Language of document : ECLI:EU:T:2014:676

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

16 juillet 2014 (*)

« Aides d’État – Services d’élimination de carcasses d’animaux et de déchets d’abattoirs – Maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie – Décision déclarant les aides incompatibles avec le marché intérieur – Notion d’entreprise – Avantage – Service d’intérêt économique général – Compensation relative à l’obligation de service public – Affectation des échanges entre États membres et distorsion de la concurrence – Aides existantes ou aides nouvelles – Nécessité de l’aide – Subsidiarité – Confiance légitime – Sécurité juridique – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑309/12,

Zweckverband Tierkörperbeseitigung in Rheinland-Pfalz, im Saarland, im Rheingau-Taunus-Kreis und im Landkreis Limburg-Weilburg, établie à Rivenich (Allemagne), représentée par Me A. Kerkmann, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. V. Kreuschitz et T. Maxian Rusche, puis par M. Maxian Rusche et Mme C. Egerer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Saria Bio-Industries AG & Co. KG, établie à Selm (Allemagne),

SecAnim GmbH, établie à Lünen (Allemagne),

et

Knochen- und Fett-Union GmbH (KFU), établie à Selm,

représentées par Mes U. Karpenstein et C. Johann, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2012/485/UE de la Commission, du 25 avril 2012, concernant l’aide d’État SA.25051 (C 19/10) (ex NN 23/10) de l’Allemagne en faveur de la Zweckverband Tierkörperbeseitigung in Rheinland-Pfalz, im Saarland, im Rheingau-Taunus-Kreis und im Landkreis Limburg-Weilburg (JO L 236, p. 1),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich (rapporteur), président, J. Schwarcz et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 février 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

 Contexte juridique en cause

1        Avant l’adoption de la directive 90/667/CEE du Conseil, du 27 novembre 1990, arrêtant les règles sanitaires relatives à l’élimination et à la transformation de déchets animaux, à leur mise sur le marché et à la protection contre les agents pathogènes des aliments pour animaux d’origine animale ou à base de poisson, et modifiant la directive 90/425/CEE (JO L 363, p. 51), les règles relatives à l’élimination de déchets animaux n’étaient pas harmonisées dans l’Union européenne. En Rhénanie-Palatinat (Allemagne), l’obligation d’élimination de cadavres d’animaux, de parties d’animaux et de produits d’origine animale pesait sur les Landkreise (arrondissements) et les kreisfreie Städte (villes n’appartenant à aucun arrondissement), en vertu de la Gesetz über die Beseitigung von Tierkörpern, Tierkörperteilen und tierischen Erzeugnissen (Tierkörperbeseitigungsgesetz) (loi sur l’élimination de cadavres d’animaux, de parties animaux et de produits d’origine animale, ci-après la « TierKBG ») du 2 septembre 1975 (BGBl. 1975 I, p. 2313). Cette loi prescrivait notamment l’élimination dans des clos d’équarrissage. En outre, l’article 2 de la Landesgesetz zur Ausführung des Tierkörperbeseitigungsgesetzes (Landestierkörperbeseitigungsgesetz) (loi du Land portant application de la loi sur l’élimination de cadavres d’animaux, ci-après la « LTierKBG ») du Land de Rhénanie-Palatinat du 22 juin 1978 (GVBl. 1978, p. 445) prévoyait que les arrondissements et les villes n’appartenant à aucun arrondissement constituaient une association de droit public à cette fin.

2        La directive 90/667 a été abrogée par le règlement (CE) n° 1774/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 3 octobre 2002, établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine (JO L 273, p. 1). Ce règlement a été quant à lui abrogé par le règlement (CE) n° 1069/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009, établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine (règlement relatif aux sous-produits animaux) (JO L 300, p. 1), qui régit la collecte, le transport, la manipulation, le traitement, la conversion, la transformation, l’entreposage, la mise sur le marché, la distribution, l’utilisation et l’élimination de sous-produits animaux pour que ces produits ne constituent pas un danger pour la santé publique et la santé animale.

3        En vertu des articles 7 à 10 du règlement n° 1069/2009, les sous-produits animaux au sens de ce règlement sont répartis en trois catégories en fonction des risques spécifiques existant pour la santé publique et la santé animale. En effet, les matières de la catégorie 1 au sens du règlement n° 1069/2009 (ci-après les « matières de la catégorie 1 ») sont celles qui comportent des risques considérables, liés particulièrement à l’encéphalopathie spongiforme transmissible (EST) et à la présence de certaines substances interdites et de contaminants environnementaux. Ces matières doivent obligatoirement être éliminées et ne doivent pas se retrouver dans les cycles de transformation. Les matières de la catégorie 2 au sens du règlement n° 1069/2009 (ci-après les « matières de la catégorie 2 ») représentent des risques importants, puisqu’elles proviennent d’animaux morts et d’autres matières contenant certaines substances interdites ou des contaminants. Ces matières doivent être éliminées par incinération ou transformation et ne peuvent être contenues dans des aliments pour animaux d’élevage. Dans certains cas, elles peuvent toutefois être utilisées comme engrais ou pour des usages techniques. Les matières de la catégorie 3 au sens du règlement n° 1069/2009 (ci-après les « matières de la catégorie 3 ») comprennent, notamment, des parties de carcasses qui, bien qu’elles aient été considérées comme impropres à la consommation, sont exemptes de tout signe de maladie transmissible aux êtres humains ou aux animaux, ainsi que les matières provenant d’animaux qui ont été considérées comme propres à la consommation humaine, mais qui, pour des raisons économiques, sont utilisées à d’autres fins, par exemple comme aliments pour animaux d’élevage.

4        En Allemagne, la transposition et l’application des règlements précités résultent de la Tierische Nebenprodukte-Beseitigungsgesetz (loi sur l’élimination de sous-produits animaux, ci-après la « TierNebG ») du 25 janvier 2004 (BGBl. 2004 I, p. 82). En vertu de l’article 2 de la TierNebG, la mise en œuvre des dispositions appartient aux autorités compétentes des Länder allemands. Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de la TierNebG, ce sont les collectivités publiques compétentes selon le droit du Land qui sont tenues de procéder à l’élimination et à la transformation des matières des catégories 1 et 2. Selon les dispositions respectives du Land concerné, les arrondissements ou les villes n’appartenant à aucun arrondissement constituent ces collectivités. L’article 3, paragraphe 2, de la TierNebG prévoit la possibilité de confier l’élimination et la transformation de ces matières à des personnes physiques ou morales de droit privé. L’élimination des matières de la catégorie 3 peut être effectuée par toute entreprise de transformation, pour autant que les dispositions du règlement n° 1069/2009 soient respectées. Conformément à l’article 8 de la TierNebG, les collectivités publiques compétentes selon le droit du Land sont obligées de collecter les matières des catégories 1 et 2. En l’absence d’une telle obligation de collecte, l’article 9 de la TierNebG définit l’obligation pour le détenteur de ces matières de les déposer auprès d’une installation déterminée par la collectivité publique compétente.

5        Avec effet au 1er janvier 1979, la requérante, la Zweckverband Tierkörperbeseitigung in Rheinland-Pfalz, im Saarland, im Rheingau-Taunus-Kreis und im Landkreis Limburg-Weilburg (association de droit public pour l’élimination de cadavres d’animaux en Rhénanie-Palatinat, en Sarre, dans l’arrondissement Rheingau-Taunus et dans l’arrondissement Limburg-Weilburg), a été créée, conformément à l’article 2 de la LTierKBG. Elle a son siège social à Rivenich (Allemagne). Tous les arrondissements et les villes n’appartenant à aucun arrondissement dans le Land de Rhénanie-Palatinat et dans le Land de Sarre (Allemagne) ainsi que l’arrondissement Rheingau-Taunus et l’arrondissement Limburg-Weilburg, situés dans le Land de Hesse (Allemagne) (ci-après le « territoire de compétence »), sont membres de la requérante. Conformément aux articles 2 des contrats d’État, conclus respectivement les 9 novembre 1972 et 7 décembre 1973 entre le Land de Rhénanie-Palatinat, d’une part, et le Land de Sarre et le Land de Hesse, d’autre part, le droit du Land de Rhénanie-Palatinat est applicable à la requérante.

6        Les statuts de la requérante ont été constatés par le ministère de l’Intérieur et des Sports du Land de Rhénanie-Palatinat, conformément à la Landesgesetz über die kommunale Zusammenarbeit (loi sur la coopération communale, ci-après la « KomZG ») du Land de Rhénanie-Palatinat du 22 décembre 1982 (GVBl. 1982, p. 476). En vertu de l’article 2, paragraphe 1, de la KomZG, la requérante possède, dans le respect des lois, le droit à autonomie de gestion et est seulement soumise à un contrôle de légalité par le Land de Rhénanie-Palatinat.

7        Les membres de la requérante n’ont pas fait usage de la possibilité, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, de la TierNebG, de confier l’élimination et la transformation des matières des catégories 1 et 2 à des personnes physiques ou morales de droit privé. En revanche, conformément à l’article 2 des statuts de la requérante, ses membres l’ont chargée d’assumer tous les droits et toutes les obligations qui leur incombaient en tant qu’entités soumises à l’obligation d’élimination au sens de l’article 3 de la TierNebG, en combinaison avec la Landesgesetz zur Ausführung des TierNebG (loi du Land portant application de la TierNebG, ci-après l’« AGTierNebG ») du Land de Rhénanie-Palatinat du 20 octobre 2010 (GVBl. 2010, p. 367) et les lois respectives du Land de Sarre et du Land de Hesse. En vertu de l’article 6 des statuts de la requérante, cette dernière gère son installation d’élimination de cadavres d’animaux en tant que régie. Conformément à l’article 8, paragraphe 1, des statuts de la requérante, les missions de la direction d’usine sont accomplies par la Gesellschaft für Tierkörperbeseitigung mbH (GFT), qui est liée à la requérante par un contrat de gestion de l’exploitation et soumise aux instructions de la requérante.

8        Le règlement que la requérante a adopté le 6 décembre 2004 prévoit, à son article 4, paragraphe 1, une obligation d’affiliation et d’utilisation pour les matières des catégories 1 et 2 produites sur son territoire de compétence.

9        Sur son territoire de compétence, la requérante ne s’est pas limitée à éliminer des matières des catégories 1 et 2. Elle a également éliminé des matières de la catégorie 3. En outre, à partir de l’an 2000, la requérante a pris en charge l’élimination des matières des catégories 1 et 2 dans une partie du Bade-Wurtemberg (Allemagne) et, à partir de l’année 2009, également en Hesse du Nord et en Hesse centrale, à savoir dans des régions ne faisant pas partie de son territoire de compétence. De 1998 à 2009, près de la moitié des matières traitées par la requérante faisait partie de la catégorie 3 ou ne provenait pas de son territoire de compétence.

10      En contrepartie de la collecte et de l’élimination ou du traitement des matières des catégories 1 et 2, la requérante reçoit des redevances des détenteurs des sous-produits animaux, conformément au règlement sur les redevances, adopté par la requérante, en combinaison avec l’article 4 de l’AGTierNebG et la Kommunalabgabengesetz (loi sur les redevances communales, ci-après la « KAG ») du Land de Rhénanie-Palatinat du 20 juin 1995 (GVBl. 1995, p. 175). En revanche, le traitement de matières de la catégorie 3 se négocie librement sur le marché.

11      En outre, conformément à l’article 9, paragraphe 1, des statuts de la requérante, cette dernière reçoit de ses membres des contributions dans la mesure où ses recettes ne suffisent pas à couvrir les coûts. Selon la version du paragraphe 2 de cet article initialement en vigueur, la contribution doit être fixée dans un règlement pour chaque exercice.

12      En 2010, les statuts de la requérante ont été modifiés avec effet rétroactif au 1er janvier 2009. Conformément à l’article 9, paragraphe 2, des statuts de la requérante, tels que modifiés, la contribution doit désormais être fixée par avance dans un règlement. De plus, en vertu du paragraphe 3 de cet article, la contribution ne peut être prélevée que pour compenser les coûts résultant de l’obligation d’élimination des matières des catégories 1 et 2 ainsi que du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie. À l’article 10 de leur version modifiée, les statuts de la requérante contiennent également des dispositions détaillées concernant l’importance de la réserve de capacités disponibles en cas d’épizootie.

13      Depuis sa création en 1979 et jusqu’en 2011, la requérante a reçu des contributions d’un montant de 66 493 680 euros. Les contributions versées entre 1998 et 2011 s’élevaient à 30 932 198 euros.

 Procédures administrative et judiciaire

14      Le 23 février 2008, la Commission des Communautés européennes a pris connaissance, à travers une plainte déposée par Saria Bio-Industries AG & Co. KG, des contributions que la République fédérale d’Allemagne accordait à la requérante.

15      Par lettre du 20 juillet 2010, la Commission a informé la République fédérale d’Allemagne de sa décision d’ouvrir la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE (ci-après la « décision d’ouverture »). Par la publication de la décision d’ouverture, le 26 octobre 2010, au Journal officiel de l’Union européenne (JO C 289, p. 8), la Commission a invité les intéressés à présenter leurs observations.

16      Parallèlement à la procédure formelle d’examen de la Commission, Saria Bio-Industries a engagé une procédure judiciaire sur le plan national en Allemagne et déposé une plainte contre la requérante devant le Verwaltungsgericht Trier (tribunal administratif de Trèves). Dans un arrêt du 2 décembre 2008, le Verwaltungsgericht Trier a estimé que les contributions en cause constituaient une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Saria Bio-Industries et la requérante ont interjeté appel contre ce jugement devant l’Oberverwaltungsgericht Rheinland-Pfalz (tribunal administratif supérieur de Rhénanie-Palatinat), qui a, par arrêt du 24 novembre 2009, confirmé l’arrêt du Verwaltungsgericht Trier. Saria Bio-Industries et la requérante ont ensuite formé un pourvoi contre l’arrêt de l’Oberverwaltungsgericht devant le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale). Par arrêt du 16 décembre 2010, le Bundesverwaltungsgericht a rejeté le pourvoi de Saria Bio-Industries, modifié l’arrêt de l’Oberverwaltungsgericht et rejeté les recours dans leur ensemble, estimant que la plainte n’était pas recevable pour la période de 2005 à 2009 et que la contribution en cause pour l’année 2010 ne constituait pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

 Décision attaquée

17      Le 25 avril 2012, la Commission a adopté la décision 2012/485/UE concernant l’aide d’État SA.25051 (C 19/10) (ex NN 23/10) de l’Allemagne en faveur de la requérante (JO L 236, p. 1, ci-après la « décision attaquée »), dont le dispositif prévoit ce qui suit :

« Article premier

Les versements de contributions que [la République fédérale d’Allemagne] a accordés illégalement depuis le 1er janvier 1979 à la [requérante], en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, constituent une aide d’État et sont incompatibles avec le marché intérieur.

Article 2

1. [La République fédérale d’Allemagne] est tenue de recouvrer immédiatement auprès du bénéficiaire l’aide visée à l’article 1er qui a été versée depuis le 26 mai 1998.

2. Les montants d’aide à rembourser doivent inclure les intérêts échus à partir de la mise à disposition de l’aide visée à l’article 1er au bénéficiaire, jusqu’à la date du remboursement effectif.

3. Les intérêts sont calculés sur une base composée, conformément au chapitre V du règlement (CE) n° 794/2004 de la Commission.

4. [La République fédérale d’Allemagne] annule tous les paiements en suspens de l’aide visée à l’article 1er à compter de la date de la notification de la présente décision.

Article 3

[La République fédérale d’Allemagne] veille à ce que les aides visées à l’article 2, paragraphe 1, soient remboursées dans un délai de quatre mois à compter de la date de la notification de la présente décision.

[…] »

18      Aux fins de motiver sa conclusion selon laquelle les contributions accordées depuis le 1er janvier 1979 par les membres de la requérante à cette dernière constituaient une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, en premier lieu, la Commission a précisé que les contributions en cause étaient financées au moyen des ressources de l’État (considérant 141 de la décision attaquée).

19      En deuxième lieu, elle a constaté que, dans la mesure où la requérante offrait contre rémunération des services pour l’élimination de certains sous-produits animaux, elle était une entreprise (considérant 142 de la décision attaquée).

20      En troisième lieu, la Commission a relevé que les contributions en cause faussaient ou menaçaient de fausser la concurrence et affectaient les échanges entre États membres. En effet, s’agissant des matières des catégories 1 et 2, il existerait une concurrence et un marché, étant donné que la majorité des collectivités territoriales compétentes octroieraient des monopoles régionaux pour l’élimination de ces matières dans le cadre de marchés publics. Les versements de contributions renforceraient la position financière de la requérante par rapport aux autres soumissionnaires potentiels. Dans la mesure où des soumissionnaires de l’ensemble des États membres pourraient prendre part aux appels d’offres, la contribution serait de nature à entraver le commerce entre les États membres. De même, les avantages économiques résultant des versements de contributions seraient en mesure de renforcer la position de la requérante sur les marchés sur lesquels elle serait en concurrence directe avec d’autres soumissionnaires, à savoir le marché pour l’élimination des matières de la catégorie 3 et celui pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2 en Hesse du Nord et en Hesse centrale (considérants 147 à 149 de la décision attaquée).

21      En quatrième lieu, la Commission a estimé que les versements de contributions constituaient un avantage économique pour la requérante, puisqu’ils auraient réduit ses dépenses courantes et qu’ils n’auraient pas été liés à une contrepartie adéquate (considérant 143 de la décision attaquée). Selon la décision attaquée, ces versements ne constituaient pas une compensation pour l’accomplissement d’obligations d’intérêt général au sens de l’arrêt de la Cour du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, Rec. p. I‑7747, ci-après l’« arrêt Altmark »). Les quatre critères posés par la Cour dans cet arrêt ne seraient pas satisfaits (considérants 144 et 239 de la décision attaquée).

22      S’agissant du premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, selon lequel l’entreprise bénéficiaire doit effectivement être chargée de l’exécution d’obligations de service public et selon lequel ces obligations doivent être clairement définies, la Commission a distingué entre la période allant de 1979 à 2008 et celle allant de 2009 à 2011. À cet égard, elle a constaté qu’une obligation clairement définie pour la requérante de mise à disposition de capacités supplémentaires en cas d’épizootie n’existait que depuis la modification des statuts de la requérante en 2010, avec effet rétroactif au 1er janvier 2009 (considérants 151 à 154 de la décision attaquée). Toutefois, selon la décision attaquée, ni l’obligation pour la requérante d’éliminer les matières des catégories 1 et 2 ni celle de mettre à disposition des capacités supplémentaires ne pouvaient justifier les versements de contributions au titre de compensation au sens du premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra (considérant 155 de la décision attaquée).

23      En effet, en ce qui concerne l’obligation d’éliminer les matières des catégories 1 et 2, celle-ci ne constituerait pas un service d’intérêt économique général (ci-après le « SIEG »). Selon la décision attaquée, qui fait référence à l’arrêt de la Cour du 20 novembre 2003, GEMO (C‑126/01, Rec. p. I‑13769, points 30 à 34), l’ensemble des coûts liés à l’élimination de cadavres d’animaux et de déchets d’abattoirs devait être supporté par les éleveurs et les abattoirs. Une intervention des autorités publiques visant à libérer les éleveurs et les abattoirs de cette charge financière apparaîtrait comme un avantage économique susceptible de fausser la concurrence. Les coûts supplémentaires relatifs à l’élimination des matières des catégories 1 et 2 devraient être intégrés dans les redevances et rémunérations (considérants 156 à 179 de la décision attaquée). À titre subsidiaire, la Commission a souligné que les paiements de compensation n’étaient pas nécessaires (considérants 180 à 185 de la décision attaquée).

24      Selon la Commission, la mise à disposition de capacités supplémentaires en cas d’épizootie ne pouvait non plus être qualifiée de SIEG. Dans le cas où les capacités existantes inutilisées pour des raisons d’exploitation ne seraient pas suffisantes pour couvrir les capacités supplémentaires prescrites, et où des coûts d’investissement complémentaires naîtraient de l’obligation de maintenir de telles capacités, ces coûts devraient être en principe couverts par les redevances ou les rémunérations, en application du principe du pollueur-payeur. Dans le cas où des capacités inutilisées plus élevées que ce qui serait effectivement nécessaire pour une épizootie seraient maintenues, il n’existerait aucun intérêt public à maintenir une telle capacité inutilisée excédentaire (considérants 186 à 193 de la décision attaquée).

25      S’agissant du deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, selon lequel les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente, la Commission a distingué entre la période allant de 1979 à 2008 et celle allant de 2009 à 2012. En ce qui concerne la première période, ce critère ne serait pas satisfait étant donné que les statuts de la requérante, avant leur modification en 2010, ne contiendraient aucune méthode objective et transparente préétablie qui aurait permis le calcul des coûts des capacités supplémentaires (considérants 199 à 201 de la décision attaquée). Pour ce qui est de la seconde période, la Commission a constaté que, après la modification des statuts de la requérante, les exigences de transparence du deuxième critère étaient satisfaites pour les années 2010 à 2012. En revanche, pour l’année 2009, ce critère n’aurait pas été satisfait étant donné que les dispositions relatives au calcul des coûts, le règlement relatif à la gestion financière et le montant de la contribution auraient été fixés rétroactivement et non au préalable (considérants 202 à 205 de la décision attaquée).

26      En ce qui concerne le troisième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, selon lequel la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public en tenant compte des recettes s’y rapportant ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations, la Commission a estimé que la mise à disposition de capacités supplémentaires selon la taille prescrite par l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante, à savoir 1 185 tonnes supplémentaires par semaine pendant six semaines, n’avait pas entraîné de coûts nets pour la requérante (considérants 206 à 211 de la décision attaquée).

27      En effet, selon la décision attaquée, les capacités supplémentaires prescrites pouvaient être couvertes par les capacités existantes de la requérante inutilisées pour des raisons d’exploitation disponibles à court terme, la nuit et le week-end. Les installations ne fonctionneraient en temps normal qu’en deux cycles de transformation par jour, cinq jours par semaine (régime cinq jours-deux cycles). La capacité inutilisée pour des raisons d’exploitation, de 2 376 tonnes, disponible en régime sept jours-trois cycles par semaine pour une durée de six semaines, correspondrait à peu près au double des capacités supplémentaires prescrites de 1 185 tonnes (considérants 212 à 223 de la décision attaquée).

