Language of document : ECLI:EU:C:2015:161

ORDONNANCE DE LA COUR (troisième chambre)

10 mars 2015 (*)

«Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Marques – Directive 2008/95/CE – Article 5, paragraphe 1 – Notion de ‘tiers’ – Titulaire d’une marque postérieure»

Dans l’affaire C‑491/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Madrid (Espagne), par décision du 26 mars 2014, parvenue à la Cour le 5 novembre 2014, dans la procédure

Rosa dels Vents Assessoria SL

contre

U Hostels Albergues Juveniles SL,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič (rapporteur), président de chambre, M. A. Ó Caoimh, Mme C. Toader, MM. E. Jarašiūnas et C. G. Fernlund, juges,

avocat général: M. M. Wathelet,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO L 299, p. 25).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Rosa dels Vents Assessoria SL (ci-après «Rosa dels Vents») à U Hostels Albergues Juveniles SL (ci-après «U Hostels») au sujet d’une action, introduite par Rosa dels Vents en sa qualité de titulaire de marques, tendant à faire interdire, cesser et retirer l’usage par U Hostels d’une marque postérieure dont celle-ci est titulaire.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        L’article 4 de la directive 2008/95 dispose:

«1.      Une marque est refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle:

a)      lorsqu’elle est identique à la marque antérieure et que les produits ou services pour lesquels la marque a été demandée ou a été enregistrée sont identiques à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée;

b)      lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

2.      Aux fins du paragraphe 1, on entend par ‘marques antérieures’:

a)      les marques dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque, [...]

[...]»

4        Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, de cette directive:

«La marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires:

a)      d’un signe identique à la marque pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée;

b)      d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque et le signe, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association entre le signe et la marque.»

5        L’article 9, paragraphe 1, de ladite directive prévoit:

«Le titulaire d’une marque antérieure telle que visée à l’article 4, paragraphe 2, qui a toléré, dans un État membre, l’usage d’une marque postérieure enregistrée dans cet État membre pendant une période de cinq années consécutives en connaissance de cet usage ne peut plus demander la nullité ni s’opposer à l’usage de la marque postérieure sur la base de cette marque antérieure pour les produits ou les services pour lesquels la marque postérieure a été utilisée, à moins que le dépôt de la marque postérieure n’ait été effectué de mauvaise foi.»

6        L’article 8 du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1), dispose:

«1.      Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement:

a)      lorsqu’elle est identique à la marque antérieure et que les produits ou les services pour lesquels la marque a été demandée sont identiques à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée;

b)      lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

2.      Aux fins du paragraphe 1, on entend par ‘marques antérieures’:

a)      les marques dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire, [...]

[...]»

7        L’article 9, paragraphe 1, de ce règlement prévoit:

«La marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires:

a)      d’un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée;

b)      d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque;

[...]»

8        L’article 53, paragraphe 1, dudit règlement énonce:

«La marque communautaire est déclarée nulle sur demande présentée auprès de l’Office [de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI)] ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon:

a)      lorsqu’il existe une marque antérieure visée à l’article 8, paragraphe 2, et que les conditions énoncées au paragraphe 1 ou au paragraphe 5 dudit article sont remplies;

[...]»

9        Aux termes de l’article 54, paragraphe 1, du même règlement:

«Le titulaire d’une marque communautaire qui a toléré pendant cinq années consécutives l’usage d’une marque communautaire postérieure dans la Communauté en connaissance de cet usage ne peut plus demander la nullité ni s’opposer à l’usage de la marque postérieure sur la base de cette marque antérieure pour les produits ou les services pour lesquels la marque postérieure a été utilisée, à moins que le dépôt de la marque communautaire postérieure n’ait été effectué de mauvaise foi.»

 Le droit espagnol

10      Aux termes de l’article 34, paragraphe 2, de la loi 17/2001 sur les marques (Ley 17/2001 de Marcas, BOE no 294, du 8 décembre 2001), du 7 décembre 2001 (ci-après la «loi sur les marques»):

«[L]e titulaire de la marque enregistrée est habilité à interdire aux tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires:

a)      d’un signe identique à la marque pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée.

b)      d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services, il existe un risque de confusion du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque.

