Language of document : ECLI:EU:C:2017:138

Édition provisoire

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR

15 février 2017 (*)

« Procédure accélérée »

Dans l’affaire C‑646/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche), par décision du 14 décembre 2016, parvenue à la Cour le 15 décembre 2016, dans la procédure

Khadija Jafari,

Zainab Jafari

contre

Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl,

LE PRÉSIDENT DE LA COUR,

le juge rapporteur, M. L. Bay Larsen, et l’avocat général, Mme E. Sharpston, entendus,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 2, 12 et 13 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (JO 2013, L 180, p. 31), ainsi que de l’article 5, paragraphes 1 et 4, du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO 2006, L 105, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre de litiges opposant Mmes Khadija et Zainab Jafari, ressortissantes afghanes, au Bundesamt für Fremdenwesen und Asyl (office fédéral pour le droit des étrangers et le droit d’asile, Autriche) au sujet des décisions de ce dernier rejetant les demandes d’asile qu’elles avaient introduites, ordonnant l’éloignement de celles-ci et constatant que leur renvoi vers la Croatie était licite.

3        Il ressort de la décision de renvoi que les requérantes au principal ont introduit, en leurs noms et en celui de leurs enfants respectifs, des demandes d’asile en Autriche, après avoir traversé la Grèce, la Macédoine, la Serbie, la Croatie et la Slovénie. Considérant que la République de Croatie était l’État membre responsable de l’examen de ces demandes en application de l’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 604/2013, l’office fédéral pour le droit des étrangers et le droit d’asile a déclaré ces dernières irrecevables, a ordonné l’éloignement des requérantes au principal et a constaté que leur renvoi vers la Croatie était licite.

4        Mmes Khadija et Zainab Jafari ont contesté les décisions de cet office devant le Bundesverwaltungsgericht (tribunal administratif fédéral, Autriche). Leurs recours ayant été rejetés par cette juridiction, elles ont introduit un pourvoi devant la juridiction de renvoi.

5        Cette juridiction s’interroge sur la manière dont doivent être appliqués les critères prévus aux articles 12 et 13 du règlement n° 604/2013, relatifs respectivement à la délivrance de titres de séjour ou de visas et à l’entrée ou au séjour, dans un contexte où les autorités nationales des États membres concernés auraient toléré, de facto, l’entrée de ressortissants de pays tiers sur leur territoire aux seules fins de traverser le territoire de ces États membres et de présenter une demande d’asile dans un autre État membre.

6        Dans ces conditions, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche) a décidé de surseoir à statuer et de saisir la Cour à titre préjudiciel. Cette juridiction a également demandé à la Cour de soumettre l’affaire à une procédure accélérée, en application de l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour.

7        Cette disposition énonce que, à la demande de la juridiction de renvoi ou, à titre exceptionnel, d’office, le président de la Cour peut, lorsque la nature de l’affaire exige son traitement dans de brefs délais, le juge rapporteur et l’avocat général entendus, décider de soumettre un renvoi préjudiciel à une procédure accélérée dérogeant aux dispositions du règlement de procédure.

8        À l’appui de sa demande tendant à ce que la présente affaire soit soumise à une procédure accélérée, la juridiction de renvoi fait valoir, en premier lieu, que les requérantes au principal font face à une incertitude quant à l’issue des procédures d’asile engagées qui les empêche de planifier la suite de leur existence et de celle de leurs enfants mineurs.

9        En second lieu, la juridiction de renvoi relève que, du fait du très grand nombre de demandes d’asile présentées en Autriche au cours de l’année 2015, le nombre d’autres procédures concernées par la solution que la Cour donnera aux questions posées atteint des dimensions exceptionnelles. Elle souligne également que la durée des procédures en cours peut avoir une incidence sur le maintien de l’ordre public en Autriche, au regard notamment de ses effets sur le budget et le fonctionnement de l’administration.

10      À cet égard, il ressort, certes, d’une jurisprudence constante de la Cour que le nombre important de personnes ou de situations juridiques potentiellement concernées par la décision qu’une juridiction de renvoi doit rendre après avoir saisi la Cour à titre préjudiciel n’est pas susceptible, en tant que tel, de constituer une circonstance exceptionnelle de nature à justifier le recours à une procédure accélérée (voir, notamment, ordonnances du président de la Cour du 5 octobre 2012, Abdullahi, C‑394/12, non publiée, EU:C:2012:623, point 11 ; du 5 juin 2014, Sánchez Morcillo et Abril García, C‑169/14, EU:C:2014:1388, point 10, ainsi que du 27 juin 2016, S., C‑283/16, non publiée, EU:C:2016:482, point 12).

11      Toutefois, cette considération ne saurait, en l’occurrence, être décisive, dans la mesure où le nombre d’affaires concernées par les questions préjudicielles que pose la juridiction de renvoi est tel que l’incertitude quant à leur issue risque d’entraver le fonctionnement du système instauré par le règlement n° 604/2013 et, par conséquent, de fragiliser le système européen commun d’asile mis en place par le législateur de l’Union européenne en application de l’article 78 TFUE.

12      En effet, d’une part, la présente affaire se place dans un contexte inédit où un nombre exceptionnellement élevé de demandes d’asile ont été déposées, en Autriche et dans l’Union, dans des conditions analogues à celles des demandes en cause au principal.

13      D’autre part, cette affaire soulève des problèmes d’interprétation directement liés à ce contexte et relatifs à des aspects centraux du système mis en place par le règlement n° 604/2013, sur lesquels la Cour est appelée à se prononcer pour la première fois. La réponse de la Cour est donc susceptible d’avoir des conséquences générales pour les autorités nationales appelées à coopérer en vue d’appliquer ce règlement (voir, par analogie, ordonnance du président de la Cour du 22 février 2008, Kozlowski, C‑66/08, non publiée, EU:C:2008:116, point 11).

14      Il s’ensuit que l’incertitude quant à la détermination de l’État membre responsable de l’examen des demandes d’asile telles que celles en cause au principal ne permet pas aux autorités nationales compétentes de prévoir les mesures administratives et budgétaires nécessaires pour assurer, en conformité avec les exigences résultant tant du droit de l’Union que des engagements internationaux des États membres concernés, l’examen de ces demandes et l’accueil des demandeurs d’asile relevant, le cas échéant, de leur responsabilité.

15      Dans cette situation exceptionnelle de crise, le recours à la procédure accélérée est nécessaire pour lever, dans les meilleurs délais, cette incertitude préjudiciable au bon fonctionnement du système européen commun d’asile, lequel concourt au respect de l’article 18 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (voir, par analogie, ordonnance du président de la Cour du 4 octobre 2012, Pringle, C‑370/12, non publiée, EU:C:2012:620, points 7 et 8).

16      Dès lors, il convient de soumettre l’affaire C-646/16 à la procédure accélérée.

Par ces motifs, le président de la Cour ordonne :

L’affaire C-646/16 est soumise à la procédure accélérée prévue à l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.