Language of document : ECLI:EU:T:2017:35

Édition provisoire

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

26 janvier 2017 (*)

« Marchés publics de services – Procédure d’appel d’offres – Fourniture de services de production audiovisuelle intégrée, de diffusion et d’archivage – Rejet de l’offre d’un soumissionnaire – Attribution du marché à un autre soumissionnaire – Offre anormalement basse – Obligation de demander des précisions – Obligation de motivation – Transparence – Égalité de traitement et non-discrimination – Erreur manifeste d’appréciation »

Dans l’affaire T‑700/14,

TV1 GmbH, établie à Unterföhring (Allemagne), représentée par Mes C. Scherer-Leydecker, J. Mey et A. Rausch, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par Mme F. Moro et M. M. Noll-Ehlers, puis par Mme Moro et M. T. Maxian Rusche et enfin par M. Maxian Rusche et Mme A. Katsimerou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision de la Commission rejetant l’offre soumise par la requérante pour le lot n° IV, intitulé « Diffusion en flux, compression, hébergement et diffusion de contenu », dans le cadre d’un avis de marché portant la référence PO/2014-03/A4 et concernant des « [s]ervices intégrés de production audiovisuelle, de diffusion et d’archivage », de la décision par laquelle la Commission a attribué ce lot au soumissionnaire retenu et du contrat de prestation de services conclu entre la Commission et le soumissionnaire retenu,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich (rapporteur), président, J. Schwarcz et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : Mme S. Bukšek Tomac, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 14 septembre 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige et mesures attaquées

1        La requérante, TV1 GmbH, fournit des services de télédiffusion en flux direct et de vidéo en ligne.

2        Par un avis daté du 26 mars 2014, publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2014/S 60-100199) sous la référence PO/2014-03/A4 et rectifié le 17 mai 2014 (JO 2014/S 95‑165517), la Commission européenne a lancé un appel d’offres pour des services de production audiovisuelle intégrée, de diffusion et d’archivage. Cet appel d’offres concernait le service d’informations télévisées de l’Union européenne nommé « Europe by Satellite », qui consistait en deux chaînes, à savoir « EbS » et « EbS+ ».

3        L’appel d’offres comprenait quatre lots, dont le lot n° IV, qui avait pour objet des services de diffusion en flux, de compression, d’hébergement et de livraison de contenu. La durée d’exécution pour ce marché était de 60 mois à partir de la date de son attribution et le budget maximal pour cette période de 3 500 000 euros.

4        Les exigences de l’appel d’offres concernant le lot n° IV étaient précisées dans le cahier des charges relatif audit lot (ci-après le « cahier des charges »). Selon le point 5 dudit cahier, le marché devait être attribué à l’offre économiquement la plus avantageuse, compte tenu de trois critères de qualité technique et du critère du prix. Selon le point 5.1 du cahier des charges, le résultat de l’évaluation de la qualité technique de l’offre correspondait à la somme des points obtenus après l’évaluation de chaque critère de qualité technique. Seules les offres ayant obtenu un score d’au moins 60 % pour chaque critère de qualité technique et un score total d’au moins 70 % devaient être prises en compte pour l’attribution du marché. En application du point 5.3 du cahier des charges, le marché devait être attribué à l’offre ayant reçu la note la plus élevée selon la formule suivante : la note de l’offre X est égale au prix le moins élevé sur le prix de l’offre X, multiplié par 40, auquel s’ajoute la note totale pour la qualité (sur 100) pour tous les critères de l’offre X, multipliée par 60.

5        Le dossier d’appel d’offres contenait également un projet de contrat de services à conclure avec le soumissionnaire retenu (ci-après le « projet de contrat de services »).

6        Le 22 mai 2014, la requérante, qui a fourni des services analogues à ceux faisant l’objet du lot n° IV à la Commission sur la base d’un contrat de service individuel jusqu’en septembre 2014, a soumis son offre pour le lot n° IV.

7        Par lettre du 25 juillet 2014, la Commission a informé la requérante du fait que son offre avait obtenu une note inférieure à l’offre du soumissionnaire retenu. Dans cette lettre, la Commission lui a également communiqué le nombre de points qu’elle avait atteints dans le cadre de l’évaluation technique, à savoir 91 sur 100, ainsi que les observations du comité d’évaluation concernant son offre.

8        Par courrier électronique du 29 juillet 2014, la requérante a demandé des informations sur le soumissionnaire retenu, sur son propre classement parmi les autres soumissionnaires et sur les motifs pour lesquels son offre avait reçu moins de points lors de l’évaluation des différents critères de qualité.

9        Par lettre du 1er août 2014, la Commission a informé la requérante du fait que l’offre retenue avait obtenu une note finale de 97,00 points, alors que son offre avait obtenu une note finale de 90,06 points, lui a communiqué le nom du soumissionnaire retenu, le nombre de points que l’offre dudit soumissionnaire avait atteints dans le cadre de l’évaluation technique, à savoir 95 points sur 100, le prix qu’il avait offert ainsi que des extraits du rapport d’évaluation contenant les observations du comité d’évaluation à cet égard.

10      Par courriels des 5, 11 et 14 août 2014, la requérante a contesté la décision de la Commission d’attribuer le lot n° IV au soumissionnaire retenu, lui a demandé de suspendre la procédure d’appel d’offres et a demandé à avoir accès au dossier de ladite procédure. La Commission a répondu à ces écrits par courriels des 8 et 14 août 2014 ainsi que par lettre du 20 août 2014.

11      Le 18 août 2014, la Commission a signé un contrat portant sur les prestations relevant du lot n° IV avec le soumissionnaire retenu.

12      Par lettre du 4 septembre 2014, la requérante a demandé à avoir accès aux documents concernant la procédure d’appel d’offres en cours, en invoquant notamment les dispositions du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43).

13      Par lettre du 29 septembre 2014, la Commission a accordé un accès partiel à ces documents.

14      Le 20 octobre 2014, la requérante a introduit une demande au titre de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001.

15      Par décision du 22 décembre 2014, la Commission a confirmé sa décision de refus partiel du 29 septembre 2014.

 Procédure et conclusion des parties

16      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 septembre 2014, la requérante a introduit le présent recours.

17      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a demandé qu’il soit statué sur le présent recours selon une procédure accélérée, conformément à l’article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991. Le 14 octobre 2014, la Commission a déposé ses observations sur cette demande. Par décision du 17 octobre 2014, le Tribunal (neuvième chambre) a rejeté la demande de procédure accélérée.

18      Le 11 décembre 2014, la Commission a présenté le mémoire en défense.

19      La réplique a été déposée au greffe du Tribunal le 29 janvier 2015.

20      La duplique a été déposée au greffe du Tribunal le 13 mars 2015.

21      Le 14 mars 2016, conformément à l’article 27, paragraphes 3 et 4, du règlement de procédure du Tribunal, l’affaire a été attribuée à un nouveau juge rapporteur, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice.

22      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, a posé aux parties des questions écrites. Les parties ont répondu à ces questions dans les délais impartis.

23      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 14 septembre 2016.

24      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de la Commission de ne pas lui attribuer le lot n° IV, notifiée par lettre du 25 juillet 2014, ainsi que sa décision d’attribuer le marché au soumissionnaire retenu, notifiée par lettre du 1er août 2014 ;

–        annuler le contrat de prestation de services conclu entre l’Union, représentée par la Commission, et le soumissionnaire retenu ;

–        condamner la Commission aux dépens, y compris aux éventuels frais de justice, aux éventuels services d’experts et aux frais exposés dans le cadre de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour ainsi que les honoraires d’avocat ;

–        adopter une mesure d’organisation de la procédure conformément à l’article 64, paragraphe 3, sous d), du règlement de procédure du 2 mai 1991 invitant la Commission à produire les documents ou toute pièce relative à la présente affaire et à garantir l’accès à l’intégralité du dossier.

25      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande d’annulation de la décision d’attribution et, donc, des décisions d’attribuer le marché non pas à la requérante, mais au soumissionnaire retenu ;

–        rejeter la demande d’annulation du contrat de prestation de services conclu entre l’Union et le soumissionnaire retenu ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        rejeter la demande d’accès au dossier.

 En droit

1.     Sur les demandes d’annulation

26      La requérante demande l’annulation de la décision de rejet de son offre, qui lui a été communiquée par lettre de la Commission du 25 juillet 2014 (ci-après la « décision de rejet »), ainsi que de la décision d’attribution du marché au soumissionnaire retenu, qui lui a été communiquée par lettre de la Commission du 1er août 2014 (ci-après la « décision d’attribution »). Elle demande également au Tribunal d’annuler le contrat de prestation de services que la Commission a conclu avec le soumissionnaire retenu.

27      À l’appui de ces demandes d’annulation, la requérante invoque quatre moyens.

28      Dans le cadre du premier moyen, elle fait valoir que, en ne tenant pas compte du caractère anormalement bas de l’offre retenue, en ne procédant pas à un examen minutieux à cet égard et en ne rejetant pas cette offre, la Commission a violé l’article 110, paragraphe 2, du règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1, ci-après le « règlement financier ») et l’article 151 de son règlement délégué (UE) n° 1268/2012, du 29 octobre 2012, relatif aux règles d’application du règlement financier (JO 2012, L 362, p. 1, ci-après les « règles d’application »).

29      Le deuxième moyen est tiré de la non-conformité des documents d’appel d’offres avec les principes de transparence, de proportionnalité, d’égalité de traitement et de non-discrimination, prévus aux articles 102 et 105 du règlement financier.

30      Les troisième et quatrième moyens sont tirés d’erreurs manifestes d’appréciation, de détournements de pouvoir et de violations de l’obligation de motivation, qui auraient été commis par le comité d’évaluation lors de l’évaluation de l’offre du soumissionnaire retenu et de celle de la requérante.

31      Dans la mesure où les deuxième, troisième et quatrième moyens visent en partie les mêmes éléments ou des éléments connexes, ils seront examinés ensemble après le premier moyen.

 Sur le premier moyen, tiré du caractère anormalement bas du prix de l’offre du soumissionnaire retenu

32      Par le présent moyen, la requérante fait valoir que la Commission a violé l’article 110, paragraphe 2, du règlement financier, l’article 151 des règles d’application ainsi que l’obligation de bonne administration. Dans ce contexte, elle avance que la Commission n’a pas suffisamment tenu compte du caractère anormalement bas de l’offre du soumissionnaire retenu, n’a pas demandé de précisions supplémentaires à cet égard et n’a pas rejeté cette offre.

33      À cet égard, à titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 110, paragraphes 1 et 2, du règlement financier, après vérification, sur la base des critères de sélection définis dans les documents d’appel à la concurrence, de la capacité des opérateurs économiques non exclus, les marchés sont attribués à l’offre économiquement la plus avantageuse sur la base des critères d’attribution applicables au contenu de l’offre.

34      En vertu de l’article 110, paragraphe 3, du règlement financier, la Commission est habilitée à adopter des actes délégués notamment en ce qui concerne des règles détaillées sur les offres anormalement basses.

35      L’article 151, paragraphe 1, première phrase, des règles d’application dispose ce qui suit :

« Si, pour un marché donné, des offres apparaissent anormalement basses, le pouvoir adjudicateur, avant de rejeter ces offres pour ce seul motif, demande, par écrit, les précisions qu’il juge opportunes sur la composition de l’offre et vérifie de manière contradictoire cette composition en tenant compte des justifications fournies. »

36      La notion d’« offre anormalement basse » ne comporte de définition ni dans les dispositions du règlement financier, ni dans celles de ses modalités d’exécution.

37      Cependant, il ressort de la jurisprudence que le caractère anormalement bas d’une offre doit être apprécié par rapport à la composition de l’offre et par rapport à la prestation en cause. Ainsi, la Cour a précisé que le pouvoir adjudicateur pouvait, dans le cadre de son examen du caractère anormalement bas d’une offre, en vue d’assurer une saine concurrence, prendre en considération non seulement les circonstances énoncées à l’article 139, paragraphe 2, des modalités d’exécution, mais également tous les éléments pertinents au regard de la prestation en cause (voir, par analogie, arrêt du 18 décembre 2014, Data Medical Service, C‑568/13, EU:C:2014:2466, point 50).

38      Il ressort également de la jurisprudence qu’une offre qui paraît anormalement basse permet de soupçonner que le soumissionnaire ne sera pas en mesure d’exécuter le marché selon les conditions offertes, et ce, notamment, parce que le prix demandé paraît trop faible ou parce que les solutions techniques envisagées paraissent dépasser les capacités du soumissionnaire (arrêt du 8 octobre 2015, Secolux/Commission, T‑90/14, non publié, EU:T:2015:772, point 61).

39      En vertu de l’article 158, paragraphe 4, des règles d’application, dans le cas d’offres anormalement basses, le comité d’évaluation demande des précisions opportunes sur la composition de l’offre.

40      S’agissant de l’article 158, paragraphe 4, des règles d’application, le Tribunal a déjà jugé que l’obligation, pour un pouvoir adjudicateur, de vérifier le sérieux d’une offre résulte de l’existence préalable de doutes quant à sa fiabilité, cette disposition ayant pour objet principal de permettre à un soumissionnaire de ne pas être écarté de la procédure sans qu’il ait eu la possibilité de justifier la teneur de son offre, qui apparaîtrait comme anormalement basse. Ce n’est donc que lorsque de tels doutes existent que le comité d’évaluation est tenu de demander des précisions opportunes sur la composition de l’offre, avant, le cas échéant, de la rejeter. En revanche, dans l’hypothèse où une offre n’apparaît pas comme anormalement basse aux termes dudit article, l’article 158, paragraphe 4, des règles d’application ne s’applique pas (voir, en ce sens, arrêts du 6 juillet 2005, TQ3 Travel Solutions Belgium/Commission, T‑148/04, EU:T:2005:274, points 49 et 50, et du 11 mai 2010, PC-Ware Information Technologies/Commission, T‑121/08, EU:T:2010:183, point 72).

41      De tels doutes peuvent notamment exister s’il apparaît incertain, d’une part, qu’une offre respecte la législation du pays dans lequel les services devraient être exécutés, en matière de rémunération du personnel, de contribution au régime de sécurité sociale, de respect des normes de sécurité et de santé au travail, de vente à perte, et, d’autre part, que le prix proposé intègre tous les coûts induits par les aspects techniques de l’offre (arrêt du 8 octobre 2015, Secolux/Commission, T‑90/14, non publié, EU:T:2015:772, point 62).

42      C’est à la lumière de ces dispositions et de cette jurisprudence qu’il convient d’examiner les arguments avancés par la requérante et tirés de ce que la Commission, premièrement, aurait dû considérer que l’offre du soumissionnaire retenu était anormalement basse au sens de l’article 151 des règles d’application, deuxièmement, n’a pas respecté les dispositions procédurales applicables en vertu de l’article 158, paragraphe 4, desdites règles et, troisièmement, n’a pas respecté l’obligation de motivation.

 Sur l’existence de doutes quant à la fiabilité de l’offre

43      La requérante invoque le fait que la Commission aurait dû considérer que le prix offert par le soumissionnaire retenu était anormalement bas. Dans ce contexte, elle invoque, d’une part, la circonstance que le prix de ladite offre était inférieur de 40 % au budget maximal annuel de 700 000 euros prévu pour le lot n° IV et, d’autre part, le fait que le prix de l’offre du soumissionnaire retenu était inférieur de 11 % à celui de sa propre offre.

44      Dans ce contexte, à titre liminaire, il convient de rappeler qu’un pouvoir adjudicateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant aux éléments à prendre en considération en vue de l’adoption d’une décision de passation de marché sur appel d’offres. Ce large pouvoir d’appréciation lui est reconnu tout au long de la procédure de passation du marché, y compris en ce qui concerne le choix et l’évaluation des critères d’attribution. Partant, s’agissant de ces questions, le contrôle du Tribunal doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2010, PC-Ware Information Technologies/Commission, T‑121/08, EU:T:2010:183, point 73).

–       Sur l’écart entre le budget maximal annuel prévu et le prix proposé par le soumissionnaire retenu

45      Selon la requérante, la circonstance selon laquelle le prix proposé par le soumissionnaire retenu était inférieur de 40 % au budget maximal annuel prévu pour le lot n° IV aurait dû faire douter la Commission de la fiabilité de son offre. En vertu de l’article 169, paragraphe 1, troisième alinéa, des règles d’application, pour l’évaluation du montant du marché, il conviendrait de se fonder sur la valeur du marché au moment de l’envoi de l’avis de marché.

