ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

13 juin 2019 (*)

« Renvoi préjudiciel – Aides d’État – Décision 2009/402/CE – Plans de campagne dans le secteur des fruits et légumes mis à exécution par la République française – Constat de l’incompatibilité de l’aide – Ordre de récupération – Champ d’application de la décision – Comités économiques agricoles »

Dans l’affaire C‑505/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Conseil d’État (France), par décision du 26 juillet 2018, parvenue à la Cour le 30 juillet 2018, dans la procédure

Copebi SCA

contre

Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer),

en présence de :

Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. E. Regan (rapporteur), président de chambre, MM. C. Lycourgos, E. Juhász, M. Ilešič et I. Jarukaitis, juges,

avocat général : Mme E. Sharpston,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour Copebi SCA, par Me N. Coutrelis, avocate,

–        pour le gouvernement français, par M. D. Colas ainsi que par Mmes C. Mosser et A.-L. Desjonquères, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par MM. B. Stromsky, X. Lewis et W. Farrell, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la décision 2009/402/CE de la Commission, du 28 janvier 2009, concernant les « plans de campagne » dans le secteur des fruits et légumes mis à exécution par la France (JO 2009, L 127, p. 11).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Copebi SCA à Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer), au sujet de l’annulation d’un titre de recettes émis à son encontre par FranceAgriMer, aux fins du recouvrement d’une somme correspondant au remboursement d’aides publiques qui lui ont été versées entre les années 1998 et 2002 et des intérêts correspondants.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 Le règlement (CE) no 659/1999

3        L’article 1er, sous h), du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), intitulé « Définitions », prévoit :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

[...]

 h)       “parties intéressées” : tout État membre et toute personne, entreprise ou association d’entreprises dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi d’une aide, en particulier le bénéficiaire de celle-ci, les entreprises concurrentes et les associations professionnelles. »

4        L’article 6, paragraphe 1, de ce règlement, intitulé « Procédure formelle d’examen », dispose :

« La décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen récapitule les éléments pertinents de fait et de droit, inclut une évaluation préliminaire, par la Commission, de la mesure proposée visant à déterminer si elle présente le caractère d’une aide, et expose les raisons qui incitent à douter de sa compatibilité avec le marché commun. La décision invite l’État membre concerné et les autres parties intéressées à présenter leurs observations dans un délai déterminé, qui ne dépasse normalement pas un mois. Dans certains cas dûment justifiés, la Commission peut proroger ce délai. »

 La décision 2009/402

5        Les considérants 15, 17, 24 à 27, 29 et 71 de la décision 2009/402 sont ainsi libellés :

« (15)      Huit comités économiques agricoles (Rhône-Méditerranée, Grand Sud-Ouest, Corse, Val de Loire, Nord, Nord-Est, Bretagne et Normandie) ont bénéficié pendant de nombreuses années de fonds publics, fournis notamment par l’[Office national interprofessionnel des fruits, des légumes et de l’horticulture (Oniflhor)], et utilisés pour le financement de dispositifs d’aides dénommés “plans de campagne”, comportant des actions sur les marchés intra et extracommunautaires visant à faciliter la commercialisation de produits agricoles récoltés en France, surtout en période de crise.

[...]

(17)      En ce qui concerne la nature exacte des actions, dans leur lettre du 26 décembre 2002, les autorités françaises ont expliqué qu’elles visaient à prévenir ou, en cas de crise, à atténuer les effets d’excédents momentanés de l’offre par rapport à la demande en agissant à trois niveaux : marchés extérieurs, marché intérieur et transformation.

[...]

(24)      Dans la lettre du 26 décembre 2002, la France a expliqué que le financement des actions a été assuré par les secteurs concernés à raison de 30 % ou 50 %, la part restante étant financée par les pouvoirs publics.

(25)      La [Fédération des comités économiques agricoles rattachés à la filière de production des fruits et légumes (ci-après la “Fedecom”)] a expliqué de façon détaillée le mécanisme de financement des “plans de campagne” ainsi que le rôle joué par les comités. Ces explications n’ont pas été contestées par la France.

(26)      Selon la [Fedecom], les mesures à appliquer étaient déterminées exclusivement par l’[Oniflhor], et les comités économiques étaient tenus de les appliquer. L’[Oniflhor] prenait, au moment de chaque campagne et pour chaque espèce végétale, une décision concernant les mesures à réaliser et chargeait la section nationale concernée de les mettre en œuvre. L’[Oniflhor] décidait aussi des sommes allouées au plan en cause, ainsi que du montant des cotisations que devaient apporter les comités économiques.

