CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 28 avril 2015 (1)

Affaire C‑290/14

Skerdjan Celaj

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunale di Firenze (Italie)]

«Espace de liberté, de sécurité et de justice – Directive 2008/115/CE – Retour d’un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier – Articles 15 et 16 – Législation nationale prévoyant une peine de prison pour un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier en cas de nouvelle entrée – Compatibilité»





 Introduction

1.        «Être étranger est‑il un crime? Nous ne le pensons pas.»

2.        Voici les mots de conclusion d’une «Opinion en partie dissidente commune» à six juges de la Cour européenne des droits de l’homme (ci‑après la «Cour EDH») dans l’affaire phare Saadi c. Royaume‑Uni (2).

3.        Dans une veine similaire, l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) pense que «[l]e simple fait d’être un migrant en situation irrégulière ne doit jamais être considéré comme un motif suffisant pour la rétention» (3).

4.        La poursuite et la sanction des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre fait l’objet d’un débat animé. Même des organes qui ont pour mission de procéder à des évaluations au regard des règles de droit souvent ne peuvent résister à la tentation de glisser des éléments de politique juridique dans leurs arguments, ainsi que les deux exemples précités tendent à l’illustrer.

5.        La présente affaire concerne un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre après une nouvelle entrée sur le territoire de cet État membre, en violation d’une interdiction d’entrée, adoptée avec une décision de retour en application de la directive 2008/115/CE (4). La Cour est saisie de la question de savoir si la directive 2008/115 s’oppose à l’emprisonnement de cette personne.

6.        Je propose (5) à la Cour de préciser et de clarifier sa jurisprudence, qui commence avec l’arrêt El Dridi (6) et se poursuit avec les arrêts Achughbabian (7) et Sagor (8), en recourant à l’objectif premier de la directive, à savoir le retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. La Cour devrait déclarer qu’une telle sanction pénale est interdite par la directive 2008/115, non pas pour des considérations d’ordre politique telles que celles citées ci‑dessus, mais dans l’intérêt de l’effet utile de la directive 2008/115.

 Cadre juridique

 Droit de l’Union

7.        L’objectif de la directive 2008/115 est défini comme suit à son article 1er, intitulé «Objet»:

«La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu’au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l’homme.»

8.        L’article 2 de la directive 2008/115, intitulé «Champ d’application», dispose:

«1.      La présente directive s’applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre.

2.      Les États membres peuvent décider de ne pas appliquer la présente directive aux ressortissants de pays tiers:

a)      faisant l’objet d’une décision de refus d’entrée conformément à l’article 13 du code frontières Schengen, ou arrêtés ou interceptés par les autorités compétentes à l’occasion du franchissement irrégulier par voie terrestre, maritime ou aérienne de la frontière extérieure d’un État membre et qui n’ont pas obtenu par la suite l’autorisation ou le droit de séjourner dans ledit État membre;

b)      faisant l’objet d’une sanction pénale prévoyant ou ayant pour conséquence leur retour, conformément au droit national, ou faisant l’objet de procédures d’extradition.

[…]»

9.        L’article 3 de ladite directive, intitulé «Définitions», dispose:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

[…]

2)      ‘séjour irrégulier’: la présence sur le territoire d’un État membre d’un ressortissant d’un pays tiers qui ne remplit pas, ou ne remplit plus, les conditions d’entrée énoncées à l’article 5 du code frontières Schengen, ou d’autres conditions d’entrée, de séjour ou de résidence dans cet État membre;

3)      ‘retour’: le fait, pour le ressortissant d’un pays tiers, de rentrer – que ce soit par obtempération volontaire à une obligation de retour ou en y étant forcé – dans:

–        son pays d’origine, ou

–        un pays de transit conformément à des accords ou autres arrangements de réadmission communautaires ou bilatéraux, ou

–        un autre pays tiers dans lequel le ressortissant concerné d’un pays tiers décide de retourner volontairement et sur le territoire duquel il sera admis;

4)      ‘décision de retour’: une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d’un ressortissant d’un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour;

5)      ‘éloignement’: l’exécution de l’obligation de retour, à savoir le transfert physique hors de l’État membre;

6)      ‘interdiction d’entrée’: une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire interdisant l’entrée et le séjour sur le territoire des États membres pendant une durée déterminée, qui accompagne une décision de retour;

[…]»

10.      L’article 6, paragraphe 1, intitulé «Décision de retour», dispose:

«Les États membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5.»

11.      L’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/115 prévoit que «[l]es États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n’a été accordé pour un départ volontaire conformément à l’article 7, paragraphe 4, ou si l’obligation de retour n’a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l’article 7».

12.      L’article 11 de ladite directive est intitulé «Interdiction d’entrée» et est rédigé comme suit:

«1.      Les décisions de retour sont assorties d’une interdiction d’entrée:

a)      si aucun délai n’a été accordé pour le départ volontaire, ou

b)      si l’obligation de retour n’a pas été respectée.

Dans les autres cas, les décisions de retour peuvent être assorties d’une interdiction d’entrée.

2.      La durée de l’interdiction d’entrée est fixée en tenant dûment compte de toutes les circonstances propres à chaque cas et ne dépasse pas cinq ans en principe. Elle peut cependant dépasser cinq ans si le ressortissant d’un pays tiers constitue une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale.

