Language of document : ECLI:EU:C:2012:239

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

26 avril 2012 (*)

«Manquement d’État – Réseaux et services de communications électroniques – Directives 2002/21/CE et 2002/20/CE – Droits de passage – Non-transposition dans le délai prescrit»

Dans l’affaire C‑125/09,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 2 avril 2009,

Commission européenne, représentée par MM. G. Zavvos, A. Nijenhuis et H. Krämer, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République de Chypre, représentée par M. K. Lykourgos et Mme A. Pantazi‑Lamprou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. A. Borg Barthet, faisant fonction de président de la cinquième chambre, M. J.-J. Kasel et Mme M. Berger (rapporteur), juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en ne garantissant pas l’octroi de droits de passage sur, au‑dessus ou au-dessous de propriétés publiques sur la base de procédures transparentes, appliquées sans discrimination et sans retard, la République de Chypre a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 11, paragraphe 1, de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre») (JO L 108, p. 33), et de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive «autorisation») (JO L 108, p. 21).

 Le cadre juridique

 La réglementation de l’Union

2        L’article 1er, paragraphe 1, de la directive «cadre» dispose:

«La présente directive crée un cadre harmonisé pour la réglementation des services de communications électroniques, des réseaux de communications électroniques et des ressources et services associés. Elle fixe les tâches incombant aux autorités réglementaires nationales et établit une série de procédures visant à garantir l’application harmonisée du cadre réglementaire dans l’ensemble de la Communauté.»

3        L’article 11 de ladite directive, intitulé «Droits de passage», prévoit:

«1.      Les États membres veillent à ce que, lorsque une autorité compétente examine:

–      une demande en vue de l’octroi de droits pour permettre la mise en place de ressources sur, au-dessus ou au-dessous de propriétés publiques ou privées à une entreprise autorisée à fournir des réseaux de communications publics, ou

–      une demande en vue de l’octroi de droits pour permettre la mise en place de ressources sur, au-dessus ou au-dessous de propriétés publiques à une entreprise autorisée à fournir des réseaux de communications électroniques non publics,

elle:

–      agisse sur la base de procédures transparentes et accessibles au public, appliquées sans discrimination et sans retard, et

–      respecte les principes de transparence et de non‑discrimination lorsqu’elle assortit de tels droits de certaines conditions.

Les procédures précitées peuvent être différentes selon que le demandeur est ou non un fournisseur de réseaux de communications publics.

2.      Les États membres veillent à ce que, lorsque des autorités publiques ou locales conservent la propriété ou le contrôle d’entreprises exploitant des réseaux et/ou des services de communications électroniques, il y ait une séparation structurelle effective entre la fonction responsable de l’octroi des droits visés au paragraphe 1 et les activités associées à la propriété et au contrôle.

3.      Les États membres veillent à ce qu’il existe des mécanismes efficaces permettant aux entreprises d’introduire un recours devant un organisme indépendant des parties concernées contre des décisions sur l’octroi de droits de mise en place de ressources.»

4        L’article 1er de la directive «autorisation» énonce:

«1.      La présente directive vise à mettre en place un marché intérieur des réseaux et des services de communications électroniques en harmonisant et en simplifiant les règles et les conditions d’autorisation, afin de faciliter leur fourniture dans l’ensemble de la Communauté.

2.      La présente directive s’applique aux autorisations portant sur la fourniture de réseaux et de services de communications électroniques.»

5        Aux termes de l’article 4 de ladite directive, intitulé «Liste des droits minimaux découlant de l’autorisation générale»:

«1.      Les entreprises ayant reçu l’autorisation visée à l’article 3 sont habilitées à:

a)      fournir des réseaux et des services de communications électroniques;

b)      faire examiner leur demande d’octroi des droits nécessaires pour mettre en place des ressources conformément à l’article 11 de la directive 2002/21/CE (directive ‘cadre’).

