1. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Réduction en raison de difficultés économiques - Conditions

Afin de bénéficier d'une réduction exceptionnelle de l'amende en raison de difficultés économiques en vertu du paragraphe 35 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003, outre une demande, deux conditions cumulatives doivent être remplies, à savoir, premièrement, la difficulté insurmontable de payer l'amende et, deuxièmement, la présence d'un "contexte social et économique particulier".

L'appréciation de la première condition doit être fondée sur la prise en compte de la situation concrète de l'entreprise concernée. Un simple calcul du pourcentage que représente l'amende par rapport au chiffre d'affaires mondial de l'entreprise ne saurait à lui seul fonder la conclusion que l'amende n'est pas de nature à mettre irrémédiablement en danger la viabilité économique de cette entreprise. Si tel était le cas, il serait possible d'indiquer des seuils concrets pour l'application du paragraphe 35 desdites lignes directrices.

Arrêt du 16 juin 2011, Ziegler / Commission (T-199/08, Rec._p._II-3507) (cf. points 165, 167)

2. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Réduction en raison de la situation financière de l'entreprise - Conditions

Une réduction de l’amende en vertu du paragraphe 35 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003 est subordonnée à trois conditions cumulatives, à savoir : l’introduction d’une demande au cours de la procédure administrative, l’existence d’un contexte social et économique particulier et l’absence de capacité contributive de l’entreprise, celle-ci devant fournir des éléments de preuve objectifs démontrant que l’imposition d’une amende mettrait irrémédiablement en danger sa viabilité économique et conduirait à priver ses actifs de toute valeur.

L’introduction d’une demande visant à obtenir une réduction de l’amende ne constitue pas une simple exigence formelle mais une exigence en l’absence de laquelle aucune appréciation valable de la situation économique ne peut être réalisée, puisque la Commission ne dispose alors pas des éléments pertinents, tels que des données internes à l’entreprise concernée, permettant d’apprécier sa viabilité économique.

Arrêt du 16 juin 2011, Team Relocations e.a./ Commission (T-204/08 et T-212/08, Rec._p._II-3569) (cf. points 171, 176)



Arrêt du 14 mai 2014, Reagens / Commission (T-30/10) (cf. points 299-305)

3. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Critères - Obligation de prendre en considération la situation financière déficitaire de l'entreprise concernée - Absence - Capacité contributive réelle de l'entreprise dans un contexte social et économique particulier - Prise en considération - Conditions

La Commission n’est pas, en principe, obligée de tenir compte, lors de la détermination du montant de l’amende, de la situation financière déficitaire d’une entreprise, étant donné que la reconnaissance d’une telle obligation reviendrait à procurer un avantage concurrentiel injustifié aux entreprises les moins adaptées aux conditions du marché.

Par ailleurs, le fait qu’une mesure prise par une autorité de l’Union provoque la faillite ou la liquidation d’une entreprise donnée n’est pas interdit, en tant que tel, par le droit de l’Union. En effet, la liquidation d’une entreprise sous sa forme juridique en cause, si elle peut porter atteinte aux intérêts financiers des propriétaires, actionnaires ou détenteurs de parts, ne signifie pas pour autant que les éléments personnels, matériels et immatériels représentés par l’entreprise perdraient eux aussi leur valeur.

En adoptant le point 35 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº1/2003, la Commission ne s'est pas imposée une obligation qui irait à l’encontre de ces principes. En témoigne le fait que ledit point ne fait pas référence à la faillite d’une entreprise, mais vise une situation, survenue "dans un contexte social et économique particulier", dans laquelle l’imposition d’une amende "mettrait irrémédiablement en danger la viabilité économique de l’entreprise concernée et conduirait à priver ses actifs de toute valeur".

Il s'ensuit que le seul fait que l’imposition d’une amende pour infractions aux règles de concurrence risque de provoquer la faillite de l’entreprise concernée n’est pas suffisant, s’agissant de l’application du point 35 des lignes directrices. En effet, si une faillite porte atteinte aux intérêts financiers des propriétaires ou actionnaires concernés, elle n’implique pas nécessairement la disparition de l’entreprise en cause. Celle-ci peut continuer à subsister en tant que telle, soit, en cas de recapitalisation de la société déclarée en faillite, en tant que personne morale assurant l’exploitation de ladite entreprise, soit, en cas de reprise globale par une autre entité des éléments de son actif et donc de l’entreprise, en tant qu’entité exerçant une activité économique. Une telle reprise globale peut intervenir soit par un rachat volontaire soit par une vente forcée des actifs de la société en faillite avec continuité d’exploitation.

