Language of document : ECLI:EU:T:2014:28

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

23 janvier 2014 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale NORWEGIAN BREAKAWAY – Motifs absolus de refus – Caractère descriptif – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑514/12,

NCL Corporation Ltd, établie à Miami, Floride (États-Unis), représentée par Me N. Grüger, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Schifko, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 12 septembre 2012 (affaire R 1017/2012‑4), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal NORWEGIAN BREAKAWAY comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, O. Czúcz (rapporteur), et A. Popescu, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 novembre 2012,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 13 février 2013,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal et la réattribution de l’affaire à la neuvième chambre,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 21 septembre 2011, la requérante, NCL Corporation Ltd, a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal NORWEGIAN BREAKAWAY.

3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Organisation de croisières ; services de croisières ; organisation de voyages, excursions et croisières ».

4        Par décision du 26 mars 2012, l’examinateur a rejeté la demande de marque en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, pour les services en cause, au motif que la marque demandée était descriptive et dépourvue de caractère distinctif.

5        Le 25 mai 2012, la requérante a formé un recours, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 12 septembre 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours de la requérante, au motif que la marque demandée était descriptive et dépourvue de caractère distinctif pour les services en cause.

7        Tout d’abord, la chambre de recours a retenu que les motifs absolus de refus devaient être appréciés par rapport aux services en cause et compte tenu de la perception des consommateurs ciblés, ces derniers étant constitués, en l’espèce, du grand public.

8        Ensuite, la chambre de recours a constaté que les deux éléments verbaux de la marque demandée, à savoir « norwegian » et « breakaway », avaient pour signification respective « de ou concernant la Norvège ou sa population, sa langue ou sa culture » et « un départ ou une rupture avec la routine ou la tradition », comme un « congé » court. En ce qui concerne les services en question, tels que les croisières et les excursions, elle a considéré que la combinaison de ces éléments verbaux revêtait le sens de « congé en Norvège ». Elle en a déduit que le signe NORWEGIAN BREAKAWAY était directement descriptif et ne pouvait donc pas être enregistré.

9        Par ailleurs, la chambre de recours a retenu que, la signification de la marque demandée ainsi que son lien direct avec les services visés étant compris d’emblée au moins par les consommateurs maîtrisant l’anglais, la marque demandée n’avait pas non plus de caractère distinctif, en raison de son caractère descriptif.

10      Enfin, la chambre de recours a considéré que l’enregistrement de la marque demandée à l’extérieur de l’Union européenne ou l’enregistrement de marques contenant l’élément verbal « norwegian » par l’OHMI ne pouvaient avoir d’effet contraignant. Selon elle, il convenait d’examiner la légalité des décisions uniquement au regard de la réglementation applicable et non en fonction d’une pratique antérieure de l’OHMI en matière d’enregistrement, et encore moins en fonction de la pratique d’un office extérieur à l’Union.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et renvoyer l’affaire à la chambre de recours ;

–        à titre subsidiaire, annuler partiellement la décision attaquée, en ce qui concerne les services de la classe 39 ayant trait à l’organisation de croisières et aux services de croisières, et renvoyer l’affaire à la chambre de recours ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui du recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, premièrement, en substance, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et, deuxièmement, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

 Sur le premier moyen, tiré, en substance, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009

14      Il convient de rappeler, à titre liminaire, que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

15      Selon la jurisprudence, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 empêche que les signes ou indications visés par lui soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous [arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley , C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 31 ; arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, point 27, et du 7 juillet 2011, Cree/OHMI (TRUEWHITE), T‑208/10, non publié au Recueil, point 12].

16      En outre, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative (arrêts OHMI/Wrigley, point 15 supra, point 30, et TRUEWHITE, point 15 supra, point 13).

17      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement et sans autre réflexion une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques (voir arrêt TRUEWHITE, point 15 supra, point 14, et la jurisprudence citée).

18      Il convient également de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la perception qu’en a le public ciblé et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services visés [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II‑683, point 38 ; ELLOS, point 15 supra, point 29, et TRUEWHITE, point 15 supra, point 17].

