1. Libre circulation des marchandises - Messages télévises - Publicité commerciale - Entreprise d'un État membre - Droit d'exclusivité - Admissibilité - Mode d'utilisation interdit

L'exclusivité dont bénéficie une entreprise d'un État membre d'émettre des messages publicitaires télévisés n'est pas incompatible avec la libre circulation des produits dont ces messages tendent à promouvoir la commercialisation. Il en irait cependant autrement si ce droit était utilisé pour favoriser, au sein de la Communauté, certains courants d'échanges ou certains opérateurs économiques par rapport à d'autres.

Arrêt du 30 avril 1974, Sacchi (155-73, Rec._p._00409)

2. Services - Libre prestation - Restrictions - Obligation de résidence - Interdiction - Prestations particulières - Auxiliaires de la justice - Règles professionnelles - Observation - Obligation d'établissement professionnel - Nécessité objective - Licéité

Les articles 59, alinéa 1er, et 60, alinéa 3, du traité CEE doivent être interprétés en ce sens qu'une législation nationale ne saurait rendre impossible, par l'exigence d'une résidence permanente sur le territoire, la prestation de services par des personnes établies sur le territoire d'un autre État membre, dès lors que la prestation de services n'est soumise à aucune condition particulière par la législation nationale applicable.

Compte tenu de la nature particulière des prestations de services, on ne saurait cependant considérer comme incompatibles avec le traité les exigences spécifiques imposées au prestataire, qui seraient motivées par l'application de règles professionnelles justifiées par l'intérêt général - notamment les règles d'organisation, de qualification, de déontologie, de contrôle et de responsabilité - incombant à toute personne établie sur le territoire de l'État où la prestation est fournie, dans la mesure où le prestataire échapperait à l'emprise de ces règles en raison de la circonstance qu'il est établi dans un autre État membre.

De même, on ne saurait dénier à un État membre le droit de prendre des dispositions destinées à empêcher que la liberté garantie par l'article 59 soit utilisée par un prestataire dont l'activité serait entièrement ou principalement tournée vers son territoire, en vue de se soustraire aux règles professionnelles qui lui seraient applicables s'il était établi sur le territoire de cet État.

Ainsi, on ne saurait considérer comme incompatible avec les dispositions des articles 59 et 60 l'exigence, en ce qui concerne les auxiliaires de la justice, d'un établissement professionnel stable dans le ressort de juridictions déterminées, au cas où cette exigence est objectivement nécessaire en vue de garantir l'observation de règles professionnelles liées, notamment, au fonctionnement de la justice et au respect de la déontologie.

Arrêt du 3 décembre 1974, Van Binsbergen / Bedrijfsvereniging voor de Metaalnijverheid (33-74, Rec._p._01299)

3. Libre prestation des services - Services - Notion - Opérations boursières à terme - Établissement du prestataire dans un État membre autre que celui du destinataire de la prestation

Des prestations consistant, de la part d'une banque, en l'exécution d'ordres en bourse et des opérations en compte courant liées à une ouverture de crédit constituent des services au sens de l'article 60, alinéa 1 du traité.

De telles prestations satisfont à l'exigence de l'article 59, alinéa 1 du traité, aux termes duquel les mesures de libération doivent profiter à tous prestataires de services'établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation', dès lors que le bénéficiaire des prestations a, avant la cessation des rapports conventionnels entre parties, transféré son domicile dans un autre État membre.

Arrêt du 24 octobre 1978, Société générale de banque alsacienne / Koestler (15/78, Rec._p._01971)

4. Services - Libre prestation - Bureaux de placement payants pour artistes du spectacle - Exercice de l'activité - Obligation d'obtenir une licence ou de recourir à un intermédiaire titulaire de licence - Restriction incompatible avec le traité - Critères

Lorsque l'exercice de l'activité des bureaux de placement payants pour artistes du spectacle est subordonné, dans l'État où la prestation est fournie, à la délivrance d'une licence, cet État ne saurait imposer aux prestataires établis dans un autre État membre, soit de satisfaire à cette condition, soit de passer par l'intermédiaire d'un bureau de placement payant titulaire d'une telle licence, dès lors que la prestation est effectuée par un bureau de placement relevant de l'administration publique d'un État membre, ou que le prestataire détient dans l'État membre où il est établi une licence délivrée à des conditions comparables à celles exigées par l'État où la prestation est fournie et ses activités sont soumises, dans le premier État, à une surveillance adéquate, concernant toute activité de placement, quel que soit l'État membre destinataire de la prestation.

Arrêt du 18 janvier 1979, Ministère public e.a. / Van Wesemael (110 et 111/78, Rec._p._00035)

5. Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application matériel - Émission de messages télévisés - Transmission de messages par télédistribution - Inclusion

L'émission de messages télévisés, y compris ceux ayant un caractère publicitaire, relève, en tant que telle, des règles du traité CEE relatives aux prestations de services. Il en va de même de la transmission de tels messages par voie de télédistribution.

Arrêt du 18 mars 1980, Procureur du Roi / Debauve (52/79, Rec._p._00833)

6. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale interdisant la publicité télévisée - Raisons d'intérêt général - Admissibilité - Conditions

Les articles 59 et 60 du traité CEE n'interdisent pas une réglementation nationale s'opposant à la transmission de messages publicitaires par télédistribution, de même qu'à l'émission de messages publicitaires par télévision, si cette réglementation est appliquée sans distinction en ce qui concerne l'origine, nationale ou étrangère, de ces messages, ou la nationalité du prestataire, ou le lieu de son établissement.

En effet, à défaut d'harmonisation des législations nationales en la matière, une interdiction de ce genre rentre dans le cadre de la compétence laissée à chaque État membre de réglementer, de restreindre ou même d'interdire totalement, sur son territoire, pour des raisons d'intérêt général, la publicité télévisée, même si elle s'étend à une telle publicité originaire d'un autre État membre.

Arrêt du 18 mars 1980, Procureur du Roi / Debauve (52/79, Rec._p._00833)

7. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale interdisant la publicité télévisée - Violation du principe de proportionnalité et de l'interdiction de discrimination - Absence

Une réglementation nationale s'opposant à la transmission par télédistribution de messages publicitaires ne saurait être considérée ni comme constituant une mesure disproportionnée par rapport à l'objectif visé, du fait que l'interdiction en question reste relativement inefficace compte tenu de l'existence de zones naturelles de captation, ni comme établissant une discrimination prohibée par le traité à l'égard des émetteurs étrangers, du fait que leur localisation géographique ne leur permet d'assurer la diffusion de leurs messages que dans la zone de captation naturelle.

Arrêt du 18 mars 1980, Procureur du Roi / Debauve (52/79, Rec._p._00833)

8. Libre prestation des services - Restrictions - Télédistribution dans un État membre d'un film représenté dans un autre État membre avec le consentement du titulaire du droit - Opposition du concessionnaire de la représentation pour le premier État - Admissibilité

Les dispositions du traité CEE relatives à la libre prestation de services ne s'opposent pas à ce qu'un cessionnaire des droits de représentation d'un film cinématographique dans un État membre invoque son droit pour faire interdire la représentation de ce film dans cet État, sans son autorisation, par voie de télédistribution, si le film ainsi représenté est capté et transmis après avoir été diffusé dans un autre État membre par un tiers, avec le consentement du titulaire originaire du droit.

En effet, si le droit d'auteur comporte le droit d'exiger des redevances pour toute représentation d'un film cinématographique, les règles du traité ne sauraient, en principe, faire obstacle aux limites géographiques dont les parties aux contrats de cession sont convenues pour protéger l'auteur et ses ayants droit à cet égard. Le seul fait que ces limites géographiques peuvent coincider avec les frontières nationales n'implique pas une solution différente dans une situation où l'organisation de la télévision dans les États membres s'appuie dans une large mesure sur des monopoles légaux d'émission, ce qui implique qu'une limitation différente du champ d'application géographique d'une cession serait souvent impraticable.

Arrêt du 18 mars 1980, Coditel / Ciné Vog Films (62/79, Rec._p._00881)

9. Libre prestation des services - Entreprises de mise à disposition de main-d'oeuvre - Exercice de l'activité - Régime d'autorisation - Licéité - Conditions

L'article 59 du traité ne fait pas obstacle à ce qu'un État membre, qui soumet les entreprises de mise à disposition de main-d'oeuvre à autorisation, oblige un prestataire de services établi dans un autre État membre et exerçant une telle activité sur son territoire, à se conformer à cette condition, même s'il est titulaire d'une autorisation délivrée par l'État d'établissement, sous réserve toutefois, d'une part, que l'État membre destinataire de la prestation ne fasse dans l'examen des demandes d'autorisations et dans l'octroi de celles-ci aucune distinction en raison de la nationalité ou du lieu d'établissement du prestataire et, d'autre part, qu'il tienne compte des justifications et garanties déjà présentées par le prestataire pour l'exercice de son activité dans l'État membre d'établissement.

Arrêt du 17 décembre 1981, Webb (279/80, Rec._p._03305) (cf. al. 21 et disp.)

10. Libre prestation des services - Services - Notion - Mise à disposition de main-d'oeuvre

L'activité consistant, pour une entreprise, à mettre à disposition, contre rémunération, de la main-d'oeuvre qui reste au service de ladite entreprise sans qu'aucun contrat de travail ne soit conclu avec l'utilisateur, constitue une activité professionnelle qui réunit les conditions fixées à l'article 60, alinéa 1, du traité CEE. Elle doit, dès lors, être considérée comme un service au sens de cette disposition.

Arrêt du 17 décembre 1981, Webb (279/80, Rec._p._03305) (cf. al. 9)

11. Transports - Établissement d'une politique commune - Pouvoir discrétionnaire du Conseil - Réalisation de la libre prestation des services - Obligation d'agir du Conseil

S'il est vrai que son pouvoir d'appréciation est limité par les exigences découlant de l'établissement du marché commun et par certaines dispositions précises du traité, comme celles fixant des échéances, il n'en reste pas moins que, dans le système du traité, il appartient au Conseil de déterminer, selon les règles de procédure prévues, les objectifs et les moyens d'une politique commune des transports.

Toutefois, dans le domaine de la libre prestation des services, le Conseil ne dispose pas du pouvoir discrétionnaire dont il peut se prévaloir dans d'autres domaines de la politique commune des transports. Le résultat à atteindre étant fixé par le jeu combiné des articles 59, 60, 61 et 75, paragraphe 1, sous a) et b), du traité, seules les modalités pour mettre en place ce résultat, en tenant compte, conformément à l'article 75, des aspects spéciaux des transports, peuvent donner lieu à l'exercice d'un certain pouvoir d'appréciation.

Arrêt du 22 mai 1985, Parlement / Conseil (13/83, Rec._p._01513) (cf. al. 49, 65)

12. Transports - Transports internationaux et nationaux - Réalisation de la libre prestation des services - Obligation d'agir du Conseil

Le Conseil était tenu d'étendre la liberté de prestations de services au secteur des transports avant l'expiration de la période de transition, conformément à l'article 75, paragraphes 1, sous a), et 2, du traité, pour autant que cette extension concernait les transports internationaux exécutés au départ ou à destination du territoire d'un État membre ou traversant le territoire d'un ou de plusieurs États membres, ainsi que de fixer, dans le cadre de la libération des prestations de services dans ce secteur, conformément à l'article 75, paragraphes 1, sous b), et 2, les conditions de l'admission de transporteurs non-résidents aux transports nationaux dans un État membre.

Arrêt du 22 mai 1985, Parlement / Conseil (13/83, Rec._p._01513) (cf. al. 67)

13. Libre prestation des services - Entreprises d'assurance - Exigence d'un agrément - Licéité - Exigence d'un établissement stable - Illicéité - Coassurance - Apériteur - Exigence d'un établissement stable - Illicéité - Exigence d'un agrément - Illicéité

Il existe, dans le secteur de l'assurance en général, des raisons impérieuses tenant à la protection des consommateurs en tant que preneurs d'assurance et assurés, qui peuvent justifier des restrictions à la libre prestation des services. En l'état actuel du droit communautaire et notamment des travaux de coordination des règles nationales à cet égard, ledit intérêt n'est pas nécessairement garanti par les règles de l'État d'établissement. Il s'ensuit que l'exigence d'un agrément séparé accordé par les autorités de l'État destinataire reste justifiée sous certaines conditions, pour ce qui concerne le domaine des assurances directes en général. Par contre, l'exigence d'un établissement, qui constitue la négation même de la libre prestation des services, va au-delà de ce qui est indispensable pour atteindre l'objectif recherche et, partant, cette exigence est contraire aux articles 59 et 60 du traité.

En ce qui concerne plus particulièrement la coassurance, la situation de l'apériteur visée par la directive 78/473 se distingue nettement de celle d'un assureur en général et, de ce fait, ni l'exigence d'un établissement ni même celle d'un agrément dans l'État destinataire ne peuvent être regardées comme compatibles avec les articles 59 et 60 du traité.

Arrêt du 4 décembre 1986, Commission / France (220/83, Rec._p._03663) (cf. al. 20-21)

Il existe, dans le secteur de l'assurance en général, des raisons impérieuses tenant à la protection des consommateurs en tant que preneurs d'assurance et assurés, qui peuvent justifier des restrictions à la libre prestation des services. En l'état actuel du droit communautaire et notamment des travaux de coordination des règles nationales à cet égard, ledit intérêt n'est pas nécessairement garanti par les règles de l'État d'établissement. Il s'ensuit que l'exigence d'un agrément séparé accordé par les autorités de l'État destinataire reste justifiée sous certaines conditions, pour ce qui concerne le domaine des assurances directes en général. Par contre, l'exigence d'un établissement, qui constitue la négation même de la libre prestation des services, va au-delà de ce qui est indispensable pour atteindre l'objectif recherché et, partant, cette exigence est contraire aux articles 59 et 60 du traité.

En ce qui concerne plus particulièrement la coassurance, la situation de l'apériteur visée par la directive 78/473 se distingue nettement de celle d'un assureur en général et, de ce fait, ni l'exigence d'un établissement ni même celle d'un agrément dans l'État destinataire ne peuvent être regardées comme compatibles avec les articles 59 et 60 du traité.

Arrêt du 4 décembre 1986, Commission / Danemark (252/83, Rec._p._03713) (cf. al. 20-21, 25)

Il existe, dans le secteur de l'assurance en général, des raisons impérieuses tenant à la protection des consommateurs en tant que preneurs d'assurance et assurés qui peuvent justifier des restrictions à la libre prestation des services. En l'état actuel du droit communautaire, et notamment des travaux de coordination des règles nationales à cet égard, ledit intérêt n'est pas nécessairement garanti par les règles de l'État d'établissement. Il s'ensuit que l'exigence d'un agrément séparé accordé par les autorités de l'État destinataire reste justifiée sous certaines conditions, pour ce qui concerne le domaine des assurances directes en général. Par contre, l'exigence d'un établissement, qui constitue la négation même de la libre prestation des services, va au-delà de ce qui est indispensable pour atteindre l'objectif recherché et, partant, cette exigence est contraire aux articles 59 et 60 du traité.

En ce qui concerne plus particulièrement la coassurance, la situation de l'apériteur visée par la directive 78/473 se distingue nettement de celle d'un assureur en général et, de ce fait ni l'exigence d'un établissement ni même celle d'un agrément dans l'État destinataire ne peuvent être regardées comme compatibles avec les articles 59 et 60 du traité.

Arrêt du 4 décembre 1986, Commission / Irlande (206/84, Rec._p._03817) (cf. al. 20-21)

14. Libre prestation des services - Entreprises d'assurance - Restrictions imposées par un État membre aux entreprises établies sur son territoire - Régime d'agrément s'étendant aux activités exercées dans d'autres États membres - Conformité au droit communautaire

Aucune disposition du droit communautaire ne s'oppose à ce qu'un État membre soumette à un agrément les entreprises d'assurance et leurs succursales, établies sur son territoire, en ce qui concerne non seulement leurs activités exercées sur son territoire, mais également celles exercées, sous la forme de prestations de services, dans d'autres États membres. Une telle exigence est au contraire conforme aux principes consacrés par la directive 73/239. En effet, cette directive s'inspire de la conception selon laquelle l'État d'établissement est autorisé à prendre en considération l'ensemble des activités des entreprises constituées sur son territoire, afin de pouvoir procéder à un contrôle efficace des conditions de leur exercice.

Arrêt du 4 décembre 1986, Commission / Danemark (252/83, Rec._p._03713) (cf. al. 28-29)

15. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Délimitation - Entreprise maintenant, dans l'État membre ou les services sont prêtés, une présence permanente - Entreprise dont l'activité est entièrement ou principalement tournée vers le territoire d'un autre État membre - Application des règles du traité relatives au droit d'établissement

Une entreprise d'assurance d'un autre État membre qui maintient, dans l'État membre où elle prête des services, une présence permanente relève des dispositions du traité sur le droit d'établissement et cela même si cette présence n'a pas pris la forme d'une succursale ou d'une agence, mais s'exerce par le moyen d'un simple bureau, géré par le propre personnel de l'entreprise, ou d'une personne indépendante, mais mandatée pour agir en permanence pour celle-ci comme le ferait une agence. Une telle entreprise d'assurance ne saurait donc se prévaloir des dispositions relatives à la libre prestation des services pour ce qui est de ses activités dans l'État membre en cause.

De même, on ne saurait dénier à un État membre le droit de prendre des dispositions destinées à empêcher que la liberté garantie par l'article 59 soit utilisée par un prestataire dont l'activité serait entièrement ou principalement tournée vers son territoire, en vue de se soustraire aux règles professionnelles qui lui seraient applicables au cas où il serait établi sur le territoire de cet État, une telle situation pouvant être justiciable du chapitre relatif au droit d'établissement et non de celui des prestations de service.

Arrêt du 4 décembre 1986, Commission / Allemagne (205/84, Rec._p._03755) (cf. al. 21-22)

16. Libre prestation des services - Entreprises d'assurance - Exigence d'un agrément - Licéité - Conditions

En matière d'assurance directe, la protection des preneurs d'assurance et des assurés justifie, en l'état actuel du droit communautaire, que l'État membre destinataire de prestations d'assurance assure l'application de sa propre législation en ce qui concerne les réserves ou provisions techniques et les conditions d'assurance, dès lors que les exigences de cette législation ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer la protection des preneurs d'assurance et des assurés. L'exigence d'un agrément qu'il appartient à l'État membre destinataire d'accorder et de retirer est seule de nature à assurer un contrôle efficace et est de ce fait admissible. L'agrément doit être accordé sur demande à toute entreprise, établie dans un autre État membre, qui remplit les conditions prévues par la législation de l'État destinataire, ces conditions ne peuvent pas faire double emploi avec les conditions légales équivalentes déjà remplies dans l'État d'établissement et l'autorité de contrôle de l'État destinataire doit prendre en considération les contrôles et vérifications déjà effectués dans l'État membre d'établissement.

Arrêt du 4 décembre 1986, Commission / Allemagne (205/84, Rec._p._03755) (cf. al. 41, 46-47)

17. Libre prestation des services - Entreprises d'assurance - Exigence d'un établissement stable - Illicéité

Si l'exigence d'un agrément constitue une restriction à la libre prestation des services, l'exigence d'un établissement stable des prestataires de service est en fait la négation même de cette liberté. Elle a pour conséquence d'enlever tout effet utile à l'article 59 du traité, dont l'objet est précisement d'éliminer les restrictions à la libre prestation des services de la part de personnes non établies dans l'État sur le territoire duquel la prestation doit être fournie. Une telle exigence n'est admissible que si elle constitue une condition indispensable pour atteindre l'objectif recherché. En matière de prestations d'assurance directe il ne suffit pas que la présence sur place de tous les documents nécessaires pour le contrôle des autorités de l'État destinataire soit de nature à faciliter l'accomplissement de la mission de celles-ci. Il faut encore que, même dans le cadre d'un régime d'agrément, ces autorités ne puissent exécuter leur mission de contrôle de manière efficace sans que l'entreprise dispose, dans ledit État membre, d'un établissement stable possédant tous les documents nécessaires. Tel n'est pas le cas dans l'État actuel du droit communautaire.

Arrêt du 4 décembre 1986, Commission / Allemagne (205/84, Rec._p._03755) (cf. al. 52, 54-55)

18. Libre prestation des services - Entreprises d'assurance - Coassurance - Apériteur - Exigence d'un établissement stable - Illicéité - Exigence d'un agrément - Illicéité

Pour les assurances comprises dans la directive 78/473 sur la coassurance, non seulement l'exigence d'établissement, mais aussi l'obligation d'agrément de l'apériteur prévues par une législation nationale relative au contrôle des entreprises d'assurance sont en contradiction avec les articles 59 et 60 du traité et donc également avec la directive.

Arrêt du 4 décembre 1986, Commission / Allemagne (205/84, Rec._p._03755) (cf. al. 67)

19. Libre prestation des services - Avocats - Directive 77/249 - Champ d'application - Avocat invoquant la liberté de prestation des services dans un État membre ou l'accès à la profession lui à été refuse pour des raisons tenant au respect de la déontologie - Exclusion

La directive 77/249 doit être interprétée en ce sens que ses dispositions ne peuvent pas être invoquées par un avocat établi dans un État membre en vue d'exercer, sur le territoire d'un autre État membre, ses activités en tant que prestataire de services lorsque, dans ce dernier État membre, l'accès à la profession d'avocat lui avait été interdit pour des raisons tenant à la dignité, à l'honorabilité et à la probité.

Arrêt du 19 janvier 1988, Gullung / Conseils de l'ordre des avocats du barreau de Colmar et de Saverne (292/86, Rec._p._00111) (cf. al. 22, disp. 2)

20. Libre prestation des services - Avocats - Directive 77/249 - Mise en oeuvre - Obligation de concertation avec un avocat local - Champ d'application - Modalités - Règle de territorialité de la postulation applicable aux avocats locaux - Inapplicabilité à l'avocat prestataire de services

La République fédérale d'Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 59 et 60 du traité CEE et de la directive 77/249 du Conseil, tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats,

- en imposant à l'avocat prestataire de services l'obligation d'agir de concert avec un avocat établi sur le territoire allemand même lorsque le droit allemand n'exige pas l'assistance obligatoire d'un avocat;

- en exigeant que l'avocat allemand avec lequel il doit y avoir concertation soit lui-même mandataire "ad litem" ou défenseur dans le cadre du litige;

- en exigeant que l'avocat prestataire de services ne puisse intervenir à l'audience que s'il est accompagné de cet avocat allemand;

- en imposant des modalités de preuve de la concertation entre les deux avocats qui ne sont pas justifiees;

- en imposant, sans dérogation possible, à l'avocat prestataire de services l'obligation de se faire accompagner par un avocat allemand s'il rend visite à un détenu et de ne correspondre avec celui-ci que par l'intermédiaire de cet avocat allemand;

- en soumettant les avocats prestataires de services à la règle de l'exclusivité territoriale prévue par l'article 52, paragraphe 2, de la Bundesrechtsanwaltsordnung.

Arrêt du 25 février 1988, Commission / Allemagne (427/85, Rec._p._01123) (cf. al. 46 et disp.)

21. Libre prestation des services - Services - Notion - Diffusion transfrontalière, par télédistribution, de programmes télévisés contenant des messages publicitaires

La diffusion, par l'intermédiaire d'exploitants de réseaux de câbles établis dans un État membre, de programmes télévisés offerts par des émetteurs établis dans d'autres États membres et contenant des messages publicitaires destinés spécialement au public de l'État de réception, comporte plusieurs prestations de service au sens des articles 59 et 60 du traité.

Arrêt du 26 avril 1988, Bond van Adverteerders / État néerlandais (352/85, Rec._p._02085) (cf. al. 17, disp. 1)

22. Libre prestation des services - Restrictions - Télédistribution de programmes émis à partir d'un autre État membre - Interdictions des messages publicitaires destinés spécialement au public national et des programmes sous-titres - Discrimination - Inadmissibilité - Dérogations - Raisons d'ordre public - Maintien du caractère non commercial et pluraliste du système de radiodiffusion nationale - Caractère disproportionné des restrictions imposées spécifiquement aux programmes en provenance d'autres États membres - Inadmissibilité

Comporte des restrictions prohibées par l'article 59 du traité, en raison de leur caractère discriminatoire, une législation nationale qui subordonne la télédistribution de programmes diffusés par des émetteurs établis dans d'autres États membres à l'absence de messages publicitaires destinés spécialement au public national, alors que les chaînes nationales de télévision ne sont pas soumises aux mêmes restrictions. Il en va de même pour l'interdiction du sous-titrage en langue nationale desdits programmes, dès lors qu'elle n'a d'autre objectif que de compléter l'interdiction de publicité.

Même présentées comme motivées par des raisons d'ordre public, à savoir la préservation du caractère non commercial et, par là, pluraliste du système de radiodiffusion nationale, de telles restrictions discriminatoires ne sauraient, en raison de leur caractère disproportionné par rapport à l'objectif poursuivi, rentrer dans les dérogations qu'autorise l'article 56 du traité.

Arrêt du 26 avril 1988, Bond van Adverteerders / État néerlandais (352/85, Rec._p._02085) (cf. al. 26-29, 35-37, disp. 2 et 3)

23. Libre prestation des services - Activités bancaires - Réalisation en harmonie avec la libération progressive de la circulation des capitaux - Constitution de dépôts d'épargne - Libéralisation non réalisée

Une réglementation d'un État membre qui réserve une exonération fiscale aux seuls dépôts d'épargne constitués en monnaie nationale auprès d'établissements financiers ayant leur siège social sur le territoire national n'est, en l'état actuel du droit communautaire, pas incompatible avec les articles 59 et suivants du traité. La liberté de prestation des services bancaires en matière de constitution de dépôts d'épargne est en effet liée, en vertu de l'article 61, paragraphe 2, du traité, à la libération des mouvements de capitaux, laquelle n'a, en ce domaine, pas encore été réalisée.

Arrêt du 21 septembre 1988, Van Eycke / ASPA (267/86, Rec._p._04769) (cf. al. 22-24)

24. Libre circulation des marchandises - Propriété industrielle et commerciale - Droits d'auteur - Libre prestation des services - Réglementation nationale autorisant, à l'occasion de l'exécution publique d'oeuvres musicales enregistrées sur supports de son importés d'un autre État membre, la perception de redevances au titre du droit d'auteur - Admissibilité

Les articles 30 et 59 du traité doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à l'application d'une législation nationale qui considère comme une violation du droit d'auteur l'exécution publique, sans paiement de redevances, d'oeuvres musicales protégées enregistrées sur des supports de son, lorsque des redevances ont déjà été versées à l'auteur, pour la reproduction de l'oeuvre, dans un autre État membre.

Arrêt du 13 juillet 1989, Tournier (395/87, Rec._p._02521) (cf. al. 15, disp. 1)

25. Transports - Transports internationaux et nationaux - Réalisation de la libre prestation des services - Inaction du Conseil - Conséquences - Effet direct de l'article 75 du traité - Absence

Le fait que le Conseil ait manqué aux obligations que lui impose l'article 75 du traité, en ne prenant pas les mesures nécessaires pour étendre la liberté de prestation des services au secteur des transports avant l'expiration de la période de transition, n'a pas eu pour effet de rendre les articles 59 et 60 du traité directement applicables dans le domaine des transports.

D'autre part, en lui-même, l'article 75, paragraphe 1, lettres a) et b), du traité ne confère pas aux ressortissants des États membres des droits dont ils peuvent se prévaloir devant les juridictions nationales à l'encontre de décisions prises par des administrations nationales.

Arrêt du 13 juillet 1989, Lambregts Transportbedrijf / État belge (4/88, Rec._p._02583) (cf. al. 14-15 et disp.)

26. Transports - Transports maritimes - Libre prestation des services - Réalisation subordonnée à l'intervention du Conseil - Application de mesures nationales restrictives avant l'entrée en vigueur de la réglementation communautaire - Admissibilité

Le traité CEE, en particulier ses articles 59, 61, 62 et 84, ne s'opposait pas, avant l'entrée en vigueur du règlement nº 4055 /86, adopté par le Conseil sur la base de l'article 84, paragraphe 2, du traité et portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers, à ce qu'un État membre perçût, à l'occasion de l'utilisation, par un navire, d'installations portuaires situées sur son territoire insulaire, lorsque les passagers provenaient de ports sis dans un autre État membre ou se dirigeaient vers ceux-ci, des taxes lors du débarquement et de l'embarquement des passagers, alors que, dans le cas d'un transport entre deux ports situés sur le territoire national, ces taxes n'étaient perçues que pour l'embarquement au départ du port insulaire.

Arrêt du 13 décembre 1989, Corsica Ferries France / Direction générale des douanes (C-49/89, Rec._p._04441) (cf. al. 13-16)

27. Libre prestation des services - Guides touristiques accompagnant des groupes de touristes en provenance d'un autre État membre - Exigence d'un titre attestant une qualification professionnelle reconnue par les autorités de l'État membre du lieu d'exécution de la prestation - Inadmissibilité

L'intérêt général lié à la valorisation des richesses historiques et à la meilleure diffusion possible des connaissances relatives au patrimoine artistique et culturel d'un pays peut constituer une raison impérative justifiant une restriction à la libre prestation des services. Édicte cependant des restrictions allant au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer la protection de cet intérêt l'État membre qui subordonne la prestation de services des guides touristiques voyageant avec un groupe de touristes en provenance d'un autre État membre, lorsque cette prestation consiste à guider ces touristes dans des lieux autres que les musées ou monuments historiques susceptibles de n'être visités qu'avec un guide professionnel spécialisé, à la possession d'une carte professionnelle supposant l'acquisition d'une qualification déterminée à établir en règle générale par la réussite à un examen.

Arrêt du 26 février 1991, Commission / France (C-154/89, Rec._p._I-659) (cf. al. 17, 25 et disp.)

L'article 59 du traité doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'un État membre subordonne la prestation de services des guides touristiques voyageant avec un groupe de touristes en provenance d'un autre État membre, si cette prestation consiste à guider ces touristes dans des lieux autres que les musées ou les monuments historiques susceptibles de n'être visités qu'avec un guide professionnel spécialisé, à la possession d'un permis d'exercer qui suppose l'acquisition d'une formation déterminée sanctionnée par un diplôme.

Arrêt du 22 mars 1994, Commission / Espagne (C-375/92, Rec._p._I-923) (cf. point 21 et disp.)

28. Libre prestation des services - Guides touristiques accompagnant des groupes de touristes en provenance d'un autre État membre - Exigence d'une licence délivrée au vu d'une qualification professionnelle attestée par la réussite à un examen - Inadmissibilité

L'intérêt général lié à la valorisation des richesses historiques et à la meilleure diffusion possible des connaissances relatives au patrimoine artistique et culturel d'un pays peut constituer une raison impérative justifiant une restriction à la libre prestation des services. Édicte cependant des restrictions allant au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer la protection de cet intérêt l'État membre qui subordonne la prestation de services des guides touristiques voyageant avec un groupe de touristes en provenance d'un autre État membre, lorsque cette prestation consiste à guider ces touristes dans des lieux autres que les musées ou monuments historiques susceptibles de n'être visités qu'avec un guide professionnel spécialisé, à la possession d'une licence supposant l'acquisition d'une qualification déterminée attestée par la réussite à un examen.

Arrêt du 26 février 1991, Commission / Italie (C-180/89, Rec._p._I-709) (cf. al. 20, 28 et disp.)

