Language of document : ECLI:EU:C:2017:120

Édition provisoire

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR

15 février 2017 (*)

« Procédure accélérée »

Dans l’affaire C‑670/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgericht Minden (tribunal administratif de Minden, Allemagne), par décision du 22 décembre 2016, parvenue à la Cour le 29 décembre 2016, dans la procédure

Tsegezab Mengesteab

contre

Bundesrepublik Deutschland,

LE PRÉSIDENT DE LA COUR,

le juge rapporteur, M. L. Bay Larsen, et l’avocat général, Mme E. Sharpston, entendus,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 17, paragraphe 1, de l’article 20, paragraphe 2, de l’article 21, paragraphe 1, et de l’article 22, paragraphe 7, du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (JO 2013, L 180, p. 31).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Tsegezab Mengesteab, ressortissant érythréen, à la Bundesrepublik Deutschland (République fédérale d’Allemagne), représentée par le Bundesamt für Migration und Flüchtlinge (Office fédéral de la migration et des réfugiés, Allemagne, ci-après l’« office »), au sujet de la décision de ce dernier rejetant sa demande d’asile, constatant l’absence de motifs interdisant son éloignement, ordonnant son transfert vers l’Italie et prononçant à l’encontre de celui-ci une interdiction d’entrée et de séjour d’une durée de six mois à compter du jour de l’éloignement.

3        Il ressort de la décision de renvoi que le requérant au principal a sollicité l’asile en Allemagne le 14 septembre 2015 et qu’il a présenté une demande officielle d’asile auprès de l’office le 22 juillet 2016. Considérant que la République italienne était l’État membre responsable de l’examen de cette demande en application du règlement n° 604/2013, l’office, par décision du 10 novembre 2016, a déclaré cette demande irrecevable, a constaté l’absence de motifs interdisant l’éloignement de M. Mengesteab, a ordonné le transfert de l’intéressé vers l’Italie et a prononcé à l’encontre de celui-ci une interdiction d’entrée et de séjour d’une durée de six mois à compter du jour de l’éloignement.

4        M. Mengesteab a contesté cette décision devant la juridiction de renvoi.

5        Cette juridiction se demande si, dans une situation telle que celle en cause au principal, un demandeur d’asile peut invoquer, dans le cadre d’un recours exercé contre une décision de transfert prise à son égard, l’expiration des délais de présentation de la requête aux fins de prise en charge prévus à l’article 21, paragraphe 1, du règlement n° 604/2013. Elle s’interroge également sur les modalités de décompte de ces délais et sur les effets éventuels du retard pris dans la présentation d’une requête aux fins de prise en charge sur la détermination de l’État membre responsable de l’examen de la demande d’asile.

6        Elle relève, à cet égard, que des retards tels que ceux en cause dans l’affaire au principal sont extrêmement communs pour les ressortissants de pays tiers ayant sollicité l’asile en Allemagne à partir du deuxième semestre de l’année 2015, en raison de l’augmentation inhabituelle du nombre de demandeurs d’asile entrés en Allemagne à compter du mois de juillet 2015.

7        Dans ces conditions, le Verwaltungsgericht Minden (tribunal administratif de Minden, Allemagne) a décidé de surseoir à statuer et de saisir la Cour à titre préjudiciel. Cette juridiction a également demandé à la Cour de soumettre l’affaire à une procédure accélérée, en application de l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour.

8        Cette disposition énonce que, à la demande de la juridiction de renvoi ou, à titre exceptionnel, d’office, le président de la Cour peut, lorsque la nature de l’affaire exige son traitement dans de brefs délais, le juge rapporteur et l’avocat général entendus, décider de soumettre un renvoi préjudiciel à une procédure accélérée dérogeant aux dispositions du règlement de procédure.

9        À l’appui de sa demande tendant à ce que la présente affaire soit soumise à la procédure accélérée, la juridiction de renvoi fait valoir que la procédure au principal est susceptible d’entraîner la suspension d’un grand nombre de décisions adoptées dans le cadre de la procédure instituée par le règlement n° 604/2013 et que les questions posées visent à résoudre des problèmes qui pourraient se présenter dans la grande majorité des affaires relevant de cette procédure en Allemagne. Elle souligne également que les retards prévisibles dans le traitement de ces affaires font obstacle à l’objectif de ce règlement tenant à garantir la célérité dans le traitement des demandes d’asile.

