Language of document : ECLI:EU:C:2009:588

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. M. POIARES MADURO

présentées le 30 septembre 2009 (1)

Affaire C‑135/08

Janko Rottmann

contre

Freistaat Bayern

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesverwaltungsgericht (Allemagne)]

«Citoyenneté européenne – Perte – Déchéance de la nationalité de l’État membre d’origine au moment de l’acquisition de la nationalité d’un autre État membre – Retrait de la nouvelle nationalité en raison de manœuvres frauduleuses ayant accompagné son acquisition»





1.        Le présent renvoi préjudiciel pose pour la première fois la question de l’étendue du pouvoir discrétionnaire dont disposent les États membres pour déterminer leurs nationaux. Dans la mesure où la citoyenneté de l’Union européenne, qui dépend, certes, de la jouissance de la condition nationale d’un État membre, est instaurée par le traité, la compétence des États membres pour fixer les conditions d’acquisition et de perte de la nationalité peut‑elle encore être exercée sans aucun droit de regard du droit communautaire? Tel est, en substance, le point en litige dans cette affaire. Celle-ci invite ainsi à préciser les rapports entre les concepts de nationalité d’un État membre et de citoyenneté de l’Union, question, faut‑il le souligner, largement déterminante de la nature de l’Union européenne.

I –    Le litige au principal et les questions préjudicielles

2.        Le requérant au principal, M. Rottmann, est né à Graz (Autriche) en 1956 et a acquis la citoyenneté autrichienne de par sa naissance sur le territoire de cet État. Par l’effet de l’adhésion de la République d’Autriche à l’Union, le 1er janvier 1995, il est également devenu citoyen de l’Union en sa qualité de ressortissant autrichien.

3.        Suite à une enquête diligentée à son encontre par la police fédérale de Graz en raison de soupçons pesant sur lui d’activités frauduleuses graves dans l’exercice de sa profession, il a été entendu en qualité d’inculpé, en juillet 1995, par le Landesgericht für Strafsachen (juridiction pénale) de Graz. Par la suite, il a quitté l’Autriche et s’est installé à Munich (Allemagne). En février 1997, le Landesgericht für Strafsachen de Graz a lancé à son encontre un mandat d’arrêt national.

4.        En février 1998, le demandeur au principal a sollicité sa naturalisation en Allemagne auprès de la ville de Munich. Dans le formulaire qu’il a dû remplir à cet effet, il a dissimulé le fait qu’il faisait l’objet de poursuites pénales en Autriche. Le document de naturalisation du 25 janvier 1999 a été délivré au demandeur le 5 février 1999. Par l’effet de l’acquisition de la nationalité allemande, M. Rottmann a perdu la nationalité autrichienne, conformément au droit autrichien de la nationalité (2).

5.        En août 1999, la ville de Munich a été informée par les autorités autrichiennes que M. Rottmann faisait l’objet d’un mandat d’arrêt dans leur pays et qu’il avait déjà été entendu en qualité d’inculpé en juillet 1995 par le Landesgericht für Strafsachen de Graz. Au vu de ces informations, la partie défenderesse au principal, le Land de Bavière, a retiré la naturalisation, par décision du 4 juillet 2000, au motif que le requérant avait dissimulé qu’il faisait l’objet d’une information judiciaire en Autriche et qu’il avait par conséquent obtenu frauduleusement la nationalité allemande. Pour prendre cette décision de retrait, les autorités allemandes se sont fondées sur l’article 48, paragraphe 1, du code de procédure administrative du Land de Bavière (BayVwVfG), d’après lequel «un acte administratif illégal peut, alors même qu’il est devenu définitif, être retiré, en tout ou en partie, avec effet pour l’avenir ou rétroactivement. […]».

6.        Le requérant a formé un recours en annulation contre cette décision, en faisant valoir que le retrait de sa naturalisation le placerait, en méconnaissance du droit international public, en situation d’apatridie et que le statut d’apatride entraînerait également, en violation du droit communautaire, la perte de la citoyenneté de l’Union. Son recours ayant été rejeté en première instance et en appel, M. Rottmann a introduit un recours en révision devant le Bundesverwaltungsgericht.

7.        Nourrissant des doutes sur la compatibilité de la décision de retrait litigieuse et de l’arrêt en appel avec le droit communautaire et, notamment, avec l’article 17, paragraphe 1, CE, en raison de la perte de la citoyenneté européenne qui accompagne normalement la perte de la nationalité allemande et l’apatridie qui en résulte, le Bundesverwaltungsgericht a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Le droit communautaire s’oppose‑t‑il à la conséquence juridique de la perte de la citoyenneté de l’Union européenne (ainsi que des droits et libertés fondamentales qui y sont liés), résultant du fait que le retrait d’une naturalisation dans un État membre (Allemagne) obtenue par le biais d’une fraude intentionnelle, retrait qui est en soi légal en application du droit national applicable (allemand), a pour conséquence que la personne concernée devient apatride du fait que, comme tel est le cas en l’espèce du requérant, elle ne retrouve pas la nationalité qu’elle avait à l’origine, en raison des dispositions applicables du droit de l’autre État membre (Autriche).