46      La Commission conteste ces arguments.

47      À cet égard, il convient de relever que, dans la mesure où l’écart entre le budget maximal annuel prévu pour le lot n° IV et le prix de l’offre du soumissionnaire retenu peut s’expliquer par des circonstances ne remettant pas en cause la fiabilité de cette offre, cet écart n’est pas susceptible de démontrer l’existence d’une erreur manifeste de la Commission affectant l’appréciation du caractère anormalement bas du prix de son offre.

48      S’agissant du budget maximal annuel prévu pour le lot n° IV, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 169, paragraphe 1, premier alinéa, des règles d’application, le pouvoir adjudicateur est tenu d’indiquer la rémunération totale estimée dans l’appel d’offres et que, en vertu du troisième alinéa de ce paragraphe, cette estimation doit être effectuée au moment de l’envoi de l’avis de marché. Il s’ensuit que le budget maximal annuel prévu pour le lot n° IV a été fondé sur une estimation de la Commission.

49      Quant à l’estimation de ce budget, il doit être tenu compte des indications de la Commission selon lesquelles elle n’a pas suffisamment pris en compte la chute des prix des prestations demandées. À cet égard, elle expose que les prix de l’ensemble des offres soumises à la suite de l’appel d’offres étaient inférieurs, et en partie même considérablement inférieurs, à cette valeur. Ainsi, l’offre de la requérante serait inférieure de 32 % audit budget.

50      Cette chute des prix n’étant pas contestée par la requérante, il convient de constater que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en ne considérant pas l’écart entre le budget maximal prévu pour le lot n° IV et le prix de l’offre du soumissionnaire retenu comme un élément soulevant un doute quant à la fiabilité de cette offre.

51      Aucun argument de la requérante n’est susceptible de remettre en question cette conclusion.

52      En premier lieu, quant à l’argument de la requérante selon lequel les supports de stockage avaient, certes, enregistré une réduction des coûts, mais ne constituaient qu’une partie des coûts des services demandés, il suffit de rappeler que la Commission a constaté une chute des prix de l’ensemble des offres soumises et que la requérante n’avance pas d’arguments visant à démontrer que l’ampleur de cette chute des prix devait être attribuée à des facteurs remettant en cause le caractère fiable desdites offres.

53      En second lieu, la requérante invoque le fait que, en vertu de l’article 169, paragraphe 1, troisième alinéa, des règles d’application, en ce qui concerne l’évaluation du montant du marché, il y a lieu de se fonder sur la valeur du marché au moment de l’envoi de l’avis de marché.

54      À cet égard, il suffit de relever que, même si, selon l’article 169, paragraphe 1, troisième alinéa, des règles d’application, l’estimation du budget maximal doit être fondée sur la valeur du marché au moment de l’envoi de l’avis de marché, cela ne s’oppose pas à ce que, lorsque le pouvoir adjudicateur constate que, dans le cadre de son estimation, il n’a pas tenu compte d’une baisse des prix des services demandés, il puisse en tenir compte lors de l’appréciation du caractère fiable des offres soumises.

55      Partant, aucun argument avancé par la requérante n’est susceptible de démontrer que le comité d’évaluation aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en ne considérant pas que le fait que le prix de l’offre du soumissionnaire retenu était inférieur de 40 % au budget maximal pour le lot n° IV constituait un élément susceptible de remettre en cause le caractère fiable de ladite offre.

56      Dès lors, il convient de rejeter le grief tiré de l’existence d’un tel écart.

–       Sur l’écart entre le prix de l’offre du soumissionnaire retenu et celui de l’offre de la requérante

57      La requérante fait valoir que le caractère anormalement bas du prix de l’offre du soumissionnaire retenu était également démontré par la différence de prix de 11 % entre ladite offre et sa propre offre.

58      À titre liminaire, il convient de rappeler que le seul fait que le prix de l’offre du soumissionnaire retenu soit plus bas que celui de l’offre d’un autre soumissionnaire n’est pas, en lui-même, susceptible de démontrer le caractère anormalement bas de l’offre du soumissionnaire retenu. En effet, une offre peut être moins chère qu’une autre sans être pour autant anormalement basse (voir, en ce sens, arrêts du 6 juillet 2005, TQ3 Travel Solutions Belgium/Commission, T‑148/04, EU:T:2005:274, points 28, 29 et 71, et du 8 octobre 2015, Secolux/Commission, T‑90/14, non publié, EU:T:2015:772, point 64).

59      Cela vaut également pour un cas de figure dans lequel le prix de l’offre du soumissionnaire retenu est plus bas que celui de l’offre du prestataire déjà en place. Dans le cas contraire, le prestataire en place pourrait systématiquement remettre en cause la fiabilité des offres moins chères des autres soumissionnaires, même si elles ne sont pas anormalement basses, mais uniquement économiquement plus avantageuses.

60      Ensuite, force est de constater que la requérante n’avance aucun argument permettant de considérer que, eu égard aux particularités du secteur en cause, la différence de prix de 11 % entre son offre et l’offre du soumissionnaire retenu devrait être considérée en tant que telle comme un élément remettant en cause la fiabilité de l’offre du soumissionnaire retenu.

61      Dans ces circonstances, il convient d’examiner si les autres arguments avancés par la requérante étaient susceptibles de remettre en cause la fiabilité de l’offre du soumissionnaire retenu ou de susciter un doute à cet égard.

62      En premier lieu, la requérante avance que la fourniture des services demandés exigeait des investissements importants. Dans ce contexte, elle soutient que, lorsque le marché antérieur lui avait été attribué, elle avait dû investir près de 750 000 euros pour l’achat des équipements et des logiciels, mais aussi et surtout pour l’adaptation de ceux-ci aux processus imposés.

63      Ces arguments ne suffisent pas pour démontrer l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation commise par la Commission.

64      En effet, premièrement, il doit être relevé que l’appel d’offres portait sur des services qui étaient soumis à une évolution rapide de la technologie et des prix. Partant, même à supposer que la somme indiquée par la requérante soit correcte, il convient de constater qu’elle concerne l’achat et l’adaptation d’équipements et de logiciels survenus plusieurs années avant la procédure d’appel d’offres en cause dans la présente affaire et que, comme cela a été exposé aux points 49 et 50 ci‑dessus, entre-temps, les prix des prestations demandées avaient chuté de manière substantielle.

65      Deuxièmement, il y a lieu de relever que, eu égard à la taille du soumissionnaire retenu, à ses champs d’activité et au fait que, dans le cadre de la procédure de sélection, il a dû démontrer qu’il disposait d’une expérience suffisante dans le domaine faisant l’objet du marché public, il ne pouvait être exclu qu’il disposait à tout le moins d’une certaine partie de l’infrastructure nécessaire pour la fourniture des services demandés.

66      Eu égard à ces considérations, l’argument de la requérante tiré des investissements auxquels elle a dû procéder plusieurs années auparavant n’est pas susceptible de susciter un doute quant au caractère fiable de l’offre du soumissionnaire retenu.

67      Contrairement à ce que propose la requérante, dans ce contexte, il n’y a pas lieu d’adopter une mesure d’instruction en vertu de l’article 91, sous e), et de l’article 96 du règlement de procédure sous forme d’une expertise portant sur la question de savoir si le soumissionnaire retenu aurait dû supporter des charges comparables à celles que la requérante avait dû supporter plusieurs années auparavant, afin de pouvoir fournir les services visés par le marché antérieur. En effet, dans le présent contexte, il convient uniquement d’examiner si le comité d’évaluation a été mis en présence d’éléments qui étaient susceptibles de susciter un doute quant à la fiabilité de l’offre du soumissionnaire retenu. Or, comme cela est exposé ci-dessus, dans les circonstances de l’espèce, l’écart entre le prix de l’offre du soumissionnaire retenu et celui de l’offre de la requérante n’était pas susceptible de susciter un tel doute.

68      En second lieu, la requérante avance que le soumissionnaire retenu n’était pas capable de mettre en place le système dans le délai prévu. Dans ce contexte, premièrement, elle fait valoir que, pour la prise de fonction du nouveau président de la Commission, donc pour un évènement d’importance exceptionnelle, des retransmissions en direct n’étaient disponibles qu’en cinq langues. Dans le cadre de ses réponses aux questions du Tribunal, elle invoque également le fait que les vidéos affichées sur la page Internet de la Commission sont indisponibles dans la majorité des 25 langues exigées dans le cahier des charges. Deuxièmement, elle soutient que les données archivées sur son serveur n’ont été ni retirées ni transférées.

69      À titre liminaire, il convient de relever que ces arguments ne visent pas à remettre en cause le critère de sélection relatif à la capacité du soumissionnaire retenu, qui a été examiné par le comité d’évaluation dans le cadre de la procédure de sélection.

70      Dans la mesure où ces arguments visent à démontrer que l’offre du soumissionnaire retenu n’était pas fiable en raison de son prix anormalement bas, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre d’un recours en annulation introduit en vertu de l’article 263 TFUE, la légalité d’un acte de l’Union doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date où l’acte a été adopté (arrêt du 7 février 1979, France/Commission, 15/76 et 16/76, EU:C:1979:29, point 7). Or, force est de constater que les circonstances invoquées par la requérante sont postérieures à l’adoption des décisions d’attribution et de rejet.

71      En tout état de cause, pour autant que la requérante invoque le fait que ces circonstances constitueraient des indices susceptibles de démontrer que, déjà au moment où le comité d’évaluation a procédé à l’évaluation de l’offre de la requérante, il aurait dû reconnaître le manque de fiabilité de l’offre du soumissionnaire retenu en raison de son prix anormalement bas, cet argument devrait également être rejeté.

72      En effet, premièrement, contrairement à ce qu’avance la requérante, le fait que, pour la prise de fonction du nouveau président de la Commission, des retransmissions en direct n’étaient disponibles qu’en cinq langues ne peut pas être imputé à un manque de fiabilité de l’offre du soumissionnaire retenu. En effet, comme la Commission l’a exposé, il s’agissait d’une conférence de presse que le Parlement européen n’avait organisée qu’en six langues et pour laquelle elle avait renoncé à une retransmission en polonais pour des « motifs rédactionnels ». En tout état de cause, comme la Commission l’avance, le discours du nouveau président de la Commission, qui a eu lieu en séance plénière le même jour que la prise en fonction, a été proposé et retransmis par le soumissionnaire retenu dans les 23 langues officielles de l’Union. S’agissant des vidéos disponibles sur la page Internet de la Commission, il convient de relever que, au cours de l’audience, la Commission a exposé que les raisons pour lesquelles ces vidéos n’étaient pas disponibles dans toutes les langues exigées dans le cahier des charges étaient d’ordre « rédactionnel » et liées au contenu des vidéos, et non à la mauvaise exécution du contrat par le soumissionnaire retenu.

73      Partant, cet argument doit être rejeté, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur sa recevabilité, alors qu’il n’a été soulevé qu’au stade des réponses de la requérante aux questions du Tribunal.

74      Deuxièmement, il convient de rejeter l’argument tiré de ce que les données archivées sur le serveur de la requérante n’ont pas été retirées et n’ont pas été transférées au soumissionnaire retenu. À cet égard, il suffit de relever que, selon les indications de la Commission, qui n’ont pas été remises en cause par la requérante, avant même que le contrat avec le soumissionnaire retenu eût commencé à courir, une copie de l’ensemble des données archivées et un nettoyage de celles-ci avaient été effectués. La Commission indique également que ces données avaient été transférées au soumissionnaire retenu et étaient désormais disponibles sur le site Internet de la chaîne « EbS », ce qui n’a pas non plus été contesté par la requérante.

75      Eu égard aux considérations précédentes, il convient de conclure que ni l’écart de 11 % entre le prix de l’offre retenue et celui de l’offre de la requérante ni les autres circonstances invoquées par celle-ci ne sont susceptibles de démontrer que l’offre du soumissionnaire retenu était anormalement basse et tendait à susciter des doutes quant à sa fiabilité.

76      Aucun des arguments avancés par la requérante n’étant susceptible d’établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en ne considérant pas que le prix de l’offre du soumissionnaire retenu suscitait des doutes quant à sa fiabilité, il convient de rejeter la présente branche du premier moyen.

 Sur le respect des dispositions procédurales

77      La requérante avance également que la Commission n’a pas respecté les dispositions procédurales pertinentes. À cet égard, il suffit de rappeler que, en vertu de la jurisprudence mentionnée au point 40 ci-dessus, lorsque l’offre d’un soumissionnaire ou les circonstances l’entourant ne soulèvent pas de doutes quant à sa fiabilité, le comité d’évaluation n’est pas obligé de demander des précisions à cet égard au soumissionnaire en cause, en application de l’article 158, paragraphe 4, des règles d’application. Partant, dans les circonstances de l’espèce, le comité d’évaluation n’était pas tenu de demander des précisions opportunes sur la composition de l’offre du soumissionnaire retenu. Dès lors, la branche tirée du non-respect des dispositions procédurales doit également être rejetée.

 Sur l’obligation de motivation

78      Dans la mesure où la requérante fait valoir que ni elle ni le juge de l’Union ne sont en mesure de contrôler si la Commission a respecté les dispositions pertinentes, elle doit être regardée comme invoquant une violation de l’obligation de motivation.

79      Dans ce contexte, il convient de rappeler que la violation de cette obligation constitue une violation des formes substantielles au sens de l’article 263 TFUE. Selon une jurisprudence constante, cette obligation dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté. La motivation doit faire apparaître de manière claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, de façon, d’une part, à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de pouvoir défendre leurs droits et de vérifier si la décision est ou non bien fondée et, d’autre part, à permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle de légalité (arrêt du 11 mai 2010, PC-Ware Information Technologies/Commission, T‑121/08, EU:T:2010:183, point 92).

80      L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications (voir arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 63 et jurisprudence citée).

81      En ce qui concerne la décision portant rejet de l’offre d’un soumissionnaire, l’étendue concrète de l’obligation de motivation dépend de l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier et de l’article 161 des règles d’application.

82      Aux termes de l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier, le pouvoir adjudicateur communique à tout candidat ou soumissionnaire écarté les motifs du rejet de sa candidature ou de son offre et à tout soumissionnaire ayant fait une offre recevable et qui en fait la demande par écrit les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire.

83      L’article 161 des règles d’application précise ce qui suit :

« 1. Les pouvoirs adjudicateurs informent dans les meilleurs délais les candidats et les soumissionnaires des décisions prises concernant l’attribution du marché ou d’un contrat-cadre ou l’admission dans un système d’acquisition dynamique, y inclus les motifs pour lesquels ils ont décidé de renoncer à passer un marché ou un contrat-cadre ou à mettre en place un système d’acquisition dynamique pour lequel il y a eu mise en concurrence ou de recommencer la procédure.

2. Le pouvoir adjudicateur communique, dans un délai maximal de quinze jours de calendrier à compter de la réception d’une demande écrite, les informations mentionnées à l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier.

3. Pour les marchés passés par les institutions de l’Union pour leur propre compte, d’une valeur égale ou supérieure aux seuils visés à l’article 170, paragraphe 1, et qui ne sont pas exclus du champ d’application de la directive 2004/18/CE, le pouvoir adjudicateur notifie, simultanément et individuellement à chaque soumissionnaire ou candidat évincé, par voie électronique, que leur offre ou candidature n’a pas été retenue, à l’un ou l’autre des stades suivants :

a)       peu de temps après l’adoption de décisions sur la base des critères d’exclusion et de sélection et avant la décision d’attribution, lorsque les procédures de passation de marché sont organisées en deux étapes distinctes ;

b)       en ce qui concerne les décisions d’attribution et les décisions de rejet d’une offre, le plus tôt possible après la décision d’attribution et au plus tard dans la semaine qui suit.

Le pouvoir adjudicateur indique dans chaque cas les motifs du rejet de l’offre ou de la candidature ainsi que les voies de recours disponibles.

Les soumissionnaires ou candidats évincés peuvent obtenir des informations complémentaires sur les motifs du rejet, sur demande écrite, par lettre, par télécopie ou par courrier électronique et pour tout soumissionnaire retenu dont l’offre n’est pas éliminée, sur les caractéristiques et avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire, sans préjudice des dispositions de l’article 113, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement financier. Les pouvoirs adjudicateurs répondent dans un délai maximal de quinze jours de calendrier à compter de la réception de la demande. »

84      Toutefois, comme il ressort de l’article 113, paragraphe 2, second alinéa, du règlement financier, la communication de certains éléments peut être omise dans les cas où elle ferait obstacle à l’application des lois, serait contraire à l’intérêt public, porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d’entreprises publiques ou privées ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre celles-ci.

85      C’est à la lumière de ces dispositions et de cette jurisprudence qu’il convient d’examiner si, en l’espèce, la Commission a violé son obligation de motivation.