29. Libre prestation des services - Guides touristiques accompagnant des groupes de touristes en provenance d'un autre État membre - Exigence d'un permis d'exercer délivré aux titulaires d'un diplôme - Inadmissibilité

L'intérêt général lié à la valorisation des richesses historiques et à la meilleure diffusion possible des connaissances relatives au patrimoine artistique et culturel d'un pays peut constituer une raison impérative justifiant une restriction à la libre prestation des services. Édicte cependant des restrictions allant au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer la protection de cet intérêt l'État membre qui subordonne la prestation de services des guides touristiques voyageant avec un groupe de touristes en provenance d'un autre État membre, lorsque cette prestation consiste à guider ces touristes dans des lieux autres que les musées ou monuments historiques susceptibles de n'être visités qu'avec un guide professionnel spécialisé, à la possession d'un permis d'exercer qui suppose l'acquisition d'une formation déterminée sanctionnée par un diplôme.

Arrêt du 26 février 1991, Commission / Grèce (C-198/89, Rec._p._I-727) (cf. al. 21, 29 et disp.)

30. Libre prestation des services - Monopole de la télévision - Discrimination en raison de la provenance des émissions - Inadmissibilité - Justification - Conditions

L'article 59 du traité s'oppose à une réglementation nationale qui crée un monopole des droits exclusifs de diffusion d'émissions propres et de retransmission d'émissions en provenance d'autres États membres, lorsqu'un tel monopole entraîne des effets discriminatoires au détriment des émissions en provenance d'autres États membres, à moins que cette réglementation ne soit justifiée par l'une des raisons indiquées à l'article 56, auquel renvoie l'article 66 du traité. L'objectif d'éviter des perturbations dues au nombre restreint de canaux disponibles ne saurait toutefois constituer une telle justification, lorsque l'entreprise en question n'utilise qu'un nombre restreint de ces canaux.

Arrêt du 18 juin 1991, ERT / DEP (C-260/89, Rec._p._I-2925) (cf. al. 25-26, disp. 3)

31. Libre prestation des services - Avocats - Directive 77/249 - Mise en oeuvre - Champ d'application personnel - Exclusion des nationaux exerçant la profession d'avocat dans un autre État membre - Inadmissibilité - Obligation de concertation avec un avocat local - Champ d'application - Modalités - Règle de territorialité de la postulation applicable aux avocats locaux - Inapplicabilité à l'avocat prestataire de services

La République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 59 et 60 du traité et de la directive 77/249, tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats:

- en privant les ressortissants français, qui exercent la profession d'avocat dans un État membre autre que la République française, du bénéfice des dispositions relatives à la libre prestation de services en France par les avocats;

- en obligeant l'avocat prestataire de services à agir de concert avec un avocat inscrit à un barreau français pour l'exercice d'activités devant des autorités et organismes qui n'exercent pas de fonction juridictionnelle ainsi que pour l'exercice d'activités pour lesquelles le droit français n'exige pas l'assistance obligatoire d'un avocat;

- en exigeant qu'en matière civile et lorsque son ministère est obligatoire l'avocat prestataire de services plaidant devant un tribunal de grande instance ait recours à un avocat inscrit au barreau de ce tribunal ou habilité à postuler devant lui, afin de postuler ou diligenter les actes de procédure.

Arrêt du 10 juillet 1991, Commission / France (C-294/89, Rec._p._I-3591) (cf. disp. 1)

32. Libre prestation des services - Restrictions - Limitation de la retransmission de messages publicitaires contenus dans des programmes de radio ou de télévision émis à partir d'autres États membres

Constituent des restrictions à la libre prestation des services, visées par l'article 59 du traité, des conditions posées par un État membre à la transmission par les gérants de réseaux de télédistribution établis sur son territoire des programmes de radio ou de télévision contenant des messages publicitaires destinés en particulier au public national et servis par un organisme de radiodiffusion établi sur le territoire d'un autre État membre et tenant à la fois à la structure desdits organismes et aux messages publicitaires contenus dans les programmes.

Arrêt du 25 juillet 1991, Stichting Collectieve Antennevoorziening Gouda / Commissariaat voor de Media (C-288/89, Rec._p._I-4007) (cf. al. 17-18)

En interdisant aux gérants de réseaux de télédistribution établis sur son territoire de transmettre des programmes de radio ou de télévision contenant des messages publicitaires destinés en particulier au public national et servis par un organisme de radiodiffusion établi sur le territoire d'un autre État membre, lorsque ne sont pas remplies certaines conditions relatives à la structure de ces organismes ou ayant trait aux messages publicitaires contenus dans leurs programmes et destinés au public national, un État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 59 du traité.

Arrêt du 25 juillet 1991, Commission / Pays-Bas (C-353/89, Rec._p._I-4069) (cf. al. 48)

33. Libre prestation des services - Restrictions - Conditions touchant à la structure des organismes étrangers agissant dans le secteur audiovisuel - Justification par des raisons d'intérêt général - Absence

Des conditions touchant à la structure des organismes étrangers agissant dans le secteur audiovisuel ne peuvent être regardées comme objectivement nécessaires en vue de garantir l'intérêt général que constitue le maintien d'un système national de radio et de télévision assurant le pluralisme.

Arrêt du 25 juillet 1991, Stichting Collectieve Antennevoorziening Gouda / Commissariaat voor de Media (C-288/89, Rec._p._I-4007) (cf. al. 25)

Arrêt du 25 juillet 1991, Commission / Pays-Bas (C-353/89, Rec._p._I-4069) (cf. al. 43)

34. Libre prestation des services - Restrictions - Limitation de la retransmission de messages publicitaires contenus dans des programmes de radio ou de télévision émis à partir d'autres États membres - Justification par des raisons d'intérêt général - Conditions

Des restrictions à l'émission de messages publicitaires peuvent être imposées dans un but d'intérêt général, à savoir protéger les consommateurs contre les excès de la publicité commerciale ou, dans le cadre d'une politique culturelle, maintenir une certaine qualité des programmes. Cependant, lorsque de telles restrictions ne touchent que les messages publicitaires destinés spécialement au public national, elles ne sont pas justifiées par des raisons impérieuses d'intérêt général, car elles visent à restreindre la concurrence à laquelle est soumis de la part d'opérateurs étrangers un organisme national détenant le monopole de la diffusion de ces messages publicitaires.

Arrêt du 25 juillet 1991, Stichting Collectieve Antennevoorziening Gouda / Commissariaat voor de Media (C-288/89, Rec._p._I-4007) (cf. al. 27-30)

Arrêt du 25 juillet 1991, Commission / Pays-Bas (C-353/89, Rec._p._I-4069) (cf. al. 45-48)

35. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les diffuseurs nationaux de s'adresser à une entreprise nationale pour la réalisation de leurs programmes de radio et de télévision - Inadmissibilité - Justification - Maintien du pluralisme dans le secteur audiovisuel - Absence

En obligeant les organismes qui ont obtenu du temps d'antenne sur le réseau national de radiodiffusion à dépenser auprès d'une entreprise nationale déterminée l'ensemble des montants mis à leur disposition en ce qui concerne la réalisation des programmes de radio et un pourcentage fixé par décret en ce qui concerne la réalisation des programmes de télévision, un État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 59 du traité.

En effet, même si elle s'insère dans une politique culturelle visant à sauvegarder la liberté d'expression des différentes composantes sociales, culturelles, religieuses ou philosophiques de la société en assurant la survie d'une entreprise qui met des moyens techniques à leur disposition, une telle contrainte va au-delà du but poursuivi car le pluralisme dans le secteur audiovisuel d'un État membre ne peut en rien être affecté par la possibilité qui serait ouverte aux organismes nationaux agissant dans ce secteur de s'adresser aux prestataires de services établis dans d'autres États membres.

Arrêt du 25 juillet 1991, Commission / Pays-Bas (C-353/89, Rec._p._I-4069) (cf. al. 31, 37, disp. 1)

36. Libre prestation des services - Activités relatives à la conservation de droits de propriété industrielle - Exigence d'une qualification professionnelle particulière - Inadmissibilité

L'article 59 du traité s'oppose à une réglementation nationale qui interdit à une société établie dans un autre État membre de fournir à des titulaires de brevets sur le territoire national un service de surveillance et de renouvellement de ces brevets par l'acquittement des redevances prévues, au motif que cette activité est, en vertu de cette réglementation, réservée aux seuls titulaires d'une qualification professionnelle particulière, telle que celle de conseil en brevets.

Arrêt du 25 juillet 1991, Säger / Dennemeyer (C-76/90, Rec._p._I-4221) (cf. 21 et disp.)

37. Libre prestation des services - Services - Notion - Interruption médicale de grossesse - Inclusion

L'interruption médicale de grossesse, réalisée conformément au droit de l'État où elle a lieu, est un service au sens de l'article 60 du traité.

Arrêt du 4 octobre 1991, Society for the Protection of Unborn Children Ireland / Grogan e.a. (C-159/90, Rec._p._I-4685) (cf. al. 21, disp. 1)

38. Libre circulation des personnes - Travailleurs - Égalité de traitement - Libre prestation des services - Restrictions - Libre circulation des capitaux - Déductibilité du revenu imposable de certaines cotisations en matière d'assurance des personnes - Déductibilité subordonnée au versement à un organisme établi sur le territoire d'imposition - Limitation susceptible d'être justifiée par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal

Les articles 48 et 59 du traité s'opposent à ce que la législation d'un État membre subordonne la déductibilité de cotisations d'assurance contre la maladie et l'invalidité ou contre la vieillesse et le décès à la condition que ces cotisations soient versées dans cet État. Toutefois cette condition peut être justifiée par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal applicable.

Cette nécessité peut, par exemple, se manifester lorsque, dans le système fiscal d'un État membre, à la déductibilité des cotisations correspond l'imposition des sommes dues par les assureurs en exécution des contrats, et inversement, et que cette compensation entre la déductibilité à un stade et l'imposition à l'autre ne pourrait plus être assurée dès lors que les versements résultant des cotisations exonérées seraient effectués par un assureur étranger à l'étranger, où leur soumission à l'impôt s'avère aléatoire.

Les articles 67 et 106 du traité ne s'opposent pas à une telle législation.

Arrêt du 28 janvier 1992, Bachmann / État belge (C-204/90, Rec._p._I-249) (cf. al. 21-33, 35 et disp.)

39. Libre circulation des personnes - Travailleurs - Égalité de traitement - Libre prestation des services - Restrictions - Déductibilité du revenu imposable de certaines cotisations en matière d'assurance des personnes - Déductibilité subordonnée au versement à un organisme établi sur le territoire d'imposition - Limitation susceptible d'être justifiée par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal

Les articles 48 et 59 du traité s'opposent à ce que la législation d'un État membre subordonne la déductibilité de cotisations d'assurance contre la vieillesse et le décès à la condition que ces cotisations soient versées dans cet État. Toutefois cette condition peut être justifiée par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal applicable.

Cette nécessité peut, par exemple, se manifester lorsque, dans le système fiscal d'un État membre, à la déductibilité des cotisations correspond l'imposition des sommes dues par les assureurs en exécution des contrats, et inversement, et que cette compensation entre la déductibilité à un stade et l'imposition à l'autre ne pourrait plus être assurée dès lors que les versements résultant des cotisations exonérées seraient effectués par un assureur étranger à l'étranger, où leur soumission à l'impôt s'avère aléatoire.

Arrêt du 28 janvier 1992, Commission / Belgique (C-300/90, Rec._p._I-305) (cf. al. 14-24)

40. Libre circulation des personnes - Libre prestation des services - Travailleurs - Réviseurs d'entreprises - Accès à la profession - Restrictions justifiées par l'intérêt général - Admissibilité - Conditions

Les articles 48 et 59 du traité ne s'opposent pas à ce qu'un État membre subordonne, sur son territoire, l'exercice de la profession de réviseur d'entreprises par une personne déjà habilitée à exercer cette profession dans un autre État membre à des conditions objectivement nécessaires pour garantir l'observation des règles professionnelles et concernant la permanence d'une infrastructure pour l'accomplissement des travaux, la présence effective dans cet État membre et le contrôle de l'observation des règles déontologiques, à moins que le respect de telles règles et conditions ne soit déjà garanti à travers un réviseur d'entreprises, personne physique ou morale, établi et agréé sur ce territoire et au service duquel est placé, pour la durée des travaux, celui qui entend exercer la profession de réviseur d'entreprises.

Arrêt du 20 mai 1992, Ramrath / Ministre de la Justice (C-106/91, Rec._p._I-3351) (cf. al. 25-37, disp. 2)

41. Libre prestation des services - Restrictions - Interdiction de la retransmission des programmes de radio ou de télévision émis à partir d'un autre État membre et diffusés dans une langue autre que celle de ce dernier - Inadmissibilité - Justification - Absence

En interdisant aux sociétés de télédistribution de transmettre par leurs réseaux des programmes de stations de radiodiffusion d'autres États membres dont les émissions ne sont pas diffusées dans la langue ou dans l'une des langues de l'État membre où la station est établie, un État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 59 du traité.

En effet, une telle restriction, discriminatoire en ce qu'elle n'est pas indistinctement applicable aux prestations de services quelle qu'en soit l'origine, ne relève d'aucune des exceptions à la libre prestation des services qu'autorise le droit communautaire, à savoir celles prévues par l'article 56 du traité.

Arrêt du 16 décembre 1992, Commission / Belgique (C-211/91, Rec._p._I-6757) (cf. al. 4-6, 10-11)

42. Libre prestation des services - Libre circulation des capitaux - Restrictions - Législation interdisant à un organisme de radiodiffusion établi sur le territoire national de participer au capital d'une société de radiodiffusion dirigeant ses activités vers ledit territoire à partir d'un établissement dans un autre État membre - Conditions

Les dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux et à la libre prestation des services doivent être interprétées en ce sens qu'elles ne s'opposent pas à ce que la législation d'un État membre interdise à un organisme de radiodiffusion établi dans cet État de participer au capital d'une société de radiodiffusion établie ou à établir dans un autre État membre et de fournir à celle-ci une garantie bancaire ou d'élaborer un "business plan" et de donner des conseils juridiques à une société de télévision à créer dans un autre État membre, lorsque ces activités sont orientées vers la création d'une station de télévision commerciale destinée à atteindre en particulier le territoire du premier État membre et que ces interdictions sont nécessaires pour garantir le caractère pluraliste et non commercial du système audiovisuel mis en place par cette législation.

Arrêt du 3 février 1993, Veronica Omroep Organisatie / Commissariaat voor de Media (C-148/91, Rec._p._I-487) (cf. point 15 et disp.)

43. Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Exploitation en salle ou à la télévision, dans un État membre, de films cinématographiques produits dans d'autres États membres - Inclusion

L'exploitation en salle ou à la télévision des films cinématographiques, dans le cadre de laquelle les producteurs autorisent les distributeurs à effectuer des copies de leurs films et à organiser des représentations publiques à partir de celles-ci, le tout moyennant remunération, constitue une activité de prestation de services. Dès lors qu'elle revêt un caractère transfrontalier, producteurs et distributeurs n'étant pas établis dans le même État membre, elle relève des dispositions du traité relatives à la libre prestation des services.

Arrêt du 4 mai 1993, Federación de Distribuidores Cinematográficos / État espagnol (C-17/92, Rec._p._I-2239) (cf. points 10-11)

44. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation liant l'octroi de licences de doublage des films cinématographiques en provenance de pays tiers à la distribution de films nationaux - Effet discriminatoire à l'égard des producteurs établis dans d'autres États membres - Inadmissibilité - Dérogations - Raisons d'ordre public - Poursuite d'objectifs de nature économique - Inadmissibilité

Les dispositions du traité relatives à la libre prestation des services doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'opposent à une réglementation nationale réservant l'octroi de licences de doublage, dans l'une des langues officielles nationales, de films cinématographiques en provenance de pays tiers aux distributeurs qui s'engagent à distribuer des films nationaux.

En effet, une telle réglementation est discriminatoire, dans la mesure où, le choix du public se portant dans une très large mesure sur des films, doublés dans l'une des langues nationales, originaires de pays tiers, elle privilégie les producteurs de films nationaux qui, en raison de la forte demande de licences de doublage, sont assurés de voir leurs films distribués et de bénéficier des recettes correspondantes, par rapport aux producteurs établis dans d'autres États membres, qui dépendent du seul choix des distributeurs, et ne relève pas d'une disposition dérogatoire expresse, tel l'article 56 du traité, auquel renvoie l'article 66. A cet égard, il suffit de constater qu'outre le fait que la poursuite d'une politique culturelle ne figure pas parmi les justifications énoncées à l'article 56, une réglementation qui favorise la distribution des films nationaux, quel que soit leur contenu ou leur qualité, ne poursuit qu'un objectif de nature purement économique, qui ne constitue pas une raison d'ordre public au sens dudit article.

Arrêt du 4 mai 1993, Federación de Distribuidores Cinematográficos / État espagnol (C-17/92, Rec._p._I-2239) (cf. points 15, 20-22 et disp.)

45. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Travailleurs - Égalité de traitement - Guides touristiques et guides-interprètes - Accès à la profession - Condition de nationalité - Inadmissibilité - Obligation des États membres de prévoir une procédure d'examen de la correspondance entre les diplômes et qualifications exigés par le droit national et ceux obtenus dans l'État membre de provenance

Les articles 48, 52 et 59 du traité, qui exigent l'élimination de toute discrimination en raison de la nationalité à l'encontre des ressortissants d'autres États membres en ce qui concerne l'accès à l'emploi, l'établissement et les prestations de services, s'opposent à ce qu'un État membre réserve à ses ressortissants l'accès à la profession de guide touristique et de guide-interprète, que cette profession soit exercée à titre indépendant ou dans le cadre d'un contrat de travail.

Ils s'opposent également à ce qu'un État membre ne prévoie pas de procédure d'examen et de comparaison des qualifications acquises par un ressortissant communautaire, titulaire d'un diplôme de guide touristique ou de guide-interprète délivré dans un autre État membre, avec celles exigées par la législation nationale.

Il incombe en effet à un État membre, saisi d'une demande d'autorisation d'exercer une profession dont l'accès est, selon la législation nationale, subordonné à la possession d'un diplôme ou d'une qualification professionnelle, de prendre en considération les diplômes, certificats et autres titres que l'intéressé a acquis dans le but d'exercer cette même profession dans un autre État membre, en procédant à une comparaison entre les compétences attestées par ces diplômes et les connaissances et qualifications exigées par les règles nationales.

Arrêt du 22 mars 1994, Commission / Espagne (C-375/92, Rec._p._I-923) (cf. points 8-9, 12, 18 et disp.)

46. Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Importation de documents publicitaires et de billets de loterie destinés à permettre la participation des habitants d'un État membre à une loterie organisée dans un autre État membre - Inclusion

L'importation de documents publicitaires et de billets de loterie dans un État membre pour faire participer les habitants de cet État membre à une loterie organisée dans un autre État membre se rattache à une activité de "services", au sens de l'article 60 du traité, et relève, par suite, du champ d'application de l'article 59 du traité.

D'une part, en effet, les activités de loterie, en tant que prestations normalement fournies contre une rémunération constituée par le prix du billet, ne relèvent pas, même pour ce qui est de l'envoi et de la diffusion transfrontalière d'objets matériels nécessaires à leur organisation ou leur fonctionnement, des règles relatives à la libre circulation des marchandises. Elles ne relèvent pas davantage de celles relatives à la libre circulation des personnes, qui ne visent que les mouvements de personnes, ou de celles relatives à la libre circulation des capitaux, qui visent les mouvements de capitaux en tant que tels et non pas l'ensemble des transferts monétaires nécessaires aux activités économiques.

D'autre part, leur qualification de services n'est pas affectée par le fait qu'elles font l'objet d'une réglementation particulièrement stricte et d'un contrôle étroit de la part des autorités publiques dans les différents États membres de la Communauté, car elles ne peuvent pas être regardées comme des activités que leur nocivité fait interdire dans tous les États membres et dont la situation, au regard du droit communautaire, puisse être rapprochée de celle des activités portant sur des produits illicites.

Enfin, ni le caractère aléatoire du gain, en tant que contrepartie de la rémunération perçue par l'organisateur, ni le fait que, si l'organisation d'une loterie poursuit un but lucratif, la participation à celle-ci peut revêtir un caractère ludique, ni même le fait que les bénéfices générés par une loterie ne puissent, généralement, recevoir qu'une affectation relevant de l'intérêt général, ne sont de nature à ôter aux activités de loterie leur caractère d'activité économique.

Arrêt du 24 mars 1994, H.M. Customs and Excise / Schindler (C-275/92, Rec._p._I-1039) (cf. points 21-22, 28, 30-35, 37, disp. 1)

47. Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale interdisant les activités de loterie - Justification - Protection des consommateurs et de l'ordre social

Une législation nationale qui interdit, sauf exceptions qu'elle détermine, le déroulement des loteries sur le territoire d'un État membre et qui empêche ainsi, de manière absolue, les organisateurs de loteries d'autres États membres de promouvoir leurs loteries et de vendre leurs billets, soit directement, soit par l'intermédiaire d'agents indépendants, sur le territoire de l'État membre qui a édicté cette législation constitue, même si elle est indistinctement applicable, une entrave à la libre prestation des services.

Toutefois, cette entrave, dans la mesure où la législation en cause ne comporte aucune discrimination selon la nationalité, peut être justifiée par des objectifs tenant à la protection des consommateurs et de l'ordre social.

En effet, les particularités des loteries justifient que les autorités nationales disposent d'un pouvoir d'appréciation suffisant pour déterminer les exigences que comportent la protection des joueurs et, plus généralement, compte tenu des particularités socio-culturelles de chaque État membre, la protection de l'ordre social, tant en ce qui concerne les modalités d'organisation des loteries, le volume de leurs enjeux, que l'affectation des profits qu'elles dégagent, et pour décider soit de les restreindre soit de les interdire.

Arrêt du 24 mars 1994, H.M. Customs and Excise / Schindler (C-275/92, Rec._p._I-1039) (cf. points 43-45, 47, 58, 61, disp. 2)

48. Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Diffusion par câble de programmes télévisés provenant d'une entreprise établie dans un autre État membre - Inclusion, indépendamment de l'objectif poursuivi à travers une diffusion à partir de l'étranger

La notion de "prestation de services" visée par les articles 59 et 60 du traité couvre la diffusion, par l'intermédiaire d'exploitants de réseaux de câbles établis dans un État membre, de programmes télévisés offerts par un organisme de radiodiffusion établi dans un autre État membre, même si cet organisme s'y est établi dans le but de se soustraire à la législation applicable dans l'État de réception aux organismes nationaux de radiodiffusion.

Arrêt du 5 octobre 1994, TV10 / Commissariaat voor de Media (C-23/93, Rec._p._I-4795) (cf. point 16, disp. 1)

49. Libre prestation des services - Restrictions - Contrôle technique des véhicules à moteur - Réglementation d'un État membre réservant la délivrance des certificats de contrôle aux entreprises établies sur le territoire national - Justification - Protection de la sécurité routière - Désavantage pour les prestataires établis dans d'autres États membres résultant de la gratuité du certificat délivré à l'occasion d'un entretien périodique effectué par une entreprise agréée - Absence d'incidence - Conformité à la directive 77/143 - Violation des dispositions du traité relatives à la libre circulation des marchandises et à la concurrence - Absence

Les dispositions du traité en matière de libre circulation des marchandises, de libre prestation des services et de concurrence ainsi que la directive 77/143 relative au contrôle technique des véhicules à moteur ne s'opposent pas à une réglementation d'un État membre qui exclut la délivrance des certificats de contrôle pour les voitures immatriculées dans cet État par des garages établis dans un autre État.

En effet, s'agissant de la libre prestation des services, d'une part, la reconnaissance de la qualité de contrôleur agréé à des opérateurs établis dans un autre État membre, en tant qu'elle est relative à l'extension d'une prérogative de puissance publique en dehors du territoire national, échappe au champ d'application de l'article 59 du traité; d'autre part, le fait qu'une telle réglementation nationale, en ce qu'elle prévoit la gratuité de la délivrance du certificat de contrôle technique lorsque ce dernier est associé à un entretien ou à une réparation du véhicule, peut entraîner une perte de clientèle pour les garages étrangers qui, parce que non agréés, ne peuvent faire bénéficier leur clientèle de cette gratuité lorsque leur sont confiées des opérations d'entretien, ne permet pas de conclure à une violation du traité, car le monopole de la délivrance du certificat de contrôle conféré aux seules entreprises sur lesquelles, du fait de leur établissement, les autorités nationales peuvent exercer une surveillance peut trouver sa justification dans les exigences de la sécurité routière.

S'agissant de la directive 77/143, elle établit le caractère territorialement limité du contrôle périodique et, en tout état de cause, ne réalise qu'une harmonisation partielle des critères de contrôle.

S'agissant des dispositions du traité relatives à la libre circulation des marchandises, elle ne sont pas en cause, étant donné que les fournitures auxquelles peuvent donner lieu les opérations d'entretien des véhicules ne sont qu'accessoires à la prestation de services que constitue ledit entretien.

S'agissant enfin des règles de concurrence, on ne peut que constater qu'une telle réglementation nationale ne vise ni à imposer ni à favoriser un comportement qu'elles interdisent.

Arrêt du 5 octobre 1994, Van Schaik (C-55/93, Rec._p._I-4837) (cf. points 7, 14, 16, 18-21, 25-26 et disp.)

50. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Faculté des États membres de déroger aux règles relatives à la publicité - Portée - Réglementation interdisant la publicité télévisée dans le secteur de la distribution - Admissibilité

La directive 89/552, qui vise à assurer la libre diffusion des émissions télévisées conformes aux normes minimales prévues par elle et impose à cette fin aux États membres d'origine de veiller au respect de ses dispositions et aux États membres de réception d'assurer la liberté de réception et de retransmission, accorde, dans son article 3, paragraphe 1, aux États membres la faculté, en ce qui concerne les organismes de diffusion relevant de leur compétence, de prévoir des règles plus strictes ou plus détaillées dans les domaines couverts par la directive. Cette faculté, conférée par une disposition générale de la directive et dont l'exercice n'est pas de nature à compromettre la libre diffusion des émissions conformes à ses prescriptions minimales que veut assurer la directive, ne se limite pas, en matière de publicité, aux circonstances définies par les articles 19 et 20.

C'est pourquoi la directive doit être interprétée en ce sens qu'elle ne s'oppose pas à ce qu'un État membre, par voie législative ou réglementaire, interdise la diffusion de messages publicitaires en faveur du secteur économique de la distribution par les organismes de radiodiffusion télévisuelle établis sur son territoire.

Arrêt du 9 février 1995, Leclerc-Siplec / TF1 et M6 (C-412/93, Rec._p._I-179) (cf. points 30-31, 37-44, 48 et disp.)

51. Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Services offerts par téléphone à des destinataires potentiels dans d'autres États membres - Inclusion

L'application des dispositions en matière de libre prestation de services n'est pas subordonnée à l'existence préalable d'une relation entre un prestataire et un destinataire déterminé. L'article 59 du traité doit dès lors être interprété en ce sens qu'il s'applique à des offres de services d'un prestataire faites par téléphone à des destinataires potentiels établis dans d'autres États membres.

Arrêt du 10 mai 1995, Alpine Investments / Minister van Financiën (C-384/93, Rec._p._I-1141) (cf. points 19, 22)

52. Libre prestation des services - Restrictions - Notion - Interdiction du démarchage téléphonique de clients potentiels dans d'autres États membres - Inclusion

L'interdiction de prendre contact par téléphone avec des clients potentiels se trouvant dans un autre État membre sans leur consentement préalable est susceptible de constituer une restriction à la libre prestation des services étant donné qu'elle prive les opérateurs concernés d'une technique rapide et directe de publicité et de prise de contact.

Arrêt du 10 mai 1995, Alpine Investments / Minister van Financiën (C-384/93, Rec._p._I-1141) (cf. points 28, 39)

53. Libre prestation des services - Restrictions - Interdiction du démarchage téléphonique transfrontalier pour des services liés à l'investissement dans les contrats à terme de marchandises - Justification par des raisons d'intérêt général - Maintien de la bonne réputation du secteur financier de l'État membre édictant l'interdiction - Caractère proportionné de l'interdiction - Admissibilité

L'interdiction faite dans un État membre aux intermédiaires financiers qui y sont établis de prendre contact par téléphone avec des clients potentiels se trouvant dans un autre État membre sans leur consentement préalable pour leur proposer des services liés à l'investissement dans des contrats à terme de marchandises constitue une restriction à la libre prestation des services, mais est justifiée par la raison impérieuse d'intérêt général que constitue le maintien de la bonne réputation du secteur financier national. Le bon fonctionnement des marchés financiers est, en effet, largement tributaire de la confiance qu'ils inspirent aux investisseurs, laquelle est notamment conditionnée par l'existence d'une réglementation professionnelle visant à assurer la compétence et la loyauté des intermédiaires financiers. Or, en soustrayant les investisseurs à un mode de démarchage les prenant généralement au dépourvu, l'interdiction du "cold calling" sur un marché aussi spéculatif que celui des contrats à terme de marchandises vise à assurer l'intégrité du secteur financier national.

L'État membre à partir duquel est donné l'appel téléphonique non sollicité étant le mieux placé pour réglementer le démarchage de clients potentiels se trouvant dans un autre État membre, il ne saurait lui être reproché de ne pas laisser ce soin à l'État membre du destinataire. De plus, la restriction en cause ne saurait être considérée comme excessive, l'interdiction étant limitée au marché sur lequel ont été constatés des abus et à un seul des modes possibles d'approche de la clientèle.

Arrêt du 10 mai 1995, Alpine Investments / Minister van Financiën (C-384/93, Rec._p._I-1141) (cf. points 42-56)

54. Libre prestation des services - Restrictions - Régime d'aide au logement subordonnant l'octroi aux emprunteurs d'une bonification d'intérêt à la condition d'avoir contracté avec un établissement de crédit établi sur le territoire national - Justification par des raisons d'intérêt général ou par la nécessité d'assurer la cohérence du système fiscal - Absence

L'article 59 du traité s'oppose à ce qu'un État membre soumette l'octroi d'une aide sociale en faveur du logement, notamment une bonification d'intérêt, à la condition que les prêts destinés au financement de la construction, de l'acquisition ou de l'amélioration du logement subventionné aient été contractés auprès d'un établissement de crédit agréé dans cet État membre, ce qui suppose qu'il y soit établi.

En effet, cette condition crée, s'agissant des prestations de service que constituent les prêts à la construction octroyés par les banques, une discrimination à l'encontre des prestataires établis dans d'autres États membres, qu'interdit ledit article et qui ne peut trouver de justification ni dans les dérogations qu'autorise l'article 56 du traité, celui-ci ne pouvant être invoqué pour poursuivre des objectifs de nature économique, ni dans la nécessité d'assurer la cohérence du système fiscal national, aucun lien direct n'existant entre l'octroi aux emprunteurs de la bonification et son financement au moyen de l'impôt perçu sur les bénéfices des établissements financiers.

Arrêt du 14 novembre 1995, Svensson et Gustavsson / Ministre du Logement et de l'Urbanisme (C-484/93, Rec._p._I-3955) (cf. points 11-19 et disp.)

55. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 92/49 - Champ d'application - Assurances comprises dans un régime légal de sécurité sociale - Exclusion

L'article 2, paragraphe 2, de la directive 92/49, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357, doit être interprété en ce sens que des régimes de sécurité sociale, tels que les régimes légaux de sécurité sociale français dont relèvent l'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, l'assurance vieillesse des professions artisanales et l'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales, sont exclus du champ d'application de la directive 92/49. En effet, cette disposition établit clairement qu'elle exclut du champ d'application de la directive non seulement les organismes de sécurité sociale, mais également les assurances et les opérations qu'ils effectuent à ce titre. En outre, les États membres ont conservé leur compétence pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale, et donc pour organiser des régimes obligatoires fondés sur la solidarité, régimes qui ne pourraient survivre si la directive qui implique la suppression de l'obligation d'affiliation devait leur être appliquée.

