Language of document : ECLI:EU:C:2018:773

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

26 septembre 2018 (*)

Table des matières


I. Le cadre juridique

II. Les antécédents du litige et la décision litigieuse

III. La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

IV. Les conclusions des parties au pourvoi

V. Sur le pourvoi

A. Sur le premier moyen, tiré de l’insuffisance de contrôle du Tribunal

1. Sur la première branche du premier moyen

a) Argumentation des parties

b) Appréciation de la Cour

2. Sur la deuxième branche du premier moyen

a) Argumentation des parties

b) Appréciation de la Cour

3. Sur la troisième branche du premier moyen

a) Argumentation des parties

b) Appréciation de la Cour

4. Sur la quatrième branche du premier moyen

a) Argumentation des parties

b) Appréciation de la Cour

1) Sur le premier grief

2) Sur le second grief

5. Sur la cinquième branche du premier moyen

a) Argumentation des parties

b) Appréciation de la Cour

6. Conclusion sur le premier moyen

B. Sur le deuxième moyen, tiré d’une application erronée de l’article 101 TFUE

1. Sur la première branche du deuxième moyen

a) Argumentation des parties

b) Appréciation de la Cour

2. Sur la deuxième branche du deuxième moyen

a) Argumentation des parties

b) Appréciation de la Cour

3. Sur la troisième branche du deuxième moyen

a) Argumentation des parties

b) Appréciation de la Cour

C. Sur le troisième moyen, relatif à l’amende infligée à la requérante, ainsi que sur la première branche du premier moyen en ce qu’elle est tirée d’une violation de la compétence de pleine juridiction

1. Argumentation des parties

2. Appréciation de la Cour

VI. Sur l’annulation partielle de l’arrêt attaqué

VII. Sur le litige en première instance

VIII. Sur les dépens


« Pourvoi – Ententes – Marché européen des puces pour cartes – Réseau de contacts bilatéraux – Échanges d’informations commerciales sensibles – Contestation de l’authenticité des preuves – Droits de la défense – Restriction de la concurrence “par objet” – Infraction unique et continue – Contrôle juridictionnel – Compétence de pleine juridiction – Étendue – Calcul du montant de l’amende »

Dans l’affaire C‑99/17 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 24 février 2017,

Infineon Technologies AG, établie à Neubiberg (Allemagne), représentée par Mes M. Dreher, T. Lübbig et M. Klusmann, Rechtsanwälte,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par MM. A. Biolan et A. Dawes ainsi que par Mme J. Norris-Usher, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. T. von Danwitz, président de chambre, MM. C. Vajda, E. Juhász, Mme K. Jürimäe (rapporteur) et M. C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. M. Wathelet,

greffier : Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 février 2018,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 12 avril 2018,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, Infineon Technologies AG demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 décembre 2016, Infineon Technologies/Commission (T‑758/14, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2016:737), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision C(2014) 6250 final de la Commission, du 3 septembre 2014, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39574 – Puces pour cartes) (ci-après la « décision litigieuse »), et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende qui lui a été infligée.

I.      Le cadre juridique

2        L’article 23 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), dispose, à ses paragraphes 2 et 3 :

« 2.      La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :

a)      elles commettent une infraction aux dispositions de l’article [101 ou 102 TFUE], ou

[...]

3.      Pour déterminer le montant de l’amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l’infraction, la durée de celle-ci. »

3        Aux termes de l’article 31 de ce règlement :

« La Cour de justice statue avec compétence de pleine juridiction sur les recours formés contre les décisions par lesquelles la Commission a fixé une amende ou une astreinte. Elle peut supprimer, réduire ou majorer l’amende ou l’astreinte infligée. »

4        S’agissant du calcul des amendes, les points 20 à 23 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement (CE) no 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices de 2006 »), énoncent :

« 20.      L’appréciation de la gravité sera faite au cas par cas pour chaque type d’infraction, tenant compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce.

21.      En règle générale, la proportion de la valeur des ventes prise en compte sera fixée à un niveau pouvant aller jusqu’à 30 %.

22.      Afin de décider si la proportion de la valeur des ventes à prendre en considération dans un cas donné devrait être au bas ou au haut de cette échelle, la Commission tiendra compte d’un certain nombre de facteurs, tels que la nature de l’infraction, la part de marché cumulée de toutes les parties concernées, l’étendue géographique de l’infraction, et la mise en œuvre ou non de l’infraction.

23.      Les accords [...] horizontaux de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production, qui sont généralement secrets, comptent, par leur nature même, parmi les restrictions de concurrence les plus graves. Au titre de la politique de la concurrence, ils doivent être sévèrement sanctionnés. Par conséquent, la proportion des ventes prise en compte pour de telles infractions sera généralement retenue en haut de l’échelle. »

II.    Les antécédents du litige et la décision litigieuse

5        Les antécédents du litige et les éléments essentiels de la décision litigieuse, tels qu’ils ressortent des points 1 à 40 de l’arrêt attaqué, peuvent se résumer comme suit pour les besoins de la présente affaire.

6        La Commission a été informée, le 22 avril 2008, de l’existence d’une entente dans le secteur des puces pour cartes par Renesas Technology Corp. et ses filiales (ci-après « Renesas »), lesquelles ont demandé à bénéficier de l’immunité d’amendes au titre de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17, ci-après la « communication sur la coopération »). Après avoir procédé à des inspections inopinées dans les locaux de plusieurs sociétés opérant dans ce secteur et après leur avoir adressé des demandes de renseignements, la Commission a, le 28 mars 2011, ouvert la procédure, conformément à l’article 11, paragraphe 6, du règlement n° 1/2003, à l’encontre, premièrement, de Koninklijke Philips NV et Philips France SAS (ci-après, prises ensemble, « Philips »), deuxièmement, de Renesas ainsi que, troisièmement, de Samsung Electronics Co. Ltd et de Samsung Semiconductor Europe GmbH (ci-après, prises ensemble, « Samsung »).

7        Au mois d’avril 2011, la Commission a engagé des discussions en vue d’une transaction au sens de l’article 10 bis du règlement (CE) nº 773/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission, en application des articles [101] et [102 TFUE] (JO 2004, L 123, p. 18), avec Renesas, Samsung et Philips. Ces discussions ont été suspendues au mois d’octobre 2012.

8        Le 18 avril 2013, la Commission a envoyé une communication des griefs à Renesas, à Hitachi Ltd, à Mitsubishi Electric Corp., à Samsung, à la requérante et à Philips. Dans leurs observations sur la communication des griefs, la requérante et Philips ont contesté l’authenticité de certains documents produits par Samsung après la procédure de transaction. Samsung a répondu à ces observations et a fourni d’autres documents à la Commission. L’authenticité de ces documents a par ailleurs fait l’objet de deux exposés des faits adoptés par la Commission les 9 octobre 2013 et 25 juillet 2014.

9        L’audition s’est tenue le 20 novembre 2013.

10      Le 3 septembre 2014, la Commission a adopté la décision litigieuse.

11      Par cette décision, la Commission a constaté que quatre entreprises, à savoir la requérante, Philips, Renesas et Samsung, avaient participé à une infraction unique et continue à l’article 101, paragraphe 1, TFUE et à l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3) (ci-après l’« accord EEE »), dans le secteur des puces pour cartes couvrant l’Espace économique européen (EEE) (ci-après l’« infraction en cause »). Cette infraction, qui se serait déroulée entre le 24 septembre 2003 et le 8 septembre 2005, aurait porté sur les puces pour cartes.

12      Le marché des puces pour cartes comportait deux segments, à savoir celui des puces pour cartes SIM, utilisées essentiellement pour les téléphones mobiles (ci-après les « puces SIM »), et celui des puces pour cartes non-SIM, utilisées pour la banque, la sécurité et l’identification (ci-après les « puces non-SIM »). Au moment de l’infraction en cause, ce marché était caractérisé par une chute constante des prix, par une pression exercée sur les prix par les principaux clients des producteurs de cartes à puces, par des déséquilibres de l’offre par rapport à la demande résultant de l’augmentation de la demande et de l’évolution technologique constante et rapide ainsi que par la structure des négociations contractuelles avec les clients.

13      La Commission a considéré, s’agissant des principales caractéristiques de l’infraction en cause, que l’entente sanctionnée reposait sur un ensemble de contacts bilatéraux, qui étaient hebdomadaires au cours des années 2003 et 2004, entre les destinataires de la décision litigieuse. Selon la Commission, les participants à l’infraction ont coordonné leur politique de prix en matière de puces pour cartes au moyen de contacts portant sur la fixation de prix, notamment les prix spécifiques proposés aux principaux clients, les prix minimaux et les prix indicatifs, le partage des points de vue sur l’évolution des prix pour le semestre suivant et les intentions en matière de fixation de prix, mais aussi sur la capacité de production et l’utilisation de celle-ci, le comportement futur sur le marché ainsi que les négociations de contrats de clients communs. Le calendrier des contacts collusoires, dont la liste figure au tableau n° 4 de la décision litigieuse, suivrait le calendrier du cycle économique. La Commission a constaté l’existence de liens entre ces contacts bilatéraux en raison de l’objet de ces derniers ainsi que de leurs dates. À l’occasion desdits contacts bilatéraux, les entreprises auraient parfois fait ouvertement mention de la tenue d’autres contacts bilatéraux entre les participants à l’infraction en cause et des informations collectées auraient été transmises aux concurrents.

14      La Commission a qualifié l’infraction en cause d’infraction unique et continue. En effet, les contacts collusoires seraient liés et de nature complémentaire. Par leur interaction, ils auraient contribué à la réalisation de l’ensemble des effets anticoncurrentiels dans le cadre d’un plan global ayant un objectif unique. Selon la Commission, Samsung, Renesas et Philips avaient connaissance de l’infraction dans son entièreté. En revanche, la requérante n’a été tenue pour responsable de cette infraction que dans la mesure où elle a participé à des pratiques collusoires avec Samsung et Renesas, en l’absence de preuves de contacts qu’elle aurait eus avec Philips ou de son impression subjective de participer à l’ensemble de l’infraction en cause.

15      Enfin, la Commission a estimé que le comportement des entreprises en cause avait pour objet de restreindre le jeu de la concurrence à l’intérieur de l’Union européenne et qu’il a eu un effet appréciable sur le commerce entre les États membres et entre les parties contractantes à l’accord EEE.

16      Aux fins du calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et des lignes directrices de 2006, la Commission a précisé que l’infraction en cause avait été commise intentionnellement. Pour le calcul du montant de base, cette institution a retenu un indicateur pour la valeur annuelle des ventes reposant sur la valeur réelle des ventes des produits cartellisés, réalisées par les entreprises au cours des mois de leur participation active à l’infraction en cause. Elle a fait application d’un coefficient de gravité de l’infraction en cause de 16 %. S’agissant de la durée de cette infraction, elle a retenu une durée de 11 mois et 14 jours pour Philips, de 18 mois et 7 jours pour la requérante, de 23 mois et 2 jours pour Renesas ainsi que de 23 mois et 15 jours pour Samsung. Elle a appliqué un coefficient de 16 % de la valeur des ventes au titre du montant additionnel.

17      Au titre des circonstances atténuantes, la Commission a accordé une réduction de 20 % du montant de l’amende à la requérante en raison du fait que cette dernière n’était responsable de l’infraction en cause qu’à concurrence de sa participation à des arrangements collusoires avec Samsung et Renesas, et non avec Philips. En application de la communication sur la coopération, elle a accordé l’immunité d’amendes à Renesas et une réduction de 30 % du montant de l’amende à Samsung.

18      À l’article 1er de la décision litigieuse, la Commission a constaté que les entreprises suivantes ont participé à une infraction unique et continue à l’article 101, paragraphe 1, TFUE et à l’article 53 de l’accord EEE dans le secteur des puces pour cartes couvrant l’EEE :

–        la requérante, du 24 septembre 2003 au 31 mars 2005, « en raison de sa coordination avec Samsung et Renesas » [article 1er, sous a)] ;

–        Philips, du 26 septembre 2003 au 9 septembre 2004 [article 1er, sous b)] ;

–        Renesas, du 7 octobre 2003 au 8 septembre 2005 [article 1er, sous c)], et

–        Samsung, du 24 septembre 2003 au 8 septembre 2005 [article 1er, sous d)].