3.      Les États membres examinent la possibilité de lever ou de suspendre une interdiction d’entrée lorsqu’un ressortissant d’un pays tiers faisant l’objet d’une telle interdiction décidée conformément au paragraphe 1, deuxième alinéa, peut démontrer qu’il a quitté le territoire d’un État membre en totale conformité avec une décision de retour.

Les personnes victimes de la traite des êtres humains auxquelles un titre de séjour a été accordé conformément à la directive 2004/81/CE du Conseil du 29 avril 2004 relative au titre de séjour délivré aux ressortissants de pays tiers qui sont victimes de la traite des êtres humains ou ont fait l’objet d’une aide à l’immigration clandestine et qui coopèrent avec les autorités compétentes [(9)] ne font pas l’objet d’une interdiction d’entrée, sans préjudice du paragraphe 1, premier alinéa, point b), et à condition que le ressortissant concerné d’un pays tiers ne représente pas un danger pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale.

Les États membres peuvent s’abstenir d’imposer, peuvent lever ou peuvent suspendre une interdiction d’entrée, dans des cas particuliers, pour des raisons humanitaires.

Les États membres peuvent lever ou suspendre une interdiction d’entrée, dans des cas particuliers ou certaines catégories de cas, pour d’autres raisons.

4.      Lorsqu’un État membre envisage de délivrer un titre de séjour ou une autre autorisation conférant un droit de séjour à un ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet d’une interdiction d’entrée délivrée par un autre État membre, il consulte au préalable l’État membre ayant délivré l’interdiction d’entrée et prend en compte les intérêts de celui‑ci conformément à l’article 25 de la convention d’application de l’accord de Schengen [(10)].

5.      Les paragraphes 1 à 4 s’appliquent sans préjudice du droit à la protection internationale, telle qu’elle est définie à l’article 2, point a), de la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts [(11)], dans les États membres.»

13.      L’article 15, paragraphe 1, de la directive 2008/115 dispose:

«1.      À moins que d’autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l’éloignement, en particulier lorsque:

a)      il existe un risque de fuite, ou

b)      le ressortissant concerné d’un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement.

Toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise.»

 Droit italien

14.      L’article 13, paragraphe 13, du décret législatif no 286, du 25 juillet 1998 (ci‑après le «décret législatif no 286/1998»), prévoit que «[l]e ressortissant étranger destinataire d’une décision d’obligation de quitter le territoire ne peut revenir sur le territoire national sans une autorisation spéciale du Ministero dell’Interno. En cas d’infraction à cette règle, le ressortissant étranger est puni d’une peine allant d’un an à quatre ans d’emprisonnement et est de nouveau éloigné par une reconduite immédiate à la frontière».

 Faits, procédure et question préjudicielle déférée

15.      M. Celaj, un ressortissant albanais, est entré sur le territoire italien à une date non connue. Le 26 août 2011, il a été arrêté par les autorités italiennes pour tentative de vol, à la suite de quoi il a été condamné à une peine d’un an d’emprisonnement (avec sursis) et à une amende de 400 euros. Ce jugement est devenu définitif le 15 mars 2012.

16.      Le 17 avril 2012, un ordre de reconduite a été adopté par le préfet de Florence (Italie), ainsi qu’un ordre d’éloignement par le Questore di Firenze (préfet de police de Florence), assorti d’une interdiction de nouvelle entrée en Italie pendant trois ans. Dans sa décision, le Questore di Firenze a indiqué qu’il convenait d’exclure la possibilité d’un retour volontaire, puisque les circonstances de l’affaire exigeaient la reconduite immédiate de M. Celaj. En effet, ce dernier n’avait pas demandé à bénéficier d’un délai de départ volontaire et il existait un risque de fuite en raison de l’absence de documents indiquant qu’il avait un lieu de résidence.

17.      Étant donné qu’aucun transporteur aérien n’était disponible et qu’il était impossible de placer M. Celaj dans un centre de rétention, ce dernier n’a pas été reconduit de force et le Questore di Firenze lui a ordonné de quitter le territoire national, sous peine des sanctions prévues par la loi.

18.      M. Celaj est ensuite resté en Italie. Il a été identifié à trois occasions à trois endroits différents entre le 27 juillet 2012 et le 30 août 2012 et il a été inculpé à ces trois occasions en raison de son statut d’immigrant irrégulier et pour culture de stupéfiants.

19.      Le 4 septembre 2012, M. Celaj s’est rendu, de sa propre initiative, au poste de la police des frontières à Brindisi et a volontairement quitté le territoire national.

20.      Par la suite, M. Celaj est de nouveau entré sur le territoire italien. Le 14 février 2014, il a été arrêté pour violation de l’article 13, paragraphe 13, du décret législatif no 286/1998 par les carabiniers du poste de San Piero a Sieve qui effectuaient des contrôles à la gare ferroviaire locale.

21.      Le procureur a engagé une procédure pénale à son égard devant le Tribunale di Firenze (tribunal de première instance de Florence, Italie) et a requis une peine d’emprisonnement de huit mois sur le fondement de l’article 13, paragraphe 13, du décret législatif no 286/1998.