2.      Lorsque ces entreprises offrent des réseaux ou des services de communications électroniques au public, l’autorisation générale les habilite aussi à:

a)      négocier l’interconnexion avec d’autres fournisseurs de réseaux et de services de communications publics titulaires d’une autorisation générale et, s’il y a lieu, obtenir l’accès ou l’interconnexion à leurs réseaux dans n’importe quelle partie de la Communauté, conformément à la directive 2002/19/CE (directive ‘accès’) et selon les conditions qu’elle fixe;

b)      obtenir la possibilité d’être désignées pour fournir différentes composantes d’un service universel et/ou de couvrir différentes parties du territoire national, conformément à la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive ‘service universel’).»

 La réglementation nationale

6        Dans le but de transposer la directive «cadre» et la directive «autorisation», le législateur chypriote a adopté la loi N. 112 (I)/2004 sur la réglementation des communications électroniques et de services postaux réglementant la fourniture de réseaux et/ou de services de communications électroniques.

7        L’article 37, troisième alinéa, de ladite loi, dans sa version applicable en l’espèce (ci-après la «loi N. 112 (I)/2004»), prévoyait la transmission d’une notification officielle au commissaire de la réglementation des communications électroniques et des postes (ERA) par le candidat fournisseur de réseaux et/ou de services de communications électroniques.

8        Cette même disposition, combinée avec l’article 40 de la loi N. 112 (I)/2004, prévoyait l’obligation, pour le fournisseur, d’obtenir les autorisations locales nécessaires ainsi que les autres droits de mise en place de ressources sur, au‑dessus ou au-dessous de propriétés publiques ou privées en vue de fournir des réseaux de communications électroniques.

9        L’article 96 de la loi N. 112 (I)/2004 était consacré à l’obligation pour les fournisseurs de s’assurer que tous ces droits et autorisations ont été garantis par les autorités compétentes.

10      Sur la base de cette loi, le décret de 2004 sur l’autorisation des communications électroniques a été adopté.

11      En vertu de la loi N. 90/1972 sur l’urbanisme et l’aménagement du territoire, telle que modifiée, un opérateur d’un réseau radio de communications électroniques était également tenu d’obtenir, pour les stations de communication radio, un permis d’urbanisme.

12      La loi sur la réglementation de la voirie et de la construction, Chapitre 96, telle que modifiée, exigeait la délivrance d’un permis de construire par la municipalité ou le district compétent.

13      Par ailleurs, un opérateur d’un réseau radio de communications électroniques devait obtenir l’approbation du Conseil des ministres pour l’utilisation de superficies publiques ou forestières.

 Les antécédents du litige et la procédure précontentieuse

14      Au cours du mois de mai de l’année 2006, le deuxième opérateur de réseau de téléphonie mobile sur le marché chypriote, et le seul nouvel entrant sur ce marché, a soumis une plainte officielle à la Commission, au motif que les autorités chypriotes refusaient de lui octroyer des droits de passage. Il a ainsi fait valoir que ses efforts pour se conformer aux obligations découlant de sa licence et pour devenir compétitif étaient entravés, d’une part, par le caractère inadéquat du cadre législatif applicable à l’octroi de permis de construire et/ou d’urbanisme requis pour l’installation des stations de base et, d’autre part, par le traitement incorrect et discriminatoire pratiqué par les autorités compétentes pour délivrer ces permis.

15      Par lettre de mise en demeure du 21 mars 2007 adressée à la République de Chypre, la Commission a exprimé sa préoccupation à l’égard de l’application effective de l’article 11, paragraphe 1, de la directive «cadre» et de l’article 4, paragraphe 1, de la directive «autorisation» en ce qui concerne l’octroi des droits de passage sur, au‑dessus ou au‑dessous de propriétés publiques. En conséquence, la Commission a invité cet État membre à lui présenter ses observations dans un délai de deux mois.

16      Dans leur réponse, les autorités chypriotes ont rejeté les allégations de la société plaignante devant la Commission, tout en admettant que l’introduction de la concurrence dans les communications électroniques avait mis en évidence «certaines défaillances» concernant l’installation des mâts et des antennes du deuxième opérateur.

17      Ces défaillances concernaient, d’une part, l’instruction des permis de construire ou d’urbanisme demandés par cet opérateur, dans la mesure où l’impact environnemental des champs électromagnétiques des stations de base était évalué même si cela n’était pas prévu par la législation nationale, et, d’autre part, le chevauchement de compétences des différents services chargés de la délivrance de ces permis rendant les procédures de délivrance «très longues». Les autorités chypriotes soulignaient, à cet égard, que tout retard allégué frappait cependant toute demande du même type, indépendamment de l’identité du demandeur.

