Language of document : ECLI:EU:T:2014:439

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

11 juin 2014 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la Syrie – Gel des fonds – Erreur manifeste d’appréciation – Charge de la preuve – Demande en indemnité »

Dans l’affaire T‑293/12,

Syria International Islamic Bank PJSC, établie à Damas (Syrie), représentée par Mes G. Laguesse et J.-P. Buyle, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. B. Driessen et Mme D. Gicheva, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande d’annulation du règlement d’exécution (UE) n° 544/2012 du Conseil, du 25 juin 2012, mettant en œuvre l’article 32, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO  L 165, p. 20, rectificatif JO 2012, L 173, p. 27), et de la décision d’exécution 2012/335/PESC du Conseil, du 25 juin 2012, mettant en œuvre la décision 2011/782/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 165, p. 80), en ce qu’ils concernent la requérante, et, d’autre part, une demande en indemnité,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. G. Berardis (rapporteur), président, O. Czúcz et A. Popescu, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 janvier 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, la Syria International Islamic Bank PJSC, est une banque syrienne, dont le capital est détenu par des actionnaires qatariens, à concurrence de 48,7 %, avec notamment une participation de 30 % d’une banque qatarienne, et par des actionnaires syriens, à concurrence de 51,3 %, avec un actionnariat dispersé.

2        Le 9 mai 2011, le Conseil de l’Union européenne a adopté, sur le fondement de l’article 29 TUE, la décision 2011/273/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 121, p. 11). Son article 4, paragraphe 1, dispose que tous les fonds et ressources économiques qui appartiennent à des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie et aux personnes, physiques ou morales, et entités qui leur sont liées de même que tous les fonds et ressources qu’elles possèdent, détiennent ou contrôlent, sont gelés. Les modalités de ce gel sont définies aux autres paragraphes du même article. Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, de la décision 2011/273, le Conseil établit la liste de ces personnes.

3        De même, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 215, paragraphe 2, TFUE et de la décision 2011/273, le règlement (UE) n° 442/2011, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO L 121, p. 1). L’article 4, paragraphe 1, de celui-ci prévoit le gel de tous les fonds et ressources économiques appartenant aux personnes physiques ou morales, entités et organismes énumérés à l’annexe II dudit règlement, ou possédés, détenus ou contrôlés par ceux-ci.

4        La décision 2011/273 a été remplacée par la décision 2011/782/PESC du Conseil, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO L 319 p. 56).

5        Le règlement n° 442/2011 a été remplacé par le règlement (UE) n° 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement n° 442/2011 (JO L 16, p. 1).

6        Par lettre du 8 juin 2012, la requérante a demandé au Conseil de lui concéder une audition au sujet de rumeurs concernant la probable inscription de son nom dans les listes des personnes et entités visées par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie.

7        Le même jour, le Conseil a rejeté cette demande, motif pris de l’exigence de respecter son processus décisionnel et la confidentialité des procédures.

8        Par lettre du 15 juin 2012, la requérante a fait part au Conseil de la connaissance qu’elle avait acquise de l’imminente inscription de son nom dans les listes en cause, à la suite de la décision similaire prise le 30 mai 2012 par l’Office of Foreign Assets Control (OFAC, Bureau de contrôle des actifs étrangers) de l’United States Department of the Treasury (département du Trésor des États-Unis d’Amérique). À cette occasion, la requérante a produit des documents qui étaient censés prouver l’absence de fondement de cette inscription et a sollicité que le Conseil lui communique les éléments de preuve sur lesquels il se fonderait.

9        Par lettre du 24 juin 2012, la requérante a réitéré sa demande tendant à ce que le Conseil l’entende avant de prendre toute mesure à son égard.

10      Le Conseil n’a pas répondu à ces deux lettres.

11      Par la décision d’exécution 2012/335/PESC du Conseil, du 25 juin 2012, mettant en œuvre la décision 2011/782 (JO L 165, p. 80), le nom de la requérante a été inséré dans la liste figurant à l’annexe I de ladite décision, avec la motivation suivante :

« La [requérante] a fait office de société-écran pour le compte de la Commercial Bank of Syria, ce qui a permis à cette dernière de contourner les sanctions que l’UE lui a imposées. De 2011 à 2012, la [requérante] a, de manière clandestine, facilité des financements d’un montant de près de 150 [000 000 dollars des États-Unis (USD)] pour le compte de la Commercial Bank of Syria. Les accords financiers qui étaient censés être conclus par la [requérante] l’étaient en réalité par la Commercial Bank of Syria.