22.      C’est dans le cadre de cette procédure que, par ordonnance du 22 mai 2014, parvenue à la Cour le 12 juin 2014, le Tribunale di Firenze a déféré la question préjudicielle suivante:

«Les dispositions de la directive 2008/115 s’opposent‑elles à l’existence de dispositions nationales des États membres qui prévoient une peine d’emprisonnement allant jusqu’à quatre ans pour un ressortissant de pays tiers qui, après avoir été renvoyé dans son pays non à titre de sanction pénale ni comme conséquence d’une sanction pénale, est de nouveau entré sur le territoire national en violation d’une interdiction légale de retour, sans que ce ressortissant ait été préalablement soumis aux mesures coercitives prévues à l’article 8 de la directive 2008/115 aux fins de son éloignement rapide et efficace?»

23.      Les gouvernements tchèque, allemand, grec, italien, norvégien et suisse ont déposé des observations écrites, de même que la Commission européenne.

 Appréciation

24.      Une fois de plus, la Cour est invitée à se prononcer sur la compatibilité d’une peine prévue par le droit pénal national avec les dispositions de la directive 2008/115. Est en jeu cette fois une sanction prévue par le droit pénal national sous la forme d’un emprisonnement infligé à un ressortissant d’un pays tiers au seul motif que, après être retourné dans son pays d’origine en provenance d’un État membre dans le cadre d’une procédure de retour antérieure, il est de nouveau entré sur le territoire de l’État membre concerné.

25.      La Cour a déclaré de façon répétée que si, en principe, la législation pénale et les règles de procédure pénale relèvent de la compétence des États membres et si ni la directive 2008/115 ni sa base légale (12) n’excluent la compétence pénale des États membres dans le domaine de l’immigration clandestine et du séjour irrégulier, les États membres ne sauraient appliquer une réglementation pénale susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs poursuivis par la directive 2008/115 et, partant, de priver celle‑ci de son effet utile (13).

26.      Avant d’examiner le droit national en cause dans la procédure au principal, je voudrais rappeler brièvement, aux fins de la présente affaire, le système mis en place par la directive 2008/115 et la jurisprudence de la Cour relative aux sanctions pénales dans le contexte de cette directive.

 Le retour, l’éloignement et le système de rétention établis par la directive 2008/115

27.      La procédure de retour établie par la directive 2008/115 a déjà été amplement décrite par la Cour dans le cadre de différentes affaires dont elle était saisie (14). Par conséquent, je peux être bref à ce stade et me limiter aux éléments essentiels aux fins de l’affaire en cause.

28.      Conformément à son considérant 2, la directive 2008/115 a pour objectif de mettre en place une politique efficace d’éloignement et de rapatriement basée sur des normes communes, afin que les personnes concernées soient rapatriées d’une façon humaine et dans le respect intégral de leurs droits fondamentaux et de leur dignité (15). À cette fin, elle établit une procédure de retour qui est centrée sur une décision de retour et qui commence avec cette décision, que les États membres, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115, sont tenus (16) d’adopter à l’égard de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire (17). Cette disposition constitue l’élément clé de la directive (18).

29.      La procédure qui y fait suite est sous‑tendue par le principe de proportionnalité (19): à cette fin, en règle générale, un éloignement, c’est‑à‑dire l’exécution de l’obligation de retour par le transfert physique hors de l’État membre (20), n’est possible que si un départ volontaire n’est pas possible ou infructueux (21) et l’on ne peut recourir à la rétention qu’à titre d’ultima ratio, uniquement dans la mesure où cela est strictement nécessaire et dans l’attente d’un éloignement (22). La raison d’être qui sous‑tend ces dispositions relatives à la rétention est que seules les procédures de retour et d’éloignement justifient une privation de liberté et que, si ces procédures ne sont pas menées avec la diligence requise, la rétention cesse d’être justifiée au regard de ces dispositions (23). Ainsi que je l’ai déjà souligné dans ma prise de position présentée dans l’affaire Mahdi (24), la rétention à des fins d’éloignement n’a un caractère ni punitif ni pénal et ne constitue pas une peine de prison (25). De plus, l’article 15, paragraphe 1, de la directive 2008/115 requiert une interprétation étroite parce qu’une rétention forcée constitue, en tant que privation de liberté, une exception au droit fondamental de la liberté individuelle (26).

 Rétention ou emprisonnement admissibles au‑delà des situations visées par la directive 2008/115

30.      La directive elle‑même ne contient aucune disposition sur la possibilité pour les États membres de recourir à la rétention ou à l’emprisonnement en tant que sanction pénale en rapport avec un séjour irrégulier. Selon moi, la raison de cela est évidente: il n’y a pas de place pour une telle sanction si l’objectif de la directive est de prévoir le retour rapide de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Toute rétention ou emprisonnement non prononcé dans le cadre d’une procédure de retour retardera en définitive une telle procédure.

31.      Il est bien connu, et cela a déjà été mentionné dans l’introduction des présentes conclusions, qu’il existe également une jurisprudence de la Cour sur cette question. Toutefois, jusqu’à ce jour, il n’y a pas eu d’affaire dans laquelle, sur la base des faits de l’affaire au principal, la Cour a déclaré que la rétention ou l’emprisonnement en tant que sanction pénale est compatible avec la directive 2008/115.

 Jurisprudence jusqu’à ce jour: de l’arrêt El Dridi à l’arrêt Sagor, en passant par l’arrêt Achughbabian

32.      Dans l’affaire El Dridi (27), il a été demandé à la Cour d’apprécier si la directive 2008/115 s’opposait à une réglementation d’un État membre, telle que la réglementation italienne en cause dans l’affaire au principal (28), qui prévoyait l’infliction d’une peine d’emprisonnement à un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier pour le seul motif que celui‑ci avait demeuré, en violation d’un ordre de quitter le territoire de cet État dans un délai déterminé, sur ledit territoire sans motif justifié. La Cour a déclaré qu’en effet, la directive 2008/115, et en particulier ses articles 15 et 16, s’opposait à une telle réglementation (29).