18      La République de Chypre précisait, en outre, que, afin de remédier auxdits problèmes, le Conseil des ministres avait approuvé, le 14 décembre 2005, le code intitulé «Politique et procédures pour l’installation et le fonctionnement de stations de communication radio avec possibilité d’émission» (ci-après le «code»), qui constituerait le cadre d’harmonisation des procédures appliquées pour l’installation d’antennes et de mâts et dont la mise en œuvre garantirait la pleine application de la directive «cadre» et de la directive «autorisation».

19      Selon cet État membre, ce code ne prévoirait plus une vérification de l’impact environnemental des champs électromagnétiques lors de contrôles en matière d’urbanisme et de construction relatifs à l’installation des mâts et des antennes. En outre, conformément au paragraphe 4 dudit code, le délai d’examen des demandes de permis de construire et d’urbanisme serait limité à six semaines au maximum et, dans le cas des permis de construire, une demande qui n’a pas été examinée dans le délai prévu de six semaines serait réputée approuvée. Enfin, l’installation des stations de téléphonie mobile d’un poids inférieur à 600 kilogrammes ou d’un diamètre inférieur à 4 mètres ne serait plus soumise à l’obligation d’obtenir un permis d’urbanisme.

20      La République de Chypre indiquait que les modifications nécessaires devaient être introduites par le projet de loi (modificative) de 2007 sur la réglementation de la voirie et de la construction, qui avait été approuvé par le Conseil des ministres le 16 mai 2007 et qui devait être déposé à la Chambre des représentants le 24 mai 2007 pour être voté en tant que loi.

21      La Commission a émis, le 1er février 2008, un avis motivé concluant que la République de Chypre n’avait pas garanti la mise en œuvre correcte de la directive «cadre» et de la directive «autorisation» et invitant cet État membre à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de la réception de celui-ci.

22      Le 28 mars, la République de Chypre a demandé une prorogation du délai de réponse à l’avis motivé de trois mois, tout en réitérant la position déjà exprimée en réponse à la lettre de mise en demeure.

23      La Commission, ayant refusé d’accorder la prorogation et estimant que la République Chypre n’avait pas répondu à l’avis motivé, a introduit le présent recours.

 Sur le recours

 Argumentation des parties

24      À l’appui de son recours, la Commission soulève deux griefs. Elle fait valoir, d’une part, que la législation chypriote en matière de permis de construire et d’urbanisme n’est pas coordonnée, entraînant des retards et une situation d’insécurité juridique pour les opérateurs de téléphonie mobile. D’autre part, elle considère que le cadre juridique régissant l’installation d’antennes et de mâts est incomplet, provoquant les mêmes effets négatifs pour ces opérateurs.

25      Dans le cadre de son premier grief, la Commission rappelle que, conformément à la législation applicable à Chypre, l’installation de mâts et d’antennes requérait, pour certaines stations de base, tant un permis de construire qu’un permis d’urbanisme délivrés par l’autorité compétente en matière d’urbanisme. Elle souligne également que, outre ce chevauchement de compétences entre les divers services chargés de délivrer lesdits permis, l’impact environnemental des champs électromagnétiques était évalué, et ce, bien que cet examen ne fût pas prévu par la législation chypriote. Il en résulterait une situation d’insécurité juridique pour les opérateurs de réseau de téléphonie mobile, et particulièrement pour les nouveaux entrants comme le deuxième opérateur en cause en l’espèce, et des retards considérables dans le traitement de leurs demandes.

26      En l’espèce, l’opérateur concerné n’a pu ni installer efficacement son propre réseau en vue de fournir des services de communications électroniques concurrençant le premier opérateur ni se conformer aux obligations résultant de sa licence obtenue le 4 décembre 2003, par adjudication, l’obligeant à garantir une certaine couverture géographique.