28      En outre, la Commission a constaté que les capacités inutilisées des installations excédaient les capacités supplémentaires prescrites. Certaines années, la capacité normale en régime cinq jours-deux cycles serait restée inexploitée jusqu’à hauteur de 25 %. En réalité, la requérante disposerait d’installations qui lui conféreraient une capacité maximale de 4 536 tonnes par semaine et elle exploiterait donc des installations dont les capacités atteindraient le double de ce qui serait nécessaire pour les missions fixées dans ses statuts. Puisque la requérante disposerait de capacités nettement plus élevées que ce qui serait nécessaire pour remplir ses mandats publics, l’obligation de mise à disposition de capacités supplémentaires ne saurait entraîner pour elle des coûts nets (considérants 224 à 227 de la décision attaquée).

29      S’agissant du quatrième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, selon lequel, lorsque le choix de l’entreprise à charger de l’exécution d’obligations de service public n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée aurait encourus pour exécuter ces obligations en tenant compte des recettes s’y rapportant ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations, la Commission a constaté que la République fédérale d’Allemagne n’avait pas apporté la preuve que ce critère était satisfait (considérants 229 à 232 de la décision attaquée).

30      Selon la décision attaquée, les versements des contributions en cause procuraient à la requérante des avantages économiques pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sur son territoire de compétence, et en dehors de celui-ci, et pour celle de matières de la catégorie 3. En réalité, ces versements auraient compensé des pertes dues à la transformation des matières de la catégorie 3 moins rentable, aux capacités inexploitées et au fait que les rémunérations pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2 en Hesse du Nord et en Hesse centrale ainsi que les redevances pour l’élimination de ces matières sur le territoire de compétence de la requérante n’auraient pas couvert les coûts (considérants 242 à 274 de la décision attaquée).

31      En cinquième lieu, la Commission a constaté que, étant donné qu’elle n’avait pas reçu de notification des contributions accordées depuis le 1er janvier 1979 par les membres de la requérante à cette dernière, celles-ci constituaient, au regard de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, des aides d’État illégales. Une exemption de notification telle que visée par la décision 2005/842/CE de la Commission, du 28 novembre 2005, concernant l’application des dispositions de l’article [106, paragraphe 2, TFUE] aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de SIEG (JO L 312, p. 67), ou par la décision 2012/21/UE de la Commission, du 20 décembre 2011, relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, [TFUE] aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de SIEG (JO 2012, L 7, p. 3), ne serait pas applicable en l’espèce. En effet, la requérante n’aurait pas été chargée d’exécuter un SIEG, pour la période allant de 1979 à 2010, le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, ne serait pas satisfait et, pour la totalité de la période à partir de 1979, le troisième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, ne serait pas satisfait (considérants 276 et 277 de la décision attaquée).

32      En sixième lieu, la Commission a constaté que les contributions en cause ne pouvaient pas être justifiées en tant qu’aide d’État pour la mise à disposition des capacités supplémentaires sur le territoire de compétence de la requérante au titre de l’article 106, paragraphe 2, TFUE et de l’encadrement de l’Union applicable aux aides d’État sous forme de compensations de service public (2011) (JO 2012, C 8, p. 15, ci-après l’« encadrement SIEG »), adopté par la Commission (considérants 278 à 283 de la décision attaquée).

33      Selon la Commission, étant donné que les versements de contributions en cause ont favorisé la requérante, ils ne pouvaient être considérés comme des aides d’État compatibles avec le marché intérieur, selon l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, au sens des lignes directrices de la Communauté concernant les aides d’État liées aux tests EST, aux animaux trouvés morts et aux déchets d’abattoirs (JO 2002, C 324, p. 2), et des lignes directrices de la Communauté concernant les aides d’État dans le secteur agricole et forestier 2007-2013 (JO 2006, C 319, p. 1) (considérants 284 à 292 de la décision attaquée).

34      Enfin, en réponse à l’affirmation de la République fédérale d’Allemagne selon laquelle une partie des contributions servait à financer les coûts d’assainissement des sites désaffectés de Sohrschied (Allemagne) et de Sprendlingen-Gensingen (Allemagne), la Commission a constaté que les versements de contributions en cause ne pouvaient être considérés comme des aides d’État compatibles avec le marché intérieur, selon l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, au sens des lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement (JO 2008, C 82, p. 1), dès lors que, selon le droit allemand, la requérante était entièrement responsable pour les coûts d’assainissement en cause (considérants 130 à 139 et 293 à 303 de la décision attaquée).

35      En conclusion, premièrement, la Commission a relevé qu’une demande de renseignements avait été transmise à la République fédérale d’Allemagne le 26 mai 2008 qui avait interrompu le délai de récupération. L’ensemble des versements de contributions que la requérante avait reçus avant le 26 mai 1998 serait dès lors, selon elle, considéré comme des aides existantes. En revanche, l’ensemble des versements de contributions que la requérante avait reçus après le 26 mai 1998 constituerait, selon elle, des aides nouvelles (considérants 306 à 308 de la décision attaquée).

36      Deuxièmement, la Commission a constaté que le remboursement des versements de contributions en cause n’allait pas à l’encontre des principes généraux du droit de l’Union en matière de protection de la confiance légitime. Selon elle, l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, ne pouvait faire naître chez la requérante des espérances fondées quant au fait que les versements de contributions en cause n’étaient pas des aides d’État. En effet, d’une part, cet arrêt ne se serait référé qu’aux versements de contributions de 2010 et, d’autre part, il ne constituerait pas une assurance précise fournie par une institution de l’Union (considérants 309 à 316 de la décision attaquée).

 Procédure et conclusions des parties

37      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 juillet 2012, la requérante a introduit le présent recours.

38      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 23 juillet 2012, Saria Bio-Industries, SecAnim GmbH et Knochen- und Fett-Union GmbH (KFU) ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Il a été fait droit à cette demande par ordonnance du président de la septième chambre du Tribunal du 12 décembre 2012.

39      Les parties intervenantes ont déposé leur mémoire en intervention le 13 février 2013. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 2 avril 2013, la requérante a présenté ses observations sur ce mémoire. La Commission n’a pas présenté d’observations sur le mémoire des parties intervenantes.

40      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 31 mai 2013, la requérante a introduit une demande en référé, dans laquelle elle a conclu, en substance, à ce qu’il plaise au président du Tribunal de surseoir à l’exécution de la décision attaquée. Par ordonnance du 5 juillet 2013, Zweckverband Tierkörperbeseitigung/Commission (T‑309/12 R, non publiée au Recueil), le président du Tribunal a rejeté cette demande en référé et a réservé les dépens.

41      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la cinquième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

42      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

43      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 6 février 2014.

44      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

45      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

46      Les parties intervenantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours.

 En droit

47      Au soutien du recours, la requérante soulève neuf moyens. Le premier est tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE en ce que la Commission aurait erronément constaté que la requérante constituait une entreprise. Le deuxième moyen est tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et de l’article 106, paragraphe 2, TFUE en ce que la Commission aurait erronément constaté, d’une part, que les contributions en cause procuraient un avantage économique pour la requérante et, d’autre part, que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie ne constituait pas un SIEG. Par le troisième moyen, la requérante fait valoir une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE en ce que la Commission aurait erronément constaté une affectation du commerce entre États membres et une distorsion de la concurrence. Le quatrième moyen concerne la question de la compatibilité de l’aide en cause avec le marché intérieur. Il est tiré d’une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE en raison d’une méconnaissance des conditions d’autorisation visées dans cette disposition. Par le cinquième moyen, la requérante fait valoir une atteinte à la répartition des compétences entre l’Union et les États membres ainsi qu’une violation du principe de subsidiarité. Les sixième, septième et huitième moyens concernent la question de savoir si la Commission pouvait, à juste titre, ordonner la récupération de l’aide en cause. Le sixième moyen est tiré d’une violation de l’article 108, paragraphe 1, TFUE, de l’article 1er, sous b), et de l’article 14 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO L 83, p. 1), tandis que, par le septième moyen, la requérante fait valoir une méconnaissance des exigences des principes de confiance légitime et de sécurité juridique. Le huitième moyen est tiré d’une violation du principe de nécessité et du principe de proportionnalité. Enfin, par le neuvième moyen, la requérante fait valoir une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, au motif que, pour autant que les contributions servaient à financer les coûts d’assainissement des sites désaffectés de Sohrschied et de Sprendlingen-Gensingen, elles ne constituaient pas une aide d’État.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, relatif à l’existence d’une entreprise

48      La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 107, paragraphe 1, TFUE en constatant, au considérant 142 de la décision attaquée, que, dans la mesure où elle offrait contre rémunération des services pour l’élimination de certains sous-produits animaux, elle était une entreprise. Selon la requérante, elle n’offrait pas le service consistant à éliminer les matières des catégories 1 et 2 sur un marché donné, étant donné que l’élimination de ces matières et le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie relèveraient de l’exercice des prérogatives de puissance publique que la République fédérale d’Allemagne lui aurait conféré dans le cadre de son domaine de compétence en organisant la mission d’élimination des matières des catégories 1 et 2 sous la forme d’une mission de service public. Les collectivités territoriales compétentes auraient décidé d’accomplir leurs missions de service public en collaborant les unes avec les autres dans le cadre de l’exercice des prérogatives publiques et en excluant l’existence d’un marché sur leur territoire. Selon la requérante, la détermination de l’importance de la réserve de capacités en cas d’épizootie constitue une décision relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique de ses membres. Elle devrait donc être considérée comme une entreprise uniquement en ce qui concerne l’élimination des matières de la catégorie 3.

49      À titre liminaire, il convient de rappeler que la qualification d’aide, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, requiert que toutes les conditions visées par cette disposition soient remplies. Premièrement, il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État. Deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d’affecter les échanges entre États membres. Troisièmement, elle doit accorder un avantage à son bénéficiaire en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence (voir arrêt du Tribunal du 17 décembre 2008, Ryanair/Commission, T‑196/04, Rec. p. II‑3643, point 36, et la jurisprudence citée).

50      Le présent moyen concerne plus particulièrement la troisième de ces conditions, aux termes de laquelle sont considérées comme des aides d’État les interventions qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises, ou qui doivent être considérées comme un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (voir arrêt de la Cour du 2 septembre 2010, Commission/Deutsche Post, C‑399/08 P, Rec. p. I‑7831, point 40, et la jurisprudence citée).

51      Selon une jurisprudence constante, dans le contexte du droit de la concurrence, la notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement. Constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné (voir arrêt de la Cour du 10 janvier 2006, Cassa di Risparmio di Firenze e.a., C‑222/04, Rec. p. I‑289, points 107 et 108, et la jurisprudence citée). Le caractère économique ou non d’une activité ne dépend pas du statut privé ou public de l’entité qui l’exerce, ni de la rentabilité de cette activité (voir arrêt de la Cour du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig/Commission, C‑288/11 P, non encore publié au Recueil, point 50, et la jurisprudence citée).

52      Selon la jurisprudence, ne présentent pas un caractère économique, justifiant l’application des règles de concurrence du traité FUE, les activités qui relèvent de l’exercice des prérogatives de puissance publique (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, Rec. p. I‑43, points 30 et 31).

53      En ce qui concerne l’éventuelle incidence de l’exercice des prérogatives de puissance publique sur la qualification d’une personne morale telle que la requérante d’entreprise au sens du droit de la concurrence de l’Union, il convient de relever que la circonstance qu’une entité dispose, pour l’exercice d’une partie de ses activités, de prérogatives de puissance publique n’empêche pas, à elle seule, de la qualifier d’entreprise au sens du droit de la concurrence de l’Union pour le reste de ses activités économiques. La qualification d’activité relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique ou d’activité économique doit être faite à part pour chaque activité exercée par une entité donnée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 1er juillet 2008, MOTOE, C‑49/07, Rec. p. I‑4863, point 25, et la jurisprudence citée). Il y a donc lieu de distinguer, dans le cadre de l’examen des contributions en cause, les activités de nature économique de celles qui pourraient relever de prérogatives de puissance publique (voir, en ce sens, arrêt Ryanair/Commission, point 49 supra, point 98).

54      À cet égard, il convient de rejeter l’argument de la Commission selon lequel, étant donné que la requérante n’a pas contesté que l’élimination des matières de la catégorie 3 constituait une activité économique, l’argumentation de cette dernière est dépourvue d’effet, l’argent étant fongible. En effet, un tel argument ne saurait être accueilli sans rechercher auparavant quelle est la nature des différentes activités de la requérante (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission, C‑82/01 P, Rec. p. I‑9297, point 75). Ainsi, une éventuelle qualification de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 d’activité relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique pourrait avoir une incidence sur l’examen de la qualification de la requérante d’entreprise au sens du droit de la concurrence de l’Union (voir arrêts Aéroports de Paris/Commission, précité, points 74 à 82 ; MOTOE, point 53 supra, points 22 à 29, et Ryanair/Commission, point 49 supra, point 84 à 94). En outre, pour les mêmes raisons, l’argument de la Commission, selon lequel l’argumentation de la requérante est dépourvue d’effet pour la période allant de 1998 à février 2010 parce que, jusqu’en février 2010, les contributions auraient couvert la totalité des pertes de la requérante, doit être rejeté.

55      Il convient donc d’examiner si les activités de la requérante relatives à l’élimination des matières des catégories 1 et 2 et au maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie relevaient de l’exercice des prérogatives de puissance publique, ainsi que l’allègue la requérante, ou de l’exercice d’activité économique.

56      Afin de trancher la question de savoir si la requérante agissait en exerçant des prérogatives de puissance publique ou si elle exerçait des activités économiques, il est nécessaire d’examiner la nature de l’activité concernée. À cet égard, il convient de vérifier si l’activité en cause, par sa nature, son objet et les règles auxquelles elle est soumise, se rattache à l’exercice des prérogatives de puissance publique ou si elle présente un caractère économique justifiant l’application des règles de concurrence du droit de l’Union (voir arrêts de la Cour du 18 mars 1997, Diego Calì & Figli, C‑343/95, Rec. p. I‑1547, points 16, 18 et 23, et du 28 février 2013, Ordem dos Técnicos Oficiais de Contas, C‑1/12, non encore publié au Recueil, point 40, et la jurisprudence citée).

57      Au soutien de son argumentation selon laquelle les activités en cause relèvent de l’exercice des prérogatives de puissance publique, premièrement, la requérante fait valoir que la mission d’élimination des matières des catégories 1 et 2 est organisée sous la forme d’une mission obligatoire d’intérêt public. Deuxièmement, elle invoque le pouvoir de l’État membre de prévoir une organisation sous la forme d’une mission de service public. Troisièmement, la requérante fait valoir l’absence de marché.

 Sur l’argumentation relative à l’organisation de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sous la forme d’une mission obligatoire d’intérêt public

58      La requérante fait valoir qu’il ressort de l’exposé des motifs de l’article 3, paragraphe 1, de la TierNebG, qui prévoit que, en Allemagne, ce sont les collectivités publiques compétentes selon le droit du Land qui sont tenues de procéder à l’élimination et à la transformation des matières des catégories 1 et 2 (voir point 4 ci-dessus), que la mission d’élimination des matières des catégories 1 et 2 est organisée sous la forme d’une mission relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique dans cet État membre. Selon ces motifs, la transformation et l’élimination de ces matières constitueraient principalement des missions sanitaires de prévention des maladies servant à la protection de la santé des êtres humains et des animaux et, donc, des missions publiques.

59      À cet égard, d’une part, il convient de relever, ainsi que l’allègue la Commission, que la notion de « mission publique » est plus large que celle de mission relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique. En outre, l’exposé des motifs de l’article 3 de la TierNebG reconnaît que la transformation et l’élimination des matières des catégories 1 et 2 possèdent une « importance économique ». De plus, ces motifs et l’article 3, paragraphe 1, de la TierNebG envisagent explicitement la possibilité que des entreprises privées puissent être chargées de la transformation et de l’élimination de ces matières, ce qui constitue un indice susceptible de permettre de qualifier l’activité en cause d’activité économique (voir, en ce sens, arrêt Aéroports de Paris/Commission, point 54 supra, point 82). D’autre part, si l’activité de transformation et d’élimination des matières en cause peut être déléguée à des tiers, il ressort de l’exposé desdits motifs et de l’article 3 de la TierNebG que c’est l’autorité compétente qui doit s’assurer que ces matières sont correctement transformées ou éliminées à tout moment. Ainsi que l’allègue la Commission, seul le fait de s’assurer de la transformation et de l’élimination relève donc de l’autorité elle-même et constitue, selon l’exposé de ces motifs et de l’article 3 de la TierNebG, une mission relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique.

60      L’argumentation de la requérante doit donc être rejetée.

 Sur l’argumentation relative au pouvoir de l’État membre de prévoir une organisation sous la forme d’une mission de service public

61      En premier lieu, la requérante souligne que le législateur allemand avait le droit de confier la mission d’élimination de ces matières aux collectivités de droit public sous la forme d’une mission de service public contraignante. Selon la requérante, cette décision d’attribution devait être prise par l’État membre dans le cadre de la prévention des risques dont il est responsable. En outre, la requérante fait observer que le centre de gravité des mesures visées dans le règlement n° 1069/2009, fondé sur les dispositions relatives à la santé publique de l’article 168 TFUE et non sur la répartition des compétences dans le marché intérieur prévue par l’article 114 TFUE, se situe dans le cadre de la protection de la santé publique et que les aspects économiques revêtent, quant à eux, une importance secondaire. En Allemagne, les missions de police sanitaire seraient traditionnellement des missions de droit public qui seraient généralement accomplies au moyen de prérogatives de puissance publique, puisque cela constituerait la seule façon de mettre à disposition de manière juridiquement effective des instruments à caractère contraignant déterminants pour une destruction sécurisée.

62      Il y a lieu de constater qu’il ne ressort pas de cette argumentation que l’activité d’élimination des matières des catégories 1 et 2 constitue une activité relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique. En effet, il est vrai que le règlement n° 1069/2009 vise à garantir la protection de la santé, ce qui n’est, d’ailleurs, pas contesté par la Commission, ainsi qu’il ressort des considérants 169 à 171 de la décision attaquée. Toutefois, la requérante ne fournit aucun élément permettant de considérer qu’il résulte du règlement n° 1069/2009 que l’élimination des matières en cause en tant que telle, et non seulement l’assurance d’une telle élimination, constitue une activité relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique. À cet égard, il y a lieu de relever que, en vertu de l’article 4, paragraphe 4, sous b), de ce règlement, les États membres sont seulement obligés de veiller à ce qu’un système adéquat soit en place sur leur territoire pour garantir que les sous-produits animaux soient traités, utilisés ou éliminés conformément à ce règlement. Le règlement n° 1069/2009 ayant été transposé en Allemagne par la TierNebG, il a déjà été constaté que, selon l’exposé des motifs et l’article 3 de la TierNebG, seul le fait de s’assurer de la transformation et de l’élimination relève donc de l’autorité elle-même et constitue une mission relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique (voir point 59 ci-dessus).

63      Contrairement à ce qu’allègue la requérante, le fait que la décision de déléguer la transformation et l’élimination des matières des catégories 1 et 2 à des tiers ou de faire exécuter ces opérations par l’autorité compétente elle-même revêt un caractère politique ne permet pas de conclure que l’activité d’élimination relève de l’exercice des prérogatives de puissance publique. En effet, selon la jurisprudence citée au point 56 ci-dessus, les critères pertinents sont la nature de l’activité, son objet et les règles auxquelles elle est soumise.

64      En outre, la requérante fait valoir que, en l’espèce, la surveillance et l’accomplissement étaient exercés par une seule et même entité et formaient dès lors une entité devant être considérée comme juridiquement identique en ce qui concerne l’appréciation de la question de savoir si l’élimination des matières des catégories 1 et 2 relevait de l’autorité publique. À cet égard, il suffit de relever que, ainsi que l’admet la requérante, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, de la TierNebG, il était possible de séparer la surveillance et l’accomplissement. Or, il a déjà été constaté (voir point 53 ci-dessus) que la qualification d’activité relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique ou d’activité économique doit être faite à part pour chaque activité exercée par une entité donnée.

65      En second lieu, la requérante fait valoir qu’elle exerçait des prérogatives de puissance publique parce qu’elle percevait des redevances au titre de la KAG pour ses services et non une rémunération de droit privé. Selon la requérante, l’avis d’imposition de la redevance était un titre exécutoire qu’elle pouvait recouvrer en recourant aux mesures de contrainte administrative.

66      Cette argumentation doit être rejetée. D’une part, il convient de constater que, en vertu de l’article 4, paragraphe 1, de l’AGTierNebG, la requérante pouvait percevoir des redevances au titre de la KAG ou une rémunération de droit privé afin de couvrir ses coûts relatifs notamment à l’élimination des matières en cause. La requérante n’était donc pas obligée par les dispositions législatives pertinentes de percevoir des redevances pour ses services, mais c’est elle qui a choisi ce procédé pour couvrir ses coûts. D’autre part, il y a lieu de relever que, en vertu des articles 7 et 8 de la KAG, une redevance est perçue en contrepartie d’un service concret et elle doit couvrir les coûts du service. Même si ce fait ne suffit pas à lui seul pour qualifier l’activité exercée d’activité économique, il constitue un indice susceptible de permettre de considérer, ainsi que l’allègue la Commission, que l’élimination des matières en cause constitue une activité économique (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 12 juillet 2012, Compass-Datenbank, C‑138/11, non encore publié au Recueil, point 39, et la jurisprudence citée).

67      Dans la mesure où la requérante fait valoir que l’élimination des matières des catégories 1 et 2 se rattache à l’exercice des prérogatives de puissance publique en raison de l’existence de l’obligation d’affiliation et d’utilisation, il convient de relever, à l’instar de la Commission, que cette obligation existe typiquement dans le cas des entreprises publiques, en vertu de l’article 106, paragraphe 1, TFUE. Or, si l’existence d’une telle obligation excluait l’application des règles de concurrence prévues dans le traité FUE, l’article 106, paragraphe 1, TFUE serait privé de son effet utile, étant donné qu’il prévoit le respect des articles 101 TFUE à 109 TFUE.

 Sur l’argumentation relative à l’absence de marché

68      La requérante fait valoir que ses activités, à savoir l’élimination des matières des catégories 1 et 2 et le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, ne constituaient pas des activités économiques en raison de l’absence de marché.

