Language of document : ECLI:EU:C:2020:389

ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

27 mai 2020 (*)

« Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Droit institutionnel ‐ Recours en indemnité – Plaintes auprès de la Commission européenne et de la Cour européenne des droits de l’homme – Pourvoi manifestement irrecevable »

Dans l’affaire C‑798/19 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 29 octobre 2019,

Paix et justice pour les juifs séfarades en Israël, établie à Paris (France), représentée par Me R. Paternel, avocat,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Commission européenne,

et

Conseil de l’Europe,

parties défenderesses en première instance,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. P. G. Xuereb, président de chambre, MM. T. von Danwitz et A. Kumin (rapporteur), juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Paix et justice pour les juifs séfarades en Israël demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 5 septembre 2019, Paix et justice pour les juifs séfarades en Israël/Commission et Conseil de l’Europe (T‑337/19, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2019:563), par laquelle celui-ci a rejeté comme étant manifestement irrecevable son recours tendant, à titre principal, à ce que la Commission européenne soit condamnée à indemniser la requérante pour un préjudice dont elle aurait, par ses carences, empêché cette dernière d’obtenir la réparation devant la Cour européenne des droits de l’homme et qui aurait résulté d’une discrimination des juifs séfarades par la République française et, à titre subsidiaire, à ce qu’il soit ordonné que la requérante intègre l’Union pour la Méditerranée, en tant qu’autorité séfarade, et qu’il lui soit mis à disposition les fonds nécessaires pour exercer son rôle au sein de celle-ci.

 La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

2        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 mai 2019, la requérante a introduit un recours tendant, à titre principal, à la condamnation de la Commission à se substituer à la République française « pour le paiement des sommes que ses carences ont empêché d’obtenir devant la [Cour européenne des droits de l’homme] » et, à titre subsidiaire, à ordonner l’intégration de la requérante au sein de l’Union pour la Méditerranée.

3        Au soutien de son recours, la requérante avait fait valoir qu’il appartenait à la Commission de sanctionner l’Agence juive à Paris (France) en raison du monopole dont bénéficierait cette organisation en matière de communication à l’adresse des juifs de France.

4        Le Tribunal a, par l’ordonnance attaquée, rejeté le recours comme étant manifestement irrecevable, en application de l’article 126 de son règlement de procédure.

5        Aux fins de statuer ainsi, il a rappelé, au point 5 de cette ordonnance, que la requête doit notamment contenir l’objet du litige et un exposé sommaire des moyens invoqués, avant de considérer, au point 7 de celle-ci, que « le texte de la requête n’expos[ait] aucun moyen juridique de manière suffisamment claire, intelligible et cohérente au soutien des conclusions formulées ».

 Les conclusions de la requérante

6        Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour :

–        d’annuler l’ordonnance attaquée ;

–        de constater l’illégalité de l’omission de la Commission et de la condamner à se substituer à la République française « pour le paiement des sommes que ses carences ont empêché d’obtenir devant ses juridictions internes et la [Cour européenne des droits de l’homme] », et

–        de renvoyer l’affaire devant le Tribunal.

 Sur le pourvoi

7        En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.

8        Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre du présent pourvoi.

9        À l’appui de son pourvoi, la requérante réitère en substance l’argumentation exposée au soutien de son recours en première instance. Elle avance ainsi des arguments relatifs à la situation des juifs séfarades en France, allègue qu’ils seraient victimes d’une campagne de désinformation orchestrée par l’Agence juive à Paris et rappelle les différentes procédures judiciaires qu’elle a introduites devant les juridictions françaises ainsi que devant la Cour européenne des droits de l’homme.

10      Il résulte de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169 du règlement de procédure de la Cour qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. Selon la jurisprudence constante de la Cour, ne répond pas à cette exigence le pourvoi qui se limite à reproduire les moyens et les arguments déjà présentés devant le Tribunal. En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétence de la Cour (voir, notamment, arrêt du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, EU:C:2000:361, point 35, ainsi que ordonnance du 3 septembre 2019, ND et OE/Commission, C‑317/19 P, non publiée, EU:C:2019:688, point 27 et jurisprudence citée).

11      En outre, en vertu de ces mêmes dispositions, les éléments du pourvoi qui ne contiennent aucune argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entachée l’ordonnance attaquée ne répondent pas à cette exigence et doivent être écartés comme étant manifestement irrecevables (ordonnance du 18 octobre 2018, Alex/Commission, C‑696/17 P, non publiée, EU:C:2018:848, point 23 et jurisprudence citée).

12      De même, doivent être écartés comme manifestement irrecevables les arguments difficilement compréhensibles et confus, dès lors qu’ils ne permettent pas à la Cour d’exercer la mission qui lui incombe et d’effectuer son contrôle de la légalité (ordonnance du 19 septembre 2019, Renew Consorzio Energie Rinnovabili/Commission et Italie, C‑325/19 P, non publiée, EU:C:2019:768, point 21 et jurisprudence citée).

13      En l’occurrence, d’une part, il convient de constater que le pourvoi consiste, en substance, en une répétition de l’argumentation présentée par la requérante devant le Tribunal, selon laquelle la Commission aurait omis d’adopter des mesures en sa faveur.

14      D’autre part, les arguments développés au soutien du pourvoi sont confus et se limitent à des affirmations générales relatives à la situation des juifs séfarades en France ainsi qu’aux différentes procédures judiciaires initiées par la requérante devant les juridictions françaises et devant la Cour européenne des droits de l’homme. En outre, la requérante n’identifie dans son pourvoi aucune erreur de droit qui aurait été commise par le Tribunal dans l’ordonnance attaquée ni même ne vise cette dernière.

15      En conséquence, le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble comme étant manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

16      En application de l’article 137 du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance. En l’espèce, la présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi ne soit signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que Paix et justice pour les juifs séfarades en Israël supportera ses propres dépens.


Par ces motifs, la Cour (septième chambre) ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté comme étant manifestement irrecevable.

2)      Paix et justice pour les juifs séfarades en Israël supporte ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 27 mai 2020.

Le greffier

Le président de la VIIème chambre

A. Calot Escobar

 

P. G. Xuereb


*      Langue de procédure : le français.