1. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Obligations des institutions - Portée - Directive 89/391 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail - Application au logement mis à disposition d'un fonctionnaire exerçant ses fonctions dans un pays tiers - Limites

En ce qui concerne la sécurité des conditions de travail de son personnel, une institution a, comme tout employeur public ou privé, une obligation d’agir. Ce personnel peut en effet invoquer un droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa dignité, comme le rappelle d’ailleurs l’article 31, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

De même, il résulte de l’article 1er sexies, paragraphe 2, du statut, et de plusieurs directives européennes, en particulier de la directive 89/391, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, que l’employeur est tenu d’assurer la sécurité et la santé de son personnel dans tous les aspects liés au travail. Dans ce domaine, l’obligation pour une institution, en qualité d’employeur, d’assurer la sécurité de son personnel s’impose avec une rigueur particulière et la marge d’appréciation de l’administration, sans être inexistante, est réduite.

Toutefois, pour étendue qu’elle soit, cette obligation d’assurer la sécurité de son personnel ne peut aller jusqu’à faire peser sur l’institution concernée une obligation absolue de résultat. Ne peuvent notamment être négligées les contraintes d’ordre budgétaire, administratif ou technique auxquelles l’administration est confrontée, qui rendent parfois difficile voire impossible la mise en œuvre à bref délai de mesures pourtant urgentes et nécessaires, en dépit des diligences effectuées par les autorités compétentes. En outre, cette obligation de sécurité est rendue délicate lorsque le fonctionnaire concerné, à la différence d’un travailleur occupant un poste fixe dans un endroit déterminé, est amené à exercer ses fonctions dans un pays tiers et à assumer une fonction, comparable à une fonction diplomatique, exposée à des risques variés et moins aisément identifiables et maîtrisables.

À cet égard, le logement d’un tel fonctionnaire, même s’il est mis à la disposition de celui-ci en raison de ses fonctions et fait l’objet de mesures de protection spécifiques dans certaines délégations de pays tiers, ne peut être complètement assimilé à un poste de travail ou un lieu de travail, au sens de la directive 89/391. Dans un tel contexte, l’obligation de sécurité à la charge de l’institution implique, d’abord, qu’elle évalue les risques auxquels son personnel est exposé et s’inscrive dans une démarche préventive intégrée à tous les niveaux du service, ensuite, qu’elle informe le personnel concerné des risques qui ont pu être identifiés et s’assure que le personnel a bien reçu les instructions appropriées relatives aux risques pour sa sécurité, enfin, qu’elle prenne les mesures de protection adaptées et mette en place l’organisation et les moyens qu’elle a jugés nécessaires.

Arrêt du 12 mai 2011, Missir Mamachi di Lusignano / Commission (F-50/09) (cf. points 126-127, 130-132)

2. Fonctionnaires - Égalité de traitement - Discrimination - Dispositions générales d'exécution adoptées par la Commission - Handicap - Obligation de prévoir des aménagements raisonnables dans le domaine de l'emploi - Portée

Il peut être déduit de la décision de la Commission relative à l’application de l’article 1er quinquies, paragraphe 4, du statut des fonctionnaires, concernant l’interdiction de la discrimination, que l’administration doit fournir des aménagements raisonnables afin qu’un fonctionnaire atteint d’une déficience soit en mesure d’exercer les fonctions essentielles liées à son emploi. Par suite, si cette décision prévoit, parmi les aménagements raisonnables susceptibles d’être mis en place, la possibilité de modifier des règles ou des pratiques, il y a lieu de comprendre cette disposition comme visant les règles et pratiques concernant les conditions de travail et la gestion du personnel en rapport avec un emploi donné dont la personne atteinte d’une déficience serait précisément en mesure d’exercer les fonctions essentielles moyennant les aménagements envisagés. Partant, permettre à un fonctionnaire d’être dispensé de toute obligation de rotation, sans examen concret des besoins de l'emploi concerné et des mesures appropriées, et ce en guise d’aménagement raisonnable, irait au-delà des exigences prévues par la décision de la Commission.

