Language of document : ECLI:EU:C:2003:55

ARRÊT DE LA COUR

28 janvier 2003(1)

«Traités CECA et CE - Aides d'État - Composition de la Commission - Notification à la Commission des aides et des projets d'aides - Notion et contenu de la notification - Champ d'application du traité CECA - Cinquième code des aides à la sidérurgie - Compétence ‘ratione temporis’ de la Commission - Article 87, paragraphe 2, sous c), CE - Procédure de privatisation - Critère de l'investisseur privé - Appel d'offres - Transparence»

Dans l'affaire C-334/99,

République fédérale d'Allemagne, représentée par M. C.-D. Quassowski, en qualité d'agent, assisté de Me J. Sedemund, Rechtsanwalt,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. D. Triantafyllou et K.-D. Borchardt, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l'annulation des articles 4 à 7 de la décision 1999/720/CE, CECA de la Commission, du 8 juillet 1999, concernant l'aide d'État mise à exécution par l'Allemagne en faveur de Gröditzer Stahlwerke GmbH et de sa filiale Walzwerk Burg GmbH (JO L 292, p. 27),

LA COUR,

composée de M. G. C. Rodríguez Iglesias, président, MM. J.-P. Puissochet, M. Wathelet, R. Schintgen et C. W. A. Timmermans, présidents de chambre, MM. C. Gulmann, D. A. O. Edward, A. La Pergola, V. Skouris (rapporteur), S. von Bahr et J. N. Cunha Rodrigues, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,


greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 27 novembre 2001, au cours de laquelle la République fédérale d'Allemagne a été représentée par Mme B. Muttelsee-Schön, en qualité d'agent, assistée de Me T. Lübbig, Rechtsanwalt, et la Commission par M. D. Triantafyllou,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 24 janvier 2002,

rend le présent

Arrêt

1.
    Par requête déposée au greffe de la Cour le 9 septembre 1999, la République fédérale d’Allemagne a demandé, en vertu des articles 230 CE et 33 CA, l’annulation des articles 4 à 7 de la décision 1999/720/CE, CECA de la Commission, du 8 juillet 1999, concernant l’aide d’État mise à exécution par l’Allemagne en faveur de Gröditzer Stahlwerke GmbH et de sa filiale Walzwerk Burg GmbH (JO L 292, p. 27, ci-après la «décision attaquée»).

Les antécédents du litige

2.
    Il résulte du dossier que Gröditzer Stahlwerke GmbH (ci-après «GS») est une entreprise de l’industrie sidérurgique, employant environ 720 salariés, qui est établie en Saxe, un des nouveaux Länder. En 1990, à la suite de la réunification allemande, les parts représentant le capital de GS ont été reprises par la Treuhandanstalt, un organisme allemand de droit public chargé de restructurer et de privatiser les entreprises de ces Länder.

3.
    Au 1er janvier 1995, la Treuhandanstalt a été rebaptisée «Bundesanstalt für vereinigungsbedingte Sonderaufgaben» (ci-aprPs la «BvS»). Les fonctions de la BvS se concentrent depuis sur la gestion. La mission de restructuration et de privatisation des entreprises a été confiée, au début de l’année 1995, à une société appartenant à la BvS, BMGB Beteiligungs-Management-Gesellschaft Berlin mbH (ci-après «BMGB»), qui a également repris les parts de sociétés encore détenues par la BvS. Pour soutenir l’activité de privatisation, la Treuhandanstalt avait, en outre, créé des sociétés de gestion en commandite, comme la société EREL Gesellschaft Verwaltung GmbH & Co Management KG (ci-après «EREL»), qui, sur mandat et sous le contrôle de la Treuhandanstalt, étaient chargées de la privatisation de certaines entreprises des nouveaux Länder.

4.
    Au cours de la période 1992-1996, GS a bénéficié d’aides relatives à des mesures d’investissement, sociales et de fonctionnement pour un montant de 304,5 millions de DEM, sous la forme de prêts d’associé, de crédits bancaires garantis par la Treuhandanstalt et la BvS ainsi que d’interventions directes.

5.
    Le 1er janvier 1997, BMGB a vendu GS et sa filiale Walzwerk Burg GmbH (ci-après «WB») à Georgsmarienhütte GmbH (ci-après «GMH»), à la suite d’une procédure d’appel d’offres menée par des banques d’investissement. La vente de GS à GMH a entraîné pour BMGB des coûts d’un montant total de 393 millions de DEM, résultant notamment de l’annulation du remboursement des prêts d’associé et du remboursement des crédits bancaires.

6.
    Par lettre du 6 juin 1997, la République fédérale d’Allemagne a, conformément à l’article 93, paragraphe 3, du traité CE (devenu article 88, paragraphe 3, CE), notifié à la Commission les mesures de financement prises en faveur de GS et de WB avant et pendant la privatisation de ces entreprises. Par lettre du 5 août 1997, la Commission a informé cet État membre de sa décision d’ouvrir, à l’égard de ces aides, la procédure prévue à l’article 6, paragraphe 5, de la décision n° 2496/96/CECA de la Commission, du 18 décembre 1996, instituant des règles communautaires pour les aides à la sidérurgie (JO L 338, p. 42, ci-après le «sixième code des aides à la sidérurgie»). La Commission a invité les autres intéressés à présenter leurs observations sur lesdites mesures.

7.
    C’est dans ce cadre factuel et procédural que la Commission a adopté la décision attaquée, dont les articles 4 à 7 sont libellés comme suit:

«Article 4

Les aides à l’investissement d’un montant total de 83,2 millions de DEM octroyées à GS et consistant en [des] crédits bancaires garantis à 100 % par la Treuhandanstalt/BvS, en des prêts d’associé accordés pendant la période 1992-1996 par les actionnaires publics successifs de GS (Treuhandanstalt/EREL/BMGB), en subventions accordées dans le cadre de l’accord de privatisation et en aides régionales octroyées dans le cadre du programme ‘Gemeinschaftsaufgabe Verbesserung der regionalen Wirtschaftsstruktur’ pendant la période 1997-1999 sont incompatibles avec le marché commun.

Article 5

Les mesures mises à exécution par l’Allemagne en faveur de GS pour un montant total de 155,5 millions de DEM et consistant en des aides à l’investissement d’un montant maximal de 14,3 millions de DEM et en aides au fonctionnement d’un montant maximal de 141,2 millions de DEM [dont 17 millions de DEM correspondent à une subvention accordée dans le cadre de l’accord de privatisation et 124,2 millions de DEM au financement de crédits bancaires garantis à 100 % par la Treuhandanstalt/BvS et aux prêts d’associé accordés par les actionnaires publics successifs de GS (Treuhandanstalt/EREL/BMGB)] constituent des aides d’État incompatibles avec le marché commun du charbon et de l’acier.

Article 6

Les aides que l’Allemagne prévoit d’accorder à GS en application de l’article 9, paragraphe 2, de l’accord du 27 février 1997 relatif à la vente de parts de Gröditzer Stahlwerke GmbH à Georgsmarienhütte GmbH, d’un montant de 3,3 millions de DEM sous la forme de prêts constituant une avance sur des aides régionales à recevoir sont incompatibles avec le marché commun du charbon et de l’acier.

Article 7

1.    L’Allemagne prend les mesures nécessaires pour récupérer auprès de leur bénéficiaire les aides visées aux articles 4 et 5 et déjà illégalement mises à sa disposition.

2.    La récupération a lieu conformément aux procédures nationales, si le droit national ne les rend pas impossibles ou excessivement difficiles à mettre en oeuvre. Les sommes à récupérer produisent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition du bénéficiaire, jusqu’à leur récupération effective. Les intérêts sont calculés sur la base du taux de référence utilisé pour le calcul de l’équivalent-subvention dans le cadre des aides à finalité régionale.

3.    Aux fins du présent article, le terme ‘bénéficiaire’ ne désigne pas uniquement GS, mais, le cas échéant, toute entreprise à laquelle des éléments d’actif ont été transférés en vue de rendre inopérantes les dispositions du paragraphe 1.»

Le recours

8.
    À l’appui de son recours, le gouvernement allemand soulève six moyens tirés respectivement

—     d’une violation des articles 213 CE, 215 CE, 9 CA et 12 CA, au motif que la Commission n’aurait pas été composée régulièrement lors de l’adoption de la décision attaquée;

—     d’une violation de l’obligation de diligence, du principe de bonne administration et du principe de sécurité juridique lors de la procédure administrative, ainsi que d’une violation de l’obligation de motivation;

—     d’une application des règles du traité CECA à des secteurs de production de GS ne relevant pas de ce traité;

—     d’une appréciation erronée, au titre de la décision n° 3855/91/CECA de la Commission, du 27 novembre 1991, instituant des règles communautaires pour les aides à la sidérurgie (JO L 362, p. 57, ci-après le «cinquième code des aides à la sidérurgie»), des aides à l’investissement destinées au secteur de production de GS relevant du traité CECA;

—     d’une appréciation erronée des aides à l’investissement destinées aux secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA;

—     d’une appréciation erronée, au titre des règles applicables en matières d’aides, de la procédure de privatisation de GS.

