DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

22 mars 2013 (*)

« Marque communautaire –– Demande de marque communautaire tridimensionnelle – Forme d’un sac à main –– Motifs absolus de refus – Absence de caractère distinctif – Absence de caractère distinctif acquis par l’usage – Article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 3, du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de prise en compte d’un élément constituant la marque demandée – Règle n° 9 du règlement (CE) n° 2868/95 »

Dans l’affaire T‑409/10,

Bottega Veneta International Sàrl, établie à Luxembourg (Luxembourg), représentée par Mes P. Roncaglia, G. Lazzeretti, M. Boletto et E. Gavuzzi, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Mannucci, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 16 juin 2010 (affaire R 1247/2009‑1), concernant une demande d’enregistrement d’un signe tridimensionnel constitué par la forme d’un sac à main comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot (rapporteur), président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. A. Popescu, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 13 septembre 2010,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 12 novembre 2010,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 1er février 2008, la requérante, Bottega Veneta International Sàrl, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe tridimensionnel reproduit ci-après :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 18 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Sacs et sacs à main ».

4        Le 11 mars 2008, l’examinateur a, conformément à la règle 11, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), informé la requérante de ses objections à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée. Il a indiqué que celle-ci était dépourvue de caractère distinctif au regard des produits visés dans la demande d’enregistrement, dès lors que, premièrement, ladite marque consistait uniquement dans la représentation en trois dimensions d’un sac, deuxièmement, il n’était pas dans les habitudes des consommateurs de déduire l’origine commerciale des produits à partir de leur forme, troisièmement, le public percevrait la marque demandée comme la représentation d’un sac que l’on peut acheter sur le marché et, quatrièmement, la forme du sac représenté par la marque demandée n’était pas inhabituelle.

5        La requérante a présenté ses observations le 9 octobre 2008 et a déposé une représentation graphique de la marque demandée qu’elle estimait plus nette que celle contenue dans la demande d’enregistrement. Elle a soutenu que la marque demandée possédait un caractère distinctif intrinsèque en raison du fait que, d’une part, le sac à main représenté par ladite marque était entièrement recouvert d’un motif « tressé » réalisé par l’entrecroisement de lanières de cuir ou de tissu et, d’autre part, les anses dudit sac à main étaient positionnées dans le prolongement du reste dudit sac, ce qui différenciait ce dernier des autres sacs présents sur le marché. Elle a ajouté que le motif « tressé » dont était recouvert le sac à main représenté par la marque demandée avait contribué à conférer à ladite marque un caractère distinctif acquis par l’usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 (devenu article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009).

6        Par décision du 29 septembre 2009, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, aux motifs que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif intrinsèque et qu’elle n’avait pas acquis un tel caractère par l’usage qui en avait été fait.

7        Le 22 octobre 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

8        Par décision du 16 juin 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a considéré en premier lieu que la marque demandée devait être interprétée comme représentant la forme d’un sac à main, mais non l’aspect tressé de la surface de celui-ci, dès lors que l’intention de la requérante de demander l’enregistrement dudit aspect tressé ne ressortait pas de façon évidente de la représentation graphique fournie dans la demande d’enregistrement présentée le 1er février 2008. Elle a ajouté que cette représentation graphique était celle qui devait être prise en compte aux fins de l’examen du caractère enregistrable de ladite marque et non celle envoyée le 9 octobre 2008 en réponse au courrier de l’examinateur du 11 mars 2008. En effet, selon la chambre de recours, la requérante aurait dû préciser l’objet de la demande d’enregistrement au moment de son dépôt, en décrivant de façon précise la marque demandée dans le formulaire de demande d’enregistrement, et non au cours de l’examen de ladite demande. En deuxième lieu, la chambre de recours a considéré, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, que la marque demandée ne présentait pas le caractère distinctif requis aux fins de son enregistrement, au motif que les consommateurs percevraient le sac à main représenté par ladite marque comme étant l’image d’un produit, mais non comme étant une marque. En troisième lieu, elle a considéré que le faible nombre d’éléments de preuve produits par la requérante qui font apparaître un modèle de sac à main semblable à celui représenté par la marque demandée ne permettait pas d’établir que ladite marque avait acquis un caractère distinctif du fait de son usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009. La chambre de recours a ensuite rejeté les éléments de preuve relatifs au chiffre d’affaires de la requérante, au motif qu’ils étaient de nature à établir le succès commercial du sac à main représenté par la marque demandée, mais non le fait que la forme dudit sac à main était perçue comme une marque par les consommateurs. Elle a également rejeté les arguments et les éléments de preuve relatifs à l’aspect tressé de la surface du sac à main représenté par la marque demandée comme dénués de pertinence, dès lors qu’il y avait lieu de considérer que la marque demandée représentait la forme d’un sac à main et non l’aspect tressé de la surface de celui-ci.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens, y compris ceux exposés dans le cadre de la procédure devant la chambre de recours.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      Au soutien de son recours, la requérante invoque trois moyens. Le premier moyen est pris de la violation de la règle 9, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2868/95. Le deuxième moyen est pris de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Le troisième moyen est pris de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du même règlement.