2)      Dans le cas où la première question appelle une réponse affirmative: l’État membre (Allemagne) qui a naturalisé un citoyen de l’Union européenne et entend procéder au retrait d’une naturalisation obtenue frauduleusement doit‑il s’abstenir de le faire si ou aussi longtemps que ce retrait de la naturalisation aurait pour conséquence la perte de la citoyenneté de l’Union (ainsi que des droits et libertés fondamentales qui y sont liés) ou l’État membre (Autriche) de la nationalité initiale est‑il tenu, pour respecter le droit communautaire, d’interpréter, d’appliquer ou encore d’adapter son droit national de manière à éviter une telle conséquences juridique»?

II – Sur la recevabilité du renvoi préjudiciel

8.        Avant de tenter d’apporter une réponse aux questions posées, il convient d’écarter l’objection soulevée par certains États membres et par la Commission des Communautés européennes, selon laquelle la situation en cause, en ce qu’elle ne revêtirait qu’une dimension purement interne, ne relèverait pas du champ du droit communautaire, si bien que le renvoi préjudiciel serait irrecevable.

9.        La citoyenneté de l’Union, fût‑elle constitutive d’un «statut fondamental des ressortissants des États membres» (3), n’a pas, il est vrai, pour objectif d’étendre le champ d’application matériel du traité à des situations internes n’ayant aucun rattachement avec le droit communautaire (4). Elle ne saurait donc être invoquée dans de telles situations.

10.      Il serait cependant à l’évidence erroné de considérer, comme cela semble ressortir des observations de certains États membres, qu’on est en présence d’une situation purement interne, sous prétexte que la matière faisant l’objet du litige, ici l’acquisition et la perte de la nationalité, serait réglée exclusivement par le droit national. Qu’il suffise de rappeler qu’il a été jugé que le fait que les règles régissant le nom d’une personne ressortissent à la compétence des États membres ne saurait les faire nécessairement échapper à l’emprise du droit communautaire (5). Certes, sauf à élargir le domaine du traité, les dispositions nationales relatives à l’acquisition et à la perte de la nationalité ne sauraient entrer dans le champ d’application du droit communautaire au seul motif qu’elles peuvent conduire à l’acquisition ou à la perte de la citoyenneté de l’Union. Cependant, même si une situation a trait à une matière dont la réglementation ressortit à la compétence des États membres, elle relève du champ d’application ratione materiae du droit communautaire, dès lors qu’elle comporte un élément d’extranéité, c’est‑à‑dire une dimension transfrontalière. Ne constitue, en effet, une situation purement interne qu’une situation dont tous les éléments se cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre (6).

11.      À cet égard, on ne saurait à bon droit contester la présence d’un élément d’extranéité au motif que, une fois la nationalité allemande obtenue, les rapports juridiques du requérant au principal avec la République fédérale d’Allemagne seraient devenus ceux d’un ressortissant de cet État et que, en particulier, le retrait de la naturalisation est un acte administratif allemand adressé à un ressortissant allemand résidant en Allemagne. C’est faire fi de l’origine de la situation de M. Rottmann. C’est en faisant usage de la liberté de circulation et de séjour attachée à la citoyenneté de l’Union dont il bénéficiait en sa qualité de ressortissant autrichien que M. Rottmann s’est rendu en Allemagne et y a fixé sa résidence en 1995, afin d’ouvrir la voie à une procédure de naturalisation. Si c’est conformément aux conditions imposées par le droit national qu’il a acquis le statut de ressortissant allemand et perdu celui de ressortissant autrichien, ce n’est donc qu’à la suite de l’exercice d’une liberté fondamentale (7) que le droit communautaire lui confère. Or, de jurisprudence établie, des situations relatives à l’exercice des libertés fondamentales garanties par le traité, notamment de celles relevant de la liberté de circuler et de séjourner sur le territoire des États membres telle que conférée par l’article 18 CE, ne sauraient être considérées comme des situations internes sans rattachement au droit communautaire (8).

12.      A ainsi été considérée comme entrant dans le champ du droit communautaire la situation d’un contribuable résidant en Allemagne qui ne pouvait, en vertu de la réglementation allemande, déduire de son revenu imposable dans cet État membre la pension alimentaire versée à son ex‑épouse résidant en Autriche, alors qu’il en aurait eu le droit si celle‑ci résidait encore en Allemagne. Il en a été jugé ainsi, bien que le contribuable n’eût pas lui‑même usé du droit de libre circulation, au motif que l’exercice par son ex‑épouse du droit, dont elle était titulaire en vertu de l’article 18 CE, de circuler et de séjourner librement dans un autre État membre avait été de nature à influer sur la possibilité pour son ex‑époux de déduire de son revenu imposable en Allemagne la pension alimentaire qu’il lui versait (9). De même, ne constitue pas une situation purement interne le refus de versement par les autorités polonaises d’une pension d’invalidité pour victimes civiles de guerre à une de leurs ressortissantes, dès lors qu’il était justifié par le fait qu’elle avait établi sa résidence en Allemagne et que, partant, l’exercice par cette dernière de son droit de circulation et de séjour attaché à sa citoyenneté de l’Union avait eu une incidence sur le droit au versement de ladite prestation (10).