Par ailleurs, cette interprétation est confirmée par la lecture de la directive 2000/78 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, dont il ne saurait être fait abstraction dans l’application et l’interprétation de la décision de la Commission, dès lors que celle-ci a été prise pour l’exécution de l’article 1er quinquies, paragraphe 4, du statut, lequel définit la notion d’aménagements raisonnables en des termes analogues à ceux de l’article 5 de ladite directive.

Arrêt du 15 septembre 2011, Esders / Commission (F-62/10) (cf. points 68, 70-71)

3. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Fonctionnaires enceintes, accouchées ou allaitantes au travail - Interdiction de licenciement - Exception - Révocation à la suite d'une procédure disciplinaire

L’article 10 de la directive 92/85, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, ne saurait être interprété en ce sens qu’il interdit tout licenciement d’une travailleuse enceinte. En effet, une décision de révocation prise pendant la période allant du début de la grossesse jusqu’au terme du congé de maternité pour des motifs non liés à l’état de grossesse n’est pas contraire audit article 10, à condition que l’employeur donne par écrit des motifs justifiés de licenciement et que le licenciement de l’intéressée soit admis par la législation et/ou la pratique, conformément aux dispositions de l’article 10, points 1 et 2, de cette directive.

À cet égard, bien que le statut des fonctionnaires ne prévoie pas une disposition spécifique qui établisse explicitement une exception à l’interdiction prévue par l’article 10 de ladite directive, il doit être interprété en ce sens qu’il admet une telle exception à son article 47, sous e), lequel prévoit la possibilité, tout à fait exceptionnelle, de cessation définitive des fonctions d’un fonctionnaire en cas de décision de révocation adoptée suite à une procédure disciplinaire.

Arrêt du 17 juillet 2012, BG / Médiateur (F-54/11) (cf. points 139, 142)

4. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Article 1er sexies, paragraphe 2, du statut - Interprétation - Interprétation conforme à l'article 7 de la directive 2003/88 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail - Absence - Objet différent

À la lecture du libellé de l’article 1er sexies, paragraphe 2, du statut, il ne saurait être considéré que cet article correspond à la situation selon laquelle les institutions auraient, par son insertion dans le statut, entendu donner exécution à une obligation particulière énoncée par la directive 2003/88, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, ou que la référence contenue dans cet article aux prescriptions minimales applicables en vertu des mesures arrêtées dans les domaines de santé et de sécurité en application des traités renvoie à l’article 7, paragraphe 1, de ladite directive, dès lors que l’objet de cette dernière diffère de celui de l’article 1er sexies du statut.

En effet, l’article 1er sexies du statut, qui s’intègre dans les dispositions générales du titre I dudit statut, se réfère à la conformité des conditions de travail des fonctionnaires en activité, aux "normes de sécurité et de santé appropriées", ce qui semble viser les normes techniques minimales de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs sur leur lieu de travail, non régies par les autres dispositions du statut, et non les prescriptions minimales de sécurité et de santé de manière générale, couvrant également celles relatives à l’aménagement du temps de travail visées par la directive 2003/88 et, notamment, le congé annuel. En effet, une interprétation aussi large de l’article 1er sexies, paragraphe 2, du statut irait à l’encontre de l’autonomie du législateur de l’Union en matière de fonction publique, consacrée à l’article 336 TFUE.

De plus, le statut contient des dispositions spécifiques sur l’aménagement du temps de travail et des congés, dans son titre IV et dans son annexe V. Les modalités de report, ou de compensation, des jours de congé annuel non pris sur l’année suivante sont spécifiquement régies par l’article 4 de l’annexe V du statut. Dès lors que cette disposition énonce une règle claire et précise, limitant le droit de report et de compensation du congé annuel par rapport au nombre de jours de congé non pris, il ne saurait être fait usage des dispositions de la directive 2003/88 en se fondant sur une autre disposition du statut, telle que l’article 1er sexies, comme constituant une règle d’application générale, permettant de déroger aux dispositions spécifiques du statut en la matière. Cela conduirait à une interprétation contra legem du statut.