10      À cet égard, il ressort, certes, d’une jurisprudence constante de la Cour que le nombre important de personnes ou de situations juridiques potentiellement concernées par la décision qu’une juridiction de renvoi doit rendre après avoir saisi la Cour à titre préjudiciel n’est pas susceptible, en tant que tel, de constituer une circonstance exceptionnelle de nature à justifier le recours à une procédure accélérée (voir, notamment, ordonnances du président de la Cour du 5 octobre 2012, Abdullahi, C‑394/12, non publiée, EU:C:2012:623, point 11 ; du 5 juin 2014, Sánchez Morcillo et Abril García, C‑169/14, EU:C:2014:1388, point 10, ainsi que du 27 juin 2016, S., C‑283/16, non publiée, EU:C:2016:482, point 12).

11      Toutefois, cette considération ne saurait, en l’occurrence, être décisive, dans la mesure où le nombre d’affaires concernées par les questions préjudicielles que pose la juridiction de renvoi est tel que l’incertitude quant à leur issue risque d’entraver le fonctionnement du système instauré par le règlement n° 604/2013 et, par conséquent, de fragiliser le système européen commun d’asile mis en place par le législateur de l’Union européenne en application de l’article 78 TFUE.

12      En effet, d’une part, la présente affaire se place dans un contexte inédit où un nombre exceptionnellement élevé de demandes d’asile ont été enregistrées, en Allemagne et dans l’Union, dans des conditions analogues à celles de la demande en cause au principal.

13      D’autre part, cette affaire soulève des problèmes d’interprétation directement liés à ce contexte et relatifs à des aspects centraux du système mis en place par le règlement n° 604/2013, sur lesquels la Cour est appelée à se prononcer pour la première fois. La réponse de la Cour est donc susceptible d’avoir des conséquences générales pour les autorités nationales appelées à coopérer en vue d’appliquer ce règlement (voir, par analogie, ordonnance du président de la Cour du 22 février 2008, Kozlowski, C‑66/08, non publiée, EU:C:2008:116, point 11).

14      En effet, les questions posées par la juridiction de renvoi dans la présente affaire portent, en substance, sur l’interprétation des dispositions du règlement n° 604/2013 relatives aux procédures de prise en charge d’un demandeur d’asile, aux fins de déterminer l’État membre responsable de l’examen de la demande d’asile, dans une situation où l’État membre auprès duquel ce demandeur a sollicité la protection internationale pour la première fois ne semblerait pas, en principe, avoir respecté les délais prévus pour demander la prise en charge de celui-ci par un autre État membre. Il ressort de la demande de décision préjudicielle qu’un nombre exceptionnellement élevé de demandeurs d’asile se trouvent dans la même situation que le demandeur en cause dans le litige au principal.

15      Il s’ensuit que l’incertitude quant à la détermination de l’État membre responsable de l’examen des demandes d’asile telles que celle en cause au principal ne permet pas aux autorités nationales compétentes de prévoir les mesures administratives et budgétaires nécessaires pour assurer, en conformité avec les exigences résultant tant du droit de l’Union que des engagements internationaux des États membres concernés, l’examen de ces demandes et l’accueil des demandeurs d’asile relevant, le cas échéant, de leur responsabilité.

16      Dans cette situation exceptionnelle de crise, le recours à la procédure accélérée est nécessaire pour lever, dans les meilleurs délais, cette incertitude préjudiciable au bon fonctionnement du système européen commun d’asile, lequel concourt au respect de l’article 18 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (voir, par analogie, ordonnance du président de la Cour du 4 octobre 2012, Pringle, C‑370/12, non publiée, EU:C:2012:620, points 7 et 8).

17      Dès lors, il convient de soumettre l’affaire C-670/16 à la procédure accélérée.

Par ces motifs, le président de la Cour ordonne :

L’affaire C-670/16 est soumise à la procédure accélérée prévue à l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.