19      À l’article 2 de cette décision, la Commission a imposé des amendes d’un montant de 82 784 000 euros à la requérante [article 2, sous a)], de 20 148 000 euros à Philips [article 2, sous b)], de 0 euro à Renesas [article 2, sous c)] et de 35 116 000 euros à Samsung [article 2, sous d)].

III. La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

20      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 novembre 2014, la requérante a introduit un recours tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision litigieuse en tant qu’elle la concerne, et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l’amende qui lui avait été infligée.

21      À l’appui de son recours, la requérante invoquait six moyens. Ses deux premiers moyens avaient trait au respect des droits de la défense et du principe de bonne administration. Le troisième moyen était pris de la violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE. Le quatrième moyen, soulevé à titre subsidiaire, était tiré de l’application erronée de la notion d’infraction unique et continue. Les cinquième et sixième moyens portaient sur l’amende.

22      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ces moyens et, partant, le recours de la requérante dans son intégralité.

IV.    Les conclusions des parties au pourvoi

23      Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué ;

–        d’annuler la décision litigieuse en tant qu’elle la concerne ;

–        à titre subsidiaire, de réduire l’amende d’un montant de 82 874 000 euros qui lui a été infligée dans la décision litigieuse à un montant proportionné ;

–        à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire au Tribunal pour réexamen, et

–        de condamner la Commission aux dépens.

24      La Commission demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi ;

–        à titre subsidiaire, de rejeter la demande de réduction du montant de l’amende infligée à la requérante, et

–        de condamner la requérante aux dépens.

V.      Sur le pourvoi

25      À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève trois moyens.

A.      Sur le premier moyen, tiré de l’insuffisance de contrôle du Tribunal

26      Le premier moyen de la requérante est divisé en cinq branches.

1.      Sur la première branche du premier moyen

a)      Argumentation des parties

27      Par la première branche du premier moyen, qui concerne en particulier le point 160 de l’arrêt attaqué, la requérante reproche au Tribunal de n’avoir examiné, sur les onze contacts prétendument illégaux qui ont eu lieu entre elle-même et Samsung ou Renesas et dont l’existence a été constatée par la Commission, que cinq d’entre eux, alors qu’elle avait contesté chacun de ces contacts. Ce contrôle juridictionnel incomplet et sélectif de la décision litigieuse serait contraire à l’article 263 TFUE et aurait conduit à un contrôle insuffisant du montant de l’amende. Selon la requérante, l’illégalité des appréciations de la Commission à l’égard de l’un ou de l’autre des contacts contestés devait conduire à l’annulation des conclusions correspondantes de la Commission dans la décision litigieuse.

28      Le Tribunal aurait également méconnu l’obligation de motivation prévue à l’article 36 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. En particulier, il aurait omis de fournir des motifs suffisants pour justifier l’approche qu’il a exposée au point 160 de l’arrêt attaqué ainsi que le choix des cinq contacts contrôlés.

29      Un tel contrôle sélectif n’aurait pas permis au Tribunal d’apprécier pleinement la gravité de l’infraction alléguée et de contrôler le montant de l’amende infligée. Le Tribunal aurait insuffisamment répondu aux arguments de la requérante relatifs à l’amende, comme cela ressort du troisième moyen de pourvoi. En particulier, dès lors que la participation de celle-ci à l’infraction a été réduite aux cinq contacts dont l’existence a été prouvée, le Tribunal ne pouvait confirmer le montant de l’amende que la Commission lui avait infligée.

30      S’agissant des contacts non contrôlés, le Tribunal se serait borné, en particulier au point 153 de l’arrêt attaqué, à renvoyer aux conclusions de la Commission, sans les contrôler comme il aurait été tenu de le faire.

31      Le contrôle sélectif opéré par le Tribunal serait contradictoire et incohérent avec les appréciations qu’il a portées aux points 136, 137 et 211 de l’arrêt attaqué. Par ce contrôle sélectif, le Tribunal aurait dénaturé les caractéristiques de l’infraction alléguée par la Commission, dès lors que les contacts examinés par le Tribunal auraient été insuffisants pour étayer le constat d’une infraction unique et continue en ce qui concerne la requérante.

32      Faute d’avoir confirmé les autres contacts établis par la Commission et, en particulier, faute d’avoir examiné les contacts allégués entre la requérante et Renesas au cours de l’année 2003, mentionnés au considérant 160 de la décision litigieuse, le Tribunal n’aurait disposé d’aucune base pour constater la tenue de réunions illégales entre Samsung et la requérante durant cette année. Partant, selon la requérante, le Tribunal n’a disposé d’aucune preuve, autre que celles qu’elle conteste, étayant l’existence et le contenu des contacts qu’elle aurait eus avec Samsung en 2003.

33      La requérante précise que le contrôle sélectif affecte sa situation juridique dans la mesure où il l’expose à des revendications injustifiées de la part de tiers, telles que des demandes de dommages et intérêts.

34      La Commission conteste l’ensemble de ces arguments.

35      Elle observe que la requérante n’a pas contesté la conclusion figurant aux considérants 38 à 41, 68, 76, 77, 246 et 297 de la décision litigieuse, selon laquelle les prix des puces pour cartes étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle. Dès lors, selon la Commission, le Tribunal pouvait se limiter à vérifier que la requérante avait participé à au moins un contact anticoncurrentiel par an pendant la période comprise entre l’année 2003 et l’année 2005. En effet, il suffirait que les résultats économiques des contacts anticoncurrentiels poursuivent leurs effets au-delà de la date à laquelle ils ont eu lieu.

36      Dans ces conditions, le Tribunal n’aurait pas été tenu de justifier son choix des cinq contacts qu’il a examinés ni l’absence d’examen de la participation de la requérante aux six autres contacts.

37      Le Tribunal n’aurait pas été empêché d’apprécier les arguments relatifs à la gravité de l’infraction et au montant de l’amende. En particulier, le nombre de contacts auxquels la requérante a participé serait sans incidence sur l’appréciation de la gravité de l’infraction ou sur la possibilité d’appliquer un pourcentage de gravité de 16 %.

38      Il n’aurait pas davantage été empêché d’examiner les arguments relatifs à la participation de la requérante à l’infraction unique et continue, dès lors que cette dernière a participé à au moins un contact par année et que ces contacts s’inscrivaient dans un plan d’ensemble. Il aurait également été en mesure d’apprécier correctement les arguments relatifs à la nature anticoncurrentielle des contacts avec Samsung les 24 septembre et 3 novembre 2003, dès lors que les éléments de preuve fournis par Renesas n’étaient que l’une des raisons parmi d’autres pour lesquelles le Tribunal a confirmé les conclusions de la Commission relatives à la crédibilité de Samsung comme témoin et à l’échange d’informations lors desdits contacts.

39      L’argument de la requérante relatif à l’annulation totale de la décision litigieuse serait irrecevable en vertu de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour.

40      L’argument relatif au point 153 de l’arrêt attaqué serait inopérant, le Tribunal n’ayant tiré aucune conséquence de la référence faite aux neuf contacts anticoncurrentiels autres que ceux des 3 novembre et 27 novembre 2003.

41      La requérante serait exposée à des demandes d’indemnisation en raison non pas de l’approche retenue par le Tribunal, mais de sa participation à au moins un contact anticoncurrentiel par an au cours des années allant de 2003 à 2005.

42      S’agissant de l’argument de la requérante relatif aux points 136 et 137 de l’arrêt attaqué, cette dernière confondrait deux notions différentes, à savoir la preuve du nombre de contacts anticoncurrentiels auxquels la requérante a participé et la démonstration du caractère anticoncurrentiel de ces contacts.

b)      Appréciation de la Cour

43      À titre liminaire, il convient d’observer que le point 160 de l’arrêt attaqué est relatif à l’appréciation, par le Tribunal, de la troisième branche du troisième moyen soulevée par la requérante devant lui et tirée de l’absence de preuves permettant d’établir l’existence d’une infraction à l’article 101 TFUE. Ce point est libellé comme suit :

« [...] la requérante ne conteste pas l’appréciation de la Commission selon laquelle les prix étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle, ce qui ressort d’ailleurs des discussions auxquelles la requérante a pris part. Dans ces conditions, il suffit d’examiner, pour les années 2003 à 2005, si la requérante a participé à une ou, le cas échéant, à deux discussions anticoncurrentielles, durant chacune de ces trois années, avec Samsung ou Renesas, pour conclure à l’existence ou non d’une infraction à l’article 101 TFUE. Dans ces conditions, le Tribunal estime opportun d’examiner, à titre liminaire, cinq contacts entre la requérante et Samsung ou Renesas, à savoir les contacts du 24 septembre 2003 (premier contact), du 3 novembre 2003 (deuxième contact), du 18 mars 2004 (sixième contact), du 1er au 8 juin 2004 (septième contact) et du 31 mars 2005 (onzième contact), ces premier et dernier contacts marquant, selon la Commission, respectivement le début et la fin de la participation de la requérante à l’infraction en cause. Ce n’est donc que dans l’hypothèse où ces cinq contacts ne permettraient pas d’établir l’existence de l’infraction en cause que le Tribunal examinera si les autres contacts, tels que celui du 17 novembre 2003, dont la requérante soutient dans ses écritures et lors de l’audience qu’ils n’étaient pas illicites, contribuent ou non à établir l’existence de cette infraction. »

44      Après avoir examiné les arguments de la requérante relatifs auxdits cinq contacts, le Tribunal a estimé, au point 207 de l’arrêt attaqué, que la Commission n’avait pas commis d’erreur en considérant que la requérante avait participé à des discussions anticoncurrentielles avec Samsung et Renesas entre le 24 septembre 2003 et le 31 mars 2005.

45      Le Tribunal n’a, en revanche, pas examiné les arguments par lesquels la requérante contestait les conclusions de la Commission à l’égard des six autres contacts bilatéraux retenus à son égard dans la décision litigieuse.

46      La requérante conteste cette approche du Tribunal au motif, en substance, qu’elle est incompatible avec les exigences d’un contrôle juridictionnel complet au titre à la fois du contrôle de la légalité et du contrôle du montant de l’amende.

47      Il y a lieu, à cet égard, de rappeler que le système de contrôle juridictionnel des décisions de la Commission relatives aux procédures d’application des articles 101 et 102 TFUE consiste en un contrôle de la légalité des actes des institutions établi à l’article 263 TFUE, lequel peut être complété, en application de l’article 261 TFUE et sur demande des requérants, par l’exercice par le Tribunal d’une compétence de pleine juridiction en ce qui concerne les sanctions infligées en ce domaine par la Commission (arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission, C‑603/13 P, EU:C:2016:38, point 71).

48      Il convient de rappeler que la portée du contrôle de légalité prévu à l’article 263 TFUE s’étend à l’ensemble des éléments des décisions de la Commission relatives aux procédures d’application des articles 101 et 102 TFUE dont le Tribunal assure un contrôle approfondi, en droit comme en fait, à la lumière des moyens soulevés par la requérante et compte tenu de l’ensemble des éléments pertinents soumis par cette dernière (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission, C‑603/13 P, EU:C:2016:38, point 72 ainsi que jurisprudence citée).

49      En l’espèce, la requérante cherchait, notamment, à obtenir un contrôle de la légalité du constat, par la Commission, de sa participation à une infraction unique et continue pendant la période comprise entre le 24 septembre 2003 et le 31 mars 2005.

50      Ainsi qu’il ressort du point 43 du présent arrêt, le Tribunal a justifié la limitation de son contrôle à cinq des onze contacts bilatéraux en cause par le fait, non contesté par la requérante, que les prix étaient, en principe, négociés sur une base annuelle. Il importe d’ajouter à ce titre que, comme cela ressort des points 115 et 116 du présent arrêt, la requérante n’a présenté aucun argument recevable au stade du pourvoi de nature à infirmer cette justification.

51      Ainsi, d’une part, le Tribunal a exposé à suffisance de droit les raisons pour lesquelles il a exercé un contrôle sur un nombre limité des contacts contestés par la requérante.