19      Par ailleurs, il convient de retenir qu’il suffit, pour que l’OHMI oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, que, en au moins une de ses significations potentielles, le signe en cause désigne une caractéristique des produits ou des services visés (arrêt de la Cour OHMI/Wrigley, point 15 supra, point 32 ; voir également, par analogie, arrêt de la Cour du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99 P, Rec. p. I‑1619, point 97).

20      Le moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 s’articule en deux branches. En premier lieu, la requérante avance que la chambre de recours a déterminé le public ciblé de manière erronée. En second lieu, elle soutient que la conclusion de la chambre de recours selon laquelle le signe NORWEGIAN BREAKAWAY est descriptif est erronée.

 Sur la branche relative à la détermination du public pertinent

21      Au point 10 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que les services en cause étaient destinés au grand public. Ensuite, elle a retenu que, étant donné que le signe demandé était composé de mots anglais, le public pertinent était le consommateur moyen anglophone dans l’Union.

22      La requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur concernant la détermination du public ciblé. Les services tenant à l’organisation de croisières et aux services de croisières ne relèveraient pas d’une consommation courante. Ils ne s’adresseraient donc pas au consommateur moyen.

23      Partant, le public ciblé serait constitué uniquement de personnes participant à des croisières en tant que passagers ou les réservant, ainsi que de professionnels organisant ou distribuant des croisières, tels que des agents de voyage et des collaborateurs d’agences de voyage. Le niveau d’attention dont ces personnes feraient preuve lors de la perception des signes serait plus élevé. Pour les personnes souhaitant réserver des voyages, cela s’expliquerait par le prix élevé et l’importance de la qualité de l’organisateur et du voyage proposé. Les collaborateurs d’agences de voyage feraient également preuve d’un niveau d’attention plus élevé.

24      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

25      Il convient de rappeler que, comme il a été exposé au point 18 ci-dessus, l’appréciation du caractère descriptif d’un signe doit être opérée par rapport à la perception qu’en a le public ciblé. Celui-ci est constitué par le consommateur des produits ou services visés par le signe en cause (arrêt ELLOS, point 15 supra, point 29).

26      D’une part, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel le public ciblé ne consiste pas uniquement en des consommateurs, mais également en des conseillers et des distributeurs de voyages, il y a lieu de constater que la requérante ne remet pas en cause le constat de la chambre de recours selon lequel les consommateurs font partie du public ciblé. Partant, en application de la jurisprudence susmentionnée, l’appréciation du caractère descriptif du signe doit être effectuée notamment par rapport à la perception de ces derniers.

27      D’autre part, il convient de rejeter l’argument avancé par la requérante, selon lequel les consommateurs souhaitant réserver une croisière font preuve d’un niveau d’attention plus élevé en raison du prix considérable des croisières. Tout d’abord, du point de vue d’un consommateur moyen des services en cause, une croisière est un type de voyage parmi d’autres. Ensuite, il y a lieu de constater que les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé ne se limitent pas à des croisières particulièrement luxueuses. Par ailleurs, comme l’OHMI le retient à juste titre, comparé aux prix d’autres voyages, le prix moyen des croisières n’est pas tel qu’il puisse être considéré qu’un consommateur moyen fasse systématiquement preuve d’un niveau d’attention plus élevé en ce qui concerne les croisières. Enfin, il convient de retenir que, même si la requérante soutient que des croisières sont habituellement commercialisées à des prix plus élevés que d’autres types de voyages, elle n’avance pas d’éléments au soutien de cette affirmation.

28      Partant, il convient de confirmer la conclusion de la chambre de recours, selon laquelle le consommateur moyen anglophone dans l’Union faisait partie du public ciblé qui devait être pris en compte dans le cadre de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. Dès lors, la branche tirée d’une détermination erronée du public pertinent doit être rejetée.

 Sur la branche relative à la constatation du caractère descriptif du signe demandé

29      La requérante remet en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle le signe NORWEGIAN BREAKAWAY est descriptif.