Sur le premier moyen, tiré dune irrégularité dans la composition de la Commission

Arguments des parties

9.
    Le gouvernement allemand fait valoir que la décision attaquée est entachée d’un vice de forme substantiel et donc nulle, au motif que la Commission n’aurait pas été composée régulièrement lors de l’adoption de ladite décision. Selon ce gouvernement, la décision attaquée a été adoptée en violation des articles 213 CE et 215 CE (ou des dispositions équivalentes contenues aux articles 9 CA et 12 CA), dans la mesure où la Commission, au moment de l’adoption de cette décision, n’était plus composée de 20 membres, M. le commissaire M. Bangemann ayant été, dès le 1er juillet 1999, «mis en congé» par une décision du collège de la Commission (ci-après la «décision du 1er juillet 1999»). Étant donné, d’une part, que cette «mise en congé» ne serait pas prévue par le traité CE et, d’autre part, que le Conseil n’aurait réagi à cette «mise en congé» que le 9 juillet 1999 en renonçant, conformément à l’article 215, deuxième alinéa, deuxième phrase, CE, à nommer un successeur [décision 1999/493/CE, CECA, Euratom du Conseil, du 9 juillet 1999, relative à la composition de la Commission (JO L 192, p. 53)], le gouvernement allemand considère qu’il est établi que la Commission a modifié de sa propre autorité le nombre de ses membres prescrit par le traité CE et, en cela, a porté atteinte aux pouvoirs de décision du Conseil.

10.
    Le gouvernement allemand soutient que, s’il est vrai que l’article 215, deuxième alinéa, CE envisage la possibilité d’un nombre réduit de commissaires, il n’en reste pas moins que, aux termes de cette disposition, seul le Conseil dispose en la matière d’un pouvoir de décision.

11.
    En outre, le gouvernement allemand prétend que M. Bangemann se trouvait, en raison de la démission collective des membres de la Commission, le 16 mars 1999, purement et simplement dans la situation d’un commissaire qui reste en fonctions, au sens de l’article 215, quatrième alinéa, CE. Cette situation aurait perduré jusqu’au remplacement des membres de la Commission. Or, selon le gouvernement allemand, un commissaire en fonctions ne peut se libérer de sa charge, limitée en l’espèce à la gestion des affaires courantes, y compris l’adoption de décisions urgentes, qu’avec l’accord du Conseil. Cet accord aurait fait cependant défaut lors de l’adoption de la décision attaquée.

12.
    Par ailleurs, le gouvernement allemand fait valoir que le principe de la collégialité de la Commission a été méconnu en l’espèce dans la mesure où les fonctions de M. Bangemann ont été transférées à M. le commissaire K. van Miert, compétent en matière de surveillance de la concurrence et des aides. Ainsi, la direction générale compétente en matière de politique industrielle n’aurait pas été représentée lors de la procédure de décision.

13.
    La Commission fait valoir, d’une part, que l’article 215, deuxième alinéa, CE envisage l’hypothèse d’un nombre réduit de commissaires et, d’autre part, que le Conseil a confirmé l’octroi d’un congé à M. Bangemann en décidant formellement, le 9 juillet 1999, qu’il n’y avait pas lieu de nommer un successeur pour une période de transition aussi courte. Cette décision du Conseil apparaît, selon la Commission, parfaitement légitime. En effet, M. Bangemann n’aurait plus pu assumer sa charge de commissaire compte tenu de son obligation de respecter, pendant la durée de ses fonctions et après la cessation de celles-ci, les obligations découlant de sa charge, notamment les devoirs d’honnêteté et de délicatesse quant à l’acceptation, après cette cessation, de certaines fonctions ou de certains avantages.

14.
    Il s’ensuivrait que la Commission aurait pu prêter le flanc à la critique si, précisément, M. Bangemann avait continué à participer au processus de décision de la Commission, alors qu’il avait demandé à être relevé de ses fonctions afin de pouvoir se consacrer à des activités professionnelles dans une entreprise. En effet, dans la pratique, la Commission n’aurait pas pu vérifier dans chaque cas l’impartialité de M. Bangemann. En tout état de cause, les règles d’incompatibilité et le devoir de délicatesse imposeraient davantage qu’une obligation d’impartialité. Il aurait donc été nécessaire que M. Bangemann quitte ses fonctions de commissaire.

15.
    À l’appui de son argumentation, la Commission invoque la jurisprudence constante selon laquelle elle serait habilitée, dans des cas d’urgence et pour prévenir un vide juridique, à se substituer au législateur communautaire et à adopter des mesures législatives, afin d’assurer la continuité de l’action de la Communauté (arrêts du 3 juillet 1979, Van Dam en Zonen e.a., 185/78 à 204/78, Rec. p. 2345; du 28 mars 1984, Midden-Nederland et Van Miert, 47/83 et 48/83, Rec. p. 1721, et du 10 juillet 1984, Kirk, 63/83, Rec. p. 2689). À plus forte raison, la Commission serait autorisée à expédier ses propres affaires courantes, lorsqu’elle compte un membre de moins.

16.
    Quant à l’argumentation du gouvernement allemand selon laquelle la direction générale compétente en matière de politique industrielle n’aurait pas été représentée lors de la procédure de décision, la Commission fait valoir que tout projet de décision de cette institution est soumis pour avis à chacun des services concernés, lesquels peuvent alors faire connaître par écrit leur opinion. En l’occurrence, le projet relatif à la décision attaquée aurait été approuvé par la direction générale de la politique industrielle.

Appréciation de la Cour

17.
    Il y a lieu de rappeler que, conformément aux articles 213, paragraphe 1, deuxième alinéa, CE, et 9, paragraphe 1, deuxième alinéa, CA, le nombre des membres de la Commission peut être modifié par le Conseil statuant à l’unanimité.

18.
    Les articles 215, premier alinéa, CE et 12, premier alinéa, CA prévoient que, en dehors des renouvellements réguliers et des décès, les fonctions de membre de la Commission prennent fin individuellement par démission volontaire ou d’office. Selon les articles 215, deuxième alinéa, CE et 12, deuxième alinéa, CA, l’intéressé est remplacé pour la durée du mandat restant à courir par un nouveau membre nommé d’un commun accord par les gouvernements des États membres. Aux termes de ces dernières dispositions, le Conseil, statuant à l’unanimité, peut décider qu’il n’y a pas lieu à remplacement.

19.
    En outre, les articles 215, quatrième alinéa, CE et 12, quatrième alinéa, CA disposent que, sauf en cas de démission d’office prévue aux articles 216 CE et 12 A CA respectivement, les membres de la Commission restent en fonctions jusqu’à ce qu’il soit pourvu à leur remplacement.

20.
    Il résulte des ces dispositions, d’une part, que la Commission n’est pas compétente pour modifier le nombre de ses membres et, d’autre part, que, en cas de démission de l’un d’eux, seul le Conseil est compétent pour remplacer ce membre ou décider qu’il n’y a pas lieu à remplacement.

21.
    Afin de se prononcer sur le bien-fondé du premier moyen soulevé par le gouvernement allemand, il convient dès lors d’examiner la nature exacte de la décision du 1er juillet 1999, par laquelle la Commission a mis M. Bangemann en «congé de fonction», et, plus particulièrement, de rechercher si, par cette décision, la Commission a modifié le nombre de ses membres.

22.
    À cet égard, il convient de rappeler que M. Bangemann a, par lettre du 29 juin 1999 adressée au président de la conférence des représentants des gouvernements des États membres, demandé à être relevé de ses fonctions à la Commission afin de pouvoir se consacrer à des activités professionnelles dans une entreprise.

23.
    Par la décision du 1er juillet 1999, la Commission a mis M. Bangemann en «congé de fonction» jusqu’à l’achèvement de la procédure prévue aux articles 215 CE et 12 CA. Cette décision a donné lieu à un communiqué de presse comportant une déclaration relative à la situation de M. Bangemann.

24.
    Dans cette déclaration, qui a d’ailleurs été invoquée par le gouvernement allemand au soutien de ce premier moyen, la Commission a indiqué ce qui suit:

«[E]n tout état de cause, il n’est pas possible pour M. Bangemann d’occuper sa future fonction tant que la procédure prévue à l’article 215 [CE] n’est pas achevée. M. Bangemann accepte ce point. En attendant, le Collège a décidé que M. Bangemann se mettait en congé de fonction, comme il l’a lui-même souhaité.»

25.
    Il est exact que, comme le relève le gouvernement allemand, il n’existe dans les traités CE et CECA ou le règlement intérieur de la Commission aucune disposition prévoyant une telle mise en «congé de fonction». Néanmoins, il convient de constater, indépendamment de la terminologie utilisée dans la décision du 1er juillet 1999, que, par cette décision, la Commission a, dans le souci d’assurer la continuité de l’action de la Communauté, simplement tiré les conséquences, d’une part, du fait que M. Bangemann avait décidé d’accepter une activité professionnelle dans une entreprise privée et, d’autre part, de la volonté de ce dernier de ne plus exercer ses fonctions au sein de la Commission.

26.
    Dans ces conditions, la décision du 1er juillet 1999 ne saurait être perçue comme ayant une influence sur la qualité de commissaire de M. Bangemann ni comme ayant pour objet de diminuer le nombre des membres de la Commission.

27.
    Il s’ensuit que, lors de l’adoption de la décision attaquée, la Commission était régulièrement composée.

28.
    Le premier moyen du gouvernement allemand doit donc être rejeté comme non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré dune violation de lobligation de diligence, du principe de bonne administration et du principe de sécurité juridique lors de la procédure administrative, ainsi que dune violation de lobligation de motivation

29.
    Le deuxième moyen du gouvernement allemand s’articule en deux branches.

Sur la première branche

Arguments des parties

30.
    Le gouvernement allemand soutient que la décision attaquée viole l’obligation de diligence ainsi que les principes de bonne administration et de sécurité juridique dans la mesure où la Commission n’aurait ouvert la procédure principale de contrôle des aides que le 5 août 1997, c’est-à-dire plus de trois ans après la réception de la première communication du gouvernement allemand relative aux mesures de soutien prévues pour GS.