86      Dans ce contexte, il doit être relevé que, dans ses courriels des 5, 11 et 14 août 2014 (voir le point 10 ci-dessus), la requérante a fait valoir que le prix de l’offre retenue était artificiellement bas et que cette offre n’était pas fiable, car les frais pour l’installation de l’équipement et des logiciels et pour la formation ne pouvaient, selon elle, être couverts et parce qu’elle-même n’aurait été capable d’offrir des prix compétitifs qu’en raison du fait qu’elle était le prestataire en place.

87      Il doit également être relevé que la Commission n’a pas répondu explicitement à ces arguments de la requérante. Toutefois, force est de constater qu’il ressortait de manière implicite des réponses de la Commission qu’elle considérait que les arguments avancés par la requérante n’étaient pas susceptibles de susciter des doutes quant au niveau du prix de l’offre du soumissionnaire retenu. Dans la mesure où la requérante invoque le fait que la Commission aurait dû exposer davantage les raisons pour lesquelles l’offre n’était pas anormalement basse, il suffit de relever que, comme cela a été exposé aux points 43 à 76 ci-dessus, ni l’écart entre le budget maximal annuel prévu et le prix proposé par le soumissionnaire retenu, ni l’écart entre le prix de l’offre du soumissionnaire retenu et celui de l’offre de la requérante, ni les autres circonstances invoquées par la requérante n’étaient susceptibles de susciter un doute quant au niveau du prix de l’offre retenue de nature à remettre en cause sa fiabilité.

88      Partant, la branche tirée d’une violation de l’obligation de motivation doit également être rejetée et, dès lors, le premier moyen dans son intégralité, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si, ainsi que la Commission l’a soulevé pour la première fois au cours de l’audience, la requérante pouvait utilement se fonder sur une violation de l’article 151 des règles d’application, alors que, selon la Commission, cette disposition viserait à protéger le soumissionnaire ayant soumis l’offre à l’égard du prix de laquelle le pouvoir adjudicateur aurait des doutes et non un autre soumissionnaire.

 Sur les deuxième à quatrième moyens, visant des erreurs concernant les documents d’appel d’offres ainsi que l’évaluation des offres du soumissionnaire retenu et de la requérante

89      Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante fait valoir que les documents d’appel d’offres ne sont pas conformes aux principes de transparence, de proportionnalité, d’égalité de traitement et de non-discrimination et n’ont pas permis une concurrence non discriminatoire et loyale entre les soumissionnaires. Ce moyen s’articule autour de six branches, visant, la première, la capacité de stockage du réseau de diffusion de contenu, la deuxième, la commande éventuelle de langues supplémentaires, la troisième, le service d’assistance, la quatrième, le caractère arbitraire des services requis, la cinquième, la vision concernant l’évolution possible de la solution proposée et, la sixième, les stipulations du contrat-cadre.

90      Le troisième moyen vise l’évaluation de l’offre retenue et est tiré d’erreurs manifestes d’appréciation, de détournements de pouvoir et de violations de l’obligation de motivation. Il s’articule autour de sept branches visant les observations du comité d’évaluation, relatives, la première, à la solution de réseau, la deuxième, à la proposition en termes de coûts pour l’augmentation du nombre de langues, la troisième, à la redondance du réseau Internet, la quatrième, au système de gestion utilisé, la cinquième, au service d’assistance, aux réunions mensuelles régulières et au rapport d’évènements mensuels réguliers, la sixième, aux idées en termes d’évolution technologique future et, la septième, au prix.

91      Le quatrième moyen vise, quant à lui, l’évaluation de l’offre de la requérante et est également tiré d’erreurs manifestes d’appréciation, de détournements de pouvoir et de violations de l’obligation de motivation. Il s’articule autour de quatre branches, dont les trois premières visent les observations du comité d’évaluation et portent, la première, sur le niveau de détail concernant le processus de travail, la deuxième, sur la vision des évolutions futures et, la troisième, sur le prix. Dans la quatrième branche, la requérante fait grief au comité d’évaluation de ne pas lui avoir attribué le maximum de points pour un sous-critère de qualité technique alors que l’évaluation de son offre par rapport à ce sous-critère serait exclusivement positive.

92      Certains des arguments avancés dans le cadre des deuxième à quatrième moyens se recoupant partiellement ou étant à tout le moins connexes, il convient de regrouper les arguments avancés dans le cadre de ces moyens en fonction des éléments des documents d’appel d’offres qu’ils visent.

93      Avant d’examiner les arguments avancés par la requérante, il convient de rappeler les dispositions et la jurisprudence pertinentes.

 Dispositions et jurisprudence pertinentes

–       Sur les principes applicables

94      En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier, tous les marchés publics financés totalement ou partiellement par le budget de l’Union doivent respecter les principes de transparence, de proportionnalité, d’égalité de traitement et de non-discrimination.

95      Le principe d’égalité de traitement, qui revêt une importance toute particulière en matière de passation de marchés publics, exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale. Il a pour objectif de favoriser le développement d’une concurrence saine et effective entre les entreprises participant à un marché public, impose que tous les soumissionnaires disposent des mêmes chances dans la formulation des termes de leurs offres et implique donc que celles-ci soient soumises aux mêmes conditions pour tous les compétiteurs. L’application concrète de ce principe fondamental consiste à ce que la Commission veille à son respect à chaque phase de la procédure et, par conséquent, à l’égalité des chances entre tous les soumissionnaires (voir arrêt du 12 mars 2008, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑345/03, EU:T:2008:67, points 60, 61, 141 et 143 et jurisprudence citée).

96      Quant au principe de transparence, qui en constitue le corollaire, il a essentiellement pour but de garantir l’absence de risque de favoritisme et d’arbitraire de la part du pouvoir adjudicateur. Il implique que toutes les conditions et modalités de la procédure d’attribution soient formulées de manière claire, précise et univoque dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges. Il implique donc que toutes les informations techniques pertinentes pour la bonne compréhension de l’avis de marché ou du cahier des charges soient mises, dès que possible, à la disposition de l’ensemble des entreprises participant à une procédure de passation de marchés publics, de façon, d’une part, à permettre à tous les soumissionnaires raisonnablement informés et normalement diligents d’en comprendre la portée exacte et de les interpréter de la même manière et, d’autre part, à mettre le pouvoir adjudicateur en mesure de vérifier effectivement si les offres des soumissionnaires correspondent aux critères régissant le marché en cause (voir arrêt du 12 mars 2008, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑345/03, EU:T:2008:67, points 144 et 145 et jurisprudence citée).

97      Ainsi, en vertu de l’article 105, premier alinéa, du règlement financier, les documents d’appel à la concurrence doivent fournir une description complète, claire et précise de l’objet du marché et préciser les critères d’exclusion, de sélection et d’attribution applicables au marché.

–       Sur le pouvoir d’appréciation de la Commission et le contrôle du Tribunal

98      Comme cela a été exposé au point 44 ci-dessus, dans le domaine des marchés publics, un pouvoir adjudicateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant aux éléments à prendre en considération en vue de l’adoption d’une décision de passer un marché public par appel d’offres. Il jouit donc d’un large pouvoir d’appréciation pour déterminer tant le contenu que la mise en œuvre des règles applicables à la passation, pour son propre compte, d’un marché public par appel d’offres. La faculté laissée au pouvoir adjudicateur de choisir librement les critères d’attribution sur la base desquels il entend attribuer les marchés publics qu’il passe pour son propre compte lui permet de prendre en considération la nature, l’objet et les spécificités propres à chaque marché (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 20 septembre 2011, Evropaïki Dynamiki/BEI, T‑461/08, EU:T:2011:494, point 137).

99      Ce large pouvoir d’appréciation est reconnu aux pouvoirs adjudicateurs tout au long de la procédure de passation du marché, y compris en ce qui concerne le choix et l’évaluation des critères de sélection et d’attribution (arrêt du 4 juillet 2016, Orange Business Belgium/Commission, T‑349/13, non publié, EU:T:2016:385, point 45).

100    Partant, le contrôle du Tribunal doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêts du 6 juillet 2005, TQ3 Travel Solutions Belgium/Commission, T‑148/04, EU:T:2005:274, point 47, et du 11 mai 2010, PC-Ware Information Technologies/Commission, T‑121/08, EU:T:2010:183, point 73).

–       Sur l’obligation de motivation

101    S’agissant de l’obligation de motivation, il convient de renvoyer aux principes dégagés aux points 78 à 84 ci-dessus.

 Sur les arguments visant la capacité de stockage du réseau de diffusion de contenu

102    Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante fait valoir que la Commission n’a pas clairement indiqué dans les documents d’appel d’offres sur quelle capacité de stockage du réseau de diffusion de contenu les soumissionnaires devaient fonder leur offre financière. D’une part, dans le cahier des charges, il aurait été indiqué que 30 téraoctets de données audiovisuelles devaient être téléchargés dans le réseau de diffusion de contenu au début du contrat et qu’une augmentation des besoins de 20 % au maximum était attendue par année. D’autre part, dans le formulaire devant être utilisé pour l’offre financière, les soumissionnaires auraient dû indiquer un prix total qui aurait dû être calculé sur la base d’une capacité de stockage d’1 téraoctet dans le réseau de diffusion de contenu. Des modifications ou des commentaires n’auraient pas été permis à cet égard. En raison de ces indications qui seraient incohérentes et contradictoires, il n’aurait pas été possible de déterminer suffisamment clairement sur quelle base les soumissionnaires devaient calculer leur offre financière. En effet, il n’aurait pas été possible de déterminer clairement si l’augmentation des besoins en termes de capacité de stockage était supposée être couverte par le prix total proposé ou si une adaptation aurait pu avoir lieu dans le cadre de la procédure négociée. Partant, les documents d’appel d’offres n’auraient pas été conformes au principe d’égalité de traitement et de non-discrimination des soumissionnaires.

103    Dans le cadre des troisième et quatrième moyens, la requérante fait valoir que cette erreur qui entacherait les documents d’appel d’offres s’est répercutée sur l’évaluation de l’offre financière du soumissionnaire retenu et de son offre financière.

104    La Commission conteste ces arguments.

105    Il convient d’examiner les arguments visant les documents d’appel d’offres avant d’examiner les arguments visant l’évaluation des offres du soumissionnaire retenu et de la requérante.

–       Sur les arguments visant les documents d’appel d’offres

106    La requérante avance que la capacité de stockage du réseau de diffusion de contenu sur la base de laquelle l’offre financière devait être calculée ne ressortait pas de manière suffisamment claire des indications figurant dans les documents d’appel d’offres.

107    À cet égard, il convient de relever que, en premier lieu, il ressort du point 2.1.3 du cahier des charges que, au début du contrat, le soumissionnaire retenu devait charger environ 30 téraoctets de données fournies par la Commission sur des dispositifs numériques. Il peut également être déduit de ce point que les besoins relatifs au réseau de diffusion de contenu augmenteraient de 20 % au maximum chaque année.

108    En second lieu, il découle du formulaire pour l’offre financière que les soumissionnaires devaient proposer un prix unique forfaitaire annuel, valable pour toute la durée du contrat et donc, en principe, pour cinq ans.

109    Eu égard à ces éléments, il convient de conclure qu’il ressortait d’une manière suffisamment claire de ces indications que, en dépit de l’augmentation annuelle des besoins de stockage pour les services demandés, le soumissionnaire retenu recevrait, en principe, le même prix forfaitaire pour chaque année d’exécution du contrat.

110    Toutefois, la requérante fait valoir qu’il existait un doute à cet égard. Dans ce contexte, elle invoque le fait que, dans le formulaire pour l’offre financière, sous le titre « Prix forfaitaire pour les services à fournir (offre totale) », il était indiqué, entre autres, ce qui suit :

« Système de stockage des téléchargements par regroupement pour le téléchargement à grande vitesse de fichiers média (infrastructure du système de téléchargement et d’alerte rapide) – débit minimal de 2 Gbit/sec – pour un téraoctet »

111    Selon la requérante, la précision « pour un téraoctet » permettait de mettre en doute ce que le prix devant être indiqué sur le formulaire pour l’offre financière était censé couvrir, à savoir soit l’ensemble de la capacité de stockage à fournir (30 téraoctets, avec une augmentation de 20 % au maximum chaque année), soit uniquement 1 téraoctet. Dans ce contexte, la requérante fait valoir que, dans l’hypothèse où le prix pour uniquement 1 téraoctet aurait dû être indiqué, le prix total à payer aurait pu être adapté postérieurement dans le cadre d’une procédure négociée.

112    Cet argument doit être rejeté.

113    Dans ce contexte, en premier lieu, il convient de constater qu’il ressort clairement de l’indication dans le formulaire pour l’offre financière que la précision « pour un téraoctet » visait uniquement la partie du volume de stockage pour laquelle un débit minimal de 2 Gbit/sec était exigé. En effet, selon les indications de la Commission, le volume de stockage d’1 téraoctet, pour lequel un téléchargement à grande vitesse devait être garanti, était prévu pour les fichiers audiovisuels rendus publics au cours des sept derniers jours, qui revêtaient un intérêt particulier en raison de leur actualité et qui étaient généralement consultés par un grand nombre d’utilisateurs en même temps.

114    En deuxième lieu, comme cela a été exposé au point 107 ci-dessus, il ressortait clairement du point 2.1.3 du cahier des charges que, au début de l’exécution du contrat, les soumissionnaires devaient stocker 30 téraoctets de données et que ce volume augmenterait progressivement. Il ne pouvait donc pas raisonnablement être considéré que le prix unique forfaitaire annuel devant être indiqué sur le formulaire pour l’offre financière ne devait se référer qu’à 1 téraoctet.

115    En troisième lieu, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la rémunération du soumissionnaire n’aurait pas pu être adaptée au volume des données stockées par le biais d’une procédure négociée. En effet, comme il ressort de l’article 134, paragraphe 1, sous f), et paragraphe 3, des règles d’application, un pouvoir adjudicateur peut recourir à une procédure négociée pour de nouveaux services consistant dans la répétition de services similaires confiés à l’opérateur économique adjudicataire du marché initial à condition que cette possibilité ait été indiquée dans l’avis de marché initial. Or, les documents d’appel d’offres ne mentionnent pas la possibilité de recourir à une procédure négociée en ce qui concerne une augmentation de la capacité de stockage nécessaire.

116    En quatrième lieu, il y a lieu de relever que, au cours de la procédure d’appel d’offres, un soumissionnaire avait posé une question concernant la signification de l’indication « pour un téraoctet », figurant dans le formulaire pour l’offre financière, et que, dans sa réponse à cette question, la Commission a indiqué que le réseau de diffusion de contenu contenait à ce moment-là 30 téraoctets de fichiers audiovisuels à télécharger, mais devrait augmenter de 20 % par an. Cette question et cette réponse ont été publiées sur le site Internet de la Commission le 16 mai 2014, avant que la requérante n’ait soumis son offre. Dans ce contexte, il convient également de relever que, au cours de la procédure d’appel d’offres, la requérante n’a pas posé de question à cet égard.

117    Eu égard à ces éléments, il convient de conclure qu’un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent aurait dû comprendre que le prix forfaitaire annuel devant être indiqué sur le formulaire pour l’offre financière était censé couvrir une capacité de stockage d’environ 30 téraoctets au début de l’exécution du contrat, avec une augmentation de 20 % au maximum chaque année.

118    Partant, les arguments visant les documents d’appel d’offres doivent être rejetés.

–       Sur les arguments visant l’évaluation des offres du soumissionnaire retenu et de la requérante

119    Eu égard aux considérations précédentes, il convient également de rejeter les arguments de la requérante tirés de ce que des imprécisions dans les documents d’appel d’offres concernant la capacité de stockage du réseau de diffusion de contenu, sur la base de laquelle l’offre financière devait être calculée, se seraient répercutées sur l’évaluation de son offre et celle de l’offre du soumissionnaire retenu. En effet, comme cela a été exposé aux points 106 à 118 ci-dessus, un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent était en mesure de comprendre que le prix forfaitaire annuel proposé devait être calculé en tenant compte d’une capacité de stockage dans le réseau de diffusion de contenu de 30 téraoctets, avec une augmentation annuelle maximale de 20 % par an.

120    En tout état de cause, force est de constater que, selon les indications de la Commission, qui ne sont pas contestées par la requérante, tant le soumissionnaire retenu que la requérante ont fixé le prix de leur offre en fonction d’une capacité de 30 téraoctets, avec une augmentation annuelle maximale de 20 % par an.

121    Partant, les arguments visant l’évaluation des offres du soumissionnaire retenu et de la requérante doivent également être rejetés et, dès lors, l’ensemble des arguments concernant la capacité de stockage du réseau de diffusion de contenu.