30      Le premier grief que la requérante avance à l’appui de cette branche concerne les points 11 et 15 de la décision attaquée. Au point 11 de ladite décision, la chambre de recours a constaté, en substance, que l’élément verbal « norwegian » signifiait « de ou concernant la Norvège ou sa population, sa langue ou sa culture » et que, dès lors, cet élément du signe NORWEGIAN BREAKAWAY était perçu par le public ciblé comme une référence à la Norvège comme étant le pays vers lequel les croisières ou les voyages emmèneront les clients. Partant, cet élément verbal serait descriptif. Au point 15 de la décision attaquée, elle a constaté que cette appréciation n’était pas remise en cause par le fait que la requérante disposait d’une série de marques dont le premier élément était l’élément verbal « norwegian ».

31      La requérante estime que cette conclusion est erronée. Un signe ne saurait être refusé à l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 que s’il est raisonnable d’envisager qu’il puisse être effectivement reconnu par les milieux intéressés comme une description de l’une des caractéristiques des services en cause. Or, en l’espèce, l’élément verbal « norwegian » serait compris par le public concerné comme une référence à sa dénomination sociale, Norwegian Cruise Line, et à l’élément à partir duquel une série de marques dont elle ferait usage a été construite. Cet élément serait donc compris comme une indication d’origine commerciale. Dans ce contexte, la requérante fait valoir que le mot « norwegian » était connu du public pertinent depuis des décennies en tant qu’élément de sa dénomination sociale et que celui-ci constituait le premier élément d’une série de marques communautaires et américaines désignant les services en cause. Au surplus, il ressortirait des catalogues et de la page d’accueil de son site Internet qu’elle utilise, depuis des années, l’élément « norwegian » de manière isolée en tant que nom commercial. Par ailleurs, elle serait une société de premier plan en Europe pour l’organisation de croisières, ce qui serait confirmé par le nombre de récompenses qu’elle aurait obtenues ces dernières années. Partant, elle jouirait auprès du public pertinent d’une « exceptionnelle réputation et d’une forte renommée ». La chambre de recours n’aurait pas suffisamment pris en compte ces éléments dans la décision attaquée. Elle n’aurait également pas procédé à un examen d’office à cet égard, ce qui constituerait une violation de l’article 76, paragraphe 1, premier membre de phrase, du règlement n° 207/2009.

32      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

33      Il convient de retenir, tout d’abord, que, au point 11 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté à juste titre que le mot « norwegian » était un adjectif anglais indiquant un rapport avec la Norvège, sa langue ou sa culture et que ce mot était au moins connu du public maîtrisant l’anglais.

34      La requérante n’avance pas d’argument visant à remettre en cause le bien-fondé de cette considération de la chambre de recours. Elle se limite à soutenir que, dans le cadre de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, la chambre de recours aurait dû prendre en compte le fait que les milieux intéressés verraient dans l’élément verbal « norwegian » une référence à sa dénomination sociale et l’élément à partir duquel une série de marques dont elle ferait usage avait été construite.

35      Il y a lieu de constater que la requérante se limite à invoquer une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, en vertu duquel les marques composées exclusivement de signes ou d’indications descriptifs sont refusées à l’enregistrement. En revanche, elle n’invoque pas une violation de l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement, selon lequel cet article 7, paragraphe 1, sous c), n’est pas applicable lorsque la marque a acquis, pour les produits ou services pour lesquels est demandé l’enregistrement, un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait. Cette approche est conforme à celle que la requérante a adoptée au cours de la procédure devant l’OHMI, durant laquelle elle s’est limitée à avancer que les circonstances susmentionnées devaient être prises en compte dans le cadre de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et que l’article 7, paragraphe 3, de ce même règlement n’était pas applicable.