31.
    À cet égard, le gouvernement allemand fait valoir que

—     par une communication du 9 juin 1994, il a fourni à la Commission des informations détaillées sur la répartition tant des subventions, d’un montant de 133,3 millions de DEM, versées jusqu’au 31 décembre 1993 par la Treuhandanstalt pour l’assainissement de GS que des mesures de financement, d’un montant d’environ 90 millions de DEM, prévues pour 1994. Dans cette communication, le gouvernement allemand aurait, en outre, signalé à la Commission les affectations spéciales d’un montant de 15,2 millions de DEM (jusqu’au 31 décembre 1993) et de 6,5 millions de DEM pour le financement des mesures sociales. Il y aurait joint le projet d’entreprise établi pour les années 1994 à 1996 en vue du redressement de GS. La procédure aurait depuis lors été conduite au sein de la Commission sous le numéro de dossier NN 46/94.

—     par une communication du 29 juin 1994, il a informé la Commission des mesures de soutien prévues, consistant en des investissements d’un montant de 59,61 millions de DEM. Cette communication n’aurait été retirée par le gouvernement allemand, par lettre du 2 décembre 1994, que sur recommandation de la Commission.

—     par une communication détaillée du 7 septembre 1995, il a donné à la Commission une vue d’ensemble de la situation économique de GS et du développement de son activité commerciale face à la concurrence. Selon le gouvernement allemand, était joint à cette communication un aperçu, pour chaque secteur d’activité, du programme d’investissement de 1993 à 1995 ainsi que de 1996 et 1997. Les subventions décrites dans cette communication, tant celles déjà versées que celles à l’état de projet, auraient porté, à la fin de 1997, sur un montant total de 335,9 millions de DEM. Le gouvernement allemand aurait encore rendu compte, dans ce document, des entretiens menés avec quatre investisseurs potentiels venant d’Allemagne, du Royaume-Uni et des États-Unis.

—     par une communication à la Commission du 3 avril 1996, il a, d’une part, résumé le plan de restructuration mis en oeuvre pour GS et, d’autre part, présenté le projet de production, l’évolution de la capacité et de la production ainsi que les prévisions, calculées sur ces bases, des résultats et du chiffre d’affaires jusqu’en 1998.

—     par des communications des 22 août 1996 et 9 avril 1997, il a transmis à la Commission un complément d’informations concernant les mesures d’investissement mises en oeuvre de 1993 à 1995.

32.
    Le gouvernement allemand relève en outre que les données économiques figurant dans les communications visées au point précédent ont été examinées au cours des nombreux entretiens tenus entre ses représentants et ceux de la Commission.

33.
    Or, jusqu’à l’ouverture de la procédure de contrôle des aides le 5 août 1997, la Commission n’aurait jamais laissé entendre qu’elle avait des doutes quant à la légalité, au titre des règles applicables en matière d’aides d’État, des subventions déjà versées ou prévues qui étaient décrites dans lesdites communications. La Commission n’aurait pas non plus mis en doute le caractère exhaustif des informations présentées par le gouvernement allemand.

34.
    Il s’ensuivrait que, en ce qui concerne lesdites subventions, la Commission aurait contribué à créer, pendant plus de trois ans, dans le chef du gouvernement allemand et de GS, une confiance légitime quant au fait qu’elle ne soulèverait aucune objection à l’encontre de l’accompagnement financier de la restructuration de cette entreprise.

35.
    En ce qui concerne, d’une part, les subventions déjà versées au moment de leur notification, le gouvernement allemand se réfère à l’arrêt du 24 novembre 1987, RSV/Commission (223/85, Rec. p. 4617), selon lequel la Commission ne disposerait pas d’un délai illimité pour juger, à l’aune des règles applicables en matière d’aides, de la légalité de telles subventions. Au contraire, selon cette jurisprudence, il serait interdit à la Commission d’en demander la restitution si, entre l’ouverture de la procédure principale de contrôle et la décision ordonnant la restitution, il s’est écoulé 26 mois. Or, ces principes auraient été manifestement méconnus en l’espèce, d’autant qu’il s’agirait d’un cas typique de restructuration d’entreprise par la Treuhandanstalt et la BvS, dont la Commission aurait bien connu les caractéristiques.

36.
    D’autre part, quant à la notification des mesures se trouvant encore à l’état de projet à ce moment, il résulterait de l’arrêt du 11 décembre 1973, Lorenz (120/73, Rec. p. 1471), que les États membres doivent, en règle générale, être clairement informés, dans les deux mois suivant l’envoi de la notification, de la poursuite de la procédure de contrôle. Or, le gouvernement allemand fait valoir que la Commission a laissé s’écouler deux à trois ans avant d’exprimer, dans sa lettre du 5 août 1997, des doutes quant à la légalité des projets de subventions notifiés en 1994 et en 1995.

37.
    La Commission fait valoir, à titre principal, que la correspondance antérieure au 6 juin 1997 évoquée par le gouvernement allemand est sans pertinence pour le cas d’espèce. Elle soutient que, si ce gouvernement a, le 9 juin 1994, effectivement transmis des informations sur les aides de 133,3 millions de DEM octroyées à GS jusqu’à la fin de l’année 1993, cette communication a eu lieu de manière informelle, contrairement aux exigences de l’article 93, paragraphe 3, du traité. Par ailleurs, la notification formelle faite le 29 juin 1994 ne porterait que sur des aides à l’investissement, d’un montant de 59,61 millions de DEM. Or, selon la Commission, cette notification partielle a été retirée le 2 décembre 1994 par les autorités allemandes, ce qui se serait traduit par l’absence de toute notification formelle des aides en cause.

38.
    À titre subsidiaire, la Commission relève, en premier lieu, que la confiance légitime dont se prévaut le gouvernement allemand n’est instaurée que lorsque la Commission s’exprime sans réserve et de façon expressément positive à l’égard des mesures notifiées.

39.
    En deuxième lieu, la Commission considère que le cas d’espèce ne présente aucune des caractéristiques observées dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt RSV/Commission, précité, invoqué par le gouvernement allemand.

40.
    En ce qui concerne, en troisième lieu, l’arrêt Lorenz, précité, la Commission fait valoir que le délai de deux mois y énoncé ne commence réellement à courir que lorsque la Commission dispose de toutes les informations nécessaires pour formuler sa décision. En tout état de cause, dans le cas d’espèce, la notification des aides accordées à GS serait intervenue le 6 juin 1997 et la procédure formelle d’examen aurait été ouverte le 5 août 1997, soit avant l’expiration de ce délai de deux mois. Au demeurant, la Commission souligne que, même en cas d’expiration dudit délai, l’État membre concerné ne peut, pour des motifs de sécurité juridique, mettre à exécution son projet d’aide qu’à condition qu’il en ait été donné préavis à la Commission (arrêt Lorenz, précité, point 6). Or, le gouvernement allemand n’aurait pas respecté ce principe en l’espèce.

Appréciation de la Cour

41.
    S’agissant des subventions déjà versées au moment de leur communication à la Commission et de la confiance légitime dont se prévaut le gouvernement allemand, il y a lieu de rappeler, d’une part, que, compte tenu du caractère impératif du contrôle des aides étatiques opéré par la Commission au titre de l’article 88 CE, les entreprises bénéficiaires d’une aide ne sauraient avoir, en principe, une confiance légitime dans la régularité de l’aide que si celle-ci a été accordée dans le respect de la procédure prévue par ledit article. En effet, un opérateur économique diligent doit normalement être en mesure de s’assurer que cette procédure a été respectée (voir, en ce sens, arrêt du 20 mars 1997, Alcan Deutschland, C-24/95, Rec. p. I-1591, point 25).

42.
    D’autre part, un État membre, dont les autorités ont octroyé une aide en violation des règles de procédure prévues à l’article 88 CE, ne saurait invoquer la confiance légitime de l’entreprise bénéficiaire pour se soustraire à l’obligation de prendre les mesures nécessaires en vue de l’exécution d’une décision de la Commission lui ordonnant de récupérer l’aide. Admettre une telle possibilité reviendrait, en effet, à priver les dispositions des articles 87 CE et 88 CE de tout effet utile, dans la mesure où les autorités nationales pourraient ainsi se fonder sur leur propre comportement illégal pour mettre en échec l’efficacité des décisions prises par la Commission en vertu de ces dispositions du traité CE (arrêts du 20 septembre 1990, Commission/Allemagne, C-5/89, Rec. p. I-3437, point 17, et du 14 janvier 1997, Espagne/Commission, C-169/95, Rec. p. I-135, point 48).

43.
    Certes, il est exact qu’il ressort du point 17 de l’arrêt RSV/Commission, précité, que le retard pris par la Commission pour rendre une décision en matière d’aides d’État peut, dans certaines circonstances, fonder chez le bénéficiaire d’une aide une confiance légitime de nature à empêcher la Commission d’enjoindre à l’État membre concerné d’ordonner la restitution de ladite aide.

44.
    Cependant, d’une part, les circonstances de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt RSV/Commission, précité, étaient exceptionnelles et ne présentent aucune similitude avec celles de l’espèce. En effet, la mesure en cause dans ledit arrêt concernait un secteur qui, depuis plusieurs années, était bénéficiaire d’aides d’État autorisées par la Commission et elle était destinée à faire face aux coûts supplémentaires d’une opération qui avait déjà bénéficié d’une aide autorisée.

45.
    D’autre part, ainsi que l’a relevé la Commission à juste titre, les autorités nationales constituant son interlocuteur direct, elles sont mieux informées sur l’état de la procédure de contrôle des aides et sur son issue et elles ont donc moins de possibilités que les bénéficiaires de celles-ci d’alléguer une atteinte portée à leur confiance légitime, spécialement, lorsque, comme en l’espèce, elles ont continué, durant la période litigieuse, à fournir, de leur propre initiative ou à la demande de la Commission, des informations complémentaires sur les mesures en cause.