Par conséquent, il convient de comprendre le point 35 des lignes directrices, notamment au regard de la référence à la privation des actifs de l’entreprise concernée de toute valeur, comme envisageant la situation où la reprise de l’entreprise, ou tout du moins de ses actifs, paraît improbable voire impossible. Dans une telle hypothèse, les éléments composant l’actif de l’entreprise en faillite seront offerts à la vente un par un et il est probable que beaucoup d’entre eux ne trouveront aucun acheteur ou, au mieux, ne seront vendus qu’à un prix fortement réduit, de sorte qu’il paraît légitime de parler, ainsi que le fait le point 35 des lignes directrices, d’une perte totale de leur valeur.

En outre, l’application dudit point des lignes directrices exige également, selon son libellé, un "contexte social et économique particulier". Un tel contexte est constitué par les conséquences que le paiement de l’amende pourrait avoir, notamment sur le plan d’une augmentation du chômage ou d’une détérioration des secteurs économiques en amont et en aval de l’entreprise concernée.

Arrêt du 12 décembre 2012, Novácke chemické závody / Commission (T-352/09) (cf. points 186-190, 192)

Voir le texte de la décision.

Arrêt du 14 mai 2014, Donau Chemie / Commission (T-406/09) (cf. points 285-290, 299)



Arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver / Commission (T-400/09) (cf. points 94-100, 112, 114, 115)

Arrêt du 16 septembre 2013, Rubinetteria Cisal / Commission (T-368/10) (cf. points 116, 120)

4. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Critères - Caractère dissuasif de l'amende - Pouvoir d'appréciation de la Commission - Limites - Respect du principe de proportionnalité et d'égalité de traitement - Obligation de prendre en considération la situation financière déficitaire de l'entreprise concernée - Absence



Arrêt du 12 décembre 2012, 1. garantovaná / Commission (T-392/09) (cf. points 112-119, 131-132, 137)

5. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Critères - Capacité contributive réelle de l'entreprise dans un contexte social et économique particulier - Prise en considération - Conditions - Mise en danger irrémédiable de la viabilité économique de l'entreprise par l'amende - Condition ne pouvant être remplie pour une entreprise ayant décidé de cesser ses activités et de vendre ses actifs



Arrêt du 12 décembre 2012, 1. garantovaná / Commission (T-392/09) (cf. points 142-144)

6. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Lignes directrices pour le calcul des amendes - Possibilité de prendre en compte la capacité contributive réelle d'une entreprise dans un contexte social et économique particulier - Marge d'appréciation réservée à la Commission - Illégalité - Absence



Arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver / Commission (T-400/09) (cf. points 40-46, 48-51)

7. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Critères - Situation financière de l'entreprise concernée - Prise en considération - Absence d'obligation

Voir le texte de la décision.

Arrêt du 14 mars 2013, Dole Food et Dole Germany / Commission (T-588/08) (cf. point 673)

Arrêt du 7 septembre 2016, Pilkington Group e.a. / Commission (C-101/15 P) (cf. points 67, 76)

8. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Possibilité pour la Commission de s'écarter de la méthodologie générale pour la fixation des amendes - Réduction pour absence de capacité contributive ou du fait des particularités d'une affaire - Conditions

En matière de concurrence, aux termes du point 35 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003, dans des circonstances exceptionnelles, la Commission peut, sur demande, tenir compte de l’absence de capacité contributive d’une entreprise dans un contexte social et économique particulier. Toutefois, le point 37 de ces lignes directrices prévoit que, bien que lesdites lignes directrices exposent la méthodologie générale pour la fixation d’amendes, les particularités d’une affaire donnée ou la nécessité d’atteindre un niveau dissuasif dans une affaire particulière peuvent justifier que la Commission s’écarte de cette méthode ou des limites fixées au point 21. Il s’ensuit que, contrairement au point 35 desdites lignes directrices, l’application dudit point 37 est indépendante de la capacité contributive de l’entreprise concernée.