36      À cet égard, il convient de retenir que l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 vise les marques ayant un caractère descriptif et que l’utilisation même exclusive d’un signe ne confère pas à celui-ci un caractère distinctif intrinsèque. En effet, conformément à l’économie de l’article 7 du règlement n° 207/2009, l’usage d’un signe ne peut être pris en considération que dans le cadre de l’application du paragraphe 3 de cet article, afin de démontrer l’existence d’un caractère distinctif acquis [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 28 janvier 2004, Deutsche SiSi-Werke/OHMI (Sachet tenant debout), T‑146/02 à T‑153/02, Rec. p. II‑447, point 43].

37      Ensuite, force est de constater que l’interprétation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 qui est soutenue par la requérante ne serait pas conforme à l’objectif de cette disposition, qui est d’empêcher que les signes descriptifs soient réservés à une seule entreprise et de garantir que de tels signes puissent être librement utilisés par tous (voir la jurisprudence mentionnée au point 15 ci-dessus). En effet, eu égard au rapport direct et concret que l’élément verbal « norwegian » peut avoir avec les services en cause, des concurrents de la requérante peuvent légitimement vouloir utiliser le même élément verbal pour décrire la destination des voyages qu’ils proposent. Or, si la seule circonstance que la requérante dispose d’une série de marques construite à partir de l’élément verbal « norwegian » était suffisante pour remettre en cause le caractère descriptif de cet élément, cela reviendrait à lui reconnaître la possibilité de réserver l’utilisation d’éléments verbaux descriptifs par le truchement de l’enregistrement d’une série de marques contenant ledit élément.

38      Par ailleurs, la requérante ne saurait se prévaloir, dans ce contexte, du point 64 de l’arrêt de la Cour du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI (C‑234/06 P, Rec. p. I‑7333). Audit point, qui concerne l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la Cour a constaté, en substance, d’une part, qu’il ne saurait être attendu d’un consommateur, en l’absence d’usage d’un nombre suffisant de marques susceptible de constituer une série, qu’il détecte un élément commun de ladite série de marques ou qu’il associe à cette série une autre marque contenant le même élément commun et, d’autre part, que, pour qu’il existe un risque que le public se méprenne quant à l’appartenance à une série de marques de la marque dont l’enregistrement est demandé, les marques antérieures faisant partie de cette série devaient être présentes sur le marché. Partant, même si cette jurisprudence, qui concerne le risque de confusion entre deux marques au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, devait être transposée à l’application de l’article 7 de ce même règlement, force est de constater que la condition pour qu’un consommateur identifie un élément commun d’une série de marques comme une indication d’origine commerciale est l’usage de cette série de marques. Or, comme il a été exposé aux point 36 et 37 ci-dessus, un tel usage ne peut pas être pris en compte dans le cadre de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, mais uniquement dans le cadre de l’application du paragraphe 3 de cet article.

39      Dès lors, l’argument tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 doit être rejeté.

40      Il s’ensuit que l’argument tiré d’une violation de l’article 76, paragraphe 1, premier membre de phrase du règlement 207/2009 doit également être rejeté dans la mesure où il vise l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement. En effet, la circonstance que la requérante bénéficiait d’une réputation et d’une renommée n’étant pas pertinente pour l’application dudit article 7, paragraphe 1, sous c), la chambre de recours n’était pas tenue de procéder à un examen d’office des faits à l’égard de cette circonstance.

41      Partant, l’ensemble des arguments relatifs à la conclusion de la chambre de recours, selon laquelle l’élément verbal « norwegian » était descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, doit être rejeté.

42      Dès lors, le premier grief doit être rejeté dans son entièreté.

43      Le deuxième grief avancé par la requérante vise également le point 11 de la décision attaquée, dans la mesure où la chambre de recours a constaté que l’élément verbal « breakaway » était perçu par le public ciblé comme se référant à un congé et que, partant, le signe NORWEGIAN BREAKAWAY était perçu par le public pertinent comme se référant à de courtes vacances en Norvège et donc comme une indication directement et immédiatement descriptive pour les services en cause.

44      La requérante estime que cette considération est erronée. La chambre de recours n’aurait pas suffisamment démontré et motivé que, eu égard à la nature des services en cause, le terme « breakaway » était descriptif. Notamment, elle n’aurait pas démontré que le terme « breakaway » était utilisé couramment comme expression se référant à des vacances.