13.      Il est vrai que, en l’espèce, le lien entre le retrait de la naturalisation litigieux et la liberté fondamentale communautaire est moins direct: le retrait est motivé non par l’exercice de celle‑ci mais par la fraude intentionnelle du requérant au principal. Il n’en reste pas moins que l’exercice par M. Rottmann de son droit, en tant que citoyen de l’Union, de circuler et de séjourner dans un autre État membre a eu une incidence sur le changement de son état civil: c’est bien parce qu’il a transféré sa résidence en Allemagne qu’il avait pu remplir les conditions pour acquérir la nationalité allemande, à savoir un séjour régulier habituel sur le territoire. L’existence d’un tel lien suffit pour admettre le rattachement au droit communautaire. Pour preuve, le refus de changement de nom patronymique a été rattaché au droit communautaire, alors même qu’il avait été opposé par les autorités belges à des enfants nés et résidant depuis toujours en Belgique et possédant la nationalité belge, au motif qu’ils étaient également ressortissants espagnols et pouvaient donc, à ce titre, être considérés comme des ressortissants d’un État membre séjournant légalement sur le territoire d’un autre État membre. Pourtant, le refus de changement de nom patronymique n’était pas lié à la liberté de circulation attachée à la citoyenneté de l’Union, fondé qu’il était sur le motif que le droit belge ne retenait traditionnellement que le patronyme du père comme nom de famille des enfants (11).

III – Sur la réglementation étatique des questions de nationalité «dans le respect du droit communautaire»

14.      Le renvoi préjudiciel porte, en substance, sur la question de savoir si le droit communautaire restreint le pouvoir étatique de réglementer les questions de nationalité lorsqu’une personne qui avait à l’origine la nationalité d’un État membre et qui l’a perdue à la suite de l’acquisition par voie de naturalisation de la nationalité d’un autre État membre se voit retirer cette dernière obtenue frauduleusement et, par voie de conséquence, devient apatride et perd la citoyenneté de l’Union. Dans l’affirmative, est‑ce l’ordre juridique de la nationalité d’origine ou celui de la nationalité retirée qui doit veiller, au regard du droit communautaire, à éviter la conséquence juridique de l’apatridie?

15.      Les interrogations soulevées par le juge a quo sont fondées sur les considérations suivantes. La citoyenneté de l’Union présente un caractère dérivé et complémentaire par rapport à la nationalité comme il ressort des termes de l’article 17, paragraphe 1, CE, d’après lesquels «est citoyen de l’Union toute personne ayant la nationalité d’un État membre. La citoyenneté de l’Union complète la citoyenneté nationale et ne la remplace pas» (12). Il en résulte l’absence de mode autonome d’acquisition et de perte de la citoyenneté de l’Union. L’acquisition et la perte de la citoyenneté de l’Union sont fonction de l’acquisition et de la perte de la nationalité d’un État membre; la citoyenneté de l’Union présuppose la nationalité d’un État membre.

16.      Cette relation entre les deux statuts (la nationalité étatique et la citoyenneté de l’Union) s’explique par la nature et la signification mêmes de la citoyenneté de l’Union. Alors que la citoyenneté était traditionnellement comprise, en tandem avec la nationalité, comme désignant la condition juridique et politique dont jouissent les ressortissants d’un État à l’intérieur de leur communauté politique, la citoyenneté européenne renvoie au statut juridique et politique reconnu aux nationaux d’un État au‑delà de leur communauté politique étatique. Le caractère dérivé de la citoyenneté de l’Union par rapport à la nationalité d’un État membre découle de sa compréhension comme une «citoyenneté interétatique» (13), qui confère aux ressortissants d’un État membre des droits dans les autres États membres, essentiellement le droit de circulation et de séjour et le droit à l’égalité de traitement (14), et aussi vis-à-vis de l’Union elle-même. C’est donc, fort logiquement, la nationalité d’un État qui fait d’un individu le citoyen à la fois de cet État et, simultanément, de l’Union européenne. Elle confère aux ressortissants des États membres une citoyenneté au‑delà de l’État.

17.      Dans ce contexte, il est entendu que la détermination des conditions d’acquisition et de perte de la nationalité, – et donc de la citoyenneté de l’Union –, relève de la compétence exclusive des États membres. On sait, en effet, que la nationalité peut se définir comme le lien juridique de droit public unissant un individu à un État donné, lien dont il résulte que ledit individu devient titulaire d’un ensemble de droits et d’obligations. La caractéristique de ce rapport de nationalité est qu’il est fondé sur un lien particulier de solidarité à l’égard de l’État en cause et sur la réciprocité de droits et de devoirs (15). Avec la nationalité, l’État définit son peuple. Ce qui est en cause, au travers du rapport de nationalité, c’est la constitution d’une communauté nationale et il va, dès lors, de soi qu’un État membre peut librement en tracer les contours en déterminant les personnes qu’il considère comme ses ressortissants.

18.      Ainsi en dispose traditionnellement le droit international. Déjà, la Cour permanente de justice internationale avait dit pour droit que les questions de nationalité sont, en principe, comprises dans le domaine réservé des États (16). La Cour internationale de justice avait ensuite confirmé que le droit international laisse à chaque État le soin de régler l’attribution de sa propre nationalité et de conférer celle‑ci par la naturalisation octroyée par ses propres organes conformément à sa législation (17). Enfin, plus récemment, la Convention européenne sur la nationalité, adoptée le 6 novembre 1997 par le Conseil de l’Europe et entrée en vigueur le 1er mars 2000, a réitéré, en son article 3, paragraphe 1, qu’il appartient à chaque État de déterminer par sa législation quels sont ses ressortissants.