–       Sur l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sur le territoire de compétence de la requérante

69      La requérante souligne que l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sur son territoire de compétence n’était pas ouverte à la concurrence. Il appartiendrait aux collectivités territoriales de droit public compétentes de décider si elles accomplissent leurs missions de service public en collaborant les unes avec les autres en excluant l’existence d’un marché ou si elles ouvrent un marché à cette fin. L’association des collectivités territoriales responsables de l’élimination en Rhénanie-Palatinat au sein de la requérante ne constituerait pas une solution de type interne au sens de l’arrêt de la Cour du 18 novembre 1999, Teckal (C‑107/98, Rec. p. I‑8121), mais un auto-accomplissement étatique d’une mission donnée. S’il en était autrement, l’on serait en présence d’une contrainte de privatisation. Selon la requérante, la création d’une association vise à permettre la fourniture de services en commun avec d’autres pouvoirs adjudicateurs communaux dans le cadre d’une forme de collaboration communale autorisée par la KomZG ou, en d’autres termes, par le regroupement de contributions personnelles. Le Bundesverwaltungsgericht, qui se serait référé à cet égard à l’arrêt de la Cour du 9 juin 2009, Commission/Allemagne (C‑480/06, Rec. p. I‑4747, point 45), aurait également constaté, dans son arrêt du 16 décembre 2010, point 16 supra, que le marché n’était pas ouvert en ce qui concerne l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sur son territoire de compétence. L’absence de marché serait confirmée par le fait qu’un investisseur privé n’exercerait jamais cette activité dans le respect des conditions-cadres prévues par la loi. En effet, selon ces conditions-cadres, il existerait une obligation d’affiliation et d’utilisation pour les matières des catégories 1 et 2 sur son territoire de compétence. En outre, les redevances ne pourraient servir à réaliser un excédent, la perception de redevances étant soumise au principe de la couverture des coûts.

70      En premier lieu, il y a lieu de rejeter l’argument selon lequel la requérante ne constituait pas une entreprise en raison du fait que les collectivités territoriales compétentes auraient décidé d’accomplir leurs missions de service public en collaborant les unes avec les autres en excluant l’existence d’un marché. En effet, en ce qui concerne l’application éventuelle des règles de concurrence, il convient de distinguer entre l’hypothèse où l’État agit en exerçant l’autorité publique et celle où il exerce des activités économiques de caractère industriel ou commercial consistant à offrir des biens ou des services sur le marché. À cet égard, il n’importe pas que l’État agisse directement par le biais d’un organe faisant partie de l’administration publique ou par le biais d’une entité qu’il a investie de droits spéciaux ou exclusifs (voir arrêts Diego Calì & Figli, point 56 supra, points 16 et 17, et Compass-Datenbank, point 66 supra, point 35, et la jurisprudence citée). Le fait que l’élimination des matières des catégories 1 et 2 est fournie par une association des collectivités territoriales publiques sous forme de collaboration communale ne saurait donc permettre d’exclure que la requérante exerçait des activités économiques sur un marché, comme l’affirme la Commission. Contrairement à ce qu’allègue la requérante, cette considération n’entraîne aucunement une contrainte de privatisation. En effet, rien ne permet de considérer que la requérante en tant que collectivité publique en vertu de l’article 2, paragraphe 1, de la KomZG ne pouvait pas exercer des activités économiques sur un marché.

71      En outre, ainsi que l’a constaté la Commission au considérant 147 de la décision attaquée, il existait également un marché pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2. Le fait que la requérante était, sur son territoire de compétence, la seule à être compétente pour éliminer les matières des catégories 1 et 2 n’exclut pas l’existence d’un marché. En effet, d’une part, si un tel droit exclusif excluait l’existence d’un marché, l’article 106, paragraphe 1, TFUE serait privé de son effet utile, étant donné qu’il prévoit le respect des articles 101 TFUE à 109 TFUE notamment pour les entreprises auxquelles les États membres ont accordé des droits exclusifs (voir point 67 ci-dessus). D’autre part, l’existence d’un marché pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2 découle du fait que, en Hesse du Nord et en Hesse centrale, les collectivités publiques compétentes ont chargé un soumissionnaire d’effectuer cette activité dans le cadre d’un appel d’offres et que, dans d’autres régions d’Allemagne, l’élimination de ces matières est également effectuée par des entreprises privées telles que les parties intervenantes.

72      À cet égard, s’agissant de l’argument relatif à l’arrêt Teckal, point 69 supra, il convient de relever que la Commission n’a pas conclu à l’existence d’un marché sur la base de cet arrêt, ainsi qu’il ressort du considérant 148 de la décision attaquée. En effet, en ce qui concerne les effets de cet arrêt, la Commission a seulement constaté audit considérant que le droit de l’Union, tout comme le droit national, laissait aux collectivités territoriales chargées de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 le choix de trouver un soumissionnaire sur le marché à travers une procédure de marché public et de lui confier un mandat ou d’assurer elles-mêmes l’élimination dans le cadre d’une solution de type interne au sens de l’arrêt Teckal, point 69 supra. En outre, elle a considéré que, dans le cas d’une attribution de marché de type interne, l’autorité publique fournissait le service elle-même, mais faisait appel pour ce faire à un autre organisme juridiquement indépendant.

73      Par ailleurs, la Cour a déjà dit pour droit que le fait qu’un organe exerçant des activités économiques de caractère industriel ou commercial fût intégré dans l’administration de l’État avec lequel il se confondait dans une même personne juridique n’empêchait pas l’existence des relations financières entre l’État et cet organe. En effet, par le moyen d’allocations de fonds budgétaires, l’État dispose, par définition, du pouvoir d’exercer une influence sur la gestion économique de l’entreprise, permettant de compenser des pertes d’exploitation et de mettre à la disposition de l’entreprise de nouveaux fonds, et peut ainsi permettre à celle-ci de poursuivre une exploitation en dehors de règles d’une gestion commerciale normale (arrêt de la Cour du 16 juin 1987, Commission/Italie, 118/85, Rec. p. 2599, point 13).

74      En deuxième lieu, s’agissant de l’argument selon lequel le Bundesverwaltungsgericht, dans son arrêt du 16 décembre 2010, point 16 supra, aurait également constaté que le marché n’était pas ouvert en ce qui concerne l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sur le territoire de compétence de la requérante, il convient de relever que celui-ci a conclu, aux points 38 et 39 de son arrêt, à l’absence de marché en raison du fait que l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sur le territoire de compétence de la requérante constituait une mission relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique, ce qui exclurait l’ouverture d’un marché. Or, il a déjà été constaté que l’argumentation de la requérante ne démontre pas que l’élimination des matières des catégories 1 et 2 se rattachait à l’exercice des prérogatives de puissance publique (voir point 62 ci-dessus). La simple référence à l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht, point 16 supra, ne fournit aucun autre élément permettant de remettre en cause cette constatation.

75      En ce qui concerne, à cet égard, l’arrêt Commission/Allemagne, point 69 supra, il importe de relever que, selon le point 31 de cet arrêt, le recours dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt ne portait que sur la question de savoir si le contrat passé entre les services de voirie de la ville de Hambourg (Allemagne) et quatre arrondissements voisins et destiné à assurer la mutualisation du traitement de leurs déchets relevait du champ d’application de la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (JO L 209, p. 1). En revanche, ce recours ne concernait pas le contrat par lequel devaient être fixées les relations entre les services de voirie de la ville de Hambourg et l’exploitant de l’installation de traitement des déchets. Au point 45 de cet arrêt, la Cour a notamment rappelé qu’une autorité publique peut accomplir les tâches d’intérêt public qui lui incombent par ses propres moyens, sans être obligée de faire appel à des entités externes n’appartenant pas à ses services, et qu’elle peut aussi le faire en collaboration avec d’autres autorités publiques. Or, en l’espèce, la Commission n’a pas remis en cause l’absence d’application de procédures de marché public lors du transfert des tâches à la requérante, en tant qu’association de droit public, par les collectivités territoriales publiques compétentes. En revanche, elle a constaté l’existence d’aides d’État illégales sous la forme de contributions versées par ces collectivités à la requérante, qui est d’ailleurs, également selon le point 25 de l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht, point 16 supra, une entreprise publique.

76      En troisième lieu, il y a lieu de rejeter l’argument selon lequel l’absence de marché est confirmée par le fait qu’un investisseur privé n’exercerait jamais l’activité de la requérante dans le respect des conditions-cadres prévues par la loi. En effet, la question de savoir si les activités en cause exercées par la requérante avaient un caractère économique ne dépend pas du fait qu’un investisseur privé est prêt à les exercer sous les mêmes conditions (voir, en ce sens, arrêt Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig/Commission, point 51 supra, point 50). En outre, il y a lieu de constater que l’article 8, paragraphe 1, de la KAG, selon lequel les entreprises économiques ne sont pas en droit de réaliser un excédent au profit du budget des collectivités territoriales communales lorsqu’elles accomplissent des missions dans le cadre de l’autonomie de gestion ou qu’il existe une obligation d’affiliation ou d’utilisation, invoqué par la requérante, ne s’applique, en vertu de l’article 1er de la KAG, qu’à la perception de redevances par ces collectivités. Or, la requérante n’a pas soutenu que les entreprises privées étaient en droit de percevoir des redevances pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2.

77      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter l’argumentation de la requérante selon laquelle l’élimination des matières des catégories 1 et 2 ne constituait pas une activité économique en raison de l’absence de marché.

–       Sur le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie

78      La requérante fait valoir que le règlement n° 1069/2009 prévoit l’obligation pour les États membres de prendre des mesures de précaution en cas de survenance d’épizooties. La décision concernant la manière de prévoir une réserve de capacités en cas d’épizootie, notamment sous la forme de surcapacités, relèverait de la seule compétence de ses membres, ainsi que l’aurait constaté le Bundesverwaltungsgericht dans son arrêt du 16 décembre 2010, point 16 supra. Son obligation de prévoir une surcapacité en aménageant des capacités non utilisées supplémentaires, d’une part, ainsi que le financement de principe de ces surcapacités par le biais de contributions, d’autre part, qui auraient été imposés par ses membres sous la forme d’une disposition de droit public après une évaluation politique complexe, constitueraient un indice du caractère de prérogative de puissance publique du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie. La gestion d’épizooties serait dans l’intérêt de la société dans son ensemble.

79      En premier lieu, il convient d’examiner l’argumentation de la requérante selon laquelle le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie n’a pas de caractère économique dès lors que les États membres sont obligés de prendre des mesures de précaution en cas de survenance d’épizootie et selon laquelle la décision concernant la manière de prévoir une telle réserve relève de la seule compétence des membres de la requérante, après une évaluation politique complexe.

80      La Commission conteste cette argumentation et fait valoir que, avant la modification des statuts de la requérante en 2010, il n’existait pas d’acte régalien contraignant la requérante à maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie. En outre, elle souligne que, même si les membres de la requérante étaient libres de fixer, d’une manière régalienne, les capacités inutilisées à tenir à disposition pour éliminer les carcasses, cela n’impliquerait pas que la mise en œuvre de cette décision par la requérante était également régalienne.

81      Afin de démontrer l’existence d’une obligation de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie, également avant la modification des statuts de la requérante, cette dernière se réfère à une décision de son assemblée générale, au considérant 20 du règlement n° 1069/2009 ainsi qu’aux dispositions nationales.

82      Sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la décision de l’assemblée générale de la requérante ni sur le considérant 20 du règlement n° 1069/2009, il convient de relever que la requérante était, en tout état de cause, tenue de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie avant la modification de ses statuts en vertu des dispositions nationales. En effet, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la TierNebG, les collectivités publiques compétentes selon le droit du Land étaient tenues de procéder à l’élimination et à la transformation des matières des catégories 1 et 2. Ainsi qu’il ressort également de l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, cette disposition doit être comprise en ce sens qu’elle oblige ces collectivités publiques à éliminer non seulement la quantité de matières des catégories 1 et 2 reçue en temps normal, mais également la quantité plus importante de ces matières reçue en cas d’épizootie. L’obligation de transformation et d’élimination des matières des catégories 1 et 2 inclut l’obligation de mettre à disposition des capacités d’élimination suffisantes.

83      Toutefois, ainsi que l’allègue la Commission, il ne résulte pas d’une telle obligation que sa mise en œuvre par la requérante constitue une activité relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique. En effet, il a déjà été constaté que seul le fait de s’assurer de la transformation et de l’élimination relève donc de l’autorité elle-même et constitue une mission relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique (voir point 59 ci-dessus). Par conséquent, si le fait de s’assurer du maintien d’une réserve de capacités afin que, à tout moment, l’élimination des matières des catégories 1 et 2 puisse être correctement effectuée constitue une activité se rattachant à l’exercice des prérogatives de puissance publique, tel n’est pas le cas en ce qui concerne la mise en œuvre du maintien de la réserve elle-même.

84      À cet égard, il convient de relever, ainsi que l’allègue la Commission, que la mise en œuvre du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie ne peut être dissociée de l’élimination des matières des catégories 1 et 2. Le maintien d’une telle réserve sert seulement à s’assurer que, à tout moment, l’élimination complète de ces matières puisse être effectuée. Le Bundesverwaltungsgericht a également constaté un tel lien étroit. En effet, il a considéré, dans son arrêt du 16 décembre 2010, point 16 supra, que, en vertu du droit national, l’obligation des collectivités publiques d’éliminer les matières des catégories 1 et 2 devait être comprise en ce sens qu’elle ne concernait pas seulement la quantité de matières de ces catégories reçue en temps normal, mais également la quantité plus importante desdites matières reçue en cas d’épizootie (voir point 82 ci-dessus). Il s’ensuit que, si l’élimination des matières des catégories 1 et 2 constitue une activité économique, tel est également le cas du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie.

85      Cette considération est corroborée par la jurisprudence. En effet, la Cour a déjà dit pour droit qu’il n’y a pas lieu de dissocier l’activité d’achat du produit de l’utilisation ultérieure qui en est faite aux fins d’apprécier la nature de cette activité d’achat et que le caractère économique ou non de l’utilisation ultérieure du produit acheté détermine nécessairement le caractère de l’activité d’achat (arrêt de la Cour du 11 juillet 2006, FENIN/Commission, C‑205/03 P, Rec. p. I‑6295, point 26). En outre, le Tribunal a déjà jugé qu’il n’y a pas lieu de dissocier l’activité consistant à construire ou à agrandir une infrastructure de l’utilisation ultérieure qui en est faite et que le caractère économique ou non de l’utilisation ultérieure de l’infrastructure construite détermine nécessairement le caractère de l’activité d’extension (arrêt du Tribunal du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen e.a./Commission, T‑443/08 et T‑455/08, Rec. p. II‑1311, point 95).

86      Par conséquent, s’il est vrai que la requérante était obligée de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie, cela n’implique pas que la mise en œuvre de cette obligation par la requérante se rattachait à l’exercice des prérogatives de puissance publique.

87      En deuxième lieu, s’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle le financement de principe du maintien d’une telle réserve par le biais de contributions, qui aurait été décidé par ses membres, constituait un indice du caractère de prérogative de puissance publique, il convient de relever que celle-ci engendre un cercle vicieux illégal, car la requérante déduit de l’existence de ce financement décidé par ses membres que ce dernier était légal.

88      En troisième lieu, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie se rattache à l’exercice des prérogatives de puissance publique parce qu’il ferait partie de la gestion de crises et serait donc assuré dans l’intérêt de la société dans son ensemble. En effet, s’il est vrai, ainsi qu’il ressort du considérant 20 du règlement n° 1069/2009, que cette réserve est maintenue par mesure de précaution, il n’en demeure pas moins qu’il ressort du considérant 1 et de l’article 1er de ce règlement que la finalité tant de l’activité d’élimination que de celle du maintien d’une réserve est d’assurer la protection de la santé publique et de la santé animale. Les deux activités en cause sont donc assurées dans l’intérêt de la société dans son ensemble. Selon la jurisprudence citée au point 56 ci-dessus, cette finalité des activités en cause ne permet cependant pas de conclure que ces activités sont rattachées à l’exercice des prérogatives de puissance publique, étant donné que les critères pertinents pour qualifier une activité sont sa nature, son objet et les règles auxquelles elle est soumise.

89      Au vu de ce qui précède, l’argumentation de la requérante selon laquelle le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie ne constituait pas une activité économique doit être rejetée.

90      Il s’ensuit que la Commission a, à juste titre, considéré que la requérante constituait une entreprise dans la mesure où elle effectuait l’élimination des matières des catégories 1 et 2 et le maintien d’une réserve des capacités en cas d’épizootie.

91      Le premier moyen doit donc être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, relatif à l’absence d’avantage économique et à l’existence d’un SIEG

92      Ce moyen est composé de trois branches. La première est tirée du fait que les versements de contributions ne procuraient aucun avantage économique réel pour la requérante. Les deuxième et troisième branches sont invoquées à titre subsidiaire au cas où le Tribunal considérerait que l’élimination des matières des catégories 1 et 2 ainsi que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie ne constituaient pas des activités relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique. Dans le cadre de la deuxième branche, la requérante fait valoir que la Commission a eu tort de ne pas admettre l’existence d’un SIEG. La troisième branche est tirée d’une erreur de droit dans l’application des critères posés par l’arrêt Altmark, point 21 supra.

 Sur la première branche, tirée de l’absence d’avantage économique réel

93      La requérante fait valoir que les contributions en cause ne lui procuraient aucun avantage économique parce qu’elles n’auraient compensé que les frais résultant de la taille des installations. Cette dernière aurait été déterminée par une décision politique de ses membres, qui seraient donc tenus d’en supporter les conséquences. Elle n’aurait donc pas disposé de ressources provenant des contributions qui lui auraient permis de procéder à un éventuel subventionnement croisé de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 en Hesse du Nord et en Hesse centrale et des matières de la catégorie 3. Elle ajoute, en outre, que, à supposer même qu’elle n’ait pas supporté de coûts nets liés au maintien de la réserve en cas d’épizootie, il n’y a pas eu de subventionnement croisé, ainsi qu’il résulterait de l’arrêt de la Cour du 3 juillet 2003, Chronopost e.a./Ufex e.a. (C‑83/01 P, C‑93/01 P et C‑94/01 P, Rec. p. I‑6993, point 40).

94      Il y a lieu de relever que, dans le cadre de la présente branche, la requérante a présupposé qu’elle exerçait des activités se rattachant à l’exercice des prérogatives de puissance publique (voir point 92 ci-dessus). Sur cette base, elle fait valoir, en substance, que les contributions en cause ne servaient qu’à financer les coûts occasionnés par ces activités et qu’elles ne subventionnaient pas des activités économiques. Or, ainsi qu’il a déjà été constaté dans le cadre de l’examen du premier moyen, tant l’élimination des matières des catégories 1 et 2 que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie constituaient des activités économiques. En outre, au soutien de ce moyen, la requérante n’a pas démontré que l’assainissement des sites contaminés, pour lequel, selon elle, une partie des contributions en cause a été utilisée, constituait une activité qui se rattachait à l’exercice des prérogatives de puissance publique (voir, à cet égard, points 255 à 257 ci-après). Dès lors, étant donné que les contributions en cause ne peuvent avoir servi qu’à compenser les coûts occasionnés par l’exercice d’activités économiques et non par l’exercice de prérogatives de puissance publique, la présente branche ne saurait être accueillie.

95      En tout état de cause, il y a lieu de relever que l’argumentation de la requérante avancée dans le cadre de la présente branche n’est pas fondée.

96      S’agissant d’une appréciation de faits économiques complexes, la Commission dispose d’une large marge d’appréciation. Il s’ensuit que le contrôle que le Tribunal est appelé à opérer sur l’appréciation effectuée par la Commission doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, Rec. p. I‑7763, point 66, et la jurisprudence citée).

97      En premier lieu, il y a lieu de relever que l’argumentation de la requérante ne démontre pas que le constat dressé par la Commission, aux considérants 239 à 272 de la décision attaquée, d’un subventionnement croisé est entaché d’une erreur manifeste. En effet, la requérante s’appuie sur le rapport d’une société d’experts-comptables datant du 5 juillet 2012. Or, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, la légalité d’une décision en matière d’aides doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir arrêt de la Cour du 26 septembre 1996, France/Commission, C‑241/94, Rec. p. I‑4551, point 33, et la jurisprudence citée). Le rapport en cause datant du 5 juillet 2012, la Commission ne pouvait pas en disposer au moment de l’adoption de la décision attaquée le 25 avril 2012. En outre, il convient de relever que la requérante se borne à rappeler les conclusions de ce rapport sans indiquer ce qui, dans celui-ci, démontrerait la présence d’erreurs dans la décision attaquée. La simple référence audit rapport, annexé à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de fait et de droit dans la requête (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 29 novembre 1993, Koelman/Commission, T‑56/92, Rec. p. II‑1267, point 21, et la jurisprudence citée).

98      En second lieu, il y a lieu de rejeter l’argumentation de la requérante selon laquelle, à supposer même qu’elle n’ait pas supporté de coûts nets du fait du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, il n’y a pas eu de subventionnement croisé, ce qui résulterait de l’arrêt Chronopost e.a./Ufex e.a., point 93 supra.

99      En effet, premièrement, à supposer que la requérante n’ait pas supporté de coûts nets du fait du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, les contributions en cause ont nécessairement dû servir à compenser des coûts résultant d’une activité économique et, par conséquent ont dû alléger des charges qui normalement auraient dû grever le budget de la requérante en tant qu’entreprise. Ainsi que l’a indiqué la requérante lors de l’audience, les contributions en cause n’ont pas servi à financer l’élimination des matières des catégories 1 et 2. En ce qui concerne la situation avant la modification des statuts de la requérante, il convient de constater que les contributions versées n’étaient, en vertu de l’article 9 de ces statuts, pas affectées à un usage précis, mais servaient à couvrir globalement ses pertes.

100    Deuxièmement, ainsi que l’allègue la Commission, l’arrêt Chronopost e.a./Ufex e.a., point 93 supra, n’est pas totalement transposable au cas d’espèce, étant donné que l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt ne portait pas sur la question de savoir si une aide avait été accordée à l’entreprise à laquelle appartenait l’infrastructure en question, mais à une autre entreprise, qui utilisait cette infrastructure.