En plus de collaborer avec la Commercial Bank of Syria pour contourner les sanctions, en 2012, la [requérante] a facilité plusieurs versements conséquents pour le compte de la Syrian Lebanese Commercial Bank, une autre banque déjà désignée par l’UE.

En agissant de la sorte, la [requérante] a contribué à soutenir financièrement le régime syrien. »

12      Par le règlement d’exécution (UE) n° 544/2012 du Conseil, du 25 juin 2012, mettant en œuvre l’article 32, paragraphe 1, du règlement n° 36/2012 (JO  L 165, p. 20, rectificatif JO 2012, L 173, p. 27), le nom de la requérante a été inséré dans la liste figurant à l’annexe II dudit règlement, avec la même motivation que celle de la décision d’exécution 2012/335, reproduite au point 11 ci-dessus.

13      Le 28 juin 2012, la requérante a adressé au Conseil une demande visant à recevoir une copie des pièces du dossier la concernant et à obtenir un réexamen de sa situation à la lumière des documents qu’elle avait produits.

 Procédure et conclusions des parties

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 juillet 2012, la requérante a introduit le présent recours, tendant notamment à l’annulation du règlement d’exécution n° 544/2012 et de la décision d’exécution 2012/335 (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués »), en ce qu’ils la concernent. Ce recours était accompagné d’une demande de procédure accélérée, sur le fondement de l’article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal.

15      Le Conseil a déposé ses observations sur la demande de procédure accélérée le 16 juillet 2012, dans lesquelles il a exprimé ses doutes quant à l’opportunité de faire droit à cette demande.

16      Par décision du 6 août 2012, le Tribunal (sixième chambre) a rejeté la demande de procédure accélérée.

17      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté, en qualité de président, à la neuvième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

18      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (neuvième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, a posé des questions écrites aux parties, lesquelles y ont répondu dans le délai imparti.

19      En particulier, ayant constaté que la décision 2011/782, telle que modifiée par la décision d’exécution 2012/335, avait été abrogée, après l’introduction du présent recours, par la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 330, p. 21), le Tribunal a interrogé la requérante sur son intérêt à agir contre ladite décision d’exécution.

20      À cet égard, la requérante a soutenu que, en dépit de l’abrogation de la décision 2011/782, elle conservait un intérêt à agir contre la décision d’exécution 2012/335. À titre subsidiaire, elle a demandé de pouvoir adapter ses conclusions afin que son recours vise également l’annulation de la décision 2012/739 (ci-après la « demande concernant la décision 2012/739 »).

21      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 23 janvier 2014.

22      À cette occasion, premièrement, la requérante a demandé à pouvoir déposer un rapport, daté du 1er décembre 2013, concernant le préjudice invoqué dans le cadre de son recours en indemnité (ci-après le « rapport du 1er décembre 2013 »). Le Tribunal a accepté de verser au dossier ce rapport, tout en réservant la décision sur sa recevabilité.

23      Deuxièmement, en réponse à une question du Tribunal, le Conseil a produit des documents relatifs à la notification à la requérante de la décision 2012/739.

24      Troisièmement, le Conseil a été invité à déposer des documents relatifs à la notification à la requérante de la décision 2013/255/PESC du Conseil, du 31 mai 2013, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 147, p. 14).

25      Quatrièmement, le Tribunal a décidé que chaque partie pourrait déposer des observations écrites sur les documents produits par l’autre partie.

26      Le Conseil a déposé au greffe du Tribunal, le 24 janvier 2014, les documents mentionnés au point 24 ci-dessus ainsi que, le 3 février 2014, ses observations sur le rapport du 1er décembre 2013.

27      Par lettre datée du 25 février 2014, mais déposée au greffe du Tribunal le 4 mars 2014, la requérante a présenté ses observations sur les documents produits par le Conseil concernant la notification de la décision 2012/739 et de la décision 2013/255 (voir points 23 et 24 ci-dessus). Par décision du président de la neuvième chambre du Tribunal du 10 mars 2013, cette lettre a été versée au dossier, en dépit du fait qu’elle a été reçue après l’expiration du délai imparti à la requérante à cette fin.