19.      L’Union ne se départit pas de la solution reçue en droit international qu’elle estime être constitutive d’un «principe de droit coutumier international» (18). Ainsi l’ont voulu les États membres. Cela ressort explicitement de la déclaration nº 2 relative à la nationalité d’un État membre, jointe par les États membres à l’acte final du traité sur l’Union européenne (19), sans qu’il puisse être valablement objecté que les déclarations annexées aux traités, à la différence des protocoles, n’en partagent pas la valeur juridique. En effet, la jurisprudence communautaire leur reconnaît à tout le moins une portée interprétative (20). Qu’il suffise, en particulier, de rappeler qu’une déclaration unilatérale du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, par laquelle cet État précisait quelles personnes devaient être considérées comme ses ressortissants au sens du droit communautaire, a été jugée devoir être prise en considération pour l’interprétation du traité et, plus précisément, en vue de déterminer le champ d’application ratione personae de ce dernier (21). A fortiori, une portée similaire est‑elle conférée à une déclaration émanant de la collectivité des États membres telle que la déclaration nº 2 relative à la nationalité d’un État membre. En outre, aucune disposition de droit primaire ni aucun acte de droit dérivé ne réglemente la procédure et les conditions d’acquisition et de perte de la nationalité d’un État membre ni de la citoyenneté de l’Union. Enfin et surtout, une jurisprudence constante confirme que, en l’état actuel du droit communautaire, cette matière ressortit à la compétence des États membres (22). La Cour en a, en particulier, déduit que le Royaume‑Uni avait pu, dans deux déclarations successives annexées au traité d’adhésion, librement déterminer quelles étaient les catégories de citoyens britanniques qui devaient être considérés comme des ressortissants nationaux au sens et aux fins de l’application du droit communautaire (23).

20.      Il n’en reste pas moins que, dès lors que la situation entre dans le champ du droit communautaire, l’exercice par les États membres de leurs compétences retenues ne saurait être discrétionnaire. Il est contraint par l’obligation de respecter les règles communautaires. La jurisprudence en ce sens est constante et connue. On se bornera à rappeler, à titre illustratif, qu’il a été dit pour droit que les questions de fiscalité directe (24), de nom patronymique (25), de pensions pour victimes civiles de guerre (26), quoique entrant dans le champ de compétence nationale, doivent être réglementées par les États membres dans le respect du droit communautaire. Fort logiquement, la solution n’est pas différente en ce qui concerne la réglementation des conditions d’acquisition et de perte de la nationalité. La Cour a déjà eu l’occasion de préciser, dans l’affaire Micheletti, que la compétence étatique en la matière «doit», elle aussi, «être exercée dans le respect du droit communautaire» (27).

21.      Cependant, la Cour n’a, pour l’heure, pas encore suffisamment précisé la portée de cette réserve. Elle en a simplement déduit le principe selon lequel un État membre ne doit pas restreindre les effets de l’attribution de la nationalité d’un autre État membre en posant une condition supplémentaire pour la reconnaissance de cette nationalité en vue de l’exercice d’une liberté fondamentale prévue par le traité (28).

22.      Qu’en est‑il cependant de la portée de cette obligation de respect du droit communautaire au regard de la perte de la citoyenneté européenne du requérant au principal, sachant qu’elle résulte du retrait de sa naturalisation allemande obtenue par fraude et de l’impossibilité de recouvrer sa nationalité autrichienne qu’il avait obtenue légalement par sa naissance? En d’autres termes, que déduire de ladite obligation quant à la réglementation d’un État membre qui ne concerne que sa propre nationalité et non celle d’un autre État membre, en particulier lorsque l’application de cette réglementation emporte la perte du statut fondamental de citoyen de l’Union légalement acquis comme ressortissant d’un premier État membre?

23.      Tenter une réponse présuppose de bien comprendre les rapports entre la nationalité d’un État membre et la citoyenneté de l’Union. Il s’agit de deux notions tout à la fois inextricablement liées et autonomes (29). La citoyenneté de l’Union suppose la nationalité d’un État membre mais c’est aussi un concept juridique et politique autonome par rapport à celui de nationalité. La nationalité d’un État membre n’ouvre pas seulement l’accès à la jouissance des droits conférés par le droit communautaire, elle fait de nous des citoyens de l’Union. La citoyenneté européenne constitue davantage qu’un ensemble de droits qui, en eux‑mêmes, pourraient être octroyés même à ceux qui ne la possèdent pas. Elle présuppose l’existence d’un lien de nature politique entre les citoyens européens, bien qu’il ne s’agisse pas d’un lien d’appartenance à un peuple. Ce lien politique unit, au contraire, les peuples d’Europe. Il repose sur leur engagement mutuel d’ouvrir leurs communautés politiques respectives aux autres citoyens européens et de construire une nouvelle forme de solidarité civique et politique à l’échelle européenne. Il n’exige pas l’existence d’un peuple mais il est fondé sur l’existence d’un espace politique européen, duquel émergent des droits et des devoirs. En ce qu’elle n’implique pas l’existence d’un peuple européen, la citoyenneté procède conceptuellement d’un découplage avec la nationalité. Ainsi qu’un auteur l’a observé, le caractère radicalement innovant du concept de citoyenneté européenne réside dans le fait que «l’Union appartient à, est composée de, citoyens qui par définition ne partagent pas la même nationalité» (30). Au contraire, en faisant de la nationalité d’un État membre une condition pour être un citoyen européen, les États membres ont voulu marquer que cette nouvelle forme de citoyenneté ne remet pas en question l’allégeance première à nos communautés politiques nationales. De la sorte, ce lien avec la nationalité des différents États membres constitue une reconnaissance du fait qu’il peut exister (en fait, qu’il existe) une citoyenneté qui n’est pas déterminée par la nationalité. Tel est le miracle de la citoyenneté de l’Union: elle renforce les liens qui nous unissent à nos États (dans la mesure où nous sommes des citoyens européens précisément parce que nous sommes des nationaux de nos États) et, en même temps, elle nous en émancipe (dans la mesure où nous sommes à présent des citoyens au‑delà de nos États). L’accès à la citoyenneté européenne passe par la nationalité d’un État membre, qui est réglementée par le droit national, mais, comme toute forme de citoyenneté, elle constitue la base d’un nouvel espace politique, duquel émergent des droits et des devoirs qui sont fixés par le droit communautaire et ne dépendent pas de l’État. C’est cela qui, en retour, légitime l’autonomie et l’autorité de l’ordre juridique communautaire. C’est pour cette raison que, s’il est vrai que la nationalité d’un État membre conditionne l’accès à la citoyenneté de l’Union, il est tout aussi vrai que l’ensemble de droits et d’obligations attachés à cette dernière ne peut pas être limité de manière injustifiée par la première. En d’autres termes, ce n’est pas que l’acquisition et la perte de la nationalité (et, partant, de la citoyenneté de l’Union) sont en soi régies par le droit communautaire, mais les conditions de l’acquisition et de la perte de la nationalité doivent être compatibles avec les règles communautaires et respecter les droits du citoyen européen.