45      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

46      Tout d’abord, il convient de rappeler, qu’il suffit qu’un signe puisse être utilisé de manière descriptive pour qu’il relève du motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 (arrêts OHMI/Wrigley, point 15 supra, point 32, et Koninklijke KPN Nederland, point 19 supra, point 97). Il suffit donc que, au moins selon une des significations potentielles, l’élément verbal « breakaway » désigne une des caractéristiques des services concernés.

47      Ensuite, il y a lieu de confirmer la constatation de la chambre de recours selon laquelle l’élément verbal « breakaway » peut se référer à un congé. Dans ce contexte, il y a lieu de considérer que cette dernière a fondé sa conclusion sur la consultation d’un dictionnaire d’anglais. Certes, la requérante soutient que cela ne suffit pas pour démontrer que ledit élément verbal est utilisé habituellement en anglais pour faire référence à un congé. À cet égard, elle avance que cette signification ne figure pas dans d’autres dictionnaires. Toutefois, il y a lieu de constater qu’il ressort des éléments du dossier de l’OHMI que l’examinateur avait déjà avancé des éléments démontrant que, sur des pages Internet spécialisées dans le tourisme et les voyages, l’élément verbal « breakaway » était utilisé avec la signification de « petit congé ». Eu égard à ces éléments et au dictionnaire mentionné par la chambre de recours, il y a lieu de considérer qu’il est raisonnable d’envisager qu’un consommateur disposant de suffisamment de connaissance de l’anglais reconnaîtra le signe NORWEGIAN BREAKAWAY comme une expression faisant référence à de courtes vacances en Norvège.

48      Par ailleurs, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel l’élément verbal « breakaway » n’a pas de caractère descriptif pour les services en cause. Comme la chambre de recours l’a constaté à juste titre, ledit élément, qui peut raisonnablement être perçu par le public ciblé comme faisant référence à un congé, peut avoir un caractère descriptif pour les services en cause, qui concernent des croisières, des voyages et des excursions. En effet, même si l’élément verbal « breakaway » devait être perçu comme ne faisant référence qu’à un congé de courte durée, rien ne s’oppose à ce que des croisières, des voyages et des excursions soient conçus et organisés sous forme de courtes escapades.

49      Dès lors, il y a lieu de considérer qu’un consommateur moyen perçoit l’élément verbal « breakaway », accompagné d’un autre élément indiquant une localisation géographique, comme une expression faisant référence à de courtes vacances dans la région indiquée et donc comme une expression qui a une signification clairement descriptive en ce qui concerne les services en cause.

50      Partant, le deuxième grief doit être rejeté.

51      Par un troisième grief, la requérante soutient que, même si les deux éléments verbaux « norwegian » et « breakaway » devaient avoir, en eux-mêmes, une signification descriptive, cela ne vaudrait pas pour ces deux éléments considérés dans leur ensemble. L’expression « norwegian breakaway » ne serait pas une expression courante en anglais. La chambre de recours n’aurait fait aucune constatation à cet égard et n’aurait pas démontré qu’il s’agissait d’une expression habituelle. Dans ce contexte, la requérante invoque à nouveau que l’élément « norwegian » renvoie à sa dénomination sociale et à l’élément à partir duquel une série de marques a été construite.

52      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

53      Dans la mesure où, dans le cadre du présent grief, la requérante invoque à nouveau que l’élément « norwegian » renvoie à sa dénomination sociale et à l’élément à partir duquel une série de marques a été construite, il convient de rejeter cet argument en renvoyant aux points 34 à 41 ci-dessus.