Arrêt du 26 mars 1996, Garcia e.a. (C-238/94, Rec._p._I-1673) (cf. points 10-16 et disp.)

56. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises du secteur de la construction effectuant une prestation de services d'acquitter des cotisations patronales faisant double emploi avec des cotisations versées au lieu d'établissement - Inadmissibilité - Justification - Absence

Les articles 59 et 60 du traité s'opposent à ce qu'un État membre oblige une entreprise du secteur de la construction, établie dans un autre État membre et exécutant temporairement des travaux dans le premier État, à verser des cotisations patronales au titre de "timbres-fidélité" et de "timbres-intempéries" du chef des travailleurs qui ont été affectés à la réalisation de ces travaux, alors que cette entreprise est déjà redevable de cotisations patronales comparables, du chef des mêmes travailleurs et pour les mêmes périodes d'activité, dans l'État où elle est établie.

En effet, une telle obligation, même si elle est indistinctement applicable aux entreprises établies sur le territoire national et à celles, établies dans un autre État membre, qui font usage de la liberté de prestation de services, constitue, dans la mesure où les secondes, devant payer des cotisations dans deux États membres, voient leur position concurrentielle affectée, une restriction à cette liberté. Ladite restriction pourrait, certes, être justifiée par l'intérêt général qui s'attache à la protection sociale des travailleurs du secteur de la construction, mais pour cela il faudrait que les travailleurs en cause ne jouissent pas déjà de la même protection ou d'une protection essentiellement comparable dans l'État membre où est établi leur employeur.

C'est au juge national qu'il appartient de vérifier si, par-delà les différences techniques entre les régimes de protection des salariés dans les deux États membres en cause, les travailleurs concernés ne bénéficient pas déjà, dans l'État membre où est établie l'entreprise qui les emploie, d'un mécanisme, alimenté par les cotisations de leur employeur, leur assurant une protection essentiellement comparable à celle que finance la cotisation prévue dans l'État où s'effectue la prestation de services. S'il se confirme que tel est bien le cas, on se trouve en présence d'une restriction inadmissible à la libre prestation des services.

Arrêt du 28 mars 1996, Guiot (C-272/94, Rec._p._I-1905) (cf. points 14-22 et disp.)

57. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Organisme de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence d'un État membre - Critère de détermination - Établissement - Application d'autres critères - Inadmissibilité - Contrôle d'émissions transmises par un organisme relevant de la compétence d'un autre État membre - Inadmissibilité - Application aux services par satellite autres qu'intérieurs d'un régime de contrôle moins strict que celui appliqué aux services intérieurs - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2, paragraphes 1 et 2, et 3, paragraphe 2, de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, l'État membre qui, pour déterminer les organismes de radiodiffusion par satellite qui relèvent de sa compétence, adopte des critères, telles la transmission ou la réception de programmes, autres que celui de l'établissement, ce qui le conduit à exercer un contrôle, interdit par la directive, sur des émissions relevant de la compétence d'un autre État membre, et qui, s'agissant des organismes qu'il estime relever de sa compétence, applique aux services par satellite autres qu'intérieurs un régime moins strict que celui auquel sont soumis les services par satellite intérieurs.

D'une part, en effet, la notion de compétence d'un État membre, utilisée au premier tiret de l'article 2, paragraphe 1, de la directive, doit être entendue comme englobant nécessairement une compétence ratione personae à l'égard des organismes de radiodiffusion télévisuelle, laquelle ne peut être fondée que sur le rattachement desdits organismes à l'ordre juridique de cet État, ce qui recouvre en substance la notion d'établissement au sens de l'article 59, premier alinéa, du traité dont les termes présupposent que le prestataire et le destinataire d'un service sont établis dans deux États membres différents. D'autre part, s'il est vrai que, en vertu de l'article 3, paragraphe 1, de la directive, un État membre peut prévoir des règles plus strictes dans les domaines régis par celle-ci, il n'en demeure pas moins que, selon l'article 2, paragraphe 1, toutes les émissions transmises par des organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence de cet État membre ou à l'égard desquels il est appelé à exercer une compétence en vertu du second tiret de cette disposition doivent respecter le droit applicable aux émissions destinées au public dans cet État membre.

Arrêt du 10 septembre 1996, Commission / Royaume-Uni (C-222/94, Rec._p._I-4025) (cf. points 40-42, 61, 74, 78, 80 et disp.)

58. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Champ d'application - Transmission de programmes par câble - Inclusion

La directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, doit être interprétée en ce sens qu'elle s'applique à la télédistribution par câble.

Arrêt du 10 septembre 1996, Commission / Belgique (C-11/95, Rec._p._I-4115) (cf. points 20-25)

59. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Contrôle du respect des dispositions de la directive - Contrôle incombant à l'État membre d'origine des émissions - Contrôle par l'État membre de réception par le biais d'une autorisation de retransmission devant être sollicitée par les cablo-opérateurs - Inadmissibilité

La directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, doit être interprétée, eu égard au système selon lequel, dans ses articles 2, paragraphes 1 et 2, et 3, paragraphe 2, elle répartit les obligations entre les États membres dont émanent les émissions et ceux qui les reçoivent, en ce sens que, d'une part, le contrôle de l'application du droit de l'État membre d'origine applicable aux émissions de radiodiffusion télévisuelle et du respect des dispositions de la directive n'incombe qu'à l'État membre dont les émissions émanent, et que, d'autre part, hors le cas visé par l'article 2, paragraphe 2, deuxième phrase, l'État membre de réception n'est pas autorisé à exercer son propre contrôle à cet égard.

Il s'ensuit que manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 2 de la directive, l'État membre qui

- maintient un régime d'autorisation préalable pour la retransmission par câble d'émissions de radiodiffusion télévisuelle en provenance d'autres États membres

- maintient un régime d'autorisation préalable, expresse et conditionnelle, pour la retransmission par câble d'émissions de radiodiffusion télévisuelle en provenance d'autres États membres qui comportent de la publicité commerciale ou un programme de télé-achat plus particulièrement destinés à ses téléspectateurs.

Arrêt du 10 septembre 1996, Commission / Belgique (C-11/95, Rec._p._I-4115) (cf. points 31-36, 106 et disp.)

60. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Faculté ouverte aux États membres d'augmenter le temps de transmission consacré à la publicité - Conditions d'exercice - Diffusion d'offres faites directement au public ou d'autres formes de publicité caractérisées par une durée des messages supérieure à celle habituelle pour les spots publicitaires

La directive 89/552 relative à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle et, en particulier, ses articles 1er, sous b), et 18 doivent être interprétés en ce sens que l'expression "formes de publicités telles que les offres faites directement au public" figurant à l'article 18 revêt, dans la réglementation communautaire, en ce qui concerne la possibilité de majorer le pourcentage maximal du temps de transmission quotidien consacré à la publicité et de le porter à 20 %, un caractère exemplatif de sorte qu'elle peut également viser d'autres formes de promotions, telles les "télépromotions", qui, à l'instar des "offres faites directement au public", nécessitent en raison de leurs modalités de présentation une durée plus longue que les spots publicitaires.

En effet, si le législateur communautaire a prévu une augmentation des plafonds de transmission pour les offres faites directement au public, c'est en raison du fait que cette forme de promotion des ventes nécessite des durées de diffusion supérieures à celles caractérisant les simples spots publicitaires, et non pas en raison du fait que ces offres sont des émissions présentant des produits qui peuvent être directement commandés par téléphone, courrier ou par vidéotexte et qui sont destinés à être livrés au domicile des téléspectateurs, car la commande des produits par le téléspectateur est une opération totalement distincte de la présentation télévisée qu'entend régir la directive. Il est de ce fait normal que d'autres formes de publicité, qui nécessitent aussi des durées plus longues que celle habituelle des spots, puissent bénéficier de l'augmentation prévue explicitement, mais non exclusivement, pour les offres faites directement au public. Mais c'est à chaque État membre qu'il appartient, à supposer qu'il entende faire usage de la faculté, qui lui est reconnue par l'article 18, s'agissant des organes de radiodiffusion télévisuelle relevant de sa compétence, de porter jusqu'à 20 % le plafond de diffusion, de décider, dans le respect du traité, si ce relèvement peut bénéficier à des formes de publicité qui se distinguent des spots sans constituer pour autant des offres faites directement au public.

Arrêt du 12 décembre 1996, RTI e.a. / Ministero delle Poste e Telecomunicazioni (C-320/94, C-328/94, C-329/94, C-337/94, C-338/94 et C-339/94, Rec._p._I-6471) (cf. points 31-37, disp. 1)

61. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Émissions parrainées - Insertion du nom ou du logo du parrain à des moments autres que le début ou la fin du programme - Admissibilité

La directive 89/552 relative à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle et, en particulier, son article 17, paragraphe 1, sous b) doivent être interprétés en ce sens qu'ils n'interdisent pas, s'agissant des émissions faisant l'objet d'un parrainage, l'insertion du nom et/ou du logo du parrain à des moments autres que le début et/ou la fin du programme. Toutefois, en ce qui concerne les organismes de radiodiffusion télévisuelle qui relèvent de leur compétence, les États membres ont la faculté, en vertu de l'article 3, paragraphe 1, de la directive, de prévoir des règles plus strictes en la matière, pour autant qu'elles ne portent pas atteinte aux libertés garanties par le traité, et notamment à la libre prestation des services et à la libre circulation des marchandises. Cette interprétation n'affecte pas le fait que les programmes télévisés parrainés ne doivent en aucun cas inciter à l'achat ou à la location des produits ou services du parrain ou d'un tiers, en particulier en faisant des références promotionnelles spécifiques à ces produits ou services.

Arrêt du 12 décembre 1996, RTI e.a. / Ministero delle Poste e Telecomunicazioni (C-320/94, C-328/94, C-329/94, C-337/94, C-338/94 et C-339/94, Rec._p._I-6471) (cf. points 45-47, disp. 2)

62. Libre prestation des services - Recouvrement judiciaire de créances - Restrictions - Recours obligatoire à un avocat - Justification par des raisons d'intérêt général - Protection des destinataires de services et bonne administration de la justice - Admissibilité

L'article 59 du traité ne s'oppose pas à une réglementation nationale qui interdit à une entreprise établie dans un autre État membre de procéder au recouvrement judiciaire de créances d'autrui en raison du fait qu'une telle activité, exercée à titre professionnel, est réservée à la profession d'avocat. En effet, cette interdiction n'est pas discriminatoire, car elle s'applique indistinctement aux prestataires nationaux et à ceux des autres États membres, vise à protéger les destinataires de services contre les préjudices pouvant résulter du recours à des personnes dépourvues de qualifications professionnelles ou morales nécessaires et à assurer une bonne administration de la justice, est de nature à atteindre cet objectif en raison de la garantie de compétence qu'assure le recours à un avocat, et ne saurait être qualifiée de disproportionnée, même si on ne la retrouve pas dans d'autres États membres, car il rentre dans la compétence d'un État membre de décider quelle doit être l'étendue du champ d'activité reservé aux avocats.

Arrêt du 12 décembre 1996, Reisebüro Broede / Sandker (C-3/95, Rec._p._I-6511) (cf. points 29-31, 35-43 et disp.)

63. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Organisme de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence d'un État membre - Critère de détermination - Établissement - Incidence de l'origine des programmes diffusés sur la compétence d'un État membre - Absence

L'article 2, paragraphe 1, de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, doit être interprété en ce sens qu'un organisme de radiodiffusion télévisuelle relève de la compétence de l'État membre dans lequel il est établi.

En effet, si la directive ne comporte pas de définition expresse des termes "organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de [la] compétence [d'un État membre]", il résulte, toutefois, du libellé de la disposition précitée que la notion de compétence d'un État membre doit être entendue comme englobant nécessairement une compétence ratione personae à l'égard desdits organismes, laquelle ne peut être fondée que sur le rattachement de ces derniers à l'ordre juridique de cet État, ce qui recouvre en substance la notion d'établissement au sens de l'article 59, premier alinéa, du traité, dont les termes présupposent que le prestataire et le destinataire d'un service sont "établis" dans deux États membres différents.

Par ailleurs, l'origine des programmes diffusés par l'organisme de radiodiffusion ou leur conformité avec les articles 4 et 5 de la directive sont dénuées de pertinence lorsqu'il s'agit de déterminer l'État membre de la compétence duquel relève un tel organisme en vertu de l'article 2, paragraphe 1, de ladite directive.

Arrêt du 29 mai 1997, Denuit (C-14/96, Rec._p._I-2785) (cf. points 21-23, 26-27, disp. 1)

64. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Contrôle du respect des dispositions de la directive - Contrôle incombant à l'État membre d'origine des émissions - Opposition d'un État membre à la retransmission d'émissions, non conformes aux articles 4 et 5 de la directive, transmises par un organisme relevant de la compétence d'un autre État membre - Inadmissibilité - Exceptions

L'article 2, paragraphe 2, de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, doit être interprété en ce sens qu'un État membre ne peut s'opposer à la retransmission sur son territoire des émissions d'un organisme de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence d'un autre État membre, lorsque ces émissions ne sont pas conformes aux exigences des articles 4 et 5 de cette même directive.

En effet, selon le système de répartition des obligations entre les États membres dont émanent les émissions et ceux qui les reçoivent, établi par la directive, le contrôle de l'application du droit de l'État membre d'origine applicable aux émissions de radiodiffusion télévisuelle ainsi que celui du respect des dispositions de la directive n'incombent qu'à l'État membre dont les émissions émanent, l'État membre de réception n'étant pas autorisé à exercer son propre contrôle à cet égard.

Ce n'est que dans le cas prévu à l'article 2, paragraphe 2, deuxième phrase, de ladite directive que l'État membre de réception peut, à titre exceptionnel, suspendre la retransmission d'émissions télévisées aux conditions déterminées par cette disposition.

Arrêt du 29 mai 1997, Denuit (C-14/96, Rec._p._I-2785) (cf. points 32, 34, 36, disp. 2)

65. Libre prestation des services - Restrictions - Interdiction - Portée - Mesures indistinctement applicables - Réglementation d'un État membre rendant obligatoire, entre les bureaux de tourisme et de voyage organisateurs de programmes touristiques dans cet État membre et les guides touristiques titulaires d'une autorisation d'y exercer leur profession, la forme juridique du contrat de travail - Inadmissibilité

L'article 59 du traité exige non seulement l'élimination de toute discrimination à l'encontre du prestataire de services en raison de sa nationalité, mais également la suppression de toute restriction, même si elle s'applique indistinctement aux prestataires nationaux et à ceux des autres États membres, lorsqu'elle est de nature à prohiber ou à gêner autrement les activités du prestataire établi dans un autre État membre dans lequel il fournit également des services analogues.

Dès lors, une réglementation d'un État membre qui, en rendant obligatoire entre les parties la forme juridique du contrat de travail, empêche les bureaux de tourisme et de voyage, quel que soit le lieu où ils sont établis, de conclure, dans le cadre de l'exécution des programmes d'activités touristiques qu'ils mettent sur pied dans cet État membre, un contrat de prestation de services avec un guide touristique titulaire d'une autorisation d'y exercer sa profession et originaire d'un autre État membre constitue une entrave au sens de l'article 59 du traité, en ce qu'elle prive le guide touristique originaire d'un autre État membre de la faculté d'exercer son activité dans le premier État membre à titre indépendant.

Arrêt du 5 juin 1997, Syndesmos ton en Elladi Touristikon kai Taxidiotikon Grafeion / Ypourgos Ergasias (C-398/95, Rec._p._I-3091) (cf. points 16-19, disp. 1)

66. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation d'un État membre rendant obligatoire, entre les bureaux de tourisme et de voyage organisateurs de programmes touristiques dans cet État membre et les guides touristiques titulaires d'une autorisation d'y exercer leur profession, la forme juridique du contrat de travail - Justification par des raisons d'intérêt général - Maintien de la paix sociale - Mesure poursuivant un objectif de nature économique - Exclusion - Caractère nécessaire de la mesure - Absence

Une réglementation d'un État membre qui, en rendant obligatoire entre les parties la forme juridique du contrat de travail, empêche les bureaux de tourisme et de voyage, quel que soit le lieu où ils sont établis, de conclure, dans le cadre de l'exécution des programmes d'activités touristiques qu'ils mettent sur pied dans cet État membre, un contrat de prestation de services avec un guide touristique titulaire d'une autorisation d'y exercer sa profession et originaire d'un autre État membre ne peut être justifiée par des raisons impérieuses d'intérêt général liées au maintien de la paix sociale, dans la mesure où, d'une part, adoptée afin de régler les conflits existants entre les guides touristiques et les bureaux de tourisme et de voyage et d'éviter ainsi que le tourisme, et donc l'économie du pays, n'en subisse les conséquences négatives, elle poursuit un objectif de nature économique et où, d'autre part, il n'est pas avéré qu'il est nécessaire, pour maintenir la paix sociale, de restreindre l'activité, à titre indépendant, des guides touristiques originaires d'autres États membres dans le cadre de l'exécution des programmes d'activités touristiques organisés par des bureaux de tourisme et de voyage.

Arrêt du 5 juin 1997, Syndesmos ton en Elladi Touristikon kai Taxidiotikon Grafeion / Ypourgos Ergasias (C-398/95, Rec._p._I-3091) (cf. points 22-25, disp. 2)

67. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Organisme de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence d'un État membre - Critère de détermination - Établissement - Organisme de radiodiffusion établi dans plusieurs États membres

L'article 2, paragraphe 1, de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, doit être interprété en ce sens qu'un organisme de radiodiffusion télévisuelle relève de la compétence de l'État membre dans lequel il est établi.

En effet, si la directive ne comporte pas de définition expresse des termes "organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de [la] compétence [d'un État membre]", il résulte, toutefois, du libellé de la disposition précitée que la notion de compétence d'un État membre doit être entendue comme englobant nécessairement une compétence ratione personae à l'égard desdits organismes, laquelle ne peut être fondée que sur le rattachement de ces derniers à l'ordre juridique de cet État, ce qui recouvre en substance la notion d'établissement au sens de l'article 59, premier alinéa, du traité, dont les termes présupposent que le prestataire et le destinataire d'un service sont "établis" dans deux États membres différents.

Lorsqu'un organisme de radiodiffusion télévisuelle est établi dans plus d'un État membre, la compétence dont il relève revient à l'État membre sur le territoire duquel l'organisme de radiodiffusion a le centre de ses activités, notamment là où sont prises les décisions concernant la politique de programmation et l'assemblage final des programmes à diffuser.

Arrêt du 5 juin 1997, VT4 / Vlaamse Gemeenschap (C-56/96, Rec._p._I-3143) (cf. points 15-19, 23 et disp.)

68. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Publicité télévisée - Contrôle du respect des dispositions de la directive - Contrôle incombant à l'État membre d'origine des émissions - Réglementation nationale relative à la protection des consommateurs contre la publicité trompeuse - Mesures à l'égard d'un annonceur en raison d'une publicité télévisée diffusée à partir d'un autre État membre - Admissibilité - Condition - Absence d'obstacles à la retransmission proprement dite d'émissions de radiodiffusion en provenance de cet État membre

La directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, ne fait pas obstacle à ce qu'un État membre prenne, en application d'une réglementation générale relative à la protection des consommateurs contre la publicité trompeuse, des mesures, telles des interdictions et des injonctions, à l'égard d'un annonceur en raison d'une publicité télévisée diffusée à partir d'un autre État membre, pourvu que ces mesures n'empêchent pas la retransmission proprement dite sur son territoire des émissions de radiodiffusion télévisuelle en provenance de cet autre État membre.

En effet, si la directive prévoit que les États membres assurent la liberté de réception et n'entravent pas la retransmission sur leur territoire d'émissions de radiodiffusion télévisuelle en provenance d'autres États membres pour des raisons relatives à la publicité télévisée et au parrainage, elle n'a toutefois pas pour effet d'exclure complètement et automatiquement l'application de règles autres que celles visant spécifiquement la diffusion et la distribution des programmes, et notamment d'une réglementation nationale qui, de façon générale, poursuit un objectif de protection des consommateurs sans toutefois instaurer un second contrôle des émissions de radiodiffusion télévisuelle s'ajoutant à celui que l'État membre d'émission est tenu d'effectuer.

En outre, la directive 84/450, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité trompeuse, qui prévoit notamment en son article 4, paragraphe 1, que les États membres veillent à ce qu'il existe des moyens adéquats et efficaces pour contrôler la publicité trompeuse dans l'intérêt des consommateurs aussi bien que des concurrents et du public en général, risquerait d'être vidée de sa substance dans le domaine de la publicité télévisée si l'État membre de réception était privé de toute possibilité de prendre des mesures à l'encontre d'un annonceur, ce qui serait en contradiction avec la volonté exprimée par le législateur communautaire.

Arrêt du 9 juillet 1997, Konsumentombudsmannen / De Agostini et TV-Shop (C-34/95, C-35/95 et C-36/95, Rec._p._I-3843) (cf. points 33-35, 37-39, disp. 1)

69. Libre prestation des services - Restrictions - Publicité télévisée - Réglementation en matière de publicité trompeuse - Mesures à l'égard d'un annonceur en raison d'une publicité télévisée diffusée à partir d'un autre État membre - Justification par des raisons d'intérêt général - Conditions

L'article 59 du traité doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce qu'un État membre prenne, sur la base des dispositions de sa législation nationale en matière de publicité trompeuse, des mesures à l'égard d'un annonceur en raison d'une publicité télévisée diffusée à partir d'un autre État membre. Il appartient toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier si ces dispositions sont nécessaires pour satisfaire à des exigences impératives tenant à l'intérêt général, comme la loyauté des transactions commerciales et la protection des consommateurs, ou à l'un des objectifs énoncés à l'article 56 du traité, si elles sont proportionnées à cet effet et si ces objectifs ou exigences impératives ne pourraient être atteints par des mesures restreignant d'une manière moindre les échanges intracommunautaires.

Arrêt du 9 juillet 1997, Konsumentombudsmannen / De Agostini et TV-Shop (C-34/95, C-35/95 et C-36/95, Rec._p._I-3843) (cf. points 52-54, disp. 3)

70. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Publicité télévisée - Contrôle du respect des dispositions de la directive - Contrôle incombant à l'État membre d'origine des émissions - Dispositions nationales ayant spécifiquement pour objet de contrôler le contenu de la publicité télévisuelle à l'égard des mineurs - Application aux émissions en provenance d'autres États membres - Inadmissibilité

La directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, doit être interprétée comme faisant obstacle à l'application aux émissions de radiodiffusion télévisuelle en provenance d'autres États membres d'une disposition d'une loi nationale sur la radiodiffusion qui dispose qu'une séquence publicitaire diffusée au cours des plages horaires prévues pour la publicité télévisée ne doit pas viser à capter l'attention des enfants de moins de 12 ans.

En effet, la directive précitée comprend un ensemble complet de dispositions spécifiquement consacrées à la protection des mineurs à l'égard des programmes télévisuels en général et de la publicité télévisée en particulier dont le respect doit être assuré par l'État d'émission. Ces dispositions, bien qu'elles n'aient pas pour effet d'interdire l'application de réglementations de l'État de réception qui ont pour objet général la protection des consommateurs ou des mineurs pourvu que cette application n'empêche pas la retransmission proprement dite sur son territoire des émissions de radiodiffusion en provenance d'un autre État membre, s'opposent à ce que l'État membre de réception applique à des émissions en provenance d'autres États membres des dispositions ayant spécifiquement pour objet de contrôler le contenu de la publicité télévisuelle à l'égard des mineurs, et instaure ainsi un second contrôle s'ajoutant à celui que l'État membre d'émission est tenu d'effectuer conformément à la directive.

Arrêt du 9 juillet 1997, Konsumentombudsmannen / De Agostini et TV-Shop (C-34/95, C-35/95 et C-36/95, Rec._p._I-3843) (cf. points 57-62, disp. 4)

71. Libre prestation des services - Établissements de crédit - Exigence d'un agrément - Établissement de crédit déjà agréé dans un autre État membre - Admissibilité - Conditions

Pour la période précédant l'entrée en vigueur de la deuxième directive 89/646, visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, l'article 59 du traité doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'un État membre impose à un établissement de crédit, déjà agréé dans un autre État membre, d'obtenir un agrément pour pouvoir accorder un prêt hypothécaire à une personne résidant sur son territoire, à moins que cet agrément

- s'impose à toute personne ou à toute société exerçant une telle activité sur le territoire de l'État membre de destination;

- soit justifié par des raisons liées à l'intérêt général telles que la protection des consommateurs; et

- soit objectivement nécessaire pour assurer le respect des règles applicables dans le secteur considéré et pour protéger les intérêts que ces règles ont pour but de sauvegarder, étant entendu que le même résultat ne pourrait pas être obtenu par des règles moins contraignantes.

Dans le cadre de son appréciation, le juge national doit notamment distinguer selon la nature de l'activité bancaire en cause et du risque encouru par le destinataire du service. En effet, la conclusion d'un contrat de prêt hypothécaire présente pour le consommateur des risques différents de ceux du dépôt de fonds auprès d'un établissement de crédit. En outre, la nécessité de protéger l'emprunteur varie en fonction de la nature des prêts hypothécaires et, dans certaines situations, en raison précisément des caractéristiques du prêt octroyé et de la qualité de l'emprunteur, il n'y a aucun besoin de protéger celui-ci par l'application des règles impératives de son droit national.

Arrêt du 9 juillet 1997, SCI Parodi / Banque de Bary (C-222/95, Rec._p._I-3899) (cf. points 29, 32 et disp.)

72. Libre prestation des services - Établissements de crédit - Libération des services bancaires en harmonie avec la libération progressive de la circulation des capitaux - Octroi de prêts hypothécaires - Libération, sous réserve des dérogations prévues par la première directive du Conseil pour la mise en oeuvre de l'article 67 du traité - Conséquences

L'opération consistant, pour une banque établie dans un État membre, à accorder un prêt hypothécaire à un emprunteur établi dans un autre État membre constitue une prestation de services liée à un mouvement de capital, dont la libération est à réaliser, conformément à l'article 61, paragraphe 2, du traité, en harmonie avec la libération progressive de la circulation des capitaux. À l'époque où la première directive du Conseil pour la mise en oeuvre de l'article 67 du traité, telle que modifiée par la deuxième directive 63/21, était en vigueur, l'octroi d'un tel prêt hypothécaire constituait un mouvement de capital en principe libéré par l'article 3, paragraphe 1, de la première directive. Il s'ensuit que, sans préjudice des restrictions de change qu'un État membre pouvait maintenir ou rétablir au titre de l'article 3, paragraphe 2, de la directive précitée, les règles relatives aux mouvements de capitaux n'étaient pas de nature à restreindre la liberté de conclure des prêts hypothécaires sous forme de prestations de services en vertu de l'article 59 du traité.

Arrêt du 9 juillet 1997, SCI Parodi / Banque de Bary (C-222/95, Rec._p._I-3899) (cf. points 8, 12-16)

73. Libre prestation des services - Restrictions - Fiscalité de l'épargne constituée sous forme d'assurance vie - Législation nationale prévoyant des régimes d'imposition différents selon le lieu d'établissement des compagnies d'assurances - Inadmissibilité

Bien que la matière des impôts directs ne relève pas, en tant que telle, du domaine de la compétence de la Communauté, il n'en reste pas moins que les États membres doivent exercer leurs compétences retenues dans le respect du droit communautaire.

S'agissant de la libre prestation des services, l'article 59 du traité s'oppose à l'application d'une législation d'un État membre qui prévoit un régime fiscal différent pour les assurances vie en capital selon qu'elles sont souscrites auprès de compagnies établies ou non dans cet État membre, dès lors qu'une telle législation comporte un ensemble d'éléments susceptibles de dissuader les preneurs d'assurances de souscrire des assurances vie en capital auprès de compagnies établies dans d'autres États membres ainsi que de dissuader ces compagnies d'assurances d'offrir leurs services sur le marché dudit État membre.

Arrêt du 28 avril 1998, Safir / Skattemyndigheten i Dalarnas län (C-118/96, Rec._p._I-1897) (cf. points 21, 24, 30 et disp.)

74. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre - Soins dentaires - Exigence d'une autorisation préalable de l'organisme de sécurité sociale de l'État d'affiliation - Inadmissibilité - Justification - Contrôle des dépenses de santé - Protection de la santé publique - Absence

Les articles 59 et 60 du traité s'opposent à une réglementation nationale qui subordonne à l'autorisation de l'organisme de sécurité sociale de l'assuré le remboursement, selon le barème de l'État d'affiliation, des prestations de soins dentaires fournies par un orthodontiste établi dans un autre État membre.

Une telle réglementation décourage les assurés sociaux de s'adresser aux prestataires de services médicaux établis dans un autre État membre et constitue, tant pour ces derniers que pour leurs patients, une entrave à la libre prestation des services.

Elle n'est justifiée ni par un risque d'atteinte grave à l'équilibre financier du système de sécurité sociale puisque le remboursement des soins dentaires prodigués dans d'autres États membres selon les tarifs de l'État d'affiliation n'aurait pas d'incidence significative sur le financement du système de sécurité sociale, ni par des motifs de santé publique, au sens des articles 56 et 66 du traité, afin de protéger la qualité des prestations médicales fournies aux assurés dans d'autres États membres et de maintenir un service médical et hospitalier équilibré et accessible à tous. En effet, les conditions d'accès et d'exercice des activités de médecin et de dentiste ayant fait l'objet de plusieurs directives de coordination ou d'harmonisation, les médecins et dentistes établis dans d'autres États membres doivent se voir reconnaître toutes les garanties équivalentes à celles accordées aux médecins et dentistes établis sur le territoire national aux fins de la libre prestation de services. Par ailleurs, il n'a pas été soutenu qu'une telle réglementation est indispensable au maintien d'une capacité de soins ou d'une compétence médicale essentielle sur le territoire national dudit État membre.

Arrêt du 28 avril 1998, Kohll / Union des caisses de maladie (C-158/96, Rec._p._I-1931) (cf. points 35, 41-42, 45, 47-52 et disp.)

75. Transports - Transports maritimes - Libre prestation des services - Réglementation nationale imposant aux entreprises de transport maritime établies dans un autre État membre de recourir aux services des groupes de lamaneurs locaux - Admissibilité - Conditions

Les dispositions du règlement nº 4055/86, portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers, et de l'article 59 du traité ne s'opposent pas à une réglementation d'un État membre qui impose aux entreprises de transport maritime établies dans un autre État membre, lorsque leurs navires font escale dans les ports du premier État membre, de recourir moyennant rémunération aux services des groupes de lamaneurs locaux titulaires de concessions exclusives dès lors que, d'une part, une telle réglementation ne comporte aucune discrimination ostensible ou déguisée contraire auxdites dispositions et que, d'autre part, même si elle constituait une entrave à la libre prestation du service de lamanage ou à la libre prestation des services de transport maritime, dans la première hypothèse, les conditions d'application de l'article 90, paragraphe 2, du traité seraient réunies et, dans la seconde, la réglementation serait justifiée par des considérations de sécurité publique au sens de l'article 56 du traité.