 Sur le premier moyen, pris de la violation de la règle 9, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2868/95

12      La requérante soutient que l’examinateur et la chambre de recours ont commis une erreur et violé la règle 9, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2868/95 en n’ayant pas pris en considération, dans le cadre de l’examen du caractère enregistrable de la marque demandée, l’aspect tressé de la surface du sac à main représenté par celle-ci et la représentation graphique de cette marque que la requérante a produite le 9 octobre 2008.

13      La règle 9 du règlement n° 2868/95, intitulée « Examen des conditions de fixation d’une date de dépôt et des conditions de forme du dépôt », énonce différentes hypothèses dans lesquelles les demandes d’enregistrement sont considérées comme n’étant pas conformes à certaines conditions prévues par ce règlement ou par le règlement n° 207/2009 et détermine les conséquences attachées à la constatation de l’irrégularité desdites demandes.

14      La règle 9, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2868/95 dispose :

« Si, après qu’une date de dépôt a été accordée, il s’avère à l’examen que :

a) il n’est pas satisfait aux conditions énoncées aux règles 1, 2 et 3 ou aux autres conditions de forme du dépôt prévues par le règlement [n° 207/2009] ou par les présentes règles ;

[…]

l’[OHMI] invite le demandeur à remédier, dans le délai qu’il lui impartit, aux irrégularités constatées. »

15      La règle 3 du règlement n° 2868/95 énumère les conditions relatives à la représentation de la marque demandée. Elle prévoit, en son paragraphe 1, ce qui suit :

« Si le demandeur ne revendique pas de représentation graphique ni de couleur particulière, la marque est reproduite dans la demande en écriture standard, par exemple en lettres, chiffres et signes de ponctuation dactylographiés. Elle peut comporter des minuscules et des majuscules et est publiée et enregistrée par l’[OHMI] sous cette forme. »

16      Le paragraphe 2 de la règle 3 du règlement n° 2868/95 dispose :

« Dans tous les cas autres que celui visé au paragraphe 1 et sauf si la demande est déposée par des moyens électroniques, la marque est reproduite sur une feuille séparée de la feuille sur laquelle apparaît le texte de la demande. Les dimensions de la feuille sur laquelle la marque est reproduite ne dépassent pas le format DIN A4 (29,7 cm × 21 cm), la surface utilisée pour la reproduction (format de composition) ne dépassant pas 26,2 cm × 17 cm. Une marge d’au moins 2,5 cm est prévue à gauche. Si la position exacte de la marque n’est pas évidente, elle est indiquée par la mention ‘haut’ sur chaque reproduction. La reproduction de la marque doit être d’une qualité suffisante pour permettre sa réduction ou son agrandissement au format des textes publiés au Bulletin des marques communautaires, soit au maximum 16 cm de haut × 8 cm de large ».

17      Le paragraphe 3 de la même règle prévoit ce qui suit :

« Dans les cas régis par le paragraphe 2, mention en est faite dans la demande. Celle-ci peut contenir une description de la marque. »

18      Ladite règle prévoit, en son paragraphe 4, ce qui suit :

« Si l’enregistrement d’une marque tridimensionnelle est demandé, mention en est faite dans la demande. La représentation consiste en une reproduction photographique ou une représentation graphique de la marque. Elle peut contenir jusqu’à six vues en perspective de la marque. »

19      En l’espèce, ainsi qu’il résulte des points 15 et 19 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la marque demandée était une représentation en trois dimensions de la forme d’un sac à main, c’est-à-dire son aspect extérieur, déterminé par les lignes qui en constituent les contours, ainsi que la disposition de l’anse de ce sac, mais non l’aspect tressé de la surface de celui-ci.

20      Au point 17 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la requérante aurait dû décrire la marque demandée au moment du dépôt de la demande d’enregistrement et non au cours de l’examen de ladite demande. Elle a indiqué que, à cette fin, la requérante aurait dû préciser, dans la case prévue à cet effet du formulaire de demande d’enregistrement, que la marque demandée était constituée par la forme extérieure du sac à main ainsi que par l’aspect de sa surface, tel qu’il résultait de son traitement par tressage. La chambre de recours a ajouté que, si la demande d’enregistrement avait comporté une telle description, l’examinateur aurait constaté que cette dernière ne concordait pas avec la représentation graphique de la marque demandée et il aurait demandé à la requérante de produire une nouvelle représentation graphique de la marque.

21      La requérante fait valoir que, même si l’examinateur n’a pas relevé que la surface du sac à main représenté par la marque demandée présentait un aspect tressé, il a néanmoins constaté, au point 8 de sa décision, que ledit sac à main ne présentait pas une surface lisse, mais un motif ornemental qu’il estimait difficile d’assimiler à un motif tressé. Elle en déduit que, dès lors qu’il ne parvenait pas à identifier de façon certaine cette caractéristique de la marque demandée, l’examinateur aurait dû, comme la règle 9, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2868/95 le lui imposait, l’inviter à produire une nouvelle représentation graphique de ladite marque, afin de remédier à l’irrégularité résultant du manque de clarté de sa demande d’enregistrement.

22      La requérante soutient en outre que l’aspect tressé de la surface du sac à main représenté par la marque demandée apparaissait de façon très visible sur la représentation de ladite marque reproduite au point 8 de la requête et que c’était pour cette raison qu’elle n’avait pas estimé nécessaire de décrire la marque demandée dans la demande d’enregistrement. Elle en déduit que, en ne considérant pas que l’aspect tressé de la surface du sac à main représenté par la marque demandée était l’une des caractéristiques de ladite marque et, partant, en n’en tenant pas compte dans le cadre de l’examen du caractère enregistrable de ladite marque, l’examinateur et la chambre de recours ont commis une erreur.