Néanmoins, le libellé de ce point 37 n’exclut pas que l’absence de capacité contributive d’une entreprise puisse être pertinente pour décider de son application. Cependant, il est nécessaire, afin de donner un effet utile tant au point 35 qu’au point 37 des lignes directrices pour le calcul des amendes, que les conditions de leur application respective soient distinctes. Dès lors, une absence de capacité contributive ou une capacité contributive réduite au sens dudit point 35 ne saurait à elle seule, et en tout état de cause, être considérée comme suffisante pour entraîner l’application éventuelle du point 37 de ces lignes directrices.

Arrêt du 11 juillet 2013, Ziegler / Commission (C-439/11 P) (cf. points 171, 173)

9. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Critères - Gravité de l'infraction - Prise en compte de la capacité contributive réduite d'une entreprise - Notion - Entreprise de taille moindre par rapport à d'autres participants à l'entente - Exclusion

Voir le texte de la décision.

Arrêt du 14 mai 2014, Donau Chemie / Commission (T-406/09) (cf. point 112)

10. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Ajustement du montant de base - Capacité contributive - Obligation de prendre en considération la situation financière déficitaire de l'entreprise concernée - Absence - Capacité contributive réelle de l'entreprise dans un contexte social et économique particulier - Prise en considération - Conditions

Voir le texte de la décision.

Arrêt du 15 juillet 2015, Westfälische Drahtindustrie e.a. / Commission (T-393/10) (cf. points 288-296)

Par décision du 24 juin 2015{1}, la Commission a imposé des amendes à cinq sociétés appartenant à un groupe d’entreprises (ci-après le « groupe CCPL ») pour avoir participé, avec leurs concurrents, à des arrangements collusoires visant à limiter la concurrence sur le marché européen du conditionnement alimentaire dans des barquettes en polystyrène et en polypropylène. Pour le calcul du montant des amendes, ces cinq sociétés ont bénéficié d’une réduction de 25 % au titre de leur capacité contributive réduite.

Parmi les cinq sociétés sanctionnées figuraient Coopbox Group SpA, Coopbox Eastern s.r.o. et CCPL - Consorzio Cooperative di Produzione e Lavoro SC (ci-après « CCPL »), la société mère du groupe CCPL. Dans ce contexte, CCPL était tenue responsable des comportements anticoncurrentiels de ses filiales Coopbox Group et Coopbox Eastern, qu’elle détenait par l’intermédiaire d’une société tierce, CCPL SpA.

Par son arrêt du 11 juillet 2019{2}, le Tribunal a partiellement annulé la décision de la Commission de 2015 pour insuffisance de motivation en ce qui concerne l’octroi de la réduction de 25 % au titre de la capacité contributive réduite des entreprises concernées.

À la suite du prononcé dudit arrêt, la Commission, par décision du 17 décembre 2020{3} (ci-après la « décision attaquée »), a infligé de nouvelles amendes et rejeté la demande des requérantes visant à bénéficier d’une réduction du montant au titre de leur capacité contributive réduite.

Les sociétés Coopbox Group, Coopbox Eastern et CCPL ont introduit un recours en annulation de la décision attaquée, qui est rejeté par la neuvième chambre élargie du Tribunal. Dans son arrêt, ce dernier aborde, d’une part, les conditions de l’imputation du comportement infractionnel d’une ou de plusieurs filiales à la société mère et, d’autre part, les règles d’octroi d’une réduction de l’amende au titre de l’absence de capacité contributive des entreprises concernées.

Appréciation du Tribunal

Le Tribunal analyse, premièrement, les griefs des requérantes visant à contester l’imputation à CCPL des comportements anticoncurrentiels de ses filiales CoopBox Group et CoopBox Eastern.