33.      Dans l’affaire Achughbabian (30), la Cour a été de nouveau invitée à déterminer si la directive 2008/115 s’opposait à une réglementation nationale, telle la réglementation française dans la procédure au principal (31), qui prévoyait l’infliction d’une peine d’emprisonnement à un ressortissant d’un pays tiers au seul motif de l’irrégularité de son entrée ou de son séjour sur le territoire français. La Cour a de nouveau déclaré que la directive s’opposait à une telle réglementation «pour autant que celle‑ci permet l’emprisonnement d’un ressortissant d’un pays tiers qui, tout en séjournant irrégulièrement sur le territoire dudit État membre et n’étant pas disposé à quitter ce territoire volontairement, n’a pas été soumis aux mesures coercitives visées à l’article 8 de cette directive et n’a pas, en cas de placement en rétention en vue de la préparation et de la réalisation de son éloignement, vu expirer la durée maximale de cette rétention» (32). Dans l’affaire au principal, la situation de M. Achughbabian relevait de cette catégorie.

34.      Le raisonnement tenu par la Cour dans ces deux affaires était que l’emprisonnement risquait de compromettre la réalisation de l’objectif poursuivi par la directive et était susceptible de faire échec à l’application des mesures visées à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/115 et de retarder l’exécution de la décision de retour (33).

35.      En outre, la Cour a utilisé une formule quelque peu plus large dans l’arrêt Achughbabian que dans l’arrêt El Dridi: elle a spécifié que cette conclusion s’appliquait également à l’adoption d’une décision de retour. La Cour a déclaré que «l’obligation imposée par l’article 8 de cette directive aux États membres de procéder, dans les hypothèses énoncées au paragraphe 1 de cet article, à l’éloignement doit être remplie dans les meilleurs délais. À l’évidence, tel ne serait pas le cas si, après avoir constaté le séjour irrégulier du ressortissant d’un pays tiers, l’État membre concerné faisait précéder l’exécution de la décision de retour, voire l’adoption même de cette décision [(34)], de poursuites pénales suivies, le cas échéant, d’une peine d’emprisonnement» (35).

36.      Cette évolution depuis l’arrêt El Dridi jusqu’à l’arrêt Achughbabian est remarquable et j’y reviendrai ci‑après (36).

37.      De plus, il est intéressant de se demander, et cela n’est pas clair pour moi, pourquoi la Cour, dans son raisonnement et au premier tiret du dispositif, n’a plus inclus une référence aux articles 15 et 16 de la directive 2008/115, contrairement à ce qu’elle avait fait dans l’arrêt El Dridi (37). Je reviendrai également sur ce point ci‑après (38).

38.      Dans l’arrêt Sagor, la Cour a affirmé qu’une peine d’assignation à résidence, prononcée et exécutée au cours de la procédure de retour, était «susceptible de retarder et, ainsi, d’entraver les mesures, telles que la reconduite à la frontière et le retour forcé par voie aérienne, qui contribuent, elles, à la réalisation de l’éloignement» (39).

39.      Néanmoins dans l’arrêt Achughbabian (40), la Cour ne s’est pas limitée à cette affirmation. Bien qu’il n’y eût aucun lien avec les faits de la procédure au principal, la Cour a poursuivi en déclarant que la directive 2008/115 ne s’opposait pas à une réglementation d’un État membre prévoyant des sanctions pénales pour séjour irrégulier «pour autant que celle‑ci permet l’emprisonnement d’un ressortissant d’un pays tiers auquel la procédure de retour établie par [la] directive [2008/115] a été appliquée et qui séjourne irrégulièrement sur ledit territoire sans motif justifié de non‑retour» (41).

40.      Il y a lieu de souligner une fois de plus que, tant dans l’arrêt El Dridi (42) que dans l’arrêt Achughbabian (43), les faits de l’affaire étaient tels que les procédures de retour respectives n’avaient pas été pleinement appliquées (44).

41.      Par la suite, dans l’arrêt Sagor, en ce qui concerne des poursuites pénales conduisant à une amende, la Cour a déclaré qu’une telle amende n’était pas susceptible d’entraver la procédure de retour établie par la directive 2008/115 (45). Elle a ajouté que «l’infliction d’une peine pécuniaire n’empêche en aucune manière qu’une décision de retour soit prise et mise en œuvre dans le plein respect des conditions énoncées aux articles 6 à 8 de la directive 2008/115 et ne porte pas non plus atteinte aux normes communes en matière de privation de liberté énoncées aux articles 15 et 16 de cette directive» (46).

42.      L’utilisation du terme «prise» (47) est révélateur, parce qu’il démontre que l’obligation de prendre un ordre de retour est permanente. Elle démontre également que la distinction entre le fait qu’une procédure de retour est en cours ou n’est pas en cours est en réalité artificielle. Même si une procédure de retour n’est pas en cours et que les conditions fixées à l’article 6 sont remplies, elle devrait être lancée.