(27)      Les mesures étaient financées à partir d’un fonds opérationnel géré par les comités économiques. Ce fonds fonctionnait sur la base des mêmes principes que ceux applicables aux aides communautaires prévues à l’article 15 du règlement (CE) no 2200/96 du Conseil du 28 octobre 1996 portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes [JO 1996, L 297, p. 1], en ce qu’il était alimenté en partie par l’aide publique, et en partie par des contributions financières des producteurs associés (dénommées parts professionnelles), assises sur les quantités ou la valeur des fruits et légumes commercialisées. Les parts professionnelles n’étaient pas composées de cotisations d’extension de règles. Elles n’étaient donc pas obligatoires en vertu d’un décret ministériel.

[...]

(29)      [Un tableau figurant sous ce point 29] fournit un résumé des montants payés, en euros, par l’[Oniflhor] au titre des “plans de campagne” de 1992 à 2002. Ces montants sont ventilés par année et par actions. Or, pour les années 1992 et 1993, seul le montant global de l’aide figure dans le tableau. La France a expliqué que les archives de l’[Oniflhor] ne permettent plus, pour ces deux années, de fournir une ventilation détaillée.

[...]

(71)      D’après les informations dont dispose la Commission, les “plans de campagne” prévoyaient des mesures destinées à faire face à des crises causées par un excès d’offre de produits français sur le marché communautaire, notamment par le biais d’un subventionnement des prix de vente, de subventions pour le stockage ou la destruction d’une partie de la récolte, ainsi que d’incitations financières à la transformation du produit frais. Sur les marchés hors Union européenne, des subventions à l’exportation auraient également contribué à l’écoulement des produits français excédentaires et pouvaient renforcer la position concurrentielle des opérateurs. Ces aides semblent avoir été octroyées sur la base du prix et de la quantité produite. »

6        L’article 1er de cette décision dispose :

« Les aides d’État octroyées dans le cadre des “plans de campagne” aux producteurs de fruits et légumes que la France a illégalement mises à exécution en violation de l’article [108, paragraphe 3, TFUE], entre les années 1992 et 2002 sont incompatibles avec le marché commun. »

7        L’article 2 de ladite décision énonce :

« 1.      La France prend les mesures nécessaires pour récupérer les aides incompatibles visées à l’article 1er auprès de leurs bénéficiaires.

2.      Les aides à récupérer incluent des intérêts à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition des bénéficiaires jusqu’à la date de leur récupération.

[...] »

8        Au titre de l’article 5 de cette même décision :

« La République française est destinataire de la présente décision. »

 Le litige au principal et la question préjudicielle

9        L’Oniflhor, aux droits duquel vient FranceAgriMer, est un établissement public à caractère industriel et commercial placé sous tutelle de l’État français, qui avait notamment pour mission de renforcer l’efficacité économique de la filière des fruits et légumes.

10      L’Oniflhor a mis en place, entre les années 1998 et 2002, une incitation conjoncturelle à la contractualisation des approvisionnements des industries de transformation des cerises dites « bigarreaux » à destination industrielle, sous la forme d’une aide financière à chaque campagne concernée.

11      Cette aide était destinée aux groupements de producteurs ayant procédé, au titre de la récolte en cause, à des livraisons de bigarreaux aux industriels de la transformation dans le cadre de contrats pluriannuels conclus en application d’un accord interprofessionnel.

12      L’aide versée par l’Oniflhor transitait par le comité économique bigarreau industrie (CEBI) qui reversait ces fonds à ses adhérents, dont Copebi, laquelle a reçu une somme totale de 2 823 708,83 euros.

13      Saisie d’une plainte, la Commission a, par la décision 2009/402, concernant les dispositifs d’aides attribués, notamment par l’Oniflhor, dans le cadre de « plans de campagne » dans le secteur des fruits et légumes, mis à exécution par la République française, affirmé que les aides versées au secteur des fruits et légumes français avaient pour but de faciliter l’écoulement des produits français en manipulant le prix de vente ou les quantités offertes sur les marchés. Elle a conclu que de telles interventions constituaient des aides d’État instituées en violation du droit de l’Union et a prescrit leur récupération.

14      Cette décision a été confirmée par deux arrêts du Tribunal de l’Union européenne du 27 septembre 2012, France/Commission (T‑139/09, EU:T:2012:496) et Fedecom/Commission (T‑243/09, non publié, EU:T:2012:497).

15      À la suite de ces arrêts, la République française a entrepris de récupérer les aides illégalement versées aux producteurs de bigarreaux d’industrie, dont Copebi, contre laquelle FranceAgriMer a émis, le 29 mars 2013, un titre de recettes aux fins du recouvrement d’un montant de 5 042 768,78 euros correspondant au remboursement d’aides publiques versées entre les années 1998 et 2002 ainsi que des intérêts ayant couru.