52      D’autre part, il y a lieu de considérer que, pour confirmer la légalité du constat, par la Commission, de la participation de la requérante à l’infraction en cause, le Tribunal pouvait se limiter à contrôler les appréciations de la Commission relatives non seulement aux premier et dernier contacts collusoires, mais également à un ou deux contacts par année de participation.

53      En effet, dans le cadre d’une infraction s’étendant sur une certaine durée, le fait que les manifestations de l’entente interviennent à des périodes différentes, pouvant être séparées par des laps de temps plus ou moins longs, demeure sans incidence sur l’existence de cette entente, dès lors que les différentes actions qui font partie de cette infraction poursuivent une seule finalité et s’inscrivent dans le cadre d’une infraction à caractère unique et continu (arrêt du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission, C‑113/04 P, EU:C:2006:593, point 169).

54      En outre, selon une jurisprudence constante, le fait qu’une entreprise n’a pas participé à tous les éléments constitutifs d’une entente ou qu’elle a joué un rôle mineur dans les aspects auxquels elle a participé n’est pas pertinent pour établir l’existence d’une infraction dans son chef, étant donné qu’il n’y a lieu de prendre en considération ces éléments que lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction et, le cas échéant, de la détermination du montant de l’amende (arrêt du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 45 et jurisprudence citée).

55      Partant, la première branche du premier moyen, en ce qu’elle est tirée de la violation de l’article 263 TFUE et de celle de l’obligation de motivation, doit être écartée.

56      Dans la mesure où, comme cela ressort du point 46 du présent arrêt, la première branche du premier moyen est également tirée de la violation de la compétence de pleine juridiction du Tribunal et porte, de ce fait, sur des éléments qui seront examinés dans le cadre du troisième moyen, l’argumentation développée à cet égard fera l’objet d’un traitement conjoint avec ce moyen.

2.      Sur la deuxième branche du premier moyen

a)      Argumentation des parties

57      Par la deuxième branche du premier moyen, la requérante reproche au Tribunal de lui avoir attribué à tort, au point 118 de l’arrêt attaqué, la charge de la preuve de l’absence d’authenticité du courriel interne de Samsung du 3 novembre 2003 (ci-après le « courriel du 3 novembre 2003 »). À défaut pour la Commission, à qui reviendrait la charge d’établir l’infraction, d’avoir établi l’authenticité de ce courriel conformément au principe de bonne administration et eu égard aux doutes sérieux soulevés par la requérante, cet élément de preuve et d’autres preuves fournies par Samsung auraient dû être déclarés irrecevables.

58      Le Tribunal aurait également commis des erreurs manifestes et une violation des droits de la défense en considérant, au point 74 de l’arrêt attaqué, que le rapport d’expertise informatique soumis par la requérante n’avait pas conclu à l’absence d’authenticité dudit courriel.

59      En outre, en affirmant, au point 118 de l’arrêt attaqué, que la requérante n’avait pas avancé d’argument démontrant la nécessité d’un rapport d’expertise indépendant, le Tribunal aurait violé les droits de la défense et le droit à un procès équitable. La requérante, se fondant sur une décision de l’Autorité de la concurrence française, estime que, compte tenu des observations qu’elle a présentées et des observations de Samsung, la Commission était tenue de désigner un expert professionnel indépendant aux fins d’évaluer l’authenticité du courriel en cause. Il en irait d’autant plus ainsi dans les procédures en matière d’entente en raison de leur nature pénale. Les appréciations scientifiques de la Commission ne seraient pas de nature à écarter tout doute quant à l’authenticité des preuves invoquées.

60      Le Tribunal, en se fondant sur de telles preuves, aurait apprécié de manière erronée la durée et l’ampleur de l’infraction en cause. En l’absence des preuves fournies par Samsung, qui auraient dû être déclarées irrecevables, la Commission n’aurait pu établir ni la commission d’une infraction par la requérante pendant l’année 2003 ni la participation de cette dernière à une infraction unique et continue. En particulier, la requérante conteste les points 143 et 144 de l’arrêt attaqué ainsi que la référence, au point 150 de cet arrêt, à des preuves contemporaines et à des preuves fournies par Renesas, dès lors que celles-ci n’ont pas été examinées par le Tribunal.

61      La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble de ces arguments.

b)      Appréciation de la Cour

62      À titre liminaire, il convient de relever qu’il ressort des constatations de fait du Tribunal que le courriel du 3 novembre 2003, produit par Samsung à la suite de la suspension des discussions sur la transaction, a été utilisé, par la Commission, pour établir l’existence d’un contact anticoncurrentiel entre la requérante et Samsung le même jour. La requérante a contesté l’authenticité de ce courriel devant la Commission et a produit un rapport d’expert dans ses observations sur le second exposé des faits, à l’occasion duquel ledit courriel lui a été communiqué. Sans recourir à une expertise scientifique indépendante, la Commission a écarté les doutes de la requérante sur la base de ses propres appréciations scientifiques quant à l’authenticité du même courriel.

63      Par la présente branche du premier moyen, la requérante conteste le rejet, par le Tribunal, de l’argument tiré de l’omission de la Commission de recourir à une expertise indépendante afin de s’assurer de l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003. À cet égard, le Tribunal a jugé, au point 118 de l’arrêt attaqué, que la Commission disposait d’une certaine marge d’appréciation pour décider des mesures supplémentaires à prendre et que, en l’espèce, la requérante n’avait pas établi qu’une telle expertise s’imposait.

64      La requérante estime que, ce faisant, le Tribunal lui a imposé la charge de la preuve du défaut d’authenticité du courriel du 3 novembre 2003, entachant de ce fait l’arrêt attaqué d’une erreur de droit.

65      À cet égard, il convient de rappeler que le principe qui prévaut en droit de l’Union est celui de la libre appréciation des preuves dont il découle, d’une part, que, dès lors qu’un élément de preuve a été obtenu régulièrement, sa recevabilité ne peut être contestée devant le Tribunal et, d’autre part, que le seul critère pertinent pour apprécier la force probante des preuves régulièrement produites réside dans leur crédibilité (arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission, C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, point 128 ainsi que jurisprudence citée).

66      Lorsque la Commission se fonde sur des éléments de preuve qui sont, en principe, suffisants pour démontrer l’existence de l’infraction, il ne suffit pas à l’entreprise concernée d’évoquer la possibilité qu’une circonstance qui pourrait affecter la valeur probante de ces éléments de preuve s’est produite pour que la Commission supporte la charge de prouver que cette circonstance n’a pas pu affecter la valeur probante de ceux-ci. Au contraire, sauf dans les cas où une telle preuve ne pourrait pas être rapportée par l’entreprise concernée en raison du comportement de la Commission elle-même, il appartient à l’entreprise concernée d’établir à suffisance de droit, d’une part, l’existence de la circonstance qu’elle invoque et, d’autre part, que cette circonstance remet en cause la valeur probante des éléments de preuve sur lesquels se fonde la Commission (arrêt du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission, C‑89/11 P, EU:C:2012:738, point 76).

67      Ces considérations sont transposables à la situation dans laquelle la requérante conteste, comme en l’espèce, non pas la crédibilité d’un élément de preuve, mais son authenticité.

68      En l’espèce, il ressort tant des considérants 164 à 174 de la décision litigieuse que des points 65, 74, 82 et 182 de l’arrêt attaqué que, dans cette décision, la Commission a répondu de manière détaillée aux doutes soulevés par la requérante à l’égard de l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003 et qu’elle les a, en substance, écartés. Dans ces conditions, il appartenait à la requérante de démontrer, devant le Tribunal, que la Commission avait entaché sa réponse d’erreurs en raison d’une instruction insuffisante. Or, à ce dernier titre, il ressort en substance des points 65 et 82 à 84 de l’arrêt attaqué que la requérante n’est pas parvenue à démontrer la commission de telles erreurs.

69      Il s’ensuit que c’est sans opérer un renversement de la charge de la preuve non justifié que le Tribunal a pu rejeter les différents arguments de la requérante relatifs à l’absence d’authenticité du courriel du 3 novembre 2003, au motif que celle-ci n’établissait pas que les explications fournies par la Commission étaient erronées. C’est également sans opérer un tel renversement qu’il a pu, au point 118 de l’arrêt attaqué, écarter les arguments de la requérante selon lesquels la Commission aurait dû demander une expertise scientifique indépendante afin d’établir l’authenticité de ce courriel.

70      Dans la mesure où la requérante allègue, dans ce contexte, une violation des droits de la défense, il suffit d’observer qu’elle a pu, tant au cours de la procédure administrative qu’au cours de la procédure devant le Tribunal, faire valoir ses arguments relatifs à l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003.

71      Au vu de ce qui précède, les arguments de la requérante relatifs aux points 143, 144 et 150 de l’arrêt attaqué, en ce qu’ils sont fondés sur la prémisse, erronée, que le Tribunal lui a attribué la charge de la preuve de l’absence d’authenticité du courriel du 3 novembre 2003, doivent être regardés comme étant inopérants.

72      Partant, la deuxième branche du premier moyen doit être rejetée.

3.      Sur la troisième branche du premier moyen

a)      Argumentation des parties

73      Par la troisième branche du premier moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir violé les droits de la défense et commis une erreur de droit manifeste, en ce qu’il a jugé, au point 85 de l’arrêt attaqué, que le défaut de communication en temps utile à la requérante des appréciations scientifiques de la Commission relatives à l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003, qui constituaient des éléments à charge, n’avait pas eu d’incidence sur le résultat auquel la Commission était parvenue dans la décision litigieuse.

74      La requérante estime que l’omission de la Commission de lui communiquer ces appréciations l’a privée de la possibilité d’étayer davantage les doutes sérieux qu’elle avait émis à propos de l’authenticité de ce courriel, de démontrer l’absence d’authenticité de celui-ci ou la nécessité d’une expertise indépendante à cette fin et de répondre aux appréciations de la Commission. La violation des droits de la défense de la requérante, qui serait aggravée par le fait de lui faire supporter, à tort, la charge de la preuve de l’absence d’authenticité dudit courriel, ne saurait être compensée par la production des appréciations scientifiques au cours de la procédure devant le Tribunal.

75      La Commission conteste l’ensemble de ces arguments.

b)      Appréciation de la Cour

76      Par la présente branche, la requérante allègue que le Tribunal a rejeté à tort son argumentation tirée de ce que la Commission, en omettant de lui communiquer, lors de la procédure administrative, ses propres appréciations scientifiques relatives à l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003, avait méconnu les droits de la défense de la requérante.

77      À cet égard, le Tribunal a relevé, aux points 77 et 80 de l’arrêt attaqué, que la Commission aurait dû communiquer ses appréciations scientifiques à la requérante en tant qu’éléments à charge. Il a néanmoins considéré, aux points 81 à 85 de cet arrêt, que la requérante n’avait pas établi que le résultat auquel la Commission était parvenue dans la décision litigieuse aurait été différent si une telle communication avait eu lieu, de sorte qu’il a rejeté l’argumentation de la requérante tirée d’une violation des droits de la défense.

78      Ce faisant, le Tribunal s’est conformé à la jurisprudence de la Cour selon laquelle, pour qu’une violation des droits de la défense entraîne l’annulation de l’acte attaqué, il faut que, en l’absence de cette irrégularité, la procédure ait pu aboutir à un résultat différent, ce qu’il appartient à l’entreprise concernée de démontrer (arrêt du 16 juin 2016, SKW Stahl-Metallurgie et SKW Stahl-Metallurgie Holding/Commission, C‑154/14 P, EU:C:2016:445, point 69 ainsi que jurisprudence citée).

79      Or, la requérante n’a présenté aucun élément de nature à démontrer que le Tribunal a commis une erreur de droit ou a dénaturé les éléments de fait ou de preuve en ce qu’il a estimé, sur la base des arguments et des éléments produits devant lui, qu’elle n’avait pas établi que le résultat auquel la Commission était parvenue dans la décision litigieuse aurait pu être différent si cette institution lui avait communiqué ses appréciations scientifiques au cours de la procédure administrative.