S’agissant, en premier lieu, du respect de l’obligation de motivation incombant à la Commission, le Tribunal observe que cette dernière a constaté, dans la décision attaquée, que CCPL était la société faîtière du groupe CCPL pendant toute la durée des infractions en cause, que sa participation directe ou indirecte dans une ou plusieurs filiales impliquées dans ces infractions était de 100 %, puis de 93,864 %, et qu’une telle participation était suffisante pour présumer qu’elle exerçait une influence déterminante sur le comportement de sa filiale. Or, ces éléments étaient de nature à permettre, d’une part, aux requérantes de comprendre l’argumentation qui avait conduit la Commission à retenir la responsabilité de CCPL, et, d’autre part, au Tribunal de contrôler le bien-fondé de ces motifs.

En ce qui concerne, en deuxième lieu, le grief des requérantes tiré de la violation du principe de la responsabilité personnelle, le Tribunal confirme que CCPL a, certes, été tenue responsable des infractions commises par ses filiales alors que ces infractions n’avaient pas été imputées à la société tierce par l’intermédiaire de laquelle CCPL les détenait.

Toutefois, il ressort d’une jurisprudence constante que lorsqu’une société mère détient directement ou indirectement la totalité ou la quasi-totalité du capital d’une filiale ayant commis une infraction aux règles de concurrence, il existe une présomption réfragable selon laquelle cette société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale. À moins qu’elle ne soit renversée, une telle présomption fonde la Commission à tenir la société mère pour responsable du comportement de sa filiale, sans avoir à produire une quelconque preuve additionnelle.

Cette présomption trouve également application lorsque la société mère détient le capital de sa filiale non directement, mais par l’intermédiaire d’autres sociétés auxquelles aucune infraction n’a été imputée. En effet, une telle circonstance ne remet pas en cause la présomption de l’exercice effectif, par la société mère, du fait de sa participation indirecte dans ses filiales, d’une influence déterminante sur leur comportement.

Par ailleurs, il résulte également de la jurisprudence qu’il incombe à une unité économique constituée de plusieurs personnes physiques ou morales qui enfreint les règles de la concurrence, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction.

Eu égard à ces considérations, le Tribunal juge que la Commission n’a pas commis d’erreur de droit en imputant à CCPL des pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par Coopbox Group et par Coopbox Eastern.

En troisième lieu, le Tribunal écarte le grief de CCPL tiré du fait que, dès lors que celle-ci ne détenait qu’une participation de 93,864 % dans la société intermédiaire CCPL SpA, la présomption de responsabilité pour les agissements de ses filiales n’était pas applicable en l’espèce.

À cet égard, le Tribunal relève qu’une société mère qui détient la quasi-totalité du capital de sa filiale se trouve, en principe, dans une situation analogue à celle d’un propriétaire exclusif en ce qui concerne son pouvoir d’exercer une influence déterminante sur le comportement de sa filiale. Dès lors, la Commission était en droit de présumer que CCPL avait fait un usage effectif de son pouvoir d’exercer une influence déterminante sur le comportement de ses filiales, nonobstant les allégations selon lesquelles CCPL n’aurait pas donné d’instructions à ses filiales ni eu connaissance des ententes en cause.

Secondement, le Tribunal se penche sur les griefs des requérantes tirés de prétendues erreurs commises par la Commission dans le cadre de son appréciation de leurs capacités contributives.

À cet égard, le Tribunal rappelle que, afin de pouvoir accorder, en vertu du paragraphe 35 des lignes directrices de 2006{4}, une réduction d’amende pour absence de capacité contributive des entreprises concernées, deux conditions doivent être remplies simultanément. D’une part, il doit être démontré que l’amende infligée mettrait irrémédiablement en danger la viabilité économique de l’entreprise concernée et conduirait à priver ses actifs de toute valeur. D’autre part, l’existence d’un contexte économique et social particulier doit également être établie.

S’agissant de la première condition, il ressort de la jurisprudence que la référence à la privation des actifs de l’entreprise concernée de toute valeur doit être comprise comme envisageant la situation dans laquelle la reprise globale desdits actifs par le biais d’un rachat volontaire ou d’une vente forcée de ceux-ci avec poursuite d’exploitation paraît improbable, voire impossible. La seule constatation d’une situation financière défavorable ou déficitaire de l’entreprise concernée ne saurait, en revanche, suffire à fonder une demande visant à obtenir de la Commission qu’elle tienne compte de l’absence de sa capacité contributive pour accorder une réduction d’amende. Par ailleurs, le fait qu’une mesure prise par une autorité de l’Union européenne provoque la faillite ou la liquidation d’une entreprise n’est pas interdit, en tant que tel, par le droit de l’Union.