 Emprisonnement à la suite d’une nouvelle entrée

43.      Revenons à l’affaire en cause.

44.      Il a été établi par la juridiction de renvoi que M. Celaj séjournait irrégulièrement sur le territoire italien. En vertu de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2008/115, celle‑ci est donc applicable. Aucune des exceptions énumérées à l’article 2, paragraphes 2 et 3, ne s’applique. En particulier, il n’y a aucune indication de ce que M. Celaj fait l’objet d’un refus d’entrée en application de l’article 13 du règlement (CE) no 562/2006 (48).

45.      Cela soulève la question de savoir si, en l’espèce, les autorités italiennes peuvent infliger une peine d’emprisonnement à M. Celaj.

46.      Les gouvernements italien, tchèque, allemand, grec, norvégien et suisse, ensemble avec la Commission, estiment que cela est possible. Ils considèrent que les faits de la présente affaire peuvent être distingués de ceux dans les affaires El Dridi et Achughbabian. Bien que certains détails de leurs arguments diffèrent, ils sont d’avis qu’une distinction doit être opérée entre un ressortissant d’un pays tiers entrant sur le territoire d’un État membre pour la première fois et une nouvelle entrée ultérieure de ce dernier, après l’exécution d’une procédure de retour. Dans la première situation, un État membre n’a d’autre choix que d’appliquer la directive 2008/115 alors que, dans la seconde, un État membre pourrait chercher à imposer une peine d’emprisonnement de sorte à dissuader le ressortissant d’un pays tiers d’entrer de nouveau irrégulièrement sur son territoire.

47.      La juridiction de renvoi, par ailleurs, considère que le jugement de valeur quant aux différences conceptuelles et structurelles entre les diverses situations dans lesquelles un ressortissant étranger pourrait se retrouver, selon que sa présence sur le territoire national est le résultat d’une entrée irrégulière ou d’une nouvelle entrée à la suite d’une décision d’éloignement précédente, est dénué de pertinence.

48.      Je suis d’accord avec l’approche adoptée par la juridiction de renvoi et j’attire l’attention de la Cour sur le fait qu’une telle approche est pleinement conforme à sa jurisprudence jusqu’à ce jour.

49.      La directive 2008/115, ainsi que le prévoit de manière expresse et sans équivoque son article 1er, a pour objectif le retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Les États membres sont soumis à une obligation constante de lancer une procédure de retour en adoptant une décision de retour et en poursuivant celle‑ci, sous réserve du principe de proportionnalité.

50.      La directive n’opère aucune distinction quant au nombre de fois qu’un ressortissant d’un pays tiers tente d’entrer sur le territoire d’un État membre, et cela pour une bonne raison: les questions relatives à l’entrée irrégulière relèvent avant tout de la réglementation de l’Union relative à l’entrée, tel le code frontières Schengen. Toutefois, dès qu’un ressortissant d’un pays tiers est sur le territoire d’un État membre et qu’il a été établi qu’il y séjourne irrégulièrement, il doit faire l’objet d’un retour (49). Les obligations qui incombent aux États membres au titre des articles 6 et suivants de la directive 2008/115 sont persistantes, continues et s’appliquent sans interruption, en ce sens qu’elles naissent automatiquement dès que les conditions de ces articles sont réunies. Si, dès lors qu’il a été établi qu’un ressortissant d’un pays tiers séjourne irrégulièrement sur le territoire d’un État membre, ce dernier devait ne pas adopter une décision de retour et faisait plutôt emprisonner la personne, il suspendrait effectivement ses obligations au titre de la directive.

51.      La Cour semble pleinement consciente de cela, ainsi que l’indique son raisonnement dans l’arrêt Achughbabian (50), où elle a déclaré que l’adoption d’une décision de retour ne devrait pas non plus être précédée d’une sanction pénale.

52.      Emprisonner un ressortissant d’un pays tiers pour des raisons autres que celles prévues dans la directive équivaut en effet à une suspension temporaire unilatérale du champ d’application de la directive par l’État membre concerné. J’affirme qu’il n’y a pas de place pour une telle suspension du champ d’application de la directive.

 Interdiction d’entrée

53.      Comment évaluer l’existence d’une interdiction d’entrée dans ce contexte?

54.      La jurisprudence relative à cette question est peu abondante et offre peu d’indications pour la présente affaire (51).

55.      Une interdiction d’entrée est définie par la directive comme étant une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire interdisant l’entrée et le séjour sur le territoire des États membres pendant une durée déterminée (52). Ainsi qu’il ressort clairement de l’article 11 de la directive 2008/115, une interdiction d’entrée accompagne une décision de retour. Par conséquent, elle est simplement accessoire à une décision de retour (53).

56.      Ainsi que je l’ai indiqué ci‑dessus, la directive 2008/115 porte sur le retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Les questions d’entrée sur le territoire de l’Union européenne relèvent avant tout de la réglementation relative à l’acquis de Schengen (54), et en particulier du code frontières Schengen (55). Par conséquent, bien que les politiques de l’Union en matière d’entrée et de retour soient inextricablement liées, le fait qu’elles soient régies par des instruments juridiques distincts ne doit pas être perdu de vue. Cela est également précisé à l’article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive, selon lequel les États membres peuvent décider de ne pas appliquer la directive aux ressortissants de pays tiers faisant l’objet d’une décision de refus d’entrée conformément à l’article 13 du code frontières Schengen. Cela ressort en outre clairement du fait que ce n’est qu’à un considérant (56) de la directive 2008/115, et non pas à une disposition normative de cette directive, que le législateur encourage les États membres à disposer d’un accès rapide aux informations relatives aux interdictions d’entrée imposées par les autres États membres et qui indique que ce partage d’informations devrait se faire conformément au règlement SIS‑II (57).