80      Partant, la troisième branche du premier moyen doit être rejetée.

4.      Sur la quatrième branche du premier moyen

a)      Argumentation des parties

81      La quatrième branche du premier moyen, prise de violations de la présomption d’innocence, des droits de la défense et de l’obligation de motivation, est divisée en deux griefs principaux.

82      Par son premier grief, la requérante conteste les appréciations du Tribunal, figurant en particulier aux points 93 et 126 de l’arrêt attaqué, relatives à la crédibilité de Samsung en tant que témoin.

83      En premier lieu, la requérante estime que l’argument selon lequel Samsung est un témoin crédible au motif qu’elle a demandé la clémence n’est valable que pour des éléments de preuve fournis par un témoin auquel la Commission a déjà accordé la clémence à titre provisoire. Or, tel n’aurait pas été le cas de Samsung au moment de la production des preuves contestées. Étant exposée au risque de se voir infliger une amende complète après l’échec de la transaction, Samsung n’aurait rien eu à perdre en effectuant de fausses déclarations et ce d’autant plus qu’elle n’encourait, en vertu du droit coréen, aucun risque de sanctions pénales pour fausse déclaration.

84      Partant, le Tribunal aurait dû se fonder sur d’autres preuves aux fins d’étayer l’existence des contacts bilatéraux contestés entre Samsung et la requérante. Or, de telles preuves n’existeraient pas. À cet égard, la requérante critique les points 145 à 151 de l’arrêt attaqué qui ne sauraient, selon elle, être considérés comme de simples motifs surabondants. Les points 148 et 149 de cet arrêt, qui annoncent que les preuves fournies par Samsung ont été corroborées par d’autres membres de l’infraction, contrediraient le point 155 dudit arrêt. Le courriel de Philips, mentionné au point 147 de l’arrêt attaqué, reposerait uniquement sur une « déclaration par ouï-dire » et la requérante n’aurait eu aucun contact bilatéral avec Philips. Les passages visés de la décision litigieuse ne préciseraient pas que NXP Semiconductors NV a produit des éléments corroborant les preuves rapportées par Samsung. La circonstance, mentionnée au considérant 157 de la décision litigieuse, que Renesas aurait rapporté des éléments au soutien de ces preuves serait illogique et contredite par le contrôle partiel du Tribunal qui n’aurait ni examiné ni établi l’existence d’une réunion entre Renesas et la requérante au cours de l’année 2003, année des contacts litigieux avec Samsung. Renesas ne pourrait donc étayer les faits contestés établis sur la base des preuves irrecevables émanant de Samsung.

85      Le témoin de la requérante s’exposant, à la différence de celui de Samsung, à un risque de sanctions pénales en cas de fausse déclaration sur l’honneur, le Tribunal aurait dû privilégier les déclarations du premier. Il aurait dû accorder à la requérante le bénéfice du doute, conformément au principe in dubio pro reo.

86      En second lieu, ce principe aurait également été méconnu au motif que, aux points 123 et 124 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait appliqué à Samsung la règle du privilège entre l’avocat et son client, au détriment de la requérante. En effet, s’agissant de la déclaration en cause, l’employé de Samsung ayant fourni cette déclaration n’aurait fait part que de vagues souvenirs au conseil de Samsung, dix ans après l’infraction alléguée.

87      Par le second grief, la requérante soutient que le Tribunal a considéré à tort que ses puces non-SIM faisaient partie de l’infraction en cause, a insuffisamment motivé son arrêt et a violé le principe in dubio pro reo.

88      Premièrement, le Tribunal aurait utilisé, au point 255 de l’arrêt attaqué, une traduction incorrecte du rapport interne de Samsung et aurait, ainsi, dénaturé les preuves. Sur la base de la traduction correcte, le Tribunal n’aurait pas pu considérer que les preuves en cause étayaient la conclusion selon laquelle les puces non-SIM faisaient l’objet de la discussion entre Samsung et la requérante le 24 septembre 2003.

89      Deuxièmement, les considérations émises au point 256 de l’arrêt attaqué ne seraient pas de nature à établir que les revenus liés aux puces non-SIM devaient être inclus dans le calcul du montant de l’amende pour la totalité de la période de l’infraction et seraient en contradiction avec l’approche énoncée au point 160 de cet arrêt. En effet, les puces non-SIM ne seraient mentionnées, dans le rapport interne de Samsung utilisé pour établir le contact du 24 septembre 2003, que pour l’année 2004 dans une déclaration extrêmement générale qui ne saurait être considérée comme ayant pour objet, ni pour effet, de restreindre la concurrence. Elle ne serait pas susceptible de réduire l’incertitude de Samsung, étant donné que, dans le secteur des puces pour cartes, qui auraient une courte durée de vie en raison des progrès technologiques constants, les prix baissent sans cesse. En l’absence de tout autre contact relatif aux puces non-SIM, les revenus afférents à ces produits n’auraient pu être pris en compte, pour le calcul du montant de l’amende, que, tout au plus, au titre de l’année 2004.

90      Troisièmement, la requérante conteste la corrélation entre les puces SIM et les puces non-SIM, constatée au point 257 de l’arrêt attaqué, en ce qu’elle serait entachée d’une appréciation manifestement erronée et, de ce fait, d’une dénaturation des preuves utilisées par la Commission au considérant 221 de la décision litigieuse. Il ressortirait, en effet, des considérants 6 et 221 de cette décision que le marché des puces pour cartes pouvait être scindé en deux segments. Si la segmentation n’était pas absolue, la Commission n’aurait pas pour autant constaté de corrélation.

91      Quatrièmement, même à supposer qu’une telle corrélation existe, le Tribunal aurait omis d’exposer la manière dont les échanges allégués à propos des puces SIM pouvaient affecter la concurrence à propos des puces non-SIM. En particulier, le point 258 de l’arrêt attaqué serait insuffisamment motivé à ce titre. Par ailleurs, la déclaration de Renesas, visée au considérant 217 de la décision litigieuse, selon laquelle l’infraction concernait les deux types de puces et les informations relatives aux applications non-SIM étaient pertinentes pour les fournisseurs d’applications SIM, n’aurait pas été étayée et aurait été contestée par la requérante et par Philips. Or, compte tenu de cette contestation, ladite déclaration aurait dû être corroborée par d’autres éléments pour pouvoir être prise en compte.

92      La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble de ces arguments.

b)      Appréciation de la Cour

1)      Sur le premier grief

93      Par le premier grief, la requérante conteste certaines appréciations portées par le Tribunal au sujet de la crédibilité de Samsung en tant que témoin et de la valeur probante attribuée à des éléments de preuve produits par cette dernière.

94      À cet égard, premièrement, il convient de constater, tout d’abord, que c’est à bon droit que le Tribunal a relevé, au point 93 de l’arrêt attaqué, que le fait que l’employé de Samsung, auteur de la déclaration dont la requérante contestait la valeur probante, ne risquait pas d’encourir des sanctions pénales en Corée en cas de fausse déclaration sur l’honneur ne retirait pas sa valeur probante à cette déclaration, dès lors que Samsung, en tant que demandeur au titre de la communication sur la coopération, s’exposait à perdre le bénéfice de cette coopération en cas de fausse déclaration.

95      En effet, toute tentative de la part d’un demandeur au titre de cette communication d’induire la Commission en erreur pourrait remettre en cause la sincérité ainsi que la complétude de sa coopération et, partant, le priver de la possibilité de tirer pleinement bénéfice de ladite communication (voir, par analogie, arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission, C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, point 138).

96      Ensuite, la requérante, par son allégation selon laquelle les preuves rapportées par Samsung auraient dû être corroborées par d’autres membres de l’infraction en cause, ce qui n’aurait pas été le cas, conteste en réalité non pas les points 148 et 149 de l’arrêt attaqué, mais les appréciations de la Commission figurant aux considérants 156 à 161 de la décision litigieuse, selon lesquelles les déclarations de Samsung avaient été corroborées par d’autres membres de l’infraction en cause. Or, auxdits points, le Tribunal a relevé, sans que la requérante le conteste devant la Cour, que ces appréciations n’étaient pas remises en cause devant lui.

97      Partant, cette allégation est irrecevable conformément à une jurisprudence constante selon laquelle, dans le cadre d’un pourvoi, le contrôle de la Cour est limité à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens et aux arguments débattus devant les premiers juges. Dès lors, une partie ne saurait soulever pour la première fois devant la Cour des moyens ou des arguments qu’elle n’a pas invoqués devant le Tribunal (voir, en ce sens, arrêts du 8 novembre 2016, BSH/EUIPO, C‑43/15 P, EU:C:2016:837, point 43, et du 13 décembre 2017, Telefónica/Commission, C‑487/16 P, non publié, EU:C:2017:961, point 84).

98      En outre, il convient d’écarter l’argument tiré d’une prétendue contradiction des motifs entre les points 148 et 149 de l’arrêt attaqué et le point 155 de cet arrêt. En effet, à ce dernier point, sans contredire le fait que, dans leur ensemble, les déclarations de Samsung étaient étayées par d’autres membres de l’infraction, le Tribunal s’est contenté de répondre à un argument de la requérante en observant que, aux considérants 152, 157 et 158 de la décision litigieuse, contestés par la requérante, la Commission n’avait pas constaté que les contacts des 3 novembre et 17 novembre 2003 avaient été corroborés par des preuves provenant desdits autres membres.

99      Enfin, l’argument tiré d’une prétendue dénaturation des preuves en raison de la mention, au point 147 de l’arrêt attaqué, de NXP Semiconductors est fondé sur une lecture erronée de la décision litigieuse. En effet, contrairement à ce que la requérante prétend, NXP Semiconductors est mentionnée aux considérants 158, 159 et 161 de cette décision.

100    Deuxièmement, s’agissant des points 123 et 124 de l’arrêt attaqué, il y a lieu de relever, d’une part, que, dans la mesure où la requérante tire argument du caractère vague de la déclaration mentionnée au point 123 de cet arrêt, elle cherche en réalité à obtenir une nouvelle appréciation de la valeur probante de cette déclaration, laquelle, selon une jurisprudence constante de la Cour, échappe à la compétence de la Cour, sous réserve du cas de la dénaturation de cet élément de preuve (arrêt du 12 janvier 2017, Timab Industries et CFPR/Commission, C‑411/15 P, EU:C:2017:11, point 153 ainsi que jurisprudence citée). D’autre part, s’agissant de l’argument relatif au point 124 de l’arrêt attaqué, il suffit de constater que ce point énonce un motif surabondant, comme en témoigne l’expression « en toute hypothèse » qui l’introduit. Partant, cet argument est inopérant.

101    Par conséquent, le premier grief doit être rejeté.

2)      Sur le second grief

102    Par le second grief, dirigé contre les points 255 à 258 de l’arrêt attaqué, la requérante reproche, en substance, au Tribunal d’avoir dénaturé des éléments de preuve en ce qu’il a confirmé le constat de la participation de la requérante à une infraction portant sur les puces non-SIM et a confirmé la prise en compte des revenus de celle-ci relatifs à ces produits dans le calcul du montant de l’amende.

103    Il y a dénaturation lorsque, sans avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments existants apparaît manifestement erronée. Il appartient aux requérantes d’indiquer avec précision les preuves qui ont été dénaturées et d’exposer les erreurs d’appréciation qui auraient été commises (voir, en ce sens, arrêts du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, points 16 et 17, ainsi que du 27 avril 2017, FSL e.a./Commission, C‑469/15 P, EU:C:2017:308, points 47 et 48).

104    Aux points 255 à 258 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a écarté le cinquième moyen soulevé devant lui, tiré d’une erreur de calcul du montant de l’amende en ce que la Commission avait tenu compte des puces non-SIM.

105    Premièrement, au point 255 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que la requérante et Samsung avaient évoqué les prix et le marché des puces non-SIM lors du contact du 24 septembre 2003. Au point 256 de cet arrêt, il a considéré que ce fait, qui ressortait du rapport interne d’un employé de Samsung, était suffisant pour constater que les discussions anticoncurrentielles n’avaient pas concerné uniquement les puces SIM, même s’il n’existait pas de preuves écrites de l’existence d’autres échanges entre la requérante et ses concurrents au sujet des puces non-SIM.