23      Ainsi qu’il ressort du point 13 ci-dessus, la règle 9, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2868/95 a pour objet de permettre la régularisation de demandes d’enregistrement non conformes aux autres règles du même règlement, notamment les règles 1, 2 et 3 dudit règlement, ou aux dispositions du règlement n° 207/2009.

24      Il résulte de cette disposition que, lorsqu’il constate qu’une demande d’enregistrement n’est pas conforme aux règles 1, 2 et 3 dudit règlement ou aux dispositions du règlement n° 207/2009, l’OHMI doit impartir à son auteur un certain délai pour remédier aux irrégularités constatées. En revanche, en l’absence de telles irrégularités, aucune obligation ne s’impose à l’OHMI.

25      En l’espèce, il ne ressort pas du dossier et il n’est pas allégué que l’examinateur avait constaté une quelconque irrégularité dans la demande d’enregistrement présentée par la requérante.

26      Toutefois, celle-ci soutient que sa demande d’enregistrement n’était pas conforme aux paragraphes 1 à 4 de la règle 3 du règlement n° 2868/95, de sorte que, selon elle, c’est en violation de ces dispositions, qui énumèrent les conditions relatives à la représentation de la marque demandée, que l’OHMI ne l’avait pas invitée à régulariser sa demande.

27      Ces arguments doivent être rejetés.

28      En effet, le paragraphe 1 de la règle 3 du règlement n° 2868/95 vise l’hypothèse dans laquelle le demandeur de marque ne revendique pas de représentation graphique ni de couleur particulière. Or, en l’espèce, la requérante a demandé l’enregistrement d’une marque tridimensionnelle dont elle a fourni une représentation graphique.

29      Les paragraphes 2 et 3 de ladite règle visent les hypothèses autres que celles prévues au paragraphe 1 de la même règle, mais excluent celles dans lesquelles la demande d’enregistrement a été présentée par des moyens électroniques. Or, en l’espèce, il est constant que la requérante a présenté la demande d’enregistrement de la marque demandée par voie électronique.

30      Il s’ensuit que, pour autant qu’elle est fondée sur les dispositions des paragraphes 1 à 3 de la règle 3 du règlement n° 2868/95, l’argumentation de la requérante doit être rejetée comme étant dénuée de pertinence.

31      En outre, il convient de considérer que, pour autant qu’elle est fondée sur le paragraphe 4 de la règle 3 du règlement n° 2868/95, l’argumentation de la requérante doit être rejetée comme non fondée.

32      En effet, il ressort de cette disposition que l’auteur d’une demande d’enregistrement est tenu, le cas échéant, d’une part, de mentionner dans la demande le caractère tridimensionnel de la marque demandée et, d’autre part, de représenter cette dernière au moyen d’une reproduction photographique ou d’une représentation graphique de cette marque.

33      En l’espèce, il n’est pas contesté que la demande d’enregistrement introduite par la requérante, d’une part, mentionnait que la marque demandée était une marque tridimensionnelle et, d’autre part, contenait une représentation graphique de la marque demandée.

34      La requérante n’établit dès lors pas que la demande d’enregistrement de la marque demandée ne répondait pas aux conditions rappelées au point 32 ci-dessus.

35      Partant, elle ne démontre pas que ladite demande était entachée d’une irrégularité à laquelle il devait être remédié en vertu de la règle 9, paragraphe 3, sous a), du règlement n° 2868/95.

36      Il s’ensuit qu’elle n’est pas fondée à soutenir que l’OHMI était tenu, en vertu de cette disposition, de l’inviter à régulariser sa demande ou de prendre en considération, à titre de régularisation de ladite demande, la représentation graphique de la marque demandée qu’elle a produite le 9 octobre 2008.

37      En tout état de cause, il ressort de la jurisprudence que, aux fins du bon fonctionnement du système de l’enregistrement des marques, la représentation graphique d’une marque doit permettre à la marque d’être identifiée avec exactitude, afin de déterminer l’objet exact de la protection conférée à son titulaire par la marque enregistrée. Il en résulte, notamment, que la représentation graphique d’une marque doit être précise (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 24 juin 2004, Heidelberger Bauchemie, C‑49/02, Rec. p. I‑6129, points 25 à 27 et 32, et la jurisprudence citée).

38      En outre, selon l’économie du règlement n° 207/2009, l’enregistrement ne peut avoir lieu que sur le fondement et dans les limites de la demande d’enregistrement présentée à l’OHMI par le demandeur. Il s’ensuit que, lors de l’examen du caractère distinctif d’une marque tridimensionnelle, l’OHMI doit se référer à la reproduction de la marque demandée jointe à la demande d’enregistrement et, le cas échéant, à la description incluse dans cette demande. Dès lors, l’OHMI ne peut pas prendre en compte les caractéristiques de la marque demandée qui ne sont pas indiquées dans la demande d’enregistrement et les documents l’accompagnant [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 30 novembre 2005, Almdudler-Limonade/OHMI (Forme d’une bouteille de limonade), T‑12/04, non publié au Recueil, point 42].