16      Par un jugement du 20 janvier 2015, le tribunal administratif de Nîmes (France) a rejeté la demande de Copebi tendant à l’annulation de ce titre de recettes.

17      Par un arrêt du 18 avril 2016, la cour administrative d’appel de Marseille (France) a rejeté l’appel interjeté contre ce jugement par Copebi.

18      Copebi a alors formé un pourvoi contre cet arrêt devant le Conseil d’État (France).

19      Celui-ci constate que, si la décision 2009/402 vise, de manière générale, le marché des fruits et légumes, qui relève de l’organisation commune des fruits et légumes, régie à l’époque des faits par le règlement (CEE) no 1035/72 du Conseil , du 18 mai 1972 (JO 1972, L 118, p. 1), puis par le règlement (CE) no 2200/96 du Conseil , du 28 octobre 1996 (JO 1996, L 297, p. 1), portant tous deux organisation commune dans le secteur des fruits et légumes, dont relève la filière des bigarreaux d’industrie, et, s’il ressort de l’arrêt du 12 février 2015, Commission/France (C‑37/14, non publié, EU:C:2015:90), que le CEBI a perçu les aides en cause au principal afin de faciliter l’écoulement des produits français en manipulant le prix de vente ou les quantités offertes sur le marché, le CEBI ne figure toutefois pas parmi les huit comités économiques agricoles mentionnés au point 15 de la décision 2009/402.

20      Selon la juridiction de renvoi, il ressort également de cette décision que les aides en cause au principal, contrairement au mécanisme de financement décrit aux points 24 à 28 de ladite décision, sont non pas financées par des contributions volontaires des producteurs dites « parts professionnelles », mais seulement par des subventions versées par l’Oniflhor.

21      À cet égard, la juridiction de renvoi observe que, si les montants annuels des aides versées par l’Oniflhor aux producteurs de bigarreaux d’industrie par l’intermédiaire du CEBI sont inclus dans le tableau figurant au point 29 de la décision 2009/402, ces montants ont été communiqués par les autorités françaises et rien, dans cette décision, ne permettrait de penser qu’ils auraient été formellement repris à son compte par la Commission, qui ne mentionne, au considérant 15 de ladite décision, que huit comités économiques, à l’exclusion du CEBI. Ce tableau ne figurerait que dans la partie visant à décrire les aides en cause et non dans la partie consacrée à la procédure de récupération.

22      La juridiction de renvoi s’interroge donc sur la légalité du titre de recettes émis par FranceAgriMer à l’encontre de Copebi, fondée sur la récupération des aides visées par la décision 2009/402. La légalité de ce titre de recette dépendrait, notamment, de la question de savoir si cette décision doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre les aides versées par l’Oniflhor au CEBI et attribuées aux producteurs de bigarreaux d’industrie par les groupements de producteurs membres de ce comité, alors que le CEBI ne figure pas parmi les huit comités économiques agricoles mentionnés au point 15 de ladite décision et que le mode de financement de ces aides était sensiblement différent.

23      Dans ces conditions, le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« La décision [2009/402] doit-elle être interprétée en ce sens qu’elle couvre les aides versées par l’Oniflhor au CEBI et attribuées aux producteurs de bigarreaux d’industrie par les groupements de producteurs membres de ce comité, alors que le CEBI ne figure pas parmi les huit comités économiques agricoles mentionnés au point 15 de cette décision et que les aides en cause, contrairement au mécanisme de financement décrit aux points 24 à 28 de ladite décision, étaient financées seulement par des subventions de l’Oniflhor et non pas également par des contributions volontaires des producteurs, dites “parts professionnelles” ? »

 Sur la question préjudicielle

24      Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la décision 2009/402 doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre les aides versées par l’Oniflhor au CEBI et attribuées aux producteurs de bigarreaux d’industrie par les groupements de producteurs membres de ce comité, alors que, d’une part, ce comité ne figure pas parmi les huit comités économiques agricoles mentionnés dans cette décision et que, d’autre part, ces aides, contrairement au mécanisme de financement décrit dans ladite décision, étaient financées uniquement par des subventions de l’Oniflhor et non pas également par des contributions volontaires des producteurs.

25      En ce qui concerne, en premier lieu, le fait que le CEBI n’est pas mentionné dans la décision 2009/402, il convient de relever qu’il n’est pas contesté que la requérante au principale a bénéficié d’une aide entre les années 1998 et 2002 versée par l’Oniflhor par l’intermédiaire du CEBI.