27      La Commission avance, afin d’étayer la branche de son grief relative au retard dans le traitement des demandes de permis, que, parmi les 29 demandes déposées, entre janvier 2005 et novembre 2007, par le deuxième opérateur de réseau de téléphonie mobile en vue de la délivrance de permis de construire, seules 3 ont été accueillies et 21 sont encore en suspens. Pour ce qui est des permis d’urbanisme, sur les 6 demandes introduites entre juin 2006 et juillet 2007, 1 aurait été rejetée et 5 seraient encore en suspens.

28      Par conséquent, en raison de l’absence des permis requis par la législation nationale, l’exploitation du réseau actuel de cet opérateur, qui doit répondre à l’exigence stricte de couverture géographique prévue par sa licence, pourrait être considérée comme contraire au droit chypriote.

29      En outre, en raison du manque de droits de passage, ledit opérateur dépendrait du service de gros d’itinérance nationale du premier opérateur pour environ 20 % de son activité globale, afin de garantir aux utilisateurs finaux une couverture géographique complète.

30      Dans le cadre de son second grief, la Commission fait valoir que, bien que le Parlement chypriote ait adopté, le 13 juin 2008, et donc tardivement, la deuxième loi (modificative) N. 32(I)/2008 sur la voirie et les constructions, le décret d’application de cette loi sur les voiries et constructions n’aurait pas encore été adopté.

31      À l’égard du premier grief, la République de Chypre, d’une part, conteste l’existence de toute inégalité de traitement entre les deux opérateurs de téléphonie mobile à Chypre, compte tenu du fait que les problèmes susmentionnés concerneraient ces deux opérateurs.

32      D’autre part, cet État membre fait valoir qu’il a pris les mesures législatives nécessaires en adoptant notamment la loi N. 32(I)/2008 du 13 juin 2008. Le ministre de l’Intérieur aurait, sur la base de cette loi, adopté le décret sur les voiries et constructions qui fixe un cadre et un délai précis pour la concertation des autorités compétentes pour l’octroi d’un permis de construire. Ce décret devrait être publié durant la vingt‑septième semaine de l’année 2009.

33      La République de Chypre fait valoir que la majorité des demandes de permis introduites par le second opérateur a été traitée et que seules neuf demandes concernant un permis de construire étaient encore pendantes. Ce fait n’empêcherait pas ledit opérateur de développer de manière satisfaisante son réseau. Cela prouverait que les dispositions de la directive «cadre» et de la directive «autorisation» auraient été mises en œuvre.

34      À l’égard du second grief, cet État membre souligne que le code est un acte politique et non un critère d’appréciation du respect de ses obligations vis‑à‑vis de l’Union européenne. Ainsi, peu importerait le moment ou le degré de mise en œuvre dudit code, l’élément déterminant en l’espèce consistant à savoir dans quelle mesure lesdites directives sont appliquées.

35      En réponse à ces arguments, la Commission, dans son mémoire en réplique, rappelle que la République de Chypre n’a pas communiqué le texte officiel du décret prétendument publié à l’Episimi Efimerida tis Kypriaki Dimokratias. En outre, cet État membre aurait, dans son mémoire en défense, reconnu que presque la moitié des demandes introduites par le second opérateur, à savoir 9 sur 21, étaient encore pendantes, ce qui prouverait que le système en cause engendrait des retards.

36      La République de Chypre rétorque, dans son mémoire en duplique, que le décret de 2009 sur les rues et constructions (procédure et durée d’examen des demandes de permis de construire pour certaines constructions) avait effectivement été publié le 30 juin 2009 à l’Episimi Efimerida tis Kypriaki Dimokratias nº 4639 et avait reçu le numéro d’ordre 257/2009 dans la numérotation des actes administratifs réglementaires. Il été remplacé par décret no 7/2009 publié le 14 août 2009 à l’Episimi Efimerida tis Kypriaki Dimokratias. Ce dernier décret ainsi que la loi N. 32(I)/2008, constituant son fondement juridique, auraient été officiellement communiqués à la Commission le 10 octobre 2009 par le bureau du coordinateur à l’harmonisation de la République de Chypre.

37      En outre, cet État membre souligne que seules quatre demandes datant des années 2007 et 2008 sont encore à traiter par les autorités compétentes, et qu’elles bénéficient d’un traitement prioritaire.