46.
    De surcroît, le gouvernement allemand admet lui-même que la Commission avait demandé aux autorités allemandes de suspendre la procédure de notification pendant une période transitoire tout en en leur signalant qu’elle avait l’intention de reprendre l’examen du dossier dès qu’un accord de privatisation aurait été conclu.

47.
    Dans ces conditions, l’argumentation du gouvernement allemand visant à établir une atteinte portée à la confiance légitime des autorités nationales ne saurait être accueillie.

48.
    En ce qui concerne les mesures communiquées par le gouvernement allemand à la Commission avant leur mise à exécution, il convient de rappeler que, conformément à l’article 6, paragraphe 6, du sixième code des aides à la sidérurgie, si, à compter de la date de réception de la notification d’un projet quelconque, un délai de deux mois s’écoule sans que la Commission ait ouvert la procédure formelle d’examen des aides prévue à l’article 6, paragraphe 5, dudit code ou fait connaître sa position de quelque autre manière, les mesures projetées peuvent être mises à exécution, à condition que l’État membre ait au préalable informé la Commission de cette intention.

49.
    De même, il résulte d’une jurisprudence constante que l’objectif de l’article 88, paragraphe 3, CE, qui tend à prévenir la mise en vigueur d’aides contraires au traité CE, implique que l’interdiction énoncée à cet égard par la dernière phrase de cette disposition produise ses effets tout au long de la phase préliminaire. C’est pourquoi, en vue de tenir compte de l’intérêt des États membres à être fixés rapidement dans des domaines où la nécessité d’intervenir peut revêtir un caractère d’urgence, la Commission est tenue de faire diligence. Si la Commission, après avoir été informée par un État membre d’un projet tendant à instituer une aide, omet d’ouvrir la procédure contradictoire à l’issue d’un délai raisonnable, l’État membre peut mettre à exécution l’aide en cause après avoir adressé un préavis à la Commission, cette aide relevant alors du régime des aides existantes. S’inspirant des articles 173 du traité CE (devenu, après modification, article 230 CE) et 175 du traité CE (devenu article 232 CE), la Cour a considéré qu’un tel délai raisonnable ne devrait pas excéder deux mois (voir, en ce sens, notamment, arrêts Lorenz, précité, point 4, et du 15 février 2001, Autriche/Commission, C-99/98, Rec. p. I-1101, point 32). Par ailleurs, la Cour a également jugé que ce délai de deux mois constitue un délai impératif (arrêt Autriche/Commission, précité, points 72 à 74).

50.
    À cet égard, il importe de relever que le délai dont dispose la Commission pour procéder à l’examen préliminaire d’un projet d’aide et pour décider s’il y a lieu d’ouvrir une procédure contradictoire a été évalué, à la fois par le législateur communautaire dans le cadre du sixième code des aides à la sidérurgie et par la jurisprudence de la Cour, à deux mois, compte tenu de l’intérêt de l’État membre à être fixé rapidement dans des domaines où la nécessité d’intervenir peut revêtir un caractère d’urgence. Il s’ensuit que, eu égard à cet intérêt, l’examen préliminaire d’une aide projetée doit être, en principe, considéré comme urgent, sauf si l’État membre intéressé consent expressément à une prolongation du délai (voir, en ce sens, arrêt Autriche/Commission, précité, point 76).

51.
    En l’occurrence, eu égard à la mission spécifique de la Treuhandanstalt, de la BvS et de BMGB, il convient de constater, premièrement, que toutes les subventions examinées par la Commission dans la décision attaquée constituent des mesures prises, d’une part, dans le but de parvenir à une restructuration de GS et, d’autre part, dans la perspective d’une privatisation de cette entreprise.

52.
    Il y a lieu de relever, deuxièmement, que le gouvernement allemand a affirmé, à propos du retrait de la communication du 29 juin 1994, que ce retrait est intervenu alors que la Commission avait exigé des autorités allemandes qu’elles suspendent la procédure de notification pendant une période de transition, parce que la privatisation de GS n’était pas imminente. En effet, selon le gouvernement allemand, la Commission lui avait fait savoir plusieurs fois qu’elle voulait reprendre l’examen de la question — y compris celui des subventions déjà versées dont ce gouvernement l’avait déjà informée — dès que la restructuration de GS aurait progressé et qu’un accord de privatisation aurait été conclu.

53.
    Certes, il est exact que ce retrait ne concernait que la communication du 29 juin 1994. Force est toutefois de constater qu’il constitue un indice clair et non équivoque du fait que le gouvernement allemand a consenti à ce que la Commission examine toutes les mesures prises en faveur de GS en même temps que les circonstances de la restructuration et de la privatisation de cette entreprise.

54.
    Cette constatation est en outre corroborée par le fait que, malgré les nombreuses communications qu’il a adressées à la Commission, le gouvernement allemand a néanmoins jugé nécessaire de notifier à nouveau, par sa lettre du 6 juin 1997, les mesures de financement prises en faveur de GS.

55.
    Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que, dans le cas d’espèce, en ouvrant la procédure prévue à l’article 6, paragraphe 5, du sixième code des aides à la sidérurgie le 5 août 1997, c’est-à-dire moins de deux mois après la notification du 6 juin 1997 mentionnée au point précédent, la Commission n’a pas méconnu le délai prévu à l’article 6, paragraphe 6, dudit code et énoncé par la jurisprudence rappelée aux points 49 et 50 du présent arrêt.

56.
    Dès lors, eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, la première branche du deuxième moyen du gouvernement allemand doit être rejetée.

Sur la seconde branche

57.
    Le gouvernement allemand soutient que, en ne faisant aucune mention des circonstances déterminantes de la procédure de notification qui sont antérieures au 6 juin 1997, en ne faisant aucune référence aux effets des mesures litigieuses sur les échanges entre États membres et en n’indiquant pas non plus si ces mesures faussent ou menacent de fausser la concurrence, la décision attaquée viole l’obligation de motivation, telle que prévue aux articles 5, deuxième alinéa, quatrième tiret, CA, 15, premier alinéa, CA et 253 CE.

58.
    À cet égard, il convient de rappeler que, s’il est vrai que la motivation exigée par les dispositions mentionnées au point précédent doit faire apparaître d’une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’autorité communautaire, auteur de l’acte incriminé, de façon à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la Cour d’exercer son contrôle, il n’est toutefois pas exigé qu’elle spécifie tous les éléments de fait ou de droit pertinents. En effet, la question de savoir si la motivation d’une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte, ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêts du 29 février 1996, Commission/Conseil, C-122/94, Rec. p. I-881, point 29; du 15 mai 1997, Siemens /Commission, C-278/95 P, Rec. p. I2507, point 17, et du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink's France, C-367/95 P, Rec. p. I-1719, point 63).

59.
    S’agissant, plus particulièrement, d'une décision en matière d'aides d'État, la Cour a jugé que, s'il peut ressortir, dans certains cas, des circonstances mêmes dans lesquelles l'aide a été accordée qu'elle est de nature à affecter les échanges entre États membres et à fausser ou à menacer de fausser la concurrence, il incombe à tout le moins à la Commission d'évoquer ces circonstances dans les motifs de sa décision (arrêts du 13 mars 1985, Pays-Bas et Leeuwarder Papierwarenfabriek/Commission, 296/82 et 318/82, Rec. p. 809, point 24; du 24 octobre 1996, Allemagne e.a./Commission, C-329/93, C-62/95 et C-63/95, Rec. p. I-5151, point 52, et du 19 octobre 2000, Italie et Sardegna Lines/Commission, C-15/98 et C-105/99, Rec. p. I-8855, point 66).

60.
    Dans le cas d’espèce, les mesures de soutien litigieuses prises en faveur du secteur de production de GS relevant du traité CECA sont soumises à l’article 4, sous c), CA, qui ne requiert pas, pour que des aides soient considérées comme incompatibles avec le marché commun du charbon et de l’acier, qu’elles affectent les échanges entre États membres ou qu’elles faussent ou menacent de fausser la concurrence.

61.
    En ce qui concerne les aides destinées aux secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA, il importe de constater que, en invoquant aux points 54 à 63 des motifs de la décision attaquée, premièrement, le fait que GS appartient au secteur sensible de la sidérurgie, deuxièmement, la communication de la Commission, du 13 décembre 1988, relative à l’encadrement de certains secteurs sidérurgiques hors CECA (JO C 320, p. 3, ci-après l’«encadrement de certains secteurs sidérurgiques hors CECA»), qui comporte une présentation analytique de la situation du marché communautaire des produits sidérurgiques ne relevant pas du traité CECA et fait état de la crise longue et grave dans laquelle ce secteur a été plongé depuis les années 1970, troisièmement, la communication de la Commission, du 10 mars 1998, relative aux lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale (JO C 74, p. 9, ci-après les «lignes directrices concernant les aides à finalité régionale»), et, quatrièmement, le plafond de 35 % prévu pour les aides régionales aux nouveaux Länder accordées dans le cadre de la Gemeinschaftsaufgabe Verbesserung der regionalen Wirtschaftsstruktur (Tâche d’intérêt commun visant à l’amélioration de la structure de l’économie régionale, ci-après la «Gemeinschaftsaufgabe»), approuvée par la Commission, celle-ci a suffisamment indiqué les raisons pour lesquelles l’approbation d’une aide supérieure à 35 % constituerait une distorsion de concurrence inadmissible affectant les échanges entre États membres.