Arrêt du 8 novembre 2012, Commission / Strack (T-268/11 P) (cf. points 52-54)

5. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée - Directive 1999/70 - Mesures visant à prévenir l'utilisation abusive de contrats de travail à durée déterminée successifs - Portée

L’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, qui figure en annexe de la directive 1999/70 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, tend à garantir le principe d’interdiction de l’abus de droit, en énonçant, dans sa clause 5, point 1, des prescriptions minimales destinées à éviter l’utilisation abusive des contrats de travail à durée déterminée. Ces prescriptions constituent, certes, des règles du droit social de l’Union revêtant une importance particulière, mais n’expriment pas pour autant des principes généraux du droit.

Ordonnance du 21 février 2013, Avogadri e.a. / Commission (F-58/08) (cf. point 49)

6. Fonctionnaires - Agents temporaires - Protection de la sécurité et de la santé - Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée - Directive 1999/70 - Stabilité de l'emploi - Finalité dépourvue de caractère contraignant - Résiliation d'un contrat à durée indéterminée - Admissibilité

Si la stabilité de l’emploi est conçue comme un élément majeur de la protection des travailleurs, elle ne constitue pas un principe général du droit à l’aune duquel pourrait être appréciée la légalité d’un acte d’une institution. En particulier, il ne ressort nullement de la directive 1999/70, concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, et de l’accord-cadre qui lui est annexé que la stabilité de l’emploi a été érigée en principe général du droit. D’ailleurs, les considérants 6 et 7 de la directive, de même que le premier alinéa du préambule et le considérant 5 de l’accord-cadre, mettent l’accent sur la nécessité d’atteindre un équilibre entre flexibilité et sécurité. Il y a lieu d’ajouter que l’accord-cadre n’édicte pas non plus une obligation générale dans le chef de l’employeur de prévoir, après un certain nombre de renouvellements de contrats à durée déterminée ou l’accomplissement d’une certaine période de travail, la transformation desdits contrats de travail en contrats à durée indéterminée.

Si la stabilité de l’emploi ne peut être considérée comme un principe général du droit, elle constitue, en revanche, une finalité poursuivie par les parties signataires de l’accord-cadre dont la clause 1, sous b), dispose que celui-ci a pour objet d’établir un cadre pour prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs.

Cette conclusion n’est infirmée ni par les articles 30 et 31 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ni par les dispositions de la charte sociale européenne, concernant la réalisation et le maintien du niveau le plus stable possible de l’emploi.

En effet, d’une part, s’agissant de la charte sociale européenne, même s’il ressort de l’article 151 TFUE que celle-ci est une source d’inspiration dont l’Union doit tenir compte dans la poursuite des objectifs que cet article énonce, il n’érige pas la charte sociale européenne en norme au regard de laquelle la compatibilité de la législation de l’Union devrait être appréciée.

D’autre part, s’agissant de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, son article 30 ne condamne pas l’enchaînement de contrats à durée déterminée. De plus, la fin d’un contrat de travail à durée déterminée, du simple fait de la survenance de son terme, ne constitue pas un licenciement devant être spécialement motivé au regard de l’aptitude, de la conduite ou des nécessités de fonctionnement de l’institution. En conséquence, il ne saurait être inféré de l’article 30 de ladite charte que celui-ci devrait conduire à écarter l’application des articles 8 et 88 du régime applicable aux autres agents et de la décision de la Commission du 28 avril 2004, relative à la durée maximale du recours au personnel non permanent dans les services de la Commission, ou qu’il soit appliqué en tant que principe général du droit ou pris en considération pour l’interprétation du contenu de la directive 1999/70.

Ordonnance du 21 février 2013, Avogadri e.a. / Commission (F-58/08) (cf. points 51-55)

7. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée - Directive 1999/70 - Mesures visant à prévenir l'utilisation abusive de contrats de travail à durée déterminée successifs - Raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats - Raisons objectives - Notion - Application aux agents contractuels auxiliaires

La notion de raisons objectives, au sens de la clause 5, point 1, sous a), de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, qui figure en annexe de la directive 1999/70 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, doit être entendue comme visant des circonstances précises et concrètes caractérisant une activité déterminée et, partant, de nature à justifier dans ce contexte particulier l’utilisation de contrats de travail à durée déterminée successifs. Ces circonstances peuvent résulter notamment de la nature particulière des tâches pour l’accomplissement desquelles de tels contrats ont été conclus et des caractéristiques inhérentes à celles-ci ou, le cas échéant, de la poursuite d’un objectif légitime de politique sociale d’un État membre.