[...]»

 Le litige au principal et la question préjudicielle

11      Le 20 mars 2013, Rosa dels Vents a introduit un recours contre U Hostels devant le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Madrid tendant à faire interdire, cesser et retirer l’usage, par U Hostels, de la marque nationale verbale et figurative no 3058294, comprenant une présentation stylisée du signe verbal «uh», dont U Hostels est titulaire. Cet usage par U Hostels de ladite marque porterait atteinte aux droits conférés à Rosa dels Vents par deux marques antérieures dont cette dernière est titulaire, à savoir les marques nationales verbales et figuratives nos 3049232 et 3049402.

12      U Hostels fait observer, dans son mémoire en défense dans le cadre du litige au principal, que Rosa dels Vents n’a pas introduit d’action en nullité de ladite marque nationale no 3058294 (ci-après la «marque postérieure»). En conséquence, elle conclut au rejet du recours.

13      Le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Madrid constate que, selon la jurisprudence du Tribunal Supremo, un recours par lequel le titulaire d’une marque s’oppose à l’usage par un tiers d’une marque postérieure dont ce tiers est titulaire ne saurait être accueilli en l’absence d’introduction d’un recours visant la nullité de cette marque postérieure.

14      Cependant, cette jurisprudence, qui est fondée sur le principe de l’immunité conférée par l’enregistrement et non sur le principe de priorité, ne correspondrait pas à celle de la Cour, fondée sur le principe de priorité, au sujet des situations dans lesquelles le titulaire d’une marque communautaire s’oppose à l’usage par un tiers d’une marque communautaire postérieure dont ce tiers est titulaire. En effet, dans son arrêt Fédération Cynologique Internationale (C‑561/11, EU:C:2013:91), la Cour a, en réponse à une question préjudicielle posée par le Juzgado de lo Mercantil no 1 de Alicante y no 1 de Marca Comunitaria, dit pour droit que l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 doit être interprété en ce sens que le droit exclusif du titulaire d’une marque communautaire d’interdire à tout tiers de faire usage dans la vie des affaires des signes identiques ou similaires à sa marque s’étend au tiers titulaire d’une marque communautaire postérieure, sans qu’il soit nécessaire que la nullité de cette dernière marque soit déclarée au préalable.

15      Le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Madrid se demande si cette interprétation de l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 doit être transposée à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95. Il expose que, si le libellé de cette seconde disposition correspond en substance à celui de la première, il n’en découle pas nécessairement que l’interprétation faite par la Cour de la première disposition dans l’arrêt Fédération Cynologique Internationale (EU:C:2013:91) s’applique par analogie à la seconde.

16      Ladite juridiction précise, par ailleurs, que l’article 34, paragraphe 2, de la loi sur les marques comporte les termes «interdire aux tiers» («prohibir que los terceros»), qui ne correspondent donc pas exactement aux termes «interdire à tout tiers» («prohibir a cualquier tercero»), figurant à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95 ainsi qu’à l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 207/2009. Ladite disposition de droit national pourrait, dès lors, être qualifiée de mise en œuvre incomplète de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95, ce qui soulèverait la question de son interprétation conforme à cette directive.

17      Dans ces conditions, le Juzgado de lo Mercantil no 3 de Madrid a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«L’article 5, paragraphe 1, de la directive [2008/95] doit-il être interprété en ce sens que le droit exclusif du titulaire d’une marque d’interdire à tout tiers de faire usage dans la vie des affaires des signes identiques ou similaires à sa marque s’étend au tiers titulaire d’une marque postérieure, sans qu’il soit nécessaire que la nullité de cette dernière marque soit déclarée au préalable?»

 Sur la question préjudicielle

18      En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

19      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre du présent renvoi préjudiciel.

20      Dans l’arrêt Fédération Cynologique Internationale (EU:C:2013:91), la Cour a jugé que l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 doit être interprété en ce sens que le droit exclusif du titulaire d’une marque communautaire d’interdire à tout tiers de faire usage dans la vie des affaires des signes identiques ou similaires à sa marque s’étend au tiers titulaire d’une marque communautaire postérieure, sans qu’il soit nécessaire que la nullité de cette dernière marque soit déclarée au préalable.