62.
    Quant aux circonstances de la procédure administrative qui sont antérieures au 6 juin 1997, il suffit de relever que, ainsi qu’il ressort des points 51 à 55 du présent arrêt, c’était à juste titre que la Commission a considéré la notification du 6 juin 1997 comme étant la seule pouvant être prise en compte au titre des articles 93, paragraphe 3, du traité et 6, paragraphe 6, du sixième code des aides à la sidérurgie. En outre, la Commission a affirmé, sans être contredite sur ce point par le gouvernement allemand, que cette notification concernait l’ensemble des mesures financières prises en faveur de GS. Il s’ensuit que l’absence d’une mention des communications ayant eu lieu avant le 6 juin 1997 ne constitue pas une violation de l’obligation de motivation résultant des articles 5, deuxième alinéa, quatrième tiret, CA, 15, premier alinéa, CA et 253 CE.

63.
    Dans ces conditions, la seconde branche du deuxième moyen du gouvernement allemand doit être rejetée. Dès lors, il convient de rejeter ce moyen dans son ensemble.

Sur le troisième moyen, tiré dune application des règles du traité CECA à des secteurs de production de GS ne relevant pas de ce traité

Arguments des parties

64.
    Par son troisième moyen, le gouvernement allemand fait valoir que, en ce qui concerne l’appréciation des aides au fonctionnement et des mesures sociales dont GS a bénéficié, la décision attaquée est entachée d’une erreur et doit être annulée, dans la mesure où la Commission aurait appliqué les règles du traité CECA et des codes des aides à la sidérurgie pour apprécier la légalité non seulement des mesures de soutien relatives au secteur de production de GS relevant de ce traité, mais également celles destinées aux secteurs de production de GS n’en relevant pas.

65.
    En premier lieu, selon le gouvernement allemand, la seule circonstance qu’une entreprise fabrique, dans un des quatre secteurs de son activité, des produits visés à l’annexe I CA ne peut pas suffire pour soumettre le reste de l’activité de cette entreprise au traité CECA. Cela serait, en l’espèce, d’autant plus vrai que les produits de GS ne relevant pas de cette annexe constitueraient plus de 90 % de son chiffre d’affaires externe. En effet, ce serait uniquement au niveau d’une des quatre installations de GS, à savoir l’installation de fonte, que seraient fabriqués des produits semi-finis (lingots et brames) mentionnés dans ladite annexe. Or, plus de 90 % de ces produits semi-finis ne seraient pas commercialisés par GS, mais seraient utilisés au sein de l’entreprise pour y subir une autre transformation dans la forge, le laminoir et la fonderie.

66.
    En deuxième lieu, le gouvernement allemand soutient que, ainsi qu’il résulterait des articles 50, paragraphe 2, CA et 80 CA, l’application du traité CECA à une entreprise dépend non pas de l’activité de cette entreprise considérée dans son ensemble, mais de ses produits. À l’appui de cette thèse, le gouvernement allemand invoque la jurisprudence de la Cour (arrêts du 17 décembre 1959, Société des fonderies de Pont-à-Mousson/Haute Autorité, 14/59, Rec. p. 445, 469, et du 15 décembre 1987, Deutsche Babcock, 328/85, Rec. p. 5119, point 9), d’où il ressortirait que l’applicabilité du traité CECA doit être déterminée en fonction des produits.

67.
    En troisième lieu, le gouvernement allemand fait valoir que, en appliquant le traité CECA à des produits ne relevant pas de celui-ci, la Commission contredit sa pratique antérieure, telle qu’elle résulte de l’encadrement de certains secteurs sidérurgiques hors CECA , de sa décision 97/21/CECA, CE, du 30 juillet 1996, concernant une aide d’État accordée à la Compañía Española de Tubos por Extrusión SA, située à Llodio (Álava) (JO 1997, L 8, p. 14), et de sa décision, du 29 juillet 1998, autorisant une aide à la restructuration en faveur de «Productos Tubulares» (JO C 409, p. 6).

68.
    En dernier lieu, le gouvernement allemand prétend que GS garantit, grâce à une comptabilité analytique séparée et vérifiée par des experts comptables indépendants, que les moyens mis à la disposition de son secteur de production relevant du traité CECA n’ont pas été utilisés pour d’autres secteurs, ni réciproquement. À cet égard, il rappelle que, au point 14 des motifs de la décision attaquée, la Commission a mentionné le rapport de la société d’expertise comptable KPMG, présenté par le gouvernement allemand en 1998, d’où il ressortirait très clairement qu’il existait chez GS, dès 1990, une comptabilité analytique séparée par unité de gestion qui permettait de ventiler très précisément l’affectation des fonds entre les différentes installations de production.

69.
    Il s’ensuivrait que la Commission a fondé la décision attaquée non pas sur la constatation effective d’une utilisation disproportionnée des moyens de production dans le secteur de production de GS relevant du traité CECA, mais sur la supposition, réfutée par le rapport d’expertise de KPMG, qu’il existait un risque de détournement.

70.
    Le gouvernement allemand conclut que les informations et les expertises qu’il a fournies établissent qu’il n’existait pas en l’espèce de risque de détournement. En outre, la Commission n’aurait pas constaté l’existence d’un tel détournement. Partant, le fait que la Commission, en l’espèce, a pris une décision différente de celle du 29 juillet 1998, mentionnée au point 67 du présent arrêt, sans motivation suffisante, constituerait une grave discrimination à l’encontre de GS et, en même temps, un abus du pouvoir d’appréciation dont dispose cette institution.

71.
    À titre principal, la Commission fait valoir, d’abord, qu’il résulte clairement de la jurisprudence de la Cour que le traité CECA s’applique à toutes les entreprises fabriquant des produits visés à l’annexe I CA, indépendamment de la question de savoir si ces entreprises commercialisent elles-mêmes ces produits ou se contentent de les réutiliser. L’élément déterminant ne serait donc pas la commercialisation mais la fabrication et, dans le cas de procédures intégrées, la fabrication de produits intermédiaires, puisqu’il existerait toujours le danger que les produits destinés en principe à un usage interne soient en fait mis sur le marché (arrêt Société des fonderies de Pont-à-Mousson/Haute Autorité, précité, p. 470 à 472).

72.
    Ensuite, l’arrêt Deutsche Babcock, précité, n’est pas, selon la Commission, pertinent en l’espèce, car il porterait sur l’applicabilité à des produits relevant du traité CECA d’un règlement du Conseil concernant le remboursement de droits à l’importation ou à l’exportation.

73.
    Enfin, il ressortirait de la jurisprudence de la Cour que l’applicabilité des règles de concurrence fixées par le traité CECA, y compris le régime des aides, dépend, par nature, non des produits mais des entreprises.

74.
    Dans l’hypothèse où cette argumentation ne serait pas retenue, la Commission fait valoir, à titre subsidiaire, que l’application du traité CECA et des codes des aides à la sidérurgie pour l’appréciation de l’ensemble des aides au fonctionnement et des mesures sociales dont GS a bénéficié est justifiée par l’existence d’un risque de détournement de ces aides au profit du secteur de production de GS relevant du traité CECA. En effet, ainsi qu’il résulterait des points 35 à 40 des motifs de la décision attaquée, les aides destinées apparemment aux secteurs de production ne relevant pas de ce traité auraient profité en réalité au secteur de production intégré en aval qui relève dudit traité, en ce sens que ce dernier secteur aurait bénéficié, par le jeu de la comptabilité interne, d’un prix plein fixé artificiellement.

75.
    En réponse à l’argumentation du gouvernement allemand selon laquelle la Commission n’aurait pas prouvé le détournement, mais se serait contentée d’évoquer un risque de détournement, la Commission soutient que l’absence de tout détournement constitue une condition préalable à l’examen d’aides au regard du traité CE. En d’autres termes, elle serait une condition de leur compatibilité avec ce traité. Dès lors, l’absence de détournement aurait dû être invoquée et prouvée par l’État membre, puisque c’est à lui qu’incomberait la charge de la preuve en matière de compatibilité des aides octroyées avec le marché commun. Or, les autorités allemandes n’auraient pas été en mesure de fournir cette preuve, de sorte qu’il conviendrait de s’en tenir à l’hypothèse d’une attribution des aides litigieuses au secteur de production de GS relevant du traité CECA.

Appréciation de la Cour

76.
    Il y a lieu de rappeler, premièrement, que, aux termes de l’article 4, sous c), CA, qui constitue le fondement du régime juridique des aides d’État relevant du traité CECA, sont déclarées incompatibles avec le marché commun du charbon et de l’acier et, en conséquence, interdites, dans les conditions prévues par ce traité, les subventions ou aides accordées par les États sous quelque forme que ce soit.

77.
    Il convient de relever, deuxièmement, que, en vertu des articles 80 CA et 81 CA, seules les entreprises exerçant une activité de production dans le domaine du charbon et de l’acier sont soumises aux règles du traité CECA et que, à cet égard, seuls les produits énumérés à l’annexe I CA sont couverts par les expressions « charbon » et « acier ».

78.
    Il s’ensuit qu’une entreprise n’est soumise à l’interdiction énoncée à l’article 4, sous c), CA que dans la mesure où elle exerce une telle activité de production (voir, en ce sens, arrêt Société des fonderies de Pont-à-Mousson/Haute Autorité, précité, p. 467 et 468).

79.
    En l’occurrence, il n’est pas contesté que GS exerce une activité de production relevant de l’annexe I CA. Néanmoins, le gouvernement allemand fait valoir que 90 % des activités commerciales de GS consistent en la vente de produits ne relevant pas du traité CECA et que 90 % des produits semi-finis produits par cette entreprise et relevant dudit traité ne sont pas commercialisés par elle, mais sont utilisés au sein de celle-ci.

80.
    À cet égard, il convient de rappeler, d’une part, que l’article 4, sous c), CA, à la différence de l’article 87, paragraphe 1, CE, ne requiert pas, pour que des aides soient considérées comme incompatibles avec le marché commun, qu’elles faussent ou menacent de fausser la concurrence. En effet, ladite disposition du traité CECA interdit toutes les aides sans aucune restriction, de sorte qu’elle ne saurait contenir de règle de minimis (voir, en ce sens, ordonnance du 25 janvier 2001, Lech-Stahlwerke/Commission, C-111/99 P, Rec. p. I-727, point 41).