39      Il convient dès lors de considérer qu’il appartenait à la requérante de s’assurer que le contenu de la demande d’enregistrement présentée le 1er février 2008 permettait à l’examinateur d’identifier la marque demandée avec exactitude et, partant, de déterminer l’objet exact de la protection demandée. Une description précise de la marque demandée dans le formulaire de dépôt de demande d’enregistrement, dont il n’est pas contesté qu’il contenait une case prévue à cet effet, aurait constitué un moyen adéquat à cette fin, dès lors qu’elle aurait permis à l’examinateur de comparer les caractéristiques de la marque demandée mentionnées dans la description de cette marque avec celles visibles sur la représentation graphique de ladite marque.

40      Or, ainsi que la requérante le reconnaît elle-même au point 10 de la requête, elle n’a fourni, dans sa demande d’enregistrement, aucune description de la marque demandée. Elle s’est ainsi privée d’un moyen de s’assurer que ladite marque avait été identifiée et que l’objet exact de sa demande d’enregistrement avait été déterminé conformément à son intention au moment du dépôt de la demande d’enregistrement.

41      En conséquence, c’est sans commettre d’erreur de droit susceptible d’affecter la légalité de la décision attaquée que la chambre de recours a confirmé la décision de l’examinateur en décidant qu’il n’y avait pas lieu de prendre en considération aux fins de l’examen du caractère enregistrable de ladite marque, d’une part, l’aspect tressé de la surface du sac à main représenté par la marque demandée et, d’autre part, la représentation graphique de ladite marque présentée par la requérante le 9 octobre 2008.

42      Il résulte ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, pris de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

43      La requérante soutient que c’est en violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 que la chambre de recours a considéré que la marque demandée ne présentait pas le caractère distinctif intrinsèque requis aux fins de son enregistrement en tant que marque communautaire.

44      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

45      Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, signifie que cette marque permet d’identifier les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ces produits de ceux issus d’autres entreprises [voir arrêt de la Cour du 20 octobre 2011, Freixenet/OHMI, C‑344/10 P et C‑345/10 P, non encore publié au Recueil, point 42, et la jurisprudence citée ; voir, également, arrêt du Tribunal du 21 avril 2010, Schunk/OHMI (Représentation d’une partie d’un mandrin), T‑7/09, non publié au Recueil, point 15, et la jurisprudence citée].

46      Le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen desdits produits ou services, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir arrêt Freixenet/OHMI, point 45 supra, point 43, et la jurisprudence citée ; voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 16, et la jurisprudence citée). Le niveau d’attention du consommateur moyen est toutefois susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause (arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26).

47      Selon une jurisprudence constante, les critères d’appréciation du caractère distinctif des marques constituées par l’apparence du produit lui-même ne sont pas différents de ceux applicables aux autres catégories de marques (voir arrêt Freixenet/OHMI, point 45 supra, point 45, et la jurisprudence citée ; voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 17, et la jurisprudence citée).

48      Toutefois, dans le cadre de l’application de ces critères, la perception du public pertinent n’est pas nécessairement la même dans le cas d’une marque tridimensionnelle, constituée par l’apparence du produit lui-même, que dans le cas d’une marque verbale ou figurative, qui consiste en un signe indépendant de l’apparence des produits qu’elle désigne. En effet, les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, et il pourrait s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif s’agissant d’une telle marque tridimensionnelle que s’agissant d’une marque verbale ou figurative (voir arrêt Freixenet/OHMI, point 45 supra, point 46, et la jurisprudence citée ; voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 18, et la jurisprudence citée).

49      Par ailleurs, conformément à la jurisprudence, plus la forme dont l’enregistrement a été demandé en tant que marque se rapproche de la forme la plus probable que prendra le produit en cause, plus il est vraisemblable que ladite forme est dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009. Dans ces conditions, seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, est susceptible de remplir sa fonction essentielle d’origine, n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009 (arrêt de la Cour du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec. p. I‑9165, point 31 ; voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 19, et la jurisprudence citée).

50      Dès lors, lorsqu’une marque tridimensionnelle est constituée de la forme du produit pour lequel l’enregistrement est demandé, le simple fait que la marque demandée soit une variante d’une des formes habituelles des produits en cause ne suffit pas à établir que ladite marque n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Il convient toujours de vérifier si elle permet au consommateur moyen de ces produits de distinguer, sans procéder à une analyse et sans faire preuve d’une attention particulière, les produits concernés de ceux d’autres entreprises (arrêt Mag Instrument/OHMI, point 49 supra, point 32).

51      Par ailleurs, il résulte d’une jurisprudence constante que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails. Aussi, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela n’exclut toutefois pas la possibilité, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs de la marque concernée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 30 juin 2005, Eurocermex/OHMI, C‑286/04 P, Rec. p. I‑5797, point 22, et la jurisprudence citée).

52      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante.

53      À titre liminaire, il convient de relever qu’il résulte du point 20 de la décision attaquée, qui, sur ce point, n’est pas contestée et doit être approuvée, que le public pertinent est constitué par les consommateurs moyens des produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé, à savoir, en l’espèce, les sacs et les sacs à main.