106    À cet égard, il convient de relever que, à supposer que le Tribunal se soit fondé sur une traduction incorrecte de ce rapport interne, il n’en demeure pas moins qu’il ressort des deux traductions produites par la requérante devant la Cour que des prix dans des secteurs qui, tels que la banque ou l’identité, utilisent des puces non-SIM ont bien été abordés au cours du contact du 24 septembre 2003. C’est, partant, sans dénaturer les éléments de preuve que le Tribunal a constaté l’existence d’un échange sur les prix des puces non-SIM à l’occasion de ce contact.

107    Deuxièmement, au point 257 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ajouté que la requérante n’avait avancé aucun argument dans ses écritures visant à s’opposer à l’appréciation, figurant au considérant 221 de la décision litigieuse, selon laquelle il existait une corrélation entre les puces SIM et les puces non-SIM. Dès lors que le Tribunal a considéré que les pratiques anticoncurrentielles touchant aux prix des puces SIM avaient nécessairement eu un effet sur le prix des puces non-SIM, il a estimé, au point 258 de cet arrêt, que la circonstance que les puces SIM et les puces non-SIM n’appartenaient pas à un même marché de produits avait été sans influence sur le fait que la Commission avait pu prendre les puces non-SIM en considération aux fins du calcul du montant de l’amende.

108    Or, devant la Cour, la requérante n’a pas remis en cause la lecture, effectuée par le Tribunal, de ses écritures en première instance selon laquelle elle n’avait pas contesté le constat par la Commission d’une corrélation entre les puces SIM et les puces non-SIM. Interrogée à ce titre lors de l’audience devant la Cour, elle n’a par ailleurs identifié aucun élément dans lesdites écritures indiquant qu’elle aurait contesté cette corrélation devant le Tribunal. Partant, la requérante ne saurait être recevable à contester, devant la Cour, l’appréciation portée sur ladite corrélation.

109    Dans ces conditions, et faute pour la requérante d’avoir utilement contesté, devant le Tribunal, toutes les considérations émises dans la décision litigieuse afin de justifier l’inclusion des puces non-SIM dans l’infraction commise par elle, la requérante ne saurait alléguer que le Tribunal a méconnu l’étendue de sa compétence de pleine juridiction en confirmant la prise en compte, par la Commission, de ses revenus relatifs auxdites puces pour la totalité de la durée de sa participation à l’infraction en cause.

110    Par conséquent, le second grief et, partant, la quatrième branche du premier moyen doivent être rejetés.

5.      Sur la cinquième branche du premier moyen

a)      Argumentation des parties

111    Par la cinquième branche du premier moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir commis des dénaturations des éléments de preuve.

112    En premier lieu, le Tribunal aurait dénaturé les éléments de preuve en déclarant, au point 160 de l’arrêt attaqué, que les prix étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle. Il ressortirait, en effet, des considérants 38 à 41 ainsi que 65 et 297 de la décision litigieuse que les prix ont été négociés sur une base annuelle ou trimestrielle, voire sur une base plus fréquente. Or, si le Tribunal avait tenu compte d’une négociation trimestrielle des prix, des preuves supplémentaires lui auraient été nécessaires afin de considérer que la requérante avait participé à l’infraction en cause.

113    En second lieu, le Tribunal aurait dénaturé les éléments de preuve en identifiant le courriel visé aux points 191 à 196 de l’arrêt attaqué comme étant un courriel émanant de Samsung. En effet, il ressortirait des éléments de preuve en cause ainsi que du considérant 116 de la décision litigieuse qu’il s’agit d’un courriel interne de la requérante. Cette dénaturation aurait entraîné une violation de l’obligation de réaliser un contrôle complet des arguments de la requérante.

114    La Commission conteste le bien-fondé de ces arguments.

b)      Appréciation de la Cour

115    En premier lieu, la requérante allègue que le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve en déclarant, au point 160 de l’arrêt attaqué, que les prix étaient déterminés, en principe, sur une base annuelle.

116    Or, comme cela ressort explicitement du point 160 de l’arrêt attaqué, sans que la requérante, interrogée sur ce point lors de l’audience devant la Cour, l’infirme, la requérante n’a pas contesté, devant le Tribunal, le fait que les prix étaient négociés, en principe, sur une base annuelle. Partant, l’argument relatif à ce point 160 est irrecevable conformément à la jurisprudence citée au point 97 du présent arrêt.

117    En second lieu, la requérante reproche au Tribunal d’avoir dénaturé des éléments de fait lors de l’appréciation, aux points 191 à 196 de l’arrêt attaqué, du contact avec Samsung entre le 1er juin et le 8 juin 2004.

118    Il convient d’examiner cette argumentation à la lumière de la jurisprudence rappelée aux points 100 et 103 du présent arrêt.

119    En l’espèce, la Commission convient, avec la requérante, du fait que, aux points 191 et 193 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré de manière erronée le courriel visé à ces points comme étant un courriel émanant de Samsung et découvert dans les locaux de celle-ci, alors qu’il émanait de la requérante et a été découvert dans les locaux de cette dernière.

120    Toutefois, devant la Cour, la requérante ne conteste ni l’existence même et le contenu matériel du courriel en cause ni les conclusions que le Tribunal a tirées sur le fondement de ce courriel. En particulier, elle n’avance aucun argument de nature à démontrer que le Tribunal aurait dénaturé les éléments de preuve en considérant, sur la base dudit courriel, qu’elle avait participé à un contact avec Samsung et avait échangé, à cette occasion, certaines informations que le Tribunal, seul compétent pour apprécier les faits, a qualifiées d’anticoncurrentielles.

121    Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que l’identification erronée du courriel en cause relève d’une erreur de plume qui est restée sans incidence sur l’appréciation, au fond, des arguments de la requérante relatifs au contact ayant eu lieu entre le 1er juin et le 8 juin 2004 à la lumière du contenu dudit courriel.

122    Pour autant que la requérante ajoute que, en raison de l’identification erronée du courriel en cause, le Tribunal a méconnu son obligation de réaliser un contrôle complet de ses arguments, il convient d’observer que son argumentation ne permet pas d’identifier les erreurs de droit qu’elle reproche au Tribunal, de sorte que celle-ci doit être rejetée comme étant irrecevable à cet égard.

123    Au vu de ce qui précède, la cinquième branche du premier moyen doit être rejetée.

6.      Conclusion sur le premier moyen

124    Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le premier moyen doit être rejeté, sous réserve de l’examen, aux points 191 et suivants du présent arrêt, de la première branche du premier moyen en ce qu’elle est tirée de la violation de la compétence de pleine juridiction.

B.      Sur le deuxième moyen, tiré d’une application erronée de l’article 101 TFUE

125    Le deuxième moyen soulevé par la requérante comporte trois branches.

1.      Sur la première branche du deuxième moyen

a)      Argumentation des parties

126    Par la première branche du deuxième moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir commis des erreurs de qualifications juridiques des faits pertinents au regard de l’article 101 TFUE. Elle conteste l’appréciation, faite par le Tribunal, des contacts des 24 septembre et 3 novembre 2003 avec Samsung.

127    En premier lieu, s’agissant du contact du 24 septembre 2003, premièrement, la requérante est d’avis que les considérations figurant au point 168 de l’arrêt attaqué ne permettent pas de constater l’existence d’une restriction de la concurrence à partir de l’année 2003. En effet, tout d’abord, renvoyant aux considérants 90 et 297 de la décision litigieuse, elle relève que seules deux références relatives aux prix de l’année 2003 peuvent être déduites du faisceau d’indices utilisé. Il s’agirait, d’une part, d’une simple observation sur le niveau actuel des prix sur le marché qui aurait été de notoriété publique et, d’autre part, un ajustement des prix pour le quatrième trimestre de l’année 2003 s’agissant du client Schlumberger Smart Cards and Terminals. Ensuite, la requérante estime que les échanges sur les prix et les capacités futurs mentionnés audit point 168 de l’arrêt attaqué ne sauraient étayer la conclusion que l’infraction alléguée a pu affecter la concurrence dès l’année 2003. Enfin, l’arrêt attaqué ne contiendrait aucune analyse des effets de l’échange relatif aux prix de 2003 sur la concurrence et le Tribunal n’aurait pas qualifié cet échange de restriction de la concurrence par objet.

128    Deuxièmement, la requérante considère que la seule déclaration – d’ailleurs générale et dépourvue de toute indication quant à une fixation future des prix ou au comportement sur le marché – relative aux puces non-SIM à l’occasion du contact du 24 septembre 2003 n’est pas suffisante pour établir l’existence d’un échange illégal d’informations sensibles à propos de ces produits. Ni la Commission ni le Tribunal n’auraient établi que le partage de cette information puisse restreindre la concurrence. Partant, le Tribunal, en ayant estimé le contraire au point 256 de l’arrêt attaqué, aurait commis une erreur, voire aurait dénaturé les preuves. En conséquence, il aurait tenu compte, à tort, des revenus se rapportant à ces produits aux fins du calcul du montant de l’amende infligée à la requérante.

129    En second lieu, s’agissant du contact du 3 novembre 2003, la requérante soutient, d’une part, que le Tribunal a violé son obligation de motivation, dès lors qu’il n’a fourni aucun motif de nature à permettre de qualifier ce contact comme constituant un échange illégal d’informations et qu’il a omis de répondre aux arguments figurant, à ce sujet, aux points 83 à 86 de la requête introductive d’instance.

130    D’autre part, l’appréciation, figurant aux points 181 à 183 de l’arrêt attaqué, quant à la valeur probante des preuves utilisées pour établir l’existence du contact du 3 novembre 2003 serait entachée de violations de l’obligation de motivation et de la présomption d’innocence ainsi que d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une dénaturation des preuves. En effet, ni la Commission ni le Tribunal n’auraient fourni une explication suffisante quant à l’existence des versions différentes du courriel du 3 novembre 2003 ou de l’authenticité de ce dernier. S’agissant du faisceau d’indices annoncé au point 183 de cet arrêt, qui ne comprendrait que deux sources, la requérante précise que le courriel interne de Renesas du 7 octobre 2003 est fondé sur des informations par ouï-dire et que, étant antérieur à la date du contact du 3 novembre 2003, il ne saurait à l’évidence attester de l’existence de ce dernier. Le Tribunal aurait omis d’exposer les motifs pour lesquels la Commission pouvait déduire du courriel du 7 novembre 2003 de Samsung, qui ne mentionnait que la proposition d’une future réunion le 17 novembre 2003, que le contact du 3 novembre 2003 avait eu lieu. Pour ces motifs, le Tribunal aurait méconnu les règles relatives à la charge de la preuve, aurait dénaturé les éléments de preuve et aurait tiré des appréciations manifestement erronées.

131    La Commission estime que ces arguments sont à la fois irrecevables, en ce que la requérante cherche à remettre en cause les appréciations factuelles du Tribunal, et non fondés.

b)      Appréciation de la Cour

132    À titre liminaire, compte tenu des arguments de la Commission, il y a lieu de constater que, par l’essentiel des arguments soulevés à l’appui de la présente branche, la requérante ne cherche pas à remettre en cause les appréciations factuelles du Tribunal, mais fait valoir des erreurs de droit que celui-ci aurait commises dans l’appréciation des contacts avec Samsung en date du 24 septembre et du 3 novembre 2003.

133    En premier lieu, s’agissant du contact du 24 septembre 2003, la requérante conteste les points 168 et 256 de l’arrêt attaqué, en ce que le Tribunal a jugé que l’infraction qu’elle a commise a débuté au cours de l’année 2003 et portait sur les puces non-SIM.

134    Premièrement, il est constant que, comme le Tribunal l’a relevé en particulier aux points 166, 168 et 173 à 175 de l’arrêt attaqué, lors du contact du 24 septembre 2003, la requérante et Samsung ont échangé des informations sensibles portant, notamment, sur leurs prix futurs.

135    Or, c’est en raison de l’objet même de cet échange entre concurrents que le Tribunal a pu, à bon droit, le qualifier d’infraction par objet, sans par ailleurs que, comme cela ressort des points 157 à 160 du présent arrêt, les arguments soulevés par la requérante dans le cadre de la deuxième branche du présent moyen soient de nature à établir que cette qualification est entachée d’une erreur de droit.