81.
    D’autre part, il résulte de la jurisprudence de la Cour que la notion de «production», au sens de l’article 80 CA, ne saurait être interprétée en ce sens qu’elle vise uniquement la fabrication de produits destinés à être mis sur le marché. En effet, outre le fait qu’une telle interprétation aboutirait à exclure du champ d’application du traité CECA une fraction importante ou même prépondérante de la production des objets énumérés à l’annexe I CA, ce qui contreviendrait manifestement aux intentions des auteurs de ce traité, elle ferait dépendre de la structure juridique de l’entreprise productrice l’application dudit traité à un produit. Or, dans une telle hypothèse, serait exclue du champ d’application du traité CECA, notamment, la production des grandes usines intégrées, conséquence qui se heurterait tant à la lettre dudit traité qu’à son esprit et à son but (voir, en ce sens, arrêt Société des fonderies de Pont-à-Mousson/Haute Autorité, précité, p. 470 et 471).

82.
    Il y a lieu, dès lors, de conclure que ni le fait que la production de GS relevant du traité CECA est relativement faible ni celui que GS ne commercialise pas cette production ne sont de nature à exclure cette entreprise du champ d’application dudit traité et notamment de l’article 4, sous c), CA.

83.
    Toutefois, il convient de relever que, en l’espèce, la Commission a appliqué les règles du traité CECA et des codes des aides à la sidérurgie pour examiner non seulement les aides au fonctionnement et les mesures sociales destinées aux secteurs de production de GS relevant de ce traité mais également les mesures en faveur des secteurs de production de cette entreprise n’en relevant pas.

84.
    À cet égard, il y a lieu de constater que, dans le cas des entreprises fabriquant tant des produits relevant du traité CECA que des produits relevant du traité CE, l’application du traité CECA à des aides destinés à soutenir un secteur de production ne ressortissant pas au champ d’application de ce dernier peut être justifiée lorsqu’il existe un risque réel de détournement desdites aides au profit des activités de production incluses dans ce champ d’application. En effet, eu égard, d’une part, aux particularités du secteur de la sidérurgie et, d’autre part, à l’interdiction stricte et absolue des aides d’État énoncée à l’article 4, sous c), CA, il serait contraire à la finalité du système instauré par le traité CECA de soumettre aux règles moins strictes du traité CE l’examen des aides pouvant potentiellement bénéficier aux secteurs de production d’une entreprise qui relèvent du traité CECA.

85.
    Dès lors, il convient d’examiner si un tel risque de détournement était présent en l’espèce.

86.
    Aux points 35 à 41 des motifs de la décision attaquée, la Commission a suffisamment démontré l’existence d’un tel risque en invoquant notamment l’impossibilité de distinguer les aides accordées aux secteurs de production de GS relevant du traité CECA de celles octroyées à ses autres secteurs de production, en raison du fait que cette entreprise ne dispose pas de comptabilités séparées.

87.
    La Commission a même fourni des indices sérieux qu’un tel détournement a bien eu lieu. En effet, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 40 de ses conclusions, il ressort du tableau reproduit au point 36 des motifs de la décision attaquée, que les données comptables qui figurent dans le rapport de la société d’expertise comptable KPMG invoqué par le gouvernement allemand pour démontrer l’existence d’une comptabilité séparée contredisent celles qui figurent dans la notification du 6 juin 1997 pour la quasi-totalité des postes et confirment l’appréciation de la Commission, exposée au point 39 des motifs de la décision attaquée, quant à un détournement dans l’affectation des fonds.

88.
    Dès lors, c’est à juste titre que la Commission a apprécié au regard du traité CECA la légalité de l’ensemble des aides au fonctionnement et des mesures sociales prises en faveur de GS.

89.
    Dans ces conditions, le troisième moyen du gouvernement allemand doit être rejeté.

Sur le quatrième moyen, tiré dune appréciation erronée, au titre du cinquième code des aides à la sidérurgie, des aides à linvestissement destinées aux secteurs de production de GS relevant du traité CECA

90.
    Par son quatrième moyen, le gouvernement allemand fait valoir que la décision attaquée est illégale et doit donc être annulée, en ce qu’elle déclare, au point 51 de ses motifs, que les aides à l’investissement d’un montant de 13,3 millions de DEM octroyées à GS sont incompatibles avec le marché commun du charbon et de l’acier.

91.
    Le fait que la Commission ait conclu que lesdites aides à l’investissement ne peuvent pas être compatibles avec le traité CECA et l’article 5, troisième tiret, du cinquième code des aides à la sidérurgie, au seul motif qu’elles ne lui auraient pas été notifiées avant le 30 juin 1994, établirait que la Commission a adopté en l’espèce une attitude contradictoire, puisque c’est cette institution elle-même qui aurait demandé au gouvernement allemand de retirer sa communication du 29 juin 1994.

92.
    En tout état de cause, le gouvernement allemand fait valoir que la simple violation formelle du délai de notification n’autorise pas la Commission à demander la restitution définitive d’une aide si elle n’a ni examiné ni mis en cause sa légalité en droit matériel. À cet égard, il invoque la jurisprudence de la Cour relative aux aides d’État relevant du traité CE, qui est, selon lui, également applicable au domaine du traité CECA (arrêts du 14 février 1990, France/Commission, dit «Boussac Saint Frères», C-301/87, Rec. p. I-307, et du 11 juillet 1996, SFEI e.a., C-39/94, Rec. p. I-3547, point 43).

93.
    À cet égard, il importe de relever d’emblée que, contrairement aux dispositions du traité CE relatives aux aides d’État, qui habilitent de façon permanente la Commission à statuer sur leur compatibilité, les codes des aides n’attribuent cette compétence à la Commission que pour une période déterminée (arrêt du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C-74/00 P et C-75/00 P, non encore publié au Recueil, point 115).

94.
    Dès lors, si des aides que les États membres souhaitent faire autoriser au titre d’un code ne sont pas notifiées pendant la période qu’il prévoit à cet effet, la Commission ne peut plus se prononcer sur la compatibilité de ces aides au regard dudit code (voir arrêts du 3 octobre 1985, Allemagne/Commission, 214/83, Rec. p. 3053, points 40 à 47, et du 13 juillet 2000, Salzgitter/Commission, C-210/98 P, Rec. p. I-5843, points 49 à 55).

95.
    S’agissant du cinquième code des aides à la sidérurgie, il convient de rappeler que, conformément à son article 5, des aides régionales aux investissements prévues par des régimes généraux peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun jusqu’au 31 décembre 1994 à condition que l’entreprise bénéficiaire soit établie sur le territoire des nouveaux Länder et que l’aide soit accompagnée d’une réduction de l’ensemble de la capacité de production de ce territoire.

96.
    En outre, l’article 6, paragraphe 1, troisième phrase, dudit code dispose que les notifications des projets d’aides visés à l’article 5 de ce code doivent être faites à la Commission au plus tard le 30 juin 1994.

97.
    Les aides en cause n’ayant été notifiées à la Commission que le 6 juin 1997, il s’ensuit que, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 93 et 94 du présent arrêt, la Commission ne pouvait pas les examiner au regard du cinquième code des aides à la sidérurgie. Le fait que la Commission avait été informée desdites aides par la communication du 29 juin 1994, laquelle a, par la suite, été retirée par les autorités allemandes, n’est pas de nature à modifier cette conclusion.

98.
    La circonstance, alléguée par le gouvernement allemand et contestée par la Commission, que ce retrait avait eu lieu à la demande de celle-ci ne saurait en l’espèce avoir des conséquences juridiques.

99.
    Dès lors, le quatrième moyen du gouvernement allemand doit être rejeté.

Sur le cinquième moyen, tiré dune appréciation erronée des aides à linvestissement destinées aux secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA

100.
    Par son cinquième moyen, qui s’articule en deux branches le gouvernement allemand conteste l’appréciation de la Commission quant aux aides à l’investissement destinées aux secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA.

Sur la première branche

101.
    Le gouvernement allemand fait valoir que, en appréciant les aides à l’investissement destinées aux secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA, la Commission a, dans la décision attaquée, appliqué à tort les critères prévus par le cinquième code des aides à la sidérurgie concernant les aides régionales et non — comme ce gouvernement l’avait demandé — les lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté (JO 1994, C 368, p. 12, ci-après les «lignes directrices en matière de restructuration»). Or, le premier texte limiterait l’intensité des aides à 35 % du montant des investissements, tandis que le second autoriserait des aides allant jusqu’à 100 % de ce montant.

102.
    À cet égard, le gouvernement allemand invoque trois arguments.

103.
    En premier lieu, il soutient que les aides à l’investissement destinées aux secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA auraient dû être appréciées uniquement au regard du traité CE. Or, la Commission aurait considéré, au motif que GS, dans son ensemble, exerce son activité dans un «secteur sensible», que l’autorisation des aides prévue par le traité CE ne peut pas aller au-delà de ce que permettent le traité CECA et le cinquième code des aides à la sidérurgie. Un tel renvoi aux critères du traité CECA et de ce code serait illégal.

104.
    En deuxième lieu, le gouvernement allemand fait valoir que les activités de GS relevant du traité CE ne constituent pas un «secteur sensible» au sens du cadre juridique régissant les activités de la Treuhandanstalt ou des lignes directrices en matière de restructuration. Selon ce gouvernement, un secteur économique n’est pas un «secteur sensible» au seul motif qu’il souffre de «surcapacités sectorielles». En effet, les «secteurs sensibles» seraient seulement les secteurs économiques pour lesquels la Commission a fixé, dans ses communications ou d’autres actes juridiques, des critères matériels d’autorisation des aides d’État.