Arrêt du 18 juin 1998, Corsica Ferries France / Gruppo Antichi Ormeggiatori del porto di Genova e.a. (C-266/96, Rec._p._I-3949) (cf. points 57, 59-61, disp. 3)

76. Libre prestation des services - Restrictions - Octroi d'une garantie financière - Recours, par une agence de voyages, à une garantie octroyée par un établissement de crédit ou une entreprise d'assurances établis dans un autre État membre - Réglementation nationale exigeant un accord entre le garant et un établissement financier ou une entreprise d'assurances situés dans l'État membre - Inadmissibilité - Justification - Protection des consommateurs - Limites

L'article 59 du traité ainsi que la deuxième directive 89/646, visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, et modifiant la directive 77/780, et la directive 92/49, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357, s'opposent à une réglementation nationale qui, aux fins de la mise en oeuvre de l'article 7 de la directive 90/314 concernant les voyages, vacances et circuits à forfait, exige, lors de la constitution de garanties financières auprès d'un établissement de crédit ou d'une entreprise d'assurances situés dans un autre État membre, que ce garant conclue un accord supplémentaire avec un établissement de crédit ou une entreprise d'assurances situés sur le territoire national.

Cette exigence a tout d'abord un effet restrictif et dissuasif pour les établissements financiers établis dans d'autres États membres dans la mesure où elle les empêche d'offrir les garanties requises directement à l'organisateur de voyages, au même titre qu'un garant situé sur le territoire national. Elle est également de nature à dissuader l'organisateur de voyages de s'adresser à un établissement financier situé dans un autre État membre, dans la mesure où ce dernier est obligé de conclure un autre accord de garantie étant susceptible d'engendrer des coûts supplémentaires qui seront normalement répercutés sur l'organisateur de voyages. Elle constitue une restriction à la libre prestation des services qui n'est pas justifiée comme étant nécessaire pour satisfaire à la protection des consommateurs.

Arrêt du 1er décembre 1998, Ambry (C-410/96, Rec._p._I-7875) (cf. points 28-31, 39 et disp.)

77. Libre prestation des services - Établissements de crédit - Interdiction aux personnes ou entreprises n'étant pas des établissements de crédit d'exercer, à titre professionnel, l'activité de réception de dépôts ou d'autres fonds remboursables du public - Autres fonds remboursables - Notion - Instruments financiers faisant l'objet d'un accord contractuel prévoyant le remboursement des fonds versés - Inclusion

L'expression "d'autres fonds remboursables" figurant à l'article 3 de la deuxième directive 89/646, visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, et modifiant la directive 77/780, qui prévoit une interdiction, pour les personnes ou entreprises qui ne sont pas des établissements de crédit, de recevoir des dépôts ou d'autres fonds remboursables du public à titre professionnel, vise non seulement les instruments financiers dont la caractéristique intrinsèque est d'être remboursables, mais également ceux qui, bien que ne possèdant pas cette caractéristique, font l'objet d'un accord contractuel prévoyant le remboursement des fonds versés.

En effet, il ressort des directives 77/780 et 89/646 que la protection de l'épargne constitue l'un des objectifs des travaux de coordination entrepris en matière d'établissements de crédit. Selon le quatrième considérant de la première directive 77/780, ces travaux doivent s'appliquer à l'ensemble des établissements de crédit. Le cinquième considérant ajoute qu'il est dès lors nécessaire que leur champ d'application soit le plus large possible et vise tous les établissements dont l'activité consiste à recueillir du public des fonds remboursables tant sous la forme de dépôts que sous d'autres formes telles que l'émission continue d'obligations et d'autres titres comparables.

Arrêt du 11 février 1999, Romanelli (C-366/97, Rec._p._I-855) (cf. points 12-13, 15, 17 et disp.)

78. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe - Directives 73/239 et 79/267 - Interdiction pour les États membres de fixer certaines règles concernant le choix par les entreprises d'assurance de leurs actifs - Réglementation nationale interdisant aux entreprises de détenir, au titre de leur patrimoine libre, des actions représentant plus de 5 % de l'ensemble des droits de vote d'une société anonyme - Incompatibilité - Effet direct des dispositions communautaires

Les articles 18, paragraphe 1, de la première directive 73/239 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, et son exercice, tel que modifié par l'article 26 de la directive 92/49, et 21, paragraphe 1, de la première directive 79/267 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe sur la vie, et son exercice, tel que modifié par l'article 27 de la directive 92/96, qui prévoient que les États membres ne fixent aucune règle concernant le choix, par les entreprises d'assurance, des actifs qui dépassent ceux représentant les provisions techniques, s'opposent à une règle de droit national qui interdit aux entreprises d'assurance de détenir, au titre de leur patrimoine libre, des actions représentant plus de 5 % de l'ensemble des droits de vote d'une société anonyme nationale ou étrangère, sans autorisation administrative.

Il résulte, en effet, du libellé même des dispositions en cause que les États membres doivent s'abstenir de toute réglementation quant au choix des actifs constituant le patrimoine libre des entreprises d'assurance, qu'il s'agisse de réglementations relatives à la qualité ou à la quantité de ces actifs.

Les dispositions précitées sont, par ailleurs, suffisamment précises et inconditionnelles pour être invoquées devant le juge national à l'encontre de l'administration et entraîner l'inapplicabilité d'une règle de droit national qui leur est contraire.

Arrêt du 20 avril 1999, Försäkringsaktiebolaget Skandia (C-241/97, Rec._p._I-1879) (cf. points 42-43, 53, 57, disp. 1-2)

79. Libre prestation des services - Restrictions - Contingentement des emplacements de mouillage réservés aux utilisateurs résidant dans un autre État membre - Inadmissibilité - Justification - Absence

L'article 59 du traité doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'un État membre interdise à l'exploitant d'un port de plaisance, sous peine de poursuites pénales, de donner en location des mouillages au-delà d'un contingent déterminé à des propriétaires de bateaux qui résident dans un autre État membre.

Une telle restriction des emplacements de mouillage méconnaît, en effet, l'interdiction, prévue par l'article 59, paragraphe 1, du traité, de toute discrimination, même indirecte, à l'endroit du prestataire de services. Elle ne saurait être justifiée par la nécessité de réserver l'accès des propriétaires locaux de bateaux à ces emplacements du fait que ceux-ci risqueraient d'être accaparés par les personnes résidant dans un autre État membre et disposées à payer des prix de location plus elevés, de tels motifs d'ordre économique en faveur des propriétaires locaux ne pouvant constituer des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique susceptibles de rendre des réglementations nationales discriminatoires compatibles avec le droit communautaire.

Arrêt du 29 avril 1999, Ciola (C-224/97, Rec._p._I-2517) (cf. points 13, 16-17, 20, disp. 1)

80. Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale réservant à un organisme de droit public l'exploitation des machines à sous - Justification - Protection des consommateurs et de l'ordre social

Une législation nationale qui accorde à un seul organisme de droit public des droits exclusifs d'exploitation des machines à sous sur le territoire national et qui empêche ainsi les opérateurs des autres États membres, directement ou indirectement, de mettre eux-mêmes des machines à sous à la disposition du public en vue de leur utilisation contre rémunération, constitue, même si elle est indistinctement applicable, une entrave à la libre prestation des services.

Toutefois, cette entrave, dans la mesure où la législation en cause ne comporte aucune discrimination selon la nationalité, peut être justifiée par des motifs tenant à la protection des consommateurs et de l'ordre social. S'il est vrai que ladite législation n'interdit pas l'utilisation des machines à sous mais réserve leur exploitation à un organisme public autorisé, la détermination de l'étendue de la protection qu'un État membre entend assurer sur son territoire en matière de loteries et autres jeux d'argent fait partie du pouvoir d'appréciation dont disposent les autorités nationales. Il appartient à celles-ci, en effet, d'apprécier si, dans le contexte du but poursuivi, il est nécessaire d'interdire totalement ou partiellement des activités de cette nature ou seulement de les restreindre et de prévoir à cet effet des modalités de contrôle plus ou moins strictes. Dans ces conditions, la seule circonstance qu'un État membre a choisi un système de protection différent de celui adopté par un autre État membre ne saurait avoir d'incidence sur l'appréciation de la nécessité et de la proportionnalité des décisions prises en la matière. Celles-ci doivent seulement être appréciées au regard des objectifs poursuivis par les autorités nationales de l'État membre intéressé et du niveau de protection qu'elles entendent assurer.

Arrêt du 21 septembre 1999, Läärä e.a. (C-124/97, Rec._p._I-6067) (cf. points 28-29, 34-36, 43 et disp.)

81. Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale réservant à certains organismes le droit de collecter des paris sur les événements sportifs - Justification - Protection des consommateurs et de l'ordre social

Une législation nationale qui réserve à certains organismes le droit de collecter des paris sur les événements sportifs et qui empêche ainsi les opérateurs des autres États membres, directement ou indirectement, de procéder eux-mêmes à la collecte de paris, constitue, même si elle est indistinctement applicable, une entrave à la libre prestation des services.

Toutefois, cette entrave, dans la mesure où la législation en cause ne comporte aucune discrimination selon la nationalité, peut être justifiée par des objectifs tenant à la protection des consommateurs et de l'ordre social. S'il est vrai que ladite législation n'interdit pas totalement la collecte de paris sur les événements sportifs mais réserve cette activité à certains organismes dans certaines conditions, la détermination de l'étendue de la protection qu'un État membre entend assurer sur son territoire en matière de loteries et autres jeux d'argent fait partie du pouvoir d'appréciation dont disposent les autorités nationales. Il appartient à celles-ci, en effet, d'apprécier si, dans le contexte du but poursuivi, il est nécessaire d'interdire totalement ou partiellement des activités de cette nature ou seulement de les restreindre et de prévoir à cet effet des modalités de contrôle plus ou moins strictes. Dans ces conditions, la seule circonstance qu'un État membre a choisi un système de protection différent de celui adopté par un autre État membre ne saurait avoir d'incidence sur l'appréciation de la nécessité et de la proportionnalité des décisions prises en la matière. Celles-ci doivent seulement être appréciées au regard des objectifs poursuivis par les autorités nationales de l'État membre intéressé et du niveau de protection qu'elles entendent assurer.

Arrêt du 21 octobre 1999, Zenatti (C-67/98, Rec._p._I-7289) (cf. points 26-27, 32-34, 38 et disp.)

82. Libre circulation des marchandises - Dispositions du traité - Champ d'application - Droit de pêcher ou autorisation de pêcher au lancer - Exclusion - Application des dispositions relatives à la libre prestation des services

Le droit de pêcher ou l'autorisation de pêcher au lancer ne constituent pas des "marchandises" au sens des dispositions du traité relatives à la libre circulation des marchandises, mais relèvent d'une activité de "services" au sens des dispositions du traité relatives à la libre prestation des services.

En effet, l'activité qui consiste à mettre à la disposition de tiers, contre rémunération et sous certaines conditions, un plan d'eau pour y pratiquer la pêche constitue une prestation de services qui, si elle présente un caractère transfrontalier, relève des articles 59 et suivants du traité (devenus, après modification, articles 49 CE et suivants). Le fait que ce droit ou cette autorisation de pêcher sont constatés par des documents qui, comme tels, peuvent faire l'objet d'échanges ne suffit pas pour les faire entrer dans le champ d'application des dispositions du traité relatives à la libre circulation des marchandises.

Arrêt du 21 octobre 1999, Jägerskiöld (C-97/98, Rec._p._I-7319) (cf. points 36, 39, disp. 1)

83. Libre prestation des services - Restrictions - Impôt commercial sur le capital et le bénéfice d'exploitation - Réglementation nationale prévoyant la réintégration de certains éléments dans la base d'imposition pour les entreprises louant des biens auprès de bailleurs se trouvant pour la plupart établis en dehors du territoire national - Inadmissibilité - Justification par des raisons d'intérêt général - Absence

L'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) s'oppose à une législation nationale relative à l'impôt commercial sur le capital et le bénéfice d'exploitation des établissements industriels et commerciaux qui prévoit la réintégration dans la base d'imposition, d'une part, d'une partie des loyers ou redevances d'affermage acquittés pour l'utilisation et la jouissance de biens économiques appartenant à des tiers et, d'autre part, de la valeur de ces biens, dans la mesure où les loyers et redevances ou les biens ne sont pas déjà soumis à l'impôt commercial sur le capital et le bénéfice d'exploitation dans la personne du loueur ou du bailleur à ferme.

En effet, une telle réglementation qui réserve l'avantage fiscal, consistant en l'absence d'obligation de procéder aux réintégrations susmentionnées, à la plupart des entreprises qui louent des biens auprès de bailleurs établis sur le territoire national, alors qu'elle en prive toujours celles qui louent des biens auprès de bailleurs établis dans un autre État membre, comporte une différence de traitement fondée sur le lieu d'établissement du prestataire de services et ne saurait être justifiée ni par des raisons liées à la cohérence du régime fiscal ni par le fait que le bailleur établi dans un autre État membre est soumis à une fiscalité peu élevée.

Arrêt du 26 octobre 1999, Eurowings Luftverkehr (C-294/97, Rec._p._I-7447) (cf. points 5, 7, 10-11, 40-41, 43, 46 et disp.)

84. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Publicité télévisée - Nombre d'interruptions publicitaires autorisé dans la diffusion d'oeuvres audiovisuelles - Calcul - Prise en compte de la durée des publicités

Une disposition qui, en matière de prestations de services, impose une restriction à une activité qui concerne l'exercice d'une liberté fondamentale, telle que la libre diffusion des émissions télévisées, doit exprimer cette restriction en des termes clairs. Il s'ensuit que, lorsqu'une disposition de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, telle que modifiée par la directive 97/36, impose une restriction à la diffusion et à la distribution de services de télévision, sans que le législateur communautaire ait rédigé celle-ci en des termes clairs et non équivoques, celle-ci doit être interprétée de façon restrictive.

Dès lors que l'article 11, paragraphe 3, de la directive, libellé en des termes ambigus, prévoit une restriction en ce qui concerne la possibilité d'interrompre la transmission d'oeuvres audiovisuelles par de la publicité, il y a lieu d'interpréter cette restriction dans le sens le plus strict. Or, il est constant que le principe du brut, selon lequel la durée des publicités est incluse dans la période de temps prise en considération pour le calcul du nombre d'interruption autorisé, permet un plus grand nombre d'interruptions publicitaires que le principe du net, selon lequel seule la durée elle-même des oeuvres est incluse. Il en résulte que l'article 11, paragraphe 3, de ladite directive doit être interprété en ce sens qu'il prévoit le principe du brut, en sorte que, pour calculer la période de 45 minutes aux fins de déterminer le nombre d'interruptions publicitaires autorisé dans la diffusion d'oeuvres audiovisuelles, tels des longs métrages et des films conçus pour la télévision, la durée des publicités doit être incluse dans cette période.

Arrêt du 28 octobre 1999, ARD (C-6/98, Rec._p._I-7599) (cf. points 26, 29-33, disp. 1)

85. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Faculté des États membres de déroger aux règles relatives à la publicité - Nombre d'interruptions publicitaires autorisé dans la diffusion d'oeuvres audiovisuelles - Calcul excluant la durée des publicités - Admissibilité - Conditions

Les dispositions combinées des articles 11, paragraphe 3, et 3, paragraphe 1, de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, telle que modifiée par la directive 97/36, autorisent les États membres à prévoir, pour les organismes de radiodiffusion télévisuelle qui relèvent de leur compétence, le principe du net pour la publicité qui peut être insérée pendant des émissions, donc de prévoir que, pour calculer la période de 45 minutes aux fins de déterminer le nombre d'interruptions publicitaires autorisé dans la diffusion d'oeuvres audiovisuelles, tels des longs métrages et des films conçus pour la télévision, la durée des publicités doit être exclue, à condition toutefois que ces règles soient compatibles avec d'autres dispositions pertinentes du droit communautaire.

À cet égard, d'une part, les articles 5 du traité (devenu article 10 CE), 6, 30 du traité (devenus, après modification, articles 12 CE et 28 CE) et 85 du traité (devenu article 81 CE) ainsi que le principe général d'égalité de traitement ne s'appliquent pas à une réglementation nationale qui prévoit l'application du principe du net pour les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence et, d'autre part, l'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) ne s'oppose pas à ce qu'un État membre prévoie, en vertu de l'article 3, paragraphe 1, de la directive 89/552, l'application du principe du net.

Arrêt du 28 octobre 1999, ARD (C-6/98, Rec._p._I-7599) (cf. points 43, 54, disp. 2)

86. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises du secteur de la construction effectuant une prestation de services de conserver, après la cessation d'activités dans l'État membre d'accueil, des documents sociaux sur le territoire de cet État au domicile, situé dans cet État, d'une personne physique - Inadmissibilité

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) s'opposent à ce qu'un État membre impose, même par des lois de police et de sûreté, à une entreprise du secteur de la construction établie dans un autre État membre et exécutant temporairement des travaux dans le premier État de conserver, pendant cinq ans après qu'elle a cessé d'occuper des travailleurs dans le premier État membre, des documents sociaux tels que le registre du personnel et le compte individuel au domicile, situé dans ledit État membre, d'une personne physique qui tient ces documents en tant que mandataire ou préposé. De telles exigences ne sauraient être justifiées, dès lors que le contrôle du respect des réglementations liées à la protection sociale des travailleurs du secteur de la construction peut être assuré par des mesures moins restrictives.

Arrêt du 23 novembre 1999, Arblade (C-369/96 et C-376/96, Rec._p._I-8453) (cf. points 77-78, 80, disp. 5)

87. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises du secteur de la construction effectuant une prestation de services de payer la rémunération minimale fixée par une convention collective applicable dans l'État membre d'accueil - Admissibilité - Conditions

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) ne s'opposent pas à ce qu'un État membre impose à une entreprise du secteur de la construction établie dans un autre État membre et exécutant temporairement des travaux dans le premier État de payer à ses travailleurs détachés la rémunération minimale fixée par la convention collective de travail applicable dans le premier État membre, à condition que les dispositions en cause soient suffisamment précises et accessibles pour ne pas rendre, en pratique, impossible ou excessivement difficile la détermination, par un tel employeur, des obligations qu'il devrait respecter.

Arrêt du 23 novembre 1999, Arblade (C-369/96 et C-376/96, Rec._p._I-8453) (cf. point 80, disp. 1)

88. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises du secteur de la construction effectuant une prestation de services d'acquitter des cotisations patronales faisant double emploi avec des cotisations versées au lieu d'établissement - Inadmissibilité

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) s'opposent à ce qu'un État membre impose, même par des lois de police et de sûreté, à une entreprise du secteur de la construction établie dans un autre État membre et exécutant temporairement des travaux dans le premier État de verser, pour chaque travailleur détaché, des cotisations patronales au titre de régimes de "timbres-intempéries" et de "timbres-fidélité" et de délivrer à chacun d'eux une fiche individuelle, alors que cette entreprise est déjà soumise à des obligations essentiellement comparables, en raison de leur finalité tenant à la sauvegarde des intérêts des travailleurs, du chef des mêmes travailleurs et pour les mêmes périodes d'activité, dans l'État où elle est établie.

Arrêt du 23 novembre 1999, Arblade (C-369/96 et C-376/96, Rec._p._I-8453) (cf. point 80, disp. 2)

89. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises du secteur de la construction effectuant une prestation de services d'établir des documents sociaux et de travail faisant double emploi avec des documents tenus au lieu d'établissement - Inadmissibilité

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) s'opposent à ce qu'un État membre impose, même par des lois de police et de sûreté, à une entreprise du secteur de la construction établie dans un autre État membre et exécutant temporairement des travaux dans le premier État d'établir des documents sociaux ou de travail, tels un règlement du travail, un registre spécial du personnel et, pour chaque travailleur détaché, un compte individuel, dans la forme requise par la réglementation du premier État, dès lors que la protection sociale des travailleurs susceptible de justifier ces exigences est déjà sauvegardée par la production des documents sociaux et de travail tenus par ladite entreprise en application de la réglementation de l'État membre où elle est établie.

Tel est le cas lorsque, s'agissant de la tenue des documents sociaux et de travail, l'entreprise est déjà soumise, dans l'État où elle est établie, à des obligations comparables, en raison de leur finalité tenant à la sauvegarde des intérêts des travailleurs, du chef des mêmes travailleurs et pour les mêmes périodes d'activité, à celles édictées par la réglementation de l'État membre d'accueil.

Arrêt du 23 novembre 1999, Arblade (C-369/96 et C-376/96, Rec._p._I-8453) (cf. point 80, disp. 3)

90. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises du secteur de la construction effectuant une prestation de services de tenir à disposition des documents sociaux et de travail sur le territoire de l'État membre d'accueil - Admissibilité - Conditions

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) ne s'opposent pas à ce qu'un État membre oblige une entreprise du secteur de la construction établie dans un autre État membre et exécutant temporairement des travaux dans le premier État à tenir à disposition, pendant la période d'activité sur le territoire du premier État membre, des documents sociaux et de travail sur le chantier ou en un autre lieu accessible et clairement identifié du territoire de cet État, dès lors que cette mesure est nécessaire pour lui permettre d'assurer un contrôle effectif du respect de sa réglementation justifiée par la sauvegarde de la protection sociale des travailleurs.

Arrêt du 23 novembre 1999, Arblade (C-369/96 et C-376/96, Rec._p._I-8453) (cf. point 80, disp. 4)

91. Libre prestation des services - Personnel des entreprises de gardiennage - Exigence d'une carte d'identification délivrée selon une législation nationale - Inadmissibilité

Constitue une restriction à la libre prestation des services une règle de droit national selon laquelle tout membre du personnel d'une entreprise de gardiennage ou d'un service interne de gardiennage doit être en possession d'une carte d'identification délivrée selon la législation nationale. En effet, les formalités qu'implique l'obtention d'une telle carte sont susceptibles de rendre plus onéreuse la prestation des services transfrontaliers. Par ailleurs, le prestataire d'un service qui se rend dans un autre État membre devant être en possession d'une carte d'identité ou d'un passeport, l'exigence d'un document d'identité supplémentaire est disproportionnée par rapport à la nécessité d'assurer l'identification des personnes en question.

Arrêt du 9 mars 2000, Commission / Belgique (C-355/98, Rec._p._I-1221) (cf. points 39-41 et disp.)

92. Libre prestation des services - Services - Notion - Activités sportives

Les activités sportives et, notamment, la participation d'un athlète de haut niveau à une compétition internationale sont susceptibles d'impliquer la prestation de plusieurs services distincts, mais étroitement imbriqués, qui peuvent relever des articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) même si certains de ces services ne sont pas payés par ceux qui en bénéficient.

Arrêt du 11 avril 2000, Deliège (C-51/96 et C-191/97, Rec._p._I-2549) (cf. points 55-56)

93. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation sportive subordonnant la participation de joueurs professionnels ou semi-professionnels à des compétitions internationales à une procédure de sélection - Admissibilité

Une réglementation sportive imposant à un athlète professionnel ou semi-professionnel, ou à un candidat à une activité professionnelle ou semi-professionnelle, d'être en possession d'une autorisation ou d'une sélection de sa fédération pour pouvoir participer à une compétition sportive internationale de haut niveau qui n'oppose pas des équipes nationales, dès lors qu'elle découle d'une nécessité inhérente à l'organisation d'une telle compétition, ne constitue pas en elle-même une restriction à la libre prestation de services interdite par l'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE).

Arrêt du 11 avril 2000, Deliège (C-51/96 et C-191/97, Rec._p._I-2549) (cf. point 69 et disp.)

94. Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie et assurance directe sur la vie - Directives 92/49 et 92/96 - Interdiction d'exiger la communication systématique des conditions générales et spéciales des polices d'assurance - Législation nationale prévoyant une communication au ministre compétent, lors de la première commercialisation d'un modèle de contrat d'assurance sur le territoire national, des conditions de ce contrat - Inadmissibilité

Manque aux obligations lui incombant en vertu des articles 6, 29 et 39 de la directive 92/49, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357 (troisième directive "assurance non-vie"), ainsi que 5, 29 et 39 de la directive 92/96, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, et modifiant les directives 79/267 et 90/619 (troisième directive assurance vie), qui interdisent à un État membre d'exiger la communication systématique des conditions générales et spéciales des polices d'assurance qu'une entreprise se propose d'utiliser sur son territoire dans ses relations avec les preneurs d'assurance, un État membre qui maintient en vigueur des dispositions législatives, réglementaires ou administratives qui prévoient, de la part des entreprises d'assurance ou de capitalisation qui commercialisent pour la première fois sur le territoire national un modèle de contrat d'assurance, la communication systématique au ministre chargé de l'économie et des finances d'une fiche d'information contenant des éléments relevant des conditions générales des polices d'assurance.

Arrêt du 11 mai 2000, Commission / France (C-296/98, Rec._p._I-3025) (cf. points 27, 35 et disp.)

95. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 92/49 - Champ d'application - Assurances comprises dans un régime légal de sécurité sociale pratiquées par des entreprises d'assurances à leurs propres risques - Inclusion - Réglementation nationale excluant du champ d'application de la loi de transposition de la directive toute caisse ou entreprise d'assurances couvrant les accidents du travail - Manquement

L'article 2, paragraphe 2, de la directive 92/49, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357 (troisième directive "assurance non-vie"), doit être interprété à la lumière de l'article 55 de la directive, lequel se réfère aux entreprises d'assurances pratiquant sur le territoire des États membres, à leurs propres risques, l'assurance obligatoire des accidents du travail et dont il découle, s'agissant d'une disposition spéciale dérogatoire au régime général de la directive, que les assurances visées relèvent du champ d'application de celle-ci. Il s'ensuit que la directive 92/49 est applicable aux assurances comprises dans un régime légal de sécurité sociale pratiquées par des entreprises d'assurances à leurs propres risques.

Dès lors, en adoptant et en maintenant en vigueur une disposition qui exclut du champ d'application de la loi nationale de transposition de la directive 92/49 toute caisse ou entreprise d'assurances couvrant les accidents du travail, même lorsque ces caisses ou entreprises poursuivent un but lucratif à leurs propres risques, un État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu de la directive.

Arrêt du 18 mai 2000, Commission / Belgique (C-206/98, Rec._p._I-3509) (cf. points 35-36, 44 et disp.)

96. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 73/239 - Interdiction pour les entreprises d'assurance d'exercer des activités commerciales étrangères à l'assurance - Portée - Création par de telles entreprises d'entités ayant une personnalité juridique propre et exerçant des activités commerciales - Conditions d'admissibilité - Effet direct de la disposition correspondante

L'article 8, paragraphe 1, sous b), de la première directive 73/239 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, et son exercice, dans sa version résultant de la directive 92/49, selon lequel les entreprises d'assurance limitent leur objet social à l'activité d'assurance et aux opérations qui en découlent directement, à l'exclusion de toute autre activité commerciale, ne s'oppose pas à ce que des mutuelles exerçant uniquement des activités d'assurance créent un organisme doté d'une personnalité juridique propre, tel qu'une union de mutuelles, qui exerce des activités commerciales, dès lors que l'apport desdites mutuelles à un tel organisme n'excède pas le montant de leur patrimoine libre et que leur responsabilité est limitée audit apport.

La disposition précitée est, par ailleurs, suffisamment précise et inconditionnelle pour être invoquée devant le juge national à l'encontre de l'administration et entraîner l'inapplicabilité d'une règle de droit national incompatible avec cette disposition.

Arrêt du 21 septembre 2000, ABBOI (C-109/99, Rec._p._I-7247) (cf. points 64, 70, disp. 1-2)

97. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation d'un État membre subordonnant l'accomplissement, sur son territoire, d'activités artisanales par des prestataires de services établis dans d'autres États membres à une procédure d'autorisation et d'inscription au registre des métiers - Inadmissibilité - Justification tirée de l'intérêt général - Limites

L'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et l'article 4 de la directive 64/427, relative aux modalités des mesures transitoires dans le domaine des activités non salariées de transformation relevant des classes 23-40 C.I.T.I. (Industrie et artisanat), s'opposent à une réglementation d'un État membre qui subordonne l'accomplissement, sur son territoire, d'activités artisanales par des prestataires de services établis dans d'autres États membres à une procédure d'autorisation de nature à retarder ou compliquer l'exercice du droit à la libre prestation de services, dès lors que l'examen des conditions d'accès aux activités concernées a été effectué conformément à la directive et qu'il a été établi que ces conditions sont remplies. En outre, l'éventuelle exigence d'inscription au registre des métiers de l'État membre d'accueil, à supposer qu'elle soit justifiée par la raison impérieuse d'intérêt général tenant à garantir la qualité des travaux d'artisanat exécutés et à protéger les destinataires de ces travaux, ne devrait ni engendrer des frais administratifs supplémentaires ni entraîner le versement obligatoire de cotisations à la chambre des métiers.

Arrêt du 3 octobre 2000, Corsten (C-58/98, Rec._p._I-7919) (cf. points 38, 41, 49 et disp.)

98. Libre prestation des services - Restrictions - Interdiction des annonces publicitaires pour les boissons alcooliques - Justification par des raisons de protection de la santé publique - Condition

Les articles 56 et 59 du traité (devenus, après modification, articles 46 CE et 49 CE) ne s'opposent pas à une interdiction des annonces publicitaires pour les boissons alcooliques, prévue par une législation nationale, sauf s'il apparaît que, dans les circonstances de droit et de fait qui caractérisent la situation dans l'État membre concerné, la protection de la santé publique contre les méfaits de l'alcool peut être assurée par des mesures affectant de manière moindre le commerce intracommunautaire.

Arrêt du 8 mars 2001, Gourmet International Products (C-405/98, Rec._p._I-1795) (cf. point 42 et disp.)

99. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises effectuant une prestation de services de payer la rémunération minimale fixée par les règles nationales de l'État membre d'accueil - Admissibilité - Conditions

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) ne s'opposent pas à ce qu'un État membre impose à une entreprise établie dans un autre État membre qui effectue une prestation de services sur le territoire du premier État membre de payer à ses travailleurs la rémunération minimale fixée par les règles nationales de cet État. L'application de telles règles pourrait cependant s'avérer disproportionnée lorsqu'il s'agit de salariés d'une entreprise établie dans une région frontalière qui sont amenés à effectuer, à temps partiel et pendant de brèves périodes, une partie de leur travail sur le territoire d'un, voire de plusieurs États membres autres que celui d'établissement de l'entreprise. Il incombe, en conséquence, aux autorités compétentes de l'État membre d'accueil d'établir si, et dans quelle mesure, l'application d'une réglementation nationale imposant un salaire minimal à une telle entreprise est nécessaire et proportionnée pour assurer la protection des travailleurs concernés.

Arrêt du 15 mars 2001, Mazzoleni et ISA (C-165/98, Rec._p._I-2189) (cf. point 41 et disp.)

100. Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 88/357 - "Établissement" d'une compagnie d'assurances au sens de l'article 2, sous c), de la directive - Notion - Filiale - Exclusion

L'article 2, sous c), de la deuxième directive 88/357, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 73/239, qui définit l'"établissement" comme le siège social, l'agence ou la succursale d'une "entreprise", se rapporte à l'établissement d'une compagnie d'assurances.

Même si l'article 3 de la directive doit être interprété comme étendant la notion d'"agence ou succursale" figurant à l'article 2, sous c), de la directive de manière à ce qu'elle s'applique au sens le plus large, quelle que soit l'appellation formelle utilisée, il ne saurait toutefois en être déduit qu'une filiale constitue une forme de présence permanente devant être assimilée à une agence ou à une succursale et donc être considérée comme un établissement au sens de l'article 2, sous c), de la directive.