S’agissant de la catégorie d’agents contractuels auxiliaires au sens de l’article 3 ter du régime applicable aux autres agents, dont la création correspond à des besoins particuliers, distincts de ceux couverts par la catégorie des agents contractuels visés à l’article 3 bis dudit régime, chaque emploi d’agent contractuel auxiliaire doit répondre à des besoins passagers ou intermittents. Or, la caractéristique principale des contrats d’engagement en qualité d’agent contractuel auxiliaire est leur précarité dans le temps, correspondant à la finalité même de ces contrats qui est de faire remplir des tâches précaires par nature ou en l’absence d’un titulaire, par du personnel occasionnel. Dans le cadre d’une administration à l’effectif important, il est inévitable que de tels besoins se répètent en raison, notamment, de l’indisponibilité de fonctionnaires, de surcroîts de travail dus aux circonstances ou de la nécessité, pour chaque direction générale, de s’entourer occasionnellement de personnes possédant des qualifications ou des connaissances spécifiques. Ces circonstances constituent des raisons objectives justifiant tant la durée déterminée des contrats d’agents auxiliaires que leur renouvellement en fonction de la survenance de ces besoins.

De même, au regard des caractéristiques inhérentes aux activités des agents contractuels auxiliaires, les dispositions des articles 8 et 88 du régime applicable aux autres agents ne portent pas atteinte aux finalités de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée et aux prescriptions minimales de sa clause 5, point 1, sous a), dès lors qu’elles doivent être interprétées ensemble avec l'article 3 ter dudit régime, lu lui-même à la lumière dudit accord-cadre.

Ordonnance du 21 février 2013, Avogadri e.a. / Commission (F-58/08) (cf. points 64, 65, 69, 70)

8. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée - Directive 1999/70 - Mesures visant à prévenir l'utilisation abusive de contrats de travail à durée déterminée successifs - Obligation de requalifier des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée - Absence

L’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, qui figure en annexe de la directive 1999/70 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, n’édicte pas une obligation générale de prévoir, après un certain nombre de renouvellements des contrats à durée déterminée ou l’accomplissement d’une certaine période de travail, la transformation desdits contrats en contrats à durée indéterminée.

Certes, l’article 85, paragraphes 1 et 2, du régime applicable aux autres agents fixe, en ce qui concerne les agents contractuels au titre de l’article 3 bis, les conditions dans lesquelles une succession de contrats peut conduire à un contrat à durée indéterminée. Il se concilie ainsi avec l’objectif poursuivi par la clause 5, point 2, de l’accord-cadre. Toutefois, la circonstance que les dispositions applicables aux agents contractuels auxiliaires ne prévoient pas la transformation de contrats à durée déterminée successifs en un contrat à durée indéterminée demeure compatible avec la clause susmentionnée en l’absence d’une obligation générale en ce sens.

Ordonnance du 21 février 2013, Avogadri e.a. / Commission (F-58/08) (cf. points 71-72)

9. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée - Directive 1999/70 - Champ d'application - Contrat de travail à durée déterminée dans le secteur public - Inclusion - Contrat de travail à durée indéterminée - Exclusion

L'accord-cadre sur le travail à durée déterminée, qui figure en annexe de la directive 1999/70 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, a pour objet, d’une part, d’améliorer la qualité du travail à durée déterminée en assurant le respect du principe de non-discrimination et, d’autre part, d’établir un cadre pour prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs.

Ainsi, la directive 1999/70 et l’accord-cadre ont vocation à s’appliquer aux contrats et relations de travail à durée déterminée conclus avec les administrations et les autres entités du secteur public et visent à encadrer le recours successif à des contrats de travail à durée déterminée, considérés comme une source potentielle d’abus au détriment des travailleurs. Par contre, la directive et l’accord-cadre ne sont pas pertinents pour apprécier la situation des personnes ayant bénéficié d’un contrat à durée indéterminée.