57.      L’objectif premier de la directive 2008/115 est non pas de prévenir un séjour irrégulier, mais d’y mettre un terme (58). Étant donné la nature accessoire d’une interdiction d’entrée, des mesures sanctionnant son non‑respect ne sauraient compromettre cet objectif premier. En d’autres mots, une rétention ou un emprisonnement aux fins d’exécuter une interdiction d’entrée ne doit pas compromettre une future procédure de retour.

58.      Cela n’implique en aucune façon que l’existence d’une interdiction d’entrée ne sert aucun objectif du point de vue d’un État membre: en empêchant une personne d’entrer à l’avenir une nouvelle fois régulièrement sur le territoire de l’État membre, elle peut dissuader un ressortissant d’un pays tiers d’entrer une nouvelle fois irrégulièrement sur ce territoire. Ainsi, la directive prévoit elle‑même pour les États membres des moyens pour dissuader les ressortissants de pays tiers d’entrer une nouvelle fois irrégulièrement sur leur territoire.

59.      Toutefois, dès lors qu’un ressortissant d’un pays tiers est entré (de nouveau) (irrégulièrement) sur le territoire d’un État membre, les obligations qui incombent aux États membres en vertu de la directive s’appliquent.

 Considérations finales

60.      Quelle que soit la façon de l’envisager: emprisonner une personne retarde finalement un futur retour. La simple affirmation selon laquelle la directive 2008/115 ne s’oppose pas à ce que le droit d’un État membre qualifie un séjour irrégulier d’infraction et prévoie des sanctions pénales pour dissuader et réprimer la commission d’une telle infraction aux règles nationales en matière de séjour (59) doit être envisagée dans ce contexte. Par conséquent, la rétention ou l’emprisonnement devraient être limités à la détention pour des infractions pénales sans rapport avec l’irrégularité d’un séjour (60), à la détention dans des situations administratives régies par le chapitre IV de la directive, et à la détention en vue de la détermination du caractère régulier ou non du séjour (61). Les dispositions figurant dans le chapitre IV sont exhaustives pour ce qui est de la rétention ou de l’emprisonnement en rapport avec un séjour dont l’on a établi l’irrégularité. C’est la raison pour laquelle ces dispositions, en particulier les articles 15 et 16 de la directive, ont pour effet d’empêcher d’autres situations de rétention ou d’emprisonnement.

61.      Je suis parfaitement conscient que ma compréhension des dispositions de la directive 2008/115 aboutit à une interprétation étroite du deuxième tiret du dispositif de l’arrêt Achughbabian (62). Toutefois, c’est la seule interprétation possible qui peut être réconciliée avec les dispositions de cette directive (63). Par conséquent, je lis le deuxième tiret du dispositif de l’arrêt Achughbabian comme ne couvrant que les situations dans lesquelles une procédure de retour a été poursuivie sans succès et que la personne concernée continue à séjourner irrégulièrement sur le territoire de l’État membre concerné sans motif justifié de non‑retour (64).

62.      Il y a lieu enfin d’attirer l’attention sur la jurisprudence établie de la Cour selon laquelle une juridiction nationale doit appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit de l’Union et en assurer le plein effet, laisser inappliquée toute disposition du droit national contraire à la finalité de la directive 2008/115 (65). Par conséquent, la juridiction de renvoi doit refuser d’appliquer l’article 13, paragraphe 13, du décret législatif no 286/1998 dans la mesure où il prévoit une peine d’emprisonnement à l’encontre de M. Celaj au seul motif que ce dernier, après être retourné dans son pays d’origine, est de nouveau entré sur le territoire italien.

 Conclusion

63.      À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle déférée par le Tribunal di Firenze comme suit:

La directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, en particulier ses articles 15 et 16, doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à la réglementation d’un État membre, telle que celle en cause dans la procédure au principal, qui prévoit l’infliction d’une peine d’emprisonnement à un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier au seul motif que ce dernier, après être retourné dans son pays d’origine dans le cadre d’une procédure de retour antérieure, est de nouveau entré sur le territoire de l’État membre.


1 – Langue originale: l’anglais.


2 – Voir «Opinion en partie dissidente commune aux juges Rozakis, Tulkens, Kovler, Hajiyev, Spielmann et Hirvelä», dans l’affaire Saadi c. Royaume‑Uni [GC] no 13229/03, § 65, 28 janvier 2008.


3 – Voir Rétention des ressortissants de pays tiers dans le cadre des procédures de retour, rapport de la FRA, 2011, p. 19, disponible à l’adresse http://fra.europa.eu/sites/default/files/fra_uploads/1306‑FRA‑2011_Detention_report_FR.pdf. Cette déclaration est faite uniquement dans le contexte d’une détention administrative, raison pour laquelle je la vois s’appliquer a fortiori aux sanctions pénales.


4 – Directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO L 348, p. 98).


5 – Ce faisant, je ferai de mon mieux pour me concentrer sur les arguments juridiques en rapport avec la directive 2008/115, plutôt que sur des considérations d’ordre politique telles que celles citées aux points 1 et 3 des présentes conclusions.


6 – Arrêt El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268).


7 – Arrêt Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807).