Quant à la seconde condition, relative à l’existence d’un contexte économique et social particulier, le Tribunal rappelle que celle-ci renvoie aux conséquences que le paiement de l’amende pourrait entraîner, notamment en termes d’augmentation du chômage ou de détérioration des secteurs économiques situés en amont et en aval de l’entreprise concernée.

Au regard de ces conditions, le Tribunal commence par constater que les requérantes n’avaient ni produit les données prévisionnelles consolidées concernant leur liquidités disponibles pour la période 2020-2023, ni expliqué à la Commission pourquoi le groupe CCPL ne pouvait pas utiliser les liquidités disponibles au niveau du groupe pour payer les amendes en cause. En réponse à l’argument des requérantes selon lequel les données prévisionnelles pour l’ensemble du groupe CCPL n’étaient pas pertinentes en l’espèce, le Tribunal souligne, en outre, que, dans le cadre de l’appréciation de la capacité contributive d’un groupe d’entreprises, la Commission doit tenir compte de la situation financière de l’ensemble des entités de ce groupe dans la mesure où les ressources de toutes ces entités peuvent être mobilisées pour faire face à des amendes. Par ailleurs, la présence d’éléments démontrant un niveau de passifs largement supérieur à celui des actifs ne pouvait suffire, à elle seule, à démontrer qu’en l’espèce l’imposition d’amendes aurait mis en danger la viabilité économique des requérantes.

Ainsi, le Tribunal juge que les conclusions de la Commission selon lesquelles le groupe CCPL disposait de liquidités suffisantes pour payer le montant total des amendes et qu’il n’y avait qu’une faible probabilité que la viabilité économique de ce groupe fût en elle-même menacée par le paiement de l’amende imposée ne sont entachées d’aucune erreur d’appréciation.

Par conséquent, le Tribunal rejette le recours dans son intégralité.

{1} Décision C(2015) 4336 final de la Commission, du 24 juin 2015, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire AT.39563 - Conditionnement alimentaire destiné à la vente au détail) (ci-après la « décision de 2015 »).

{2} Arrêt du 11 juillet 2019, CCPL e.a. / Commission (T 522/15, non publié, EU:T:2019:500).

{3} Décision C(2020) 8940 final de la Commission, du 17 décembre 2020.

{4}Lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2)

Arrêt du 7 décembre 2022, CCPL e.a. / Commission (T-130/21) (cf. points 99-108, 112, 127-136, 143-147, 157-161)



Arrêt du 11 juillet 2019, Italmobiliare e.a. / Commission (T-523/15) (cf. points 169-178)

11. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Ajustement du montant de base - Capacité contributive - Contrôle de pleine juridiction par le juge de l'Union - Erreurs d'appréciation par la Commission - Annulation - Exercice par le juge de l'Union de sa compétence de pleine juridiction

En matière de concurrence, dans la mesure où l'application du point 35 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement nº 1/2003 constitue le dernier élément pris en considération lors de la détermination du montant des amendes, l'appréciation de la capacité contributive des entreprises sanctionnées pour violation de l'article 101 TFUE relève de la compétence de pleine juridiction qui est prévue à l'article 261 TFUE et à l'article 31 du règlement nº 1/2003. En effet, des erreurs commises par la Commission, dans le cadre de l'appréciation de la capacité contributive des entreprises incriminées, sont de nature à entraîner l'annulation de sa décision, en tant qu'une amende y est infligée auxdites entreprises, et à justifier que le juge de l'Union exerce sa compétence de pleine juridiction.

À cet égard, dans une situation où, après la réception d'une communication des griefs, les sociétés visées ont transféré des fonds à d'autres sociétés appartenant au même groupe, la circonstance que l'absence de capacité contributive trouve son origine dans des décisions de gestion discrétionnaires ne suffit pas à elle seule à justifier le rejet de toute demande de réduction d'amende. La Commission doit tenir compte, aux fins de l'appréciation de la capacité contributive, des raisons pour lesquelles ces transferts ont été réalisés. En effet, des financements accordés à d'autres sociétés d'un groupe peuvent notamment répondre à la nécessité de financer des acquisitions réalisées avant l'envoi de la communication des griefs. Par ailleurs, la Commission doit considérer, le cas échéant, que de tels transferts financiers demeurent sans aucune incidence sur l'appréciation de la capacité contributive du groupe d'entreprises considéré dans son ensemble.