54      La requérante soutient toutefois que l’examen du caractère distinctif de la marque demandée doit être effectué en tenant compte du fait que, en ce qui concerne les sacs et les sacs à main, les consommateurs font preuve d’un niveau d’attention élevé, qui résulte du fait que les consommateurs de sexe féminin prêtent une grande attention aux accessoires de mode, en particulier aux sacs à main, dont ils évaluent le style, la qualité et la finition de façon très scrupuleuse au moment de l’achat. Elle ajoute que le sac à main représenté par la marque demandée est un produit haut de gamme, qui est destiné à des consommateurs qui disposent d’un pouvoir d’achat élevé et qui est commercialisé via des canaux de distribution sélectifs.

55      Ces arguments doivent être rejetés.

56      En effet, si les sacs et les sacs à main peuvent être considérés comme relevant du secteur de la mode au sens large et qu’il peut être admis que le consommateur moyen prête une certaine attention à son apparence, et qu’il est dès lors susceptible d’apprécier le style, la qualité, la finition et le prix de ces produits lorsqu’il les achète, il ne ressort pas de la description desdits produits figurant dans la demande d’enregistrement qu’il s’agit nécessairement de produits de luxe ou de produits d’une telle sophistication ou d’un tel prix que le public pertinent serait susceptible d’être particulièrement attentif à leur égard [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 29 septembre 2009, The Smiley Company/OHMI (Représentation de la moitié d’un sourire de smiley), T‑139/08, Rec. p. II‑3535, point 19].

57      En outre, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence du Tribunal, des circonstances extrinsèques au droit conféré par la marque communautaire, telles que le concept de commercialisation et le prix des produits pour lesquels la marque est demandée, ne font pas l’objet de l’enregistrement et, par conséquent, ne peuvent pas être prises en considération lors de l’appréciation du caractère distinctif d’une marque [voir arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Neumann/OHMI (Forme d’une tête de microphone), T‑358/04, Rec. p. II‑3329, point 34, et la jurisprudence citée].

58      Il y a donc lieu d’apprécier le caractère distinctif de la marque demandée en tenant compte de la perception présumée de cette marque par un consommateur moyen ne faisant pas preuve d’un niveau d’attention particulièrement élevé.

59      À cette fin, il convient d’examiner si, conformément à la jurisprudence rappelée au point 49 ci-dessus, la forme de sac à main dont l’enregistrement est demandé diverge de manière significative, en raison, notamment, de la position de l’anse dudit sac à main, de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, permet au consommateur d’identifier un sac ou un sac à main correspondant à celui représenté par la marque demandée comme provenant d’une entreprise déterminée, et donc de le distinguer des sacs et des sacs à main provenant d’autres entreprises.

60      La requérante soutient que la forme de sac à main dont l’enregistrement est demandé présente deux caractéristiques de nature à lui conférer un caractère distinctif. Ces caractéristiques seraient, d’une part, la position très particulière de l’anse du sac à main, qui serait dans le prolongement de celui-ci, et, d’autre part, l’aspect tressé de la surface de celui-ci.

61      S’agissant, en premier lieu, de la position de l’anse de ce sac à main, elle affirme qu’il s’agit d’une caractéristique très particulière et inhabituelle pour un sac à main, dès lors que les anses de l’immense majorité des sacs et des sacs à main présents sur le marché sont cousues ou attachées au sac au moyen de boucles, d’anneaux ou d’autres moyens de fixation. Elle ajoute que les consommateurs sont confrontés quotidiennement à de très nombreux sacs à main dont les anses sont toujours visuellement séparées du reste du sac. Au soutien de cette allégation, elle produit les résultats d’une recherche d’images sur l’internet correspondant au mot « sacs ». Elle soutient enfin que les sacs et les sacs à main constituent l’accessoire féminin par excellence, de sorte que la position particulière de l’anse du sac à main représenté par la marque demandée serait immédiatement et clairement visible par les consommateurs.

62      Il convient de relever que, même si le consommateur moyen des sacs et des sacs à main était pleinement apte à percevoir la forme de ces produits comme une indication de leur origine, cette constatation ne signifierait pas que toute forme de sac ou de sac à main possède le caractère distinctif requis pour son enregistrement en tant que marque communautaire. En effet, pour conclure au caractère distinctif de la marque demandée dans une telle hypothèse, il y aurait encore lieu de vérifier si la forme en question présente des caractéristiques suffisantes pour retenir l’attention du public (voir arrêt Forme d’une tête de microphone, point 57 supra, point 47, et la jurisprudence citée).

63      Or, en l’espèce, la position de l’anse par rapport au reste du sac apparaît, contrairement à ce que soutient la requérante, comme une simple variante du positionnement des anses d’un sac ou d’un sac à main et non comme une caractéristique susceptible d’individualiser les sacs et les sacs à main visés par la marque demandée et de signaler, à elle seule, une origine commerciale déterminée. Les résultats de la recherche d’images effectuée sur l’internet par la requérante font ainsi apparaître que les sacs et les sacs à main peuvent être munis d’anses positionnées à différents endroits desdits sacs et attachées à ceux-ci de différentes manières. Il convient en outre de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, les résultats de la recherche effectuée sur l’internet fournissent plusieurs exemples de sacs ou de sacs à main dont les anses sont positionnées de la même façon que sur le sac à main représenté par la marque demandée.