 Sur les arguments visant l’éventuel ajout de langues supplémentaires

122    Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante avance des arguments visant les indications figurant dans les documents d’appel d’offres et concernant l’éventuel ajout de langues supplémentaires. Il ressort du point 2.1 du cahier des charges que les deux chaînes du service d’informations télévisées « EbS » et « EbS+ » disposaient de 25 pistes audio et que le nombre de langues pouvait augmenter à l’avenir en raison de l’adhésion de nouveaux pays à l’Union. À cet égard, la Commission se réservait expressément le droit de recourir, en application de l’article 134, paragraphe 1, sous f), des règles d’application, à une procédure négociée en cours d’exécution de contrat pour la commande de langues supplémentaires. Cette possibilité est également reflétée dans le formulaire pour l’offre financière. En effet, dans un premier encadré sur ce formulaire, les soumissionnaires étaient invités à indiquer le prix forfaitaire pour les services demandés en 25 langues. Dans un autre encadré, intitulé « Demandes optionnelles », ils étaient invités à indiquer le prix forfaitaire pour l’ajout d’une langue supplémentaire.

123    La requérante avance que les documents d’appel d’offres n’étaient pas conformes aux principes de transparence et d’égalité de traitement. Ils n’auraient pas permis de déterminer clairement si l’ajout d’une langue supplémentaire faisait l’objet d’une procédure négociée ou d’une option. Notamment, il n’aurait pas été possible de déterminer clairement si et dans quelle mesure le prix forfaitaire pour l’ajout d’une langue supplémentaire devant également être indiqué dans le formulaire pour l’offre financière serait pris en compte dans le cadre de l’évaluation financière de l’offre. Il n’aurait pas non plus été possible de déterminer clairement si ce prix était contraignant.

124    Dans le cadre des troisième et quatrième moyens, la requérante fait également valoir que ce manque de précision qui affecterait les documents d’appel d’offres se serait répercuté sur l’évaluation de l’offre financière du soumissionnaire retenu et sur l’évaluation de sa propre offre financière. L’observation du comité d’évaluation, selon laquelle la proposition du soumissionnaire retenu était très intéressante en termes de coûts en cas d’augmentation du nombre de langues, serait entachée de graves erreurs d’appréciation. Dans le cadre de l’évaluation de l’offre technique, le comité aurait tenu compte de prix proposés sur le formulaire pour l’offre financière, qui ne figuraient pas dans les indications techniques. Dans l’hypothèse où le prix proposé aurait déjà été pris en compte dans le cadre de l’évaluation de l’offre financière, cela aurait engendré une double évaluation, ce qui serait inadmissible. En tout état de cause, dans l’hypothèse où le prix indiqué ne serait pas contraignant, il ne constituerait pas un critère d’évaluation valable. En effet, dans cette hypothèse, eu égard à l’assurance donnée par la Commission de ne pas chercher à obtenir des offres de remplacement, le soumissionnaire pourrait, le moment venu, proposer des prix très différents.

125    La Commission conteste ces arguments.

126    En substance, la requérante avance six arguments. En premier lieu, elle fait valoir qu’il ne ressortait pas de manière suffisamment claire des documents d’appel d’offres que l’éventuel ajout de nouvelles langues constituerait une option ou qu’il ferait l’objet d’une procédure négociée. En deuxième lieu, elle allègue que le prix pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire n’aurait pas dû être pris en compte doublement. En troisième lieu, elle avance qu’il ne ressortait pas de manière suffisamment claire des documents d’appel d’offres que le comité d’évaluation tiendrait compte dudit prix dans le cadre de l’évaluation de l’offre technique. En quatrième lieu, elle fait valoir qu’il ne ressortait pas davantage des documents d’appel d’offres que ce comité n’était pas en droit d’en tenir compte dans le cadre de l’évaluation de l’offre technique. En cinquième lieu, elle fait valoir que le comité d’évaluation a violé l’article 134, paragraphe 3, des règles d’application. En sixième lieu, elle soutient que le comité d’évaluation a commis des erreurs manifestes d’appréciation lors de l’évaluation de son offre et de celle de l’offre retenue.

–       Sur l’utilisation de la procédure négociée

127    La requérante fait valoir que la question de savoir si l’éventuel ajout de nouvelles langues constituerait une option ou ferait l’objet d’une procédure négociée ne ressortait pas de manière suffisamment claire des documents d’appel d’offres.

128    À cet égard, il convient de relever qu’il ressort du point 2.1 du cahier des charges que l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire ferait l’objet d’une procédure négociée. Dans ce contexte, il était expressément fait référence à l’article 134, paragraphe 1, sous f), des règles d’application. Selon cette disposition, un pouvoir adjudicateur peut recourir à une procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, quel que soit le montant estimé du marché, pour de nouveaux services ou travaux consistant dans la répétition de services ou de travaux similaires confiés à l’opérateur économique adjudicataire du marché initial par le même pouvoir adjudicateur, à condition que ces services ou travaux soient conformes à un projet de base et que ce projet ait fait l’objet d’un marché initial passé selon la procédure ouverte ou restreinte.

129    Il ressortait donc clairement du cahier des charges que l’éventuel ajout de nouvelles langues ferait l’objet d’une procédure négociée.

130    Aucun des arguments avancés par la requérante n’est susceptible de remettre en cause cette conclusion.

131    En premier lieu, contrairement à ce qu’avance la requérante, cette conclusion n’est pas remise en cause par le fait que les soumissionnaires étaient invités à indiquer le prix pour l’éventuel ajout d’une nouvelle langue sur le document pour l’offre financière. Certes, la requérante invoque à juste titre le fait que la case du formulaire pour l’offre financière dans laquelle le prix forfaitaire pour un tel ajout devait être indiqué était intitulée « Exigences optionnelles ». Or, même si le libellé de cet intitulé est peu opportun, un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent aurait dû réaliser qu’il ne pouvait pas s’agir d’un prix pour une option. En effet, d’une part, comme cela a été exposé au point 128 ci-dessus, il ressortait clairement du point 2.1 du cahier des charges que l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire ferait l’objet d’une procédure négociée. D’autre part, au point II.2.2 de l’avis de marché, il était clairement indiqué que des options n’étaient pas prévues.

132    En second lieu, la requérante avance que, eu égard au fait que le prix devant être indiqué pour l’éventuel ajout de langues supplémentaires était contraignant, un soumissionnaire n’aurait pas pu s’attendre à ce que cet éventuel ajout fît l’objet d’une procédure négociée. À cet égard, il convient de relever que, du point de vue d’un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent, la nature contraignante du prix pour l’éventuel ajout d’une nouvelle langue n’était pas susceptible d’exclure le fait que cet ajout fît l’objet d’une procédure négociée. En effet, même si le soumissionnaire retenu ne pourrait plus négocier le prix pour l’ajout d’une langue dans le cadre d’une telle procédure, il pourrait toujours refuser de s’engager à ajouter une langue supplémentaire. Partant, cet argument doit également être rejeté.

133    Il s’ensuit qu’il convient de rejeter l’argument tiré de ce qu’il ne ressortait pas de manière suffisamment claire des documents d’appel d’offres que l’éventuel ajout de nouvelles langues devrait faire l’objet d’une procédure négociée ou d’une option.

–       Sur la double prise en compte

134    L’argument de la requérante tiré d’une double prise en compte du prix pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire doit également être rejeté. À cet égard, il suffit de relever que, selon la formule mentionnée au point 4 ci-dessus, l’offre financière était évaluée en tenant compte uniquement du prix forfaitaire pour les services de base. Partant, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, le prix pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire a uniquement été pris en compte dans le cadre de l’évaluation de l’offre technique, mais pas dans le cadre de l’évaluation de l’offre financière.

–       Sur la prise en compte du prix pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire dans le cadre de l’évaluation de l’offre technique

135    Comme il ressort des observations du comité d’évaluation portant sur l’évaluation de l’offre technique du soumissionnaire retenu, celui-ci a tenu compte du prix indiqué pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire dans le cadre de l’évaluation du critère de qualité a). En effet, à l’égard de ce critère, qui concerne entre autres la possibilité et la flexibilité de la mise à niveau du système quant aux langues, ledit comité a observé que la proposition du soumissionnaire retenu était très intéressante en termes de coûts en cas d’augmentation du nombre de langues.

136    La requérante fait valoir qu’il ne ressortait pas de manière suffisamment claire des documents d’appel d’offres que le prix indiqué pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire serait pris en compte dans le cadre de l’évaluation technique de l’offre. Selon elle, la Commission aurait dû inviter les soumissionnaires à indiquer ce prix dans leur offre technique.

137    À cet égard, il convient de rappeler que, comme cela a été exposé aux points 127 à 133 ci-dessus, un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent aurait dû réaliser que le prix pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire ne constituait pas un prix pour une option, mais un prix qui serait utilisé dans le cadre d’une éventuelle procédure négociée.

138    Il doit également être relevé que, selon le point 5 du cahier des charges, dans le cadre du critère de qualité a), relatif à la qualité de la solution technique proposée, il devait être tenu compte, entre autres, de la possibilité et de la flexibilité de la mise à niveau du système en ce qui concerne notamment les langues.

139    Eu égard à ces éléments, en dépit du fait que les soumissionnaires étaient invités à indiquer le prix pour l’éventuel ajout d’une nouvelle langue sur le document pour l’offre financière, un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent aurait dû réaliser que le prix en cause serait pris en compte comme un indicateur ou comme une valeur de remplacement permettant de mesurer la possibilité et la flexibilité de la mise à niveau du système en ce qui concerne les langues et serait donc pris en compte dans le cadre de l’évaluation des offres par rapport au critère de qualité a).

140    Dès lors, il convient également de rejeter l’argument de la requérante tiré de ce qu’il ne ressortait pas de manière suffisamment claire des documents d’appel d’offres que le prix pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire serait pris en compte dans le cadre de l’évaluation technique de l’offre.

141    Il s’ensuit qu’il convient également de rejeter comme non fondé l’argument de la requérante selon lequel, dans le cadre de l’évaluation des offres, le comité d’évaluation a suivi une autre démarche ou une autre pondération que celles prévues dans les documents d’appel d’offres en n’évaluant pas, s’agissant de la possibilité d’ajout d’une langue supplémentaire, l’offre technique à l’aune du critère de qualité a), mais à l’aune des prix proposés dans l’offre financière.

–       Sur la conformité de l’approche suivie avec les dispositions pertinentes

142    La requérante estime qu’il était contraire à l’article 149, paragraphe 2, des règles d’application de tenir compte du prix pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire dans le cadre de l’évaluation technique des offres, car ledit prix ne constituerait pas un critère technique d’attribution valide. Un prix non contraignant ne permettrait pas d’identifier l’offre économiquement la plus avantageuse.

143    À cet égard, en premier lieu, il doit être relevé que la requérante ne remet pas en cause l’utilisation du sous-critère relatif à la possibilité et à la flexibilité de la mise à niveau du système en ce qui concerne les langues en tant que telle. Elle se limite à avancer que le comité d’évaluation n’était pas en droit de tenir compte du prix indiqué pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire pour évaluer ce critère.

144    En second lieu, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 149, paragraphe 2, des règles d’application, pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse, le pouvoir adjudicateur doit prendre en considération le prix proposé et d’autres critères qualitatifs justifiés par l’objet du marché.

145    Or, contrairement à ce qu’avance la requérante, cette disposition ne s’oppose pas à ce que le prix pour l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire soit utilisé comme un indicateur ou comme une valeur de remplacement pour mesurer la possibilité et la flexibilité de la mise à niveau du système en ce qui concerne les langues et, donc, dans le cadre de l’évaluation des offres par rapport au critère de qualité a).

146    En effet, dans ce contexte, premièrement, il convient de relever que l’ajout d’une nouvelle langue ne constituait qu’une éventualité. Dans ces circonstances, il ne saurait être considéré comme manifestement erroné que la Commission ait utilisé le prix indiqué pour un tel ajout comme un indicateur ou comme une valeur de remplacement permettant de mesurer la possibilité et la flexibilité de la mise à niveau du système en ce qui concerne l’ajout de langues.

147    Deuxièmement, s’agissant de l’argument de la requérante tiré du caractère non contraignant du prix indiqué pour l’éventuel ajout d’une nouvelle langue, d’une part, il convient de constater que ledit prix est contraignant pour le soumissionnaire retenu, dans la mesure où il a pour effet d’exclure le prix des éléments pouvant être négociés dans le cadre d’une éventuelle procédure négociée portant sur l’ajout d’une nouvelle langue.

148    D’autre part, il y a lieu de relever que, même si la Commission ne dispose pas d’option envers le soumissionnaire retenu et que le soumissionnaire peut donc décider de ne pas fournir une langue supplémentaire au prix indiqué dans son offre (voir le point 132 ci-dessus), cela ne s’oppose pas à ce que la Commission en tire des conclusions pour les relations contractuelles, eu égard au fait que, si, techniquement, il est possible de faire ajouter une langue par un tiers, cela est susceptible de rendre le fonctionnement des services plus compliqué.

149    Eu égard à ces arguments, il convient de conclure que l’article 149, paragraphe 2, des règles d’application ne s’oppose pas à l’approche suivie par la Commission et que le grief tiré de la violation de cette disposition doit donc être rejeté.

–       Sur l’article 134, paragraphe 3, des règles d’application

150    L’argument de la requérante tiré de ce que, en application de l’article 134, paragraphe 3, des règles d’application, le montant total envisagé pour les services supplémentaires doit être pris en considération pour l’application des seuils visés à l’article 170, paragraphe 1, desdites règles doit également être rejeté. En effet, cette disposition vise à garantir que le montant envisagé des services supplémentaires est pris en compte en ce qui concerne les seuils applicables, mais il ne peut en être déduit ni que les prix pour de tels services supplémentaires doivent être indiqués dans les indications techniques ni que certains des prix indiqués dans le formulaire de soumission de l’offre financière ne peuvent pas être pris en compte dans le cadre de l’appréciation de la qualité technique de l’offre.

–       Sur les arguments visant l’évaluation des offres du soumissionnaire retenu et de la requérante

151    La requérante fait valoir que les imprécisions dans les documents d’appel d’offres concernant l’éventuel ajout d’une langue supplémentaire se sont répercutées sur l’évaluation de son offre et de l’offre retenue et que l’observation du comité d’évaluation selon laquelle la proposition du soumissionnaire retenu était très intéressante en termes de coûts en cas d’augmentation du nombre de langues est entachée de graves erreurs d’appréciation. Eu égard aux considérations développées aux points 127 à 150 ci-dessus, ces arguments doivent également être rejetés.

152    Dès lors, l’ensemble des arguments visant l’éventuel ajout de langues supplémentaires doit être rejeté.

 Sur les arguments visant la possibilité d’ajouter d’autres fonctionnalités techniques

153    Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante avance des arguments visant le point 2.1.4 du cahier des charges, où la Commission avait prévu, notamment, que la possibilité de transformer, lors des transmissions en temps réel, la langue parlée en texte ainsi que toute autre fonctionnalité technique pouvant enrichir l’offre d’un soumissionnaire seraient considérées comme un atout.

154    En premier lieu, la requérante fait valoir que, eu égard au fait qu’il était explicitement interdit de proposer des variantes, dans l’hypothèse où des soumissionnaires auraient proposé des solutions trop originales, ils se seraient exposés au risque que leur offre fût exclue de la procédure d’appel d’offres.

155    La Commission conteste ces arguments.

156    Dans ce contexte, il convient de rappeler que les variantes au sens du droit des marchés publics constituent des offres ou des techniques de remplacement par rapport aux spécifications techniques prévues dans les documents d’appel à la concurrence, alors que, en revanche, les écarts permettent aux soumissionnaires, dans le respect des spécifications techniques prévues dans les documents d’appel à la concurrence, d’enrichir leur offre d’éléments positifs et, ainsi, de lui conférer, par rapport aux autres offres, une valeur ajoutée spécifique dans le cadre de l’attribution d’un marché au regard du critère de l’offre économiquement la plus avantageuse (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2011, bpost/Commission, T‑514/09, non publié, EU:T:2011:689, points 79 à 81).

157    Le point 2.1.4 du cahier des charges prévoit que toute autre fonctionnalité technique pouvant enrichir l’offre d’un soumissionnaire serait considérée comme un atout. Ce point ne visait donc pas une solution de remplacement et ne pouvait donc pas être considéré comme autorisant une variante. Au contraire, ledit point visait clairement des écarts permettant aux soumissionnaires d’enrichir leur offre d’éléments positifs, dans le respect des spécifications techniques prévues dans les documents d’appel à la concurrence.