24.      On ne saurait cependant raisonnablement en déduire l’impossibilité absolue de retirer la nationalité, au cas où ledit retrait emporterait la perte de la citoyenneté de l’Union. Cela reviendrait à exclure la compétence des États membres pour réglementer les conditions de la nationalité de leur propre État et affecterait ainsi dans son essence l’autonomie des États membres en la matière au mépris de l’article 17, paragraphe 1, CE. On en viendrait, en effet, à la solution paradoxale selon laquelle l’accessoire déterminerait le principal: le maintien de la citoyenneté de l’Union permettrait d’exiger le maintien de la nationalité d’un État membre.

25.      Pareille solution contreviendrait également au devoir, imposé à l’Union par l’article 6, paragraphe 3, UE, de respecter l’identité nationale des États membres, dont la composition de la communauté nationale constitue, à l’évidence, un élément essentiel.

26.      À l’inverse, il ne saurait à bon droit être soutenu, à l’instar de certains États membres, que seul l’exercice des droits découlant de la citoyenneté de l’Union conférée par la possession de la nationalité d’un État membre tombe sous le contrôle du droit communautaire et non les conditions d’acquisition et de perte de la nationalité d’un État membre en tant que telles. Dans la mesure où la possession de la nationalité d’un État membre détermine la possession de la citoyenneté de l’Union et, partant, la jouissance des droits et libertés qui lui sont explicitement liés par le traité, et encore le bénéfice de prestations sociales auxquelles elle permet de prétendre (31), on ne saurait dénier une quelconque portée à l’obligation de respect du droit communautaire sur l’exercice de la compétence des États membres en matière de nationalité. Ladite obligation ne peut donc pas ne pas faire peser quelque contrainte sur l’acte étatique de retrait de la nationalité, dès lors que celui‑ci emporte la perte de la citoyenneté de l’Union et sauf à affecter la compétence de l’Union pour déterminer les droits et devoirs de ses citoyens.

27.      La doctrine est de cet avis (32). Des indices jurisprudentiels laissent d’ores et déjà entendre que la nationalité doit être réglementée par les États membres dans le respect du droit communautaire. La Cour a, en particulier, refusé de tenir compte, aux fins de l’application du statut des fonctionnaires, de la naturalisation italienne d’une fonctionnaire de nationalité belge, au motif qu’elle lui avait été imposée, par application du droit italien, sans possibilité d’y renoncer en raison de son mariage avec un Italien, en violation du principe communautaire d’égalité de traitement entre fonctionnaires masculins et féminins (33).

28.      Et il serait, là encore, erroné de considérer qu’en raison des spécificités du droit de la nationalité, seules certaines règles communautaires, essentiellement les principes généraux du droit et les droits fondamentaux, seraient susceptibles d’être opposées à l’exercice de la compétence étatique en la matière. Théoriquement, n’importe quelle norme de l’ordre juridique communautaire peut être invoquée, dès lors que les conditions d’acquisition et de perte de la nationalité fixées par un État membre entreraient en conflit avec celle‑ci.

29.      Notamment, sans doute les États membres doivent‑ils respecter le droit international. L’obligation pour les États statuant en matière de nationalité de se conformer au droit international constitue, en effet, une règle généralement admise, qui a fait l’objet d’une codification à l’article 1er de la convention de La Haye du 12 avril 1930 concernant certaines questions relatives aux conflits de lois sur la nationalité (34). Or, les règles de droit international général et la coutume internationale constituent des normes auxquelles la Communauté européenne est soumise et qui font partie de l’ordre juridique communautaire (35). Ainsi donc de la règle imposant aux États qui statuent en matière de nationalité de respecter le droit international. On peine cependant à voir quelle norme de droit international le retrait de la naturalisation en cause dans la présente affaire aurait enfreinte. Certes, et à supposer même que ces deux textes puissent, à défaut d’avoir été ratifiés par tous les États membres de l’Union, être considérés comme l’expression de règles générales de droit international, tant la convention sur la réduction des cas d’apatridie du 30 août 1961 que la convention européenne sur la nationalité, adoptée le 6 novembre 1997 par le Conseil de l’Europe, tendent à poser le principe selon lequel l’apatridie doit être évitée. Néanmoins, elles autorisent, par exception, les États à retirer à un individu sa nationalité, quand bien même ledit retrait emporterait son apatridie, lorsque la nationalité a été acquise, comme dans l’espèce au principal, à la suite de manœuvres frauduleuses ou de fausses informations (36).