64      Par ailleurs, il convient de relever que la forme de ce sac à main, qui est rectangulaire et présente des angles arrondis, ne diverge pas de manière significative des normes ou des habitudes du secteur, telles qu’elles ressortent des résultats de la recherche sur l’internet effectuée par la requérante. Partant, il y a lieu de considérer que la forme dudit sac à main ne se différencie pas de celle d’autres sacs et sacs à main présents sur le marché au point de permettre aux consommateurs de distinguer, sans procéder à une analyse et sans faire preuve d’une attention particulière, ce sac à main des sacs et des sacs à main issus d’autres entreprises.

65      La contestation, par la requérante, de l’affirmation de la chambre de recours, au point 31 de la décision attaquée, selon laquelle la position de l’anse du sac représenté par la marque demandée présente un caractère fonctionnel n’est pas de nature à remettre en cause cette conclusion.

66      En effet, même à les supposer fondées, les allégations de la requérante selon lesquelles, d’une part, cette caractéristique n’augmenterait pas la capacité dudit sac et, d’autre part, il existerait de nombreux types de sacs qui peuvent se porter à l’épaule bien qu’étant munis d’anses visuellement séparées du reste du sac, ne sauraient influer sur l’absence de caractère distinctif de la forme dont l’enregistrement est demandé.

67      En effet, comme l’a relevé la requérante elle-même, dans la mesure où le public pertinent perçoit le signe comme une indication de l’origine commerciale du produit ou du service, le fait que ce signe remplisse ou non simultanément une fonction autre que celle indicative de l’origine commerciale est sans incidence sur son caractère distinctif [voir arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, Develey/OHMI (Forme d’une bouteille en plastique), T‑129/04, Rec. p. II‑811, point 56, et la jurisprudence citée].

68      S’agissant, en second lieu, de l’aspect tressé de la surface dudit sac à main, il convient de rappeler que, ainsi qu’il a été jugé au point 41 ci-dessus, c’est sans commettre d’erreur de droit que la chambre de recours n’a pas pris en considération cette supposée caractéristique de la marque demandée dans le cadre de son appréciation du caractère enregistrable de ladite marque.

69      Il s’ensuit qu’elle n’était pas tenue d’en tenir compte aux fins d’examiner le caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée.

70      Il résulte de ce qui précède que, étant donné que la forme dont l’enregistrement est demandé ne diverge pas de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur en cause, au sens de la jurisprudence mentionnée au point 49 ci-dessus, elle ne peut remplir la fonction essentielle d’une marque, à savoir celle d’identifier l’origine du produit.

71      En conséquence, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif intrinsèque pour les produits concernés.

72      Le deuxième moyen doit, dès lors, être rejeté.

 Sur le troisième moyen, pris de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009

73      La requérante soutient que la marque demandée a acquis un caractère distinctif en raison de l’usage prolongé et intensif qui en a été fait. Elle affirme que les preuves qu’elle a fournies devant l’OHMI établissent la notoriété acquise par ladite marque.

74      En vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, les motifs absolus de refus visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), de ce même règlement ne s’opposent pas à l’enregistrement d’une marque si celle-ci, pour les produits ou les services pour lesquels l’enregistrement est demandé, a acquis un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait. En effet, dans l’hypothèse visée par l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, le fait que le signe constituant la marque en question est effectivement perçu, par le public pertinent, comme une indication de l’origine commerciale d’un produit ou d’un service est le résultat d’un effort économique du demandeur de la marque. Cette circonstance justifie que soient écartées les considérations d’intérêt général sous-jacentes au paragraphe 1, sous b) à d), du même article, lesquelles exigent que les marques visées par ces dispositions puissent être librement utilisées afin d’éviter de créer un avantage concurrentiel illégitime en faveur d’un seul opérateur économique (voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 38, et la jurisprudence citée).

75      Il ressort de la jurisprudence que l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage de la marque exige qu’au moins une fraction significative du public pertinent identifie grâce à la marque les produits ou services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée. Toutefois, les circonstances dans lesquelles la condition liée à l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage peut être regardée comme satisfaite ne sauraient être uniquement établies sur la base de données générales et abstraites, telles que des pourcentages déterminés (voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 39, et la jurisprudence citée).

76      Il convient d’ajouter que, pour que soit admis l’enregistrement d’une marque en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, le caractère distinctif acquis par l’usage d’une marque doit être démontré dans la partie de l’Union européenne où elle en était dépourvue au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), dudit règlement. Par ailleurs, l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage doit avoir eu lieu antérieurement au dépôt de la demande d’enregistrement (voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 40, et la jurisprudence citée).

77      En outre, il convient de tenir compte, aux fins de l’appréciation, dans un cas d’espèce, de l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage, de facteurs tels que, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles. Si, sur la base de tels éléments, les milieux intéressés ou, à tout le moins, une fraction significative de ceux-ci, identifient grâce à la marque le produit comme provenant d’une entreprise déterminée, il doit en être conclu que la condition exigée par l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009 pour l’enregistrement de la marque est remplie (voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 41, et la jurisprudence citée).

78      Selon la jurisprudence, le caractère distinctif d’une marque, y compris celui acquis par l’usage, doit, également, être apprécié par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et en tenant compte de la perception présumée d’un consommateur moyen de la catégorie des produits ou des services en cause normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 42, et la jurisprudence citée).

79      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si, en l’espèce, la chambre de recours a commis une erreur en considérant que la marque demandée n’avait pas acquis de caractère distinctif après l’usage qui en a été fait, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009.