101    Troisièmement, l’argumentation de la requérante ne démontre pas que les constats dressés par la Commission aux considérants 250 à 263 de la décision attaquée, relatifs à l’existence de pertes liées à l’élimination des matières des catégories 1 et 2 en Hesse du Nord et en Hesse centrale depuis 2009 et à l’élimination des matières de la catégorie 3, sont entachés d’une inexactitude de fait ou d’une erreur manifeste d’appréciation. En effet, ni les comptes annuels de 2009 et de 2010, ni la liste reprenant le détail des dépenses et des revenus pour ces années, ni le calcul des redevances pour l’année 2010, auxquels la requérante fait référence au soutien de son argumentation, n’ont été présentés à la Commission pendant la procédure administrative. Or, il a déjà été rappelé (voir point 97 ci-dessus) que la légalité d’une décision en matière d’aides doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée. En outre, la requérante ne conteste pas que le taux de rémunération des fonds propres de 6,5 % appliqué dans le calcul des rémunérations perçues pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2 en Hesse du Nord et en Hesse centrale n’était pas suffisant pour couvrir les intérêts effectivement échus liés à ses prêts bancaires.

102    Au vu de ce qui précède, la première branche du deuxième moyen doit être rejetée.

 Sur la deuxième branche, tirée d’une erreur de droit relative à l’existence d’un SIEG

103    La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 107, paragraphe 1, TFUE et l’article 106, paragraphe 2, TFUE en considérant dans la décision attaquée que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie ne pouvait être qualifié de SIEG par les autorités allemandes.

104    Il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, les États membres disposent d’un large pouvoir d’appréciation quant à la définition de ce qu’ils considèrent comme un SIEG et que, par conséquent, la définition de ces services par un État membre ne peut être remise en question par la Commission qu’en cas d’erreur manifeste (voir arrêts du Tribunal du 15 juin 2005, Olsen/Commission, T‑17/02, Rec. p. II‑2031, point 216, et du 22 octobre 2008, TV 2/Danmark e.a./Commission, T‑309/04, T‑317/04, T‑329/04 et T‑336/04, Rec. p. II‑2935, point 101, et la jurisprudence citée). En effet, en l’absence d’une réglementation de l’Union harmonisée en la matière, la Commission n’est pas habilitée à se prononcer sur l’étendue des missions de service public incombant à l’exploitant public, à savoir le niveau des coûts liés à ce service, ni sur l’opportunité des choix politiques pris, à cet égard, par les autorités nationales, ni sur l’efficacité économique de l’exploitant public (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 27 février 1997, FFSA e.a./Commission, T‑106/95, Rec. p. II‑229, point 108, et du 1er juillet 2010, M6 et TF1/Commission, T‑568/08 et T‑573/08, Rec. p. II‑3397, point 139, et la jurisprudence citée).

105    Cette prérogative de l’État membre concernant la définition des SIEG est confirmée par l’absence tant de compétence spécialement attribuée à l’Union que de définition précise et complète de la notion de SIEG en droit de l’Union. En effet, la détermination de la nature et de la portée d’une mission de SIEG dans des domaines d’action particuliers, qui soit ne relèvent pas de la compétence de l’Union, au sens de l’article 5, paragraphe 1, TUE, soit sont fondés sur une compétence de l’Union seulement limitée ou partagée, au sens de l’article 5, paragraphe 2, TUE, comme le secteur de la santé publique en vertu de l’article 168 TFUE, reste, en principe, du ressort des États membres. Il s’ensuit que la détermination d’obligations de SIEG dans ce contexte relève également, à titre principal, de la compétence des États membres. Cette répartition des compétences est, en outre, reflétée, d’une manière générale, par l’article 14 TFUE, selon lequel, eu égard à la place qu’occupent les SIEG parmi les valeurs communes de l’Union ainsi qu’au rôle qu’ils jouent dans la promotion de la cohésion sociale et territoriale de l’Union, l’Union et ses États membres, chacun dans les limites de leurs compétences respectives et dans les limites du champ d’application des traités, veillent à ce que ces services fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions, notamment économiques et financières, qui leur permettent d’accomplir leurs missions (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 février 2008, BUPA e.a./Commission, T‑289/03, Rec. p. II‑81, point 167).

106    Pour autant, le pouvoir de définition des SIEG par l’État membre n’est pas illimité et ne peut être exercé de manière arbitraire aux seules fins de faire échapper un secteur particulier à l’application des règles de concurrence (arrêt BUPA e.a./Commission, point 105 supra, point 168). Pour pouvoir être qualifié de SIEG, le service en cause doit revêtir un intérêt économique général qui présente des caractères spécifiques par rapport à celui que revêtent d’autres activités de la vie économique (arrêts de la Cour du 10 décembre 1991, Merci convenzionali porto di Genova, C‑179/90, Rec. p. I‑5889, point 27, et du 17 juillet 1997, GT-Link, C‑242/95, Rec. p. I‑4449, point 53).

107    En premier lieu, s’agissant du critère d’appréciation appliqué par la Commission au cas d’espèce, la requérante fait valoir que la Commission ne s’est pas limitée au contrôle de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation.

108    La Commission rétorque qu’il ne lui incombait pas de prouver l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation dans la décision attaquée, mais qu’elle a néanmoins prouvé l’existence d’une telle erreur en l’espèce. Ainsi qu’elle aurait expliqué aux considérants 164, 166 et 176 de la décision attaquée, le financement de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 serait régi par le droit de l’Union de sorte que l’État membre n’aurait plus de marge de manœuvre. Elle se réfère, à cet égard, aux lignes directrices de la Communauté concernant les aides d’État liées aux tests EST, aux animaux trouvés morts et aux déchets d’abattoirs ainsi qu’aux lignes directrices de la Communauté concernant les aides d’État dans le secteur agricole et forestier 2007-2013. Le principe du pollueur-payeur énoncé dans ces lignes directrices engloberait aussi les coûts des mesures préventives.

109    S’il est vrai que le règlement n° 1069/2009 prévoit l’obligation de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie (voir point 82 ci-dessus), il ne traite pas de l’organisation et du financement du maintien d’une telle réserve. Il ressort également du considérant 10 de la décision attaquée que ce règlement ne comprend pas de dispositions concernant l’organisation économique de l’élimination des matières des catégories 1 et 2.

110    Contrairement à ce qu’allègue la Commission, l’existence des lignes directrices en cause ne suffit pas pour harmoniser la question de l’organisation et du financement d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, de sorte que l’État membre n’aurait plus un large pouvoir d’appréciation quant à la définition des SIEG. Ces lignes directrices ne constituent pas des dispositions du législateur de l’Union dans le cadre desquelles ce dernier a pris en considération les intérêts généraux évoqués par les États membres (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 mai 2000, Commission/Belgique, C‑206/98, Rec. p. I‑3509, point 45). En revanche, il s’agit d’orientations pour l’exercice des pouvoirs d’appréciation de la Commission qui contiennent les critères qu’elle compte appliquer. Les lignes directrices, que la Commission peut abroger ou modifier si les circonstances l’imposent, sont motivées par le souci de suivre une politique que la Commission a déterminée. Si la Commission apprécie une aide à la lumière de lignes directrices qu’elle a préalablement adoptées, elle ne saurait être considérée comme dépassant les limites de son pouvoir d’appréciation ou y renonçant (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 décembre 2008, Kronoply et Kronotex/Commission, T‑388/02, non publié au Recueil, point 143, et la jurisprudence citée). L’existence des lignes directrices en cause ne saurait donc limiter le large pouvoir d’appréciation des États membres quant à la définition des SIEG.

111    S’agissant, dans ce contexte, de l’argument de la Commission selon lequel l’article 14 TFUE, qui reflète, de manière générale, la répartition des compétences entre l’Union et les États membres à cet égard, s’applique explicitement sans préjudice du droit des aides État, il convient de relever, d’une part, que le service en cause relève du secteur de la santé publique et, d’autre part, que le Tribunal a déjà dit pour droit que les États membres disposent également d’un large pouvoir d’appréciation quant à la définition des SIEG (arrêt BUPA e.a./Commission, point 105 supra, point 166).

112    Par ailleurs, s’il est vrai que les lignes directrices de la Communauté concernant les aides d’État dans le secteur agricole et forestier 2007-2013 contiennent un chapitre relatif à la gestion des risques et des crises, dans lequel la Commission a déclaré le principe du pollueur-payeur applicable, celles-ci ne contiennent aucune indication explicite concernant l’organisation et le financement d’une réserve de capacités en cas d’épizootie. Les lignes directrices de la Communauté concernant les aides d’État liées aux tests EST, aux animaux trouvés morts et aux déchets d’abattoirs ne contiennent même pas un tel chapitre. S’il est vrai que ces lignes directrices prévoient, au point 37, sous b), que le principe du pollueur-payeur établit une responsabilité primaire des producteurs de déchets de se charger de leur enlèvement de manière appropriée et de financer les coûts qui y sont liés, il importe de constater que la Commission a inclus cette considération dans ces lignes directrices, ainsi qu’il ressort du point 37 de celles-ci, en vue de déterminer sa politique future concernant les déchets d’abattoirs.

113    Par conséquent, en l’absence d’une réglementation de l’Union harmonisée en la matière, la Commission était limitée au contrôle de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation. Il convient donc d’examiner si elle a démontré l’existence d’une telle erreur dans la décision attaquée.

114    La Commission fait valoir qu’elle a prouvé dans la décision attaquée l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation. Selon elle, au considérant 186 de cette décision, elle a indiqué que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie est une condition pour assurer l’élimination des matières des catégories 1 et 2 également en cas d’épizootie. Il résulterait des considérants 156 à 179 de la décision attaquée auxquels le considérant 189 de cette décision fait référence que, d’une part, qualifier de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie serait en contradiction avec l’arrêt GEMO, point 23 supra, et avec le principe du pollueur-payeur et, d’autre part, le maintien d’une telle réserve constituerait un service commercial qui ne profite qu’à des entreprises.

115    À cet égard, s’il est vrai que la Commission n’a pas expressément indiqué, dans la décision attaquée, si l’erreur de la République fédérale d’Allemagne qu’elle a constatée était simple ou manifeste, il n’en demeure pas moins qu’il ressort des considérants 156 à 179 de cette décision, auxquels le considérant 189 de cette décision fait explicitement référence, que, selon la Commission, cette erreur était manifeste. En effet, tout d’abord, il résulte du considérant 159 de la décision attaquée que la Commission était consciente du fait que, en l’absence d’une réglementation de l’Union harmonisée en la matière, les États membres disposaient, quant à la question de savoir quels types de prestations devaient être considérés comme des SIEG, d’un important pouvoir d’appréciation et qu’elle devait donc démontrer, dans un tel cas, l’existence d’une erreur manifeste. Ensuite, il ressort des considérants 160 à 175 de la décision attaquée que la Commission a considéré, sans tenir compte du fait que, selon elle, le secteur en question était régi par des dispositions du droit de l’Union, que le service en cause ne pouvait être qualifié de SIEG en raison de l’arrêt GEMO, point 23 supra, du principe du pollueur-payeur et du fait que le service en cause ne se distinguait pas fondamentalement, par son contenu, d’autres activités de la vie économique. Ce n’est qu’au considérant 176 de la décision attaquée qu’elle a mentionné la prétendue harmonisation du secteur en cause en tant que raison qui confirmerait sa considération selon laquelle le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie ne pouvait être qualifié de SIEG. La Commission a donc conclu à l’existence d’une erreur des autorités allemandes, qui était suffisante selon elle à la lumière des principes cités au considérant 159 de la décision attaquée pour nier l’existence d’un SIEG, sans tenir compte d’une prétendue harmonisation du secteur en cause. Une telle erreur ne saurait avoir, selon le raisonnement suivi par la Commission, qu’un caractère manifeste.

116    Par conséquent, la Commission n’a pas commis d’erreur de droit relative au critère d’appréciation.

117    En second lieu, il convient d’examiner si, en qualifiant de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, les autorités allemandes compétentes ont effectivement commis une erreur manifeste d’appréciation.

118    Premièrement, la Commission a estimé, au considérant 189 de la décision attaquée, que, dans le cas où les capacités existantes inutilisées pour des raisons d’exploitation ne seraient pas suffisantes pour couvrir les capacités supplémentaires prescrites, et où des coûts d’investissement complémentaires naîtraient de l’obligation de maintenir de telles capacités, ces coûts devraient être en principe couverts par les redevances ou les rémunérations, en application du principe du pollueur-payeur. Elle a fait référence, à cet égard, aux considérants 156 à 185 de la décision attaquée. Au considérant 161 de cette décision, la Commission a constaté que, en vertu de l’arrêt GEMO, point 23 supra, l’ensemble des coûts de l’élimination des cadavres d’animaux et des déchets d’abattoirs devait être supporté par les éleveurs et les abattoirs, conformément au principe du pollueur-payeur. Selon le considérant 162 de la décision attaquée, la charge financière occasionnée par l’élimination de cadavres d’animaux et de déchets d’abattoirs doit être considérée comme un coût inhérent à l’activité économique des éleveurs et des abattoirs. En effet, de l’activité développée par ces entreprises résulteraient des produits et des résidus inutilisables et surtout nuisibles pour l’environnement, dont l’élimination incomberait aux responsables de leur production.

119    À cet égard, il convient de relever que l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt GEMO, point 23 supra, portait sur la question de savoir si un régime qui assurait gratuitement pour les éleveurs et les abattoirs la collecte et l’élimination de cadavres d’animaux et de déchets d’abattoirs devait être qualifié d’aide d’État. La Cour a constaté que la charge financière occasionnée par l’élimination de cadavres d’animaux et de déchets d’abattoirs devait être considérée comme un coût inhérent à l’activité économique des éleveurs et des abattoirs (point 31 de cet arrêt). En effet, de l’activité développée par ces entreprises résulteraient des produits et des résidus inutilisables et surtout nuisibles pour l’environnement, dont l’élimination incomberait aux responsables de leur production (point 32 de cet arrêt). De ce fait, une intervention des autorités publiques visant à libérer les éleveurs et les abattoirs de cette charge financière apparaîtrait comme un avantage économique susceptible de fausser la concurrence (point 33 de cet arrêt).

120    Il est vrai que, ainsi que le fait valoir la requérante, la présente affaire se distingue de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt GEMO, point 23 supra, parce que, d’une part, cette affaire ne concernait pas la question de la qualification d’un service de SIEG et, d’autre part, dans la présente affaire, la requérante recevait des redevances de la part des détenteurs de matières des catégories 1 et 2 pour l’élimination de ces matières, même si, en vertu de l’article 9, paragraphe 3, des statuts de la requérante, celle-ci aurait également pu être financée par les contributions en cause. Toutefois, il a déjà été constaté (voir point 84 ci-dessus) que la mise en œuvre du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie ne peut être dissociée de l’élimination des matières des catégories 1 et 2. Ainsi que l’a constaté la Commission au considérant 186 de la décision attaquée, le maintien d’une telle réserve permet seulement d’assurer que, à tout moment, l’élimination complète de ces matières puisse être effectuée. Au vu de ce lien étroit entre ces deux activités, il est manifeste que le principe figurant dans l’arrêt GEMO, point 23 supra, selon lequel la charge financière occasionnée par l’élimination de cadavres d’animaux et de déchets d’abattoirs doit être considérée comme un coût inhérent à l’activité économique des éleveurs et des abattoirs, s’applique également aux coûts résultant du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie.

121    En ce qui concerne le principe du pollueur-payeur, il convient de relever que ce principe a été reconnu par les États membres dans le traité FUE dans le secteur de l’environnement. Ainsi, en vertu de l’article 191, paragraphe 2, premier alinéa, TFUE, la politique de l’Union dans le domaine de l’environnement est notamment fondée sur le principe du pollueur-payeur. Certes, l’élimination des matières des catégories 1 et 2 ne concerne pas le domaine de l’environnement, mais celui de la protection de la santé publique. Ainsi, le règlement n° 1069/2009 régissant l’élimination de ces matières dans l’Union vise l’article 152, paragraphe 4, sous b), CE, qui figure sous le titre « Santé publique » du traité. Toutefois, la Cour a déjà dit pour droit que, conformément au principe du pollueur-payeur, les éleveurs et les abattoirs ne peuvent être tenus de supporter les coûts que si, par leur activité, ils ont contribué au risque de survenance d’une épizootie (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 24 juin 2008, Commune de Mesquer, C‑188/07, Rec. p. I‑4501, point 82). Il est évident que le risque de survenance d’une épizootie est inhérent à l’élevage d’animaux. En application du principe du pollueur-payeur, il est donc également manifeste que les coûts résultant du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie doivent être supportés par les éleveurs et les abattoirs.

122    Deuxièmement, s’agissant de la considération de la Commission selon laquelle le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie constitue un service commercial qui ne profite qu’à des entreprises, il convient de constater que la Commission s’est référée, aux considérants 160, 173 et 174 de la décision attaquée, auxquels le considérant 189 fait référence, à la jurisprudence selon laquelle, pour pouvoir être qualifié de SIEG, le service en cause doit revêtir un intérêt économique général qui présente des caractères spécifiques par rapport à celui que revêtent d’autres activités de la vie économique (voir point 106 ci-dessus). Selon elle, le service en cause ne se distingue pas fondamentalement, par son contenu, d’autres activités de la vie économique.

123    À cet égard, il convient de rappeler qu’il existe un lien étroit entre l’élimination des matières des catégories 1 et 2 et le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie qui sert seulement à assurer que, à tout moment, l’élimination complète de ces matières puisse être effectuée, ainsi qu’il ressort également du considérant 186 de la décision attaquée. Dès lors, étant donné qu’il est constant que l’élimination des matières des catégories 1 et 2 ne constitue pas un SIEG et que ce service ne revêt donc pas un intérêt économique général qui présente des caractères spécifiques par rapport à celui que revêtent d’autres activités de la vie économique, aucun élément ne permet de considérer qu’il en irait autrement quant au maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie.

124    En ce qui concerne l’argument selon lequel la Cour a constaté, dans son arrêt du 23 mai 2000, Sydhavnens Sten & Grus (C‑209/98, Rec. p. I‑3743, point 75), que la gestion de certains déchets pouvait faire l’objet d’un SIEG, en particulier lorsque ce service avait pour but de faire face à un problème environnemental, il convient de relever que cette considération n’exclut pas que, pour pouvoir être qualifié de SIEG, le service en cause doive revêtir un intérêt économique général qui présente des caractères spécifiques par rapport à celui que revêtent d’autres activités de la vie économique, ce qui n’est manifestement pas le cas en l’espèce.

125    Par conséquent, la Commission n’a pas violé l’article 107, paragraphe 1, TFUE et l’article 106, paragraphe 2, TFUE en considérant que, en qualifiant de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, les autorités allemandes compétentes ont commis une erreur manifeste d’appréciation.

126    La deuxième branche du présent moyen doit donc être rejetée.

127    Il convient de relever que, à supposer même que la Commission ait erronément considéré que les autorités allemandes compétentes avaient commis une erreur manifeste d’appréciation en qualifiant de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, ce fait n’entraînerait pas à lui seul l’annulation de la décision attaquée. En effet, il faudrait, pour pouvoir annuler la décision attaquée à la suite d’une telle erreur de droit de la Commission, que les versements de contributions pour le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie n’aient pas formé un avantage économique pour la requérante au sens des critères posés par l’arrêt Altmark, point 21 supra, ou que ces versements aient été compatibles avec le marché intérieur en vertu de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, ce qui sera examiné dans le cadre de la troisième branche du présent moyen et dans le cadre du quatrième moyen.

 Sur la troisième branche, tirée d’une erreur de droit relative à l’application des critères posés par l’arrêt Altmark

128    La requérante fait valoir que la Commission a erronément constaté l’existence d’un avantage économique en considérant que les quatre critères posés par l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’étaient pas satisfaits en l’espèce.

129    Il convient de rappeler que, dans l’arrêt Altmark, point 21 supra, la Cour a relevé que, dans la mesure où une intervention étatique devait être considérée comme une compensation représentant la contrepartie des prestations effectuées par les entreprises bénéficiaires pour exécuter des obligations de service public, de sorte que ces entreprises ne profitaient pas, en réalité, d’un avantage financier et que ladite intervention n’avait donc pas pour effet de mettre ces entreprises dans une position concurrentielle plus favorable par rapport aux entreprises qui leur faisaient concurrence, une telle intervention ne tombait pas sous le coup de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Cependant, pour que, dans un cas concret, une telle compensation puisse échapper à la qualification d’aide d’État, quatre critères doivent être satisfaits cumulativement (arrêt Altmark, point 21 supra, points 87 et 88).

–       Sur le premier critère posé par l’arrêt Altmark, relatif à l’exécution d’obligations de service public

130    Selon ce critère, l’entreprise bénéficiaire doit effectivement être chargée de l’exécution d’obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies (arrêt Altmark, point 21 supra, point 89).

131    Selon le considérant 152 de la décision attaquée, la Commission a distingué, aux fins de l’appréciation du premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, entre la période allant de 1979 à 2008 et celle allant de 2009 à 2011. Au considérant 153 de la décision attaquée, elle a considéré que, avant la modification des statuts de la requérante le 2 février 2010, avec effet rétroactif au 1er janvier 2009, la requérante n’était mandatée généralement que pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2. Ces statuts n’auraient défini aucune obligation particulière de mise à disposition de capacités supplémentaires en cas d’épizootie. Selon la Commission, au sens du premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, il n’existait donc aucune obligation clairement définie de mise à disposition de capacités supplémentaires. En revanche, il ressort du considérant 154 de la décision attaquée que la Commission a considéré que, depuis la modification des statuts de la requérante, il existait une obligation explicite pour cette dernière de mettre à disposition des capacités supplémentaires.

132    En premier lieu, il y a lieu de relever que, dans le cadre de la deuxième branche du présent moyen, il a déjà été constaté que la Commission a considéré à bon droit que les autorités allemandes avaient commis une erreur manifeste d’appréciation en qualifiant de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie. Étant donné qu’il n’est pas contesté par les parties que la notion d’obligation de service public visée par l’arrêt Altmark, point 21 supra, correspond à celle du SIEG tel que désigné par la décision attaquée et qu’elle ne diverge pas de celle visée à l’article 106, paragraphe 2, TFUE (voir, en ce sens, arrêt BUPA e.a./Commission, point 105 supra, point 162), il y a donc lieu de conclure que le premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait pendant la période visée par la décision attaquée.