28      Dans sa lettre reçue le 4 mars 2014, la requérante, en faisant référence à la demande concernant la décision 2012/739, a également demandé de pouvoir adapter ses conclusions afin que son recours vise également l’annulation de la décision 2013/255 (ci-après la « demande concernant la décision 2013/255 »).

29      Le 17 mars 2014, le Conseil a déposé ses observations sur la demande concernant la décision 2013/255.

30      La procédure orale a été clôturée par décision du président de la neuvième chambre du Tribunal du 19 mars 2014.

31      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes attaqués, en ce qu’ils la concernent ;

–        condamner le Conseil à lui verser un montant provisionnel de 10 000 000 d’euros à titre d’indemnités, sous réserve d’augmentation ou de diminution ultérieure de ce montant ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

32      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la demande d’annulation des actes attaqués

 Sur l’intérêt à agir de la requérante en ce qui concerne la décision d’exécution 2012/335

33      En réponse à une question du Tribunal (voir points 19 et 20 ci-dessus), la requérante a soutenu que, en dépit de l’abrogation de la décision 2011/782, elle conservait un intérêt à agir contre la décision d’exécution 2012/335. Selon elle, en substance, l’annulation de ladite décision d’exécution est susceptible d’avoir des conséquences juridiques sur sa situation, dès lors que, d’une part, elle a demandé la réparation du préjudice matériel et moral que l’inscription de son nom sur les listes des personnes et entités visées par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie lui a occasionné et, d’autre part, cette annulation produirait des effets ex tunc, qui dépasseraient ainsi ceux découlant de l’abrogation de la décision 2011/782 et imposerait au Conseil, en vertu de l’article 266 TFUE, de retirer son nom des listes annexées aux actes ayant remplacé la décision 2011/782.

34      Lors de l’audience, le Conseil a contesté que la requérante disposât encore d’un intérêt à agir contre la décision d’exécution 2012/335.

35      À cet égard, en premier lieu, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’objet du litige doit perdurer, tout comme l’intérêt à agir, jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle sous peine de non-lieu à statuer, ce qui suppose que le recours ou, le cas échéant, le pourvoi soit susceptible de procurer un bénéfice à la partie qu’il l’a intenté (arrêts de la Cour du 17 avril 2008, Flaherty e.a./Commission, C‑373/06 P, C‑379/06 P et C‑382/06 P, Rec. p. I‑2649, point 25, et du 27 juin 2013, Xeda International et Pace International/Commission, C‑149/12 P, non publié au Recueil, point 31 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 28 mai 2013, Abdulrahim/Conseil et Commission C‑239/12 P, non encore publié au Recueil, point 61).

36      En second lieu, il doit être observé que l’abrogation, par la décision 2012/739, de la décision 2011/782, telle que modifiée par la décision d’exécution 2012/335, ne saurait équivaloir à l’annulation éventuelle par le Tribunal de cette décision d’exécution, en ce que ladite abrogation n’est pas une reconnaissance de l’illégalité des actes en cause. En outre, l’abrogation de la décision 2011/782 a produit un effet ex nunc, alors qu’une annulation éventuelle de la décision d’exécution 2012/335 produirait un effet ex tunc, à savoir celui de rendre nulle et non avenue l’inscription du nom de la requérante sur les listes annexées à la décision 2011/782 (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 13 décembre 1995, Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, T‑481/93 et T‑484/93, Rec. p. II‑2941, point 46).

37      De plus, il y a lieu de relever que, dans l’hypothèse où un acte est annulé, l’institution dont celui-ci émane est tenue, en vertu de l’article 266 TFUE, de prendre les mesures qu’implique l’exécution de l’arrêt d’annulation. Ces mesures ont trait, notamment, à l’anéantissement des effets des illégalités constatées dans ledit arrêt. C’est ainsi que l’institution concernée peut être amenée à effectuer une remise en état adéquate de la situation du requérant ou à éviter qu’un acte identique ne soit adopté (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Exporteurs in Levende Varkens e.a./Commission, précité, point 47).

38      En l’espèce, il convient de tenir compte du fait que le Conseil, par la décision 2012/739 et par la décision 2013/255, a maintenu le nom de la requérante sur les listes des personnes et entités visées par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie, et ce exactement pour les mêmes motifs que ceux retenus à l’égard de celle-ci dans la décision 2011/782, telle que modifiée par la décision d’exécution 2012/335.