80      Il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a considéré que la majorité des éléments de preuve fournis par la requérante étaient dénués de pertinence, dès lors qu’ils concernaient uniquement l’aspect tressé de la surface du sac à main représenté par la marque demandée. Elle a ajouté que seules les annexes 70 à 73 du recours contenaient des images de sacs à main ressemblant à celui représenté par la marque demandée. Toutefois, elle a relevé qu’une seule de ces images, celle figurant à l’annexe 73, présentait un sac à main identique à celui représenté par la marque demandée, les autres images faisant apparaître des sacs à main présentant des différences avec celui-ci. Elle a ensuite rejeté les arguments de la requérante fondés sur des données relatives au volume des ventes de sacs à main commercialisés par la requérante, au motif que de telles données démontraient le succès commercial desdits sacs à main, mais non que les consommateurs percevaient la forme de ceux-ci comme étant une marque. Elle a enfin considéré que les déclarations d’experts dans les domaines de la mode et du design, ainsi que les autres témoignages fournis par la requérante n’étaient, le cas échéant, que de nature à démontrer le caractère distinctif de l’aspect tressé de la surface des sacs à main commercialisés par la requérante.

81      En premier lieu, la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur manifeste en n’ayant pas pris en considération les très nombreux éléments de preuve de l’usage d’un motif tressé à la surface de divers produits qu’elle commercialise.

82      Il convient de rappeler que, ainsi qu’il a été jugé au point 41 ci-dessus, c’est sans commettre d’erreur de droit que la chambre de recours n’a pas pris en considération l’aspect tressé de la surface du sac à main représenté par la marque demandée dans le cadre de son appréciation du caractère enregistrable de ladite marque.

83      Il s’ensuit qu’elle n’était pas tenue de prendre en considération cette supposée caractéristique de la marque demandée aux fins d’apprécier si cette dernière avait acquis un caractère distinctif par l’usage.

84      En second lieu, la requérante conteste les appréciations portées par la chambre de recours sur la valeur probante des éléments de preuve qu’elle a produits aux fins d’établir l’existence d’un caractère distinctif acquis par l’usage.

85      La requérante a produit, à l’annexe 75 de son recours devant la chambre de recours, un tableau contenant des données relatives au volume des ventes de ce qu’elle a allégué, devant ladite chambre, être quatre modèles de sacs à main qu’elle commercialise. Ces données concernent vingt États membres pour trois de ces modèles et douze États membres pour l’un d’entre eux, et couvrent les années 2003 à 2009 pour deux de ces modèles et les années 2007 à 2009 pour les deux autres modèles. Dans un autre tableau sont présentées des données relatives au volume des ventes, au cours des mêmes périodes, de ces quatre modèles de sacs à main en Italie, en Espagne, en France, en Allemagne, en Suisse et au Royaume-Uni.

86      La requérante admet que ces données n’établissent pas de façon directe et irréfutable que les consommateurs percevront en tant que marque la forme de sac à main dont l’enregistrement est demandé, mais fait valoir qu’elles démontrent à tout le moins la large diffusion de ce modèle de sac à main dans de nombreux pays et que, en combinaison avec les autres éléments de preuve, elles permettent de prouver que cette forme a acquis un caractère distinctif par son usage.

87      Il y a lieu de constater que les tableaux visés au point 85 ci-dessus ne contiennent pas de représentation graphique ni de description des quatre modèles de sacs à main concernés, de sorte qu’il n’est pas certain que les données relatives au volume des ventes contenues dans lesdits tableaux concernent le sac à main représenté par la marque demandée. Dès lors, il convient de considérer que ces données ne permettent pas de connaître le volume des ventes de ce dernier.

88      Au demeurant, à supposer même que tel ait été le cas, il convient de rappeler que, comme l’ont relevé à juste titre la requérante elle-même et la chambre de recours au point 48 de la décision attaquée, de telles données seraient susceptibles de démontrer le succès commercial des produits commercialisés par la requérante, mais ne seraient pas, par elles-mêmes, de nature à établir que la forme de sac à main dont l’enregistrement est demandé est perçue par le public pertinent en tant que marque.

89      Par ailleurs, il y lieu de relever que ces données ne permettent pas de tirer de conclusions quant à la part de marché détenue par les produits commercialisés par la requérante sur les marchés concernés.

90      La requérante a également produit de nombreux documents, tels que des extraits d’articles de journaux et de magazines, visant à démontrer le caractère distinctif acquis par l’usage de la forme de sac à main dont l’enregistrement est demandé.

91      À cet égard, elle ne conteste pas l’affirmation de la chambre de recours figurant au point 37 de la décision attaquée, selon laquelle seuls les documents constituant les annexes 70 à 73 de son recours devant cette chambre concernaient la forme dudit sac à main et, partant, étaient pertinents aux fins de démontrer l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage.

92      L’annexe 70 du recours de la requérante devant la chambre de recours est une photocopie d’une page du magazine Elle daté du mois de juin 2005, sur laquelle figurent douze sacs à main de marques différentes, dont l’un est commercialisé par la requérante et ressemble à celui représenté par la marque demandée. Il s’en distingue cependant par la présence, à sa surface, de perforations cerclées de métal. Il est présenté comme étant un « classique du luxe » et comme étant « très apprécié ».