105.
    Or, l’encadrement de certains secteurs sidérurgiques hors CECA n’aurait pas pour effet de désigner un secteur sensible, puisqu’il se limiterait à imposer la notification des mesures prises en faveur de l’industrie de la fabrication de tubes. Cet encadrement n’aurait aucune conséquence juridique pour les secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA. Il n’impliquerait pas, en particulier, que le soutien d’un projet de restructuration soit limité à 35 % du montant des investissements.

106.
    En troisième lieu, le gouvernement allemand fait valoir que, en refusant d’appliquer en l’espèce les lignes directrices en matière de restructuration, qui avaient été appliquées dans des centaines de cas comparables de privatisations opérées par la Treuhandanstalt, la BvS et BMGB, la Commission a commis une grave erreur d’appréciation. L’affirmation de la Commission selon laquelle aucun plan de restructuration ne lui aurait été soumis serait fausse, car ledit gouvernement lui aurait présenté un tel plan de restructuration dans le cadre tant des communications effectuées de 1994 à 1996 que de la notification du 6 juin 1997. Le gouvernement allemand prétend que, si, ainsi qu’il est indiqué au point 58 des motifs de la décision attaquée, le rétablissement de la rentabilité de l’entreprise à la suite d’une privatisation constituait en l’espèce l’élément clé, la Commission aurait dû autoriser les aides en cause à concurrence de 100 %.

107.
    À cet égard, il convient de relever, d’abord, que c’est à juste titre que la Commission a considéré, au point 56 des motifs de la décision attaquée, que le cadre régissant les activités de la Treuhandanstalt, à savoir les lettres de la Commission au gouvernement allemand SG(91) D/17825 du 26 octobre 1991, SG(92) D/17613 du 8 décembre 1992 et SG(95) D/1062 du 1er février 1995, n’était pas applicable en l’espèce. En effet, ces lettres excluent du régime qu’elles instaurent, en tant que secteur sensible, le «secteur de l’acier» et non pas le «secteur de l’acier relevant du traité CECA».

108.
    Ensuite, il ressort des points 60 à 63 des motifs de la décision attaquée, d’une part, que la Commission a considéré que les lignes directrices concernant les aides à finalité régionale en vigueur au moment de l’octroi des aides constituaient l’unique base juridique applicable pour l’appréciation des aides à l’investissement en faveur des secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA. D’autre part, en considérant que lesdites aides devaient être appréciées au regard des plafonds autorisés pour les aides régionales à l’investissement octroyées dans le cadre du régime général de la Gemeinschaftsaufgabe, elle a conclu, conformément aux articles 87, paragraphe 3, CE et 88, paragraphe 2, CE, que lesdites aides n’étaient compatibles avec le marché commun qu’à concurrence de 35 %.

109.
    Force est de constater que, contrairement à ce que soutient le gouvernement allemand, il ne ressort aucunement de ce raisonnement que la Commission a appliqué les règles du traité CECA ou des codes des aides à la sidérurgie afin d’apprécier lesdites mesures.

110.
    Enfin, quant à l’argument par lequel le gouvernement allemand reproche à la Commission de ne pas avoir appliqué, en l’occurrence, les lignes directrices en matière de restructuration, il importe de relever que, ainsi qu’il ressort du point 53 des motifs de la décision attaquée, la République fédérale d’Allemagne a, le 14 octobre 1998, informé la Commission que, s’agissant des aides à l’investissement en cause, la Treuhandanstalt, EREL et la BvS avaient agi de fait comme des organismes payeurs d’aides régionales. Cette affirmation de la Commission n’ayant pas été contestée par le gouvernement allemand, il y a lieu de considérer que lesdites aides ont été octroyées en tant qu’aides régionales.

111.
    De surcroît, l’existence d’un plan de restructuration de GS accompagnant les aides à l’investissement en cause n’a pas été établie en l’espèce. En effet, le gouvernement allemand s’est contenté de faire référence de manière abstraite à ses échanges de correspondance avec la Commission, tant lors de la procédure administrative qu’après celle-ci, sans présenter d’éléments concrets susceptibles de démontrer qu’un véritable programme de restructuration cohérent et exhaustif avait été mis à exécution et communiqué à la Commission pour approbation.

112.
    Au demeurant, l’allégation du gouvernement allemand selon laquelle le flux de trésorerie de GS a été positif pour la première fois lors de l’exercice 1998 n’est pas susceptible, à elle seule, de prouver le rétablissement durable de la rentabilité de cette entreprise.

113.
    Dès lors, la première branche du cinquième moyen doit être rejetée comme non fondée.

Sur la seconde branche

114.
    Par la seconde branche de son cinquième moyen, le gouvernement allemand fait valoir que la décision attaquée est entachée d’une erreur de droit en ce que la Commission s’est abstenue d’autoriser les aides à l’investissement destinées aux secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA en application de l’article 87, paragraphe 2, sous c), CE. Il soutient que la restructuration de GS et son accompagnement par la Treuhandanstalt, la BvS et BMGB constituent un cas typique d’application de cette disposition, notamment parce que Gröditz (Allemagne) est particulièrement affecté, en tant qu’ancien lieu d’implantation sidérurgique, par les conséquences de la planification économique socialiste et que le niveau économique moyen de cette zone n’est pas près d’atteindre celui des Länder qui formaient la République fédérale d’Allemagne avant la réunification allemande.

115.
    À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 87, paragraphe 2, sous c), CE, sont compatibles avec le marché commun «les aides octroyées à l’économie de certaines régions de la République fédérale d’Allemagne affectées par la division de l’Allemagne, dans la mesure où elles sont nécessaires pour compenser les désavantages économiques causés par cette division».

116.
    Après la réunification de l’Allemagne, cette disposition n’a été abrogée ni par le traité sur l’Union européenne ni par le traité d’Amsterdam (arrêt du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, C-156/98, Rec. p. I-6857, point 47).

117.
    Il convient toutefois de relever que, s’agissant d’une dérogation au principe général d’incompatibilité des aides d’État avec le marché commun, énoncé à l’article 87, paragraphe 1, CE, l’article 87, paragraphe 2, sous c), CE doit faire l’objet d’une interprétation stricte (voir arrêt du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, précité, point 49).

118.
    En outre, ainsi que la Cour l’a jugé, il y a lieu, pour l’interprétation d’une disposition de droit communautaire, de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (arrêts du 17 novembre 1983, Merck, 292/82, Rec. p. 3781, point 12; du 21 février 1984, St. Nikolaus Brennerei und Likörfabrik, 337/82, Rec. p. 1051, point 10, et du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, précité, point 50).

119.
    Par ailleurs, si, à la suite de la réunification de l’Allemagne, l’article 87, paragraphe 2, sous c), CE a vocation à s’appliquer aux nouveaux Länder, cette application ne peut se concevoir que dans les mêmes conditions que celles qui étaient applicables dans les anciens Länder pour la période antérieure à la date de cette réunification (voir arrêt du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, précité, point 51).

120.
    À cet égard, les termes «division de l’Allemagne» se réfèrent, historiquement, à l’établissement en 1948 de la ligne de partage entre les deux zones occupées. Dès lors, les «désavantages économiques causés par cette division» ne sauraient viser que les désavantages économiques provoqués dans certaines régions allemandes par l’isolement qu’a engendré l’établissement de cette frontière physique, tels que la rupture de voies de communication ou la perte de débouchés faisant suite à l’interruption des relations commerciales entre les deux parties du territoire allemand (voir arrêt du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, précité, point 52).

121.
    En revanche, la conception du gouvernement allemand, selon laquelle l’article 87, paragraphe 2, sous c), CE permettrait de compenser intégralement le retard économique incontestable dont souffrent les nouveaux Länder, méconnaîtrait tant le caractère dérogatoire de cette disposition que son contexte et les objectifs qu’elle poursuit (voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, précité, point 53).

122.
    En effet, les désavantages économiques dont souffrent globalement les nouveaux Länder n’ont pas été causés directement par la division géographique de l’Allemagne, au sens de l’article 87, paragraphe 2, sous c), CE (voir arrêt du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, précité, point 54).

123.
    Force est de constater, dès lors, que les différences de développement entre les anciens et les nouveaux Länder s’expliquent par d’autres causes que la coupure géographique résultant de la division de l’Allemagne et, notamment, par les régimes politico-économiques différents mis en place dans chaque partie de l’Allemagne (voir arrêt du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, précité, point 55).

124.
    Il y a donc lieu de conclure que le gouvernement allemand n’a fourni aucun élément de nature à établir que les aides destinées aux secteurs de production de GS ne relevant pas du traité CECA étaient nécessaires pour compenser un désavantage économique causé par la division de l’Allemagne.

125.
    Dans ces conditions, la seconde branche du cinquième moyen doit être rejetée. Dès lors, il convient de rejeter ce moyen dans son ensemble.

Sur le sixième moyen, tiré dune appréciation erronée, au titre des règles applicables en matière daides, de la procédure de privatisation de GS

126.
    Par son sixième moyen, le gouvernement allemand conteste le bien-fondé de l’appréciation de la Commission relative à la procédure de privatisation de GS. Il fait valoir, d’une part, que la décision attaquée est entachée d’une erreur dans la mesure où elle se fonde sur la constatation que la privatisation de GS, pour un prix de vente négatif de 340 millions de DEM, n’était pas, du point de vue du détenteur du capital, une solution plus favorable, en termes de coûts, que la liquidation. Selon ledit gouvernement, cette constatation se base sur une appréciation inexacte de la situation juridique en Allemagne, ainsi que sur une interprétation erronée du critère de l’investisseur privé au titre des règles applicables en matière d’aides.