26      Il n’est pas non plus contesté que le CEBI a la même nature juridique que les huit autres comités économiques agricoles mentionnés au point 15 de la décision 2009/402, est régi par les mêmes dispositions nationales, et que, ainsi que l’a relevé la juridiction de renvoi, ce comité a bien bénéficié d’une aide versée par le même organisme public, à savoir l’Oniflhor, avec pour objectif de faciliter l’écoulement des produits français en manipulant le prix de vente ou les quantités offertes sur les marchés.

27      En outre, il convient de relever que, conformément à l’article 1er de la décision 2009/402, « [l]es aides d’État octroyées dans le cadre des “plans de campagne” aux producteurs de fruits et légumes que la France a illégalement mises à exécution en violation de l’article [108, paragraphe 3, TFUE], entre les années 1992 et 2002 sont incompatibles avec le marché commun ». Il y a lieu, dès lors, de constater que, ainsi que l’indique la Commission dans ses observations écrites, le dispositif de la décision 2009/402 n’est pas circonscrit aux seuls huit comités économiques agricoles mentionnés au considérant 15 de cette décision.

28      À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que les décisions de récupération des aides d’État sont adressées à l’État membre responsable et non aux bénéficiaires de l’aide et qu’aucune disposition de la procédure de contrôle des aides d’État ne réserve, parmi les intéressés, un rôle particulier au bénéficiaire de l’aide (voir, notamment, arrêt du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, EU:C:2002:524, points 81 et 83).

29      Ainsi, la décision 2009/402 est adressée, selon son article 5, spécifiquement à la République française, et non à un comité économique particulier. Il revenait donc à cet État membre, au terme de l’article 2 de cette décision, de prendre les mesures nécessaires pour récupérer les aides déclarées incompatibles par ladite décision auprès de leurs bénéficiaires et ainsi de déterminer les organismes ayant bénéficié de ces aides.

30      La Cour a également précisé que, dans le cadre d’un programme d’aides, la Commission peut se borner à étudier les caractéristiques du programme en cause pour apprécier, dans les motifs de sa décision, si, en raison des modalités que ce programme prévoit, celui-ci assure un avantage sensible aux bénéficiaires par rapport à leurs concurrents et est de nature à profiter essentiellement à des entreprises qui participent aux échanges entre les États membres (arrêt du 7 mars 2002, Italie/Commission, C‑310/99, EU:C:2002:143, point 89).

31      Ainsi, la décision de la Commission constatant l’incompatibilité d’une aide avec le marché intérieur ne doit pas contenir une analyse des aides octroyées dans des cas individuels sur le fondement de ce régime. Ce n’est qu’au niveau de la récupération des aides qu’il est nécessaire de vérifier la situation individuelle de chaque entreprise concernée (voir, en ce sens, arrêt du 7 mars 2002, Italie/Commission, C‑310/99, EU:C:2002:143, point 91).

32      Cela est d’autant plus le cas lorsque, comme l’indique la Commission, celle-ci n’est pas en mesure d’obtenir, de la part de l’État membre concerné, un ensemble satisfaisant d’informations sur la manière exacte dont ces mesures ont été appliquées.

33      Dès lors, il ne saurait être déduit du fait que le CEBI ne figure pas parmi les huit comités économiques agricoles mentionnés dans la décision 2009/402 que cette décision ne couvre pas les aides qui ont été versées par l’Oniflhor par l’intermédiaire de ce comité économique agricole et attribuées au Copebi.

34      Par ailleurs, il ne saurait être soutenu que la décision 2009/402 aurait été prise en violation du droit de la requérante au principal d’être entendue. En effet, il convient de rappeler que la Cour a également jugé que la notion d’« intéressé », au sens de l’article 1er, sous h), du règlement no 659/1999, se réfère à un ensemble indéterminé de destinataires (voir, en ce sens, arrêt du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 132) et que, dès lors, cette disposition n’exige pas une mise en demeure individuelle de sujets particuliers (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 1984, Intermills/Commission, 323/82, EU:C:1984:345, point 17).