93      Les annexes 71 à 73 du recours devant la chambre de recours sont constituées d’extraits de journaux et de magazines publiés entre 2003 et 2007, sur lesquels figurent des sacs à main commercialisés par la requérante qui ressemblent à celui représenté par la marque demandée, à l’exception d’un extrait de l’annexe 73, qui représente un sac à main identique à celui représenté par la marque demandée. Le sac à main représenté à l’annexe 71 est présenté comme étant « recherché et chic » et comme étant « le fameux modèle seau en gros grain de Bottega Veneta ». Le sac à main visible sur l’annexe 72 est présenté comme étant le modèle le plus vendu par la requérante.

94      La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les reproductions de sacs à main figurant dans les annexes 70 à 73 visées aux points 92 et 93 ci-dessus montrent des sacs qui ne présentent que peu de ressemblances avec le sac à main représenté par la marque demandée. Selon la requérante, il ne pouvait être déduit du simple fait que le sac à main figurant sur les reproductions en cause était un sac « déstructuré », c’est-à-dire non rigide, qu’il s’agissait d’un sac à main différent de celui représenté par la marque demandée. Elle ajoute que la chambre de recours a omis de prendre en compte des extraits d’articles qui accompagnaient lesdites reproductions et qui faisaient état de la renommée de ce sac à main.

95      Il convient de rappeler que, aux points 38 et 39 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les sacs à main représentés dans les annexes 70 à 73, visées aux points 92 et 93 ci-dessus, étaient différents de celui représenté par la marque demandée, mais elle a admis, aux points 41 à 44 de ladite décision, que, s’agissant de ceux représentés dans les annexes 71 à 73, les différences pouvaient s’expliquer par le fait que le sac à main de la marque demandée était représenté rempli ou rembourré, alors que ceux figurant dans les annexes susmentionnées étaient représentés vides et avaient, dès lors, et en raison de la matière dans laquelle ils étaient confectionnés, tendance à s’affaisser sur eux-mêmes. Elle a ajouté, au point 45 de la décision attaquée, que seul un document, celui qui figurait à l’annexe 73, représentait un sac à main identique à celui de la marque demandée. Elle a déduit des constatations qui précèdent qu’une seule représentation graphique exacte de la forme de sac à main dont l’enregistrement est demandé ne permettait pas d’établir que cette forme avait acquis un caractère distinctif par l’usage qui en avait été fait.

96      Il convient de considérer que, même à supposer qu’elles aient présenté des sacs à main identiques à celui représenté par la marque demandée, les annexes 70 à 73 du recours devant la chambre de recours ne suffisent pas à démontrer qu’une fraction significative du public pertinent identifierait comme provenant d’une entreprise déterminée les sacs à main ayant la forme dont l’enregistrement est demandé grâce à cette forme.

97      En effet, ces annexes, de même que l’annexe 75 visée au point 85 ci-dessus, ne livrent aucune information concernant les investissements faits par la requérante pour promouvoir la marque demandée. Elles sont tout au plus de nature à prouver que la marque demandée a donné lieu à de tels investissements, mais il n’est pas possible d’en déterminer l’importance.

98      Enfin, ni les annexes 70 à 73 ni l’annexe 75 du recours devant la chambre de recours ne contiennent d’indications, telles que des déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles ou des sondages d’opinion, qui permettraient de déterminer la proportion des milieux intéressés qui identifie des sacs et des sacs à main comme provenant de la requérante grâce à la forme dont l’enregistrement est demandé et, partant, qui distingue ces produits de ceux provenant d’autres entreprises.

99      Or, il résulte d’une jurisprudence constante qu’il incombe à la requérante qui se prévaut du caractère distinctif d’une marque demandée de fournir des indications concrètes et étayées établissant que la marque demandée est dotée d’un caractère distinctif acquis par l’usage (voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 45, et la jurisprudence citée).

100    Enfin, s’agissant du territoire à prendre en considération, il résulte de la jurisprudence que, dès lors que le caractère distinctif acquis par l’usage de la marque demandée doit être démontré dans la partie substantielle de l’Union où elle en était dépourvue au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et que le motif de refus existe, pour celle-ci, dans toute l’Union, c’est en principe l’intégralité du territoire de l’Union qui devait être prise en considération (voir arrêt Représentation d’une partie d’un mandrin, point 45 supra, point 46, et la jurisprudence citée).

101    À ce titre, il convient de rappeler que, bien que l’annexe 75 du recours de la requérante devant la chambre de recours présente le volume des ventes de certains produits commercialisés par la requérante dans vingt États membres, il n’est pas établi que ces données concernent le sac à main représenté par la marque demandée. De plus, les représentations de sacs à main figurant dans les annexes 70 à 73 du recours devant la chambre de recours sont extraites de publications rédigées en langues italienne, allemande et française, de sorte qu’elles ne sont susceptibles d’avoir une valeur probante que s’agissant des États membres dans lesquels ces langues sont parlées.

102    Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que la forme du sac à main représenté par la marque demandée n’avait pas acquis un caractère distinctif du fait de son usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009.

103    Dans ces conditions, il convient de rejeter le troisième moyen et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

104    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

105    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Bottega Veneta International Sàrl est condamnée aux dépens.

Truchot

Martins Ribeiro

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 mars 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.