En outre, pour rejeter une demande de réduction d'amende, la Commission ne saurait faire abstraction de ce que l'entreprise concernée a suffisamment établi être dans l'impossibilité aussi bien d'acquitter en un seul versement le montant total des amendes mis à sa charge que d'obtenir un financement ou même une garantie bancaire à hauteur de ce montant.

Dans ce contexte, si le juge de l'Union, eu égard aux erreurs d'appréciation qui l'entachent, annule la décision de la Commission, en tant qu'une amende y est infligée à l'entreprise concernée, rien n'empêche que ledit juge conclue, dans l'exercice de son pouvoir de pleine juridiction, qu'aucune réduction d'amende ne doit être accordée en raison de la capacité contributive de cette entreprise et qu'il condamne celle-ci au paiement d'une amende d'un montant identique à celui de l'amende infligée dans la décision annulée.

Arrêt du 15 juillet 2015, Westfälische Drahtindustrie e.a. / Commission (T-393/10) (cf. points 297, 311, 319, 321, 328, 332, 357, 358)

12. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Ajustement du montant de base - Capacité contributive - Obligation de prendre en considération la situation financière déficitaire de l'entreprise concernée - Absence - Capacité contributive réelle de l'entreprise dans un contexte social et économique particulier - Prise en considération - Conditions - Prise en compte des principes de proportionnalité et d'égalité de traitement

Voir le texte de la décision.

Arrêt du 15 juillet 2015, Trafilerie Meridionali / Commission (T-422/10) (cf. points 356-365, 373-376, 383, 392)

13. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Pouvoir d'appréciation de la Commission - Contrôle juridictionnel - Compétence de pleine juridiction du juge de l'Union - Portée - Limites - Respect des principes généraux du droit

Le respect du principe d'égalité de traitement s’impose au Tribunal, non seulement dans le cadre de l’exercice de son contrôle de la légalité de la décision de la Commission infligeant des amendes pour violation du droit de la concurrence, mais également dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction. En effet, l’exercice d’une telle compétence ne saurait entraîner, lors de la détermination du montant des amendes qui leur sont infligées, une discrimination entre les entreprises qui ont participé à un accord ou à une pratique concertée contraire à l’article 101, paragraphe 1, TFUE.

La prise en compte d’éléments postérieurs à la décision ayant infligé l'amende pour l’appréciation de la capacité contributive des entreprises visées par celle-ci dans le cadre de l’exercice par le Tribunal de sa compétence de pleine juridiction n’entraîne aucune discrimination par rapport aux entreprises qui n’ont pas introduit de recours aux fins de contester l’appréciation de leur capacité contributive par la Commission.

Ordonnance du 7 juillet 2016, Westfälische Drahtindustrie e.a. / Commission (C-523/15 P) (cf. points 64, 66)

14. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Critères - Obligation de prendre en considération la situation financière déficitaire de l'entreprise concernée - Absence - Capacité contributive réelle de l'entreprise dans un contexte social et économique particulier - Prise en considération - Conditions - Contrôle juridictionnel relevant de la compétence de pleine juridiction

Voir le texte de la décision.

Arrêt du 8 septembre 2016, Goldfish e.a. / Commission (T-54/14) (cf. points 134-148)

15. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Critères - Obligation de prendre en considération la situation financière déficitaire de l'entreprise concernée - Absence - Capacité contributive réelle de l'entreprise dans un contexte social et économique particulier - Prise en considération - Conditions - Violation du principe d'égalité de traitement - Absence

En exposant les raisons pour lesquelles il considère qu’une entreprise est en mesure de payer le montant de l’amende qui lui a été infligée pour violation des règles de concurrence de l’Union, le Tribunal peut, sans commettre d’erreur de droit, se contenter de répondre au grief présenté devant lui pris de la violation du principe d’égalité de traitement, en constatant que les situations, sur le plan financier, d’autres entreprises condamnées pour la même violation sont différentes de celle de l'entreprise requérante et que c’est compte tenu de ces différences, et non au regard des modalités de participation de ces entreprises à l’infraction, que la Commission a considéré qu’il était approprié de réduire partiellement le montant de l’amende en cause, calculé pour tenir compte de l’absence de capacité contributive de chacune de ces entreprises.