39      À cet égard, il est certes vrai que l’éventuelle annulation de la décision d’exécution 2012/335 n’entraînerait pas automatiquement la disparition du nom de la requérante des listes annexées à la décision 2012/739 et à la décision 2013/255. En effet, à la suite de cette éventuelle annulation, l’adoption d’une mesure par le Conseil, conformément à l’article 266 TFUE, serait nécessaire pour effacer, avec effet ex nunc, le nom de la requérante des listes annexées à la décision actuellement en vigueur, à savoir la décision 2013/255.

40      Cependant, ces circonstances ne permettent pas de considérer que l’intérêt de la requérante à agir contre la décision d’exécution 2012/335 a disparu (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 25 avril 2013, Gossio/Conseil, T‑130/11, non publié au Recueil, point 34).

41      En effet, au vu des considérations exposées aux points 36 et 38 ci-dessus, le fait que l’annulation en cause aura des effets dépassant ceux de l’abrogation de la décision 2011/782 et engendrera pour le Conseil l’obligation résultant de l’article 266 TFUE suffit pour constater que la requérante dispose encore d’un intérêt à agir non seulement contre le règlement d’exécution n° 544/2012, mais également contre la décision d’exécution 2012/335, et ce sans qu’il faille examiner les autres arguments de la requérante mentionnés au point 33 ci-dessus.

42      Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la demande concernant la décision 2012/739, introduite à titre subsidiaire (voir point 20 ci-dessus), ni sur la demande concernant la décision 2013/255, qui doit également être considérée comme ayant été présentée à titre subsidiaire, dans la mesure où elle se greffe sur la demande précédente (voir point 28 ci-dessus).

 Sur le fond

–       Observations liminaires

43      À l’appui de sa demande en annulation, la requérante invoque, en substance, six moyens, tirés, le premier, de la violation des droits de la défense et du droit au procès équitable, le deuxième, de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation des faits, le troisième, de la violation du principe de proportionnalité, du droit de propriété et du droit d’exercer une activité professionnelle, le quatrième, de l’illégalité des actes attaqués au motif qu’elle n’aurait agi ni sciemment ni volontairement, le cinquième, du détournement de pouvoir et, le sixième, de la violation de l’obligation de motivation.

44      Il convient d’examiner d’abord le deuxième moyen.

–       Sur le deuxième moyen, tiré de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation des faits

45      La requérante fait valoir que le Conseil n’a pas apporté la preuve du fait qu’elle aurait fait office de société-écran pour le compte de la Commercial Bank of Syria (ci-après la « CBS ») et de la Syrian Lebanese Commercial Bank (ci-après la « SLCB »). Elle précise que c’est au Conseil qu’il revient de prouver que l’adoption de mesures restrictives à son égard était justifiée et non à elle de prouver le contraire.

46      En tout état de cause, la requérante met en avant le fait que toutes les transactions financières qu’elle effectue sont soumises à un système de contrôle, qui permet de vérifier quelles sont les personnes impliquées dans ces transactions et de détecter si celles-ci sont visées par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie. Il ressortirait de ce système qu’elle n’a pas accompli de transactions suspectes. En outre, la requérante disposerait de règles internes, conformes aux standards internationaux, assurant le respect desdites mesures.

47      La requérante admet avoir effectué des transactions pour le compte de clients de la CBS et de la SLCB, mais fait remarquer que ces clients ne sont pas visés par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et que ces transactions ont été effectuées seulement une fois que les montants concernés avaient intégralement été transférés des comptes dont les clients en cause disposaient auprès desdites banques vers les comptes qu’ils détiennent auprès d’elle. La CBS et la SLCB ne tireraient ainsi aucun bénéfice de ces transactions, mais en subiraient un dommage réel, dès lors qu’elles seraient privées des montants en cause.

48      Le Conseil fait observer que l’efficacité des mesures qu’il a prises à l’encontre de la CBS et de la SLCB serait compromise si les clients de ces banques pouvaient bénéficier, par le biais de la requérante, de services que ces dernières ne peuvent plus leur offrir. Lesdites mesures viseraient non seulement à limiter les fonds à la disposition du régime syrien, mais également à rendre plus difficile l’accès aux services bancaires pour les personnes et entités liées à ce régime.

49      En ce qui concerne le système de contrôle dont dispose la requérante, le Conseil fait remarquer que celui-ci ne permet pas d’établir la provenance exacte de l’argent, si bien qu’il pourrait s’agir de fonds appartenant à des prête-noms de la CBS.