35      Son seul objet est d’obliger la Commission à faire en sorte que toutes les personnes potentiellement intéressées soient averties et aient l’occasion de faire valoir leurs arguments. Dans ces circonstances, la publication d’un avis au Journal officiel de l’Union européenne est un moyen adéquat en matière de contrôle des aides d’État en vue de faire connaître à tous les intéressés l’ouverture d’une procédure (voir, en ce sens, arrêts du 14 novembre 1984, Intermills/Commission, 323/82, EU:C:1984:345, point 17, ainsi que du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission, C‑74/00 P et C‑75/00 P, EU:C:2002:524, point 80)

36      En ce qui concerne, en deuxième lieu, la circonstance selon laquelle les aides perçues par Copebi, contrairement au mécanisme de financement décrit par la Commission dans la décision 2009/402, étaient financées uniquement par des subventions de l’Oniflhor et non pas également par des contributions volontaires des producteurs, il ressort de cette décision que le financement des « plans de campagne » était assuré par les secteurs concernés à raison de 30 % à 50 %. Cette part professionnelle était complétée par des financements émanant des pouvoirs publics, via l’Oniflhor. Ces parts professionnelles étaient appelées par les comités économiques agricoles et le non-paiement de cette part équivalait, en principe, à un refus de recevoir les aides de l’Oniflhor.

37      Il y a lieu de constater que, si les aides perçues par Copebi ont été financées uniquement par les subventions de l’Oniflhor sans contribution du secteur concerné, il demeure que ces aides ont été accordées au moyen de ressources d’État.

38      Une telle circonstance ne saurait, dès lors, faire échapper les aides dont a bénéficié Copebi à la qualification d’« aide d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et, partant, au champ d’application de la décision 2009/402.

39      En outre, pour autant que le non-paiement des parts professionnelles justifierait l’exclusion de tout versement des aides par l’Oniflhor, il y a lieu de rappeler que la Cour a déjà jugé que la question de savoir si le bénéfice accordé aux entreprises intéressées était conforme à la législation interne ou bien, au contraire, constituait un cas d’évasion ou de fraude fiscale est sans incidence sur l’obligation de l’État membre en cause de récupérer les aides dans les délais impartis (arrêt du 5 mai 2011, Commission/Italie, C‑305/09, EU:C:2011:274, point 42).

40      Dès lors, le fait que Copebi est parvenue à obtenir le bénéfice des plans de campagne sans avoir à y contribuer et a ainsi obtenu un régime plus avantageux que celui dont auraient bénéficié les autres bénéficiaires n’est pas une circonstance de nature à la faire échapper au champ d’application de la décision 2009/402.

41      Enfin, en troisième lieu, la requérante au principal soutient que, à la différence des « plans de campagne » visés dans la décision 2009/402, le dispositif interprofessionnel d’aides à la filière des bigarreaux d’industrie était lié à un plan structurel, sous la forme d’aides conjoncturelles et ponctuelles, qui n’aurait pas eu pour but d’atténuer les excédents temporaires de l’offre

42      Il convient, de constater, toutefois, qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle que l’aide versée par l’Oniflhor au CEBI prenait la forme d’une aide financière reconduite lors de chaque campagne concernée qui visait à remédier aux difficultés que traversait cette filière en raison d’une forte pression concurrentielle exercée par les industries de transformation italiennes et espagnoles, ainsi que des produits bruts importés des pays d’Europe centrale. Il ressort également du dossier soumis à la Cour que cette aide était calculée chaque année en fonction du procédé de récolte employé et de la destination du produit dans la limite d’une quantité de fruits donnée.

43      Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre à la question posée que la décision 2009/402 doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre les aides versées par l’Oniflhor au CEBI et attribuées aux producteurs de bigarreaux d’industrie par les groupements de producteurs membres de ce comité quand bien même, d’une part, ce comité ne figure pas parmi les huit comités économiques agricoles mentionnés dans cette décision et, d’autre part, ces aides, contrairement au mécanisme de financement décrit dans ladite décision, étaient financées uniquement par des subventions de l’Oniflhor et non pas, également, par des contributions volontaires des producteurs.

 Sur les dépens

44      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

La décision 2009/402/CE de la Commission, du 28 janvier 2009, concernant les « plans de campagne » dans le secteur des fruits et légumes mis à exécution par la France, doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre les aides versées par l’Office national interprofessionnel des fruits, des légumes et de l’horticulture (Oniflhor) au comité économique bigarreau industrie (CEBI), et attribuées aux producteurs de bigarreaux d’industrie par les groupements de producteurs membres de ce comité quand bien même, d’une part, ce comité ne figure pas parmi les huit comités économiques agricoles mentionnés dans cette décision et, d’autre part, ces aides, contrairement au mécanisme de financement décrit dans ladite décision, étaient financées uniquement par des subventions de l’Oniflhor et non pas, également, par des contributions volontaires des producteurs.

Regan

Lycourgos

Juhász

Ilešič

 

Jarukaitis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juin 2019.

Le greffier

Le président de la Vème chambre

A. Calot Escobar

 

E. Regan


*      Langue de procédure : le français.