Arrêt du 26 février 2013, Bojc Golob / Commission (F-74/11) (cf. points 38-40)

10. Fonctionnaires - Agents contractuels - Protection de la sécurité et de la santé - Stabilité de l'emploi - Finalité dépourvue de caractère contraignant - Résiliation d'un contrat à durée indéterminée - Admissibilité

Si la stabilité de l’emploi est conçue comme un élément majeur de la protection des travailleurs, elle ne constitue pas un principe général de droit à l’aune duquel pourrait être appréciée la légalité d’un acte d’une institution. Par conséquent, ledit principe ne saurait être interprété comme interdisant à l’institution de mettre fin à un contrat à durée indéterminée conformément à l’article 47, sous c), i), du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne.

Arrêt du 26 février 2013, Bojc Golob / Commission (F-74/11) (cf. points 42-43)

11. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Obligations des institutions - Portée - Directive 89/391 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail - Effet - Limites

Les institutions de l’Union sont tenues de respecter le droit des travailleurs à des conditions de travail qui respectent notamment leur santé, droit consacré à l’article 31, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Selon les explications afférentes à l’article 31 de la charte, lesquelles, conformément à l’article 6, paragraphe 1, troisième alinéa, TUE et à l’article 52, paragraphe 7, de la charte, doivent être prises en considération pour l’interprétation de celle-ci, l’article 31, paragraphe 1, de la charte se fonde sur la directive 89/391 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail.

Pour sa part, le libellé de l’article 1er sexies, paragraphe 2, du statut, en tant qu’il se réfère aux prescriptions minimales applicables en vertu des mesures arrêtées en application des traités dans les domaines de santé et de sécurité et relatives aux conditions de travail, envisage des règles telles que celles que comporte la directive 89/391, dès lors que celle-ci a elle-même pour objet, ainsi qu’il ressort de son article 1er, paragraphe 1, de mettre en œuvre des mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail.

Toutefois, pour étendue qu’elle soit, l’obligation des institutions de l’Union, lorsqu’elles agissent en tant qu’employeur, d’assurer la sécurité et la santé de leur personnel ne peut aller jusqu’à faire peser sur l’institution concernée une obligation absolue de résultat.

Arrêt du 19 juin 2014, BN / Parlement (F-157/12) (cf. points 104-106, 109, 110)

12. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée - Directive 1999/70 - Obligation pour les États membres d'introduire des mesures visant à prévenir l'utilisation abusive de contrats de travail à durée déterminée successifs - Résiliation d'un contrat à durée déterminée - Absence de violation

L’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, qui figure en annexe de la directive 1999/70 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, ne concerne pas les conditions de résiliation des contrats à durée déterminée ou indéterminée, mais les conditions d’utilisation desdits contrats, conformément à sa clause 1, sous b). En particulier, la clause 5, paragraphe 1, sous a), de l’accord-cadre, selon laquelle, afin de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, les États membres doivent introduire d’une manière qui tienne compte des besoins de secteurs spécifiques et/ou de catégories de travailleurs une ou plusieurs mesures dont des raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats ou relations de travail, ne saurait être directement invoquée contre une décision de résiliation d’un contrat à durée déterminée, laquelle décision n’a ni pour objet ni pour effet de renouveler l’engagement de l’intéressé et ne saurait donc être, par elle-même, contraire aux dispositions de l’accord-cadre.

Arrêt du 2 mars 2016, Ruiz Molina / OHMI (F-60/15) (cf. point 45)

13. Fonctionnaires - Protection de la sécurité et de la santé - Obligations des institutions - Portée - Directive 2003/88 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail - Droit au congé annuel payé - Réduction du nombre de jours de congé annuel payé alloué aux fonctionnaires affectés dans des pays tiers, dans le respect des prescriptions minimales de la directive - Admissibilité

M. Carreras Sequeros et les autres personnes parties à la procédure devant la Cour (ci-après « Carreras Sequeros e.a. ») sont des fonctionnaires ou agents contractuels de la Commission ayant été affectés dans des pays tiers avant le 1er janvier 2014. Lors de la mise à jour de leurs dossiers personnels, afin de tenir compte du nouvel article 6, second alinéa, premier tiret, de l’annexe X du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »){1}, ils se sont vu allouer 36 jours ouvrables de congé annuel pour l’année 2014 contre 42 l’année précédente. Carreras Sequeros e.a ont introduit des réclamations qui ont été rejetées, selon les cas, par l’autorité investie du pouvoir de nomination ou par l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement.