133    En second lieu, à titre subsidiaire, étant donné qu’il ressort des considérants 152 à 154 de la décision attaquée que la Commission ne conteste pas l’existence d’une obligation explicite pour la requérante de maintenir une telle réserve depuis la modification de ses statuts, à savoir depuis le 1er janvier 2009, date à laquelle la modification a pris effet, il convient d’examiner la question de savoir si la requérante était, avant cette date, effectivement chargée de l’exécution d’une obligation de maintenir une telle réserve et si cette obligation était clairement définie.

134    La requérante fait valoir que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie constitue un SIEG qu’elle s’est vu attribuer également pour la période précédant la modification de ses statuts en vertu des dispositions de la TierNebG et de l’AGTierNebG. Selon la requérante, l’obligation d’éliminer les matières des catégories 1 et 2 incluait l’obligation de veiller à l’existence de capacités d’élimination suffisantes. Ainsi qu’il ressortirait également de l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, ces capacités n’auraient pas dû être calculées sur la seule base des besoins des exploitations en temps normal, mais elles auraient dû tenir compte des besoins dans des cas exceptionnels.

135    À cet égard, il convient de constater, ainsi que l’allègue la Commission, que ni la TierNebG ni l’AGTierNebG ne contiennent d’instructions précises sur les capacités à prévoir pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2.

136    S’agissant, plus particulièrement, de l’article 3, paragraphe 1, de la TierNebG, celui-ci dispose que les collectivités publiques compétentes selon le droit du Land sont tenues de procéder à l’élimination et à la transformation des matières des catégories 1 et 2. Or, il est vrai que cette disposition doit être comprise en ce sens qu’elle oblige ces collectivités publiques à éliminer non seulement la quantité de matières des catégories 1 et 2 reçue en temps normal, mais également la quantité plus importante de ces matières reçue en cas d’épizootie, ainsi qu’il ressort également du point 29 de l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra. En effet, l’obligation de transformer et d’éliminer les matières des catégories 1 et 2 inclut l’obligation de mettre à disposition des capacités d’élimination suffisantes (voir point 82 ci-dessus).

137    Toutefois, ni la manière d’exécuter cette obligation ni la quantité de capacités supplémentaires à maintenir, le cas échéant, par les collectivités publiques compétentes en cas d’épizootie ne ressortent de manière suffisamment claire de l’article 3, paragraphe 1, de la TierNebG. S’il est vrai que, ainsi que l’allègue la requérante, l’organisation détaillée de cette obligation peut être laissée à des organes décisionnels ultérieurs, en particulier dans un État fédéral, il n’en demeure pas moins que ce n’est qu’avec la modification des statuts de la requérante que l’obligation de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie a été clairement définie. En effet, l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante a fixé les capacités supplémentaires à mettre à disposition en cas d’épizootie à 7 110 tonnes, qui doivent être transformées sur une période de six semaines.

138    La constatation selon laquelle, dans le cadre du droit fédéral allemand, ni la manière d’exécuter l’obligation de mettre à disposition des capacités d’élimination suffisantes ni la quantité de capacités supplémentaires à maintenir, le cas échéant, par les collectivités publiques compétentes en cas d’épizootie n’ont été clairement définies est confirmée par l’application du droit fédéral dans d’autres Länder allemands. En effet, selon les observations présentées par la République fédérale d’Allemagne relatives à la décision d’ouverture, d’autres Länder allemands, qui doivent également appliquer l’article 3, paragraphe 1, de la TierNebG, n’ont pas mis à disposition de réserve explicite de capacités supplémentaires, mais se sont contentés de recourir aux capacités inutilisées pour des raisons opérationnelles en tant que réserve de capacités en cas d’épizootie.

139    Contrairement à ce qu’allègue la requérante, en tant que la Commission s’est référée, au considérant 186 de la décision attaquée, aux autres Länder allemands, elle n’a pas méconnu la jurisprudence selon laquelle la nécessité et la proportionnalité des dispositions prises en la matière ne sont pas exclues au seul motif qu’un État membre a choisi un système de protection différent de celui adopté par un autre État (voir arrêt de la Cour du 14 octobre 2004, Omega, C‑36/02, Rec. p. I‑9609, point 38, et la jurisprudence citée). En effet, d’une part, les Länder allemands n’ont pas la qualité d’État membre. D’autre part, la Commission n’a pas entrepris une comparaison de la situation dans les seize Länder allemands afin de vérifier la nécessité et la proportionnalité de la mesure en cause, mais afin de corroborer son point de vue selon lequel l’obligation de mise à disposition de capacités supplémentaires, en vertu du droit allemand fédéral, n’entraînait pas de coûts supplémentaires, puisque la capacité supplémentaire pouvait être couverte par les capacités existantes inutilisées pour des raisons d’exploitation.

140    Par ailleurs, il convient de constater que la requérante a elle-même indiqué en 2007, dans son offre émise dans le cadre de l’appel d’offres concernant l’élimination de cadavres d’animaux en Hesse, qu’elle n’envisageait pas de prévoir du personnel et des véhicules spéciaux pour les cas d’épizooties, mais qu’elle prévoyait de recourir de manière flexible aux ressources existantes ainsi qu’à des roulements différents ou plus longs.

141    Enfin, il y a lieu de rejeter l’argument selon lequel le Bundesverwaltungsgericht aurait confirmé, dans son arrêt du 16 décembre 2010, point 16 supra, que les dispositions légales concernées comportaient déjà un mandat clairement défini avant la modification des statuts de la requérante. En effet, il ressort clairement du point 23 de cet arrêt que ce dernier concerne uniquement l’exercice 2010, à savoir la situation suivant la modification des statuts de la requérante. En tout état de cause, il ressort également de l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht, point 16 supra, que, selon ce dernier, le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie n’était pas encore suffisamment défini par les dispositions légales concernées. En effet, il a considéré, au point 36 de cet arrêt, que la taille d’une réserve de capacités en cas d’épizootie devait être déterminée par une décision politique en tenant compte des exigences de rentabilité et d’économie.

142    Il s’ensuit que, avant le 1er janvier 2009, date à laquelle la modification des statuts de la requérante a pris effet, l’obligation de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie n’était pas clairement définie pour la requérante.

143    Par conséquent, à supposer même que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie constitue un service public au sens de l’arrêt Altmark, point 21 supra, le premier critère de cet arrêt n’était, en tout état de cause, pas satisfait avant le 1er janvier 2009.

144    Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur le fait que la Commission a, aux considérants 180 à 185 de la décision attaquée, considéré que le premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était, en tout état de cause, pas satisfait en raison de l’absence de nécessité des compensations pour un SIEG, il y a donc lieu de conclure que la Commission pouvait à juste titre estimer au considérant 195 de la décision attaquée que le premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait pendant la période visée par la décision attaquée.

–       Sur le deuxième critère posé par l’arrêt Altmark, relatif à l’établissement préalable des paramètres sur la base desquels est calculée la compensation

145    Selon ce critère, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente, afin d’éviter qu’elle ne comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport à des entreprises concurrentes (arrêt Altmark, point 21 supra, point 90).

146    Aux considérants 198 à 205 de la décision attaquée, la Commission a distingué la période allant de 1979 à 2008 de celle allant de 2009 à 2012. En ce qui concerne la première période, elle a constaté que le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait parce qu’il n’y aurait eu aucune méthode objective et transparente préétablie qui aurait permis de calculer les coûts des capacités supplémentaires. S’agissant de la seconde période, la Commission a constaté que, eu égard à la modification des statuts de la requérante, le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, était satisfait pour les années 2010 à 2012. En revanche, ce critère ne serait pas satisfait pour l’année 2009 dès lors que la modification des statuts de la requérante aurait été effectuée le 2 février 2010.

147    La requérante fait valoir que, dès lors que ses installations ont une capacité donnée, l’importance de la réserve de capacités en cas d’épizootie peut être déterminée en déduisant la capacité normale, à savoir la quantité de carcasses effectivement traitées, de la capacité totale de ses installations. En outre, selon la requérante, le calcul des contributions est effectué au préalable sur la base du plan de gestion de l’exercice concerné, dont les données seraient déterminées dans son règlement budgétaire.

148    À cet égard, il convient de rappeler que l’État membre dispose d’une large marge d’appréciation non seulement quant à la définition d’une mission de SIEG, mais également concernant la détermination de la compensation des coûts, qui dépend d’une appréciation de faits économiques complexes (voir, en ce sens, arrêt FFSA e.a./Commission, point 104 supra, points 99 et 100). C’est d’ailleurs précisément parce que cette détermination n’est soumise qu’à un contrôle restreint des institutions que le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, exige que les institutions soient en mesure de vérifier l’existence de paramètres objectifs et transparents, ces paramètres devant être précisés de façon à exclure tout recours abusif de l’État membre à la notion de SIEG (arrêt BUPA e.a./Commission, point 105 supra, point 214).

149    La Commission n’ayant pas remis en cause, dans la décision attaquée, le fait que le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, était satisfait pour les années 2010 à 2012, il convient donc d’examiner uniquement si les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation pour le maintien de cette réserve étaient établis au préalable, de façon objective et transparente pendant les années 1979 à 2009, à savoir pour la période précédant l’adoption de la modification des statuts de la requérante.

150    Il y a lieu de relever que ces conditions n’étaient pas remplies en raison du seul article 9 des statuts de la requérante dans sa version avant modification. En effet, cette disposition prévoyait seulement que la requérante devait recevoir de ses membres des contributions, fixées dans un règlement pour chaque exercice, dans la mesure où les recettes de la requérante ne suffisaient pas à couvrir les coûts.

151    En premier lieu, la requérante invoque son règlement budgétaire, sur la base duquel elle aurait calculé le montant des contributions nécessaires pour chaque exercice.

152    À cet égard, premièrement, il convient de relever que l’article 9 des statuts de la requérante, avant modification, prévoyait seulement que cette dernière devait recevoir de ses membres des contributions, fixées dans un règlement pour chaque exercice, dans la mesure où ses recettes ne suffisaient pas à couvrir les coûts. La requérante était donc, dans le respect de l’article 9 de ses statuts, libre de fixer le niveau des contributions.

153    Deuxièmement, il importe de relever qu’il ne ressort pas du dossier que le règlement budgétaire de la requérante contenait des paramètres objectifs et transparents pour le calcul préalable des contributions relatives au maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie. D’une part, ce règlement n’a pas été produit par les parties. D’autre part, il y a lieu de relever que, afin de satisfaire aux exigences prévues à l’article 9 des statuts de la requérante, l’établissement de tels paramètres n’était pas nécessaire. Selon cette disposition, la requérante n’était pas obligée d’affecter les contributions à certains coûts ou à certaines de ses activités, mais elle pouvait mettre en parallèle toutes ses recettes et ses dépenses. Ce faisant, les contributions n’étaient pas fixées de manière objective et transparente en tant que compensations exclusives aux fins de l’accomplissement de l’obligation de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie. En effet, l’activité de la requérante ne se limitait pas au maintien d’une telle réserve. En outre, ainsi que l’a indiqué la requérante lors de l’audience, ce n’est qu’environ 90 % des contributions versées qui ont servi au maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, tandis que le reste a servi à financer les coûts d’assainissement des sites désaffectés de Sohrschied et de Sprendlingen-Gensingen.

154    Par ailleurs, il convient de relever que, avant la modification des statuts de la requérante, le niveau de la réserve de capacités en cas d’épizootie n’était pas défini. En effet, ce n’est qu’après la modification des statuts de la requérante que l’article 10, paragraphe 2, des statuts modifiés a fixé les capacités supplémentaires à mettre à disposition en cas d’épizootie à 7 110 tonnes qui devaient être transformées sur une période de six semaines. Tel est le cas, à supposer même que des expertises aient évalué l’importance de capacités de réserve en cas d’épizootie pour différents scénarios, ainsi que l’allègue la requérante. Pour autant que la requérante affirme que le niveau de la réserve de capacités en cas d’épizootie peut être déterminé en déduisant la quantité de carcasses effectivement traitées de la capacité totale de ses installations, il convient de relever que cette détermination du niveau définitif de la réserve pour un exercice à la fin de celui-ci ne satisfait pas au critère de transparence et aurait effectivement pour conséquence la compensation a posteriori de toutes les pertes de la requérante résultant de ses activités, dont notamment l’inexploitation de ses installations.

155    La constatation selon laquelle le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait avant la modification des statuts de la requérante est confirmée par les arrêts rendus par la juridiction allemande (voir point 16 ci-dessus). En effet, le Verwaltungsgericht Trier et l’Oberverwaltungsgericht Rheinland-Pfalz ont considéré, dans leurs arrêts des 2 décembre 2008 et 24 novembre 2009, point 16 supra, que la contribution visée à l’article 9 des statuts de la requérante ne satisfaisait pas au deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra. L’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, n’a pas contredit ces considérations. D’une part, il ressort des points 12 à 23 de cet arrêt que le Bundesverwaltungsgericht a déclaré irrecevable le pourvoi contre l’arrêt de l’Oberverwaltungsgericht Rheinland-Pfalz du 24 novembre 2009, point 16 supra, pour les années 2005 à 2009 et qu’il a donc seulement examiné l’exercice 2010. Dès lors, l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, ne concernait pas la situation juridique précédant la modification des statuts de la requérante. D’autre part, le point 33 de cet arrêt peut être compris en ce sens que, également selon le Bundesverwaltungsgericht, le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait avant la modification de ces statuts. En effet, audit point, le Bundesverwaltungsgericht a considéré que, en raison de la modification de ces statuts, il était clair que la contribution litigieuse servait uniquement à financer les coûts occasionnés par l’exécution de l’obligation de service public par la requérante qui n’étaient pas couverts par les redevances.

156    En deuxième lieu, la requérante fait valoir, en se référant à l’arrêt BUPA e.a./Commission, point 105 supra (point 214), qu’une certaine marge d’appréciation doit être conférée aux autorités nationales pour fixer la compensation versée pour couvrir les coûts d’un SIEG. Toutefois, s’il est vrai que l’État membre dispose d’une large marge d’appréciation concernant la détermination de la compensation des coûts, qui dépend d’une appréciation de faits économiques complexes (voir point 148 ci-dessus), en l’espèce, l’établissement des paramètres objectifs et transparents pour cette détermination fait justement défaut.

157    En troisième lieu, la requérante se réfère à l’arrêt TV 2/Danmark e.a./Commission, point 104 supra (point 227). Selon cet arrêt, la fixation du montant de la compensation dans un budget annuel serait une condition suffisante pour que le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, soit satisfait. Toutefois, le Tribunal s’étant borné à déclarer, au point 227 de cet arrêt, que le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’exigeait pas un budget annuel établissant un lien entre la compensation et la production, il ne saurait en être déduit que, en l’absence de paramètres objectifs et transparents, la fixation du montant de la compensation dans un budget annuel suffit pour que ce critère soit satisfait.

158    Par conséquent, ainsi que l’a constaté la Commission aux considérants 198 à 205 de la décision attaquée, le deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait entre 1979 et 2009.

–       Sur le troisième critère posé par l’arrêt Altmark, relatif à la nécessité du niveau des contributions

159    Selon ce critère, la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes s’y rapportant ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations (arrêt Altmark, point 21 supra, point 92).

160    En l’espèce, il est constant qu’il n’est pas question de bénéfice raisonnable étant donné que la requérante n’était pas en droit de réaliser un bénéfice.

161    Aux considérants 206 à 228 de la décision attaquée, la Commission a considéré que le troisième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait.

162    Tout d’abord, au considérant 207 de la décision attaquée, elle a indiqué s’être appuyée sur la méthode du coût net évité. Ainsi qu’il ressortirait du point 27 de l’encadrement SIEG, cette méthode consisterait à calculer le coût net nécessaire, effectif ou escompté, pour exécuter les obligations de service public comme étant la différence entre le coût net supporté par le prestataire lorsqu’il exécute ces obligations et le coût ou bénéfice net du même prestataire lorsqu’il ne les exécute pas. Au considérant 208 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que, selon elle, l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante établissait en ce qui concerne la taille des capacités supplémentaires à mettre à disposition que, à partir de 2009, celles-ci s’élevaient à 7 110 tonnes à transformer dans un délai de six semaines. La requérante devrait donc prendre des dispositions pour que, en cas d’épizootie, pendant six semaines, 1 185 tonnes supplémentaires par semaine puissent, en plus des quantités normales, être traitées.

163    Ensuite, aux considérants 212 à 228 de la décision attaquée, la Commission a estimé que la mise à disposition de ces capacités supplémentaires n’avait pas entraîné de coûts nets pour la requérante.

164    En effet, d’une part, aux considérants 212 à 223 de la décision attaquée, la Commission a considéré à cet égard que, selon l’expertise de M. E. Böckenhoff, intitulée « Voruntersuchung über die Verwertung von ungenieβbaren Schlachtabfällen im Gebiet der ehemaligen Deutschen Demokratischen Republik » (étude préliminaire sur l’utilisation de déchets d’abattoirs impropres à la consommation sur le territoire de l’ancienne République démocratique allemande, ci-après l’« expertise Böckenhoff »), datant d’août 1991, les capacités supplémentaires prescrites par l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante pouvaient être couvertes par les capacités inutilisées pour des raisons d’exploitation disponibles à court terme, la nuit et le week-end. Selon la Commission, la capacité inutilisée pour des raisons d’exploitation de 2 376 tonnes, disponibles en régime sept jours-trois cycles pour une durée de six semaines, correspondait à peu près au double des capacités supplémentaires prescrites de 1 185 tonnes. Il n’aurait donc jamais été nécessaire pour la requérante de mettre en place des capacités supplémentaires pour disposer d’une réserve en cas d’épizootie. L’obligation de maintenir une telle réserve n’aurait donc pas engendré de coûts nets pour la requérante.

165    D’autre part, aux considérants 224 à 227 de la décision attaquée, la Commission a considéré que la requérante disposait de capacités inutilisées nettement plus élevées que ce qui était nécessaire pour la mise à disposition des capacités supplémentaires prescrites par l’article 10, paragraphe 2, de ses statuts. La capacité normale en régime cinq jours-deux cycles serait restée inexploitée jusqu’à hauteur de 25 %. En réalité, la requérante disposerait d’installations qui lui conféreraient une capacité maximale de 4 536 tonnes par semaine. La requérante exploiterait donc des installations dont les capacités atteindraient le double de ce qui serait nécessaire pour les missions fixées dans ses statuts.

166    À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il ressort de l’examen du premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, que, avant le 1er janvier 2009, date à laquelle la modification des statuts de la requérante a pris effet, l’obligation de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie n’était pas clairement définie pour la requérante. En outre, dans le cadre de l’examen du deuxième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, il a été constaté que, avant la modification des statuts de la requérante, des paramètres objectifs et transparents pour le calcul préalable des contributions relatives au maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie faisaient défaut. Par conséquent, il convient uniquement d’examiner si, en tout état de cause, le troisième critère posé par l’arrêt Altmark, point 21 supra, était satisfait à partir de l’année 2009.

167    En premier lieu, la requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur relative au critère d’appréciation appliqué. En effet, selon elle, la Commission aurait dû se limiter au contrôle d’une erreur manifeste d’appréciation. En outre, selon la requérante, la Commission n’a pas le droit de vérifier le caractère nécessaire de la quantité des réserves de capacités en cas d’épizootie.

168    Premièrement, s’agissant du critère d’appréciation appliqué, la Commission conteste que son examen du troisième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, puisse uniquement porter sur l’existence d’une erreur manifeste. En tout état de cause, elle aurait démontré dans la décision attaquée le caractère manifeste de la surcompensation.

169    À cet égard, il convient de rappeler que l’État membre dispose d’une large marge d’appréciation non seulement quant à la définition d’une mission de SIEG, mais également concernant la détermination de la compensation des coûts, qui dépend d’une appréciation de faits économiques complexes (voir point 148 ci-dessus). S’agissant du contrôle que la Commission est habilitée à exercer, relatif à la nécessité de la compensation, le juge de l’Union a déjà dit pour droit que, au regard du pouvoir discrétionnaire dont dispose l’État membre quant à la définition d’une mission de SIEG et aux conditions de sa mise en œuvre, y compris pour apprécier les surcoûts occasionnés par son exécution qui dépend de faits économiques complexes, ce contrôle est limité à celui de l’erreur manifeste (voir arrêt BUPA e.a./Commission, point 105 supra, point 220, et la jurisprudence citée). En outre, le Tribunal a déjà constaté qu’il en découlait que le contrôle devant être exercé par le juge de l’Union sur l’appréciation de la Commission à cet égard ne saurait non plus dépasser la même limite et que, dès lors, ce contrôle devait se borner à examiner si la Commission avait constaté ou avait rejeté à bon droit l’existence d’une erreur manifeste de l’État membre (arrêt BUPA e.a./Commission, point 105 supra, point 220).

170    De plus, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, le respect du troisième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, est indispensable afin de garantir que n’est accordé à l’entreprise bénéficiaire aucun avantage qui fausse ou menace de fausser la concurrence en renforçant la position concurrentielle de cette entreprise (arrêt Altmark, point 21 supra, point 92).

171    En l’espèce, la Commission a considéré que le troisième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait parce que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, tel que prescrit par l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante, n’aurait engendré aucun coût net pour cette dernière (voir points 163 à 165 ci-dessus). Étant donné qu’aucune compensation n’était dès lors nécessaire selon la Commission, les versements de contributions en cause n’ont, selon elle, manifestement pas été nécessaires. Même si la Commission n’a pas expressément, dans la décision attaquée, constaté le caractère manifeste de la prétendue surcompensation, celui-ci peut être déduit du fait que la Commission a considéré que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie n’entraînait aucun coût net. L’argumentation de la requérante doit donc être rejetée.

172    Deuxièmement, il convient de constater que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la Commission n’a pas vérifié, dans le cadre de l’examen du troisième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, le caractère nécessaire de la quantité de la réserve de capacités en cas d’épizootie. En revanche, elle a pris comme fondement pour son examen du caractère nécessaire des contributions en cause la quantité prévue à l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante. Ainsi qu’il ressort de l’examen du premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, c’est uniquement au niveau prévu par cette disposition que le soin de maintenir une réserve de capacités en cas d’épizootie en tant que SIEG a été confié à la requérante.