Arrêt du 14 septembre 2016, Trafilerie Meridionali / Commission (C-519/15 P) (cf. points 44, 45)

16. Concurrence - Amendes - Montant - Détermination - Ajustement du montant de base - Capacité contributive - Obligation de prendre en considération la situation financière déficitaire de l'entreprise concernée - Absence

Par son arrêt Recylex e.a./Commission (T-222/17), du 23 mai 2019, le Tribunal a rejeté le recours de Recylex SA, Fonderie et Manufacture de Métaux SA et Harz-Metall GmbH (ci-après « Recylex »), des sociétés actives dans la production de plomb recyclé et d’autres produits, tendant à la réduction du montant de l’amende infligée par la Commission dans sa décision{1} relative à une infraction à l’article 101 TFUE. Cette infraction a pris la forme d’accords ou de pratiques concertées entre quatre groupes d’entreprises sur les territoires de la Belgique, de l’Allemagne, de la France et des Pays-Bas. Elle a consisté en la coordination des prix d’achat de déchets de batteries automobiles plomb-acide utilisés pour la production de plomb recyclé.

La procédure administrative à l’origine de la décision attaquée avait été ouverte à la suite d’une demande d’immunité déposée par JCI, un des groupes d’entreprises concernés. Eco-Bat, autre groupe d’entreprises, puis enfin Recylex avaient présenté, à leur tour, une demande d’immunité ou, à défaut, de réduction de l’amende, au titre de la communication de la Commission sur la coopération de 2006{2}. JCI s’était alors vu accorder l’immunité tandis qu’Eco-Bat avait bénéficié d’une réduction de l’amende de 50 % au motif qu’elle avait été la première entreprise à fournir des éléments de preuve ayant une valeur ajoutée significative. Recylex, deuxième entreprise à apporter de tels éléments, avait quant à elle bénéficié d’une réduction de 30 %.

Dans ce contexte, le Tribunal a été amené à se prononcer sur la question de savoir si, dans le cas où deux entreprises ont fourni des éléments de preuve ayant une valeur ajoutée significative, celle qui les a fournis en second lieu pourrait prendre la place de la première, si la coopération de celle-ci se révélait ne pas être conforme aux exigences du paragraphe 12 de la communication sur la coopération de 2006.

À cet égard, le Tribunal a constaté qu’il ressort notamment de la logique même de la communication sur la coopération de 2006 que l’effet recherché est de créer un climat d’incertitude au sein des ententes en encourageant leur dénonciation auprès de la Commission. Cette incertitude résulte précisément du fait que les participants à l’entente savent que seul l’un d’entre eux pourra bénéficier d’une immunité d’amende en dénonçant les autres participants à l’infraction, les exposant ainsi au risque qu’ils se voient infliger des amendes. Dans le cadre de ce système, et selon la même logique, les entreprises les plus rapides à fournir leur coopération sont censées bénéficier de réductions plus importantes des amendes auxquelles elles seraient autrement assujetties que celles accordées aux entreprises moins rapides à coopérer. L’ordre chronologique et la rapidité de la coopération offerte par les membres de l’entente constituent donc des éléments fondamentaux du système mis en place par la communication sur la coopération de 2006.

{1 Décision C(2017) 900 final de la Commission, du 8 février 2017, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE (affaire AT.40018 - Recyclage de batteries automobiles).}

{2 Communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17).}

Arrêt du 23 mai 2019, Recylex e.a. / Commission (T-222/17) (cf. points 164-166)

17. Concurrence - Amendes - Décision infligeant des amendes - Obligation de motivation - Portée - Indication des éléments d'appréciation ayant permis à la Commission de déterminer la réduction du montant des amendes au regard de la capacité contributive de l'entreprise - Absence - Violation



Arrêt du 11 juillet 2019, CCPL e.a. / Commission (T-522/15) (cf. points 161-176)