Dans leur recours introduit devant le Tribunal, Carreras Sequeros e.a. ont demandé de déclarer illégal le nouvel article 6 de l’annexe X du statut et d’annuler les décisions de la Commission, portant réduction de leurs congés annuels à compter de l’année 2014 (ci-après les « décisions litigieuses »). Le Tribunal a accueilli le recours{2} et a annulé ces décisions au motif que la Commission ne pouvait pas valablement se fonder sur le nouvel article 6 de l’annexe X du statut pour adopter les décisions litigieuses, dans la mesure où cet article, en réduisant de manière significative la durée du congé des fonctionnaires et des agents affectés dans des pays tiers, ne saurait être regardé comme étant compatible avec la nature et la finalité du droit à un congé annuel, telles qu’elles ressortent de l’article 31, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), lu à la lumière de la directive 2003/88{3}.

Saisie de pourvois formés par la Commission (affaire C-119/19 P) et par le Conseil (C-126/19 P), la Cour a annulé l’arrêt du Tribunal par un arrêt de la grande chambre du 8 septembre 2020. Dans ce même arrêt, après avoir statué elle-même définitivement sur le litige, la Cour a rejeté le recours introduit par Carreras Sequeros e.a. dans l’affaire T-518/16.

Tout d’abord, la Cour a considéré que c’est à bon droit que le Tribunal avait jugé recevable l’exception d’illégalité invoquée par Carreras Sequeros e.a., laquelle visait l’ensemble du régime de congé annuel prévu au nouvel article 6 de l’annexe X du statut, y compris sa phase définitive applicable à partir de l’année 2016. La Cour a jugé, à cet égard, que, la nature même d’une période transitoire étant d’organiser le passage progressif d’un régime à un autre, la période transitoire, prévue au nouvel article 6, second alinéa, de l’annexe X du statut, ne tire sa justification que de l’adoption du régime définitif instauré par le premier alinéa dudit article. Dans ces conditions, les décisions litigieuses constituent des mesures d’application du régime mis en place, à compter du 1er janvier 2014, par ce nouvel article 6 de l’annexe X du statut et entretiennent un lien juridique direct avec ce régime dans son ensemble.

Ensuite, la Cour s’est prononcée sur la nature et la finalité du droit au congé annuel, tel que consacré à l’article 31, paragraphe 2, de la Charte. À cet égard, la Cour a relevé qu’il découle des explications afférentes à cette disposition que la référence faite par celles-ci à la directive 2003/88 renvoie aux dispositions de cette directive qui reflètent et précisent le droit fondamental à une période annuelle de congés payés. Tel est le cas de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/88, qui prévoit un droit au congé annuel payé d’au moins quatre semaines et qui doit, sous réserve des dispositions plus favorables contenues dans le statut, être appliqué aux fonctionnaires et aux agents des institutions de l’Union. Par conséquent, et contrairement à ce que le Tribunal a jugé, ne saurait être considérée comme constituant une atteinte au droit fondamental au congé annuel payé une disposition du droit de l’Union qui, à l’instar du nouvel article 6, de l’annexe X du statut, et même si elle prive graduellement les personnes concernées d’un certain nombre de jours de congé annuel payé, leur assure toujours un droit à ce congé d’une durée supérieure aux quatre semaines minimales. La Cour a ajouté que, dans ces conditions, une disposition telle que le nouvel article 6 de l’annexe X du statut est de nature à garantir la satisfaction de la double finalité du droit au congé annuel, à savoir, permettre au travailleur de se reposer par rapport à l’exécution des tâches qui lui incombent et disposer d’une période de détente et de loisir. La Cour a donc accueilli les pourvois et annulé l’arrêt du Tribunal.