8 – Arrêt Sagor (C‑430/11, EU:C:2012:777).


9 –      JO L 261, p. 19.


10 –      JO 2000 L 239, p. 19.


11 –      JO L 304, p. 12.


12 – Article 63, point 3, sous b), du traité CE, reproduit à l’article 79, paragraphe 2, sous c), TFUE. Sur la procédure législative, voir point 45 et note en bas de page 12 de ma prise de position présentée dans l’affaire Mahdi (C‑146/14 PPU, EU:C:2014:1936).


13 – Voir, notamment, arrêt Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807, point 33).


14 – Voir, notamment, arrêt El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268, points 34 et suiv.).


15 – Pour plus de détails sur les sources d’inspiration de la directive, telle la jurisprudence de la Cour EDH et les «vingt principes directeurs sur le retour forcé», adoptés par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe le 4 mai 2005, voir point 45 de ma prise de position présentée dans l’affaire Mahdi (C‑146/14 PPU, EU:C:2014:1936).


16 – Voir arrêt Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807, point 31). Le texte anglais de la directive utilise le terme normatif «shall». Sur le caractère obligatoire de l’article 6 de la directive 2008/115, voir également Slama, S., «La transposition de la directive ‘retour’: vecteur de renforcement ou de régression des droits des irréguliers?», dans Dubin, L., La légalité de la lutte contre l’immigration irrégulière par l’Union européenne, Bruylant, 2012, p. 289 à 345, à la page 330.


17 – Cette obligation est sans préjudice de toute une série d’exceptions, énumérées aux paragraphes 2 à 5 du même article. De plus, l’article 6, paragraphe 6, autorise les États membres à adopter une décision portant sur la fin du séjour régulier en même temps qu’une décision de retour.


18 – Voir aussi Hörich, D., Die Rückführungsrichtlinie: Entstehungsgeschichte, Regelungsgehalt und Hauptprobleme, Zeitschrift für Ausländerrecht und Ausländerpolitik, 2011, p. 281 à 286, à la page 283.


19 – Voir considérants 13 et 16 de la directive 2008/115. Voir également arrêt El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268, point 41).


20 – Articles 3, point 5, et 8 de la directive 2008/115.


21 – Voir article 7 de la directive 2008/115.


22 – Voir chapitre IV, intitulé «Rétention à des fins d’éloignement», articles 15 à 18 de la directive 2008/115.


23 – Voir, pour plus de détails, points 46 à 55 de ma prise de position présentée dans l’affaire Mahdi (C‑146/14 PPU, EU:C:2014:1936).


24 – C‑146/14 PPU, EU:C:2014:1936.


25 – Ibidem (point 47) ainsi que point 91 des conclusions de l’avocat général Bot présentées dans les affaires jointes Bero et Bouzalmate (C‑473/13 et C‑514/13, EU:C:2014:295); point 35 de la prise de position de l’avocat général Mazák présentée dans l’affaire El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:205) et point 54 de la prise de position de l’avocat général Wathelet présentée dans l’affaire G. et R. (C‑383/13 PPU, EU:C:2013:553).


26 – Voir point 47 de ma prise de position présentée dans l’affaire Mahdi (C‑146/14 PPU, EU:C:2014:1936), ainsi que point 70 de la prise de position de l’avocat général Mazák présentée dans l’affaire Kadzoev (C‑357/09 PPU, EU:C:2009:691). En ce qui concerne l’article 5, paragraphe 1, sous f), de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), signée à Rome le 4 novembre 1950, la Cour EDH se prononce dans le même sens (voir, notamment, arrêts Quinn c. France, 22 mars 1995, série A, no 311, § 42, et Kaya c. Roumanie no 33970/05, § 16, 12 octobre 2006).


27 – Arrêt El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268).


28 – L’affaire portait sur différentes dispositions du même décret que celui visé par la présente affaire.


29 – Arrêt El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268, point 62 et dispositif).


30 – C‑329/11, EU:C:2011:807.


31 – Un article du code français de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda).


32 – Arrêt Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807, point 50 et premier tiret du dispositif).


33 – Voir arrêts El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268, point 59) et Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807, point 45). Plusieurs auteurs de doctrine ont parlé d’un certain paradoxe dans un tel raisonnement. Voir, notamment, Spitaleri, F., «Il rimpatrio dell’immigrato in condizione irregolare: il difficile equilibro tra efficienza delle procedure e garanzie in favore dello straniero nella disciplina dell’Unione europea», dans Amadeo, S. (ed.), Le garanzie fondamentali dell’immigrato in Europa, Torino, 2015 (à paraître), p. 17: «ricostruzioni abbastanza paradossali»; Leboeuf, L., «La directive retour et la privation de liberté des étrangers. Le rappel à l’ordre de la Cour de justice dans l’arrêt El Dridi», dans Revue du droit des étrangers, 2011, p. 181 à 191, à la page 191: «[p]aradoxalement, l’objectif de gestion efficace des flux migratoires permet à la Cour de justice de s’opposer à la pénalisation du séjour irrégulier». D’autres y voient même un certain cynisme: Kauff‑Gazin, F., «La directive ‘retour’ au secours des étrangers? De quelques ambiguïtés de l’affaire El Dridi du 28 avril 2011», dans Europe, no 6, juin 2011, p. 1 à 13, à la page 12: «[c]et argumentaire suscite la critique à la fois par son cynisme et par son manque d’audace». Selon moi, l’on peut certes percevoir un tel paradoxe si l’on met l’accent sur les intérêts présumés des particuliers concernés plutôt que sur les obligations juridiques qui découlent pour les États membres de la directive. Toutefois, les seuls intérêts des particuliers concernés protégés par la directive sont la sauvegarde de leurs droits fondamentaux tout au long de la procédure, sous réserve du principe de proportionnalité.