30.      Parmi les règles susceptibles de contraindre le pouvoir législatif des États membres en matière de nationalité figurent également les normes de droit communautaire primaire et les principes généraux du droit communautaire. C’est ainsi qu’il a été fait mention en doctrine (37) et par la République hellénique dans ses observations du principe de loyauté communautaire, posé par l’article 10 CE, qui pourrait être affecté dans l’hypothèse où un État membre procéderait, sans consultation de la Commission et de ses partenaires, à une naturalisation massive injustifiée de ressortissants d’États tiers.

31.      En ce qui concerne le retrait de la naturalisation en cause dans la présente affaire, d’aucuns pourraient lui opposer le principe de protection de la confiance légitime dans le maintien du statut de citoyen de l’Union. Cependant, on ne voit pas en quoi cette norme aurait été violée en l’absence d’une confiance digne de protection dans le chef de l’intéressé qui a fourni les fausses informations ou s’est rendu coupable de fraudes et qui a ainsi obtenu illégalement la nationalité allemande. D’autant que, on l’a vu, le droit international autorise la perte de la nationalité en cas de fraude et que la citoyenneté de l’Union est liée à la possession de la nationalité d’un État membre.

32.      Le retrait de la naturalisation litigieux pourrait, en particulier, également se heurter aux dispositions du traité relatives à la citoyenneté de l’Union et aux droits et libertés qui lui sont attachés. Les règles étatiques en matière de nationalité ne sauraient, en effet, restreindre la jouissance et l’exercice des droits et libertés constitutifs du statut de citoyenneté de l’Union sans justification. La doctrine le soutient (38). La jurisprudence, elle‑même, semble d’ores et déjà orientée en ce sens. Doit être en particulier mentionnée la justification de la solution déduite, dans l’affaire Micheletti e.a., de l’obligation de respect du droit communautaire: l’interdiction faite à un État membre de poser, en vue de l’exercice d’une liberté fondamentale prévue par le traité, une condition supplémentaire pour la reconnaissance de la nationalité attribuée par un autre État membre a été fondée non seulement sur le souci de protéger la compétence d’un État membre pour déterminer la qualité de ressortissant national mais aussi sur celui d’éviter toute variation du champ d’application personnel des libertés fondamentales communautaires d’un État membre à l’autre selon les règles édictées par ces derniers en matière de nationalité (39). Ainsi, serait sans doute constitutive d’une violation du droit de circulation et de séjour conféré au citoyen de l’Union par l’article 18 CE une règle étatique qui prévoirait la perte de la nationalité en cas de transfert de résidence dans un autre État membre (40).

33.      En l’espèce, le retrait de la nationalité n’est pas lié à l’exercice des droits et libertés découlant du traité et la condition établie par la République fédérale d’Allemagne, qui a déterminé en l’espèce la perte de la nationalité, ne méconnaît aucune autre règle communautaire. Au contraire, il me semble que le fait pour un État de retirer sa nationalité obtenue par fraude correspond à un intérêt légitime, qui est de s’assurer de la loyauté de ses ressortissants. En effet, faire montre de loyauté à l’égard de l’État dont il est le ressortissant est un des devoirs constitutifs du statut dont jouit un individu en sa qualité de national et ce devoir commence dès le moment de l’acquisition de la nationalité. Or, un individu qui, lors du processus d’obtention de la nationalité, fournit délibérément de fausses informations ne peut être considéré comme loyal vis‑à‑vis de l’État choisi. C’est, du reste, la raison pour laquelle le droit international n’interdit pas la perte de la nationalité dans ce cas, quand bien même elle emporterait l’apatridie.

34.      En ce qui concerne, enfin, la réintégration dans la nationalité autrichienne, le droit communautaire n’impose aucune obligation de ce type, même si, à défaut, le requérant au principal demeure apatride et, partant, privé de la citoyenneté de l’Union. En décider autrement serait méconnaître que la perte de la citoyenneté autrichienne est le fruit de la décision personnelle du citoyen de l’Union d’acquérir délibérément une autre nationalité (41) et que le droit communautaire ne s’oppose pas non plus à la réglementation autrichienne selon laquelle un Autrichien perd sa citoyenneté lorsqu’il acquiert, à sa demande, une nationalité étrangère (42). Certes, il pourrait être considéré que le retrait de la naturalisation allemande ayant un effet rétroactif, M. Rottmann n’aurait jamais eu la nationalité allemande, si bien que l’évènement déclenchant la perte de la nationalité autrichienne n’aurait jamais eu lieu. En conséquence, il aurait un droit à une réintégration automatique dans la nationalité autrichienne. Mais il s'agit là d'un raisonnement qu'il appartient au droit autrichien de décider s'il y a lieu à l'appliquer. Aucune règle communautaire ne saurait l’imposer. Il n'en irait autrement que si le droit autrichien prévoyait déjà une solution semblable dans des cas similaires, et, dans ce cas, au nom du principe communautaire d’équivalence.