Enfin, statuant définitivement sur le litige en première instance, la Cour a rejeté comme étant non fondés l’ensemble des moyens présentés devant le Tribunal par Carreras Sequeros e.a, dont ceux tirés de la violation des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime ainsi que du droit au respect de la vie privée.

S’agissant du principe d’égalité de traitement, qui est applicable au droit de la fonction publique de l’Union, la Cour a relevé que le législateur de l’Union a bien tenu compte de la situation particulière qui distingue les fonctionnaires et agents affectés dans un pays tiers du personnel affecté dans l’Union. En effet, il a maintenu, en faveur de ces fonctionnaires et agents, la possibilité de solliciter un congé spécial de détente qui s’ajoute au droit au congé annuel payé reconnu par le statut à tout fonctionnaire ou agent de l’Union.

Quant au principe de protection de la confiance légitime, la Cour a rappelé que, d’une part, le lien juridique entre les fonctionnaires et l’administration de l’Union est de nature statutaire et non contractuelle. Dès lors, les droits et les obligations de ces fonctionnaires peuvent être modifiés à tout moment par le législateur de l’Union. D’autre part, le droit de se prévaloir dudit principe suppose que des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, ont été fournies aux intéressés par les autorités compétentes de l’Union. Or, dans le cas d’espèce, il n’a pas été établi qu’une quelconque assurance ait été donnée par les autorités compétentes de l’Union quant au fait que l’article 6 de l’annexe X du statut ne serait jamais modifié.

S’agissant du droit au respect de la vie privée et de la vie familiale, la Cour a essentiellement souligné l’existence, dans le statut, d’une série de dispositions tenant spécifiquement compte de la situation familiale particulière des fonctionnaires et agents affectés dans un pays tiers. Elle a ajouté que l’appréciation de la légalité d’un acte de l’Union au regard des droits fondamentaux ne saurait reposer sur des allégations tirées des conséquences de cet acte dans le cas particulier d’un requérant.

{1} Depuis la prise d’effet, le 1er janvier 2014, de l’article 1er, point 70, sous a), du règlement (UE, Euratom) nº 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013, modifiant le statut des fonctionnaires de l’Union européenne et le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (JO 2013, L 287, p. 15), l’article 6 de l’annexe X du statut prévoit, en ce qui concerne les fonctionnaires affectés dans un pays tiers :

« Le fonctionnaire a droit, par année civile, à un congé annuel de deux jours ouvrables [contre trois jours et demi ouvrables précédemment] par mois de service.

Nonobstant le premier alinéa du présent article, les fonctionnaires déjà affectés dans un pays tiers au 1er janvier 2014 ont droit :

- à trois jours ouvrables du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 ;

- à deux jours ouvrables et demi du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015. »

Le nouvel article 6, second alinéa, premier tiret, de l’annexe X du statut constitue ainsi une disposition transitoire organisant le passage progressif vers le régime définitif du congé annuel mis en place par le premier alinéa de cet article, afin, notamment, d’éviter ou d’atténuer les effets d’une modification abrupte du régime antérieur pour les membres du personnel concernés, déjà affectés dans un pays tiers au 1er janvier 2014, tels que Carreras Sequeros e.a.

{2} Arrêt du 4 décembre 2018, Carreras Sequeros e.a./Commission (T-518/16, EU:T:2018:873).

{3} Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (JO 2003, L 299, p. 9).

Arrêt du 8 septembre 2020, Commission / Carreras Sequeros e.a. (C-119/19 P et C-126/19 P) (cf. points 110-127)

14. Fonctionnaires - Égalité de traitement et non-discrimination - Handicap - Obligation de prévoir des aménagements raisonnables dans le domaine de l'emploi - Portée - Contrôle juridictionnel - Limites - Remise en cause d'appréciations médicales - Exclusion



Arrêt du 27 octobre 2021, WM / Commission (T-411/18) (cf. points 42-44, 65, 77)



Arrêt du 30 mars 2022, PO / Commission (T-36/21) (cf. points 58-60, 93)