136    Dans ces conditions, même à supposer que les concurrents n’aient pas discuté des prix pour l’année 2003, c’est sans commettre d’erreur de droit quant au début de la période d’infraction que le Tribunal a considéré que la requérante avait participé à une telle infraction à compter du 24 septembre 2003.

137    Partant, d’une part, les arguments de la requérante tendant à démontrer que, lors de la réunion du 24 septembre 2003, les prix de 2003 n’avaient pas été abordés, outre le fait qu’ils visent en réalité à obtenir un nouvel examen des faits échappant à la compétence de la Cour sur pourvoi, sont dépourvus de pertinence.

138    D’autre part, le Tribunal n’était nullement tenu d’examiner et d’établir l’existence d’effets anticoncurrentiels pour l’année 2003. En effet, selon la jurisprudence de la Cour, il n’est pas nécessaire d’examiner les effets d’une pratique concertée dès lors que l’objet anticoncurrentiel de cette dernière est établi (arrêt du 4 juin 2009, T‑Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, point 30).

139    Deuxièmement, s’agissant de l’argument relatif à l’infraction portant sur les puces non-SIM et dirigé contre le point 256 de l’arrêt attaqué, il importe de préciser qu’il ressort d’une lecture des écritures de la requérante en première instance que, dans le cadre de son cinquième moyen soulevé devant le Tribunal, elle a nié toute discussion portant sur les puces non-SIM, sans nullement faire valoir, le cas échéant à titre subsidiaire, que la discussion portant sur ces produits à l’occasion du contact du 24 septembre 2003 ne saurait être qualifiée d’anticoncurrentielle par objet. Partant, le Tribunal n’était pas tenu d’approfondir davantage cette question. Pour le surplus, il y a lieu de renvoyer aux points 104 à 109 du présent arrêt.

140    En second lieu, s’agissant du contact du 3 novembre 2003, la requérante conteste les appréciations émises par le Tribunal aux points 181 à 183 et 185 de l’arrêt attaqué au sujet, respectivement, de l’existence de ce contact et de sa nature illicite.

141    Premièrement, aux points 181 à 183 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré, d’une part, que la requérante n’avait pas rapporté la preuve que les raisons objectives, avancées par la Commission pour justifier qu’il existerait plusieurs versions du courriel du 3 novembre 2003, seraient erronées et, d’autre part, qu’il existait un faisceau d’indices résultant d’autres preuves tendant à démontrer la tenue d’un contact anticoncurrentiel du même jour.

142    À cet égard, d’une part, il a déjà été relevé, aux points 68 et 69 du présent arrêt, qu’il appartenait à la requérante de contester, devant le Tribunal, les considérations émises par la Commission dans la décision litigieuse au sujet de l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003 et que le Tribunal a exposé les motifs pour lesquels la requérante n’était pas parvenue à démontrer que ces considérations étaient erronées.

143    Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur de droit et sans méconnaître son obligation de motivation que le Tribunal a écarté les arguments de la requérante relatifs à l’authenticité du courriel du 3 novembre 2003.

144    D’autre part, s’agissant de l’argument par lequel la requérante critique le faisceau d’indices mentionné aux points 181 et 183 de l’arrêt attaqué, il suffit de rappeler que l’appréciation des éléments de preuve échappe, sous réserve du cas de leur dénaturation, à la compétence de la Cour au stade du pourvoi. Or, si la requérante allègue que les éléments de ce faisceau d’indices ne sont pas de nature à venir étayer l’existence d’un contact illicite le 3 novembre 2003, elle n’établit nullement l’existence d’une dénaturation par le Tribunal de ces éléments.

145    Deuxièmement, au point 185 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré, pour autant que la requérante estimait que le contact du 3 novembre 2003 ne constituait pas une restriction de la concurrence par objet, que la Commission n’était pas tenue d’établir que chaque discussion illicite constituait une telle restriction, dès lors qu’elle avait établi que les pratiques en cause, prises dans leur ensemble, constituaient une restriction de la concurrence par objet.

146    Ce faisant, comme l’allègue la requérante, le Tribunal a constaté le caractère illicite de la discussion en cause et a renoncé à examiner les arguments présentés par celle-ci relatifs à la nature anticoncurrentielle par objet du contact du 3 novembre 2003.

147    Toutefois, au vu des considérations émises aux points 43 à 55 du présent arrêt, une telle approche n’est pas contraire, dans les circonstances de la présente affaire, aux exigences du contrôle de légalité du constat de l’infraction. La requérante ne soutient d’ailleurs pas qu’elle serait susceptible d’affecter l’appréciation de l’adéquation du montant de l’amende à l’infraction.

148    Partant, la première branche du deuxième moyen doit être rejetée.

2.      Sur la deuxième branche du deuxième moyen

a)      Argumentation des parties

149    Par la deuxième branche du deuxième moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir interprété de manière erronée la notion de restriction de la concurrence par objet aux points 172 à 176, 185 et 189 de l’arrêt attaqué. Selon elle, le Tribunal n’a pas réalisé une analyse suffisante de la nature des pratiques en cause et s’est contenté, en particulier aux points 176 et 189 de cet arrêt, d’un raisonnement insuffisant et d’une approche contradictoire.

150    La requérante soutient que le Tribunal, méconnaissant à cet égard la jurisprudence de la Cour, a omis d’analyser et de démontrer que les échanges d’informations en cause présentaient un degré suffisant de nocivité pour la concurrence sur le marché des puces pour cartes. Elle considère qu’un échange sporadique portant sur les prix actuels du marché ou les futures tendances générales et potentielles des prix ainsi que sur l’évolution du marché ne présente pas, en soi, une telle nocivité dans un marché extrêmement concurrentiel comme ledit marché des puces pour cartes.

151    La requérante précise que l’appréciation, insuffisamment motivée, figurant au point 174 de l’arrêt attaqué et selon laquelle le comportement litigieux était « de nature » à « permettre aux concurrents de limiter » la concurrence introduit deux conditions incertaines et différentes du critère du degré de nocivité exigé par la Cour.

152    Enfin, compte tenu des caractéristiques différentes des cinq contacts examinés par le Tribunal, celui-ci aurait commis une erreur en constatant, comme il semblerait le faire au point 185 de l’arrêt attaqué, une restriction globale de la concurrence par objet.

153    La Commission conteste l’ensemble de ces arguments.

b)      Appréciation de la Cour

154    Par la deuxième branche du deuxième moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir méconnu la jurisprudence de la Cour relative à la notion de restriction de la concurrence par objet.

155    Selon la jurisprudence de la Cour, le critère juridique essentiel pour déterminer si un accord ou une pratique concertée comporte une restriction de la concurrence « par objet », au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, réside dans la constatation qu’un tel accord ou une telle pratique présente, en lui-même ou en elle-même, un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour considérer qu’il n’y a pas lieu d’en rechercher les effets (voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2017, FSL e.a./Commission, C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 104 ainsi que jurisprudence citée).

156    Afin d’apprécier si un type de coordination entre entreprises présente un degré suffisant de nocivité pour être considéré comme une restriction de la concurrence « par objet », il convient de s’attacher notamment à sa teneur, aux objectifs qu’il vise à atteindre ainsi qu’au contexte économique et juridique dans lequel il s’insère. Dans le cadre de l’appréciation dudit contexte, il y a lieu également de prendre en considération la nature des biens ou des services affectés ainsi que les conditions réelles du fonctionnement et de la structure du ou des marchés en question (voir, en ce sens, arrêts du 5 décembre 2013, Solvay Solexis/Commission, C‑449/11 P, non publié, EU:C:2013:802, point 36 ; du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 117 et jurisprudence citée, ainsi que du 27 avril 2017, FSL e.a./Commission, C‑469/15 P, EU:C:2017:308, point 105 et jurisprudence citée).

157    Premièrement, s’agissant du contact du 24 septembre 2003, il ressort des constatations de fait effectuées par le Tribunal aux points 164 et 165 de l’arrêt attaqué que la requérante et Samsung ont échangé des informations au sujet de leurs capacités et de leurs prix, actuels et futurs, ainsi que de leur stratégie d’évolution technologique. Le Tribunal a considéré, au point 166 de cet arrêt, qu’un tel échange sur les prix et les capacités est de nature, en particulier sur un marché où l’offre et la demande sont concentrées, à influer directement sur la stratégie commerciale des concurrents.

158    En réponse aux arguments de la requérante tendant à contester la qualification de restriction de la concurrence par objet retenue par la Commission à l’égard de ce contact, le Tribunal a encore rappelé, notamment, la jurisprudence citée au point 155 du présent arrêt et a considéré, aux points 173 et 174 de l’arrêt attaqué, que les facteurs économiques caractérisant le marché en cause, non contestés par la requérante, étaient de nature à établir que les entreprises en cause tireraient un avantage d’un échange d’informations sensibles concernant les politiques stratégiques de leurs concurrents en termes de prix, de capacité et d’évolution technologique, en ce qu’il était de nature à leur permettre de ralentir la diminution des prix inhérente au marché en cause.

159    Ce faisant, contrairement aux arguments de la requérante, le Tribunal s’est conformé à la jurisprudence énoncée aux points 155 et 156 du présent arrêt. En effet, le Tribunal a examiné la teneur de l’échange entre les concurrents, y compris la nature des informations échangées, a apprécié les objectifs poursuivis par ces derniers et a tenu compte du contexte du marché sur lequel ces mêmes discussions ont pris place.

160    Par ailleurs, contrairement à ce que la requérante laisse entendre, le fait de qualifier l’échange d’informations sensibles entre les concurrents sur le marché en cause de restriction de la concurrence par objet ne saurait dépendre de la fréquence des échanges d’informations. Un tel critère ne ressort, en effet, nullement de la jurisprudence citée aux points 155 et 156 du présent arrêt.

161    Deuxièmement, au point 176 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté l’argument de la requérante selon lequel la Commission n’avait pas démontré que les discussions, à l’occasion du contact du 24 septembre 2003, relatives à la capacité de production risquaient de restreindre la concurrence. Selon lui, dès lors que la Commission avait identifié les raisons pour lesquelles elle considérait que ledit échange était, au regard des caractéristiques du marché, de nature à restreindre la concurrence, elle n’était pas tenue de démontrer l’existence d’effets anticoncurrentiels.

162    Il s’ensuit que le Tribunal a, en substance, considéré que, par son argument, la requérante reprochait à la Commission de ne pas avoir démontré l’existence d’effets anticoncurrentiels. Or, d’une part, dans son pourvoi, la requérante n’allègue pas que le Tribunal s’est mépris sur la portée de son argument. D’autre part, l’appréciation portée par le Tribunal sur celui-ci est conforme à la jurisprudence de la Cour citée au point 138 du présent arrêt.

163    Troisièmement, il convient de relever que l’argument de la requérante relatif au point 185 de l’arrêt attaqué doit être écarté pour les motifs évoqués aux points 145 à 147 du présent arrêt.

164    Quatrièmement, le motif figurant au point 189 de l’arrêt attaqué, selon lequel « [l’]échange [d’]informations confidentielles [relatives à l’intention d’augmenter les prix pour toute une catégorie spécifique de produits] entre concurrents entraînait nécessairement une distorsion de concurrence », ne saurait, eu égard au contexte économique du marché des puces pour cartes, tel que décrit au point 173 de l’arrêt attaqué, être considéré comme étant entaché d’une erreur de droit.

165    Par conséquent, la deuxième branche du deuxième moyen doit être rejetée.

3.      Sur la troisième branche du deuxième moyen

a)      Argumentation des parties

166    Par la troisième branche du deuxième moyen, la requérante conteste les motifs figurant aux points 215 à 224, 226 et 227 de l’arrêt attaqué au sujet de sa participation à une infraction unique et continue.

167    D’une part, elle relève une contradiction de motifs entre les points 215, 226 et 227 de l’arrêt attaqué, en ce que le Tribunal lui aurait imputé la responsabilité pour l’ensemble de l’infraction en cause, tout en indiquant également qu’elle n’avait pas participé à l’infraction unique et continue dans son ensemble.