34 – Mis en italique par mes soins.


35 – Voir arrêt Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807, point 45).


36 – Au point 51 des présentes conclusions.


37 – C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268. Toutefois, la Cour a renvoyé, ultérieurement, dans l’arrêt Sagor (C‑430/11, EU:C:2012:777, point 36), tout comme dans l’ordonnance Mbaye (C‑522/11, EU:C:2013:190, point 28), aux articles 15 et 16 de la directive 2008/115 à l’appui de son raisonnement.


38 – Au point 60 des présentes conclusions.


39 – Arrêt Sagor (C‑430/11, EU:C:2012:777, point 45).


40 – C‑329/11, EU:C:2011:807.


41 – Ibidem (points 48, 50 et deuxième tiret du dispositif). Selon moi, bien que ce passage fasse également partie du dispositif de l’arrêt, il présente clairement le caractère d’un obiter dictum, étant donné qu’il n’a aucun lien avec les faits de l’affaire en cause et vise une situation hypothétique.


42 – C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268.


43 – C‑329/11, EU:C:2011:807.


44 – Ce point est également soulevé par Piccichè, F., «Il reato di ingresso e soggiorno illegale nel territorio dello stato alla luce della Direttiva 2008/115/CE», dans Rivista penale, 7 août 2012, p. 712 à 715, à la page 715.


45 – Arrêt Sagor (C‑430/11, EU:C:2012:777, point 36).


46 – Ibidem (point 36).


47 – Concerne uniquement la version en langue anglaise des présentes conclusions.


48 – Règlement du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO L 105, p. 1, ci‑après le «code frontières Schengen»).


49 – Sans préjudice, bien entendu, des exceptions prévues à l’article 6, paragraphes 2 à 5, de la directive 2008/115.


50 – Voir point 34 des présentes conclusions.


51 – Les questions auxquelles la Cour a dû répondre jusqu’à ce jour étaient centrées sur la limitation de la durée d’une interdiction d’entrée et la date de transposition de la directive: voir arrêt Filev et Osmani (C‑297/12, EU:C:2013:569).


52 – Voir article 3, point 6, de la directive 2008/115. Il convient de faire observer que cela ne couvre que les États membres participant au système Schengen (voir également considérants 25 et 26 de la directive 2008/115).


53 – Voir également Martucci, F., «La directive ‘retour’: la politique européenne d’immigration face à ses paradoxes», dans Revue trimestrielle du droit européen, 2009, p. 47 à 67, à la page 50.


54 – Voir, pour un aperçu concis, points 3 et suiv. des conclusions de l’avocat général Sharpston présentées dans l’affaire Zh. et Staatssecretaris van Veiligheid en Justicie (C‑554/13, EU:C:2015:94). Voir également Peers, S., EU Justice and Home Affairs Law, 3e éd., Oxford, OUP 2011, p. 136 et suiv.


55 – C’est ce code qui spécifie les catégories de personnes auxquelles il faut refuser l’entrée et qui charge les gardes‑frontières de la prévention des entrées irrégulières par des ressortissants de pays tiers (voir article 13 du code). De plus, il convient de souligner que ce code se réfère plusieurs fois à ce que l’on appelle une «alerte SIS» (SIS=Schengen Information System). Le rapport juridique entre un refus d’entrée à la suite d’une telle alerte et une interdiction d’entrée en application de la directive 2008/115 n’est pas très clair. Voir également Boeles, P., «Entry Bans and SIS‑alerts», dans Zwaan, K. (éd.), The return Directive: central themes, problem issues and implementation in selected Member States, WLP, Nijmegen, 2011, p. 39 à 45, à la page 44.


56 – Voir considérant 18 de la directive 2008/115.


57 – Règlement (CE) no 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) (JO L 381, p. 4).


58 – Voir également Brunessen, B., «La Cour de justice et la directive Retour: la stratégie du Roseau», dans Revue des affaires européennes, avril 2011, p. 845 à 858, à la page 854.


59 – Voir arrêt Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807, point 28).


60 – De tels délits sont manifestement en dehors du champ d’application de la directive.


61 – Voir arrêt Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807, point 29). De manière similaire, en ce qui concerne la première branche de l’article 5, paragraphe 1, sous f), de la CEDH, voir arrêt Saadi c. Royaume‑Uni, cité à la note en bas de page 2.


62 – Arrêt Achughbabian (C‑329/11, EU:C:2011:807).


63 – Il est toujours plus difficile de déterminer la portée exacte d’un motif d’un arrêt lorsqu’il n’est pas en rapport direct avec les faits de l’espèce.


64 – Par exemple, si la personne en cause a activement contrecarré la procédure de retour de sorte à empêcher que celle‑ci soit couronnée de succès, en fuyant ou d’une autre manière, et qu’elle continue à séjourner irrégulièrement, cet État membre peut effectivement faire poursuivre cette personne et lui infliger une sanction pénale.


65 – Voir arrêt El Dridi (C‑61/11 PPU, EU:C:2011:268, point 61 ainsi que jurisprudence citée).