173    À cet égard, il y a lieu de rejeter l’argument selon lequel l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante doit être compris en ce sens que la réserve de capacités en cas d’épizootie mentionnée par cette disposition doit être maintenue en plus de la capacité normale qui existerait de toute façon. En effet, d’une part, l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante se limite à définir la quantité de la réserve à maintenir sans préciser les modalités de ce maintien. En particulier, cette disposition ne prévoit pas que la réserve de capacités en cas d’épizootie doive être disponible dans le cadre de l’exploitation normale des installations en régime cinq jours-deux cycles. D’autre part, il convient de constater que la Commission a, à juste titre, examiné si le maintien de la réserve de capacités en cause en plus de la capacité normale des exploitations de la requérante entraînait des coûts pour cette dernière. Elle pouvait, à cet égard, sans commettre d’erreur, considérer que, en plus de la capacité normalement existante et utilisée sous le régime cinq jours-deux cycles, il existait des capacités inutilisées pour des raisons d’exploitation la nuit et le week-end (voir point 164 ci-dessus) ainsi que des capacités inutilisées en régime normal de cinq jours-deux cycles (voir point 165 ci-dessus).

174    En deuxième lieu, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas contrôlé les coûts additionnels nets découlant du maintien effectif d’une réserve de capacités en cas d’épizootie. Selon la requérante, l’expertise Böckenhoff à laquelle la Commission s’est référée ne contiendrait pas une analyse suffisante relative au maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie. En outre, cette expertise ne serait pas généralement reconnue. De plus, la requérante fait référence au rapport d’une société d’experts-comptables du 5 juillet 2012 selon lequel, d’une part, elle aurait supporté des frais du fait du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie et, d’autre part, les contributions versées n’auraient pas excédé la couverture de ces coûts.

175    Il convient de rappeler que le contrôle du Tribunal doit se borner à examiner si la Commission a constaté ou a rejeté à bon droit l’existence d’une erreur manifeste de l’État membre. Ce contrôle implique que le juge de l’Union détermine si les éléments de preuve apportés par la requérante sont suffisants pour priver de plausibilité les appréciations des faits économiques complexes retenus dans la décision attaquée. Sous réserve de cet examen de la plausibilité, il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation des faits économiques complexes pertinents à celle de l’auteur de la décision. Dans un tel contexte, le contrôle du Tribunal porte sur la vérification tant du respect par la Commission des règles de procédure et de motivation que de l’exactitude matérielle des faits retenus et de l’absence d’erreur de droit, d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir (voir arrêt BUPA e.a./Commission, point 105 supra, points 220 et 221, et la jurisprudence citée).

176    En l’espèce, l’argumentation de la requérante n’est pas suffisante pour démontrer que la Commission a erronément constaté l’existence d’une erreur manifeste. En effet, ainsi qu’il ressort de l’examen du premier critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, la Commission pouvait, à bon droit, fonder son calcul sur le fait que le niveau de la réserve de capacités en cas d’épizootie avait été fixé par les autorités allemandes à l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante. En prenant en compte ce niveau, la Commission pouvait, sans commettre d’erreur, considérer que le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie n’entraînait pas de coûts nets du fait que les capacités supplémentaires pourraient être couvertes par les capacités existantes de la requérante inutilisées pour des raisons d’exploitation disponibles à court terme, la nuit et le week-end, ainsi que par les capacités inutilisées en régime cinq jours-deux cycles (voir points 164 et 165 ci-dessus).

177    S’agissant ensuite de l’argument selon lequel l’expertise Böckenhoff, sur laquelle la Commission a fondé, en substance, son appréciation relative à la disponibilité des capacités la nuit et le week-end, ne contiendrait aucune analyse suffisante relative au maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, il convient de relever que la Commission s’est référée à cette expertise uniquement pour démontrer que les capacités inutilisées pour des raisons d’exploitation la nuit et le week-end étaient, en principe, susceptibles de servir de réserves de capacités en cas d’épizootie. En outre, au considérant 214 de la décision attaquée, la Commission a relevé que le constat de base de l’expertise Böckenhoff, à savoir que des investissements supplémentaires dans des capacités inutilisées n’étaient pas nécessaires pour lutter contre les épizooties, mais que les capacités inutilisées présentes et incluses dans le troisième cycle pendant la semaine et dans les cycles du week-end seraient suffisantes pour éliminer les carcasses d’animaux supplémentaires qui seraient enregistrées en cas d’épizootie, était confirmé par d’autres expertises plus récentes.

178    En ce qui concerne l’argument selon lequel l’expertise Böckenhoff ne serait pas généralement reconnue, il convient de relever que celui-ci n’est étayé par aucun élément de preuve. En revanche, cet argument est expressément contredit par l’une des expertises mentionnées au considérant 214 de la décision attaquée, à savoir le rapport produit par l’Institut für Strukturforschung und Planung in agrarischen Intensivgebieten (ISPA, institut pour la recherche de structure et pour la conception dans des régions agrariennes intensives) de l’université de Vechta (Allemagne), intitulé « Gutachten zur Kapazitätsermittlung der Verarbeitungsbetriebe Tierische Nebenprodukte (VTN) im Verbandsgebiet des Zweckverbands TKB unter Berücksichtigung von Tierbestand und Schlachtzahlen vor dem Hintergrund des Ausbruchs hochkontagiöser Tierseuchen » (rapport concernant l’analyse des capacités des exploitations de traitement des sous-produits animaux sur le territoire relevant de l’association de droit public TKB à la lumière du cheptel et les chiffres des abattoirs dans le contexte de l’émergence d’une épizootie très contagieuse, ci-après le « rapport ISPA ») datant d’avril 2011. En effet, selon le rapport ISPA, la méthode prévue par l’expertise Böckenhoff est encore utilisée comme fondement pour les audits d’entreprise et l’applicabilité du « modèle Böckenhoff » serait, en principe, réputée acquise dans la situation concrète de la requérante. Par ailleurs, il ressort des observations de la République fédérale d’Allemagne du 4 avril 2011 relatives à la décision d’ouverture que d’autres Länder allemands utilisaient le « modèle Böckenhoff ».

179    En ce qui concerne le rapport d’une société d’experts-comptables datant du 5 juillet 2012, il convient de rappeler que la légalité d’une décision en matière d’aides doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée et que la Commission ne pouvait pas disposer de ce rapport au moment de l’adoption de la décision attaquée le 25 avril 2012 (voir point 97 ci-dessus).

180    En troisième lieu, la requérante fait valoir que le caractère approprié du niveau de la réserve de capacités en cas d’épizootie est confirmé par deux expertises, à savoir le rapport ISPA et l’expertise, produite par le Fraunhofer-Institut für Verfahrenstechnik und Verpackung (institut de Fraunhofer pour l’ingénierie de procédés et l’emballage), intitulée « Untersuchung von Verarbeitungskapazität und Seuchenreserve der Tierkörperbeseitigung in Rheinland-Pfalz » (analyse des capacités de traitement et des réserves de capacités disponibles d’élimination de cadavres d’animaux en cas d’épizootie dans le Land de Rhénanie-Palatinat, ci-après l’« expertise Fraunhofer ») de mars 2007. Selon le rapport ISPA, les réserves disponibles de la requérante ne pourraient en aucun cas être qualifiées de surdimensionnées, mais seraient au contraire appropriées. La Commission n’aurait pas examiné les coûts additionnels nets résultant pour la requérante du maintien de capacités d’exploitation selon la dimension des installations.

181    À cet égard, il suffit de relever que la question de savoir si d’autres expertises confirment le caractère approprié des dimensions des installations de la requérante en tant que réserve de capacités en cas d’épizootie n’est pas pertinente en l’espèce. En effet, le niveau du maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie ayant été prescrit par l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante, celui-ci sert de fondement pour l’examen de la question de savoir si les contributions dépassaient ce qui était nécessaire pour couvrir les coûts prétendument occasionnés par l’exécution de ce service.

182    En tout état de cause, il y a lieu de constater que l’expertise Fraunhofer a évalué la capacité totale des installations de la requérante à 168 000 tonnes/an et la capacité normale de matières transformées à 85 000 tonnes/an. Selon cette expertise, il resterait donc 83 000 tonnes/an susceptibles de servir de réserves de capacités en cas d’épizootie. Cette expertise a donc notamment conclu que la réserve de capacités sur le territoire de la requérante était trop grande et que cette réserve de capacités n’avait pas été utilisée depuis vingt ans. En outre, cette expertise évaluait les réserves de capacités adaptées au risque et économiquement acceptables de 30 000 à 35 000 tonnes/an. Quant au rapport ISPA, celui-ci a évalué la réserve de capacités nécessaire en cas d’épizootie à 54 220 tonnes/an. Eu égard à ces chiffres, qui ressortent, d’ailleurs, également de l’offre de la requérante de 2007 émise dans le cadre de l’appel d’offres concernant l’élimination de cadavres d’animaux en Hesse, l’argument selon lequel le caractère approprié du niveau de la réserve de capacités en cas d’épizootie est confirmé par deux expertises doit être rejeté.

183    En quatrième lieu, la requérante fait valoir que la décision attaquée est entachée d’une analyse insuffisante des faits et d’un défaut de motivation. La Commission n’aurait pas suffisamment analysé le rapport ISPA et l’expertise Fraunhofer. En particulier, en n’expliquant pas les raisons pour lesquelles elle considérerait que certains scénarios d’épizootie n’étaient pas pertinents, la Commission aurait violé son obligation de procéder à un examen diligent et impartial des circonstances de fait et l’obligation de motivation qui lui incomberait. En outre, la Commission aurait violé ces obligations en n’examinant pas la question de savoir si des surcoûts nets ont effectivement été occasionnés et donc si la compensation était excessive. En effet, la requérante allègue qu’elle a supporté des coûts additionnels liés au maintien effectif de la réserve de capacités. Le fait de qualifier d’aide d’État la totalité de la compensation versée dépasserait l’étendue du pouvoir de contrôle de la Commission.

184    À cet égard, il convient de relever que, au considérant 225 de la décision attaquée, la Commission a examiné la pertinence du rapport ISPA et de l’expertise Fraunhofer par rapport aux capacités inutilisées existantes de la requérante. Dans ce contexte, la Commission a considéré que la requérante n’avait jamais été chargée de la mise à disposition de capacités supplémentaires pour une période de plus de six semaines, telle que visée par le rapport ISPA et par l’expertise Fraunhofer, et que, dès lors, les scénarios excédant cette période ne seraient pas pertinents. En outre, au considérant 228 de la décision attaquée, en résumant ses observations figurant aux considérants 206 à 227 de cette décision, la Commission a indiqué que la République fédérale d’Allemagne n’avait pas pu prouver que l’obligation de mise à disposition de capacités supplémentaires, telle que prescrite à l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante, avait entraîné pour cette dernière des coûts nets. La Commission n’a donc violé ni son obligation de procéder à un examen diligent et impartial des circonstances de fait ni son obligation de motivation.

185    Par conséquent, le troisième critère posé par l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était, en tout état de cause, pas satisfait à partir de l’année 2009, date à laquelle la modification des statuts de la requérante a pris effet.

–       Sur le quatrième critère posé par l’arrêt Altmark, relatif à l’analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée aurait encourus

186    Selon ce critère, lorsque le choix de l’entreprise à charger de l’exécution d’obligations de service public, dans un cas concret, n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes s’y rapportant ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations (arrêt Altmark, point 21 supra, point 93).

187    Aux considérants 230 à 232 de la décision attaquée, la Commission a relevé que ce critère n’était pas satisfait étant donné que la requérante n’avait pas été sélectionnée dans le cadre d’une procédure de marché public et que la République fédérale d’Allemagne n’avait pas prouvé que la requérante était une entreprise moyenne et bien gérée. Les redevances élevées pour l’élimination de carcasses animales en Rhénanie-Palatinat et la nécessité d’un financement par une contribution, qui ne se retrouveraient dans aucun autre Land allemand, montreraient plutôt que la requérante ne serait pas une entreprise moyenne et bien gérée.

188    Selon la requérante, qui fait référence à l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, le quatrième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, suppose que l’obligation de service public puisse être exercée par une entreprise privée. Or, tel ne serait pas le cas en l’espèce étant donné que, d’une part, il n’existerait pas de marché en ce qui concerne l’élimination des matières des catégories 1 et 2 et le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie et que, d’autre part, la requérante disposerait d’un monopole régional. Un investisseur privé n’exercerait pas l’activité de la requérante dans le domaine de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 dans les conditions-cadres juridiques existantes. Dans cette mesure, la comparaison avec le montant des rémunérations appliquées dans d’autres Länder allemands serait dénuée de pertinence.

189    Premièrement, dans la mesure où la requérante fait référence à l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, au soutien de son argument selon lequel le quatrième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, présuppose que l’obligation de service public peut être exercée par une entreprise privée, il suffit de relever que la Commission a examiné cet argument aux considérants 235 à 238 de la décision attaquée et que la requérante n’a apporté aucun élément de nature à remettre en cause ces considérations.

190    Deuxièmement, il convient de rejeter l’argument selon lequel, sans être autorisé à réaliser un bénéfice, aucun opérateur n’exercerait l’activité de la requérante en cause. Par cet argument, la requérante ne démontre aucunement que la Commission a erronément constaté que la République fédérale d’Allemagne n’avait pas prouvé que le quatrième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, était satisfait.

191    Troisièmement, s’agissant de l’argument selon lequel la comparaison avec d’autres Länder allemands n’est pas pertinente, il convient de relever que, selon la décision attaquée, le quatrième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’était pas satisfait parce que la République fédérale d’Allemagne n’en avait pas apporté la preuve. La comparaison avec d’autres Länder allemands, effectuée au considérant 231 de la décision attaquée, constitue donc une considération surabondante de sorte que l’argument s’y rapportant est inopérant. En outre, à supposer même que les seules autorités du Land de Rhénanie-Palatinat aient valablement pu définir le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie en tant que SIEG, il n’en demeure pas moins que, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la TierNebG, les collectivités publiques compétentes de tous les Länder allemands étaient obligées d’éliminer non seulement la quantité de matières des catégories 1 et 2 reçue en temps normal, mais également la quantité plus importante de ces matières reçue en cas d’épizootie (voir point 82 ci-dessus). Par conséquent, la Commission pouvait à bon droit tenir compte de la situation dans les autres Länder allemands pour examiner le niveau de la compensation nécessaire sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises aurait encourus pour exécuter ces obligations.

192    Par conséquent, la requérante n’a pas démontré que la Commission a erronément constaté que la République fédérale d’Allemagne n’avait pas prouvé que les exigences du quatrième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, étaient satisfaites.

193    Au vu de ce qui précède, il convient de conclure que, pendant la période visée par la décision attaquée, à aucun moment tous les critères posés par l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’ont été satisfaits cumulativement. La Commission n’a donc pas commis d’erreur en constatant l’existence d’un avantage économique pour la requérante.

194    La troisième branche du présent moyen doit donc être rejetée. Par conséquent, à supposer même que la Commission ait erronément considéré que les autorités allemandes compétentes avaient commis une erreur manifeste d’appréciation en qualifiant de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, la décision attaquée ne saurait être annulée au motif de l’absence d’un avantage économique pour la requérante au sens des critères posés par l’arrêt Altmark, point 21 supra (voir point 127 ci-dessus).

195    Le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, relatif à l’affectation du commerce entre États membres et à la distorsion de la concurrence

196    La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 107, paragraphe 1, TFUE en ce qu’elle aurait considéré, aux considérants 146 à 149 de la décision attaquée, que les contributions en cause affectaient les échanges entre États membres et faussaient ou menaçaient de fausser la concurrence.

197    Il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de son appréciation des deux conditions en cause, la Commission est tenue non d’établir une incidence réelle des aides sur les échanges entre États membres et une distorsion effective de la concurrence, mais seulement d’examiner si ces aides sont susceptibles d’affecter ces échanges et de fausser la concurrence (voir arrêts de la Cour du 15 décembre 2005, Unicredito Italiano, C‑148/04, Rec. p. I‑11137, point 54 ; du 9 juin 2011, Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, C‑71/09 P, C‑73/09 P et C‑76/09 P, Rec. p. I‑4727, point 134, et du 8 mai 2013, Libert e.a., C‑197/11 et C‑203/11, non encore publié au Recueil, point 76, et la jurisprudence citée).

198    En particulier, lorsqu’une aide accordée par un État membre renforce la position d’une entreprise par rapport à d’autres entreprises concurrentes dans les échanges dans l’Union, ces derniers doivent être considérés comme influencés par l’aide (voir arrêts Unicredito Italiano, point 197 supra, point 56, et Libert e.a., point 197 supra, point 77, et la jurisprudence citée).

199    En premier lieu, s’agissant de l’élimination des matières des catégories 1 et 2, la requérante fait valoir que, étant donné qu’elle disposait d’un monopole régional pour ce service, qui s’étendrait également au maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, toute concurrence et toute affectation du commerce seraient exclues. En l’espèce, les collectivités territoriales auraient fait usage de leur droit d’assumer leur obligation d’élimination des matières des catégories 1 et 2 sans recourir au marché. Tel serait le cas sur son territoire de compétence ainsi que dans la mesure où elle assumerait cette obligation en Bade-Wurtemberg et en Hesse. Selon la requérante, elle accomplissait ainsi, en tant que puissance publique, une mission contraignante.

200    Au considérant 147 de la décision attaquée, la Commission a constaté que, certes, il existait des monopoles régionaux pour l’élimination des matières des catégories 1 et 2. La majorité des collectivités territoriales compétentes octroieraient cependant ces monopoles dans le cadre de marchés publics. Il existerait donc une concurrence et un marché. En l’espèce, ce fait serait confirmé par l’existence d’un marché public pour la Hesse du Nord et la Hesse centrale. Selon le considérant 148 de la décision attaquée, le marché de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 était ouvert à la concurrence. Le droit de l’Union, tout comme le droit national, laisserait aux collectivités territoriales chargées de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 le choix de trouver un soumissionnaire sur le marché à travers une procédure de marché public et de lui confier un mandat ou d’assurer elles-mêmes l’élimination dans le cadre d’une solution de type interne. Selon la Commission, les versements de contributions renforçaient la position financière de la requérante par rapport aux autres soumissionnaires potentiels. Dans la mesure où des soumissionnaires de l’ensemble des États membres pourraient prendre part aux appels d’offres, la contribution serait de nature à entraver le commerce entre les États membres. Au considérant 149 de la décision attaquée, la Commission a considéré que les avantages économiques résultant des versements de contributions étaient en mesure de renforcer la position de la requérante sur les marchés sur lesquels elle était en concurrence directe avec d’autres soumissionnaires, à savoir le marché de l’élimination des matières de la catégorie 3 et celui de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 en Hesse du Nord et en Hesse centrale.

201    L’argumentation présentée par la requérante ne saurait remettre en cause ces considérations.

202    En effet, premièrement, il convient de constater que la requérante n’était pas obligée de procéder à l’élimination des matières des catégories 1 et 2 en régie. En effet, l’article 3, paragraphe 2, de la TierNebG prévoit la possibilité de confier l’élimination et la transformation de ces matières à des personnes physiques ou morales de droit privé. Ce n’est qu’en vertu de l’article 6 des statuts de la requérante que cette dernière gérait son installation d’élimination de cadavres d’animaux en tant que régie. À cet égard, il convient également de constater que, selon l’article 1er du règlement que la requérante a adopté le 6 décembre 2004, cette dernière s’est chargée de l’élimination de tous les sous-produits animaux sur son territoire de compétence. Par conséquent, ainsi que l’allègue la Commission au considérant 148 de la décision attaquée, en vertu de la législation allemande, les collectivités territoriales compétentes avaient le choix de trouver un soumissionnaire sur le marché à travers une procédure de marché public et de lui confier le mandat ou d’assurer elles-mêmes l’élimination de ces matières.

203    Dans un pareil cas, la Cour a déjà dit pour droit que, lorsqu’un État membre accorde une subvention publique à une entreprise, la fourniture des services par celle-ci peut s’en trouver maintenue ou augmentée, avec cette conséquence que les chances des entreprises établies dans d’autres États membres de fournir leurs services sur le marché de cet État sont diminuées (voir arrêt Altmark, point 21 supra, point 78, et la jurisprudence citée).

204    Deuxièmement, il convient de relever que les activités de la requérante relatives à l’élimination des matières des catégories 1 et 2 n’étaient pas limitées à son territoire de compétence. En effet, à partir de l’année 2000, la requérante a pris en charge l’élimination des matières des catégories 1 et 2 dans une partie du Bade-Wurtemberg et, à partir de l’année 2009, également en Hesse du Nord et en Hesse centrale (voir point 9 ci-dessus). Il est constant que, en dehors du territoire de compétence de la requérante, d’autres opérateurs privés étaient également actifs dans le domaine de l’élimination des matières des catégories 1 et 2. Ainsi, il ressort du dossier que, afin d’obtenir un mandat pour l’élimination de ces matières en Hesse du Nord et en Hesse centrale, la requérante a participé à un appel d’offres. Le fait que, selon cet appel d’offres, il ne s’agissait pas de l’attribution d’un marché public, mais de la sélection de l’entreprise la plus adéquate, n’est pas incompatible avec l’existence d’une concurrence sur ce marché. Il ne peut être exclu que l’existence même des contributions en faveur de la requérante ait créé une incitation, dans le cadre de cet appel d’offres, à lui confier directement le service d’élimination des matières des catégories 1 et 2 plutôt que d’accorder des concessions à d’autres opérateurs privés (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 11 juin 2009, AEM/Commission, T‑301/02, Rec. p. II‑1757, point 100, et ACEA/Commission, T‑297/02, Rec. p. II‑1683, point 92).

205    En deuxième lieu, la requérante fait valoir que, s’agissant de l’élimination des matières de la catégorie 3 pour laquelle elle serait en concurrence avec d’autres opérateurs, la Commission n’aurait pas établi l’existence d’une subvention croisée entre l’élimination de ces matières et les contributions versées.

206    À cet égard, il suffit de rappeler que, afin de pouvoir considérer que les avantages économiques résultant des contributions en cause étaient en mesure de renforcer la position de la requérante sur le marché de l’élimination des matières de la catégorie 3, la Commission n’était pas tenue de démontrer l’existence d’une subvention croisée entre l’élimination de ces matières et les contributions versées. En effet, selon la jurisprudence citée au point 198 ci-dessus, lorsqu’une aide financière accordée par l’État renforce la position d’une entreprise par rapport à d’autres entreprises concurrentes dans les échanges dans l’Union, ces derniers doivent être considérés comme influencés par l’aide. Une aide octroyée à une entreprise opérant sur un marché monopolisé peut entraîner des effets sur les échanges si l’entreprise bénéficiaire est également active sur des marchés où celle-ci est soumise à la concurrence.