IV – Conclusion

35.      Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions posées par le Bundesverwaltungsgericht comme suit:

«1)      Le droit communautaire ne s’oppose pas à la perte de la citoyenneté de l’Union européenne (ainsi que des droits et libertés fondamentales qui y sont liés), résultant du fait que le retrait d’une naturalisation dans un État membre a pour conséquence que la personne concernée devient apatride du fait qu’elle ne retrouve pas la nationalité qu’elle avait à l’origine, en raison des dispositions applicables du droit de l’autre État membre, dès lors que le retrait de la naturalisation n’est pas motivé par l’exercice des droits et libertés découlant du traité ni n’est fondé sur un autre motif interdit par le droit communautaire.

2)      Le droit communautaire n’impose pas la réintégration dans la nationalité initialement détenue.»


1 – Langue originale: le français.


2 – Aux termes de l’article 27, paragraphe 1, de la loi fédérale autrichienne relative à la nationalité (Staatsbürgerschaftsgesetz, BGBl. 1985, p. 311): «Quiconque acquiert, sur sa demande, en raison d’une déclaration ou de son consentement exprès, une nationalité étrangère perd la nationalité autrichienne s’il ne lui a pas été expressément accordé le droit de garder sa nationalité autrichienne».


3 – Arrêts du 20 septembre 2001, Grzelczyk (C‑184/99, Rec. p. I‑6193, point 31), et du 11 septembre 2007, Schwarz et Gootjes‑Schwarz (C‑76/05, Rec. p I‑6849, point 86).


4 – Voir arrêts du 5 juin 1997, Uecker et Jacquet (C‑64/96 et C‑65/96, Rec. p. I‑3171, point 23); du 2 octobre 2003, Garcia Avello (C‑148/02, Rec. p. I‑11613, point 26); du 12 juillet 2005, Schempp (C‑403/03, Rec. p. I‑6421, point 20); du 26 octobre 2006, Tas‑Hagen et Tas (C‑192/05, Rec. p. I‑10451, point 23); du 1er avril 2008, Gouvernement de la Communauté française et Gouvernement wallon (C‑212/06, Rec. p. I‑1683, point 39), et du 22 mai 2008, Nerkowska (C‑499/06, Rec. p. I‑3993, point 25).


5 – Voir arrêt Garcia Avello, précité (points 20 à 29).


6 – Voir arrêts du 16 janvier 1997, USSL nº 47 di Biella (C‑134/95, Rec. p. I‑195, point 23); du 11 octobre 2001, Khalil e.a. (C‑95/99 à C‑98/99 et C‑180/99, Rec. p. I‑7413, point 69), et du 25 juillet 2008, Metock e.a. (C‑127/08, Rec. p. ‑6241, point 77).


7 – Ainsi que la Cour l’a explicitement qualifiée (voir arrêt du 11 juillet 2002, D’Hoop, C‑224/98, Rec. p. I‑6191, point 29).


8 – Voir arrêts Garcia Avello, précité (point 24); Schwarz et Gootjes‑Schwarz, précité (point 87); du 15 mars 2005, Bidar (C‑209/03, Rec. p. I‑2119, point 33); Schempp, précité (points 17 et 18), ainsi que Nerkowska, précité (points 26 à 29).


9 – Voir arrêt Schempp, précité (points 13 à 25).


10 – Voir arrêt Nerkowska, précité (points 20 à 29).


11 – Voir arrêt Garcia Avello, précité (points 20 à 39).


12 – La seconde phrase de l’article 17 CE ayant été ajoutée par le traité d’Amsterdam.


13 – Voir, sur ce point, l’analyse de Schönberger, C., «European Citizenship as Federal Citizenship. Some Citizenship Lessons of Comparative Federalism», REDP, vol. 19, n° 1, 2007, p. 61; du même auteur, Unionsbürger: Europasföderales Bürgerrecht in vergleichender Sicht, Tübingen, 2005.


14 – Voir, sur ce point, la synthèse de Iliopoulou, A., Libre circulation et non‑discrimination, éléments du statut de citoyen de l’Union européenne, éd. Bruylant, 2008.


15 – Comme la Cour elle‑même s’est plu à le relever (voir arrêt du 17 décembre 1980, Commission/Belgique, 149/79, Rec. p. 3881, point 10), et comme, auparavant, la Cour internationale de justice (voir affaire Nottebohm (deuxième phase), arrêt du 6 avril 1955, CIJ, Rec. p. 4, sp. 23: «la nationalité est un lien juridique ayant à sa base un fait social de rattachement, une solidarité effective d’existence, d’intérêts, de sentiments jointe à une réciprocité de droits et de devoirs»).


16 – Voir avis consultatif du 7 février 1923 sur les décrets de nationalité promulgués en Tunisie et au Maroc, série B n° 4 (1923), sp. 24.


17 – Voir affaire Nottebohm (deuxième phase), précitée, sp. 20 et 23.


18 – Voir arrêt du 20 février 2001, Kaur (C‑192/99, Rec. p. I‑1237, point 20).


19 – Voir le texte (JO 1992, C 191, p. 98): «La Conférence déclare que, chaque fois que le traité instituant la Communauté européenne fait référence aux ressortissants des États membres, la question de savoir si une personne a la nationalité de tel ou tel État membre est réglée uniquement par référence au droit national de l’État concerné. Les États membres peuvent préciser, pour information, quelles sont les personnes qui doivent être considérées comme leurs ressortissants aux fins poursuivies par la Communauté en déposant une déclaration auprès de la présidence; ils peuvent, le cas échéant, modifier leur déclaration».