158    Partant, l’argument tiré d’une confusion possible avec une variante doit être rejeté.

159    En deuxième lieu, la requérante avance que le sous-critère prévu au point 2.1.4 du cahier des charges n’est pas conforme à l’article 149 des règles d’application, selon lequel le pouvoir adjudicateur doit conférer une pondération relative à chacun des critères d’attribution. Or, à la lecture de ce critère, un soumissionnaire ne serait pas à même de mesurer si et dans quelle mesure une éventuelle fonctionnalité technique supplémentaire proposée par le soumissionnaire, qui, compte tenu des éventuels coûts supplémentaires qu’elle engendrerait, aurait un impact sur l’offre financière, serait prise en compte aux fins de l’évaluation de l’offre. Dans ce contexte, elle fait également valoir que la pondération relative pour ce critère aurait dû être indiquée.

160    La Commission conteste ces arguments.

161    Dans ce contexte, il convient de rappeler que, selon l’article 149, paragraphe 3, première phrase, des règles d’application, un pouvoir adjudicateur doit préciser la pondération relative qu’il confère à chacun des critères choisis pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges. Selon la deuxième phrase de cette disposition, dans la mesure où cette pondération est exprimée au moyen d’une fourchette, son écart maximal doit être approprié.

162    Selon cette disposition, qui vise à garantir le respect des principes d’égalité de traitement et de transparence, il importe que tous les éléments pris en considération par le pouvoir adjudicateur pour identifier l’offre économiquement la plus avantageuse et, si possible, leur importance relative soient connus des soumissionnaires potentiels au moment de la préparation de leurs offres (arrêt du 26 septembre 2014, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑498/11, non publié, EU:T:2014:831, point 121).

163    S’agissant des « autres fonctionnalités techniques » mentionnées au point 2.1.4 du cahier des charges, force est de constater que, au point 5 dudit cahier, la Commission a exposé les critères de qualité a) à c) et que, en ce qui concerne le critère de qualité a), elle a indiqué ce qui suit :

« Qualité de la solution technique proposée : planning d’installation des équipements nécessaires aux services de codage, de streaming et de réseau de diffusion de contenu, les performances globales du système, les possibilités de mise à niveau évolutive du système (nombre de langues, capacité du réseau de diffusion de contenu), maintenance des systèmes, formation des utilisateurs (évaluation de 1 à 50 points). »

164    Partant, un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent aurait dû réaliser que les « autres fonctionnalités techniques » mentionnées au point 2.1.4 du cahier des charges seraient prises en compte dans le cadre du critère de qualité a), ces fonctionnalités étant susceptibles d’augmenter la qualité de la solution technique proposée. En effet, la fonctionnalité technique spécifiquement mentionnée au point 2.1.4 du cahier des charges, à savoir la possibilité de transformer la langue parlée en texte lors des transmissions en temps réel, relève clairement de ce critère de qualité. Un tel soumissionnaire aurait donc également dû réaliser qu’un maximum de 50 points pouvait être atteint pour le critère de qualité a).

165    Quant à l’argument de la requérante tiré de ce que la Commission n’a pas indiqué la pondération pour le sous-critère relatif à d’autres fonctionnalités techniques pouvant enrichir l’offre d’un soumissionnaire, certes, il convient de relever que la Commission s’est limitée à prévoir une fourchette de 1 à 50 points pouvant être atteints pour le critère de qualité a), mais qu’elle n’a pas indiqué de pondérations relatives aux sous-critères.

166    Toutefois, d’une part, il convient de relever que l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application se limite à exiger qu’un pouvoir adjudicateur précise la pondération relative qu’il confère à chacun des critères de qualité choisis, mais ne prévoit pas d’obligation à cet égard en ce qui concerne les différents sous-critères (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2011, bpost/Commission, T‑514/09, non publié, EU:T:2011:689, point 88).

167    D’autre part, force est de constater que les arguments avancés par la requérante ne sont pas susceptibles de démontrer que, pour le critère de qualité a), la Commission n’a pas respecté la condition relative au caractère approprié de l’écart maximal de la fourchette prévue. En effet, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en rassemblant les sous-critères relatifs au planning d’installation des équipements nécessaires aux services de codage, de flux (streaming) et de réseau de diffusion de contenu, aux performances globales du système, aux possibilités de mise à niveau évolutive du système, à la maintenance des systèmes et à la formation des utilisateurs sous un seul critère de qualité et en ne prévoyant qu’une fourchette unique allant de 1 à 50 points pour ce critère. En effet, comme la Commission l’avance à juste titre, ces sous-critères sont interdépendants et le fait de les évaluer dans le contexte du système dans son ensemble ne constitue donc pas une erreur manifeste d’appréciation.

168    Partant, il convient de rejeter l’argument tiré de ce que la Commission a violé l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application en omettant d’indiquer la pondération relative pour le sous-critère relatif à d’autres fonctionnalités techniques pouvant enrichir la solution proposée.

169    En troisième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de ce qu’elle n’aurait appris que lors de la procédure devant le Tribunal et donc tardivement qu’un nombre de points minimal était attribué lorsque les exigences requises étaient entièrement respectées et que des points supplémentaires pouvaient être attribués en cas d’atouts supplémentaires, il suffit de relever qu’un soumissionnaire doit s’attendre à ce qu’une offre qui se limite à satisfaire les exigences requises obtienne une note satisfaisante et à ce qu’une offre qui surpasse les exigences du pouvoir adjudicateur obtienne une note supérieure.

170    Dès lors, il y a lieu de rejeter, en tout état de cause, les arguments visant les autres fonctionnalités techniques au sens du point 2.1.4 du cahier des charges, sans qu’il soit nécessaire de répondre à l’allégation de la Commission selon laquelle ces arguments seraient hypothétiques, en raison du fait que cette condition n’aurait joué aucun rôle lors de l’évaluation des offres.

 Sur les arguments visant l’observation du comité d’évaluation relative à la solution de réseau

171    Dans le cadre du troisième moyen, la requérante fait valoir que l’observation du comité d’évaluation faite dans le cadre de l’évaluation de l’offre du soumissionnaire retenu à l’égard du critère de qualité technique a), selon laquelle ladite offre prévoyait une solution de réseau convaincante, à savoir celle dudit soumissionnaire, est entachée d’erreurs.

172    En premier lieu, elle fait valoir que cette observation est en contradiction avec une autre observation du comité d’évaluation concernant l’offre retenue à l’égard du même critère de qualité, à savoir l’observation intitulée « Réseau de diffusion de contenu : accords nationaux et internationaux d’appairage avec Akamai ». L’entreprise Akamai serait un concurrent du soumissionnaire retenu qui utiliserait son propre réseau.

173    La Commission conteste ces arguments.

174    À cet égard, il convient de constater que, d’une part, l’observation du comité d’évaluation, selon laquelle l’offre du soumissionnaire retenu prévoyait une solution de réseau convaincante, à savoir celle dudit soumissionnaire, ne visait pas le réseau Internet en tant que tel, mais les solutions dont disposait le soumissionnaire retenu pour initialiser la transmission, notamment par le réseau Internet. Cette observation visait donc le fait que le soumissionnaire retenu disposait déjà de ses propres équipements, que ces équipements étaient fiables et qu’ils lui permettaient de fournir les services demandés, à savoir la transmission d’un signal satellite et l’initialisation d’une transmission par le réseau Internet.

175    D’autre part, l’observation du comité d’évaluation concernant le réseau de diffusion de contenu, qui tenait compte des accords nationaux et internationaux d’appairage avec Akamai, visait un contrat d’appairage, à savoir un accord sur l’acheminement réciproque de données afin d’obtenir une couverture mondiale. Elle ne visait donc pas l’initialisation de la transmission des données, mais la manière dont ces données étaient transmises par le réseau Internet.

176    Eu égard à ces considérations, il convient de constater que ces deux observations concernent deux aspects distincts et n’étaient pas contradictoires. Partant, il convient de rejeter l’argument tiré d’une contradiction dans les observations du comité d’évaluation à l’égard du critère de qualité a).

177    En deuxième lieu, la requérante fait valoir que le fait de disposer d’un réseau propre ne serait pas pertinent. Aucun des soumissionnaires ne disposerait d’un réseau propre, dans la mesure où il existerait toujours des parties seulement louées ou prises en crédit-bail dans la structure d’appairage requise. Partant, les caractéristiques pertinentes seraient le contrôle du flux des données et la maîtrise de l’infrastructure du réseau à cette fin.

178    La Commission conteste ces arguments.

179    À cet égard, il suffit de rappeler que, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, l’observation du comité d’évaluation, selon laquelle l’offre du soumissionnaire retenu prévoyait une solution de réseau convaincante, à savoir celle dudit soumissionnaire, visait les solutions dont disposait le soumissionnaire retenu pour initialiser la transmission, notamment par le réseau Internet. Or, le comité d’évaluation n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en tenant compte, dans le cadre de l’évaluation du critère de qualité a), concernant la qualité de la solution technique proposée, des solutions dont disposait le soumissionnaire retenu pour initialiser la transmission, notamment par le réseau Internet.

180    Partant, cet argument doit également être rejeté.

181    En troisième lieu, la requérante soutient que l’observation du comité d’évaluation, selon laquelle le soumissionnaire retenu disposait d’un accord d’appairage avec Akamai, n’était pas conforme à l’interdiction de faire exécuter le contrat par des tiers, prévue à l’article II.7.1 du projet de contrat de services.

182    La Commission conteste ces arguments.

183    Cet argument doit également être rejeté. En effet, les contrats d’appairage, qui constituent l’un des fondements de l’internet, ne peuvent être assimilés à un contrat de sous-traitance au sens de l’article II.7.1 du projet de contrat de services.

184    Dès lors, l’ensemble des arguments visant à remettre en cause l’observation du comité d’évaluation relative au caractère convaincant de la solution de réseau du soumissionnaire retenu doit être rejeté.

 Sur les arguments visant l’observation du comité d’évaluation relative à la redondance du réseau

185    Dans le cadre du troisième moyen, la requérante avance également des arguments visant à remettre en cause l’observation du comité d’évaluation portant sur l’évaluation de l’offre retenue à l’égard du critère de qualité technique a), selon laquelle l’un des avantages de cette offre en ce qui concerne le réseau de diffusion de contenu consistait dans la « redondance du réseau Internet ».

186    En premier lieu, la requérante allègue que, eu égard au fait que, en vertu du point 4.2.2 du cahier des charges, une redondance entre la liaison satellitaire et la liaison Internet était exigée, ce critère ne permettait pas de faire une distinction entre différents niveaux de qualité et ne pouvait donc pas constituer un critère d’attribution.

187    La Commission conteste ces arguments.

188    À cet égard, il convient de relever que, comme aurait dû le réaliser un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent, l’observation du comité d’évaluation concernant l’évaluation de l’offre retenue à l’égard du critère de qualité technique a) ne pouvait pas viser le critère de sélection mentionné aux points 2.1 et 4.2.2 du cahier des charges.

189    Au contraire, ce commentaire visait la circonstance selon laquelle le soumissionnaire retenu disposait de deux centres indépendants l’un de l’autre à des endroits différents, permettant chacun des transmissions par le biais des deux méthodes exigées.

190    Cet élément doit donc être distingué de la redondance des voies de transmission visée aux points 2.1 et 4.2.2 du cahier des charges. Par ailleurs, comme il ajoute un niveau de sécurité en cas de défaillance de l’un des deux centres, son existence permet de distinguer différents niveaux de qualité des offres. Partant, il convient de rejeter l’argument de la requérante tiré de ce que l’observation du comité d’évaluation ne permettait pas d’opérer une distinction entre les différents niveaux de qualité.

191    En deuxième lieu, dans le cadre de la réplique, la requérante avance que l’observation du comité d’évaluation en cause est sans valeur informative, l’internet étant un réseau qui, depuis sa création, serait conçu de façon redondante. La Commission n’aurait pas respecté l’obligation de motivation à cet égard.

192    La Commission conteste ces arguments.

193    À cet égard, il suffit de rappeler que, comme cela a été exposé au point 189 ci‑dessus, l’observation en cause ne se référait pas à l’internet en tant que tel, mais à la circonstance selon laquelle le soumissionnaire retenu disposait de deux centres de transmission indépendants à des endroits différents. Cet argument doit donc également être rejeté.

194    En troisième lieu, dans le cadre de la réplique, la requérante avance que le comité d’évaluation n’a pas examiné si le soumissionnaire retenu remplissait l’exigence relative à la redondance entre la liaison satellitaire et la liaison Internet.

195    Ces arguments doivent être rejetés comme non fondés. En effet, comme il ressort du point 5 du rapport d’évaluation, le comité a examiné si le soumissionnaire retenu satisfaisait aux critères de sélection. La requérante n’avance aucun argument susceptible de remettre en cause ce constat.

196    Partant, il convient de rejeter cet argument, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur le grief d’irrecevabilité que la Commission a avancé à cet égard.

197    Eu égard à ces considérations, l’ensemble des arguments visant l’observation du comité d’évaluation relative à la redondance du réseau du soumissionnaire retenu doit être rejeté.

 Sur les arguments visant les observations relatives au système de notification

198    Dans le cadre du troisième moyen, la requérante remet également en cause les observations du comité d’évaluation concernant l’évaluation de l’offre retenue à l’égard du critère de qualité b) et, plus spécifiquement, son observation selon laquelle le système « New Relic » était une plateforme très satisfaisante, répondant pleinement aux exigences requises.

199    En premier lieu, la requérante fait valoir que cette observation est fondée sur une analyse inexacte des faits, le système « New Relic » étant un logiciel fourni par un tiers, qui laisserait une marge extrêmement limitée pour son évolution.

200    La Commission conteste cet argument.

201    À cet égard, il convient de relever que, selon les indications de la Commission, dans son offre, le soumissionnaire retenu avait indiqué que les données brutes pouvaient être exportées de ce système et être utilisées par des applications ou des serveurs de fournisseurs tiers en vue d’autres développements. Eu égard au fait que la requérante n’a avancé aucun argument susceptible de remettre en cause cette fonctionnalité, il convient de rejeter son argument.

202    En deuxième lieu, la requérante fait valoir que l’observation du comité d’évaluation ne fait pas apparaître de manière suffisante la manière dont le comité d’évaluation est parvenu à cette appréciation.

203    À cet égard, il convient de rappeler que l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier ne s’oppose pas à ce qu’un pouvoir adjudicateur s’acquitte de son obligation de motivation par des commentaires succincts sur l’offre retenue et sur l’offre rejetée, à condition que ces commentaires soient suffisamment précis pour permettre à une partie concernée de connaître les éléments de fait et de droit sur la base desquels le pouvoir adjudicateur a rejeté son offre et retenu celle d’un autre soumissionnaire (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2012, Evropaïki Dynamiki/Cour de justice, T‑447/10, non publié, EU:T:2012:553, points 95 et 96).

204    Or, force est de constater que non seulement le nom du système de notification utilisé par le soumissionnaire retenu ressortait de l’observation du comité d’évaluation, mais également l’information selon laquelle ce système était pleinement conforme aux exigences formulées dans le cahier des charges. Eu égard aux informations détaillées que le cahier des charges contenait à cet égard, il convient de conclure que ces indications, prises conjointement avec l’information concernant la possibilité d’exporter les données, étaient suffisamment précises pour permettre à la requérante de connaître les éléments de ce système qui étaient déterminants pour le comité d’évaluation.

205    Partant, le grief tiré de la violation de l’obligation de motivation doit également être rejeté.

206    En troisième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de ce qu’elle n’aurait appris que lors de la procédure devant le Tribunal et donc tardivement qu’un nombre de points minimal était attribué lorsque les exigences requises étaient entièrement respectées et que des points supplémentaires pouvaient être attribués en cas d’atouts supplémentaires, il suffit de renvoyer aux considérations développées au point 169 ci-dessus.

207    Les arguments visant les observations du comité d’évaluation relatives au système de notification doivent donc également être rejetés.

 Sur les arguments visant le critère relatif à l’existence d’un service d’assistance établi à Bruxelles et à l’observation du comité d’évaluation relative à d’autres services proposés

208    Dans le cadre des deuxième et troisième moyens, la requérante avance des arguments visant à remettre en cause l’utilisation du sous-critère prévu au point 2.1.4 du cahier des charges, selon lequel une assistance locale établie à Bruxelles (Belgique) était considérée comme un atout, ainsi que l’évaluation de son offre et de l’offre retenue à l’égard de ce sous-critère. Dans ce contexte, elle fait valoir que la Commission a violé l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application, le principe de non-discrimination et l’obligation de motivation et qu’elle a commis des erreurs manifestes d’appréciation.