207    Par conséquent, le troisième moyen doit être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE en raison d’une méconnaissance des conditions d’autorisation visées dans cette disposition

208    La requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur de droit en ce qu’elle aurait estimé, aux considérants 278 à 283 de la décision attaquée, que les contributions en cause ne pouvaient être justifiées au titre de l’article 106, paragraphe 2, TFUE. Plus précisément, la requérante soutient que la Commission n’était pas habilitée à se prononcer sur l’étendue des missions de service public incombant à l’exploitant public, à savoir le niveau des coûts liés à ce service, ni sur l’opportunité des choix politiques pris par les autorités nationales, ni sur l’efficacité économique de l’exploitant public dans le secteur qui lui serait réservé.

209    Il convient de constater que, aux considérants 278 à 283 de la décision attaquée, la Commission a apprécié la compatibilité des contributions en cause avec l’article 106, paragraphe 2, TFUE. Elle a constaté que ces contributions ne pouvaient pas être justifiées en tant qu’aide d’État pour la mise à disposition des capacités supplémentaires sur le territoire de compétence de la requérante au titre de cette disposition et de l’encadrement SIEG. Dans ce contexte, premièrement, la Commission a précisé que, dès lors que les versements des contributions constituaient des aides d’État illégales, l’encadrement SIEG devait être appliqué. Deuxièmement, elle a considéré que, la requérante n’étant pas chargée de l’exécution d’un SIEG, une compatibilité des versements des contributions en cause sur la base de l’article 106, paragraphe 2, TFUE ou de l’encadrement SIEG était exclue. Troisièmement, la Commission a constaté que, en accord avec les deuxième et troisième critères de l’arrêt Altmark, point 21 supra, une aide d’État ne devait être considérée comme compatible avec l’article 106, paragraphe 2, TFUE, selon les points 2.3 et 2.8 de l’encadrement SIEG, que si un mandat fixant les méthodes de calcul de la compensation existait et si le montant de l’aide d’État ne dépassait pas les coûts nets de l’obligation de service public. Quatrièmement, en faisant référence à ses observations relatives à ces deux critères de l’arrêt Altmark, point 21 supra, la Commission a constaté que les conditions prévues dans l’encadrement SIEG n’étaient pas respectées parce que ces deux critères n’étaient pas satisfaits.

210    L’argumentation de la requérante ne saurait remettre en cause ces considérations.

211    Premièrement, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de la deuxième branche du deuxième moyen, il a déjà été constaté que la Commission avait considéré à bon droit que les autorités allemandes avaient commis une erreur manifeste en qualifiant de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie.

212    Deuxièmement, dans la mesure où la requérante fait valoir une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE sans contester la légalité de l’encadrement SIEG appliqué par la Commission en l’espèce ni invoquer une violation de cet encadrement, son argumentation est inopérante. En effet, ainsi qu’il ressort du point 11 de l’encadrement SIEG, la Commission a précisé, aux points 2.2 à 2.10 de cet encadrement, les conditions qui doivent être remplies pour que les aides d’État puissent être déclarées compatibles avec l’article 106, paragraphe 2, TFUE. Les conditions figurant aux points 2.3 et 2.8 de l’encadrement SIEG comportent, d’une part, des règles relatives à la nécessité d’un mandat précisant les obligations de service public et les méthodes de calcul de la compensation et, d’autre part, des règles relatives au montant de la compensation. Il importe de relever que, en adoptant des règles de conduite et en annonçant, par leur publication, qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 11 septembre 2008, Allemagne e.a./Kronofrance, C‑75/05 P et C‑80/05 P, Rec. p. I‑6619, point 60, et la jurisprudence citée). Ainsi, dans le domaine spécifique des aides d’État, la Commission est tenue par les encadrements et les communications qu’elle adopte, dans la mesure où ils ne s’écartent pas des normes du traité et où ils sont acceptés par les États membres (voir arrêt Allemagne e.a./Kronofrance, précité, point 61, et la jurisprudence citée). En l’espèce, au moment de l’adoption de la décision attaquée, tous les États membres avaient accepté de mettre leurs régimes d’aide en conformité avec l’encadrement SIEG (JO 2012, C 308, p. 3).

213    Troisièmement, il y a lieu de relever que la requérante ne conteste pas la considération de la Commission selon laquelle les conditions prévues aux points 2.3 et 2.8 de l’encadrement SIEG n’étaient pas remplies parce que les deuxième et troisième critères de l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’étaient pas satisfaits. Ainsi qu’il ressort de l’examen de la troisième branche du deuxième moyen, pour aucune des périodes visées par la décision attaquée, ces critères n’étaient satisfaits cumulativement.

214    En outre, il convient de constater que la Commission a effectivement examiné si le montant des versements de contributions excédait les coûts additionnels nets du maintien de la réserve de capacités en cas d’épizootie, tel qu’il a été défini par l’État membre. En effet, le niveau du maintien de cette réserve ayant été prescrit par l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante, celui-ci devait servir de base pour l’examen de la question de savoir si les contributions dépassaient ce qui était nécessaire pour couvrir les coûts prétendument occasionnés par l’exécution de ce service.

215    Le quatrième moyen doit donc être rejeté.

216    Par conséquent, à supposer même que la Commission ait erronément considéré que les autorités allemandes compétentes avaient commis une erreur manifeste d’appréciation en qualifiant de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, la décision attaquée ne pourrait pas être annulée en raison d’une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE (voir point 127 ci-dessus).

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de la répartition des compétences entre l’Union et les États membres ainsi que d’une violation du principe de subsidiarité

217    La requérante fait valoir que la Commission a violé la répartition des compétences entre l’Union et les États membres telle qu’elle résulte de l’article 14 TFUE ainsi que le principe de subsidiarité en ce qu’elle aurait refusé de qualifier les services en cause de SIEG. Cette qualification ne dépendrait pas de la question de savoir si, ailleurs, ces services sont fournis dans le cadre d’une activité économique privée. La question de savoir dans quelle mesure des mesures de précaution devraient être adoptées relèverait de la compétence des États membres. En l’absence d’harmonisation complète du domaine concerné, il résulterait du principe de subsidiarité que l’évaluation des risques devrait être faite au niveau des États membres ou au niveau régional ou local. Il serait contraire à ce principe de contester le caractère nécessaire de la réserve de capacités en cas d’épizootie en invoquant la situation qui prévaudrait dans d’autres Länder allemands.

218    Premièrement, s’agissant de l’argumentation relative à la répartition des compétences, il convient de relever que les griefs avancés sont, en substance, identiques à ceux formulés dans le cadre de la deuxième branche du deuxième moyen, tirée d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et de l’article 106, paragraphe 2, TFUE et relative à l’existence d’un SIEG. Ainsi qu’il a été constaté dans le cadre de l’examen de cette branche, en qualifiant de SIEG le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, les autorités allemandes compétentes ont commis une erreur manifeste d’appréciation. La Commission n’a donc pas violé la répartition des compétences entre l’Union et les États membres telle qu’elle résulte de l’article 14  TFUE.

219    Deuxièmement, dans la mesure où la requérante fait valoir une violation du principe de subsidiarité, il convient de relever que, en vertu de l’article 5, paragraphe 3, TUE, ce principe s’applique uniquement dans les domaines qui ne relèvent pas de la compétence exclusive de l’Union. Or, selon l’article 3, paragraphe 1, sous b), TFUE, l’Union dispose d’une compétence exclusive dans le domaine de l’établissement des règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur, y compris les règles relatives aux aides d’État visées de l’article 107 TFUE à l’article 109 TFUE. Nonobstant la prérogative de l’État membre concernant la définition des SIEG (voir point 105 ci-dessus), il y a donc lieu de rejeter l’argumentation de la requérante, étant donné que la décision attaquée a pour base juridique l’article 108, paragraphe 2, premier alinéa, TFUE (voir, en ce sens, arrêt Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig/Commission, point 51 supra, point 79).

220    Le cinquième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une violation de l’article 108, paragraphe 1, TFUE, de l’article 1er, sous b), et de l’article 14 du règlement n° 659/1999

221    La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 108, paragraphe 1, TFUE, l’article 1er, sous b), et l’article 14 du règlement n° 659/1999 en ce qu’elle aurait considéré, au considérant 308 de la décision attaquée, que les contributions versées constituaient une aide nouvelle depuis le 26 mai 1998. En effet, selon elle, avant l’entrée en vigueur du règlement n° 1774/2002 qui aurait créé la catégorisation des matières premières, il n’existait pas de marché de l’élimination de cadavres d’animaux en Allemagne, de sorte que les contributions ne constituaient pas une aide. Selon la requérante, auparavant, toutes les parties de cadavres d’animaux impropres à la consommation étaient soumises à l’obligation d’élimination par les organismes prévus à cette fin et devaient lui être confiées par leurs détenteurs, et elle était obligée de les détruire. En ce qui concerne le territoire de la Rhénanie-Palatinat, cela aurait été prévu à l’article 4 de la TierKBG, à l’article 2 de la LTierKBG et par le Verordnung über die Einzugsbereiche für die Beseitigung tierischer Nebenprodukte (règlement sur les zones de compétence pour l’élimination de sous-produits animaux, ci-après le « règlement sur les zones de compétence »). Les contributions devraient donc être considérées comme des aides existantes et la Commission n’aurait pas dû ordonner la récupération. Elle aurait dû proposer à la République fédérale d’Allemagne des mesures utiles conformément à l’article 18 du règlement n° 659/1999.

222    À cet égard, il convient de constater que la requérante fonde son argumentation sur l’existence des dispositions allemandes régissant l’élimination de cadavres d’animaux en Rhénanie-Palatinat avant l’entrée en vigueur du règlement n° 1774/2002. Or, interrogée à ce sujet lors de l’audience, la requérante n’a pas pu démontrer qu’elle avait porté ces dispositions à la connaissance de la Commission au cours de la procédure précontentieuse. Cette dernière fait valoir que la requérante avance, pour la première fois dans la requête, cette argumentation et les faits sur lesquels elle se fonde. Il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de l’adoption d’une décision en matières d’aides d’État, la constatation du droit national est une question de fait [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 21 décembre 2011, A2A (anciennement ASM Brescia)/Commission, C‑318/09 P, non encore publié au Recueil, point 125, et la jurisprudence citée]. La question de savoir si et dans quelle mesure une règle de droit national s’applique ou non au cas d’espèce relève d’une appréciation factuelle (arrêt du Tribunal du 20 septembre 2012, France/Commission, T‑154/10, non encore publié au Recueil, point 65). Par conséquent, étant donné que la légalité d’une décision en matière d’aides doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir la jurisprudence citée au point 97 ci-dessus), et que la requérante n’a pas été en mesure de démontrer que la Commission disposait de ces dispositions du droit allemand, l’argumentation de la requérante doit être rejetée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 janvier 2004, Fleuren Compost/Commission, T‑109/01, Rec. p. II‑127, point 50).

223    En tout état de cause, il importe de relever que la requérante a produit la TierKBG et le règlement sur les zones de compétence pour la première fois devant le Tribunal dans la réplique. Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, les parties peuvent faire des offres de preuve à l’appui de leur argumentation dans la réplique et la duplique, mais doivent alors motiver le retard apporté à la présentation de celles-ci. Cependant, cette disposition concerne les offres de preuve nouvelles et doit être lue à la lumière de l’article 66, paragraphe 2, dudit règlement, qui prévoit expressément que la preuve contraire et l’ampliation des offres de preuve restent réservées (arrêts de la Cour du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission, C‑185/95 P, Rec. p. I‑8417, point 72, et du Tribunal du 12 septembre 2007, Commission/Trends e.a., T‑448/04, non publié au Recueil, point 52).

224    En l’espèce, la requérante n’a avancé aucune motivation pour justifier spécifiquement le retard apporté à présenter la TierKBG et le règlement sur les zones de compétence. En outre, il y a lieu de relever, dans ce contexte, que ces documents sont antérieurs à la date d’introduction du présent recours, voire à l’adoption de la décision attaquée, et que rien ne permet de démontrer que la requérante n’aurait pas été en mesure de les produire au stade de la requête. Il doit par ailleurs être constaté que les documents en cause ne constituent ni une ampliation de preuve, étant donné que la requérante a fondé son argumentation dans la requête uniquement sur l’existence du règlement sur les zones de compétence qu’elle n’a cependant pas produit, ni des preuves contraires, étant donné que la Commission n’a avancé aucun élément de preuve à l’appui dudit moyen dans sa défense et qu’elle s’est, en substance, limitée à relever que la requérante n’avait produit de preuve ni pendant la procédure précontentieuse ni dans la requête.

225    Il résulte de ce qui précède que la production, au stade de la réplique, de la TierKBG et du règlement sur les zones de compétence doit être rejetée comme irrecevable (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 septembre 2012, Wam Industriale/Commission, T‑303/10, non encore publié au Recueil, points 68 à 72) et que, en l’absence de ces documents, la requérante n’a donc, en tout état de cause, pas démontré qu’aucun marché de l’élimination de cadavres d’animaux n’existait en Allemagne avant l’entrée en vigueur du règlement n° 1774/2002.

226    Par ailleurs, il convient de relever que, selon les parties intervenantes, leurs entreprises prédécesseurs en droit ont déjà fourni des services pour des communes et des circonscriptions dès avant 1949 sur la base de la TierKBG.

227    Le sixième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le septième moyen, tiré d’une méconnaissance des exigences des principes de confiance légitime et de sécurité juridique

228    La requérante fait valoir que, en ordonnant la récupération des contributions en cause, la Commission a violé les principes de confiance légitime et de sécurité juridique.

 Sur la première branche, tirée d’une violation du principe de confiance légitime

229    La requérante soutient que la Commission a violé le principe de confiance légitime en ce qu’elle aurait estimé, aux considérants 309 à 316 de la décision attaquée, que le remboursement des versements de contributions n’allait pas l’encontre des principes généraux du droit de l’Union en matière de protection de la confiance légitime. En effet, d’une part, elle aurait obtenu des contributions depuis sa création en 1979 et celles-ci n’auraient jamais fait l’objet d’un contrôle au titre du droit des aides d’État. D’autre part, avant l’adoption de la décision attaquée, le Bundesverwaltungsgericht aurait explicitement nié dans son arrêt du 16 décembre 2010, point 16 supra, sur la base de la compétence de contrôle qui lui aurait été reconnue par la Cour, le fait que les contributions constituaient des aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Contrairement à ce que l’alléguerait la Commission, cet arrêt du Bundesverwaltungsgericht répondrait à la définition de « renseignements précis, inconditionnels et concordants ».

230    Conformément à une jurisprudence constante, le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime appartient à tout justiciable à l’égard duquel une institution de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître des espérances fondées. Constituent de telles assurances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels et concordants (voir arrêt de la Cour du 16 décembre 2010, Kahla Thüringen Porzellan/Commission, C‑537/08 P, Rec. p. I‑12917, point 63, et la jurisprudence citée).

231    En outre, en vertu de l’article 14, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement n° 659/1999, la Commission n’exige pas la récupération de l’aide, si, ce faisant, elle va à l’encontre d’un principe général du droit de l’Union.

232    En analysant, aux considérants 309 à 316 de la décision attaquée, la question de savoir si, en ordonnant la récupération de l’aide en cause, elle allait à l’encontre d’un principe général du droit de l’Union, la Commission a examiné si l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, avait suscité chez la requérante des espérances fondées quant au fait que les versements de contributions n’étaient pas des aides d’État. À cet égard, la Commission a d’abord constaté, au considérant 310 de la décision attaquée, que cet arrêt ne se référait qu’aux versements de contributions de 2010 et que, dès lors, de telles espérances pourraient se rapporter aux seuls versements de contributions de 2010 et des années suivantes. Aux considérants 311 à 315 de la décision attaquée, la Commission a ensuite considéré que, même pour l’année 2010 et les années suivantes, cet arrêt ne pouvait pas avoir fait naître de telles espérances chez la requérante parce qu’il ne répondrait pas à la définition de renseignements précis, inconditionnels et concordants. Premièrement, selon la Commission, elle n’a pas fourni de tels renseignements, mais a, au contraire, adopté la décision d’ouverture le 20 juillet 2010. Deuxièmement, le Bundesverwaltungsgericht ne serait pas une institution de l’Union. Il aurait prononcé un arrêt, point 16 supra, sur une mesure au sujet de laquelle la Commission aurait déjà ouvert une procédure formelle d’examen. En outre, le Bundesverwaltungsgericht aurait rendu son arrêt, point 16 supra, qu’il aurait motivé notamment par la prétendue non-applicabilité du quatrième critère de l’arrêt Altmark, point 21 supra, sans renvoyer l’affaire devant la Cour.

233    En premier lieu, s’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle elle aurait obtenu des contributions depuis sa création en 1979, celles-ci n’auraient jamais fait l’objet d’un contrôle au titre du droit des aides d’État et, dans le cadre d’une autre affaire, la Commission aurait eu connaissance de la manière dont le système d’élimination de cadavres d’animaux était financé en Rhénanie-Palatinat, il y a lieu de constater que celle-ci ne remet aucunement en cause la considération de la Commission selon laquelle elle n’a jamais fourni à la requérante des renseignements précis, inconditionnels et concordants. En outre, en ce qui concerne l’inaction alléguée de la Commission, il convient de relever que, lorsque le droit de l’Union prévoit un délai de prescription explicite, comme en l’espèce un délai de dix ans en vertu de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999, toute considération liée à une confiance légitime supplémentaire résultant du seul passage du temps doit être écartée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 19 mars 2003, CMA CGM e.a./Commission, T‑213/00, Rec. p. II‑913, point 324). De plus, la Cour a déjà constaté que toute inaction apparente est dépourvue de signification lorsqu’un régime d’aide n’a pas été notifié à la Commission (arrêt de la Cour du 11 novembre 2004, Demesa et Territorio Histórico de Álava/Commission, C‑183/02 P et C‑187/02 P, Rec. p. I‑10609, point 52).

234    Par ailleurs, il convient de relever que, le 20 juillet 2010, la Commission a ouvert la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et qu’elle a invité les parties intéressées à faire part de leurs observations en publiant cette décision le 26 octobre 2010 au Journal officiel de l’Union européenne. Elle a donc informé les bénéficiaires potentiels d’aides d’État du caractère précaire des aides qui leur seraient octroyées illégalement, en ce sens qu’ils pourraient être amenés à les restituer (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 mars 2002, Italie/Commission, C‑310/99, Rec. p. I‑2289, point 102, et la jurisprudence citée).

235    En second lieu, la requérante fait valoir que l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, lui a fourni des renseignements précis, inconditionnels et concordants de sorte que la Commission n’aurait pas dû exiger la récupération de l’aide en cause.

236    À cet égard, il convient de rappeler que la suppression d’une aide étatique, illégalement accordée, par voie de récupération est la conséquence logique de la constatation de son illégalité (arrêt de la Cour du 21 mars 1990, Belgique/Commission, C‑142/87, Rec. p. I‑959, point 66). En outre, selon une jurisprudence constante, les entreprises bénéficiaires d’une aide ne sauraient avoir, en principe, une confiance légitime dans la régularité de l’aide que si celle-ci a été accordée dans le respect de la procédure prévue par le traité FUE. En effet, un opérateur économique diligent doit normalement être en mesure de s’assurer que cette procédure a été respectée (voir arrêt de la Cour du 20 mars 1997, Alcan Deutschland, C‑24/95, Rec. p. I‑1591, point 25, et la jurisprudence citée).

237    Certes, la possibilité, pour le bénéficiaire d’une aide illégale, d’invoquer des circonstances exceptionnelles, qui ont légitimement pu fonder sa confiance dans le caractère régulier de cette aide, et de s’opposer, par conséquent, à son remboursement ne saurait être exclue. Il appartient toutefois à ce bénéficiaire de faire valoir ces circonstances devant les autorités nationales ou le juge national, en contestant la décision nationale de récupération par laquelle ces autorités transposent la décision de la Commission. C’est le juge national auquel il appartient, éventuellement saisi, d’apprécier, le cas échéant, après avoir posé à la Cour des questions préjudicielles d’interprétation, les circonstances en cause (voir, en ce sens, arrêt Italie/Commission, point 234 supra, point 103, et la jurisprudence citée ; arrêts du Tribunal du 27 janvier 1998, Ladbroke Racing/Commission, T‑67/94, Rec. p. II‑1, points 182 et 183, et Fleuren Compost/Commission, point 222 supra, points 136 et 137). En application de cette jurisprudence, la requérante ne peut donc invoquer l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht, point 16 supra, en faisant valoir que la décision attaquée va à l’encontre du principe de confiance légitime.

238    En tout état de cause, il convient de rappeler que le comportement d’une autorité nationale chargée d’appliquer le droit de l’Union, qui est en contradiction avec ce dernier, ne saurait fonder, pour un opérateur économique, une confiance légitime à bénéficier d’un traitement contraire au droit de l’Union (voir arrêt de la Cour du 4 octobre 2007, Commission/Italie, C‑217/06, non publié au Recueil, point 23, et la jurisprudence citée).

239    À cet égard, il y a lieu de relever que la Cour a déjà dit pour droit que, après l’adoption d’une décision d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, à l’égard d’une mesure en cours d’exécution et qualifiée d’aide nouvelle, il existe à tout le moins un doute important sur la légalité de cette mesure qui doit conduire l’État membre à en suspendre le versement, dès lors que l’ouverture de cette procédure exclut une décision immédiate concluant à la compatibilité avec le marché intérieur qui permettrait de poursuivre régulièrement l’exécution de ladite mesure. Une telle décision pourrait être invoquée devant un juge national appelé à tirer toutes les conséquences découlant de la violation de l’article 108, paragraphe 3, dernière phrase, TFUE (arrêt de la Cour du 24 octobre 2013, Deutsche Post/Commission, C‑77/12 P, non encore publié au Recueil, point 52).