168    D’autre part, elle rappelle que, selon la jurisprudence de la Cour, la participation d’une entreprise à une infraction unique et continue requiert la réunion de trois conditions, à savoir, premièrement, l’existence d’un plan d’ensemble poursuivant un objectif commun, deuxièmement, la contribution intentionnelle de cette entreprise à ce plan et, troisièmement, la connaissance par celle-ci, prouvée ou présumée, des comportements infractionnels des autres participants. Or, en l’occurrence, ni le Tribunal ni la Commission n’auraient fourni de motivation permettant de conclure qu’elle avait contribué intentionnellement au même objectif unique que Renesas, Samsung et Philips. Comme cela ressortirait du considérant 312 de la décision litigieuse et du point 231 de l’arrêt attaqué, la Commission comme le Tribunal n’auraient pas davantage constaté que la requérante avait connaissance du comportement de Renesas, de Samsung et de Philips.

169    Ainsi, tant la Commission que le Tribunal auraient méconnu le critère relatif à l’intention individuelle de participer à un plan commun. En revanche, dans l’arrêt du 15 juillet 2015, voestalpine et voestalpine Wire Rod Austria/Commission (T‑418/10, EU:T:2015:516, point 302), le Tribunal aurait procédé à une analyse détaillée de ce critère.

170    La Commission conteste le bien-fondé de cette branche.

b)      Appréciation de la Cour

171    Par la troisième branche du deuxième moyen, la requérante reproche au Tribunal des erreurs de droit dans l’analyse de sa participation à une infraction unique et continue.

172    Selon la jurisprudence de la Cour, une entreprise ayant participé à une infraction unique et complexe par des comportements qui lui étaient propres, qui relevaient des notions d’accord ou de pratique concertée ayant un objet anticoncurrentiel au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE et qui visaient à contribuer à la réalisation de l’infraction dans son ensemble peut être également responsable des comportements mis en œuvre par d’autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction. Tel est le cas lorsqu’il est établi que ladite entreprise entendait contribuer par son propre comportement aux objectifs communs poursuivis par l’ensemble des participants et qu’elle avait connaissance des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par d’autres entreprises dans la poursuite des mêmes objectifs, ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque (arrêts du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 42, ainsi que du 24 juin 2015, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce, C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416, point 157).

173    En revanche, si une entreprise a directement pris part à un ou à plusieurs des comportements anticoncurrentiels composant une infraction unique et continue, mais qu’il n’est pas établi que, par son propre comportement, elle entendait contribuer à l’ensemble des objectifs communs poursuivis par les autres participants à l’entente et qu’elle avait connaissance de l’ensemble des autres comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par ces participants dans la poursuite des mêmes objectifs ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque, la Commission n’est en droit de lui imputer la responsabilité que des seuls comportements auxquels elle a directement participé et des comportements envisagés ou mis en œuvre par les autres participants dans la poursuite des mêmes objectifs que ceux qu’elle poursuivait et dont il est prouvé qu’elle avait connaissance ou pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque (arrêts du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 44, ainsi que du 24 juin 2015, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce, C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416, point 159).

174    En l’espèce, conformément à cette jurisprudence, le Tribunal a relevé, au point 226 de l’arrêt attaqué, que le constat de l’existence d’une infraction unique est distinct de la question de savoir si la responsabilité pour cette infraction dans sa globalité est imputable à une entreprise.

175    À ce dernier titre, il ressort sans équivoque des constats opérés par le Tribunal aux points 229 et 231 de l’arrêt attaqué que, en dépit d’une certaine ambiguïté de la décision litigieuse, dont le Tribunal a exposé les principales considérations aux points 215, 227 et 228 de cet arrêt, la Commission a, dans cette décision, tenu la requérante pour responsable de sa participation à l’infraction en cause en raison de ses seuls contacts bilatéraux avec Samsung et Renesas et qu’elle ne lui a pas imputé la responsabilité de cette infraction dans sa globalité.

176    Dès lors, l’arrêt attaqué n’est pas entaché d’une contradiction de motifs quant à l’étendue de la participation de la requérante à l’infraction en cause.

177    En outre, étant donné que la requérante a été tenue pour responsable de l’infraction en cause non pas dans sa globalité, mais seulement dans la mesure de sa participation directe à des manifestations de cette infraction, il n’était nullement nécessaire, en l’espèce, d’établir qu’elle avait connaissance des comportements collusoires des autres membres de cette infraction.

178    Partant, il convient d’écarter la troisième branche du deuxième moyen et, par conséquent, de rejeter le deuxième moyen dans son intégralité.

C.      Sur le troisième moyen, relatif à l’amende infligée à la requérante, ainsi que sur la première branche du premier moyen en ce qu’elle est tirée d’une violation de la compétence de pleine juridiction

1.      Argumentation des parties

179    Le troisième moyen soulevé par la requérante comprend deux branches.

180    Par la première branche du troisième moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation lors de la détermination du montant de l’amende, en raison du contrôle incomplet et sélectif, tel que mis en exergue dans le cadre de la première branche du premier moyen, des contacts bilatéraux qu’elle a contestés. Dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, le Tribunal aurait dû tenir compte du nombre des incidents et de la participation individuelle de chaque entreprise à l’infraction. En omettant de le faire, le Tribunal aurait méconnu la jurisprudence de la Cour. Le Tribunal aurait également insuffisamment motivé son appréciation selon laquelle la réduction du montant de l’amende qui a été accordée par la Commission était adéquate, alors qu’il n’aurait examiné que moins de la moitié des contacts dont l’existence avait été établie par la Commission et que la requérante avait contesté la proportionnalité du montant de l’amende qui lui avait été infligée sur la base de ces derniers contacts.

181    Par la seconde branche du troisième moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir méconnu le principe de proportionnalité.

182    En premier lieu, elle soutient que le Tribunal n’a pas suffisamment pris en compte le fait qu’elle a participé de manière limitée à l’infraction.

183    D’une part, la requérante allègue que, contrairement à ce que le Tribunal a jugé au point 239 de l’arrêt attaqué, elle avait avancé des arguments visant à contester la réduction de 20 % accordée par la Commission au point 172 de sa requête introductive d’instance et au point 115 de sa réplique déposée devant le Tribunal.

184    D’autre part, la requérante estime que le Tribunal a omis, méconnaissant ainsi la jurisprudence de la Cour, de tenir compte de la gravité relative de sa participation individuelle très limitée à l’infraction aux fins de la détermination du montant de l’amende. Ce montant ne refléterait pas la réalité de la participation de la requérante à cette infraction dès lors que le Tribunal n’aurait procédé au contrôle que d’un nombre limité de contacts, que la requérante n’aurait pas eu connaissance des contacts bilatéraux intervenus entre les autres participants à l’infraction et qu’un seul contact impliquant la requérante concernerait les puces non-SIM. Elle précise que ses revenus afférents à ces dernières représentaient plus de 50 % de son chiffre d’affaires global et que l’infraction pour les puces non-SIM ne pouvait se rapporter qu’à l’année 2004. Le Tribunal n’aurait, partant, pas tenu suffisamment compte de la part du chiffre d’affaires que représentaient les produits faisant l’objet de l’infraction, contrairement à ce qu’exige la jurisprudence de la Cour.

185    En second lieu, la requérante conteste les points 269 et 270 de l’arrêt attaqué en soutenant que, en lui infligeant une amende d’un montant disproportionné, la Commission et le Tribunal ont violé l’article 49 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et le Tribunal a méconnu sa compétence de pleine juridiction. Selon elle, le Tribunal aurait omis de tenir compte de la participation limitée de la requérante à l’infraction en cause. En particulier, la détermination du montant de l’amende aurait procédé d’un calcul erroné du chiffre d’affaires et contraire à la jurisprudence citée au point 269 de cet arrêt. La totalité des revenus de la requérante relatifs aux puces non-SIM pendant toute la durée de l’infraction alléguée aurait ainsi été, à tort, prise en compte. En effet, selon la requérante, l’infraction relative aux puces non-SIM ne pouvait concerner, tout au plus (quod non), que l’année 2004.

186    La Commission considère que ces arguments doivent être rejetés.

187    S’agissant de la première branche, la Commission expose que le nombre de contacts auxquels la requérante a participé ne modifie en rien la gravité de la participation de celle-ci à l’infraction, dès lors que les conséquences économiques des contacts anticoncurrentiels ont produit leurs effets postérieurement à la date de ces contacts.

188    S’agissant de la seconde branche de ce moyen, la Commission estime que l’argument tiré du fait que, lors de l’examen de la gravité de la participation de la requérante à l’infraction, le Tribunal aurait dû tenir compte de la circonstance que seuls certains desdits contacts avaient trait aux puces non-SIM est irrecevable en vertu de l’article 170 du règlement de procédure de la Cour, dès lors qu’il est exposé pour la première fois devant la Cour. En tout état de cause, le Tribunal aurait jugé à bon droit que l’infraction en cause avait trait à de telles puces.

189    En premier lieu, la Commission relève que, dès lors qu’elle peut procéder à une prise en compte de la gravité relative de la participation d’une entreprise à l’infraction, soit lors de la détermination du montant de base de l’amende qu’elle peut lui infliger, soit à titre de circonstances atténuantes ou aggravantes, le Tribunal a, à bon droit, confirmé la fixation d’un pourcentage de gravité de 16 % pour toutes les parties à l’entente. La requérante n’aurait pas démontré que la réduction de 20 %, opérée à son profit, conduirait à l’imposition d’une amende d’un montant excessif, au point d’être disproportionné.

190    En second lieu, s’agissant de la prétendue violation du principe de proportionnalité, la Commission soutient que l’imposition d’une amende d’un montant plus élevé à la requérante par rapport à celui des amendes infligées par la décision litigieuse aux autres participants à l’infraction résulte du fait que la valeur des ventes de puces pour cartes de la requérante est la plus élevée des quatre participants. À cet égard, la Commission précise que le chiffre d’affaires constitue un élément objectif donnant une juste mesure de la nocivité du comportement collusoire pour le jeu normal de la concurrence. Aucun des autres facteurs invoqués par la requérante ne serait de nature à modifier l’appréciation de la gravité de l’infraction par le Tribunal.

2.      Appréciation de la Cour

191    Les deux branches du troisième moyen se recoupant en partie, il y a lieu de les examiner ensemble. Par ailleurs, conformément à ce qui a été exposé au point 56 du présent arrêt, il y a lieu d’examiner également les arguments soulevés à l’appui de la première branche du premier moyen, en ce qu’ils portent sur l’exercice, par le Tribunal, de sa compétence de pleine juridiction.

192    En premier lieu, il convient de rappeler que le Tribunal est seul compétent pour contrôler la façon dont la Commission a apprécié dans chaque cas particulier la gravité des comportements illicites. Dans le cadre du pourvoi, le contrôle de la Cour a pour objet, d’une part, d’examiner dans quelle mesure le Tribunal a pris en considération, d’une manière juridiquement correcte, tous les facteurs essentiels pour apprécier la gravité d’un comportement déterminé à la lumière de l’article 101 TFUE et de l’article 23 du règlement n° 1/2003, et, d’autre part, de vérifier si le Tribunal a répondu à suffisance de droit à l’ensemble des arguments invoqués au soutien de la demande de suppression de l’amende ou de réduction du montant de celle-ci (arrêt du 26 janvier 2017, Laufen Austria/Commission, C‑637/13 P, EU:C:2017:51, point 58).

193    En deuxième lieu, selon la jurisprudence de la Cour, la compétence de pleine juridiction, reconnue au juge de l’Union à l’article 31 du règlement n° 1/2003 conformément à l’article 261 TFUE, habilite le juge, au-delà du simple contrôle de légalité de la sanction, à substituer son appréciation à celle de la Commission et, en conséquence, à supprimer, à réduire ou à majorer l’amende ou l’astreinte infligée (arrêts du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 63 et jurisprudence citée, ainsi que du 26 janvier 2017, Villeroy & Boch Austria/Commission, C‑626/13 P, EU:C:2017:54, point 81).