–       Sur l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application

209    La requérante fait valoir que, en omettant d’indiquer de quelle manière le critère selon lequel une assistance locale établie à Bruxelles était considérée comme un atout serait pris en compte dans le cadre de l’évaluation de l’offre, la Commission n’a pas suffisamment précisé la pondération des critères d’attribution et a donc violé l’article 149 des règles d’application. Lorsque des critères imprécis seraient choisis, il serait d’autant plus important d’indiquer précisément leur pondération. Ce n’est que lors de la procédure devant le Tribunal qu’elle aurait appris que le nombre de points minimal avait été attribué lorsque les exigences requises avaient été entièrement respectées et que des points supplémentaires avaient pu être attribués en cas d’atouts supplémentaires. Par ailleurs, en dépit du fait que ni la tenue de rencontres mensuelles ni la rédaction de rapports d’évènements mensuels n’auraient été demandées dans l’appel d’offres, le comité d’évaluation aurait tenu compte de ces éléments dans le cadre de l’évaluation de l’offre du soumissionnaire retenu.

210    La Commission conteste ces arguments.

211    À cet égard, en premier lieu, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application, un pouvoir adjudicateur doit préciser la pondération relative qu’il confère à chacun des critères choisis pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges. Dans la mesure où cette pondération est exprimée au moyen d’une fourchette, son écart maximal doit être approprié. En effet, afin de garantir le respect des principes d’égalité de traitement et de transparence, il importe que tous les éléments pris en considération par le pouvoir adjudicateur pour identifier l’offre économiquement la plus avantageuse et, si possible, leur importance relative soient connus des soumissionnaires potentiels au moment de la préparation de leurs offres (voir les points 161 et 162 ci-dessus).

212    En deuxième lieu, il convient de constater qu’un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent aurait dû réaliser que le sous-critère relatif à une assistance locale établie à Bruxelles serait pris en compte dans le cadre de l’appréciation du critère de qualité c), relatif aux mesures de contrôle de la qualité et à l’évolutivité de la solution proposée. En effet, ce sous-critère est indiqué au point 2.1.4 du cahier des charges, qui, selon son intitulé, concerne le service de clientèle et le contrôle de qualité continus.

213    En troisième lieu, quant à l’argument de la requérante tiré de ce que la Commission n’a pas indiqué la pondération pour le sous-critère relatif à l’existence d’un service d’assistance établi à Bruxelles, il convient de relever que la Commission s’est limitée à prévoir une fourchette de 1 à 20 points pouvant être atteints pour le critère de qualité c), mais qu’elle n’a pas indiqué la pondération relative de ce sous-critère.

214    Toutefois, l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application se limite à exiger que la Commission indique la pondération de chaque critère de qualité choisi, mais ne prévoit pas d’obligation à cet égard en ce qui concerne les différents sous-critères (voir le point 166 ci-dessus).

215    Certes, ladite disposition exige également que, dans la mesure où une fourchette est appliquée pour la pondération d’un critère de qualité, une telle fourchette soit appropriée. Toutefois, eu égard au fait que l’existence d’une assistance établie à Bruxelles n’était qu’un des nombreux éléments pertinents pour l’appréciation du critère de qualité c), relatif aux mesures de contrôle de la qualité et à l’évolutivité de la solution proposée, force est de constater que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en se limitant à prévoir une fourchette unique pour ce critère de qualité et en n’indiquant pas la pondération relative spécifique à chaque sous-critère.

216    En quatrième lieu, il convient de rejeter l’argument tiré de ce que, dans les documents d’appel d’offres, ni la tenue de rencontres mensuelles ni la rédaction de rapports d’évènements mensuels n’ont été demandées.

217    En effet, l’article 149, paragraphe 3, du règlement financier ne s’oppose pas à ce qu’un élément qui n’a pas été mentionné explicitement dans les documents d’appel d’offres, mais dont la pertinence pour l’appréciation des offres par rapport à un critère de qualité prévu dans le cahier des charges aurait dû être reconnue par un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent soit pris en compte par le comité d’évaluation.

218    Or, en l’espèce, un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent aurait dû reconnaître que des éléments tels que la rédaction de rapports mensuels sur les incidents et la tenue de rencontres mensuelles à Bruxelles étaient des éléments pertinents pour l’appréciation du critère de qualité c), relatif aux mesures de contrôle de la qualité et à l’évolutivité de la solution proposée.

219    Dès lors, il convient de rejeter l’ensemble des arguments tirés d’une violation de l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application.

–       Sur le principe de non-discrimination

220    La requérante fait valoir que le point 2.1.4 du cahier des charges, selon lequel une assistance locale établie à Bruxelles était considérée comme un atout, ne serait pas conforme au principe de non-discrimination. Il mènerait à une discrimination fondée sur le lieu et la nationalité des soumissionnaires, ce qui aurait favorisé indûment l’offre du soumissionnaire retenu, une entreprise établie à Bruxelles, en raison de sa proximité géographique avec le pouvoir adjudicateur. En raison du développement des infrastructures de télécommunication, une telle exigence ne serait pas objectivement justifiée.

221    La Commission conteste ces arguments.

222    À cet égard, il convient de relever que, à la suite d’une question posée par le Tribunal au cours de l’audience, la requérante a précisé que, par ces arguments, elle entendait invoquer une violation, d’une part, du principe de non-discrimination entre les soumissionnaires, prévu à l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier, et, d’autre part, du principe de non-discrimination en raison de la nationalité, qui est consacré notamment à l’article 21, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

223    S’agissant du principe de non-discrimination en raison de la nationalité, il convient de relever que, en général, des soumissionnaires belges pourront répondre plus facilement à un critère relatif à l’existence d’un service d’assistance et de garde établi à Bruxelles que des soumissionnaires établis dans d’autres États membres. Partant, l’utilisation de ce sous-critère a pour effet de traiter des soumissionnaires belges de manière plus avantageuse que des soumissionnaires situés dans d’autres États membres.

224    Il convient donc d’examiner si l’utilisation de ce sous-critère peut être justifiée objectivement. Dans ce contexte, il doit être tenu compte du large pouvoir d’appréciation dont la Commission dispose pour le choix des critères d’évaluation (voir le point 99 ci-dessus).

225    Selon les indications de la Commission, le sous-critère en cause vise à assurer la présence d’un interlocuteur direct sur place. Selon la Commission, pour les transmissions en direct, qui font l’objet du marché en cause, il peut être important et urgent de résoudre des problèmes techniques d’émission à l’aide d’un interlocuteur direct sur place. Cela constituerait un avantage par rapport à un service d’assistance et de garde pouvant être joint uniquement par courrier électronique et par téléphone.

226    À cet égard, premièrement, il convient de constater que, eu égard au large pouvoir d’appréciation de la Commission, un tel objectif ne peut pas être considéré comme inapproprié. Deuxièmement, s’agissant du caractère nécessaire de la présence d’un interlocuteur sur place, il convient de relever que la requérante se limite à avancer que, eu égard au développement des infrastructures de télécommunication, une telle exigence n’est plus justifiée. Toutefois, elle n’avance aucun argument circonstancié permettant d’établir que, dans une situation d’urgence, la présence d’un interlocuteur directement sur place ne pourrait pas constituer un avantage. Au contraire, comme la Commission l’invoque à juste titre, dans son offre, la requérante a elle-même fait valoir qu’un service d’assistance proche des locaux de la Commission permettait une réponse rapide et une discussion en face-à-face pour résoudre le problème. Troisièmement, eu égard au large pouvoir d’appréciation de la Commission, l’entrave résultant de l’utilisation du sous-critère en cause ne saurait être considérée comme disproportionnée. En effet, force est de constater qu’un soumissionnaire non établi à Bruxelles pouvait satisfaire à ce sous-critère en installant du personnel approprié dans un bureau proche des locaux de la Commission.

227    Partant, aucun argument avancé par la requérante n’est susceptible de démontrer que l’utilisation du sous-critère relatif à l’existence d’un service d’assistance et de garde établi à Bruxelles n’était pas objectivement justifiée.

228    Il s’ensuit que l’argument tiré d’une violation du principe de non-discrimination en raison de la nationalité doit être rejeté.

229    Eu égard aux considérations précédentes, il convient également de rejeter l’argument tiré d’une violation du principe général de non-discrimination entre les soumissionnaires, prévu à l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier.

–       Sur l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation

230    La requérante fait valoir que les commentaires positifs du comité d’évaluation, selon lesquels le soumissionnaire retenu offrirait un support local à Bruxelles et selon lesquels des rencontres auraient lieu avec le soumissionnaire retenu à un rythme mensuel, sont entachés d’une erreur manifeste d’appréciation. La Commission aurait surestimé l’importance de ces éléments, qui ne seraient d’aucune nécessité objective dans le cadre de la fourniture des services en cause. Le commentaire positif relatif à la proposition du soumissionnaire retenu d’organiser des rencontres à un rythme mensuel ne serait pas plus conforme au principe de non-discrimination.

231    La Commission conteste ces arguments.

232    À cet égard, en premier lieu, s’agissant de l’existence d’un service d’assistance établi à Bruxelles, il suffit de renvoyer aux points 222 à 229 ci-dessus.

233    En second lieu, s’agissant de la rédaction de rapports mensuels sur les incidents et de la tenue de rencontres mensuelles à Bruxelles, il suffit de constater que la requérante n’avance aucun argument susceptible de démontrer que ces éléments n’étaient pas pertinents pour l’appréciation du critère de qualité c), relatif aux mesures de contrôle de qualité et à l’évolutivité de la solution proposée.

234    Partant, ces arguments doivent également être rejetés.

–       Sur l’obligation de motivation

235    La requérante avance que la Commission a violé l’obligation de motivation en se limitant à indiquer les éléments positifs de l’offre retenue, sans toutefois indiquer les points attribués en raison des différents commentaires.

236    Cet argument doit également être rejeté.

237    En effet, premièrement, il convient de relever que les observations que le comité d’évaluation a faites à l’égard de l’offre de la requérante et de l’offre retenue en ce qui concerne le critère de qualité c) portent sur leurs caractéristiques et avantages relatifs, comme l’exigent l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier et l’article 161 des règles d’application.

238    Deuxièmement, il doit être rappelé qu’il ne saurait être exigé de la Commission qu’elle transmît à un soumissionnaire dont l’offre n’avait pas été retenue, d’une part, outre les motifs du rejet de cette dernière, un résumé minutieux de la manière dont chaque détail de son offre avait été pris en compte au titre de l’évaluation de celle-ci et, d’autre part, dans le cadre de la communication des caractéristiques et des avantages relatifs de l’offre retenue, une analyse comparative minutieuse de cette dernière et de l’offre du soumissionnaire évincé (arrêt du 4 octobre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑629/11 P, non publié, EU:C:2012:617, point 21).

239    Partant, l’argument tiré d’une violation de l’obligation de motivation doit également être rejeté et, dès lors, l’ensemble des arguments visant le critère relatif à l’existence d’un service d’assistance établi à Bruxelles et les observations concernant d’autres services proposés.

 Sur les arguments concernant le critère relatif à l’évolution de la solution proposée

240    Dans le cadre des deuxième à quatrième moyens, la requérante avance des arguments visant notamment le point 3 du cahier des charges, selon lequel les soumissionnaires étaient invités à présenter leur vision en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes dans les cinq années à venir dans le cadre de l’offre technique.

241    Il convient d’examiner, dans un premier temps, les arguments visant l’existence d’erreurs affectant le cahier des charges et, dans un second temps, ceux visant l’existence d’erreurs affectant les commentaires du comité d’évaluation.

–       Sur les arguments visant le cahier des charges

242    En premier lieu, la requérante avance que, dans le cahier des charges, la Commission n’a pas fait de distinction suffisamment claire entre, d’une part, l’obligation impartie aux soumissionnaires de détailler les améliorations possibles du système dans le cadre des rapports annuels et, d’autre part, l’invitation qui leur a été faite de présenter leur vision en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes dans les cinq années à venir.

243    La Commission conteste ces arguments.

244    À cet égard, il convient de relever que, au point 3 du cahier des charges, les soumissionnaires étaient invités à exposer leur vision en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes dans les cinq années à venir. En revanche, comme il ressort du point 2.2 du cahier des charges, les soumissionnaires devaient établir des rapports annuels, dont un rapport d’activité et un rapport technique, qui concernait l’exécution du marché. Ce dernier rapport visait à établir, pour la période d’analyse, une liste des erreurs techniques s’étant produites et des corrections effectuées ainsi que des moyens d’améliorer le système.

245    Eu égard à ces indications contenues dans le cahier des charges, un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent était en mesure de distinguer ces deux éléments du cahier des charges. En effet, d’une part, l’invitation figurant au point 3 du cahier des charges visait à obtenir, au stade de la soumission de leur offre, des explications des soumissionnaires en ce qui concerne l’évolution possible de la solution proposée en cours de contrat. D’autre part, l’obligation prévue au point 2.2 du cahier des charges de rédiger un rapport technique visait à établir une procédure permettant de recenser les erreurs qui s’étaient produites et les corrections qui avaient été effectuées au cours d’une année et de proposer des approches permettant d’améliorer le système en tenant compte de ces éléments.

246    En tout état de cause, même à supposer qu’il existe un certain recoupement entre, d’une part, les améliorations possibles du système dans le cadre des rapports annuels et, d’autre part, la vision des soumissionnaires en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes dans les cinq années à venir, il ressort d’une manière suffisamment claire du cahier des charges que ces deux éléments devaient être pris en compte dans le cadre de l’évaluation de l’offre au regard du critère de qualité c), qui visait l’évolutivité de la solution proposée et la qualité des rapports et pour lequel un total de 20 points pouvait être atteint. Dans ces circonstances, contrairement à ce qu’avance la requérante, un éventuel recoupement de ces éléments ne serait contraire ni au principe de transparence, ni à l’obligation d’indiquer les critères d’attribution prévue à l’article 110, paragraphe 1, du règlement financier, ni à l’obligation de préciser la pondération relative conférée à chacun des critères choisis, résultant de l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application.

247    Partant, il convient de rejeter le grief tiré de ce que le cahier des charges ne faisait pas ressortir de manière suffisamment claire la distinction entre les améliorations possibles du système dans le cadre des rapports annuels, d’une part, et la vision des soumissionnaires en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes dans les cinq années à venir, d’autre part.

248    En deuxième lieu, la requérante avance que la Commission n’a pas indiqué la pondération relative du sous-critère correspondant à l’évolutivité de la solution proposée.

249    La Commission conteste ces arguments.

250    À cet égard, à titre liminaire, il convient de relever qu’un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent était en mesure de réaliser que le sous-critère en cause serait pris en compte dans le cadre de l’évaluation de l’offre au regard du critère de qualité c), qui visait notamment l’évolutivité de la solution proposée et pour lequel un total de 20 points pouvait être atteint.

251    S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission n’a pas indiqué la pondération relative dudit sous-critère, mais s’est limitée à prévoir une fourchette de 1 à 20 points pouvant être atteints pour le critère de qualité c), il convient de rappeler que, en vertu de l’article 149, paragraphe 3, première phrase, des règles d’application, un pouvoir adjudicateur est uniquement tenu de préciser, dans les documents d’appel à la concurrence, la pondération relative qu’il confère à chacun des critères choisis pour identifier l’offre économiquement la plus avantageuse. Cette disposition n’oblige donc pas le pouvoir adjudicateur à indiquer la pondération pour les différents sous-critères (voir le point 166 ci‑dessus).

252    Certes, l’article 149, paragraphe 3, deuxième phrase, des règles d’application prévoit que, dans la mesure où la pondération pour un critère de qualité est exprimée au moyen d’une fourchette, son écart maximal doit être approprié. Dans ce contexte, il convient également de relever que le critère de qualité c) porte, d’une part, sur les mesures de contrôle de la qualité et, d’autre part, sur l’évolutivité de la solution proposée. Toutefois, l’indication d’une fourchette unique pour le critère de qualité c), sans indication de la pondération des sous-critères relatifs aux mesures de contrôle de la qualité et à l’évolutivité de la solution proposée, ne saurait être considérée comme inappropriée. En effet, le sous-critère relatif aux mesures de contrôle de la qualité portait sur l’appréciation globale de la capacité de l’offre à garantir en continu la fourniture de services de haute qualité et, partant, l’exécution correcte du contrat pendant toute la durée de celui-ci. Quant à lui, le sous-critère relatif à l’évolutivité de la solution proposée visait à garantir que la solution proposée ne soit pas statique. Eu égard à ces considérations, il convient de conclure que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en réunissant ces sous-critères sous le critère de qualité c) et en ne prévoyant qu’une fourchette unique pour ce dernier. En effet, il existe un lien entre ces deux sous-critères, le contrôle de la qualité, l’analyse des problèmes techniques et l’élaboration d’une solution globale satisfaisante s’appuyant sur les analyses et d’éventuelles innovations techniques sur le marché afin de garantir, dans l’ensemble, la qualité et la modernité de la prestation.