240    En outre, lorsque, en application de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen prévue au paragraphe 2 dudit article à l’égard d’une mesure non notifiée en cours d’exécution, une juridiction nationale, saisie d’une demande tendant à la cessation de l’exécution de cette mesure et à la récupération des sommes déjà versées, est tenue d’adopter toutes les mesures nécessaires en vue de tirer les conséquences d’une éventuelle violation de l’obligation de suspension de l’exécution de ladite mesure. À cette fin, la juridiction nationale peut décider de suspendre l’exécution de la mesure en cause et d’exiger la récupération des montants déjà versés. Elle peut aussi décider d’ordonner des mesures provisoires afin de sauvegarder, d’une part, les intérêts des parties concernées et, d’autre part, l’effet utile de la décision de la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen. Lorsque la juridiction nationale éprouve des doutes sur le point de savoir si la mesure en cause constitue une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE ou quant à la validité ou à l’interprétation de la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, d’une part, elle peut demander à la Commission des éclaircissements et, d’autre part, elle peut ou doit, conformément à l’article 267, deuxième et troisième alinéas, TFUE, poser une question préjudicielle à la Cour (arrêt de la Cour du 21 novembre 2013, Deutsche Lufthansa, C‑284/12, non encore publié au Recueil, point 45).

241    En application de la jurisprudence mentionnée aux points 238 à 240 ci-dessus, l’arrêt du Bundesverwaltungsgericht, point 16 supra, ne saurait donc, en tout état de cause, avoir fait naître une confiance légitime à l’égard de la requérante.

242    Par conséquent, l’argumentation de la requérante relative à une prétendue violation du principe de confiance légitime doit être rejetée.

 Sur la seconde branche, tirée d’une violation du principe de sécurité juridique

243    La requérante fait valoir, en se référant à l’arrêt de la Cour du 22 décembre 2010, Commission/Slovaquie (C‑507/08, Rec. p. I‑13489), que la Commission a violé le principe de sécurité juridique en ordonnant la récupération des contributions versées à partir de 2005. En effet, elle aurait méconnu que le caractère définitif des arrêts du Bundesverwaltungsgericht du 16 décembre 2010, point 16 supra, et de l’Oberverwaltungsgericht Rheinland-Pfalz du 25 mai 2011 faisait échec à la récupération de ces contributions. L’arrêt du Bundesverwaltungsgericht aurait pour objet les contributions payées de 2005 à 2010. Par son arrêt du 25 mai 2011, l’Oberverwaltungsgericht Rheinland-Pfalz aurait jugé que la requérante ne devait pas rembourser les contributions versées en 2009.

244    Il est vrai que, aux points 59 et 60 de l’arrêt Commission/Slovaquie, point 243 supra, la Cour a rappelé l’importance que revêtait le principe d’autorité de la chose jugée, tant dans l’ordre juridique de l’Union que dans les ordres juridiques nationaux et elle a jugé que le droit de l’Union n’imposait pas dans tous les cas à une juridiction nationale d’écarter des règles de procédure internes conférant force de chose jugée à une décision juridictionnelle, même si cela permettrait de remédier à une violation du droit de l’Union par la décision en cause.

245    Toutefois, premièrement, il convient de relever que le cas d’espèce se distingue de celui ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Slovaquie, point 243 supra. En effet, dans cette affaire, se posait la question de savoir si le caractère définitif d’une décision juridictionnelle nationale par laquelle était approuvé, dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire, un concordat duquel résultait l’abandon partiel d’une créance publique, abandon ultérieurement qualifié par la Commission d’aide d’État, pouvait faire échec à la récupération de cette aide (arrêt Commission/Slovaquie, point 243 supra, point 55). En revanche, en l’espèce, les arrêts du Bundesverwaltungsgericht, point 16 supra, et de l’Oberverwaltungsgericht Rheinland-Pfalz du 25 mai 2011, point 243 supra, n’ont pas décidé d’accorder les contributions en cause, mais traitaient de la question de savoir si ces dernières devaient être remboursées.

246    Deuxièmement, il convient de rappeler que l’appréciation de la compatibilité de mesures d’aides ou d’un régime d’aides avec le marché intérieur relève de la compétence exclusive de la Commission, agissant sous le contrôle du juge de l’Union (voir arrêts de la Cour du 18 juillet 2007, Lucchini, C‑119/05, Rec. p. I‑6199, point 52, et du 18 juillet 2013, P, C‑6/12, non encore publié au Recueil, point 38, et la jurisprudence citée). En application du principe selon lequel les juridictions nationales sont liées par la décision d’ouverture de la Commission (voir points 239 et 240 ci-dessus), le droit de l’Union s’oppose à ce que l’application du principe d’autorité de la chose jugée fasse obstacle à la récupération d’une aide d’État octroyée en violation du droit de l’Union et dont l’incompatibilité a été constatée par une décision de la Commission devenue définitive (voir, en ce sens, arrêt Lucchini, précité, points 62 et 63).

247    Troisièmement, ainsi qu’il a déjà été constaté (voir point 237 ci-dessus), il appartient à la requérante de faire valoir l’autorité de la chose jugée des arrêts nationaux en cause devant les autorités nationales ou le juge national, en contestant la décision nationale de récupération par laquelle ces autorités transposent la décision de la Commission. C’est le juge national auquel il appartient, éventuellement saisi, d’apprécier, le cas échéant, après avoir posé à la Cour des questions préjudicielles d’interprétation, les circonstances en cause (voir, en ce sens, arrêt Commission/Slovaquie, point 243 supra, point 60).

248    En tout état de cause, il y a lieu de relever que la requérante n’a produit l’arrêt de l’Oberverwaltungsgericht Rheinland-Pfalz du 25 mai 2011, point 243 supra, qu’au stade de la réplique, sans aucune motivation pour justifier spécifiquement le retard apporté à cette présentation. Or, en vertu de l’article 48, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de cet arrêt doit être rejetée comme irrecevable, étant donné qu’il ne constitue ni une ampliation de preuve ni une preuve contraire (voir la jurisprudence citée aux points 223 à 225 ci-dessus).

249    Il s’ensuit que la seconde branche du septième moyen tout comme ce moyen dans son ensemble doivent être rejetés.

 Sur le huitième moyen, tiré d’une violation du principe de nécessité et du principe de proportionnalité

250    La requérante fait valoir que, dans la mesure où la Commission exige la restitution de toutes les contributions versées depuis le 26 mai 1998, elle viole le principe de nécessité et le principe de proportionnalité. En effet, la compensation d’un SIEG n’impliquerait pas une contre-valeur économique qui demeurerait dans l’entreprise après la restitution de l’aide, mais serait contrebalancée par des pertes résultant de la fourniture de celui-ci. Dans le cas d’une disparition complète du montant compensatoire, ces pertes resteraient non couvertes et devraient être pleinement supportées par la requérante, ce qui serait contraire à la jurisprudence de la Cour selon laquelle le but de la récupération des aides ne serait pas d’infliger une sanction, mais de rétablir la situation telle qu’elle se présenterait en l’absence de distorsion de la concurrence.

251    À cet égard, il convient de rappeler que, pendant la période visée par la décision attaquée, à aucun moment tous les critères posés par l’arrêt Altmark, point 21 supra, n’ont été satisfaits cumulativement. Il a notamment été constaté que la Commission pouvait, à bon droit, considérer que le service en cause, à savoir le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie, tel que prescrit par l’article 10, paragraphe 2, des statuts de la requérante, n’avait engendré aucun coût net pour cette dernière. Sur cette base, il ne saurait être accepté que la Commission n’ordonne que la récupération partielle des contributions en cause. Au contraire, si la Commission parvient à la conclusion que l’aide en cause est incompatible avec le marché intérieur, il lui incombera d’ordonner sa récupération conformément à l’article 14 du règlement n° 659/1999 (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 25 novembre 2009, Andersen/Commission, T‑87/09, Rec. p. II‑225, points 59 et 60).

252    Le huitième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le neuvième moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE en ce qui concerne l’utilisation des contributions en cause pour le financement des coûts d’assainissement des sites désaffectés

253    La requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 107, paragraphe 1, TFUE en ce qu’elle aurait considéré que les contributions utilisées pour financer les coûts d’assainissement des sites désaffectés de Sohrschied et de Sprendlingen-Gensingen constituaient des aides d’État. Selon l’arrêt du Tribunal du 16 mars 2004, Danske Busvognmaend/Commission (T‑157/01, Rec. p. II‑917, point 57), la réduction des désavantages structurels que le bénéficiaire doit supporter par rapport aux opérateurs privés sur le marché ne constituerait pas un avantage économique. La requérante soutient également qu’elle n’était pas responsable en tant que pollueur des dommages causés à l’environnement en cause, mais qu’elle était tenue de remplir sa mission en conséquence d’une attribution contraignante par le Land de Rhénanie-Palatinat des anciens terrains contaminés et qu’elle fournit une contrepartie pour les contributions versées. Selon la requérante, il n’existe aucun lien entre l’assainissement des sites contaminés et l’élimination de cadavres d’animaux qu’elle effectue, étant donné qu’elle n’exploiterait aucune installation sur ces sites. La Commission aurait donc dû examiner la question de savoir pourquoi cette partie de son activité constituait une activité économique. Elle n’aurait jamais reçu d’avantage économique dès lors que les coûts d’assainissement des sites seraient plus élevés que la valeur marchande des terrains transférés. Aucune entreprise privée soumise à la concurrence n’accepterait de reprendre et de réhabiliter ces sites contaminés. La requérante souligne qu’elle est tenue de mettre des ressources à disposition de manière illimitée. Selon la requérante, la Commission a violé son obligation de procéder à un examen diligent et impartial des faits. Lors de l’audience, la requérante a indiqué qu’environ 10 % des contributions versées avaient servi à financer les coûts d’assainissement des sites désaffectés de Sohrschied et de Sprendlingen-Gensingen.

254    À cet égard, il convient de constater que, en réponse à l’affirmation de la République fédérale d’Allemagne selon laquelle une partie des contributions servait à financer les coûts d’assainissement des sites désaffectés de Sohrschied et de Sprendlingen-Gensingen (considérant 130 de la décision attaquée), la Commission a examiné, aux considérants 293 à 303 de la décision attaquée, si les contributions en cause constituaient des aides d’État compatibles avec le marché intérieur, en vertu de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE au sens des lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement. Elle a constaté que ces contributions constituaient des aides au fonctionnement qui n’étaient pas compatibles avec le marché intérieur en vertu de ces dispositions, puisque, selon le droit allemand, la requérante aurait été entièrement responsable pour les coûts d’assainissement des deux sites désaffectés.

255    Premièrement, s’agissant de l’argumentation selon laquelle il n’existe aucun lien entre l’assainissement des sites contaminés et l’élimination de cadavres d’animaux effectuée par la requérante et selon laquelle la Commission aurait donc dû examiner la question de savoir pourquoi cette partie de l’activité de la requérante constituait une activité économique, il convient de rappeler que constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné et que la qualification d’activité relevant de l’exercice des prérogatives de puissance publique ou d’activité économique doit être faite à part pour chaque activité exercée par une entité donnée (voir points 51 et 53 ci-dessus). En outre, il a déjà été constaté que, afin de trancher la question de savoir si la requérante agissait en exerçant des prérogatives de puissance publique ou si elle exerçait des activités économiques, il était nécessaire d’examiner la nature de l’activité concernée et que, à cet égard, il convenait de vérifier si l’activité en cause, par sa nature, par son objet et par les règles auxquelles elle était soumise, se rattachait à l’exercice des prérogatives de puissance publique ou si elle présentait un caractère économique justifiant l’application des règles de concurrence du droit de l’Union (voir point 56 ci-dessus).

256    À la lumière de ces critères, force est de constater que l’activité d’assainissement sur les deux sites contaminés constituait une activité économique. En effet, à supposer même qu’il n’existe pas de lien entre l’assainissement des sites contaminés et l’élimination de cadavres d’animaux effectuée par la requérante, l’assainissement des sites en cause ne se rattache aucunement, par sa nature, par son objet et par les règles auxquelles il est soumis, à l’exercice de prérogatives de puissance publique. La requérante n’a, d’ailleurs, invoqué aucun élément permettant de considérer que cette activité avait un caractère régalien. En particulier, la requérante n’est pas fondée à alléguer que les charges financières illimitées en vue de l’assainissement des sites ne pouvaient lui être imposées que du fait de son caractère de droit public.

257    Par ailleurs, il convient de considérer que, même selon les observations présentées par la requérante, il existe un lien entre l’assainissement des sites et l’élimination de cadavres d’animaux effectuée par la requérante. En effet, il est constant que la contamination des sites est due à l’élimination de carcasses. En outre, en vertu du Landesverordnung über den Übergang des der Tierkörperbeseitigung dienenden Verwaltungsvermögens auf den Zweckverband nach § 2 des Landestierkörperbeseitigungsgesetzes (règlement du Land relatif au transfert des actifs administratifs servant à l’élimination de cadavres d’animaux à la requérante conformément à l’article 2 de la LTierKBG) du Land de Rhénanie-Palatinat du 5 juillet 1979 (GVBl. 1979, p. 239), produit par la requérante, les actifs des arrondissements et des villes n’appartenant à aucun arrondissement du Land de Rhénanie-Palatinat, qui, jusqu’au 31 décembre 1978, ont servi à l’accomplissement des missions d’élimination de cadavres d’animaux, y compris les charges s’y rapportant, ont été transférés à la requérante. Cette dernière devait reprendre les installations des arrondissements et des villes n’appartenant à aucun arrondissement du Land de Rhénanie-Palatinat destinées à l’élimination de cadavres d’animaux. La contamination des sites en cause était donc le résultat de l’activité économique d’élimination des prédécesseurs de la requérante.

258    Deuxièmement, au soutien de l’argumentation selon laquelle elle n’aurait pas obtenu d’avantage économique résultant des contributions utilisées pour financer les coûts d’assainissement des deux sites désaffectés, la requérante invoque l’arrêt Danske Busvognmænd/Commission (point 253 supra, point 57).

259    Il convient de rappeler que, dans cet arrêt, le Tribunal a jugé que, lors de la privatisation d’une entreprise de transport par autobus, le versement par un État membre d’une rémunération unique au bénéfice de fonctionnaires qui étaient employés par cette société, en compensation de leur renonciation aux droits découlant de leur statut de fonctionnaire lors de leur passage au statut d’agent contractuel auprès de cette entreprise, ne constituait pas une aide d’État. Le Tribunal a, en effet, admis à cet égard que la mesure en cause visait à remplacer le statut privilégié et coûteux des fonctionnaires employés par l’entreprise concernée par un statut d’agent contractuel comparable à celui des employés d’autres entreprises de transport par autobus et, partant, à libérer l’entreprise concernée du désavantage structurel, résultant du statut privilégié des fonctionnaires, par rapport à ses concurrents privés (arrêt du Tribunal du 28 novembre 2008, Hotel Cipriani e.a./Commission, T‑254/00, T‑270/00 et T‑277/00, Rec. p. II‑3269, point 187).

260    Or, l’arrêt Danske Busvognmænd/Commission, point 253 supra, n’est pas transposable au cas d’espèce. En effet, les deux sites en cause ont été transférés à la requérante dans le cadre de sa création en 1979. Ainsi qu’il a déjà été constaté (voir point 257 ci-dessus), à ce moment-là, la requérante a obtenu tous les actifs des arrondissements et des villes n’appartenant à aucun arrondissement du Land de Rhénanie-Palatinat, qui, jusqu’au 31 décembre 1978, ont servi à l’accomplissement des missions d’élimination de cadavres d’animaux, y compris les charges s’y rapportant. Ainsi qu’il ressort du considérant 296 de la décision attaquée, ce n’est que par deux injonctions d’assainissement datant respectivement du 21 avril 1997 et du 31 mars 1998, qui ont obligé la requérante à effectuer l’assainissement complet des deux sites désaffectés, que cette dernière a été identifiée en tant que pollueur suivant le droit national applicable. Dans ce contexte, il ne saurait être conclu que les contributions en cause visaient à libérer la requérante d’un désavantage structurel par rapport à ses concurrents privés, au sens de l’arrêt Danske Busvognmænd/Commission, point 253 supra.

261    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la notion d’aide d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, est plus générale que celle de subvention parce qu’elle comprend non seulement des prestations positives telles que les subventions elles-mêmes, mais également des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui normalement grèvent le budget d’une entreprise et qui, par là même, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques (voir arrêt de la Cour du 8 septembre 2011, Commission/Pays-Bas, C‑279/08 P, Rec. p. I‑7671, point 86, et la jurisprudence citée). Au sens de cette jurisprudence, les coûts d’assainissement des deux sites désaffectés constituaient des charges qui normalement grevaient le budget de la requérante en tant qu’entreprise et qui étaient donc allégés par les contributions en cause. Par ailleurs, il convient de relever que l’objectif de compensation des désavantages concurrentiels ne pourrait enlever aux contributions en cause leur caractère d’aide au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir, en ce sens, arrêt Hotel Cipriani e.a./Commission, point 259 supra, points 181 à 184, confirmé par arrêt Comitato « Venezia vuole vivere » e.a./Commission, point 197 supra, point 100).

262    Cette appréciation n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante. En ce qui concerne son argument selon lequel aucun de ses concurrents ne doit supporter l’assainissement de sites contaminés dont il n’est pas responsable, mais qui lui a été imposé par un règlement du Land, il convient de relever que la requérante a justement été identifiée, en tant que pollueur suivant le droit national applicable, en vertu des injonctions d’assainissement datant des 21 avril 1997 et 31 mars 1998. Eu égard à la notion d’aide d’État, telle que définie par la jurisprudence (voir point 261 ci-dessus), doivent également être rejetés l’argument selon lequel l’assainissement en cause ne peut être financé d’une autre manière que par des contributions, étant donné que la requérante ne disposerait pas d’actifs propres ni d’aucune autre possibilité de se procurer les ressources nécessaires, et l’argument selon lequel aucune entreprise privée soumise à la concurrence n’accepterait de reprendre, ni de réhabiliter, ces sites.

263    Troisièmement, s’agissant d’une prétendue violation de l’obligation de procéder à un examen diligent et impartial des faits, la requérante fait valoir que la Commission aurait dû tenir compte du fait que les deux injonctions d’assainissement en cause constituaient seulement la conséquence du transfert des charges sur elle, prévu par le règlement du Land relatif au transfert des actifs administratifs du 5 juillet 1979 (voir point 257 ci-dessus).

264    À cet égard, il convient de rappeler que la Commission est tenue, dans l’intérêt d’une bonne administration des règles fondamentales du traité FUE relatives aux aides d’État, de procéder à un examen diligent et impartial de la plainte, ce qui peut rendre nécessaire qu’elle procède à l’examen des éléments qui n’ont pas été expressément évoqués par le plaignant (arrêt de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 62).

265    En l’espèce, il ressort du considérant 131 de la décision attaquée que la Commission était consciente du fait que, selon la République fédérale d’Allemagne, les deux terrains en cause étaient devenus la propriété de la requérante dès sa création en 1979. Toutefois, ainsi qu’il ressort des considérants 293 à 303 de la décision attaquée, l’élément décisif pour la Commission, dans le cadre de l’examen de la compatibilité des contributions avec l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, était le fait que, selon les deux injonctions d’assainissement en cause, la requérante était formellement obligée de supporter les coûts d’assainissement des sites désaffectés et que, dès lors, les contributions relatives à ces coûts constituaient un avantage économique pour elle. Il s’ensuit que la Commission n’a pas violé son obligation de procéder à un examen diligent et impartial des faits.

266    Par conséquent, le neuvième moyen doit être rejeté.

267    Au vu de tout ce qui précède, le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

268    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière. Les parties intervenantes n’ayant pas formulé de conclusions à cet égard, elles supporteront leurs propres dépens. Les dépens afférents à la procédure de référé seront supportés par la requérante, conformément aux conclusions de la Commission et des parties intervenantes.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Zweckverband Tierkörperbeseitigung in Rheinland-Pfalz, im Saarland, im Rheingau-Taunus-Kreis und im Landkreis Limburg-Weilburg supportera ses propres dépens afférents à la procédure principale ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

3)      Saria Bio-Industries AG & Co. KG, SecAnim GmbH et Knochen- und Fett-Union GmbH (KFU) supporteront leurs propres dépens afférents à la procédure principale.

4)      La Zweckverband Tierkörperbeseitigung in Rheinland-Pfalz, im Saarland, im Rheingau-Taunus-Kreis und im Landkreis Limburg-Weilburg supportera les dépens afférents à la procédure de référé.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 juillet 2014.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Contexte juridique en cause

Procédures administrative et judiciaire

Décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, relatif à l’existence d’une entreprise

Sur l’argumentation relative à l’organisation de l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sous la forme d’une mission obligatoire d’intérêt public

Sur l’argumentation relative au pouvoir de l’État membre de prévoir une organisation sous la forme d’une mission de service public

Sur l’argumentation relative à l’absence de marché

– Sur l’élimination des matières des catégories 1 et 2 sur le territoire de compétence de la requérante

– Sur le maintien d’une réserve de capacités en cas d’épizootie

Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, relatif à l’absence d’avantage économique et à l’existence d’un SIEG

Sur la première branche, tirée de l’absence d’avantage économique réel

Sur la deuxième branche, tirée d’une erreur de droit relative à l’existence d’un SIEG

Sur la troisième branche, tirée d’une erreur de droit relative à l’application des critères posés par l’arrêt Altmark

– Sur le premier critère posé par l’arrêt Altmark, relatif à l’exécution d’obligations de service public

– Sur le deuxième critère posé par l’arrêt Altmark, relatif à l’établissement préalable des paramètres sur la base desquels est calculée la compensation

– Sur le troisième critère posé par l’arrêt Altmark, relatif à la nécessité du niveau des contributions

– Sur le quatrième critère posé par l’arrêt Altmark, relatif à l’analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée aurait encourus

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, relatif à l’atteinte au commerce entre États membres et à la distorsion de la concurrence

Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE en raison d’une méconnaissance des conditions d’autorisation visées dans cette disposition

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de la répartition des compétences entre l’Union et les États membres ainsi que d’une violation du principe de subsidiarité

Sur le sixième moyen, tiré d’une violation de l’article 108, paragraphe 1, TFUE, de l’article 1er, sous b), et de l’article 14 du règlement n° 659/1999

Sur le septième moyen, tiré d’une méconnaissance des exigences des principes de confiance légitime et de sécurité juridique

Sur la première branche, tirée d’une violation du principe de confiance légitime

Sur la seconde branche, tirée d’une violation du principe de sécurité juridique

Sur le huitième moyen, tiré d’une violation du principe de nécessité et du principe de proportionnalité

Sur le neuvième moyen, tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE en ce qui concerne l’utilisation des contributions en cause pour le financement des coûts d’assainissement des sites désaffectés

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’allemand.