127.
    D’autre part, la décision attaquée serait également entachée d’une erreur dans la mesure où elle met en doute le fait que la procédure d’appel d’offres, menée au niveau international dans le cas de GS, ait satisfait aux critères d’une «procédure sans condition, ouverte et transparente», conformément aux lignes de conduite en matière de privatisation publiées par la Commission dans le XXIIIe Rapport sur la politique de concurrence (1993) (ci-après les «lignes de conduite»).

128.
    Quant au principe de la privatisation de GS et à l’application par la Commission du critère de l’investisseur privé, le gouvernement allemand rappelle que celle-ci a considéré, en se référant à la jurisprudence de la Cour (arrêt du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, C-278/92 à C-280/92, Rec. p. I-4103, point 22), que, sur les coûts de la liquidation de GS, estimés par la société d’expertise comptable KPMG à 475 millions de DEM, seuls 94 millions de DEM devaient entrer en ligne de compte aux fins d’une comparaison, cette somme correspondant à la valeur de la liquidation, évaluée par les experts-comptables, au-delà de laquelle la BvS ne se porterait pas garante.

129.
    Le gouvernement allemand soutient, en premier lieu, que la jurisprudence invoquée par la Commission n’est pas pertinente en l’espèce. En effet, l’arrêt du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, précité, se serait fondé sur des constatations relatives à la responsabilité d’une entité publique détentrice du capital au sens du droit espagnol. Toutefois, en droit allemand, la situation se présenterait différemment. Ainsi que la Commission l’aurait reconnu au point 81 des motifs de la décision attaquée, les prêts d’associé consentis par les actionnaires publics successifs de GS n’auraient pas pu servir à satisfaire les créanciers sur la masse de la faillite. En prenant en compte ce montant, les coûts de la liquidation s’élèveraient à 292 millions de DEM.

130.
    En deuxième lieu, le gouvernement allemand conteste les constatations de la Commission, figurant au point 80, premier alinéa, sous a), des motifs de la décision attaquée, selon lesquelles la BvS se serait portée garante des dettes de GS non en tant que détentrice du capital, mais en tant qu’organisme public. Selon ce gouvernement, les garanties octroyées par la BVS ne constituent pas des mesures de soutien à caractère étatique. Elles seraient, au contraire, comparables en tous points aux garanties, courantes dans le secteur privé, qui sont accordées par des holdings en faveur de leurs filiales. De telles holdings devraient également, lorsqu’il s’agit de déterminer les coûts de liquidation d’une filiale, prendre en compte ces garanties. Il serait tout à fait indifférent à cet égard de savoir si la BvS était détentrice du capital de GS directement ou indirectement, par l’intermédiaire d’une société de gestion.

131.
    En troisième lieu, le gouvernement allemand fait valoir que la décision attaquée ne tient pas compte du fait que, selon le droit allemand, la BvS, en tant que détentrice du capital, est redevable, en cas de liquidation, des coûts d’assainissement du lieu d’implantation, évalués par les experts-comptables à 87 millions de DEM. En vertu du droit public allemand, tout détenteur du capital d’une société liquidée est responsable de la pollution du sol par celle-ci et d’autres circonstances nécessitant un assainissement.

132.
    En quatrième lieu, il conviendrait également d’avoir égard aux coûts de la liquidation elle-même, évalués par les experts-comptables à 57 millions de DEM. Comme le détenteur du capital en est redevable, ce montant devrait également être pris en compte dans la comparaison des coûts de la privatisation par rapport à ceux de la liquidation. Pour autant que ces coûts seraient à charge de la société de gestion contrôlée par la BvS, il faut, selon le gouvernement allemand, ajouter que cette société profite, en ce qui concerne les coûts de liquidation, d’un droit d’exonération envers la BvS.

Appréciation de la Cour

133.
    En vue de déterminer si la privatisation de GS pour un prix de vente négatif de 340 millions de DEM comporte des éléments d’aide d’État, il y a lieu d’apprécier si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé d’une taille qui puisse être comparée à celle des organismes gérant le secteur public aurait pu être amené à procéder à des apports de capitaux de cette importance dans le cadre de la vente de ladite entreprise ou aurait opté pour la liquidation de celle-ci (voir, en ce sens, notamment, arrêt du 16 mai 2002, France/Commission, C-482/99, Rec. p. I-4397, point 70).

134.
    À cet égard, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour, il faut établir une distinction entre les obligations que l’État doit assumer en tant qu’actionnaire d’une société et les obligations qui peuvent lui incomber en tant que puissance publique (arrêt du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, précité, point 22).

135.
    S’agissant du cas d’espèce, il convient également de tenir compte du fait qu’il n’est pas contesté que GS est une entreprise en difficulté, à laquelle différents organismes publics ont, durant plusieurs années, alloué des crédits sans intérêts et sans obligation de remboursement.

136.
    C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner l’argumentation du gouvernement allemand visant à établir que la liquidation de GS aurait été plus coûteuse que sa privatisation.

137.
    En l’occurrence, la République fédérale d’Allemagne chiffre à 475 millions de DEM le coût qu’aurait entraîné la liquidation de GS. Ce montant est ventilé en 196 millions de DEM correspondant aux prêts d’associé, 49 millions de DEM pour des crédits bancaires garantis, 26 millions de DEM pour des dettes diverses, 147 millions de DEM représentant des provisions pour frais divers (dont 87 millions de DEM pour les frais de réhabilitation du site et 22 millions de DEM pour les frais d’un plan social ne résultant pas d’une obligation contraignante) et 57 millions de DEM pour le coût de la procédure de liquidation proprement dite, notamment les frais de fonctionnement et de suspension des activités durant la période de liquidation.

138.
    En ce qui concerne, d’abord, les garanties de crédits octroyées en faveur de GS, il y lieu de constater qu’elles ont été constituées en faveur d’une entreprise en difficulté qui n’a fourni aucune contrepartie adéquate. Or, un investisseur privé n’aurait normalement pas accordé des crédits de ce type à GS. Ainsi que la Commission l’a relevé au point 45 des motifs de la décision attaquée, les garanties accordées par l’État à une entreprise en difficulté doivent être considérées comme des aides d’un montant égal au prêt garanti. Il s’ensuit que les obligations qui découlent de celui-ci pour l’entreprise résultent donc clairement de l’octroi des aides et ne peuvent, de ce fait, être intégrées dans le calcul du coût normal de la liquidation.

139.
    S’agissant, ensuite, des frais de réhabilitation du site invoqués par le gouvernement allemand, il convient d’observer que, étant donné que, ainsi qu’il ressort du dossier, la valeur de vente du site concerné n’était que de 9 millions de DEM, même si l’entreprise était obligée de procéder à la réhabilitation, un investisseur privé n’aurait pas mis de fonds supplémentaires à la disposition de cette dernière en cas de liquidation. En tout état de cause, le gouvernement allemand n’a fourni aucune information précise susceptible d’établir que, dans un cas tel que celui de l’espèce, le détenteur du capital de l’entreprise en liquidation aurait été obligé, le cas échéant, d’assumer à titre personnel l’ensemble de la charge de la réhabilitation du site.

140.
    En ce qui concerne, enfin, les prêts d’associé, ils constituent, compte tenu des difficultés de GS et des conditions attachées aux crédits, des aides à part entière, comme l’expose le point 44 des motifs de la décision attaquée. L’absence de remboursement de ces prêts occasionnerait donc la perte d’une créance découlant de l’octroi des aides, c’est-à-dire résultant d’une mesure prise par l’État membre en tant que puissance publique, qui n’aurait pu émaner d’un investisseur privé et ne pourrait, de ce fait, être prise en compte dans le calcul du coût de la liquidation. À supposer même que, en cas d'insolvabilité, les prêts d'associé aient été considérés, conformément à la législation allemande, comme des fonds propres qui ne peuvent pas être réclamés pour satisfaire les créanciers sur la masse de la faillite et aient été inclus dans les coûts de la liquidation, ces coûts ne s'élèveraient qu'à 292 millions de DEM, montant nettement inférieur aux 340 millions de DEM qu’a coûté la privatisation.

141.
    Dans ces conditions, il convient de conclure que c’est à juste titre que la Commission a constaté au point 82 des motifs de la décision attaquée que la liquidation de GS aurait été moins coûteuse et que, dès lors, un investisseur privé aurait opté pour cette solution.

142.
    En ce qui concerne, par ailleurs, l’allégation du gouvernement allemand selon laquelle la procédure de privatisation de GS a satisfait aux critères d’une «procédure sans conditions, ouverte et transparente» énoncés dans les lignes de conduite, il suffit de constater que, indépendamment de la valeur juridique de ces lignes de conduite, à supposer même que cette allégation ait été établie, elle n’aurait pas été susceptible de remettre en cause la constatation selon laquelle l’option de privatiser GS à un prix de vente négatif ne répondait pas au critère de l’investisseur privé et comportait donc des éléments d’aide d’État.

143.
    Il s’ensuit que le sixième moyen du gouvernement allemand doit également être rejeté.

144.
    Dans ces conditions, eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours du gouvernement allemand comme non fondé.

Sur les dépens

145.
    Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République fédérale d’Allemagne aux dépens et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

1)     Le recours est rejeté.

2)      La République fédérale d Allemagne est condamnée aux dépens.

Rodríguez Iglesias
Puissochet

Wathelet

Schintgen

Timmermans

Gulmann

Edward

La Pergola

Skouris

von Bahr

Cunha Rodrigues

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 janvier 2003.

Le greffier

Le président

R. Grass

G. C. Rodríguez Iglesias


1: Langue de procédure: l'allemand