253    Partant, l’argument tiré d’une violation de l’article 149, paragraphe 3, des règles d’application doit être rejeté.

254    En troisième lieu, quant à l’argument de la requérante tiré de ce qu’elle n’aurait appris que lors de la procédure devant le Tribunal et donc tardivement qu’un nombre de points minimal était attribué lorsque les exigences requises étaient entièrement respectées et que des points supplémentaires pouvaient être attribués en cas d’atouts supplémentaires, il suffit de renvoyer aux considérations développées au point 169 ci-dessus.

255    En quatrième lieu, la requérante fait valoir que la question de savoir si la présentation de la vision en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes pour les cinq années à venir s’accompagnait d’une force obligatoire quelconque ne ressortait pas suffisamment clairement des documents d’appel d’offres. Selon elle, si ce critère n’avait pas de force obligatoire, il était uniquement susceptible de mesurer la capacité imaginaire d’un soumissionnaire, il n’avait donc pas d’incidence sur la qualité de l’offre et ne pouvait donc être utilisé comme critère d’attribution au sens de l’article 110, paragraphe 2, du règlement financier et de l’article 149, paragraphe 2, des règles d’application.

256    La Commission conteste ces arguments.

257    À cet égard, premièrement, il convient de relever que, selon le point 3 du cahier des charges, la vision en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes dans les cinq années à venir devait être présentée au vu de l’évolution de la solution proposée. Cela est confirmé par le fait que cet élément devait être pris en compte dans le cadre de l’évaluation du critère de qualité c), visant notamment l’évolutivité de la solution proposée (voir le point 250 ci-dessus).

258    Deuxièmement, il doit être rappelé que, selon la jurisprudence, les critères retenus par le pouvoir adjudicateur pour identifier l’offre économiquement la plus avantageuse ne doivent pas nécessairement être de nature quantitative ou être orientés exclusivement vers les prix. Il suffit que de tels critères puissent être appliqués de manière objective et uniforme afin de comparer les offres et qu’ils soient clairement pertinents pour identifier l’offre économiquement la plus avantageuse (arrêt du 26 septembre 2014, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑498/11, non publié, EU:T:2014:831, point 110).

259    Eu égard à cette jurisprudence, il convient de constater que, en demandant aux soumissionnaires de présenter leur vision en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes pour les cinq années à venir dans le contexte de l’évolution possible de la solution proposée en cours de contrat, la Commission n’a pas dépassé les limites de la liberté de choix qui lui est conférée en ce qui concerne le choix des critères d’attribution (voir les points 98 et 99 ci‑dessus).

260    En effet, tout d’abord, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, les soumissionnaires ne devaient pas se limiter à spéculer sur l’évolution technologique dans le secteur, mais étaient invités à préciser de quelle manière la solution proposée pourrait évoluer, en tenant compte de l’évolution technologique.

261    Ensuite, s’agissant de l’argument tiré de l’absence de force obligatoire de la vision des soumissionnaires, il suffit de relever que, comme il ressort du projet de contrat de services, l’offre du soumissionnaire devait devenir une partie intégrante du contrat conclu entre l’Union et le soumissionnaire retenu.

262    Enfin, aucun des arguments avancés par la requérante n’est susceptible de remettre en cause l’argument de la Commission selon lequel le critère relatif aux possibilités d’évolutivité des solutions soumises est objectivement justifié, ce critère visant à garantir que le pouvoir adjudicateur obtienne des services qui soient à la hauteur de l’évolution technique non seulement au moment de la conclusion du contrat, mais également au cours de l’exécution de celui-ci.

263    Partant, l’ensemble des arguments visant le cahier des charges doit être rejeté.

–       Sur les arguments visant les commentaires du comité d’évaluation

264    La requérante avance que l’évaluation de l’offre du soumissionnaire retenu et de son offre en ce qui concerne la présentation de leur vision en termes d’évolution technologique du marché et des technologies correspondantes dans les cinq années à venir, également entachée d’erreurs.

265    Dans ce contexte, en premier lieu, elle fait valoir que le commentaire du comité d’évaluation, selon lequel les visions du soumissionnaire retenu étaient « intéressantes », est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation, le caractère intéressant d’une offre ne constituant pas un critère d’attribution valide.

266    La Commission conteste cet argument.

267    À cet égard, il suffit de relever qu’il ressort clairement des commentaires du comité d’évaluation que, en observant que l’offre du soumissionnaire retenu contenait des « idées intéressantes concernant l’évolution technologique future », il ne s’est pas limité à évaluer la vision du soumissionnaire retenu concernant l’évolution technologique du secteur, mais qu’il s’est prononcé de manière laudative sur l’évolution de la solution proposée envisagée par celui-ci, en mentionnant, comme exemples, les éléments d’un « transcodage instantané » et d’une « gestion http avancée ».

268    Partant, cet argument doit être rejeté.

269    En deuxième lieu, la requérante soutient que l’observation du comité d’évaluation concernant l’offre du soumissionnaire retenu selon laquelle le « transcodage instantané » et la « gestion http avancée » constitueraient des idées intéressantes en termes d’évolution technologique future serait manifestement erronée. Elle utiliserait déjà la technique du « transcodage instantané » et la « gestion http avancée » serait également comprise dans son offre. Il ne s’agirait donc pas de techniques nouvelles. En tenant compte de la vision du soumissionnaire retenu, le comité d’évaluation aurait donc commis une erreur manifeste d’appréciation. Au contraire, le fait que le soumissionnaire retenu ait considéré ces caractéristiques techniques comme une vision aurait dû entraîner une dévalorisation de son offre.

270    La Commission conteste ces arguments.

271    À cet égard, premièrement, il convient de relever qu’il ne ressort pas de l’observation en cause du comité d’évaluation que les fonctionnalités du « transcodage instantané » et de la « gestion http avancée » étaient des technologies futures dans le secteur. Cette observation se limite à constater que ces fonctionnalités constituaient des idées intéressantes pour l’évolution future de la solution proposée au cours de l’exécution du contrat. En effet, cela ressort clairement d’une lecture de l’observation en cause à la lumière du critère de qualité c), portant notamment sur l’évolutivité de la solution proposée, et du point 3 du cahier des charges, où les soumissionnaires étaient invités à exposer leur vision de l’évolution de la solution proposée pour les cinq années à venir, donc pour la période de l’exécution du contrat de services. Partant, dans la mesure où les arguments avancés par la requérante sont tirés du fait que le « transcodage instantané » et la « gestion http avancée » ne constituent pas des technologiques futures, ils doivent être rejetés.

272    Deuxièmement, dans la mesure où les arguments de la requérante sont tirés de ce que, eu égard au fait qu’elle utilisait déjà ces technologies, le comité d’évaluation aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant celles-ci comme un avantage de l’offre du soumissionnaire retenu, il convient de rappeler que l’évaluation des offres techniques par rapport au critère de qualité c) concernait les solutions qui avaient été proposées dans les offres des différents soumissionnaires. Partant, c’est à la lumière des indications figurant dans les offres de la requérante et du soumissionnaire retenu qu’il convient d’examiner si le comité d’évaluation a commis une erreur manifeste d’appréciation.

273    Dans un premier temps, s’agissant du « transcodage instantané », il convient de relever que, selon les indications de la Commission, cette notion décrit un procédé de compression numérique utilisé pour la production de fichiers audiovisuels, par lequel la compression numérique s’effectue simultanément avec la réception du signal audiovisuel et donc de manière instantanée. Selon la Commission, cette méthode se distingue donc de la technologie traditionnelle du transcodage, par laquelle les données audiovisuelles sont seulement traitées une fois la réception terminée. Force est de constater que la requérante n’a pas avancé d’arguments visant à remettre en cause cette définition du « transcodage instantané ».

274    En revanche, la requérante fait valoir que, dans son offre, elle a fait référence au « transcodage instantané ».

275    Or, force est de constater que, dans les parties de son offre auxquelles la requérante fait référence, cette notion n’est pas mentionnée explicitement.

276    Par ailleurs, d’une part, dans la mesure où la requérante fait référence à des parties de son offre dans lesquelles elle a mentionné le « transcodage en temps réel », le « transcodage multiformat » et le « transcodage VSD », il convient de relever qu’une partie de ces références se trouvent dans une partie de son offre où elle a décrit sa capacité technique. Partant, ces références ne pouvaient pas être prises en compte dans le cadre de l’évaluation de la solution proposée par la requérante.

277    D’autre part, dans la mesure où la requérante fait référence à des parties de son offre s’inscrivant dans la description de la solution qu’elle a proposée, la Commission conteste de manière circonstanciée le fait que les notions qui y sont mentionnées puissent être considérées comme des références au « transcodage instantané ». Dans ce contexte, elle avance que le « transcodage en temps réel » et le « transcodage multiformat » sont des procédés qui ne prévoient pas de compression numérique s’effectuant simultanément avec la réception du signal audiovisuel et donc de façon instantanée, mais entraînent une conversion en flux en différents formats après leur réception. Elle soutient également que le « transcodage VSD » désigne un procédé par lequel le signal audiovisuel entrant est d’abord enregistré, puis converti à la demande en flux aux divers formats. La requérante n’ayant avancé aucun argument visant à remettre en cause ces arguments de la Commission, il convient de conclure qu’elle n’a pas démontré que, dans son offre, elle avait proposé une solution prévoyant le « transcodage instantané ».

278    Dans un deuxième temps, s’agissant de l’observation du comité d’évaluation concernant la « gestion http avancée », la requérante avance qu’il s’agit d’une notion fantaisiste qui n’est pas compréhensible en elle-même et que, partant, la Commission n’a pas satisfait à son obligation de motivation. À cet égard, il convient de relever que, d’une part, il ressort de cette observation du comité d’évaluation qu’il s’agit d’une technologie avancée s’appuyant sur le « protocole http » et, d’autre part, eu égard au contexte dans lequel se situait son observation, la requérante aurait dû comprendre qu’il s’agissait d’une utilisation de ce protocole concernant les enregistrements audio et vidéo ainsi que leur diffusion. Partant, l’argument tiré d’une violation de l’obligation de motivation doit être rejeté.

279    La requérante fait également valoir que, en tout état de cause, son offre contenait des références à la « gestion http avancée ».

280    Dans ce contexte, tout d’abord, pour les raisons mentionnées au point 276 ci‑dessus, il convient de rejeter les références aux parties de l’offre de la requérante qui portent sur sa capacité technique.

281    Ensuite, force est de constater qu’il ne ressort pas des indications figurant dans l’offre de la requérante, auxquelles elle fait référence et qui s’inscrivent dans la description de la solution proposée ou de son évolution, que la requérante proposait une « gestion http avancée » ou envisageait de faire évoluer ladite solution à cet égard. En effet, d’une part, de la page 169 de la liasse d’annexes de la requête, à laquelle la requérante fait référence, il ressort uniquement que son offre satisfaisait à l’exigence relative au « protocole http ». D’autre part, de la page 177 de la liasse d’annexes de la requête, à laquelle la requérante fait référence pour la première fois dans le cadre de ses réponses aux questions du Tribunal et donc de manière tardive, il ressort uniquement que le réseau de diffusion de contenu de la requérante fournirait une gestion complète des formats de flux (streaming) actuels les plus courants pour la diffusion en direct et sur demande.

282    Enfin, il convient de relever que, bien que la Commission ait exposé, à la suite d’une question du Tribunal, qu’une « gestion http avancée » permettait d’obtenir des avantages tels que la possibilité de diffuser en continu un nombre plus important de contenus vidéo pour une utilisation optimale par les utilisateurs, la totale compatibilité avec divers réseaux et terminaux ou la distribution optimalisée des contenus pendant les heures de pointe, la requérante n’a pas avancé d’arguments visant à démontrer que, dans son offre, s’agissant de la solution proposée ou de l’évolution de celle-ci, elle avait proposé des technologies permettant d’obtenir ces avantages.

283    Eu égard à ces considérations, l’argument de la requérante selon lequel, dans son offre, elle avait fait référence à la fonctionnalité de « gestion http avancée » doit également être rejeté.

284    Dans un troisième temps, il convient de rejeter la demande de la requérante visant à désigner un agent de la Commission comme témoin afin de démontrer qu’elle utilisait déjà les fonctionnalités en cause dans le cadre des services fournis jusqu’en septembre 2014 (voir le point 6 ci‑dessus). En effet, comme cela a été exposé au point 272 ci-dessus, en tout état de cause, cela ne serait pas susceptible de démontrer que l’évaluation des offres du soumissionnaire retenu et de la requérante était entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

285    Troisièmement, l’argument de la requérante tiré de ce que l’offre du soumissionnaire retenu aurait dû être dévalorisée en raison du fait qu’il aurait considéré les caractéristiques techniques comme une « vision » doit être rejeté en renvoyant aux points 257 à 263 ci-dessus.

286    Partant, il convient de rejeter l’argument tiré du caractère erroné de l’observation du comité d’évaluation concernant l’offre du soumissionnaire retenu, selon laquelle le « transcodage instantané » et la « gestion http avancée » constitueraient des idées intéressantes en termes d’évolution technologique future.

287    En troisième lieu, dans la mesure où la requérante fait valoir que le commentaire du comité d’évaluation, selon lequel son offre ne faisait preuve que d’une vision limitée concernant les évolutions futures, est erroné, son offre ayant contenu une étude détaillée d’évolutions technologiques futures, ces arguments seront examinés aux points 336 à 339 ci-après avec les autres arguments visant l’évaluation de l’offre technique de la requérante.

288    Dès lors, l’ensemble des arguments visant le critère relatif à l’évolution de la solution proposée et les observations du comité d’évaluation à cet égard doivent être rejetés, sous réserve de l’examen des arguments visant à démontrer l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation concernant l’évaluation de l’offre de la requérante, qui seront examinés aux points 336 à 339 ci-après.

 Sur les arguments visant les stipulations du projet de contrat de services

289    Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante fait valoir des arguments visant le projet de contrat de services. Elle avance que ce projet contient des stipulations imprécises en ce qui concerne la contre-prestation pour les services fournis, les intérêts de retard et la durée de contrat, qui, en tout état de cause, serait excessive.

–       Sur la contre-prestation pour les services fournis

290    La requérante fait valoir que les stipulations du projet de contrat de services concernant la contre-prestation de la Commission pour les services fournis ne seraient pas suffisamment précises. D’une part, il résulterait des articles I.3.1, I.3.2 et I.4.2 dudit projet qu’un prix ferme devait être payé chaque mois conformément à l’offre de prix. D’autre part, il semblerait résulter du libellé des articles I.4.2 et I.4.3 de ce projet que des paiements dépassant le paiement du prix total proposé seraient réalisés. La requérante estime que cette possibilité pourrait avoir été prévue afin de pouvoir procéder à des augmentations, ce qui permettrait de tenir compte des imprécisions dans les documents d’appel d’offres à l’égard, notamment, des besoins de capacité de stockage.

291    La Commission conteste ces arguments.

292    À cet égard, il convient de constater que, contrairement à ce qu’avance la requérante, il ne peut pas être déduit des articles I.3.1, I.3.2, I.4.2 et I.4.3 du projet de contrat de services que le soumissionnaire retenu pouvait recevoir une somme supérieure à celle figurant dans son offre.

293    En effet, il ressort de l’article I.3.1 du projet de contrat de services que le montant devant être payé au soumissionnaire retenu ne peut pas dépasser 58 333,33 euros par mois. Cette somme mensuelle correspond à un douzième du budget maximal prévu de 700 000 euros par an. Dans ce contexte, il convient de tenir compte du fait qu’il ne s’agit que d’un projet de contrat et que, selon les indications de la Commission, dans le contrat final, le montant mensuel a été adapté afin de correspondre à un douzième du prix offert par le soumissionnaire retenu.

294    En application de l’article I.4.2 du projet de contrat de services, les paiements mensuels sont effectués sur présentation d’une facture. Pour sa part, l’article I.4.3 dudit projet prévoit que le solde à régler est à payer sur la base d’une facture annuelle finale.

295    Partant, il ne peut pas être déduit des stipulations invoquées par la requérante que la Commission était en droit de procéder à des paiements supérieurs au prix contractuel convenu. Comme l’avance à juste titre la Commission, l’article I.4.3 du projet de contrat de services sert uniquement à apurer les paiements mensuels précédents. Cela est confirmé par l’article II.15.6 dudit projet de contrat, portant sur les paiements intermédiaires et les paiements du solde restant.