21      La Cour a fondé cette interprétation sur les considérations suivantes:

«33      Il importe de relever, tout d’abord, que l’article 9, paragraphe 1, du règlement [no 207/2009] ne fait pas de différence selon que le tiers est titulaire d’une marque communautaire ou ne l’est pas. Ainsi, cette disposition reconnaît au titulaire d’une marque communautaire un droit exclusif qui l’habilite à interdire à ‘tout tiers’, en l’absence de son consentement, de faire usage, dans la vie des affaires, de signes susceptibles de porter atteinte à sa marque [...]

34      Il convient de tenir compte, ensuite, de l’article 54 [de ce] règlement, concernant la forclusion par tolérance, aux termes duquel ‘[l]e titulaire d’une marque communautaire qui a toléré pendant cinq années consécutives l’usage d’une marque communautaire postérieure [...] ne peut plus demander la nullité ni s’opposer à l’usage de la marque postérieure’.

35      Il ressort du libellé de cette disposition que, avant qu’une forclusion par tolérance ne soit intervenue, le titulaire d’une marque communautaire est habilité tant à demander la nullité d’une marque communautaire postérieure devant l’OHMI qu’à s’opposer à son usage en vertu d’une action en contrefaçon devant un tribunal des marques communautaires.

36      Il y a lieu de signaler, enfin, que ni l’article 12 du règlement [no 207/2009], relatif à la limitation des effets de la marque communautaire, ni aucune autre disposition de celui-ci ne prévoit de limitation expresse du droit exclusif du titulaire de la marque communautaire au bénéfice du tiers titulaire d’une marque communautaire postérieure.

37      Il ressort ainsi du libellé de l’article 9, paragraphe 1, [de ce] règlement et de l’économie générale de ce dernier que le titulaire d’une marque communautaire doit pouvoir interdire au titulaire d’une marque communautaire postérieure de faire usage de celle-ci.

38      Cette conclusion n’est pas remise en cause par la circonstance que le titulaire d’une marque communautaire postérieure bénéficie, lui aussi, d’un droit exclusif en vertu de l’article 9, paragraphe 1, [dudit] règlement.

39      À cet égard, il convient de relever que [...] les dispositions du règlement [no 207/2009] doivent être interprétées à la lumière du principe de priorité, en vertu duquel la marque communautaire antérieure prime sur la marque communautaire postérieure [...]

40      En effet, il découle notamment des articles 8, paragraphe 1, et 53, paragraphe 1, [de ce] règlement que, en cas de conflit entre deux marques, celle enregistrée en premier lieu est présumée réunir les conditions requises pour obtenir la protection communautaire avant celle enregistrée en second lieu.

[...]

49      Il y a lieu de souligner, au demeurant, la nécessité de préserver la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir aux consommateurs la provenance du produit (arrêt Arsenal Football Club, C‑206/01, EU:C:2002:651, point 51).

50      À cet égard, la Cour a déjà considéré à plusieurs reprises que le droit exclusif prévu à l’article 9, paragraphe 1, du règlement [no 207/2009] a été octroyé afin de permettre au titulaire de la marque de protéger ses intérêts spécifiques en tant que titulaire de cette marque, c’est-à-dire d’assurer que cette dernière puisse remplir ses fonctions propres (voir arrêt Google France et Google, C‑236/08 à C‑238/08, EU:C:2010:159, point 75 et jurisprudence citée).

51      Or [...], si le titulaire d’une marque communautaire antérieure devait, pour interdire l’usage, par un tiers, d’un signe qui porterait atteinte aux fonctions de sa marque, attendre la déclaration de nullité de la marque communautaire postérieure dont ledit tiers est titulaire, la protection que l’article 9, paragraphe 1, [de ce] règlement lui confère serait considérablement affaiblie.»

22      Ces considérations sur la portée du droit exclusif conféré par la marque communautaire sont pertinentes pour interpréter la portée du droit exclusif conféré par les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement dans un État membre ou auprès de l’Office Benelux de la propriété intellectuelle ou qui ont fait l’objet d’un enregistrement international produisant ses effets dans un État membre, telle qu’harmonisée par la directive 2008/95.