Arrêt du 14 juin 2001, Kvaerner (C-191/99, Rec._p._I-4447) (cf. points 32, 35, 39)

101. Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 88/357 - État membre où le risque est situé - "Établissement" du preneur d'assurance au sens de l'article 2, sous d), de la directive - Notion - Portée

La notion d'"établissement" qui est utilisée, pour déterminer l'"État membre où le risque est situé", à l'article 2, sous d), dernier tiret, de la deuxième directive 88/357, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 73/239, doit être interprétée en ce sens qu'elle couvre toutes les sociétés liées les unes aux autres au sein d'un groupe lorsque l'une de ces sociétés conclut une police d'assurance couvrant les risques d'exploitation d'autres sociétés du groupe.

Arrêt du 14 juin 2001, Kvaerner (C-191/99, Rec._p._I-4447) (cf. points 42, 56)

102. Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 88/357 - Taxes sur les primes d'assurance - État membre percevant à charge d'une personne morale établie dans un autre État membre une taxe sur les conventions d'assurance afférentes aux primes versées à un assureur, également établi dans un autre État membre, afin de couvrir les risques d'exploitation de sa filiale directe ou indirecte établie dans l'État membre de taxation - Admissibilité

Les articles 2, sous c) et d), dernier tiret, et 3 de la deuxième directive 88/357, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 73/239, permettent à un État membre de percevoir à charge d'une personne morale établie dans un autre État membre une taxe sur les conventions d'assurance afférente aux primes que cette personne morale a versées à un assureur, également établi dans un autre État membre, afin de couvrir les risques d'exploitation de sa filiale directe ou indirecte établie dans l'État membre de taxation. Il en va de même si la personne morale qui a versé les primes et celle dont les risques d'exploitation sont couverts sont deux sociétés du même groupe liées par une relation autre que celle de société mère à filiale.

Arrêt du 14 juin 2001, Kvaerner (C-191/99, Rec._p._I-4447) (cf. point 57, disp. 1)

103. Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 88/357 - Notions de "preneur" d'assurance et d'"État membre où le risque est situé" au sens de l'article 2, sous d), de la directive - Interprétation - Accords internes au sein d'un groupe de sociétés en matière de facturation et de paiement - Absence d'incidence

Il est indifférent, pour interpréter les notions de "preneur" d'assurance ou d'"État membre où le risque est situé" au sens de l'article 2, sous d), dernier tiret, de la deuxième directive 88/357, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 73/239, de savoir de quelle manière la prime afférente au risque assuré est facturée ou payée au sein d'un groupe de sociétés. Des critères subjectifs tels que des accords internes au sein du groupe en matière de facturation et de paiement ne sauraient, en effet, avoir une incidence sur la détermination de l'État membre où le risque est situé et, dès lors, de l'État membre compétent pour taxer l'opération d'assurance, parce qu'ils pourraient conduire à une évasion fiscale.

Arrêt du 14 juin 2001, Kvaerner (C-191/99, Rec._p._I-4447) (cf. points 59-60, disp. 2)

104. Libre prestation des services - Services - Notion - Prestation médicale dispensée dans un État membre et rétribuée par le patient - Inclusion - Remboursement sollicité auprès de l'assurance maladie d'un autre État membre prévoyant essentiellement une intervention en nature - Absence d'incidence

Une prestation médicale dispensée dans un État membre et rétribuée par le patient ne saurait cesser de relever du champ d'application de la libre prestation des services garantie par le traité du seul fait que le remboursement des soins en cause est sollicité au titre de la législation sur l'assurance maladie d'un autre État membre qui prévoit essentiellement une intervention en nature.

Arrêt du 12 juillet 2001, Smits et Peerbooms (C-157/99, Rec._p._I-5473) (cf. point 55)

105. Libre prestation des services - Services - Notion - Traitement médical hospitalier financé directement par les caisses d'assurance maladie sur la base de conventions et de tarifs préétablis - Inclusion

La circonstance qu'un traitement médical hospitalier est financé directement par les caisses d'assurance maladie sur la base de conventions et de tarifs préétablis n'est pas de nature à soustraire un tel traitement au domaine des services au sens de l'article 60 du traité (devenu article 50 CE).

En effet, d'une part, ladite disposition n'exige pas que le service soit payé par ceux qui en bénéficient et, d'autre part, les paiements effectués par les caisses de maladie dans le cadre d'un système de conventionnement entre celles-ci et les prestataires de soins de santé, fussent-ils forfaitaires, constituent bien la contrepartie économique des prestations hospitalières et présentent indubitablement un caractère rémunératoire dans le chef de l'établissement hospitalier qui en bénéficie et qui est engagé dans une activité de type économique.

Arrêt du 12 juillet 2001, Smits et Peerbooms (C-157/99, Rec._p._I-5473) (cf. points 56-58)

106. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre - Soins hospitaliers - Exigence d'une autorisation préalable de la caisse de maladie de l'État d'affiliation - Octroi soumis à des conditions relatives au caractère usuel et nécessaire du traitement - Admissibilité - Conditions

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) ne s'opposent pas à la législation d'un État membre qui subordonne la prise en charge de soins dispensés dans un établissement hospitalier situé dans un autre État membre à l'obtention d'une autorisation préalable de la caisse de maladie à laquelle l'assuré est affilié et qui soumet l'octroi d'une telle autorisation à la double condition que, d'une part, le traitement puisse être considéré comme "usuel dans les milieux professionnels concernés", critère également appliqué lorsqu'il s'agit de déterminer si des soins hospitaliers dispensés sur le territoire national bénéficient d'une couverture, et que, d'autre part, le traitement médical de l'assuré l'exige. Il n'en va toutefois de la sorte que pour autant

- que l'exigence relative au caractère "usuel" du traitement soit interprétée de telle manière que l'autorisation ne puisse être refusée de ce chef lorsqu'il apparaît que le traitement concerné est suffisamment éprouvé et validé par la science médicale internationale, et

- que l'autorisation ne puisse être refusée du chef d'une absence de nécessité médicale que lorsqu'un traitement identique ou présentant le même degré d'efficacité pour le patient peut être obtenu en temps opportun auprès d'un établissement ayant conclu une convention avec la caisse de maladie dont relève l'assuré.

Dans ces circonstances, de telles conditions sont justifiables au regard de la nécessité de maintenir sur le territoire national une offre suffisante, équilibrée et permanente de soins hospitaliers et de garantir la stabilité financière du système de l'assurance maladie.

Arrêt du 12 juillet 2001, Smits et Peerbooms (C-157/99, Rec._p._I-5473) (cf. points 97, 105, 108 et disp.)

107. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises du secteur de la construction effectuant une prestation de services d'appliquer aux travailleurs détachés à cette fin le régime de congés payés de l'État membre d'accueil - Admissibilité - Conditions

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) ne s'opposent pas à ce qu'un État membre impose à une entreprise du secteur de la construction établie dans un autre État membre, qui effectue une prestation de services sur le territoire du premier État membre, une réglementation nationale garantissant aux travailleurs détachés à cette fin par l'entreprise des droits à des congés payés, à condition, d'une part, que les travailleurs ne bénéficient pas d'une protection essentiellement comparable en vertu de la législation de l'État membre d'établissement de leur employeur, de sorte que l'application de la réglementation nationale du premier État membre leur apporte un avantage réel qui contribue, de manière significative, à leur protection sociale, et, d'autre part, que l'application de cette réglementation du premier État membre soit proportionnée à l'objectif d'intérêt général poursuivi.

Arrêt du 25 octobre 2001, Finalarte e.a. (C-49/98, C-50/98, C-52/98 à C-54/98 et C-68/98 à C-71/98, Rec._p._I-7831) (cf. point 53, disp. 1)

108. Libre prestation des services - Restrictions - Application aux travailleurs détachés des entreprises du secteur de la construction d'une réglementation nationale prévoyant une durée des congés payés pour les travailleurs du bâtiment dépassant la durée minimum prévue par la directive 93/104 - Admissibilité

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) ne s'opposent pas à ce que la réglementation d'un État membre qui prévoit une durée de congés payés supérieure à celle prévue par la directive 93/104 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, nécessaire pour assurer la protection sociale des travailleurs du bâtiment, soit étendue aux travailleurs détachés dans cet État membre par des prestataires de services du secteur de la construction établis dans d'autres États membres, pendant la période de détachement.

Arrêt du 25 octobre 2001, Finalarte e.a. (C-49/98, C-50/98, C-52/98 à C-54/98 et C-68/98 à C-71/98, Rec._p._I-7831) (cf. points 58-59, disp. 2)

109. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale ne prévoyant pas le droit au remboursement des sommes versées par une caisse de congés payés au titre des indemnités de congés pour les entreprises du secteur de la construction établies dans d'autres États membres mais conférant aux travailleurs détachés un droit direct envers ladite caisse - Admissibilité - Conditions

Dans la mesure où une différence de traitement est justifiée par des différences objectives entre les entreprises du secteur de la construction établies dans l'État membre d'accueil et celles établies dans d'autres États membres en ce qui concerne la mise en oeuvre effective de l'obligation de paiement d'indemnités de congés aux travailleurs, les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) ne s'opposent pas à ce qu'une réglementation nationale accorde aux premières un droit au remboursement par la caisse de congés payés des sommes versées au titre des indemnités de congés et de la prime de vacances, alors qu'elle ne prévoit pas un tel droit pour les secondes mais confère, au lieu de cela, aux travailleurs détachés un droit direct envers ladite caisse.

Arrêt du 25 octobre 2001, Finalarte e.a. (C-49/98, C-50/98, C-52/98 à C-54/98 et C-68/98 à C-71/98, Rec._p._I-7831) (cf. point 65, disp. 2)

110. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises du secteur de la construction effectuant une prestation de services de fournir des renseignements supplémentaires aux autorités de l'État membre d'accueil - Justification par des raisons d'intérêt général - Protection sociale des travailleurs - Caractère proportionné de la demande de renseignements - Appréciation par le juge national

L'obligation, imposée par une réglementation nationale visant à protéger efficacement des travailleurs du secteur de la construction, notamment quant à leurs droits aux congés payés, aux entreprises établies dans un autre État membre qui détachent des travailleurs sur le territoire national, de fournir plus de renseignements à la caisse de congés payés que les employeurs établis sur le territoire national constitue une restriction à la libre prestation des services au sens de l'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE).

Une telle restriction peut être justifiée si elle est nécessaire pour protéger effectivement et par les moyens appropriés la raison impérieuse d'intérêt général que constitue la protection sociale des travailleurs.

Il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer, compte tenu du principe de proportionnalité, les types de renseignements que les autorités de l'État membre concerné peuvent légitimement exiger des prestataires de services établis sur le territoire d'un autre État membre. À cette fin, il convient que la juridiction de renvoi évalue si des différences objectives entre la situation des entreprises établies sur le territoire national et celle des entreprises établies dans les autres États membres nécessitent objectivement le surcroît de renseignements exigé de ces dernières.

Arrêt du 25 octobre 2001, Finalarte e.a. (C-49/98, C-50/98, C-52/98 à C-54/98 et C-68/98 à C-71/98, Rec._p._I-7831) (cf. points 69-72, 75, disp. 2)

111. Libre prestation des services - Restrictions non justifiées dans le domaine de l'organisation des foires - Manquement

Manque aux obligations lui incombant en vertu des articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE), 60 du traité (devenu article 50 CE), 61, 63 et 64 du traité (devenus, après modification, articles 51 CE, 52 CE et 53 CE), et 65 et 66 du traité (devenus articles 54 CE et 55 CE) un État membre qui instaure, sans justification tenant à des raisons impérieuses d'intérêt général, des restrictions à la libre prestation des services en maintenant en vigueur des dispositions qui

- exigent un agrément ou une reconnaissance officielle pour l'exercice de l'activité d'organisateur de foires;

- imposent à l'organisateur de foires de disposer d'un siège, d'un établissement ou d'une structure permanente au niveau national ou local;

- imposent à l'organisateur de foires de posséder une forme ou un statut juridique particuliers;

- exigent que l'activité d'organisateur de foires soit exercée à titre exclusif;

- interdisent à l'organisateur de foires de poursuivre un but lucratif;

- imposent un caractère périodique aux foires;

- imposent la conformité des foires aux objectifs fixés par une région dans le cadre de la programmation régionale;

- imposent le respect de délais contraignants dans la procédure d'autorisation des foires;

- prévoient l'interdiction d'organiser d'autres foires que celles qui sont inscrites dans le calendrier officiel.

Arrêt du 15 janvier 2002, Commission / Italie (C-439/99, Rec._p._I-305) (cf. points 26-34, 42, disp. 1)

112. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions non justifiées dans le domaine de l'organisation des foires - Manquement

Manque aux obligations lui incombant en vertu des articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE), 60 du traité (devenu article 50 CE), 61, 63 et 64 du traité (devenus, après modification, articles 51 CE, 52 CE et 53 CE), et 65 et 66 du traité (devenus articles 54 CE et 55 CE) ainsi qu'en vertu des articles 52 et 54 du traité (devenus, après modification, articles 43 CE et 44 CE), 55 du traité (devenu article 45 CE), 56 et 57 du traité (devenus, après modification, articles 46 CE et 47 CE), et 58 du traité (devenu article 48 CE) un État membre qui instaure, sans justification tenant à des raisons impérieuses d'intérêt général, des restrictions à la libre prestation des services et à la liberté d'établissement en maintenant en vigueur des dispositions qui

- subordonnent la nomination des organes des entités foraines à l'intervention des autorités publiques ou d'organismes locaux d'autre nature;

- subordonnent l'activité d'organisateur de foires à la présence parmi les fondateurs ou les associés d'au moins une institution territoriale locale;

- subordonnent l'organisation de foires à l'intervention d'organismes composés d'opérateurs déjà présents sur le territoire visé, aux fins de l'autorisation de manifestations foraines.

Arrêt du 15 janvier 2002, Commission / Italie (C-439/99, Rec._p._I-305) (cf. points 36-42, disp.2)

113. Libre circulation des marchandises - Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale en matière de télévision numérique - Soumission à autorisation préalable des activités des opérateurs de services d'accès conditionnel et de la commercialisation de leurs produits - Justification - Conditions - Critères d'appréciation

Une réglementation nationale qui soumet la commercialisation des appareils, équipements, décodeurs ou systèmes de transmission et de réception numérique de signaux de télévision par satellite ainsi que la prestation des services y afférents par des opérateurs de services d'accès conditionnel à une procédure d'autorisation préalable restreint tant la libre circulation des marchandises que la libre prestation des services. Partant, pour être justifiée au regard de ces libertés fondamentales, une telle réglementation doit poursuivre un motif d'intérêt général reconnu en droit communautaire et respecter le principe de proportionnalité, c'est-à-dire être propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint.

Pour apprécier le respect du principe de proportionnalité par une telle réglementation nationale, les considérations suivantes doivent notamment être prises en compte:

- pour qu'un régime d'autorisation administrative préalable soit justifié alors même qu'il déroge à ces libertés fondamentales, il doit, en tout état de cause, être fondé sur des critères objectifs, non discriminatoires et connus à l'avance, de manière à encadrer l'exercice du pouvoir d'appréciation des autorités nationales afin que celui-ci ne soit pas exercé de manière arbitraire;

- une mesure instituée par un État membre qui, en substance, fait double emploi avec des contrôles qui ont déjà été effectués dans le cadre d'autres procédures, soit dans ce même État, soit dans un autre État membre, ne saurait être considérée comme nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi;

- une procédure d'autorisation préalable ne serait nécessaire que si un contrôle a posteriori devait être considéré comme intervenant trop tardivement pour garantir une réelle efficacité de celui-ci et lui permettre d'atteindre l'objectif poursuivi;

- une procédure d'autorisation préalable ne saurait être conforme aux principes fondamentaux de la libre circulation des marchandises et de la libre prestation des services si, par sa durée et les frais disproportionnés qu'elle engendre, elle est susceptible de dissuader les opérateurs concernés de poursuivre leur projet.

Arrêt du 22 janvier 2002, Canal Satélite Digital (C-390/99, Rec._p._I-607) (cf. point 43, disp. 1-2)

114. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Interdiction de collaboration entre avocats et experts-comptables édictée par l'ordre des avocats d'un État membre - Justification - Bon exercice de la profession d'avocat

Les articles 52 et 59 du traité (devenus, après modification, articles 43 CE et 49 CE) ne s'opposent pas à une réglementation nationale telle qu'un règlement relatif à la collaboration entre les avocats et d'autres professions libérales, adopté par l'ordre des avocats d'un État membre, qui interdit toute collaboration intégrée entre les avocats et les experts-comptables, étant donné que celle-ci a pu être raisonnablement considérée comme nécessaire au bon exercice de la profession d'avocat telle qu'elle est organisée dans l'État membre concerné.

Arrêt du 19 février 2002, Wouters e.a. (C-309/99, Rec._p._I-1577) (cf. point 123, disp. 4)

115. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe sur la vie - Directive 92/96 - Informations à fournir au preneur - Législation nationale exigeant un avertissement relatif au caractère généralement préjudiciable de la résiliation, de la réduction ou du rachat d'un contrat d'assurance en cours en vue de la souscription d'un autre contrat - Inadmissibilité

L'article 31, paragraphe 3, de la directive 92/96, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie et modifiant les directives 79/267 et 90/619 (troisième directive assurance vie), s'oppose à une réglementation nationale qui prévoit que la proposition d'assurance sur la vie ou, à défaut de proposition, la police doit informer le preneur que la résiliation, la réduction ou le rachat d'un contrat d'assurance sur la vie en cours, en vue de la souscription d'un autre contrat d'assurance sur la vie, est généralement préjudiciable au preneur d'assurance. En effet, les informations supplémentaires que les États membres peuvent requérir conformément à cet article doivent être claires, précises et nécessaires à la compréhension effective des caractéristiques essentielles des produits d'assurance qui sont proposés au preneur. Or, une information aussi vague et générale que celle fournie par un tel avertissement n'apparaît pas comme répondant à ces conditions.

Arrêt du 5 mars 2002, Axa Royale Belge (C-386/00, Rec._p._I-2209) (cf. points 24-25, 30-31 et disp.)

116. Libre prestation des services - Restrictions - État membre interdisant aux avocats établis dans d'autres États membres et exerçant dans le premier État de disposer de l'infrastructure nécessaire - Inadmissibilité

Manque aux obligations lui incombant en vertu de l'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) un État membre qui maintient une interdiction générale faite aux avocats établis dans les autres États membres, qui exercent dans le premier État membre dans le cadre de la libre prestation des services, de disposer dans cet État de l'infrastructure nécessaire à l'accomplissement de leurs prestations.

En effet, le caractère temporaire d'une prestation de services n'exclut pas la possibilité pour le prestataire de services, au sens du traité, de se doter, dans l'État membre d'accueil, d'une certaine infrastructure (y compris un bureau, un cabinet ou une étude) dans la mesure où cette infrastructure est nécessaire aux fins de l'accomplissement de la prestation en cause.

Arrêt du 7 mars 2002, Commission / Italie (C-145/99, Rec._p._I-2235) (cf. points 22-23, 57, disp. 1)

117. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Architectes - Reconnaissance des diplômes et des titres - Établissement de listes nationales des diplômes et titres devant bénéficier d'une reconnaissance automatique - Obligations des États membres

S'il est vrai que l'article 7 de la directive 85/384, visant à la reconnaissance mutuelle de certains titres du domaine de l'architecture, n'oblige pas expressément les États membres à reprendre, dans une liste nationale des titres devant bénéficier de la reconnaissance automatique, les diplômes, certificats et autres titres figurant dans les listes publiées par la Commission en application du paragraphe 2 de cet article, la transposition en droit interne d'une directive doit néanmoins assurer effectivement sa pleine application d'une façon suffisamment claire et précise, afin que, au cas où la directive vise à créer des droits pour les particuliers, les bénéficiaires soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et de s'en prévaloir, le cas échéant, devant les juridictions nationales. Cette condition est particulièrement importante lorsque la directive vise à accorder des droits aux ressortissants d'autres États membres, pour lesquels il est essentiel qu'ils puissent identifier les titres qui doivent être reconnus automatiquement par l'État membre d'accueil.

Arrêt du 21 mars 2002, Commission / Italie (C-298/99, Rec._p._I-3129) (cf. points 27-29, disp. 1)

118. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Architectes - Reconnaissance des diplômes et des titres - Diplômes ou titres donnant accès aux activités d'architecte en vertu des droits acquis - Période transitoire s'achevant au terme du délai de transposition de la directive 85/384

L'article 12 de la directive 85/384, visant à la reconnaissance mutuelle de certains titres du domaine de l'architecture, qui prévoit une exception aux exigences minimales de formation fixées aux articles 3 et 4 de la même directive en stipulant que chaque État membre doit reconnaître le titre d'architecte aux personnes qui se sont vues délivrer par un autre État membre une attestation certifiant que, au moment de la mise en application de la directive, elles étaient en droit de porter ce titre dans cet autre État membre, quand bien même ces personnes ne répondraient pas auxdites exigences minimales, doit être interprété en se sens que la "mise en application de la directive" se réfère à la date à laquelle cette directive devait être au plus tard transposée. Il s'ensuit qu'un État membre qui a transposé la directive avec retard ne peut pas prolonger la période transitoire prévue à l'article 12.

Arrêt du 21 mars 2002, Commission / Italie (C-298/99, Rec._p._I-3129) (cf. points 47, 51-52, disp. 1)

119. Libre prestation des services - Restrictions - État membre interdisant aux architectes établis dans d'autres États membres et exerçant dans le premier État de disposer de l'infrastructure nécessaire - Inadmissibilité

L'interdiction générale, faite par un État membre aux architectes établis dans d'autres États membres qui souhaitent fournir des prestations de services dans le premier État membre, de créer sur son territoire un siège principal ou secondaire est incompatible avec l'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) dans la mesure où elle fait obstacle à ce qu'un prestataire de services établi dans un autre État membre se dote, dans le premier État, d'une infrastructure nécessaire aux fins de la prestation en cause. En effet, le caractère temporaire d'une prestation de services n'exclut pas la possibilité pour le prestataire de services, au sens du traité, de se doter, dans l'État membre d'accueil, d'une certaine infrastructure (y compris un bureau, un cabinet ou une étude) dans la mesure où cette infrastructure est nécessaire aux fins de l'accomplissement de la prestation en cause.

Arrêt du 21 mars 2002, Commission / Italie (C-298/99, Rec._p._I-3129) (cf. points 56-57, disp. 1)

120. Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Leasing - Inclusion

Le leasing constitue un service au sens de l'article 50 CE. Il consiste en effet en une prestation économique fournie contre rémunération. Le fait que cette activité implique la remise de marchandises par le bailleur au locataire ne saurait infirmer cette qualification dans la mesure où la fourniture ne porte pas tant sur les marchandises elles-mêmes que sur leur utilisation par le locataire, lesdites marchandises demeurant la propriété du bailleur.

Arrêt du 21 mars 2002, Cura Anlagen (C-451/99, Rec._p._I-3193) (cf. point 18)

121. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation d'immatriculer dans l'État membre d'utilisation les véhicules pris en leasing auprès d'une entreprise établie dans un autre État membre - Justification - Compétence fiscale des États membres en matière de taxation des véhicules automobiles - Conditions liées au délai d'immatriculation, à la résidence ou à l'établissement de l'entreprise de leasing, à l'assurance, au contrôle technique et à l'acquittement d'une taxe à la consommation - Inadmissibilité - Critères

Lorsqu'un véhicule pris en leasing auprès d'une société établie dans un État membre est réellement utilisé sur le réseau routier d'un autre État membre, ce dernier peut prévoir l'obligation pour ce véhicule d'être immatriculé sur son territoire, dès lors que l'immatriculation est le corollaire naturel de la compétence fiscale que, dans le respect du droit communautaire, les États membres sont libres d'exercer en matière de taxation des véhicules automobiles. Les dispositions du traité relatives à la libre prestation des services (articles 49 CE à 55 CE) s'opposent toutefois à la législation d'un État membre qui en pareil cas soumet l'immatriculation à une ou plusieurs des conditions suivantes :

- un délai d'immatriculation d'une telle brièveté qu'il rend impossible ou excessivement difficile le respect des obligations imposées, eu égard aux formalités qui doivent être accomplies;

- l'obligation de résidence ou d'établissement dans l'État membre d'utilisation pour la personne au nom de laquelle le véhicule y est immatriculé, en tant qu'elle contraint l'entreprise de leasing soit à avoir un établissement principal dans ledit État membre, soit à accepter l'immatriculation du véhicule sous le nom du locataire et la limitation de ses droits sur le véhicule en découlant;

- l'obligation d'assurance du véhicule auprès d'un assureur agréé dans l'État membre d'utilisation, dans l'hypothèse où cette obligation implique que l'assureur doit avoir son principal établissement dans cet État membre, en tant qu'État d'origine au sens des directives sur l'assurance non-vie, et y disposer d'un "agrément officiel";

- l'obligation de contrôle technique, lorsque le véhicule a déjà fait l'objet d'un contrôle technique dans l'État membre d'établissement de la société de leasing, sauf si cette obligation vise à vérifier que le véhicule satisfait aux conditions imposées aux véhicules immatriculés dans l'État membre d'utilisation qui ne sont pas couvertes par les contrôles effectués dans l'État membre d'établissement de la société de leasing et/ou que l'état du véhicule ne s'est pas détérioré depuis qu'il a été contrôlé dans ce dernier État membre, s'il a été entre-temps utilisé sur la voie publique, à condition qu'un contrôle similaire soit imposé lorsqu'un véhicule précédemment contrôlé dans l'État membre d'utilisation est présenté à l'immatriculation dans cet État;

- l'acquittement, dans l'État membre d'utilisation, d'une taxe à la consommation dont le montant n'est pas proportionnel à la durée de l'immatriculation du véhicule dans ledit État.

Arrêt du 21 mars 2002, Cura Anlagen (C-451/99, Rec._p._I-3193) (cf. points 40-42, 46, 71 et disp.)

122. Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Assurance retraite volontaire - Inclusion

Les dispositions du traité relatives à la libre prestation des services s'appliquent à un régime d'assurance retraite volontaire dans la mesure où les cotisations que verse l'assuré constituent la contrepartie économique des pensions qui lui seront servies lorsqu'il cessera d'exercer ses activités et où elles présentent un caractère rémunératoire dans le chef de l'institution qui les perçoit. En effet, au sens de l'article 60 du traité (devenu article 50 CE), qui précise que le chapitre concernant les services s'applique aux prestations fournies normalement contre rémunération, la caractéristique essentielle de la rémunération réside dans le fait que celle-ci constitue la contrepartie économique de la prestation en cause.

Arrêt du 3 octobre 2002, Danner (C-136/00, Rec._p._I-8147) (cf. points 26-27)

123. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Impôts sur le revenu - Déductibilité du revenu imposable de cotisations en matière d'assurance retraite volontaire - Exclusion des cotisations versées à un prestataire établi dans un autre État membre nonobstant le caractère imposable des pensions versées - Inadmissibilité - Justification - Absence

L'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation fiscale d'un État membre qui restreint ou exclut la faculté de déduire aux fins de l'impôt sur le revenu des cotisations d'assurance retraite volontaire versées à des prestataires de pensions établis dans d'autres États membres tout en accordant la faculté de déduire de telles cotisations lorsqu'elles sont versées à des organismes établis dans le premier État membre, si elle n'exclut pas en même temps le caractère imposable des pensions versées par lesdits prestataires de pensions.

En effet, compte tenu de l'importance que revêt, lors de la conclusion d'un contrat d'assurance retraite, la possibilité d'obtenir des allégements fiscaux à ce titre, de telles règles sont susceptibles de dissuader les intéressés de contracter des assurances retraite volontaires avec des compagnies établies dans d'autres États membres et celles-ci d'offrir leurs services sur le marché du premier État membre.

La nécessité d'assurer la cohérence fiscale, de garantir l'efficacité des contrôles fiscaux ou de préserver l'assiette des recettes fiscales ne saurait justifier une telle réglementation, dans la mesure où

- premièrement, un lien direct entre la faculté de déduire les cotisations d'assurance et l'imposition des pensions versées par l'assureur fait défaut et où, par l'effet des conventions contre la double imposition, la cohérence fiscale n'est plus établie au niveau d'une même personne;

- deuxièmement, outre le fait que rien n'empêche les autorités fiscales concernées d'exiger du contribuable les preuves qu'elles jugent nécessaires pour apprécier si les conditions de déductibilité des cotisations sont réunies, un État membre peut invoquer la directive 77/799, concernant l'assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs, afin d'obtenir toutes les informations susceptibles de lui permettre l'établissement correct des impôts sur le revenu, l'efficacité du contrôle de l'imposition des pensions versées pouvant quant à elle être sauvegardée par des moyens moins restrictifs de la libre prestation des services;

- troisièmement, la nécessité de prévenir la réduction des recettes fiscales ne figure ni parmi les raisons énoncées à l'article 56 du traité (devenu, après modification, article 46 CE) ni parmi les raisons impérieuses d'intérêt général, et un éventuel avantage fiscal résultant, dans le chef des prestataires de services, de la fiscalité peu élevée à laquelle ils seraient soumis dans l'État membre dans lequel ils sont établis ne saurait permettre à un autre État membre de justifier un traitement fiscal moins favorable des destinataires des services établis dans ce dernier État.

Arrêt du 3 octobre 2002, Danner (C-136/00, Rec._p._I-8147) (cf. points 31-32, 37, 41, 49-52, 56-57 et disp.)

124. Libre prestation des services - Restrictions - Agents en brevets - Obligation d'inscription au registre professionnel - Obligation de résidence ou de domicile professionnel - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 49 CE à 55 CE un État membre qui maintient une réglementation imposant aux agents en brevets établis dans d'autres États membres d'être inscrits au registre national des agents en brevets et d'avoir une résidence ou un domicile professionnel sur son territoire, pour fournir des services devant l'Office national des brevets.

Arrêt du 13 février 2003, Commission / Italie (C-131/01, Rec._p._I-1659) (cf. point 48 et disp.)

125. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 92/49 - Liberté tarifaire - Système de blocage des prix applicable aux contrats d'assurance responsabilité civile des véhicules automoteurs - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de la directive 92/49 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357 (troisième directive "assurance non-vie"), qui vise à réaliser la libre commercialisation dans la Communauté des produits d'assurance dans le secteur concerné, un État membre qui institue et maintient en vigueur un système de blocage des prix, applicable à tous les contrats d'assurance responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs couvrant un risque situé sur son territoire, sans distinction entre les compagnies d'assurances ayant leur siège dans cet État membre et celles y exerçant leurs activités par l'intermédiaire de succursales ou en régime de libre prestation des services.

Une telle réglementation viole, en effet, le principe de la liberté tarifaire visé aux articles 6, 29 et 39 de ladite directive, qui implique l'interdiction de tout système de notification préalable ou systématique et d'approbation des tarifs qu'une entreprise d'assurances se propose d'utiliser dans ses relations avec les preneurs d'assurance. Elle ne relève pas, par ailleurs, de l'exception prévue par les articles 8, paragraphe 3, troisième alinéa, de la directive 73/239, 29, second alinéa, et 39, paragraphe 3, de la directive 92/49 dans la mesure où elle ne saurait être regardée comme faisant partie d'un système général de contrôle des prix au sens de ces dispositions.

Arrêt du 25 février 2003, Commission / Italie (C-59/01, Rec._p._I-1759) (cf. points 26, 29, 37, 48 et disp.)