50      Enfin, selon le Conseil, au vu notamment du large pouvoir d’appréciation dont il dispose en matière de sanctions économiques et financières, il lui était loisible d’inclure la requérante dans la liste des personnes et entités visées par les mesures restrictives en cause, au motif qu’elle facilitait les activités de la CBS et de la SLCB, bien qu’elle ne traitât pas directement avec ces dernières.

51      Il convient de rappeler que, selon l’article 19, paragraphe 1, de la décision 2011/782 :

« Sont gelés tous les fonds et ressources économiques appartenant à des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie, à des personnes et entités bénéficiant des politiques menées par le régime ou soutenant celui-ci et à des personnes et entités qui leur sont liées, dont les listes figurent aux annexes I et II, de même que tous les fonds et ressources économiques qu’elles possèdent, détiennent ou contrôlent. »

52      L’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 36/2012 renvoie à l’article 19, paragraphe 1, de la décision 2011/782 en ce qui concerne les critères retenus pour composer les listes des personnes et entités visées par les mesures restrictives prévues dans ce règlement.

53      Ainsi, il y a lieu de répondre à la question de savoir si le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation des faits en considérant que la requérante contribuait au soutien du régime syrien.

54      À titre liminaire, il convient de préciser quelle est l’intensité du contrôle que le Tribunal effectue à l’égard des actes portant adoption de mesures de sanctions économiques et financières au titre de la politique extérieure et de sécurité commune (PESC).

55      Selon la jurisprudence, en ce qui concerne les règles générales définissant les modalités des mesures restrictives, le Conseil dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant aux éléments à prendre en considération en vue de l’adoption de mesures de sanctions économiques et financières sur la base de l’article 215 TFUE, conformément à une décision adoptée en vertu du chapitre 2 du titre V du traité UE, en particulier de l’article 29 TUE. Le juge de l’Union ne pouvant substituer son appréciation des preuves, faits et circonstances justifiant l’adoption de telles mesures à celle du Conseil, le contrôle exercé par ledit juge doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits, ainsi que de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation des faits et de détournement de pouvoir. Ce contrôle restreint s’applique, en particulier, à l’appréciation des considérations d’opportunité sur lesquelles de telles mesures sont fondées (arrêts du Tribunal du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, Rec. p. II‑3967, point 36, et Gossio/Conseil, précité, point 57).

56      Quant au contrôle de la légalité de la décision d’inscrire le nom d’une personne ou d’une entité sur les listes annexées aux actes comportant l’adoption de mesures restrictives, le juge de l’Union doit s’assurer que cette décision, qui revêt une portée individuelle pour cette personne, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend cette décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur le point de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même inscription, sont étayés. En cas de contestation, il appartient au Conseil d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne concernée et non à cette dernière d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal Bank Melli Iran/Conseil, précité, point 37, et du 5 décembre 2012, Qualitest/Conseil, T‑421/11, non publié au Recueil, point 55 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, non encore publié au Recueil, points 119 et 121).

57      Par ailleurs, la question de la preuve du comportement allégué, laquelle relève de la légalité au fond de l’acte en cause, implique de vérifier la réalité des faits mentionnés dans cet acte ainsi que la qualification de ces faits de constituant des éléments justifiant l’application de mesures restrictives à l’encontre de la personne concernée (arrêt de la Cour du 15 novembre 2012, Conseil/Bamba, C‑417/11 P, non encore publié au Recueil, point 60).

58      En l’espèce, il est constant entre les parties que la requérante a été visée par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie au motif qu’elle aurait facilité des financements pour le compte de la CBS et de la SLCB en effectuant des transactions financières pour des personnes physiques ou morales qui, sans être elles-mêmes inscrites dans les listes des personnes et entités frappées par ces mesures, disposaient de comptes bancaires auprès de ces deux banques, lesquelles figurent sur lesdites listes.

59      Il est certes vrai que la requérante ne peut pas contrôler, lorsqu’elle effectue une transaction financière, quelle est l’origine exacte de l’argent faisant l’objet de cette transaction. Ainsi, il n’est pas exclu que, lorsqu’une personne ou une entité non inscrite dans les listes des personnes et entités visées par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie dépose de l’argent auprès de la requérante, cet argent provienne, en dernier ressort, du régime syrien ou de personnes physiques ou morales visées par les mesures restrictives en cause. Cependant, ce risque n’est en principe pas plus important lorsque la requérante effectue des transactions pour des clients qui disposent également d’un compte auprès de la CBS ou de la SLCB que lorsqu’elle le fait pour d’autres clients. En tout état de cause, le Conseil n’a pas fourni le moindre élément de preuve permettant de considérer que ce risque était particulièrement élevé lorsqu’il s’agissait d’effectuer des transactions pour les titulaires de comptes auprès de ces deux banques.