23      En effet, tout d’abord, à l’instar de l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95 confère au titulaire d’une marque enregistrée un droit exclusif et lui donne droit d’interdire «à tout tiers», en l’absence de son consentement, de faire usage, dans la vie des affaires, de signes susceptibles de porter atteinte à sa marque. À cet égard, ces dispositions ne distinguent pas selon que les tiers sont titulaires ou non d’une marque.

24      Une réglementation nationale, telle que l’article 34, paragraphe 2, de la loi sur les marques, qui, sans reprendre littéralement les termes de la directive 2008/95 ou du règlement no 207/2009 sur l’interdiction «à tout tiers» de faire usage, dans la vie des affaires, de signes susceptibles de porter atteinte à une marque enregistrée sans le consentement du titulaire de celle-ci, interdit «aux tiers» un tel usage, doit être regardée comme étant libellée de manière analogue aux actes de l’Union européenne en cause. Il appartient à la juridiction de renvoi de procéder à une application de l’article 34, paragraphe 2, de la loi sur les marques qui est conforme à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95, tel qu’interprété par la Cour.

25      Ensuite, à l’instar de l’article 54 du règlement no 207/2009, l’article 9 de la directive 2008/95 prévoit que «[l]e titulaire d’une marque antérieure [...] qui a toléré [...] l’usage d’une marque postérieure enregistrée [...] pendant une période de cinq années consécutives en connaissance de cet usage ne peut plus demander la nullité ni s’opposer à l’usage de la marque postérieure». Il ressort du libellé de cette disposition que, avant qu’une forclusion par tolérance ne soit intervenue, le titulaire d’une marque est habilité tant à demander la nullité d’une marque postérieure qu’à s’opposer à son usage en vertu d’une action en contrefaçon.

26      Il y a lieu de préciser, enfin, que, à l’instar du règlement no 207/2009, aucune disposition de la directive 2008/95 ne prévoit de limitation expresse du droit exclusif du titulaire de la marque au bénéfice du tiers titulaire d’une marque postérieure.

27      Il ressort ainsi du libellé de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95 et de l’économie générale de cette dernière que, dans les conditions qu’elle énonce, le titulaire d’une marque doit pouvoir interdire au titulaire d’une marque postérieure de faire usage de celle-ci.

28      Cette conclusion n’est pas remise en cause par la circonstance que le titulaire d’une marque postérieure bénéficie également d’un droit exclusif, en vertu de la règle énoncée à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95.

29      En effet, pour la même raison que celle exposée aux points 39 et 40 de l’arrêt Fédération Cynologique Internationale (EU:C:2013:91), les dispositions de la directive 2008/95 doivent être interprétées à la lumière du principe de priorité, en vertu duquel la marque antérieure prime sur la marque postérieure, dès lors qu’il découle notamment de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2008/95 que, en cas de conflit entre des marques, celle enregistrée en premier lieu est présumée réunir les conditions requises pour obtenir la protection avant celle enregistrée en second lieu.

30      Par ailleurs, les considérations exposées aux points 49 à 51 de l’arrêt Fédération Cynologique Internationale (EU:C:2013:91) sont, elles aussi, applicables mutatis mutandis à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95.

31      Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre à la question posée que l’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95 doit être interprété en ce sens que le droit exclusif du titulaire d’une marque d’interdire à tout tiers de faire usage dans la vie des affaires des signes identiques ou similaires à sa marque s’étend au tiers titulaire d’une marque postérieure, sans qu’il soit nécessaire que la nullité de cette dernière marque soit déclarée au préalable.

 Sur les dépens

32      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

L’article 5, paragraphe 1, de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques, doit être interprété en ce sens que le droit exclusif du titulaire d’une marque d’interdire à tout tiers de faire usage dans la vie des affaires des signes identiques ou similaires à sa marque s’étend au tiers titulaire d’une marque postérieure, sans qu’il soit nécessaire que la nullité de cette dernière marque soit déclarée au préalable.

Signatures


* Langue de procédure: l’espagnol.