38      Enfin, la République de Chypre rappelle que l’opérateur plaignant n’avait, à aucun moment, essayé de contester, par quelque procédure nationale que ce soit, la légalité des actes ou des éventuelles omissions de l’administration dans le cadre des faits visés par sa plainte à la Commission, bien que la Constitution et législation nationale lui en eussent donné les moyens.

 Appréciation de la Cour

39      En ce qui concerne le grief soulevé par la Commission relatif à l’adoption tardive des actes législatifs permettant de pallier les défaillances constatées et, partant, de respecter les obligations posées par la directive «cadre» et la directive «autorisation», il suffit de rappeler que la Cour a itérativement jugé que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 19 juin 2008, Commission/Luxembourg, C-319/06, Rec. p. I-4323, point 72 et la jurisprudence citée; du 4 mars 2010, Commission/France, C‑241/08, Rec. p. I-1697, point 59 et la jurisprudence citée, ainsi que du 3 mars 2011, Commission/Irlande, C-50/09, non encore publié au Recueil, point 102).

40      Or, il ressort du dossier que ces actes législatifs ont été adoptés après l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé. Dès lors, ils ne peuvent être pris en considération dans le cadre de l’examen par la Cour du bien-fondé du présent recours en manquement.

41      S’agissant du grief soulevé par la Commission relatif au manque de coordination entre les différentes autorités compétentes, il ressort d’une jurisprudence constante à l’égard de la transposition d’une directive dans l’ordre juridique d’un État membre qu’il est indispensable que le droit national en cause garantisse effectivement la pleine application de la directive, que la situation juridique découlant de ce droit soit suffisamment précise et claire et que les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et, le cas échéant, de s’en prévaloir devant les juridictions nationales (arrêts du 23 mars 1995, Commission/Grèce, C-365/93, Rec. p. I-499, point 9, et du 12 juin 2003, Commission/Luxembourg, C-97/01, Rec. p. I-5797, point 32).

42      Il convient de rappeler à cet égard que la directive «cadre» et la directive «autorisation» visent à garantir, notamment par, respectivement, les articles 11, paragraphe 1, et 4, paragraphe 1, l’exercice effectif des droits de passage dans le but de libéraliser la fourniture d’infrastructures de télécommunications. Une transposition effective desdites dispositions suppose ainsi non seulement que l’autorité compétente pour l’octroi de tels droits soit clairement désignée, mais aussi que des procédures administratives transparentes soient établies pour la mise en œuvre de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 12 juin 2003, Commission/Luxembourg, précité, point 36).

43      Or, le régime d’autorisation en cause en matière de délivrance de droits de passage sur le domaine public manque de transparence.

44      D’une part, il est constant que les autorités nationales compétentes ont procédé, lors du traitement des demandes de permis de construire ou d’urbanisme, à une évaluation de l’impact environnemental des champs électromagnétiques, bien qu’une telle évaluation ne fût pas prévue par la législation nationale.

45      D’autre part, force est de constater que la République de Chypre admet des retards relatifs à l’octroi des droits de passages en ce qui concerne l’installation de mâts et d’antennes, ces retards résultant du chevauchement des compétences entre les autorités chargées de délivrer les permis de construire et d’urbanisme.

46      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que, en ne garantissant pas l’octroi de droits de passage sur, au dessus ou au-dessous de propriétés publiques sur la base de procédures transparentes, appliquées sans discrimination et sans retard, conformément aux articles 11, paragraphe 1, de la directive «cadre», et de l’article 4, paragraphe 1, de la directive «autorisation», la République de Chypre a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces directives.

 Sur les dépens

47      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République de Chypre et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) déclare et arrête:

1)      En ne garantissant pas l’octroi de droits de passage sur, au‑dessus ou au-dessous de propriétés publiques sur la base de procédures transparentes, appliquées sans discrimination et sans retard, conformément aux articles 11, paragraphe 1, de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques(directive «cadre»), et 4, paragraphe 1, de la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive «autorisation»), la République de Chypre a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de ces directives.

2)      La République de Chypre est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le grec.