20 – Sur la portée juridique des déclarations, voir mes conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission (C‑64/05 P, Rec. p. I‑11389, point 34).


21 – Voir arrêt Kaur, précité (point 24).


22 – Voir arrêts du 7 juillet 1992, Micheletti e.a. (C‑369/90, Rec. p. I‑4239, point 10); du 11 novembre 1999, Mesbah (C‑179/98, Rec. p. I‑7955, point 29), et Kaur, précité (point 19).


23 – Voir arrêt Kaur, précité.


24 – Voir arrêt du 13 décembre 2005, Marks & Spencer (C‑446/03, Rec. p. I‑10837, point 29).


25 – Voir arrêt Garcia Avello, précité (point 25).


26 – Voir arrêts précités Tas‑Hagen et Tas (points 21 et 22), et Nerkowska (point 23).


27 – Arrêt Micheletti e.a., précité (point 10). Pour une confirmation, voir, ensuite, arrêts précités Mesbah (point 29), et Kaur (point 19).


28 – Voir arrêt Micheletti e.a., précité. On rappellera que, dans cette affaire, le Royaume d’Espagne refusait le bénéfice de la liberté d’établissement à un ressortissant italien qui possédait en même temps la nationalité argentine, au motif que la législation espagnole le considérait comme citoyen argentin, pays dans lequel il avait sa résidence habituelle. Voir, aussi, arrêts Garcia Avello, précité (point 28), et du 19 octobre 2004, Zhu et Chen (C‑200/02, Rec. p. I‑9925, point 39).


29 – Pour une analyse approfondie des liens et différences entre la nationalité et la citoyenneté, voir Closa, C., «Citizenship of the Union and Nationality of the Member States», CMLRev, 1995, p. 487.


30 – Weiler, J., The Constitution of Europe, Cambridge University Press, 1999, p. 344.


31 – Voir notamment, arrêts D’Hoop, précité; du 23 mars 2004, Collins (C‑138/02, Rec. p. I‑2703); du 7 septembre 2004, Trojani (C‑456/02, Rec. p. I‑7573); Bidar, précité, et du 18 novembre 2008, Förster (C‑158/07, non encore publié au Recueil).


32 – Voir en ce sens, notamment, Hall, S., «Loss of Union Citizenship in Breach of fundamental Rights», ELR, 1996, p. 129; Kotalakidis, N., Von der nationalen Staatsangehörigkeit zur Unionsbürgerschaft: die Person und das Gemeinwesen, Nomos Verlagsgesellschaft, Baden‑Baden, 2000, sp. 305 à 316.


33 – Voir arrêt du 20 février 1975, Airola/Commission (21/74, Rec. p. 221).


34 – Le texte de cette stipulation énonce, en effet: «Il appartient à chaque État de déterminer par sa législation quels sont ses nationaux. Cette législation doit être admise par les autres États, pourvu qu’elle soit en accord avec les conventions internationales, la coutume internationale et les principes de droit généralement reconnus en matière de nationalité» (Recueil des Traités de la Société des Nations, vol. 179, p. 89).


35 – Voir, notamment, arrêts du 24 novembre 1992, Poulsen et Diva Navigation (C‑286/90, Rec. p. I‑6019, points 9 et 10), et du 16 juin 1998, Racke (C‑162/96, Rec. p. I‑3655, points 45 et 46).


36 – Voir, respectivement, article 8, paragraphe 2, sous b), de la convention sur la réduction des cas d’apatridie et article 7, paragraphe 1, sous b), de la convention européenne sur la nationalité.


37 – Voir de Groot, G. R., «The relationship between nationality legislation of the Member States of the European Union and European citizenship», in La Torre, M., (ed.), European citizenship: an institutional challenge, Kluwer Law International 1998, p. 115, sp. 123 et 128 à 135; Zimmermann, A., «Europaïsches Gemeinschaftsrecht und Staatsangehörigkeitsrecht der Mitgliedstaaten unter besonderer Berücksichtigung der Probleme mehrfacher Staatsangehörigkeit», EuR, 1995, n° ½, p. 54, sp. 62‑63.


38 – Voir de Groot, G. R., op. cit. , sp. 136 à 146.


39 – Voir arrêt Micheletti e.a., précité (points 10 à 12).


40 – Pour d’autres exemples, voir de Groot, G. R., loc. cit.


41 – En décider autrement reviendrait également, d’une certaine manière, à considérer que le lien initial de nationalité n’a pas été entièrement dissous par l’acquisition de la nationalité allemande. Autrement, on comprendrait difficilement pourquoi, au prétexte d’éviter l’apatridie et la perte consécutive de la citoyenneté de l’Union, la République d’Autriche serait le seul État membre à être soumis à des obligations au regard de la récupération par le requérant au principal de la nationalité d’un État membre.


42 – Il pourrait être concevable que, dans le futur, les États membres décident que l’acquisition de la nationalité d’un État membre ne puisse jamais entraîner la perte de la nationalité d’un autre État membre. Ce n’est cependant pas une obligation qui puisse, à mon avis, être déduite des traités actuels [voir, pour les raisons qui justifieraient une telle initiative des États membres, Kochenov, D., A Glance at StateNationality/EU Citizenship Interaction (Using the Requirement to Renounce One’s Community Nationality upon Naturalising in the Member State of Residence as a Pretext), talk at the 11th bi-annual EUSA Conference, April 2009, Los Angeles CA, non encore publié].