60      À cet égard, il y a lieu de relever que, lors de l’inscription de la CBS et de la SLCB dans les listes des personnes et entités visées par les mesures restrictives, le Conseil s’est appuyé sur le fait que la première était une banque appartenant à l’État syrien et que la seconde était une filiale de celle-ci et non sur des éléments concernant les clients de ces banques.

61      Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que, afin d’éviter d’être frappé par des mesures restrictives, un établissement financier, tel que la requérante, lorsqu’il sait ou peut raisonnablement suspecter que l’un de ses clients est impliqué dans les activités ayant justifié l’adoption par le Conseil de ces mesures, en l’occurrence la répression violente exercée contre la population civile en Syrie, doit cesser la fourniture de services financiers à ce client sans délai, compte tenu des obligations légales applicables, et ne lui fournir aucun nouveau service (arrêts du Tribunal du 6 septembre 2013, Bank Melli Iran/Conseil, T‑35/10 et T‑7/11, non encore publié au Recueil, points 134 à 137, et du 16 septembre 2013, Bank Kargoshaei e.a./Conseil, T‑8/11, non publié au Recueil, points 127 et 128). Or, en l’espèce, le Conseil n’a présenté aucun élément permettant de considérer que les clients de la requérante à l’origine des transactions censées justifier son inscription sont impliqués dans lesdites activités. Du reste, le Conseil n’a pas soutenu que les noms de ces clients, qu’il n’a même pas identifiés, figuraient sur les listes des personnes et entités visées par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie. Dès lors, le fait que la requérante a effectué des transactions financières pour des personnes qui disposent également de comptes auprès de la CBS ou de la SLCB ne saurait être considéré comme suffisant pour justifier son inscription.

62      Enfin, il convient de relever que le Conseil, au cours de la procédure devant le Tribunal, n’a pas fourni d’éléments complémentaires au regard desquels il aurait été possible de vérifier l’exactitude matérielle des faits allégués dans la motivation des actes attaqués concernant la requérante (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Commission e.a./Kadi, précité, point 124).

63      En effet, d’une part, le Conseil a mentionné le fait que, à la suite de l’adoption par l’OFAC de mesures restrictives à l’égard de la requérante, le représentant de son principal actionnaire qatarien (voir point 1 ci-dessus) a publiquement condamné les activités de celle-ci et les membres qatariens de son conseil d’administration ont présenté leurs démissions. Cependant, cette condamnation et ces démissions ne constituent pas des preuves suffisantes pour établir, à l’aune des critères rappelés aux points 56 et 57 ci-dessus, le bien-fondé des motifs retenus par le Conseil dans les actes attaqués en ce qui concerne la requérante. Il en est d’autant plus ainsi qu’il ne ressort aucunement du dossier que les actionnaires en cause aient vendu leurs participations dans le capital de la requérante.

64      D’autre part, en réponse à une question écrite du Tribunal l’invitant à produire toutes les informations et tous les éléments de preuve sur lesquels il s’était appuyé pour justifier l’inscription de la requérante, le Conseil s’est borné à déposer un extrait de la proposition relative à ladite inscription, émanant d’un État membre. Or, le contenu de cette proposition coïncide tout simplement avec celui de la motivation des actes attaqués en ce qui concerne la requérante, telle que reprise au point 11 ci-dessus. Dès lors, cet extrait n’apporte aucun élément complémentaire utile aux fins de la vérification visée au point 62 ci-dessus.

65      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que la requérante est fondée à soutenir que, en l’incluant dans la liste des personnes et entités visées par les mesures restrictives à l’encontre de la Syrie, le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation des faits, si bien que le deuxième moyen doit être accueilli.

66      Dans ces circonstances, il convient d’annuler les actes attaqués, en ce qu’ils concernent la requérante, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens avancés par celle-ci.