126. Libre prestation des services - Restrictions - Agents en brevets - Obligation d'élire domicile auprès d'un mandataire agréé - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre qui maintient une réglementation prévoyant l'obligation pour les agents en brevets d'élire domicile auprès d'un mandataire agréé lors d'une prestation de services.

Arrêt du 6 mars 2003, Commission / Luxembourg (C-478/01, Rec._p._I-2351) (cf. points 19, 27 et disp.)

127. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre - Soins hospitaliers - Exigence d'une autorisation préalable de la caisse de maladie de l'État d'affiliation - Octroi soumis à des conditions relatives au caractère nécessaire du traitement - Admissibilité - Conditions - Possibilité d'obtenir un traitement présentant le même degré d'efficacité en temps utile - Critères d'appréciation

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à la législation d'un État membre, qui, d'une part, subordonne la prise en charge de soins hospitaliers dispensés dans un État membre autre que celui où est établie la caisse de maladie dont relève l'assuré, par un prestataire avec lequel cette dernière n'a pas conclu de convention, à l'obtention d'une autorisation préalable délivrée par cette caisse et, d'autre part, soumet l'octroi de cette autorisation à la condition que le traitement médical de l'assuré l'exige. Pour autant, l'autorisation ne peut être refusée, pour ce motif, que lorsqu'un traitement identique ou présentant le même degré d'efficacité pour le patient peut être obtenu en temps opportun dans un établissement ayant conclu une convention avec ladite caisse.

Aux fins d'apprécier si un traitement présentant le même degré d'efficacité pour le patient peut être obtenu en temps utile dans un établissement ayant conclu une convention avec la caisse de maladie dont relève l'assuré, les autorités nationales sont tenues de prendre en considération l'ensemble des circonstances caractérisant chaque cas concret, en tenant dûment compte non seulement de la situation médicale du patient au moment où l'autorisation est sollicitée et, le cas échéant, du degré de la douleur ou de la nature du handicap de ce dernier, qui pourrait, par exemple, rendre impossible ou excessivement difficile l'exercice d'une activité professionnelle, mais également de ses antécédents.

Toutefois, un refus d'autorisation préalable qui serait motivé non pas par la crainte de gaspillage ou de déperdition, du fait d'une surcapacité hospitalière, mais exclusivement par un motif tiré de l'existence de listes d'attente sur le territoire national pour bénéficier des soins hospitaliers en cause, sans que soient prises en considération les circonstances concrètes qui caractérisent la situation médicale du patient, ne saurait constituer une entrave valablement justifiée à la libre prestation des services.

Arrêt du 13 mai 2003, Müller-Fauré et van Riet (C-385/99, Rec._p._I-4509) (cf. points 90, 92, 109 et disp.)

128. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre - Soins non hospitaliers - Exigence d'une autorisation préalable de la caisse de maladie de l'État d'affiliation - Inadmissibilité - Justification - Atteinte à l'équilibre financier du système de sécurité sociale, à la protection de la santé publique ou aux caractéristiques essentielles du régime national d'assurance maladie - Absence

Les articles 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) et 60 du traité (devenu article 50 CE) s'opposent à la législation d'un État membre qui subordonne la prise en charge de soins non hospitaliers dispensés dans un autre État membre, par une personne ou un établissement avec lequel la caisse de maladie dont relève l'assuré n'a pas conclu de convention, à l'obtention d'une autorisation préalable délivrée par cette dernière, alors même que la législation nationale en cause instaure un régime de prestations en nature en vertu duquel les assurés ont droit non au remboursement des frais exposés pour des soins médicaux, mais aux soins eux-mêmes, qui sont dispensés gratuitement. Une telle entrave au principe fondamental de la libre prestation des services n'est pas justifiée dès lors que, d'une part, la suppression de l'exigence de l'autorisation préalable pour ce type de soins ne provoque pas de déplacements transfrontaliers de patients d'une importance telle, nonobstant les barrières linguistiques, la distance géographique, les frais de séjour à l'étranger et le manque d'informations sur la nature des soins qui y sont dispensés, que l'équilibre financier du système de sécurité sociale concerné en serait gravement perturbé et que, de ce fait, le niveau global de protection de la santé publique serait menacé et que, d'autre part, la suppression de l'exigence d'une autorisation préalable n'est pas de nature à porter atteinte aux caractéristiques essentielles du régime concerné d'assurance maladie qui garantit des prestations en nature.

Arrêt du 13 mai 2003, Müller-Fauré et van Riet (C-385/99, Rec._p._I-4509) (cf. points 95, 108-109 et disp.)

129. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Différence de traitement à l'égard des assurances complémentaires de retraite souscrites dans les autres États membres - Inadmissibilité

L'article 49 CE s'oppose à ce qu'une assurance souscrite auprès d'une compagnie établie dans un autre État membre et remplissant toutes les conditions d'une assurance complémentaire de retraite prévues par le droit national, à l'exception de celle d'avoir été souscrite auprès d'un assureur établi sur le territoire national, soit traitée différemment d'un point de vue fiscal, avec des effets en matière d'impôts sur le revenu qui, en fonction des circonstances de l'espèce, peuvent être moins favorables.

Arrêt du 26 juin 2003, Skandia et Ramstedt (C-422/01, Rec._p._I-6817) (cf. point 62 et disp.)

130. Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Activité d'exploitation d'appareils de jeux de hasard ou d'argent - Inclusion - Monopole d'exploitation desdits jeux - Inapplicabilité de l'article 31 CE

Les jeux de hasard ou d'argent constituent des activités économiques au sens de l'article 2 CE. En particulier, l'activité d'exploitation d'appareils de jeux de hasard ou d'argent doit, qu'elle soit séparable ou non des activités relatives à la production, à l'importation et à la distribution de tels appareils, recevoir la qualification d'activité de services, au sens du traité, et ne saurait dès lors relever des articles 28 CE et 29 CE, relatifs à la libre circulation des marchandises. En outre, dès lors qu'ils constituent une activité de services, un monopole d'exploitation de tels jeux n'entre pas dans le champ d'application de l'article 31 CE, lequel vise les échanges de marchandises.

Arrêt du 11 septembre 2003, Anomar e.a. (C-6/01, Rec._p._I-8621) (cf. points 48, 56, 59-61, disp. 1-3)

131. Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale réservant le droit d'exploitation des jeux de hasard ou d'argent aux salles de casinos - Justification - Protection de l'ordre social et prévention de la fraude - Existence de conditions moins strictes dans d'autres États membres - Absence d'incidence - Modalités d'organisation et de contrôle - Pouvoir d'appréciation des autorités nationales

Une législation nationale qui n'autorise l'exploitation et la pratique des jeux de hasard ou d'argent que dans certains lieux tels que les salles des casinos et s'applique indistinctement aux ressortissants nationaux et aux ressortissants d'autres États membres constitue une entrave à la libre prestation des services. Toutefois, les articles 49 CE et suivants ne s'opposent pas à une telle législation dès lors qu'elle est fondée sur des préoccupations de politique sociale et de prévention de la fraude.

Par ailleurs, l'existence éventuelle, dans d'autres États membres, de législations établissant des conditions d'exploitation et de pratique des jeux de hasard ou d'argent moins restrictives que celles prévues par la législation en cause est sans effet sur la compatibilité de cette dernière avec le droit communautaire. Il appartient en effet aux autorités nationales d'apprécier si, dans le contexte du but poursuivi, il est nécessaire d'interdire totalement ou partiellement des activités de cette nature ou seulement de les restreindre et de prévoir à cet effet des modalités de contrôle plus ou moins strictes.

Il appartient également aux seules autorités nationales, dans le cadre de leur pouvoir d'appréciation, de choisir les modalités d'organisation et de contrôle des activités d'exploitation et de pratique des jeux de hasard ou d'argent, telles la conclusion avec l'État d'un contrat administratif de concession ou la limitation de l'exploitation et de la pratique de certains jeux aux lieux dûment autorisés à cet effet.

Arrêt du 11 septembre 2003, Anomar e.a. (C-6/01, Rec._p._I-8621) (cf. points 75, 79, 81, 87-88, disp. 4-6)

132. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre - Soins hospitaliers - Exigence d'une autorisation préalable de la caisse de maladie de l'État d'affiliation - Octroi soumis à une condition relative au caractère nécessaire du traitement - Admissibilité

Les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à la législation d'un État membre en ce que celle-ci, d'une part, subordonne le remboursement de soins hospitaliers dispensés dans un État membre autre que celui où est établie la caisse de maladie dont relève l'assuré social à l'obtention d'une autorisation délivrée par cette caisse et, d'autre part, soumet l'octroi de cette autorisation à la condition qu'il soit établi que celui-ci ne pouvait recevoir sur le territoire de ce dernier État membre les soins appropriés à son état. Pour autant, l'autorisation ne peut être refusée pour ce motif que lorsqu'un traitement identique ou présentant le même degré d'efficacité pour le patient peut être obtenu en temps opportun sur le territoire de l'État membre dans lequel il réside.

Arrêt du 23 octobre 2003, Inizan (C-56/01, Rec._p._I-12403) (cf. point 60, disp. 3)

133. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Publicité télévisée - Fréquence des interruptions publicitaires dans les émissions - Protection renforcée des oeuvres audiovisuelles - Exception pour les "séries" - Critères

Les liens devant relier les films pour qu'ils puissent relever de l'exception prévue pour les "séries" à l'article 11, paragraphe 3, de la directive 89/552, relatif à la protection renforcée pour les oeuvres audiovisuelles concernant la fréquence des interruptions publicitaires, doivent porter sur le contenu des films concernés, tels que, par exemple, l'évolution d'un même récit d'une émission à l'autre ou la réapparition d'un ou de plusieurs personnages dans les différentes émissions.

Des liens d'ordre formel, tels qu'un même créneau de diffusion, une diffusion sous un même titre ou thème ou une présentation avant ou après les émissions, ne sauraient être suffisants aux fins de la définition de la notion de "séries".

Arrêt du 23 octobre 2003, RTL Television (C-245/01, Rec._p._I-12489) (cf. points 103-104, 108, disp. 2)

134. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Publicité télévisée - Fréquence des interruptions publicitaires dans les émissions - Protection renforcée des oeuvres audiovisuelles - "Films conçus pour la télévision" - Notion - Téléfilms prévoyant, dès leur conception, des pauses pour l'insertion de publicités - Inclusion

Des films qui ont été produits pour la télévision et qui prévoient, dès leur conception, des pauses pour l'insertion de messages publicitaires relèvent de la notion de "films conçus pour la télévision" visée à l'article 11, paragraphe 3, de la directive 89/552 relative à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, telle que modifiée par la directive 97/36.

Ils bénéficient dès lors de la protection renforcée prévue par ladite disposition pour les oeuvres audiovisuelles concernant la fréquence des interruptions publicitaires.

Arrêt du 23 octobre 2003, RTL Television (C-245/01, Rec._p._I-12489) (cf. points 51, 55, 74, disp. 1)

135. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale interdisant, sous peine de sanctions pénales, la collecte de paris en l'absence de concession ou d'autorisation - Justification tenant à l'intérêt général - Respect des principes de proportionnalité et de non-discrimination - Vérification par les juridictions nationales

Une réglementation nationale qui, en l'absence de concession ou d'autorisation délivrée par l'État membre concerné, interdit - sous peine de sanctions pénales - l'exercice d'activités de collecte, d'acceptation, d'enregistrement et de transmission de propositions de paris, notamment sur les événements sportifs, constitue une restriction à la liberté d'établissement et à la libre prestation des services prévues respectivement aux articles 43 CE et 49 CE qui, pour être justifiée, doit se fonder sur des raisons impérieuses d'intérêt général, être propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et être appliquée de manière non discriminatoire.

Il appartient à cet égard aux juridictions nationales de vérifier si une telle réglementation, au regard de ses modalités concrètes d'application, répond véritablement aux objectifs susceptibles de la justifier et si les restrictions qu'elle impose n'apparaissent pas disproportionnées au regard de ces objectifs.

En particulier, dans la mesure où les autorités d'un État membre incitent et encouragent les consommateurs à participer aux loteries, aux jeux de hasard ou aux jeux de paris afin que le trésor public en retire des bénéfices sur le plan financier, les autorités de cet État ne sauraient invoquer l'ordre public social tenant à la nécessité de réduire les occasions de jeu pour justifier des mesures telles que celles en cause au principal. En outre, si une sanction pénale est infligée à toute personne qui effectue des paris à partir de son domicile dans cet État membre, par l'Internet, avec un bookmaker établi dans un autre État membre, les juridictions nationales doivent examiner si cela ne constitue pas une sanction disproportionnée.

Arrêt du 6 novembre 2003, Gambelli e.a. (C-243/01, Rec._p._I-13031) (cf. points 65, 69, 72, 76 et disp.)

136. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Imposition des gains provenant de jeux de hasard - Exemption en faveur des seuls gains provenant de jeux organisés sur le territoire national - Inadmissibilité

L'article 49 CE s'oppose à la législation d'un État membre selon laquelle les gains provenant de jeux de hasard organisés dans d'autres États membres sont considérés comme un revenu du gagnant imposable au titre de l'impôt sur les revenus, tandis que les gains provenant de jeux de hasard organisés dans l'État membre en question ne sont pas imposables.

Arrêt du 13 novembre 2003, Lindman (C-42/02, Rec._p._I-13519) (cf. point 27 et disp.)

137. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation d'un État membre subordonnant l'accomplissement sur son territoire de prestations de services par des opérateurs économiques établis dans d'autres États membres à une procédure d'inscription au registre des métiers - Inadmissibilité - Critères

Le droit communautaire en matière de libre prestation des services s'oppose à ce qu'un opérateur économique soit soumis à une obligation d'inscription au registre des métiers qui retarde, complique ou rend plus onéreuse la prestation de ses services dans l'État membre d'accueil dès que sont remplies les conditions prévues par la directive de reconnaissance des qualifications professionnelles applicable pour l'exercice de cette activité dans ledit État membre.

Une fois ces conditions remplies, une éventuelle exigence d'inscription au registre des métiers de l'État membre d'accueil ne peut être autre qu'automatique, elle ne peut ni constituer une condition préalable à la prestation de services, ni conduire à des frais administratifs pour le prestataire concerné, ni engendrer une obligation de cotisations à la chambre des métiers.

Cela vaut non seulement pour des prestataires qui n'ont l'intention de fournir des services dans l'État membre d'accueil qu'à titre occasionnel, voire une seule fois, mais également pour des prestataires qui fournissent ou qui désirent fournir des services de manière répétée ou de façon plus ou moins régulière.

Arrêt du 11 décembre 2003, Schnitzer (C-215/01, Rec._p._I-14847) (cf. points 37-38, 40 et disp.)

138. Libre prestation des services - Avocats - Directive 77/249 - Remboursement des frais d'avocat par la partie ayant succombé dans le litige - Règle jurisprudentielle plafonnant le remboursement des honoraires des avocats établis dans d'autres États membres au barème applicable aux avocats nationaux - Admissibilité - Exclusion du remboursement des frais de l'avocat local en cas d'obligation de concertation avec un tel avocat - Inadmissibilité

Les articles 49 CE et 50 CE ainsi que la directive 77/249, tendant à faciliter l'exercice effectif de la libre prestation de services par les avocats, doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à une règle jurisprudentielle d'un État membre plafonnant à hauteur des frais qu'aurait occasionnés la représentation par un avocat établi dans cet État le remboursement, par la partie ayant succombé dans un litige à la partie ayant obtenu gain de cause, des prestations de services fournies par un avocat établi dans un autre État membre. En effet, en dehors des conditions de résidence ou d'inscription à une organisation professionnelle mentionnées à l'article 4 de ladite directive, toutes les autres conditions et règles en vigueur dans le pays d'accueil peuvent s'appliquer aux prestations d'avocat transfrontalières, le remboursement des frais d'un avocat établi dans un État membre pouvant donc également être soumis aux règles applicables aux avocats établis dans un autre État membre.

L'article 49 CE et la directive 77/249 doivent cependant être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une règle jurisprudentielle d'un État membre prévoyant que la partie ayant eu gain de cause dans un litige, dans lequel elle a été représentée par un avocat établi dans un autre État membre, ne peut pas se faire rembourser, par la partie ayant succombé, en dehors des frais de cet avocat, les frais d'un avocat exerçant auprès de la juridiction saisie qui, en vertu de la législation nationale en cause, était requis pour agir de concert avec le premier avocat. En effet, l'obligation de recourir aux services d'un avocat exerçant auprès de la juridiction saisie implique que les frais en résultant sont alors nécessaires pour une représentation appropriée en justice. L'exclusion générale de ces frais du montant à rembourser par la partie ayant succombé pénaliserait la partie ayant obtenu gain de cause, ce qui aurait pour effet que les justiciables seraient fortement découragés d'avoir recours à des avocats établis dans d'autres États membres. La libre prestation de services de ces avocats serait alors entravée et l'harmonisation du secteur telle qu'entamée par la directive serait affectée.

Arrêt du 11 décembre 2003, AMOK (C-289/02, Rec._p._I-15059) (cf. points 29-31, 39, 41, disp. 1-2)

139. Libre prestation des services - Libre circulation des capitaux - Restrictions - Législation fiscale - Prélèvement libératoire sur certains revenus mobiliers - Condition de résidence ou d'établissement du débiteur dans l'État membre concerné - Inadmissibilité - Justification - Absence

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 49 CE et 56 CE un État membre qui exclut de manière absolue l'application d'un taux de prélèvement libératoire à certains revenus mobiliers dont le débiteur n'est pas domicilié ou établi dans cet État membre.

Outre le fait qu'elle a pour effet de dissuader les contribuables résidant dans cet État membre de souscrire des contrats générateurs de tels revenus avec des sociétés ayant leur siège dans un autre État membre, une telle réglementation entraîne également un effet restrictif à l'égard desdites sociétés en ce qu'elle constitue à leur encontre un obstacle à la collecte de capitaux dans l'État membre concerné.

La nécessité de garantir le paiement de l'impôt et l'efficacité des contrôles fiscaux ne peuvent justifier une telle restriction à la libre prestation des services et à la libre circulation des capitaux. Si la lutte contre l'évasion fiscale et l'efficacité des contrôles fiscaux peuvent certes être invoquées pour justifier des restrictions à l'exercice des libertés fondamentales garanties par le traité, une présomption générale d'évasion ou de fraude fiscale ne saurait toutefois suffire à justifier une mesure fiscale qui porte atteinte aux objectifs du traité.

Par ailleurs, la mesure restrictive en cause ne respecte pas le principe de proportionnalité, en ce sens qu'elle n'est pas propre à garantir la réalisation de l'objectif qu'elle poursuit et qu'elle va au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre.

Arrêt du 4 mars 2004, Commission / France (C-334/02, Rec._p._I-2229) (cf. points 23-24, 27-28, 34 et disp.)

140. Libre prestation des services - Restrictions - Laboratoires d'analyses de biologie médicale - Obligation d'avoir un siège d'exploitation sur le territoire national - Inadmissibilité - Justification - Absence

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre qui impose aux laboratoires d'analyses de biologie médicale établis dans d'autres États membres la condition d'avoir un siège d'exploitation sur le territoire national afin d'obtenir l'autorisation de fonctionnement nécessaire.

L'objectif de maintenir la qualité des services médicaux peut certes justifier une restriction à la libre prestation des services dans le domaine des laboratoires d'analyses de biologie médicale, dans la mesure où il contribue à la réalisation d'un niveau élevé de protection de la santé.

La condition d'avoir un siège d'exploitation sur le territoire national va toutefois au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. En effet, au lieu d'exiger un siège d'exploitation et d'exclure ainsi toute prestation transfrontalière, l'État membre concerné peut exiger des laboratoires ayant leur siège d'exploitation dans un autre État membre qu'ils se soumettent, conformément à la législation nationale, à une autorisation, afin d'effectuer, s'ils le souhaitent, des prestations de service au profit de personnes résidant dans cet État membre, pour autant toutefois que les conditions à respecter pour obtenir une telle autorisation ne fassent pas double emploi avec les conditions légales équivalentes déjà remplies dans l'État d'établissement.

Arrêt du 11 mars 2004, Commission / France (C-496/01, Rec._p._I-2351) (cf. points 66, 69-71, 77 et disp.)

141. Libre prestation des services - Restrictions - Laboratoires d'analyses de biologie médicale - Refus de remboursement des analyses effectuées par les laboratoires établis dans les autres États membres - Inadmissibilité - Justification - Absence

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre qui exclut tout remboursement des frais pour des analyses de biologie médicale effectuées par un laboratoire d'analyses de biologie médicale établi dans un autre État membre.

Une restriction à la libre prestation des services peut être, en principe, justifiée dans la mesure où elle vise à contribuer à garantir un niveau élevé de protection de la santé publique. Cependant, le refus, par les caisses d'assurance maladie, de prendre en charge les frais des analyses effectuées par des laboratoires ayant leur siège d'exploitation dans un autre État membre excède ce qui est objectivement nécessaire à cette fin.

En effet, en l'absence de mesures d'harmonisation, le droit communautaire ne s'oppose pas à ce que l'État membre impose son niveau de protection de la santé publique aux laboratoires d'analyses de biologie médicale établis dans un autre État membre et désireux d'offrir leurs services aux affiliés à un des régimes nationaux d'assurance maladie dans le cadre d'un régime d'autorisation.

Arrêt du 11 mars 2004, Commission / France (C-496/01, Rec._p._I-2351) (cf. points 91-93, 95 et disp.)

142. Libre prestation des services - Services postaux de la Communauté - Directive 97/67 - Services réservés aux prestataires du service postal universel - Exclusion de l'autoprestation telle que définie par la directive - Réglementation nationale soumettant l'autoprestation à des conditions supplémentaires - Inadmissibilité

L'article 7 de la directive 97/67, concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service, lequel décrit les différents services susceptibles d'être réservés ou non aux prestataires du service universel, lu à la lumière du vingt et unième considérant de la directive, doit être interprété en ce sens qu'il ne permet pas de soumettre l'autoprestation, que les États membres n'ont pas le droit de réserver aux prestataires du service universel et qui est définie par ledit considérant comme "la prestation de services postaux par la personne physique ou morale qui est à l'origine des envois ou collecte et acheminement de ces envois par un tiers agissant seulement au nom de cette personne", aux conditions additionnelles suivantes:

- le destinataire doit être la même personne que l'expéditeur,

- les services ne doivent pas être fournis à des tiers dans le cadre de l'activité commerciale ou d'entreprise du prestataire de services,

- les services ne doivent pas être fournis par le système de courrier interne ou d'autres procédés similaires, et

- de telles opérations ne doivent pas perturber les services réservés au prestataire du service universel.

En effet, si l'on admet que les États membres sont libres d'imposer des conditions additionnelles à la notion d'autoprestation et de restreindre ainsi les situations qui en sont couvertes, ils auraient la faculté d'élargir à leur gré les services réservés aux prestataires du service universel, ce qui irait à l'encontre de la finalité de la directive.

Arrêt du 11 mars 2004, Asempre et Asociación Nacional de Empresas de Externalización y gestión de Envíos y Pequeña Paqueteria (C-240/02, Rec._p._I-2461) (cf. points 21, 23-26, disp. 1)

143. Libre prestation des services - Services postaux de la Communauté - Directive 97/67 - Champ d'application - Services de virement postal - Exclusion - Faculté pour les États membres de réglementer ces services

Les services de virement postal qui consistent à effectuer des paiements à travers le réseau postal public en faveur de personnes physiques ou morales pour le compte et à la demande d'autrui ne sont pas couverts par le champ d'application de la directive 97/67, concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service.

Le fait que l'article 7 de cette directive, lequel décrit les différents services susceptibles d'être réservés ou non aux prestataires du service universel, ne mentionne pas les virements postaux parmi les services pouvant être réservés aux prestataires du service universel n'a donc pas d'effet décisif et les États membres restent ainsi libres de réglementer les services financiers fournis éventuellement par les prestataires du service postal universel.

Arrêt du 11 mars 2004, Asempre et Asociación Nacional de Empresas de Externalización y gestión de Envíos y Pequeña Paqueteria (C-240/02, Rec._p._I-2461) (cf. points 21, 33-34, disp. 2)

144. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative à la prise en charge de dépenses liées à une cure thermale effectuée dans un autre État membre - Exigence d'une reconnaissance préalable d'éligibilité - Octroi subordonné à l'absolue nécessité du traitement en raison de chances de succès plus élevées dans l'autre État membre - Inadmissibilité - Octroi exclu en cas de commencement de la cure avant la clôture de la procédure judiciaire de recours contre la décision de refus - Inadmissibilité - Octroi soumis à la condition que la station thermale concernée figure sur une liste ad hoc - Admissibilité - Conditions

Les articles 49 CE et 50 CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation d'un État membre qui subordonne la prise en charge de dépenses afférentes à l'hébergement, à la restauration, au voyage, à la taxe de séjour et à l'élaboration d'un rapport médical final, engagées en raison d'une cure thermale effectuée dans un autre État membre, à l'obtention d'une reconnaissance préalable d'éligibilité qui n'est octroyée que pour autant qu'il est établi, par une expertise des services de santé publique ou par un médecin-conseil, que la cure envisagée revêt une impérieuse nécessité du fait de chances de succès beaucoup plus élevées dans cet autre État membre.

Lesdites dispositions s'opposent en outre à l'application d'une réglementation nationale en vertu de laquelle la prise en charge de telles dépenses est exclue au cas où l'intéressé n'a pas attendu la clôture de la procédure judiciaire initiée à l'encontre d'une décision de refus de reconnaître l'éligibilité à l'aide desdites dépenses avant d'entamer la cure en question.

Les articles 49 CE et 50 CE doivent en revanche être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas, en principe, à une réglementation d'un État membre qui subordonne la prise en charge de telles dépenses, que la cure soit effectuée dans cet État membre ou dans un autre État membre, à la condition que la station thermale concernée figure sur une liste ad hoc. Il appartient toutefois à la juridiction nationale de s'assurer que les conditions éventuelles auxquelles se trouve soumise l'inscription d'une station thermale sur une telle liste revêtent un caractère objectif et n'ont pas pour effet de rendre les prestations de services entre États membres plus difficiles que les prestations qui sont purement internes à l'État membre concerné.

Arrêt du 18 mars 2004, Leichtle (C-8/02, Rec._p._I-2641) (cf. points 51, 59, disp. 1-3)

145. Libre circulation des personnes - Travailleurs - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises de sécurité privée d'avoir leur siège ou un établissement permanent sur le territoire national, d'avoir la forme d'une personne morale, de posséder un capital social minimal, d'obtenir une autorisation délivrée par les autorités nationales et d'obtenir, pour leur personnel, une carte professionnelle émise par lesdites autorités - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 39 CE, 43 CE et 49 CE un État membre qui exige comme conditions pour que les opérateurs étrangers puissent exercer sur le territoire national, dans le secteur des services de sécurité privée, des activités de surveillance de personnes et de biens, que ces opérateurs

- aient leur siège ou un établissement permanent sur le territoire national;

- aient la forme d'une personne morale;

- possèdent un capital social minimal;

- obtiennent une autorisation délivrée par les autorités nationales, sans qu'il soit tenu compte des justifications ni des garanties déjà présentées dans l'État membre d'origine, et que

- les membres de leur personnel possèdent une carte professionnelle émise par lesdites autorités, sans qu'il soit tenu compte des contrôles ni des vérifications déjà effectués dans l'État membre d'origine.

Arrêt du 29 avril 2004, Commission / Portugal (C-171/02, Rec._p._I-5645) (cf. point 74 et disp.)

146. Libre prestation des services - Restrictions - Interdiction des publicités pour des boissons alcooliques lors de la diffusion télévisée de manifestations sportives - Justification par des raisons de protection de la santé publique

Ne manque pas aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) un État membre subordonnant la diffusion télévisée dans cet État par des chaînes de télévision nationales de manifestations sportives ayant lieu sur le territoire d'autres États membres à la suppression préalable des publicités pour des boissons alcooliques.

Il est vrai qu'un tel régime de publicité télévisée constitue une restriction à la libre prestation des services au sens de l'article 59 du traité. Il comporte, en effet, d'une part, une restriction à la libre prestation des services de publicité en ce que les propriétaires de panneaux publicitaires doivent refuser, de manière préventive, toute publicité pour des boissons alcooliques dès lors que la manifestation sportive est susceptible d'être retransmise dans l'État membre concerné. D'autre part, ce régime empêche la prestation des services de diffusion de programmes télévisés, les diffuseurs de cet État devant refuser toute retransmission d'événements sportifs au cours de laquelle seraient visibles des panneaux publicitaires portant de la publicité pour des boissons alcooliques commercialisées dans ledit État, et les organisateurs d'événements sportifs se déroulant à l'étranger ne pouvant vendre les droits de retransmission à ces diffuseurs, dès lors que la diffusion des programmes télévisés consacrés à de tels événements est susceptible de comporter de la publicité télévisée indirecte pour lesdites boissons alcooliques.

Un tel régime de publicité télévisée poursuit toutefois un objectif relevant de la protection de la santé publique au sens de l'article 56, paragraphe 1, du traité (devenu, après modification, article 46, paragraphe 1, CE), dès lors que des mesures limitant les possibilités de publicité pour des boissons alcooliques et cherchant ainsi à lutter contre l'abus d'alcool répondent à des préoccupations de santé publique.

En outre, un tel régime est propre à garantir la réalisation de cet objectif et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre. Ce régime limite en effet les situations dans lesquelles les panneaux publicitaires pour les boissons alcooliques peuvent être vus à la télévision et est, de ce fait, susceptible de restreindre la diffusion de tels messages, réduisant ainsi les occasions dans lesquelles les téléspectateurs pourraient être incités à consommer des boissons alcooliques.

Arrêt du 13 juillet 2004, Commission / France (C-262/02, Rec._p._I-6569) (cf. points 26, 30-31)

L'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) ne s'oppose pas à ce qu'un État membre interdise la publicité télévisée pour des boissons alcooliques commercialisées dans cet État, dans la mesure où est concernée la publicité télévisée indirecte résultant de l'apparition à l'écran de panneaux qui sont visibles lors de la retransmission de manifestations sportives binationales ayant lieu sur le territoire d'autres États membres.

Il est vrai qu'un tel régime de publicité télévisée constitue une restriction à la libre prestation des services au sens de l'article 59 du traité. Il comporte, en effet, d'une part, une restriction à la libre prestation des services de publicité en ce que les propriétaires de panneaux publicitaires doivent refuser, de manière préventive, toute publicité pour des boissons alcooliques dès lors que la manifestation sportive est susceptible d'être retransmise dans l'État membre concerné. D'autre part, ce régime empêche la prestation des services de diffusion de programmes télévisés, les diffuseurs de cet État devant refuser toute retransmission d'événements sportifs au cours de laquelle seraient visibles des panneaux publicitaires portant de la publicité pour des boissons alcooliques commercialisées dans ledit État, et les organisateurs d'événements sportifs se déroulant à l'étranger ne pouvant vendre les droits de retransmission à ces diffuseurs, dès lors que la diffusion des programmes télévisés consacrés à de tels événements est susceptible de comporter de la publicité télévisée indirecte pour lesdites boissons alcooliques.

Un tel régime de publicité télévisée poursuit toutefois un objectif relevant de la protection de la santé publique au sens de l'article 56, paragraphe 1, du traité (devenu, après modification, article 46, paragraphe 1, CE), dès lors que des mesures limitant les possibilités de publicité pour des boissons alcooliques et cherchant ainsi à lutter contre l'abus d'alcool répondent à des préoccupations de santé publique.