296    Par ailleurs, dans la mesure où la requérante invoque des imprécisions dans le cahier des charges et dans le formulaire pour l’offre financière, notamment en ce qui concerne les besoins de capacité de stockage, il suffit de rappeler que, aux points 106 à 118 ci-dessus, les arguments de la requérante tirés de l’existence de telles imprécisions ont déjà été rejetés.

297    Partant, il convient de rejeter les arguments tirés de ce que les stipulations du projet de contrat de services concernant la contre-prestation de la Commission pour les services fournis n’étaient pas suffisamment précises.

–       Sur les intérêts de retard

298    La requérante fait valoir que l’article II.15.8 du projet de contrat de services prête à confusion dans la mesure où il prévoirait le paiement d’intérêts de retard au bénéfice de la Commission.

299    La Commission conteste ces arguments.

300    À cet égard, il convient de relever que, certes, la requérante fait valoir à juste titre que, dans la version allemande du projet de contrat de services qui faisait partie des documents d’appel d’offres, l’article II.15.8 prévoyait que le pouvoir adjudicateur était en droit de demander le paiement d’intérêts de retard après écoulement du délai pour le paiement prévu à l’article I.4 du projet de contrat de services, à savoir le paiement que l’Union devait effectuer au cocontractant pour les services fournis. En effet, dans cette version, à l’article II.15.8 du projet de contrat de services, le terme « Auftraggeber » (pouvoir adjudicateur) a été utilisé par erreur à la place de celui d’« Auftragnehmer » (contractant). Selon les indications de la Commission, ce lapsus a été corrigé entre-temps.

301    Toutefois, force est de constater qu’un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent aurait dû comprendre qu’il s’agissait d’une erreur de plume et n’aurait donc pas été induit en erreur en ce qui concerne la question de savoir si la Commission était en droit de demander le paiement d’intérêts de retard après l’écoulement du délai de paiement prévu au point I.4 du contrat-cadre.

302    En effet, dans ce contexte, premièrement, il convient de relever que le délai de paiement prévu à l’article I.4 du projet de contrat de services concerne une obligation de paiement du pouvoir adjudicateur à l’égard du soumissionnaire retenu. Partant, il ne semble guère logique que, dans l’hypothèse où la Commission ne procèderait pas au paiement de la somme due au contractant dans ce délai, ce soit elle et non le cocontractant qui pourrait demander le paiement d’intérêts de retard.

303    Deuxièmement, il ressort clairement de l’article II.15.8, quatrième alinéa, du projet de contrat de services que c’est le pouvoir adjudicateur qui est obligé de payer des intérêts de retard.

304    Eu égard à ces considérations, même un soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent qui se serait limité à examiner uniquement la version allemande du projet de contrat de services aurait donc dû reconnaître que l’utilisation du terme « Auftraggeber » (pouvoir adjudicateur) à l’article II.15.8 de la version allemande du projet de contrat de services constituait une erreur de plume et que, en fait, cette stipulation prévoyait un droit de l’« Auftragnehmer » (contractant).

305    Partant, cette erreur de plume ne saurait constituer une violation de l’obligation de transparence et le présent argument doit être rejeté.

–       Sur la durée du contrat

306    En premier lieu, la requérante fait valoir que la durée prévue pour le contrat de services était excessive. Comme il ressortirait des articles I.2 et I.3 du projet de contrat de services, ledit contrat devait avoir une durée de 9 ans au total, ce qui ne serait pas conforme aux dispositions applicables. Elle déduit de ces stipulations que le contrat initial devait avoir une durée de 5 ans (60 mois) et pouvait ensuite être renouvelé pour quatre années consécutives.

307    La Commission conteste ces arguments.

308    Ces arguments doivent être rejetés.

309    En effet, il ressort de l’article I.2.3, premier alinéa, du projet de contrat de services que la durée de l’exécution des tâches ne peut dépasser 60 mois. Selon le second alinéa de cette stipulation, la durée de l’exécution des tâches ne peut être étendue par un commun accord des parties avant l’écoulement de la période de 60 mois.

310    Cette stipulation doit être lue en combinaison avec le point II.2.1 de l’avis de marché, selon lequel le budget maximal pour le lot n° IV était de 3 500 000 euros pour 5 ans, ce qui correspond au budget maximal annuel de 700 000 euros prévu au point 7 des spécification générales multiplié par cinq et au budget mentionné aux articles I.3.1 et I.4.2 du projet de contrat, selon lesquels le paiement mensuel s’élevait à 58 333,33 euros, donc un douzième du budget maximal annuel prévu de 700 000 euros.

311    Il peut être déduit de ces éléments que la durée de l’exécution des tâches ne pouvait, en principe, dépasser une période de 5 ans.

312    S’agissant de l’article I.2.4 du projet de contrat de services, il doit être constaté que celui-ci ne porte pas sur la durée de l’exécution des tâches, mais sur la prolongation du contrat. Cet article prévoit que, en principe, le contrat serait prolongé tacitement quatre fois pour une période d’exécution de 12 mois. Contrairement à ce qu’avance la requérante, cette stipulation ne peut pas être interprétée comme prévoyant une durée initiale de 5 ans, qui serait prolongée tacitement quatre fois pour une durée de 12 mois. Au contraire, dans la mesure où il convient de lire l’article I.2.4 du projet de contrat de services en combinaison avec les articles I.2.3, I.3.1 et I.4.2 ainsi qu’avec le point II.2.1 de l’avis de marché, il doit être interprété comme prévoyant une durée initiale de 12 mois, qui pourrait être prolongée tacitement quatre fois pour une durée de 12 mois, donc 5 ans au total.

313    Eu égard à ces considérations, contrairement à ce qu’avance la requérante, il ne saurait être déduit des articles I.2.3 et I.2.4 du projet de contrat de services que la durée envisagée du contrat était de 9 ans.

314    En second lieu, la requérante avance que, à supposer que seule une durée de 5 ans ait été prévue, une telle durée ne serait pas objectivement justifiée.

315    La Commission conteste cet argument.

316    À cet égard, il convient de relever que, en application de l’article 122, paragraphe 1, des règles d’application, la durée des contrats ne peut excéder 4 ans, sauf dans des cas exceptionnels dûment justifiés.

317    La requérante fait valoir que la Commission n’a pas prouvé, document à l’appui, que, en ce qui concerne le projet en cause, une durée de 5 ans était justifiée.

318    Cet argument doit être rejeté.

319    En effet, d’une part, dans la mesure où celui-ci vise le bien-fondé de la décision de la Commission, il convient de relever que, eu égard aux particularités des services en cause, une période d’exécution de 5 ans ne peut pas être considérée comme excessive. En effet, force est de constater que, dans un autre contexte (voir le point 68 ci-dessus), la requérante invoque elle-même le fait que d’importantes mesures techniques devaient être prises pour pouvoir exécuter le contrat. La Commission invoque également le fait que le temps d’adaptation nécessaire pour le nouveau personnel pouvait prendre jusqu’à un an et demi.

320    D’autre part, dans la mesure où, en invoquant le fait que la Commission n’a pas avancé de preuves à l’appui, la requérante souhaiterait faire valoir que la Commission n’a pas suffisamment établi ou exposé les circonstances sur lesquelles elle s’est fondée, il suffit de relever que les particularités des services demandés en cause ressortent de manière suffisamment claire des documents d’appel d’offres.

321    Partant, il convient également de rejeter l’argument visant la durée du contrat et, dès lors, l’ensemble des arguments visant les stipulations du contrat-cadre.

 Sur les arguments tirés d’un détournement de pouvoir

322    À de multiples reprises, la requérante fait valoir que la Commission a commis un détournement de pouvoir.

323    À cet égard, il convient de rappeler que la notion de détournement de pouvoir a une portée précise dans le droit de l’Union et vise la situation dans laquelle une autorité administrative use de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles invoquées (arrêts du 25 février 1997, Kernkraftwerke Lippe-Ems/Commission, T‑149/94 et T‑181/94, EU:T:1997:21, points 53 et 149, et du 26 février 2002, Esedra/Commission, T‑169/00, EU:T:2002:40, point 198).

324    Or, force est de constater que la requérante n’avance aucun élément qui serait susceptible d’indiquer que la Commission a usé de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés.

325    Dès lors, les arguments tirés d’un détournement de pouvoir doivent être rejetés.

326    En tout état de cause, dans l’hypothèse où, en invoquant un détournement de pouvoir, la requérante souhaiterait en fait faire valoir que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation en ce qui concerne le choix des critères utilisés dans les documents d’appel d’offres, l’évaluation de son offre financière ou l’évaluation de l’offre technique et financière du soumissionnaire retenu , il suffit de rappeler que l’examen précédent effectué par le Tribunal n’a pas révélé de telles erreurs.

 Sur l’obligation de motivation

327    Au-delà des griefs tirés d’une violation de l’obligation de motivation qui ont déjà été examinés ci-dessus, la requérante avance de manière générale que, s’agissant de l’évaluation de l’offre du soumissionnaire retenu, la Commission n’a pas satisfait à l’obligation de motivation. La justification, documents à l’appui, des évaluations, considérations, déductions et décisions de la Commission aurait été extrêmement lacunaire et ne lui aurait pas permis de procéder à un examen. Elle aurait encore moins permis au juge de l’Union d’effectuer son contrôle. La Commission ne lui aurait pas donné accès à l’offre du soumissionnaire retenu et à d’autres documents. Sans accès à l’offre technique du soumissionnaire retenu, elle ne pourrait pas comprendre la teneur des commentaires du comité d’évaluation.

328    La Commission conteste ces arguments.

329    À cet égard, il convient de rappeler que, en ce qui concerne la décision portant rejet de l’offre d’un soumissionnaire, l’étendue concrète de l’obligation de motivation dépend de l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier et de l’article 161 des règles d’application, comme cela a été exposé aux points 79 à 84 ci-dessus.

330    S’agissant du respect de l’obligation de motivation en l’espèce, il convient de relever que, par lettre du 25 juillet 2014, la Commission a informé la requérante du fait que son offre avait obtenu moins de points que l’offre du soumissionnaire retenu et lui a communiqué les observations du comité d’évaluation concernant son offre ainsi que le nombre de points qu’elle avait atteints dans le cadre de l’évaluation technique. À la suite de la demande de la requérante, par lettre du 1er août 2014, la Commission lui a communiqué le nom du soumissionnaire retenu, l’a informée du fait que son offre avait reçu une note finale de 90,06 points, alors que l’offre retenue avait reçu une note finale de 97,00 points, et lui a communiqué le nombre de points que l’offre retenue avait atteints dans le cadre de l’évaluation de sa qualité technique, à savoir 95 points sur 100, son prix ainsi que des extraits du rapport d’évaluation contenant les observations du comité d’évaluation concernant ces deux offres. Les notes pour les différents critères techniques que l’offre du soumissionnaire retenu et celle de la requérante avaient atteintes étaient également indiquées dans les extraits du rapport d’évaluation.

331    Il doit également être rappelé que les arguments de la requérante examinés aux points 32 à 326 ci-dessus n’ont pas révélé que les informations que la Commission lui avaient fournies ne lui permettaient pas de connaître les éléments de fait et de droit justifiant le rejet de son offre et le choix de celle du soumissionnaire retenu et ne permettaient pas au Tribunal d’exercer son contrôle.

332    Comme cela a déjà été exposé au point 203 ci-dessus, l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier ne s’oppose pas en principe à ce qu’un pouvoir adjudicateur s’acquitte de son obligation de motivation par des commentaires succincts sur l’offre retenue et sur l’offre rejetée. Au contraire, l’article 113, paragraphe 2, second alinéa, du règlement financier prévoit que la communication de certains éléments peut être omise dans les cas, notamment, où elle pourrait porter préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d’entreprises publiques ou privées ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre celles-ci.

333    Ainsi, il ne saurait être exigé de la Commission qu’elle transmît à un soumissionnaire dont l’offre n’avait pas été retenue, d’une part, outre les motifs du rejet de cette dernière, un résumé minutieux de la manière dont chaque détail de son offre avait été pris en compte au titre de l’évaluation de celle-ci et, d’autre part, dans le cadre de la communication des caractéristiques et des avantages relatifs de l’offre retenue, une analyse comparative minutieuse de cette dernière et de l’offre du soumissionnaire évincé (voir, en ce sens, arrêt du 4 octobre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑629/11 P, non publié, EU:C:2012:617, point 21).

334    Par ailleurs, dans le cadre de la procédure de marché public, le pouvoir adjudicateur n’est pas non plus tenu de fournir à un soumissionnaire évincé, sur demande écrite de ce dernier, une copie complète du rapport d’évaluation (voir, en ce sens, ordonnance du 20 septembre 2011, Evropaïki/Commission, C‑561/10 P, non publiée, EU:C:2011:598, point 25).

335    Dès lors, le présent argument tiré d’une violation de l’obligation de motivation découlant de l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier et de l’article 161 des règles d’application doit également être rejeté.

 Sur les arguments visant l’évaluation de l’offre technique de la requérante

336    Dans le cadre du quatrième moyen, la requérante avance également des arguments visant l’évaluation de son offre technique. À cet égard, elle avance que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation et n’a pas suffisamment motivé sa décision. Dans ce contexte, il convient également de tenir compte de l’argument de la requérante tiré du caractère erroné de l’observation du comité d’évaluation, selon laquelle son offre ne faisait preuve que d’une vision limitée concernant les évolutions futures, mentionné au point 287 ci-dessus.

337    Ces arguments doivent être rejetés comme inopérants.

338    En effet, comme il ressort des considérations développées aux points 89 à 335 ci‑dessus, les arguments que la requérante a avancés à l’égard des documents d’appel d’offres ou de l’évaluation de l’offre du soumissionnaire retenu ne sont pas susceptibles de remettre en cause la conclusion de la Commission selon laquelle l’offre du soumissionnaire retenu avait atteint un score final de 97,00 points. Or, même à supposer que l’évaluation de l’offre technique de la requérante soit entachée d’erreurs et que, en l’absence de ces erreurs, cette offre aurait atteint un score parfait de 100 points en ce qui concerne sa qualité technique, en raison du prix qu’elle a proposé, selon la formule indiquée au point 4 ci-dessus, la requérante n’aurait pas pu atteindre le score final de 97,00 atteint par le soumissionnaire retenu.

339    Dans ce contexte, il convient de rejeter comme irrecevable l’argument que la requérante a avancé dans le cadre de ses réponses aux questions du Tribunal et selon lequel, lors de l’évaluation des offres, le comité d’évaluation a utilisé une autre formule que celle prévue au point 5 du cahier des charges. En effet, en application de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Or, force est de constater que la requérante aurait déjà pu avancer cet argument dans le cadre de la requête.

340    Eu égard aux considérations précédentes, il convient de rejeter tant la demande d’annulation des décisions de rejet et d’attribution que la demande d’annulation du contrat de services, sans qu’il soit nécessaire d’examiner la recevabilité de cette dernière demande.

2.     Sur la demande visant à ce que le Tribunal ordonne une mesure d’organisation de la procédure

341    La requérante demande qu’il soit ordonné à la Commission, par voie de mesure d’organisation de la procédure, de produire les documents du dossier de la procédure de passation de marché en question et de lui donner le plein accès au dossier.

342    Cette demande doit être rejetée.

343    En effet, dans l’hypothèse où les informations que la Commission a mises à la disposition de la requérante au cours de la procédure administrative ne feraient pas apparaître de manière claire et non équivoque son raisonnement de façon, d’une part, à lui permettre de connaître les justifications de la mesure prise afin de pouvoir défendre ses droits et de vérifier si la décision est ou non bien fondée et, d’autre part, à permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle de légalité, il conviendrait d’annuler les décisions d’attribution et de rejet pour défaut de motivation. Les intérêts de la partie requérante sont donc suffisamment protégés par l’obligation de motivation prévue à l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier et à l’article 161, paragraphe 3, des règles d’application (voir, en ce sens, arrêt du 17 octobre 2012, Evropaïki Dynamiki/Cour de justice, T‑447/10, non publié, EU:T:2012:553, point 115). Or, comme cela a été exposé aux points 327 à 335 ci-dessus, en l’espèce, la Commission a satisfait à l’obligation de motivation.

344    Dans la mesure où cette demande viserait, en fait, à remettre en cause la décision de la Commission du 22 décembre 2014, rejetant partiellement la demande de la requérante de lui donner accès aux documents concernant la procédure d’appel d’offres (voir le point 15 ci-dessus), il suffit de rappeler que, dans le cadre du présent recours, la requérante n’a pas avancé de chef de conclusion visant à l’annulation de cette décision.

345    Dès lors, cette demande doit également être rejetée et, partant, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

346    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      TV1 GmbH est condamnée aux dépens.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 janvier 2017.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.