 Sur la demande en indemnité

67      La requérante demande la condamnation du Conseil à lui verser un montant de 10 000 000 euros, susceptible d’être revu à la hausse ou à la baisse, en raison de plusieurs préjudices, matériels et moraux, que les actes attaqués lui auraient occasionnés ou pourraient lui occasionner. En tant que liste non exhaustive de ces préjudices, en substance, la requérante fait valoir : la perte de nombreux épargnants en raison de la perte de confiance que les sanctions entraînent ; une baisse substantielle de sa position concurrentielle sur le marché ; une perte sèche dans la mesure où les opérations de crédit représentent plus de 50 % de ses bénéfices ; le manque à gagner découlant de la disparition des sources de financement par des tiers ; un risque de problème de solvabilité ; un dommage psychologique à ses 570 employés ainsi qu’à leurs familles ; un dommage pour ses actionnaires, parmi lesquels 13 000 sont syriens ; une dégradation de sa note par les agences de notation ; le coût de la conversion de toutes les opérations habituellement exécutées en euros dans des devises autres ; l’annulation de nombreux contrats de crédit et les pertes correspondantes ; le refus de la part de compagnies de transport de livrer de nombreux biens dans le cadre d’opérations financées par elle, alors que ces biens sont sans lien avec les interdictions existantes ; l’impossibilité d’honorer de nombreuses factures.

68      En outre, la requérante affirme que le lien causal entre le comportement du Conseil et les préjudices qu’elle invoque est certain, en dépit du fait qu’elle est visée également par les mesures restrictives adoptées par l’OFAC. Lors de l’audience, elle a produit le rapport du 1er décembre 2013, afin d’établir l’importance de ces préjudices ainsi que l’existence dudit lien de causalité (voir point 22 ci-dessus).

69      Dans ses écritures devant le Tribunal, le Conseil a fait valoir que la présente demande en indemnité était irrecevable au motif que la requérante n’avait pas précisé quel était le lien de causalité entre le comportement reproché à cette institution et les prétendus dommages subis par elle.

70      Par ailleurs, lors de l’audience, le Conseil a fait remarquer que le Tribunal pourrait examiner d’office la question de savoir s’il était compétent pour connaître d’une demande en indemnité dans le domaine de la PESC.

71      Dans ses observations sur le rapport du 1er décembre 2013, le Conseil a excipé de l’irrecevabilité de ce dernier, dans la mesure où il n’a été produit que lors de l’audience.

72      En ce qui concerne la recevabilité de la demande en indemnité de la requérante, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, conformément à l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, toute requête doit contenir l’indication de l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels se fonde celui-ci ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (arrêt du Tribunal du 3 février 2005, Chiquita Brands e.a./Commission, T‑19/01, Rec. p. II‑315, point 64).

73      Pour satisfaire à ces exigences, une requête visant à la réparation de dommages prétendument causés par une institution de l’Union doit contenir les éléments qui permettent d’identifier le comportement que le requérant reproche à l’institution, les raisons pour lesquelles il estime qu’un lien de causalité existe entre le comportement et le préjudice qu’il prétend avoir subi, ainsi que le caractère et l’étendue de ce préjudice (arrêt Chiquita Brands e.a./Commission, précité, point 65).

74      En revanche, une demande tendant à obtenir une indemnité quelconque manque de la précision nécessaire et doit, par conséquent, être considérée comme irrecevable (arrêt Chiquita Brands e.a./Commission, précité, point 66).

75      Dans la présente affaire, d’une part, il y a lieu de constater que la requérante, dans la requête, n’a pas produit le moindre élément permettant d’établir la réalité du préjudice qu’elle prétend avoir subi, ne serait-ce que pour la partie de ce préjudice qui se serait réalisée jusqu’au moment de l’introduction du recours. D’autre part, il doit être relevé que la requérante reste en défaut de fournir tout élément permettant d’établir que le préjudice qu’elle invoque est la conséquence des mesures restrictives contenues dans les actes dont elle a demandé l’annulation. En effet, comme le fait remarquer à bon droit le Conseil, les pertes subies par la requérante, à les supposer avérées, pourraient découler des mesures restrictives adoptées par d’autres autorités que celles de l’Union, notamment par l’OFAC, ainsi que de la dégradation de la situation économique en Syrie au vu du conflit en cours et, plus généralement, de la crise financière internationale.

76      Ensuite, il convient de rappeler que, selon l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure, les parties peuvent encore faire des offres de preuve à l’appui de leur argumentation dans la réplique et la duplique, cette disposition précisant toutefois qu’elles doivent motiver le retard apporté à la présentation de leurs offres de preuve.