54      Ensuite, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel l’ensemble du signe NORWEGIAN BREAKAWAY n’est pas descriptif, il convient de retenir que, pour constater qu’un signe est descriptif dans son intégralité, il ne suffit pas de constater que les éléments dont il est constitué sont descriptifs. En effet, un tel caractère doit être établi pour le signe dans son ensemble (arrêt de la Cour du 19 avril 2007, OHMI/Celltech, C‑273/05 P, Rec. p. I‑2883, points 78 à 80 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI, C‑329/02 P, Rec. p. I‑8317, point 35). Toutefois, en ce qui concerne le signe Norwegian BREAKaway, eu égard aux considérations qui précèdent, il semble raisonnable qu’un consommateur moyen des services en cause considère, directement et sans autre réflexion, qu’il décrit un congé en Norvège. Partant, il s’agit d’un signe qui relève du motif absolu de refus d’enregistrement prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

55      Dès lors, il convient également de rejeter le troisième grief.

56      Par un quatrième grief, la requérante invoque que, puisqu’une marque peut être enregistrée si le public pertinent la perçoit simultanément, voire en premier lieu, comme une formule promotionnelle et comme une indication de l’origine commerciale de produits et de services, il en serait de même si le public pertinent considérait la marque demandée comme descriptive et la percevrait en même temps comme une indication de l’origine commerciale renvoyant à elle.

57      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

58      À cet égard, il convient de constater que, aux points 32 à 36 de l’arrêt de la Cour du 12 juillet 2012, Smart Technologies/OHMI (C‑311/11 P, non encore publié au Recueil), que la requérante invoque à l’appui de son grief, la Cour a constaté, en substance, que, lorsqu’une marque a un caractère distinctif, le seul fait qu’elle soit simultanément, voire en premier lieu, appréhendée comme une formule promotionnelle ne remet pas en cause son caractère distinctif. Cependant, il ne ressort pas de cet arrêt que le seul fait qu’il s’agisse d’une formule promotionnelle lui confère un caractère distinctif.

59      Partant, contrairement à ce qu’avance la requérante, il ne saurait être déduit de cet arrêt que les seules circonstances que sa dénomination sociale est « Norwegian Cruise Line » et que l’élément à partir duquel une série de marques dont elle dispose a été construite est l’élément verbal « norwegian » soient susceptibles de remettre en cause le constat selon lequel l’élément verbal « norwegian » a un caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

60      Le quatrième grief doit donc également être rejeté.

61      Enfin, dans le cadre d’un cinquième grief, la requérante avance, d’une part, que la désignation Norwegian BREAKAWAY a déjà été admise et publiée en tant que marque en sa faveur aux États-Unis et au Brésil pour les services en cause et, d’autre part, qu’elle a été enregistrée en tant que marque au Mexique.

62      L’OHMI conteste les arguments de la requérante et attire notamment l’attention sur le fait que la marque n’a pas encore été enregistrée aux États-Unis et que le Brésil et le Mexique ne sont pas des pays anglophones.

63      À cet égard, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire doit être apprécié sur le fondement de la réglementation de l’Union applicable [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 47 ; du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 37, et du 14 septembre 2009, Lange Uhren/OHMI (Champs géométriques sur le cadran d’une montre), T‑152/07, non publié au Recueil, point 108]. Dès lors, en tout état de cause, ni l’OHMI ni le Tribunal ne pourraient être liés par une décision intervenue dans un pays tiers.

64      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le premier moyen dans son intégralité.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

65      La requérante avance que la chambre de recours a commis une erreur en constatant que l’enregistrement de la marque demandée devait être refusé en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, au motif d’un défaut de caractère distinctif de cette marque.

66      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

67      Le moyen doit être rejeté. En effet, il ressort très clairement du libellé de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 qu’il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés à cette disposition s’applique pour que le signe en cause ne puisse pas être enregistré comme marque communautaire [arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29, et arrêt du Tribunal du 21 novembre 2013, Heede/OHMI (Matrix-Energetics), T‑313/11, non encore publié au Recueil, point 68]. Dès lors, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur le bien-fondé du second moyen soulevé par la requérante, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

68      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le recours doit donc être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

69      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      NCL Corporation Ltd supportera ses propres dépens ainsi que les dépens de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

Berardis

Czúcz

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 janvier 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.