194    Certes, l’exercice de cette compétence de pleine juridiction n’équivaut pas à un contrôle d’office et la procédure est contradictoire. C’est à la partie requérante qu’il appartient, en principe, de soulever les moyens à l’encontre de la décision litigieuse et d’apporter des éléments de preuve à l’appui de ces moyens (arrêts du 18 décembre 2014, Commission/Parker Hannifin Manufacturing et Parker-Hannifin, C‑434/13 P, EU:C:2014:2456, point 76 et jurisprudence citée, ainsi que du 26 janvier 2017, Villeroy & Boch Austria/Commission, C‑626/13 P, EU:C:2017:54, point 83).

195    Cependant, comme l’a relevé M. l’avocat général au point 74 de ses conclusions, afin de satisfaire aux exigences d’un contrôle de pleine juridiction au sens de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux en ce qui concerne l’amende, le juge de l’Union est tenu, dans l’exercice des compétences prévues aux articles 261 et 263 TFUE, d’examiner tout grief, de droit ou de fait, visant à démontrer que le montant de l’amende n’est pas en adéquation avec la gravité et la durée de l’infraction (arrêts du 18 décembre 2014, Commission/Parker Hannifin Manufacturing et Parker-Hannifin, C‑434/13 P, EU:C:2014:2456, point 75 et jurisprudence citée, ainsi que du 26 janvier 2017, Villeroy & Boch Austria/Commission, C‑626/13 P, EU:C:2017:54, point 82).

196    En troisième lieu, la gravité de l’infraction doit faire l’objet d’une appréciation individuelle (arrêt du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission, C‑444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, point 102). Pour la détermination du montant des amendes, il y a lieu de tenir compte de la durée de l’infraction et de tous les éléments de nature à entrer dans l’appréciation de la gravité de celle-ci, tels que le comportement de chacune des entreprises, le rôle joué par chacune d’elles dans l’établissement des pratiques concertées, le profit qu’elles ont pu tirer de ces pratiques, leur taille et la valeur des marchandises concernées ainsi que le risque que des infractions de ce type représentent pour l’Union européenne (arrêt du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 56 et jurisprudence citée).

197    Parmi ces éléments figurent également le nombre et l’intensité des comportements anticoncurrentiels (voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 57 et jurisprudence citée).

198    Cependant, la Cour a rappelé qu’il n’existe pas de liste contraignante ou exhaustive de critères devant obligatoirement être pris en compte afin d’apprécier la gravité d’une infraction (arrêts du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, C‑534/07 P, EU:C:2009:505, point 54, ainsi que du 13 juin 2013, Versalis/Commission, C‑511/11 P, EU:C:2013:386, point 82 et jurisprudence citée).

199    En outre, il ressort de la jurisprudence de la Cour que la Commission peut tenir compte de la gravité relative de la participation d’une entreprise à une infraction et des circonstances particulières de l’affaire soit lors de l’appréciation de la gravité de l’infraction au sens de l’article 23 du règlement n° 1/2003, soit lors de l’ajustement du montant de base en fonction de circonstances atténuantes et aggravantes. L’octroi d’un tel choix à la Commission est conforme à la jurisprudence rappelée au point 196 du présent arrêt, dès lors qu’il impose, en toute hypothèse, qu’il soit tenu compte, lors de la détermination du montant de l’amende, du comportement individuel adopté par l’entreprise en cause (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission, C‑444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, points 104 et 105).

200    En l’espèce, tout d’abord, il ressort sans équivoque de la décision litigieuse et des constatations opérées par le Tribunal aux points 215, 229 et 231 de l’arrêt attaqué que, si, dans cette décision, la Commission a constaté l’existence d’une infraction unique et continue, cette institution a tenu la requérante pour responsable de cette infraction dans la seule mesure des contacts illicites qu’elle a eus avec Samsung et Renesas entre le 24 septembre 2003 et le 31 mars 2005. Ainsi, la requérante n’a été tenue pour responsable de l’infraction en cause que sur le fondement des onze contacts bilatéraux constatés à son égard dans la décision litigieuse et qu’elle a contestés devant le Tribunal.

201    La Commission a tenu compte de cette participation limitée de la requérante à l’infraction en cause dans le calcul de l’amende en lui accordant une réduction de 20 % au titre des circonstances atténuantes, tout en appliquant un coefficient de gravité de 16 % identique pour tous les participants à l’infraction en cause.

202    Ensuite, il ressort sans équivoque d’une lecture de la requête introductive d’instance que la requérante a demandé non seulement l’annulation de la décision litigieuse en tant qu’elle la concerne, mais également, à titre subsidiaire, la réduction du montant de l’amende qui lui avait été infligée. À cet égard, il importe par ailleurs de préciser que, lors de l’audience devant la Cour, la Commission a retiré son argumentation selon laquelle la requérante n’aurait pas demandé au Tribunal d’exercer sa compétence de pleine juridiction.

203    Par ses moyens soulevés devant le Tribunal, la requérante a notamment contesté les appréciations que la Commission a portées sur chacun des onze contacts bilatéraux retenus à son encontre et a critiqué le calcul du montant de l’amende qui lui a été infligée en ce qui concerne tant le coefficient de gravité de 16 % que le taux de réduction de 20 % accordé au titre des circonstances atténuantes.

204    Il s’ensuit que, par son argumentation développée dans sa requête introductive d’instance, la requérante a invité le Tribunal à examiner la réalité de sa participation à l’infraction en cause et, le cas échéant, l’étendue exacte de cette participation. Or, cette argumentation pouvait être pertinente pour apprécier, conformément à la jurisprudence citée au point 195 du présent arrêt, au regard du comportement de la requérante, l’adéquation du montant de l’amende qui lui a été infligée par rapport à l’infraction qu’elle a commise.

205    En effet, si, aux fins d’apprécier la gravité de l’infraction commise par la requérante et de fixer le montant de l’amende, le Tribunal n’est pas tenu de se fonder sur le nombre exact de contacts bilatéraux retenus à l’égard de la requérante, cet élément peut néanmoins constituer un élément pertinent parmi d’autres (voir, par analogie, arrêts du 25 janvier 2007, Dalmine/Commission, C‑407/04 P, EU:C:2007:53, point 132, et du 14 octobre 2010, Deutsche Telekom/Commission, C‑280/08 P, EU:C:2010:603, point 277).

206    Dans ces conditions, le Tribunal ne pouvait, sans méconnaître l’étendue de sa compétence de pleine juridiction, omettre de répondre à l’argument soulevé par la requérante, selon lequel la Commission avait violé le principe de proportionnalité en fixant le montant de l’amende infligée sans prendre en compte le nombre limité de contacts auxquels la requérante aurait participé. Cette conclusion vaut d’autant plus qu’en l’espèce, le Tribunal s’est contenté d’entériner cinq des onze contacts constatés dans la décision litigieuse, tout en ne répondant pas à la question de savoir si la Commission avait établi l’existence des six autres contacts retenus dans cette décision.

207    Or, dans la mesure où le Tribunal n’a pas, dans l’arrêt attaqué, contrôlé la proportionnalité du montant de l’amende infligée par rapport au nombre de contacts qu’il a retenus à l’encontre de la requérante, ni exposé les motifs pour lesquels il n’a pas procédé à un tel contrôle, il a commis une erreur de droit.

208    Cette appréciation n’est pas remise en cause par les arguments de la Commission.

209    Certes, d’une part, comme le Tribunal l’a rappelé au point 269 de l’arrêt attaqué, la partie du chiffre d’affaires global provenant de la vente des produits qui font l’objet de l’infraction est la mieux à même de refléter l’importance économique de cette infraction (arrêt du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission, C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 55), de sorte que le fait que le chiffre d’affaires de la requérante soit bien plus important que celui des autres entreprises sanctionnées peut justifier qu’elle se soit vu infliger l’amende la plus élevée en l’espèce.

210    D’autre part, selon la jurisprudence de la Cour, compte tenu du point 23 des lignes directrices de 2006, un coefficient de gravité d’un taux de 16 % peut se justifier au regard de la seule nature de l’infraction en cause, dès lors que celle-ci compte, ainsi que le Tribunal l’a relevé, parmi les restrictions de concurrence les plus graves au sens dudit point 23 et qu’un tel taux figure parmi les taux les plus faibles de l’échelle des sanctions prévue pour de telles infractions en vertu de ces lignes directrices (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2017, Aloys F. Dornbracht/Commission, C‑604/13 P, EU:C:2017:45, point 75).

211    Toutefois, les circonstances relevées et la jurisprudence citée aux points 209 et 210 du présent arrêt ne sauraient, à elles seules, justifier que, dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal renonce à l’examen de l’adéquation du montant de l’amende au nombre de contacts qu’il a retenus à l’égard de la requérante. Un tel examen était, en effet, nécessaire afin d’apprécier, notamment, si le nombre limité de ces contacts justifiait une réduction du montant de l’amende infligée à la requérante supérieure à celle de 20 % qui lui a été accordée au titre des circonstances atténuantes.

212    Certes, la Cour a déjà jugé qu’il n’est pas nécessaire d’accorder de manière automatique une réduction supplémentaire pour chaque circonstance atténuante alléguée par un requérant, même à la supposer fondée, pourvu qu’une analyse globale tenant compte de l’ensemble des circonstances pertinentes conduise à constater le caractère proportionné du montant de l’amende infligée par la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 5 décembre 2013, Caffaro/Commission, C‑447/11 P, non publié, EU:C:2013:797, points 103 et 104).

213    Or, en l’occurrence, une telle analyse globale tenant compte de l’ensemble des circonstances pertinentes fait précisément défaut dans l’arrêt attaqué, dans la mesure où le Tribunal s’est abstenu d’examiner la proportionnalité de l’amende par rapport au nombre de contacts retenus à l’encontre de la requérante.

214    En second lieu, les arguments de la requérante relatifs à la prise en compte de ses revenus liés aux puces non-SIM doivent être écartés pour les motifs exposés aux points 104 à 109 et 139 du présent arrêt.

215    Par conséquent, il convient d’accueillir la première branche du premier moyen et le troisième moyen dans la mesure où la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir tenu compte, lors de l’appréciation du montant de l’amende, du nombre de contacts qu’il a retenus à son encontre, et de les rejeter pour le surplus.

VI.    Sur l’annulation partielle de l’arrêt attaqué

216    Il résulte de ce qui précède que l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit quant à l’exercice, par le Tribunal, de sa compétence de pleine juridiction.

217    Dans ces conditions, il y a lieu d’annuler l’arrêt attaqué, en ce que le Tribunal a rejeté la demande subsidiaire de la requérante tendant à la réduction du montant de l’amende que la Commission lui avait infligée, et de rejeter le pourvoi pour le surplus.

VII. Sur le litige en première instance

218    Conformément à l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, la Cour peut statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé.

219    En l’espèce, tel n’est pas le cas.

220    En effet, il est constant que l’examen de la demande de la requérante tendant à obtenir une réduction du montant de l’amende qui lui a été infligée par la décision litigieuse est susceptible d’impliquer des appréciations de fait portant, principalement, sur les contacts bilatéraux, qu’elle conteste dans le cadre de la troisième branche du troisième moyen qu’elle a porté devant le Tribunal, qui n’ont pas fait l’objet d’une appréciation par le Tribunal et qui n’ont pas été pleinement débattus devant la Cour.

221    Par conséquent, il convient de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il apprécie la proportionnalité du montant de l’amende infligée par rapport au nombre de contacts retenus à l’encontre de la requérante, le cas échéant en examinant si la Commission a établi l’existence des six contacts sur lesquels le Tribunal ne s’est pas prononcé.

VIII. Sur les dépens

222    L’affaire étant renvoyée devant le Tribunal, il convient de réserver les dépens.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête :

1)      L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 décembre 2016, Infineon Technologies/Commission (T758/14, non publié, EU:T:2016:737), est annulé, en ce que le Tribunal a rejeté la demande subsidiaire d’Infineon Technologies AG tendant à la réduction du montant de l’amende que la Commission européenne lui avait infligée.

2)      Le pourvoi est rejeté pour le surplus.

3)      L’affaire est renvoyée devant le Tribunal pour qu’il soit statué sur la demande de réduction du montant de l’amende infligée à Infineon Technologies AG à la lumière du sixième moyen.

4)      Les dépens sont réservés.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.