77      Toutefois, la réplique ne contient pas d’éléments susceptibles de pallier les déficiences de la requête mises en avant au point 75 ci-dessus.

78      En ce qui concerne le rapport du 1er décembre 2013, la décision sur sa recevabilité ayant été réservée (voir point 22 ci-dessus), il y a lieu d’observer que, selon la jurisprudence, le dépôt des offres de preuve postérieurement à la duplique reste possible dans le cas où l’auteur de l’offre ne pouvait, avant la clôture de la procédure écrite, disposer des preuves en question ou si les productions tardives de son adversaire justifient que le dossier soit complété de façon à assurer le respect du principe du contradictoire (arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Agrar-Invest-Tatschl/Commission, T‑51/07, Rec. p. II‑2825, point 57 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 avril 2005, Gaki-Kakouri/Cour de justice, C‑243/04 P, non publié au Recueil, point 32).

79      S’agissant d’une exception aux règles régissant le dépôt des offres de preuve, l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure impose aux parties de motiver le retard apporté à la présentation de leurs offres de preuve. Une telle obligation implique que soit reconnu au juge le pouvoir de contrôler le bien-fondé de la motivation du retard apporté à la production de ces offres de preuve et, selon le cas, le contenu de ces dernières ainsi que, si la demande n’est pas fondée à suffisance de droit, le pouvoir de les écarter. A fortiori, il en est de même en ce qui concerne les offres de preuve présentées postérieurement au dépôt de la duplique (arrêt Gaki-Kakouri/Cour de justice, précité, point 33).

80      En l’espèce, la requérante a soutenu, lors de l’audience, que le rapport du 1er décembre 2013 devrait être considéré comme étant recevable au vu des circonstances exceptionnelles qui existent en Syrie.

81      À cet égard, il convient de relever que le rapport du 1er décembre 2013 émane de la requérante elle-même et que la quasi-totalité des données qu’il contient concerne les années 2011 et 2012. Cependant, la requérante n’a pas expliqué les raisons pour lesquelles il lui aurait été impossible de rédiger plus tôt un rapport portant sur ces années. De même, la requérante n’a pas expliqué en quoi les conditions difficiles qui existent en Syrie l’ont empêchée de transmettre au Tribunal le rapport en cause avant la tenue de l’audience dans la présente affaire le 23 janvier 2014, alors même que ledit rapport date du 1er décembre 2013. Par ailleurs, il doit être tenu compte du fait que la requérante est une entreprise exerçant une activité commerciale qui implique l’échange, notamment par la voie électronique, de nombreux documents.

82      Par conséquent, le dépôt du rapport du 1er décembre 2013 doit être considéré comme étant tardif, si bien que l’issue de la présente demande en indemnité doit être établie sans tenir compte dudit rapport.

83      Dans ces circonstances, puisqu’il a été constaté aux points 75 et 77 ci-dessus que, en l’espèce, la requête et la réplique ne satisfont pas aux exigences établies par le règlement de procédure, tel qu’interprété par la jurisprudence, la demande en indemnité de la requérante doit être rejetée comme irrecevable, et ce indépendamment du bien-fondé de la remarque du Conseil reprise au point 70 ci-dessus.

 Sur les dépens

84      Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs ou pour des motifs exceptionnels.

85      Le recours ayant été partiellement accueilli, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que la requérante supportera un quart de ses propres dépens et que le Conseil supportera ses propres dépens ainsi que trois quarts de ceux exposés par la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le règlement d’exécution (UE) n° 544/2012 du Conseil, du 25 juin 2012, mettant en œuvre l’article 32, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie, est annulé en ce qu’il vise la Syria International Islamic Bank PJSC.

2)      La décision d’exécution 2012/335/PESC du Conseil, du 25 juin 2012, mettant en œuvre la décision 2011/782/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie, est annulée en ce qu’elle vise la Syria International Islamic Bank.

3)      La demande en indemnité est rejetée comme irrecevable.

4)      La Syria International Islamic Bank supportera un quart de ses propres dépens.

5)      Le Conseil de l’Union européenne supportera ses propres dépens ainsi que trois quarts de ceux exposés par la Syria International Islamic Bank.

Berardis

Czúcz

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 juin 2014.

Signatures


* Langue de procédure : le français.