En outre, un tel régime est propre à garantir la réalisation de cet objectif et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre. Ce régime limite en effet les situations dans lesquelles les panneaux publicitaires pour les boissons alcooliques peuvent être vus à la télévision et est, de ce fait, susceptible de restreindre la diffusion de tels messages, réduisant ainsi les occasions dans lesquelles les téléspectateurs pourraient être incités à consommer des boissons alcooliques.

Arrêt du 13 juillet 2004, Bacardi France (C-429/02, Rec._p._I-6613) (cf. points 35, 37-38, 41, disp. 2)

147. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Champ d'application - Notion de publicité télévisée - Régime de publicité télévisée indirecte résultant de l'apparition à l'écran de panneaux visibles lors de la retransmission de manifestations sportives ayant lieu sur le territoire d'autres États membres - Exclusion

L'article 2, paragraphe 2, premier alinéa, première phrase, de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, qui prévoit une obligation pour les États membres d'assurer la liberté de réception et de ne pas entraver la retransmission sur leur territoire d'émissions de radiodiffusion télévisuelle en provenance d'autres États membres pour des raisons qui relèvent des domaines coordonnés par cette directive, ne s'oppose pas à ce qu'un État membre interdise la publicité télévisée pour des boissons alcooliques commercialisées dans cet État, dans la mesure où est concernée la publicité télévisée indirecte résultant de l'apparition à l'écran de panneaux qui sont visibles lors de la retransmission de manifestations sportives binationales ayant lieu sur le territoire d'autres États membres.

Une telle publicité télévisée indirecte ne doit en effet pas être qualifiée de "publicité télévisée" au sens des articles 1er, sous b), 10 et 11 de cette directive, dans la mesure où elle ne constitue pas un message télévisé individualisable destiné à promouvoir des biens ou des services.

Arrêt du 13 juillet 2004, Bacardi France (C-429/02, Rec._p._I-6613) (cf. points 27, 29, disp. 1)

148. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 92/49 - Liberté tarifaire - Système de bonus-malus n'aboutissant pas à la fixation directe des tarifs par l'État - Admissibilité

Ne saurait être assimilé à un système d'approbation des tarifs contraire au principe de la liberté tarifaire posé par la directive 92/49, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357, un système de bonus-malus applicable aux contrats d'assurance automobile qui comporte certes des répercussions sur l'évolution des primes sans toutefois aboutir à une fixation directe des tarifs par l'État, les entreprises d'assurances restant libres de fixer la hauteur des primes de base.

À cet égard, une harmonisation complète du domaine tarifaire en matière d'assurance non-vie excluant toute mesure nationale susceptible d'avoir des répercussions sur les tarifs ne saurait être présumée en l'absence d'une volonté clairement exprimée en ce sens par le législateur communautaire.

Arrêt du 7 septembre 2004, Commission / Luxembourg (C-346/02, Rec._p._I-7517) (cf. points 23-24)

Arrêt du 7 septembre 2004, Commission / France (C-347/02, Rec._p._I-7557) (cf. points 24-25)

149. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Architectes - Reconnaissance des diplômes et des titres - Obligation de présenter un document attestant de la conformité du titre avec les dispositions nationales en cause - Traitement tardif par la chambre technique nationale des demandes d'inscription des ressortissants communautaires ne possédant pas un diplôme national - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de la directive 85/384, visant à la reconnaissance mutuelle des diplômes, certificats et autres titres du domaine de l'architecture et comportant des mesures destinées à faciliter l'exercice effectif du droit d'établissement et de libre prestation de services, un État membre qui, d'une part, adopte et maintient en vigueur des dispositions qui prévoient, parmi les conditions d'obtention de l'autorisation d'exercer la profession d'architecte, l'obligation de présenter un certificat délivré par les autorités compétentes de l'État membre d'origine ou de provenance attestant que les titres présentés sont ceux prévus par les dispositions nationales en cause et, d'autre part, accepte que la chambre technique nationale, auprès de laquelle il faut obligatoirement s'inscrire pour exercer la profession d'architecte, effectue le traitement des dossiers et l'inscription des ressortissants communautaires titulaires de diplômes étrangers qui devraient être reconnus en vertu de la directive précitée avec d'importants retards.

Arrêt du 9 septembre 2004, Commission / Grèce (C-417/02, Rec._p._I-7973) (cf. point 18 et disp.)

150. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe - Directives 73/239 et 79/267 - Obligation pour les entreprises d'assurances de constituer des provisions techniques et une marge de solvabilité suffisantes pour l'ensemble de leurs activités - Réglementation nationale octroyant aux créances salariales un privilège sur les actifs représentatifs des provisions techniques ayant priorité sur le privilège des créances d'assurance - Compatibilité

Les articles 15 et 16 de la première directive 73/239, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, et son exercice, et les articles 17 et 18 de la première directive 79/267, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe sur la vie, et son exercice, lesquels prévoient l'obligation pour les entreprises d'assurances de constituer des provisions techniques et une marge de solvabilité suffisantes pour l'ensemble de leurs activités d'assurance, ne s'opposent pas à une législation nationale en vertu de laquelle, en cas de faillite, de liquidation ou de situation analogue d'insolvabilité de l'entreprise d'assurances, les actifs représentatifs des provisions techniques peuvent être affectés au paiement des créances salariales avant celui des créances d'assurance, dès lors que cette législation reconnaît à ces dernières un privilège dont l'assiette comprend en tout état de cause, outre les actifs représentatifs des provisions techniques, d'autres éléments d'actif de l'entreprise et peut, en vertu d'une décision ministérielle, avoir été étendue à l'ensemble des actifs disponibles de l'entreprise.

Si, en effet, la coordination des dispositions nationales relatives aux garanties financières exigées des entreprises d'assurances, réalisée, notamment, par les dispositions communautaires mentionnées ci-dessus, vise à assurer une protection adéquate des assurés et des tiers bénéficiaires dans tout État membre de la Communauté, les dispositions communautaires en cause ne sauraient pour autant être interprétées comme signifiant dans l'esprit du législateur communautaire que, en cas de liquidation de l'entreprise d'assurances, les actifs représentatifs des provisions techniques doivent, en toutes circonstances, être affectés par priorité absolue au paiement des créances d'assurance.

Arrêt du 16 septembre 2004, Epikouriko Kefalaio (C-28/03, Rec._p._I-8533) (cf. points 24-26, 28 et disp.)

151. Libre prestation des services - Restrictions - Entreprises de gardiennage et de recherche établies dans un autre État membre - Obligation d'obtenir une autorisation pour les entreprises et leurs dirigeants et une carte de légitimation pour leur personnel - Absence de prise en compte des obligations prévues dans l'État membre d'établissement - Inadmissibilité - Justification - Absence

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre qui adopte des dispositions :

- qui exigent que les entreprises privées de gardiennage et de recherche désireuses de fournir des services sur le territoire national ainsi que leurs dirigeants soient titulaires d'une autorisation et qui imposent des frais pour l'obtention de ladite autorisation, sans tenir compte des obligations auxquelles le prestataire de services étranger est déjà soumis dans l'État membre d'établissement, et

- qui exigent que les membres du personnel de ces entreprises qui sont détachés de l'État d'établissement vers l'État membre concerné soient titulaires d'une carte de légitimation délivrée par les autorités nationales, pour autant qu'il n'est pas tenu compte, pour l'exigence en cause, des contrôles auxquels les prestataires de services transfrontaliers sont déjà soumis dans leur État membre d'origine.

En effet, de telles exigences constituent des restrictions à la libre prestation des services allant au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre le but recherché et ne sauraient dès lors être justifiées par des raisons liées à l'intérêt général.

Arrêt du 7 octobre 2004, Commission / Pays-Bas (C-189/03, Rec._p._I-9289) (cf. points 18, 20, 30, 33 et disp.)

152. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Établissements de crédit - Systèmes de garantie des dépôts - Réglementation nationale limitant les missions de l'autorité nationale de surveillance à l'intérêt général et excluant la réparation des préjudices causés par une surveillance défaillante - Conformité à la directive 94/19 - Condition - Indemnisation des déposants dans les conditions définies par la directive

Dès lors qu'est assurée l'indemnisation des déposants prévue par la directive 94/19, relative aux systèmes de garantie des dépôts, l'article 3, paragraphes 2 à 5, de cette dernière ne peut être interprété comme s'opposant à une règle nationale selon laquelle les missions de l'autorité nationale de surveillance des établissements de crédit ne sont accomplies que dans l'intérêt général, ce qui exclut selon le droit national que les particuliers puissent demander réparation des préjudices causés par une surveillance défaillante de la part de cette autorité.

En effet, lesdites dispositions ont pour objectif d'assurer aux déposants que l'établissement de crédit dans lequel ils effectuent leur dépôt appartient à un système de garantie des dépôts, de sorte que soit sauvegardé leur droit à être indemnisés en cas d'indisponibilité de leur dépôt conformément aux règles prévues par ladite directive, et ne servent ainsi qu'à l'instauration et au bon fonctionnement du système de garantie des dépôts tel que prévu par la directive. En revanche et dès lors que cette indemnisation est assurée, elles n'accordent pas aux déposants un droit à ce que les autorités compétentes assurent dans leur intérêt les mesures de surveillance.

Arrêt du 12 octobre 2004, Paul e.a. (C-222/02, Rec._p._I-9425) (cf. points 29-30, 32, disp. 1)

153. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Établissements de crédit - Surveillance des établissements de crédit - Réglementation nationale limitant les missions de l'autorité nationale de surveillance à l'intérêt général et excluant la réparation des préjudices causés par une surveillance défaillante - Conformité aux directives 77/780, 89/299 et 89/646

La première directive 77/780 visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, la directive 89/299 concernant les fonds propres des établissements de crédit ainsi que la deuxième directive 89/646 visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice ne s'opposent pas à une règle nationale selon laquelle les missions de l'autorité nationale de surveillance des établissements de crédit ne sont accomplies que dans l'intérêt général, ce qui exclut selon le droit national que les particuliers puissent demander réparation des préjudices causés par une surveillance défaillante de la part de cette autorité.

En effet, si les directives en cause imposent aux autorités nationales certaines obligations de surveillance vis-à-vis des établissements de crédit, il n'en découle pas nécessairement, pas plus que du fait que parmi les objectifs desdites directives figure également celui de la protection des déposants, que ces directives visent à créer des droits en faveur des déposants en cas d'indisponibilité de leurs dépôts causée par une surveillance défaillante de la part des autorités nationales compétentes.

Arrêt du 12 octobre 2004, Paul e.a. (C-222/02, Rec._p._I-9425) (cf. points 39-40, 47, disp. 2)

154. Libre prestation des services - Détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services - Directive 96/71 - Réglementation nationale prévoyant pour une entreprise ayant recours aux services d'une entreprise établie dans un autre État membre la responsabilité en tant que caution pour la rémunération minimale des travailleurs employés par l'autre entreprise - Restriction à la libre prestation des services - Justification par des raisons d'intérêt général - Protection sociale des travailleurs

L'article 5 de la directive 96/71 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services, en vertu duquel les États membres prennent des mesures adéquates en cas de non-respect de cette directive et veillent en particulier à ce que les travailleurs et/ou leurs représentants disposent de procédures adéquates aux fins de l'exécution des obligations prévues par la même directive, interprété à la lumière de l'article 49 CE, ne s'oppose pas en principe à des règles nationales selon lesquelles une entreprise de construction qui est établie dans l'État membre concerné et qui charge une entreprise établie dans un autre État membre d'effectuer des travaux de construction répond, en tant que caution ayant renoncé au bénéfice de discussion, des obligations de cette entreprise ou d'un sous-traitant pour le paiement du salaire minimal d'un travailleur employé par ces derniers ou de cotisations à un organisme commun aux parties à une convention collective, lorsque le salaire minimal consiste dans le montant à payer après déduction des impôts et des cotisations de sécurité sociale et de promotion de l'emploi ou des prestations correspondantes en matière de sécurité sociale qui doit être payé au travailleur (salaire net), et ceci même lorsque les règles nationales visées n'ont pas pour objectif prioritaire la protection de la rémunération du travailleur ou que cette protection n'est qu'un objectif secondaire de celles-ci.

En effet, si le droit au salaire minimal constitue un élément de la protection des travailleurs, laquelle figure parmi les raisons impérieuses d'intérêt général susceptibles de justifier une éventuelle restriction à la libre prestation des services, les modalités procédurales permettant d'obtenir le respect de ce droit, telles que la responsabilité en tant que caution, doivent également être regardées comme étant de nature à garantir une telle protection, dans la mesure où cette règle profite aux travailleurs détachés au motif que, au bénéfice de ces derniers, elle ajoute au premier débiteur du salaire minimal qu'est l'employeur un second débiteur, qui est lié solidairement au premier et qui est même généralement plus solvable que celui-ci.

Arrêt du 12 octobre 2004, Wolff & Müller (C-60/03, Rec._p._I-9553) (cf. points 28, 34-35, 37, 40, 45 et disp.)

155. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale interdisant l'exploitation commerciale de jeux de simulation d'actes homicides - Justification - Protection de l'ordre public - Respect de la dignité humaine en tant que principe général du droit

Le droit communautaire ne s'oppose pas à ce qu'une activité économique consistant en l'exploitation commerciale de jeux de simulation d'actes homicides fasse l'objet d'une mesure nationale d'interdiction adoptée pour des motifs de protection de l'ordre public en raison du fait que cette activité porte atteinte à la dignité humaine.

En effet, ladite mesure ne saurait être regardée comme une mesure portant une atteinte injustifiée à la libre prestation des services, dès lors que, d'une part, la protection des droits fondamentaux, étant précisé que l'ordre juridique communautaire tend indéniablement à assurer le respect de la dignité humaine en tant que principe général du droit, constitue un intérêt légitime de nature à justifier, en principe, une restriction aux obligations imposées par le droit communautaire, même en vertu d'une liberté fondamentale garantie par le traité telle que la libre prestation de services et que, d'autre part, la mesure en cause correspond au niveau de protection de la dignité humaine que la constitution nationale a entendu assurer sur le territoire de l'État membre concerné et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi.

Arrêt du 14 octobre 2004, Omega (C-36/02, Rec._p._I-9609) (cf. points 34-35, 39-41 et disp.)

156. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Impôt sur les sociétés - Réglementation nationale réservant aux opérations de recherche réalisées dans cet État membre le bénéfice d'un crédit d'impôt recherche - Inadmissibilité - Justification - Absence

L'article 49 CE s'oppose à une réglementation d'un État membre qui réserve aux seules opérations de recherche réalisées sur le territoire de cet État membre le bénéfice d'un crédit d'impôt recherche.

En effet, une telle réglementation est fondée, bien qu'indirectement, sur le lieu d'établissement du prestataire de services et est donc de nature à entraver les activités transfrontalières de ce dernier. Elle n'est pas susceptible d'être justifiée par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal, de promouvoir la recherche ou de garantir l'efficacité des contrôles fiscaux.

Arrêt du 10 mars 2005, Laboratoires Fournier (C-39/04, Rec._p._I-2057) (cf. points 18, 20, 23-24, 26 et disp.)

157. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Notion de "radiodiffusion télévisuelle" - Définition autonome par l'article 1er, sous a), de la directive 89/552, indépendamment de la notion de "service de la société de l'information" figurant à la directive 98/34 - Services relevant de ladite notion - Critères de détermination

La notion de "radiodiffusion télévisuelle" visée à l'article 1er, sous a), de la directive 89/552 relative à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, telle que modifiée par la directive 97/36, est définie de façon autonome par cette disposition. Elle ne se définit pas par opposition à la notion de "service de la société de l'information" au sens de l'article 1er, point 2, de la directive 98/34, prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information, telle que modifiée par la directive 98/48, et ne recouvre donc pas nécessairement les services qui ne sont pas couverts par cette dernière notion.

Un service relève de ladite notion de "radiodiffusion télévisuelle" s'il consiste en l'émission primaire de programmes télévisés destinés au public, c'est-à-dire à un nombre indéterminé de téléspectateurs potentiels, auprès desquels les mêmes images sont simultanément transmises. La technique de transmission des images n'est pas un élément déterminant dans cette appréciation.

Arrêt du 2 juin 2005, Mediakabel (C-89/04, Rec._p._I-4891) (cf. points 25, 33, disp. 1-2)

158. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Notion de "service de radiodiffusion télévisuelle" - Service consistant à émettre des programmes télévisés à destination du public et non fourni à la demande individuelle d'un destinataire - Inclusion - Mode d'exécution de l'obligation de réserver une proportion majoritaire du temps de diffusion à des oeuvres européennes - Absence d'incidence

Un service qui consiste à émettre des programmes télévisés à destination du public et qui n'est pas fourni à la demande individuelle d'un destinataire de services est un service de radiodiffusion télévisuelle, au sens de l'article 1er, sous a), de la directive 89/552 relative à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, telle que modifiée par la directive 97/36. Le point de vue du prestataire du service doit être privilégié dans l'analyse de la notion de "service de radiodiffusion télévisuelle" car le critère déterminant de cette notion est celui de l'émission de programmes télévisés "destinés au public". En revanche, la situation des services concurrents du service concerné est sans incidence sur cette appréciation.

Par ailleurs, les conditions dans lesquelles le prestataire d'un tel service s'acquitte de l'obligation, visée à l'article 4, paragraphe 1, de la directive 89/552, de réserver une proportion majoritaire de son temps de diffusion à des oeuvres européennes sont sans incidence sur la qualification de service de radiodiffusion télévisuelle pour ce service.

Arrêt du 2 juin 2005, Mediakabel (C-89/04, Rec._p._I-4891) (cf. points 42, 45, 52, disp. 3-4)

159. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Attribution directe d'une concession relative à la gestion du service public de distribution du gaz - Inadmissibilité à défaut de transparence adéquate

Les articles 43 CE et 49 CE s'opposent à l'attribution directe par une commune d'une concession relative à la gestion du service public de distribution du gaz à une société à capitaux majoritairement publics et dont ladite commune détient une participation dans le capital à hauteur de 0,97 %, si cette attribution ne répond pas à des exigences de transparence qui, sans nécessairement impliquer une obligation de procéder à un appel d'offres, sont, notamment, de nature à permettre qu'une entreprise située sur le territoire d'un État membre autre que celui de ladite commune puisse avoir accès aux informations adéquates relatives à ladite concession avant que celle-ci soit attribuée de sorte que, si cette entreprise l'avait souhaité, elle aurait été en mesure de manifester son intérêt pour obtenir cette concession.

Arrêt du 21 juillet 2005, Coname (C-231/03, Rec._p._I-7287) (cf. points 21, 28 et disp.)

160. Libre prestation des services - Restrictions - Secteur des télécommunications - Taxe sur les infrastructures de communications mobiles et personnelles - Admissibilité - Conditions

L'article 59 du traité (devenu, après modification, article 49 CE) doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce qu'une réglementation d'une autorité nationale ou d'une collectivité locale instaure une taxe sur les infrastructures de communications mobiles et personnelles utilisées dans le cadre de l'exploitation des activités couvertes par les licences et autorisations octroyées aux opérateurs qui est indistinctement applicable aux prestataires nationaux et à ceux des autres États membres et affecte de la même manière la prestation de services interne à un État membre et la prestation de services entre États membres, pour autant qu'un effet cumulatif des taxes locales compromettant la libre prestation des services de téléphonie mobile ne soit pas démontré.

Arrêt du 8 septembre 2005, Mobistar et Belgacom Mobile (C-544/03 et C-545/03, Rec._p._I-7723) (cf. points 34-35, disp. 1)

161. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Obligation pour les entreprises étrangères de sécurité privée d'être constituées sous la forme d'une personne morale, de disposer d'un capital social minimal déterminé, de verser une caution auprès d'un organisme national, d'employer un nombre minimal de salariés, et, pour leur personnel, d'être titulaires d'une autorisation administrative spéciale délivrée par les autorités nationales - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 43 CE et 49 CE un État membre qui impose aux entreprises étrangères de sécurité privée une série de conditions pour exercer leurs activités sur le territoire national, à savoir l'obligation:

- d'être constituées sous la forme d'une personne morale;

- de disposer d'un capital social minimal déterminé;

- de verser une caution auprès d'un organisme national;

- d'employer un nombre minimal de salariés, dans la mesure où l'entreprise en question exerce ses activités dans d'autres domaines que celui du transport et de la distribution d'explosifs;

- générale, pour les membres de leur personnel, d'être titulaires d'une autorisation administrative spéciale délivrée par les autorités nationales.

Arrêt du 26 janvier 2006, Commission / Espagne (C-514/03, Rec._p._I-963) (cf. points 31, 36, 41, 48, 50, 55-56 et disp.)

162. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Réglementation nationale attribuant de manière exclusive le droit d'exercer certaines activités de conseil et d'assistance en matière fiscale à certains sujets de droit remplissant des conditions strictes, voire ayant leur siège dans l'État membre en cause - Inadmissibilité

Les articles 43 CE et 49 CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui réserve de manière exclusive le droit d'exercer certaines activités de conseil et d'assistance en matière fiscale à des centres d'assistance fiscale (CAF) devant être constitués sous forme de sociétés anonymes, exercer leur activité sur autorisation du ministère des Finances et ne pouvant être constitués que par des sujets de droit énoncés par décret législatif. En effet, une telle réglementation, d'une part, empêche totalement l'accès au marché des services en cause aux opérateurs économiques établis dans d'autres États membres et, d'autre part, en limitant la possibilité de constituer des CAF à certains sujets de droit remplissant des conditions strictes, voire à certains de ces sujets ayant leur siège dans l'État membre concerné, est, en effet, susceptible de rendre plus difficile, voire d'empêcher totalement, l'exercice par les opérateurs économiques en provenance d'autres États membres de leur droit de s'établir dans l'État membre en cause dans le but de fournir les services en question.

Arrêt du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti (C-451/03, Rec._p._I-2941) (cf. points 7, 33-34, 50, disp. 1)

163. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre - Soins hospitaliers - Exigence d'une autorisation préalable de l'institution compétente - Admissibilité - Refus d'autorisation préalable fondé sur la seule existence de listes d'attente - Admissibilité - Conditions

L'article 49 CE doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce que la prise en charge de soins hospitaliers envisagés dans un établissement situé dans un autre État membre soit subordonnée à l'obtention d'une autorisation préalable de l'institution compétente.

Un refus d'autorisation préalable ne peut toutefois être fondé sur la seule existence de listes d'attente destinées à planifier et à gérer l'offre hospitalière en fonction de priorités cliniques préétablies en termes généraux, sans qu'il ait été procédé à une évaluation médicale objective de l'état pathologique du patient, de ses antécédents, de l'évolution probable de sa maladie, du degré de sa douleur et/ou de la nature de son handicap lors de l'introduction ou du renouvellement de la demande d'autorisation.

Lorsque le délai découlant de telles listes s'avère excéder le délai acceptable compte tenu d'une évaluation médicale objective des éléments précités, l'institution compétente ne peut refuser l'autorisation sollicitée en se fondant sur des motifs tirés de l'existence de ces listes d'attente, d'une prétendue atteinte portée à l'ordre normal des priorités lié au degré d'urgence respectif des cas à traiter, de la gratuité des soins hospitaliers prodigués dans le cadre du système national en cause, de l'obligation de prévoir des moyens financiers spécifiques aux fins de la prise en charge du traitement envisagé dans un autre État membre et/ou d'une comparaison des coûts de ce traitement et de ceux d'un traitement équivalent dans l'État membre compétent.

Arrêt du 16 mai 2006, Watts (C-372/04, Rec._p._I-4325) (cf. points 113, 119-120, 123, disp. 2)

164. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre - Soins hospitaliers - Remboursement par l'institution compétente - Critères

L'article 49 CE doit être interprété en ce sens que, dans l'hypothèse où la législation de l'État membre compétent prévoit la gratuité des soins hospitaliers prodigués dans le cadre d'un service national de santé, et où la législation de l'État membre dans lequel un patient relevant dudit service a été, ou aurait dû être, autorisé à recevoir un traitement hospitalier aux frais de ce service ne prévoit pas une prise en charge intégrale du coût dudit traitement, il doit être accordé à ce patient, par l'institution compétente, un remboursement correspondant à la différence éventuelle entre, d'une part, le montant du coût, objectivement quantifié, d'un traitement équivalent dans un établissement relevant du service en cause, plafonné, le cas échéant, à hauteur du montant global facturé pour le traitement prodigué dans l'État membre de séjour, et, d'autre, part, le montant à concurrence duquel l'institution de ce dernier État membre est tenue d'intervenir, pour le compte de l'institution compétente, en application des dispositions de la législation de cet État membre, au titre de l'article 22, paragraphe 1, sous c), i), du règlement nº 1408/71, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement nº 118/97.

Arrêt du 16 mai 2006, Watts (C-372/04, Rec._p._I-4325) (cf. point 143, disp. 3)

165. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre - Soins hospitaliers - Exclusion des frais accessoires - Admissibilité - Conditions

L'article 49 CE doit être interprété en ce sens qu'un patient qui a été autorisé à se rendre dans un autre État membre pour y recevoir des soins hospitaliers ou qui a essuyé un refus d'autorisation dont il est ultérieurement établi qu'il n'était pas fondé, n'est en droit de réclamer à l'institution compétente la prise en charge des frais accessoires liés à ce déplacement transfrontalier à des fins médicales que pour autant que la législation de l'État membre compétent impose au système national une obligation de prise en charge correspondante dans le cadre d'un traitement prodigué dans un établissement local relevant dudit système.

Arrêt du 16 mai 2006, Watts (C-372/04, Rec._p._I-4325) (cf. point 143, disp. 3)

166. Libre prestation des services - Sécurité sociale des travailleurs migrants - Assurance maladie - Prestations en nature servies dans un autre État membre - Article 22 du règlement nº 1408/71 - Compatibilité avec l'article 152, paragraphe 5, CE

L'obligation pour l'institution compétente, au titre tant de l'article 22 du règlement nº 1408/71, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement nº 118/97, que de l'article 49 CE, d'autoriser un patient relevant d'un service national de santé à obtenir, à la charge de ladite institution, un traitement hospitalier dans un autre État membre lorsque le délai d'attente excède le délai acceptable au vu d'une évaluation médicale objective de l'état et des besoins cliniques du patient concerné, ne contrevient pas à l'article 152, paragraphe 5, CE aux termes duquel l'action de la Communauté dans le domaine de la santé publique respecte pleinement les responsabilités des États membres en matière d'organisation et de fourniture de services de santé et de soins médicaux.

En effet, l'article 152, paragraphe 5, CE n'exclut pas que les États membres soient tenus, au titre d'autres dispositions du traité, telles que l'article 49 CE, ou de mesures communautaires adoptées sur le fondement d'autres dispositions du traité, telles que l'article 22 du règlement nº 1408/71, d'apporter des adaptations à leur système national de sécurité sociale, sans pour autant que l'on puisse considérer qu'il y aurait de ce fait atteinte à leur compétence souveraine en la matière.

Par ailleurs, les exigences découlant des articles 49 CE et 22 du règlement nº 1408/71 ne sauraient être comprises comme imposant aux États membres d'assumer la prise en charge de soins hospitaliers prodigués dans d'autres États membres en faisant abstraction de toute considération d'ordre budgétaire, mais reposent, au contraire, sur la recherche d'un équilibre entre l'objectif de libre circulation des patients, d'une part, et les impératifs nationaux de planification des capacités hospitalières disponibles, de maîtrise des dépenses de santé et d'équilibre financier des systèmes de sécurité sociale, d'autre part.

Arrêt du 16 mai 2006, Watts (C-372/04, Rec._p._I-4325) (cf. points 145-148, disp. 4)

167. Libre prestation des services - Services - Notion - Prestation de soins hospitaliers dispensée dans un autre État membre et rétribuée par le patient - Inclusion - Remboursement sollicité auprès d'un service national de santé - Absence d'incidence

L'article 49 CE s'applique à une situation dans laquelle une personne dont l'état de santé nécessite des soins hospitaliers se rend dans un autre État membre et y reçoit de tels soins contre rémunération, sans qu'il soit besoin d'examiner si les prestations de soins hospitaliers fournies dans le cadre du système national dont relève cette personne constituent en elles-mêmes des services au sens des dispositions sur la libre prestation des services.

La circonstance que le remboursement des soins hospitaliers en cause est ultérieurement sollicité auprès d'un service national de santé n'est pas de nature à écarter l'application des règles de la libre prestation des services garantie par le traité. En effet, une prestation médicale ne perd pas sa qualification de prestation de services au sens de l'article 49 CE au motif que le patient, après avoir rétribué le prestataire étranger pour les soins reçus, sollicite ultérieurement la prise en charge de ces soins par un service national de santé.

Arrêt du 16 mai 2006, Watts (C-372/04, Rec._p._I-4325) (cf. points 89, 123, disp. 2)

168. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation d'immatriculer dans l'État membre d'utilisation les véhicules pris en leasing auprès d'une entreprise établie dans un autre État membre - Admissibilité - Critères

Les articles 49 CE à 55 CE ne s'opposent pas à une réglementation nationale d'un premier État membre interdisant à une personne résidant et travaillant dans cet État d'utiliser, sur le territoire de celui-ci, un véhicule qu'elle a loué à une société de leasing établie dans un second État membre, lorsque ce véhicule n'a pas été immatriculé dans le premier État et qu'il est destiné à y être essentiellement utilisé à titre permanent ou est, en fait, utilisé de cette façon.

Ordonnance du 30 mai 2006, Leroy (C-435/04, Rec._p._I-4835) (cf. point 16 et disp.)

169. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale imposant un régime de licence aux agents de placement des artistes établis dans un autre État membre - Octroi soumis aux besoins de placement des artistes - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre soumettant l'octroi d'une licence aux agents de placement des artistes établis dans un autre État membre aux besoins de placement des artistes, pour autant qu'il ne fournit aucune raison susceptible de justifier cette entrave.

Arrêt du 15 juin 2006, Commission / France (C-255/04, Rec._p._I-5251) (cf. points 29, 55 et disp.)

170. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale imposant une présomption de salariat aux artistes prestataires de services établis dans leur État membre d'origine - Inadmissibilité - Justification - Absence

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre imposant une présomption de salariat aux artistes qui sont des prestataires de services établis dans leur État membre d'origine où ils fournissent habituellement des services analogues, présomption qui implique la soumission au régime de sécurité sociale des travailleurs salariés ainsi qu'à celui des congés payés.

La protection sociale des prestataires de services peut, en principe, relever des raisons impérieuses d'intérêt général susceptibles de justifier une restriction à la libre prestation de services. La législation applicable en matière de sécurité sociale desdits prestataires fait toutefois l'objet d'une coordination communautaire, selon laquelle les artistes en question bénéficient de la sécurité sociale que prévoit leur État membre d'origine, de sorte que l'État membre en cause n'est pas fondé à les soumettre à son propre régime de sécurité sociale. Quant à un droit à des congés payés pour des prestataires de services, il est difficile à concilier avec le concept d'une activité à titre indépendant.

Par ailleurs, la mesure en cause ne peut être justifiée par l'objectif de lutte contre le travail dissimulé, dans la mesure où la circonstance que les artistes sont normalement engagés de manière intermittante et pour de courtes périodes par différents organisateurs de spectacles ne saurait, à elle seule, fonder un soupçon général de travail dissimulé. Il en est d'autant plus ainsi que les artistes en question sont reconnus comme prestataires de services établis dans leur État membre d'origine où ils fournissent habituellement des services analogues.

Arrêt du 15 juin 2006, Commission / France (C-255/04, Rec._p._I-5251) (cf. points 45, 47-49, 51-52, 55 et disp.)

171. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale imposant à ses résidents le paiement de l'intégralité d'une taxe d'immatriculation lors de la première utilisation sur le réseau routier national de véhicules de location immatriculés dans un autre État membre - Inadmissibilité - Critères

Les articles 49 CE à 55 CE s'opposent à une réglementation nationale d'un État membre qui impose à une personne physique établie dans cet État membre qui prend en location un véhicule immatriculé dans un autre État membre, lors de la première utilisation de ce véhicule sur le réseau routier du premier État membre, le paiement de l'intégralité d'une taxe d'immatriculation, sans tenir compte de la durée d'utilisation dudit réseau routier et sans que la personne en question puisse faire valoir aucun droit à exonération ou à remboursement, lorsque le véhicule n'est ni destiné à être essentiellement utilisé dans le premier État membre à titre permanent ni, en fait, utilisé de cette façon.

Ordonnance du 27 juin 2006, van de Coevering (C-242/05, Rec._p._I-5843) (cf. point 33 et disp.)

172. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale interdisant l'exploitation des jeux électriques, électromécaniques et électroniques dans tous les lieux publics ou privés - Justification - Protection de la moralité, de l'ordre et de la sécurité publics - Mesure disproportionnée au regard des objectifs poursuivis - Inadmissibilité

L'interdiction par un État membre d'exploiter des jeux électriques, électromécaniques et électroniques dans tous les lieux publics ou privés, à l'exception des casinos et, en ce qui concerne les ordinateurs, des établissements de prestation de services Internet, constitue une entrave à la libre prestation des services ainsi qu'à la liberté d'établissement.

Cette restriction ne peut pas être justifiée par des exigences impératives d'intérêt général, telles que la protection de la moralité, de l'ordre et de la sécurité publics, si la mesure nationale est disproportionnée au regard des objectifs poursuivis.

Arrêt du 26 octobre 2006, Commission / Grèce (C-65/05, Rec._p._I-10341) (cf. points 50, 52-53, 55)

173. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale interdisant de déroger, par convention, aux honoraires minimaux fixés par un tarif des honoraires d'avocat - Justification par des raisons d'intérêt général - Protection des destinataires de services et bonne administration de la justice - Vérification par le juge national - Éléments à prendre en considération

Une interdiction imposée par un État membre de déroger, par convention, aux honoraires minimaux fixés par un tarif des honoraires d'avocat pour des prestations qui sont, d'une part, de nature juridique et, d'autre part, réservées aux avocats est de nature à rendre plus difficile l'accès des avocats établis dans un autre État membre au marché des prestations juridiques du premier État membre et, dès lors, est propre à restreindre l'exercice de leurs activités de prestation de services dans cet État membre. Partant, cette interdiction s'analyse comme une restriction au sens de l'article 49 CE.

En effet, ladite interdiction prive les avocats établis dans un autre État membre de la possibilité de livrer, par la demande d'honoraires inférieurs à ceux fixés par le tarif, une concurrence plus efficace aux avocats installés de façon stable dans l'État membre concerné et disposant, de ce fait, de plus grandes facilités que les avocats établis à l'étranger pour s'attacher une clientèle.

De même, l'interdiction ainsi prévue limite le choix des destinataires de services dudit État membre, car ces derniers ne peuvent pas recourir aux services d'avocats établis dans d'autres États membres qui offriraient dans cet État membre leurs prestations à un prix moindre que celui résultant des honoraires minimaux fixés par le tarif.

Toutefois, une telle interdiction peut être justifiée dès lors qu'elle répond à des raisons impérieuses d'intérêt général, pour autant qu'elle est propre à garantir la réalisation de l'objectif qu'elle poursuit et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre.

À cet égard, la protection, d'une part, des consommateurs, notamment des destinataires des services judiciaires fournis par des auxiliaires de justice, et, d'autre part, de la bonne administration de la justice sont des objectifs figurant au nombre de ceux qui peuvent être considérés comme des raisons impérieuses d'intérêt général susceptibles de justifier une restriction à la libre prestation des services, à la double condition que la mesure nationale en cause au principal soit propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et qu'elle n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

Il incombe à la juridiction nationale de décider si la restriction à la libre prestation de services instaurée par la réglementation nationale respecte ces conditions. À cette fin, il lui appartiendra de tenir compte des éléments suivants.

Ainsi, il conviendra de vérifier, en particulier, s'il existe une corrélation entre le niveau des honoraires et la qualité des prestations fournies par les avocats et si, notamment, la fixation de tels honoraires minimaux constitue une mesure appropriée permettant d'atteindre les objectifs poursuivis, à savoir la protection des consommateurs et la bonne administration de la justice.

S'il est vrai qu'un tarif imposant des honoraires minimaux ne saurait empêcher des membres de la profession d'offrir des services de qualité médiocre, il ne saurait être a priori exclu qu'un tel tarif permette d'éviter que les avocats ne soient incités, dans le contexte d'un marché qui est caractérisé par la présence d'un nombre extrêmement élevé d'avocats inscrits et en activité, à se livrer une concurrence pouvant se traduire par l'offre de prestations au rabais, avec le risque d'une détérioration de la qualité des services fournis.

Il conviendra également de tenir compte des particularités propres tant au marché en cause qu'aux services en cause et, notamment, du fait que, dans le domaine des prestations d'avocat, il existe normalement une asymétrie de l'information entre les "clients-consommateurs" et les avocats. En effet, les avocats disposent d'un niveau élevé de compétences techniques que les consommateurs ne possèdent pas nécessairement, de sorte que ces derniers éprouvent des difficultés pour apprécier la qualité des services qui leur sont fournis.

Cependant, il y aura lieu, pour la juridiction nationale, de vérifier si des règles professionnelles relatives aux avocats, notamment des règles d'organisation, de qualification, de déontologie, de contrôle et de responsabilité, sont en elles-mêmes suffisantes pour atteindre les objectifs de protection des consommateurs et de bonne administration de la justice.

Il en résulte qu'une réglementation interdisant de manière absolue de déroger, par convention, aux honoraires minimaux fixés par un tarif des honoraires d'avocat pour des prestations qui sont, d'une part, de nature juridique et, d'autre part, réservées aux avocats constitue une restriction à la libre prestation de services prévue à l'article 49 CE. Il appartient à la juridiction nationale de vérifier si une telle réglementation, au regard de ses modalités concrètes d'application, répond véritablement aux objectifs de protection des consommateurs et de bonne administration de la justice susceptibles de la justifier et si les restrictions qu'elle impose n'apparaissent pas disproportionnées au regard de ces objectifs.

Arrêt du 5 décembre 2006, Cipolla e.a. (C-94/04 et C-202/04, Rec._p._I-11421) (cf. points 58-61, 64-70, disp. 2)

174. Libre prestation des services - Restrictions - Obligation d'établissement sur le territoire national des organismes d'inspection des chaudières - Inadmissibilité - Justification - Absence



Arrêt du 14 décembre 2006, Commission / Autriche (C-257/05, Rec._p._I-134*) (cf. points 20-34 et disp.)

175. Libre circulation des personnes - Travailleurs - Égalité de traitement - Libre prestation des services - Restrictions - Versement par un État membre à une agence de placement privée de la rémunération due par un demandeur d'emploi au titre du placement - Exclusion en cas de placement dans un autre État membre - Inadmissibilité - Justification - Absence

Les articles 39 CE, 49 CE et 50 CE s'opposent à ce qu'une réglementation nationale prévoie que le versement par un État membre à une agence de placement privée de la rémunération due par un demandeur d'emploi à cette agence au titre du placement de ce dernier soit soumis à la condition que l'emploi trouvé par cet intermédiaire soit assujetti aux cotisations obligatoires de l'assurance sociale sur le territoire de cet État.

En effet, un demandeur d'emploi pour lequel ladite agence a procuré un emploi assujetti aux cotisations obligatoires de l'assurance sociale dans un autre État membre se trouve dans une situation plus défavorable que si l'agence en question avait procuré un emploi dans cet État membre, puisqu'il aurait en pareil cas bénéficié de la prise en charge de la rémunération due à l'agence intermédiaire au titre du placement. Une telle réglementation crée ainsi une entrave à la libre circulation des travailleurs qui peut dissuader les demandeurs d'emploi, notamment ceux dont les ressources financières sont limitées, et, par conséquent, les agences de placement privées, de chercher un travail dans un autre État membre dès lors que la commission de placement ne sera pas acquittée par l'État membre d'origine desdits demandeurs.

Par ailleurs, une telle réglementation comporte une restriction à la libre prestation des services fondée sur le lieu d'exécution de cette prestation, car elle est susceptible d'affecter le destinataire de services, à savoir le demandeur d'emploi qui doit, lorsque l'emploi procuré par l'agence de placement privée se situe dans un autre État membre, acquitter lui-même la rémunération due à ladite agence. Quant à l'agence de placement privée, prestataire de services, la possibilité d'étendre son activité aux autres États membres sera restreinte, dans la mesure où ce sera largement en vertu de l'existence du système en cause que nombre de demandeurs d'emploi auront recours aux services de cette agence et également en vertu dudit système que cette dernière pourra placer un demandeur d'emploi dans un autre État membre sans encourir un risque de défaut de paiement.

Le fait qu'un tel système vise à améliorer le placement des travailleurs ainsi qu'à diminuer le chômage, à protéger le système de sécurité sociale nationale ou à protéger le marché du travail national contre la perte de main-d'oeuvre qualifiée ne peut justifier une telle entrave. En effet, en refusant de manière systématique le bénéfice de ce système aux demandeurs d'emploi placés dans d'autres États membres, la réglementation en cause va en tout état de cause au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis.

Arrêt du 11 janvier 2007, ITC (C-208/05, Rec._p._I-181) (cf. points 35-36, 38, 42, 44-45, 57-59, 61-62, disp. 1)

176. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale interdisant, sous peine de sanctions pénales, la collecte de paris en l'absence de concession ou d'autorisation de police - Justification tenant à l'intérêt général - Lutte contre la criminalité - Respect des principes de proportionnalité et de non-discrimination - Vérification par les juridictions nationales

Une réglementation nationale qui interdit l'exercice d'activités de collecte, d'acceptation, d'enregistrement et de transmission de propositions de paris, notamment sur les événements sportifs, en l'absence de concession ou d'autorisation de police délivrées par l'État membre concerné, constitue une restriction à la liberté d'établissement ainsi qu'à la libre prestation des services prévues respectivement aux articles 43 CE et 49 CE.

L'objectif visant à lutter contre la criminalité en assujettissant les opérateurs actifs dans ce secteur à un contrôle et en canalisant les activités de jeux de hasard dans les circuits ainsi contrôlés est susceptible de justifier ces entraves, un système de concessions pouvant, à cet égard, constituer un mécanisme efficace.

Toutefois, il incombe aux juridictions nationales de vérifier si, dans la mesure où elle limite le nombre d'opérateurs agissant dans le secteur des jeux de hasard, ladite réglementation nationale répond véritablement à cet objectif. De même, il appartient aux juridictions nationales de vérifier si ces restrictions sont propres à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi, ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre et sont appliquées de manière non discriminatoire.

Arrêt du 6 mars 2007, Placanica (C-338/04, C-359/04 et C-360/04, Rec._p._I-1891) (cf. points 49, 52, 57-58, disp. 1-2)

177. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale excluant du secteur des jeux de hasard les opérateurs constitués sous la forme de sociétés de capitaux cotées sur les marchés réglementés - Inadmissibilité

Les articles 43 CE et 49 CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui exclut du secteur des jeux de hasard les opérateurs constitués sous la forme de sociétés de capitaux dont les actions sont cotées sur les marchés réglementés. En effet, indépendamment de la question de savoir si l'exclusion des sociétés de capitaux cotées sur les marchés réglementés s'applique, en fait, de la même manière aux opérateurs établis dans l'État membre concerné et à ceux provenant d'autres États membres, cette exclusion totale va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif visant à éviter que les opérateurs actifs dans le secteur des jeux de hasard ne soient impliqués dans des activités criminelles ou frauduleuses.

Arrêt du 6 mars 2007, Placanica (C-338/04, C-359/04 et C-360/04, Rec._p._I-1891) (cf. points 62, 64, disp. 3)

178. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale interdisant la collecte de paris en l'absence de concession ou d'autorisation de police - Refus de concession ou d'autorisation en violation du droit communautaire - Application de sanctions pénales - Inadmissibilité

Les articles 43 CE et 49 CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui impose une sanction pénale à des personnes pour avoir exercé une activité organisée de collecte de paris en l'absence de concession ou d'autorisation de police exigées par la législation nationale lorsque ces personnes n'ont pu se munir desdites concessions ou autorisations en raison du refus de cet État membre, en violation du droit communautaire, de les leur accorder.

Si, en principe, la législation pénale relève de la compétence des États membres, le droit communautaire impose toutefois des limites à cette compétence, une telle législation ne pouvant, en effet, restreindre les libertés fondamentales garanties par le droit communautaire. En outre, un État membre ne peut appliquer une sanction pénale pour une formalité administrative non remplie lorsque l'accomplissement de cette formalité est refusé ou rendu impossible par l'État membre concerné en violation du droit communautaire.

Arrêt du 6 mars 2007, Placanica (C-338/04, C-359/04 et C-360/04, Rec._p._I-1891) (cf. points 68-69, 71, disp. 4)

179. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions



Ordonnance du 6 mars 2007, D'Antonio e.a. (C-395/05, Rec._p._I-24*) (cf. point 7, disp. 1-4)

Ordonnance du 6 mars 2007, Di Maggio et Buccola (C-397/05, Rec._p._I-25*) (cf. point 7, disp. 1-4)

Ordonnance du 6 mars 2007, Damonte (C-466/05, Rec._p._I-27*) (cf. point 7, disp. 1-4)

Ordonnance du 6 mars 2007, Gallo et Damonte (C-191/06, Rec._p._I-30*) (cf. point 7, disp. 1-4)

180. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale excluant le remboursement des frais médicaux engagés dans un établissement hospitalier privé d'un autre État membre - Inadmissibilité - Justification - Absence - Violation du principe de proportionnalité

L'article 49 CE s'oppose à une législation d'un État membre qui exclut tout remboursement, par un organisme national de sécurité sociale, des frais occasionnés par l'hospitalisation de ses assurés dans les établissements de soins privés situés dans un autre État membre, à l'exception de ceux relatifs aux soins dispensés aux enfants âgés de moins de 14 ans.

Une telle mesure ne peut pas être justifiée par un risque d'atteinte grave à l'équilibre financier du système de sécurité sociale dans la mesure où le caractère absolu, sous réserve du cas des enfants âgés de moins de 14 ans, des termes de l'interdiction édictée par cette législation n'est pas adapté à l'objectif poursuivi, dès lors que des mesures moins restrictives et plus respectueuses de la liberté de prestation des services pourraient être prises, tel un régime d'autorisation préalable respectant les exigences qu'impose le droit communautaire et, le cas échéant, la définition de barèmes de remboursement de soins.

Arrêt du 19 avril 2007, Stamatelaki (C-444/05, Rec._p._I-3185) (cf. points 35, 38 et disp.)

181. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Architectes - Reconnaissance des diplômes et des titres - Réglementation nationale soumettant les titulaires de qualifications professionnelles conférées par un autre État membre et non inscrits à l'ordre des architectes de cet État à une épreuve d'admission à l'ordre des architectes de l'État membre d'accueil - Inadmissibilité



Arrêt du 24 mai 2007, Commission / Portugal (C-43/06, Rec._p._I-73*) (cf. point 31 et disp.)

182. Libre prestation des services - Restrictions - Détachement de travailleurs - Obligation des seules entreprises de travail temporaire étrangères de déclarer le lieu d'affectation du travailleur ainsi que toute modification relative à ce lieu - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre imposant aux entreprises de travail temporaire étrangères de déclarer non seulement la mise à disposition d'un travailleur au profit d'une entreprise utilisatrice dans l'État membre concerné, mais aussi le lieu d'affectation de ce travailleur ainsi que toute modification relative à ce lieu, tandis que les entreprises du même type établies dans cet État membre ne sont pas soumises à cette obligation supplémentaire.

Arrêt du 18 juillet 2007, Commission / Allemagne (C-490/04, Rec._p._I-6095) (cf. points 85, 89 et disp.)

183. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie et assurance directe sur la vie - Directives 92/49 et 2002/83 - Champ d'application - Faculté pour les preneurs d'assurance de résilier le contrat en cas de transfert de portefeuille non souscrit en régime d'établissement ou de libre prestation de services - Exclusion - Maintien du droit des États membres de prévoir une telle faculté



Arrêt du 18 juillet 2007, Commission / Espagne (C-501/04, Rec._p._I-99*) (cf. points 40-42)

184. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Recouvrement extrajudiciaire de créances - Obligation d'obtenir une autorisation dans chaque province de l'État membre concerné et de disposer de locaux sur le territoire couvert par l'autorisation - Inadmissibilité

En prévoyant l'obligation pour toute entreprise exerçant l'activité de recouvrement extrajudiciaire de créances :

- de demander, bien que l'entreprise dispose d'une autorisation délivrée par l'autorité compétente d'une province, une nouvelle autorisation dans chaque autre province où elle veut déployer ses activités, sauf à conférer un mandat à un représentant autorisé dans cette autre province, un État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 43 CE et 49 CE;

- de disposer de locaux sur le territoire couvert par l'autorisation et d'y afficher les prestations qui peuvent être effectuées pour les clients, un État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE;

- de disposer d'un local dans chaque province où elle entend exercer ses activités, un État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 43 CE.

Arrêt du 18 juillet 2007, Commission / Italie (C-134/05, Rec._p._I-6251) (cf. points 47, 64, 66, 87 et disp.)

185. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Impôts sur le revenu - Déductibilité des frais de scolarité limitée aux frais de scolarité versés à des établissements nationaux - Inadmissibilité - Justification - Absence

Lorsque les contribuables d'un État membre scolarisent leurs enfants dans une école située dans un autre État membre et dont le financement est assuré essentiellement par des fonds privés, l'article 49 CE doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation d'un État membre qui prévoit la possibilité, pour les contribuables, de faire valoir, au titre des dépenses spéciales ouvrant droit à une réduction de l'impôt sur le revenu, le versement de frais de scolarité à certaines écoles privées établies sur le territoire national, mais exclut de manière générale cette possibilité s'agissant de frais de scolarité versés à une école privée établie dans un autre État membre.

Une telle réglementation est constitutive d'une entrave à la libre prestation des services garantie par l'article 49 CE en ce qu'elle a pour effet de dissuader les contribuables résidant dans l'État membre concerné de scolariser leurs enfants dans des écoles établies dans un autre État membre. Par ailleurs, elle entrave également l'offre de formation émanant d'établissements d'enseignement privés établis dans d'autres États membres, destinée aux enfants de contribuables résidant dans le premier État membre.

Le refus d'accorder l'abattement fiscal en cause au titre des frais de scolarité versés à des écoles établies dans un autre État membre ne saurait être justifié par l'objectif d'assurer une couverture des frais de fonctionnement des écoles privées sans qu'il en résulte une charge déraisonnable pour l'État, dès lors que cet objectif pourrait être atteint par des moyens moins contraignants. En effet, pour éviter une charge financière excessive, il est loisible à un État membre de limiter le montant déductible au titre des frais de scolarité à un montant déterminé, correspondant à l'abattement fiscal accordé par cet État, compte tenu de certaines valeurs qui lui sont propres, pour la fréquentation d'écoles situées sur son territoire, ce qui constituerait un moyen moins contraignant que le refus d'octroi de l'abattement fiscal en cause. Il apparaît en tout état de cause disproportionné d'exclure totalement de cet abattement les frais de scolarité versés à des écoles établies dans un autre État membre indépendamment du point de savoir si ces écoles remplissent des critères objectifs fixés sur la base de principes propres à chaque État membre et permettant de déterminer quels types de frais de scolarité ouvrent droit audit abattement fiscal.

Arrêt du 11 septembre 2007, Schwarz et Gootjes - Schwarz (C-76/05, Rec._p._I-6849) (cf. points 66-67, 79-82, disp. 1)

186. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Impôts sur le revenu - Déductibilité des frais de scolarité limitée aux frais de scolarité versés à des établissements privés nationaux - Inadmissibilité - Justification - Absence

Lorsque les contribuables d'un État membre scolarisent leurs enfants dans une école située dans un autre État membre et financée pour l'essentiel par des fonds privés, le premier État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE en excluant de manière générale les frais de scolarité liés à la fréquentation d'une telle école de la déduction fiscale au titre des dépenses spéciales ouvrant droit à une réduction de l'impôt sur le revenu.

Une telle réglementation est constitutive d'une entrave à la libre prestation des services garantie par l'article 49 CE en ce qu'elle a pour effet de dissuader les contribuables résidant dans l'État membre concerné de scolariser leurs enfants dans des écoles établies dans un autre État membre. Par ailleurs, elle entrave également l'offre de formation émanant d'établissements d'enseignement privés établis dans d'autres États membres et destinée aux enfants de contribuables résidant dans le premier État membre.

Le refus d'accorder l'abattement fiscal en cause s'agissant des frais de scolarité versés à des écoles établies dans un autre État membre ne saurait être justifié par l'objectif d'assurer une couverture des frais de fonctionnement des écoles privées sans qu'il en résulte une charge déraisonnable pour l'État, dès lors que cet objectif pourrait être atteint par des moyens moins contraignants. En effet, afin d'éviter une charge financière excessive, il est loisible à un État membre de limiter le montant déductible au titre des frais de scolarité à un montant déterminé, correspondant à l'abattement fiscal accordé par cet État, compte tenu de certaines valeurs qui lui sont propres, pour la fréquentation d'écoles situées sur son territoire, ce qui constituerait un moyen moins contraignant que le refus d'octroi de l'abattement fiscal en cause. Il apparaît en tout état de cause disproportionné d'exclure totalement de cet abattement les frais de scolarité versés à des écoles établies dans un autre État membre indépendamment du point de savoir si ces écoles remplissent des critères objectifs fixés sur la base de principes propres à chaque État membre et permettant de déterminer quels types de frais de scolarité ouvrent droit audit abattement fiscal.

Arrêt du 11 septembre 2007, Commission / Allemagne (C-318/05, Rec._p._I-6957) (cf. points 80-81, 97-100, 139, disp. 1)

187. Droit communautaire - Principes - Égalité de traitement - Discrimination en raison de la nationalité - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Contrats de concession de services publics - Inclusion - Renouvellement de concessions pour la gestion des paris hippiques sans mise en concurrence - Inadmissibilité - Justification - Absence

Les autorités publiques concluant des contrats de concession de services publics sont tenues de respecter les règles fondamentales du traité CE en général, notamment les articles 43 CE et 49 CE, et le principe de non-discrimination en raison de la nationalité en particulier, qui sont une expression particulière du principe général d'égalité de traitement. Les principes d'égalité de traitement et de non-discrimination en raison de la nationalité impliquent, notamment, une obligation de transparence qui consiste à garantir, en faveur de tout soumissionnaire potentiel, un degré de publicité adéquat permettant une ouverture de la concession des services à la concurrence ainsi que le contrôle de l'impartialité des procédures d'adjudication.

Dès lors, manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 43 CE et 49 CE et viole, en particulier, le principe général de transparence ainsi que l'obligation de garantir un degré de publicité adéquat un État membre procédant au renouvellement de concessions pour la gestion des paris hippiques en dehors de toute procédure de mise en concurrence.

Le fait de procéder au renouvellement desdites concessions sans mise en concurrence ne peut pas être justifié par la nécessité de décourager le développement d'activités clandestines de collecte et d'attribution des paris, dès lors qu'il n'est pas propre à garantir la réalisation de cet objectif et va au-delà de ce qui est nécessaire pour éviter que les opérateurs actifs dans le secteur des paris hippiques ne soient impliqués dans des activités criminelles ou frauduleuses.

En outre, des motifs de nature économique, tels que le fait de garantir aux titulaires d'une concession la continuité, la stabilité financière et un rendement correct des investissements réalisés dans le passé, ne sauraient être admis en tant que raisons impérieuses d'intérêt général de nature à justifier une restriction à une liberté fondamentale garantie par le traité.

Arrêt du 13 septembre 2007, Commission / Italie (C-260/04, Rec._p._I-7083) (cf. points 22-24, 31, 34-35, 38 et disp.)

188. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Notion de "télé-achat" - Jeu par téléphone doté d'un prix - Inclusion - Conditions

L'article 1er de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, telle que modifiée par la directive 97/36, doit être interprété en ce sens qu'une émission ou partie d'émission, au cours de laquelle un organisme de radiodiffusion télévisuelle offre la possibilité aux téléspectateurs de participer à un jeu doté d'un prix en composant immédiatement un numéro de téléphone spécial et donc moyennant paiement, relève de la définition que ledit article, sous f), donne du télé-achat si cette émission ou partie d'émission représente une véritable offre de services compte tenu du but de l'émission dans laquelle s'insère le jeu, de l'importance de celui-ci au sein de l'émission en termes de temps et de retombées économiques escomptées par rapport à celles qui sont attendues de l'émission dans son ensemble, ainsi que de l'orientation des questions posées aux candidats.

Un tel jeu ne saurait toutefois constituer un télé-achat au sens de la disposition précitée que s'il constitue une véritable activité économique autonome de prestation de services et ne se limite pas à une simple offre de divertissement au sein de l'émission.

Arrêt du 18 octobre 2007, Österreichischer Rundfunk (ORF) (C-195/06, Rec._p._I-8817) (cf. points 37, 47 et disp.)

189. Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Notion de "publicité télévisée" - Jeu par téléphone doté d'un prix - Inclusion - Conditions

L'article 1er de la directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, telle que modifiée par la directive 97/36, doit être interprété en ce sens qu'une émission ou partie d'émission, au cours de laquelle un organisme de radiodiffusion télévisuelle offre la possibilité aux téléspectateurs de participer à un jeu doté d'un prix en composant immédiatement un numéro de téléphone spécial et donc moyennant paiement, relève de la définition que ledit article, sous c), donne de la publicité télévisée si, en raison de la finalité et du contenu de ce jeu, ainsi que des conditions dans lesquelles sont présentés les prix à gagner, celui-ci consiste en un message visant à inciter les téléspectateurs à acquérir les biens et les services présentés comme prix à gagner, ou visant à promouvoir indirectement sous forme d'autopromotion les mérites des programmes de l'organisme en cause.

Arrêt du 18 octobre 2007, Österreichischer Rundfunk (ORF) (C-195/06, Rec._p._I-8817) (cf. point 47 et disp.)

190. Libre prestation des services - Services postaux de la Communauté - Directive 97/67 - Services réservés aux prestataires du service postal universel - Conditions

L'article 7, paragraphe 2, de la directive 97/67, concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service, lequel prévoit que peuvent continuer d'être réservés dans les limites de prix et de poids fixées au paragraphe 1 dudit article le courrier transfrontalier et le publipostage, dans la mesure où cela est nécessaire au maintien du service universel, doit être interprété en ce sens qu'il ne permet aux États membres de réserver le courrier transfrontalier au prestataire du service universel que dans la mesure où ils établissent

- que, à défaut d'une telle réserve, il serait fait échec à l'accomplissement de ce service universel, ou

- que cette réserve est nécessaire pour que ce service puisse être accompli dans des conditions économiquement acceptables.

L'objectif de l'article 7, paragraphe 2, de ladite directive est de garantir le maintien du service postal universel, notamment en le dotant des ressources nécessaires pour qu'il puisse fonctionner dans des conditions d'équilibre financier. Toutefois, la condition énoncée à ladite disposition ne saurait être réduite à ce seul aspect financier, dans la mesure où il ne saurait être exclu qu'il existe d'autres raisons pour lesquelles, conformément à l'article 86, paragraphe 2, CE, les États membres peuvent décider de réserver le courrier transfrontalier pour s'assurer qu'il n'est pas fait échec à l'accomplissement de la mission particulière impartie au prestataire du service postal universel. Or, des considérations, telles que l'opportunité, relatives à la situation générale du secteur postal, y compris celle liée au degré de libéralisation de celui-ci au moment de prendre une décision quant au courrier transfrontalier, ne suffisent pas pour justifier le fait de réserver ce dernier, à moins que, à défaut d'une telle réserve, il ne soit fait échec à l'accomplissement du service postal universel ou que cette réserve soit nécessaire pour que ce service puisse être fourni dans des conditions économiquement acceptables.

Arrêt du 15 novembre 2007, International Mail Spain (C-162/06, Rec._p._I-9911) (cf. points 31, 40-41, 50 et disp.)

191. Libre prestation des services - Restrictions - Organismes privés de contrôle des produits issus de l'agriculture biologique - Participation à l'exercice de l'autorité publique - Absence - Exigence d'un établissement ou d'une infrastructure durable dans l'État membre de la prestation - Inadmissibilité - Justification - Absence

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre exigeant des organismes privés de contrôle des produits issus de l'agriculture biologique agréés dans un autre État membre qu'ils disposent d'un établissement sur le territoire national pour pouvoir y fournir des prestations de contrôle.

En effet, d'une part, le rôle auxiliaire et préparatoire dévolu aux organismes privés par le règlement nº 2092/91, concernant le mode de production biologique de produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires, vis-à-vis de l'autorité de supervision ne saurait être considéré comme une participation directe et spécifique à l'exercice de l'autorité publique au sens de l'article 55 CE lu en combinaison avec l'article 45, premier alinéa, CE, justifiant une exception au titre de ces dispositions, mais comme une activité supplémentaire détachable de l'exercice d'une telle autorité. D'autre part, une telle exigence va au-délà de ce qui est objectivement nécessaire pour atteindre l'objectif de protection des consommateurs susceptible de justifier des entraves à la libre prestation des services.

Arrêt du 29 novembre 2007, Commission / Autriche (C-393/05, Rec._p._I-10195) (cf. points 31-32, 42, 46, 52-54 et disp.)

Arrêt du 29 novembre 2007, Commission / Allemagne (C-404/05, Rec._p._I-10239) (cf. points 37-38, 44, 48, 52 et disp.)

192. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Entreprises de sécurité privée - Obligation de disposer d'effectifs minimaux et/ou maximaux et de déposer une caution auprès d'un oganisme national - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 43 CE et 49 CE un État membre dont la réglementation prévoit:

- que les entreprises de sécurité privée doivent disposer d'un effectif minimal et/ou maximal pour être autorisées à exercer leur activité;

- que les mêmes entreprises doivent déposer une caution auprès d'un organisme national.

Arrêt du 13 décembre 2007, Commission / Italie (C-465/05, Rec._p._I-11091) (cf. points 105, 115, 130 et disp.)

193. Libre prestation des services - Restrictions - Contrôle des prix - Entreprises de sécurité privée - Réglementation nationale prévoyant la fixation des prix dans l'autorisation émise par l'autorité compétente par rapport à une marge de variation préétablie - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre dont la réglementation prévoit que les prix des services de sécurité privée sont fixés dans l'autorisation émise par l'autorité compétente par rapport à une marge de variation préétablie. La limitation ainsi apportée à la liberté de fixation des tarifs est de nature à restreindre l'accès au marché de l'État membre concerné des services de sécurité privée d'opérateurs, établis dans d'autres États membres, souhaitant offrir leurs services dans cet État membre. En effet, ladite limitation a, d'une part, pour effet de priver lesdits opérateurs de la possibilité de livrer, par l'offre de tarifs inférieurs à ceux fixés par le tarif imposé, une concurrence plus efficace aux opérateurs économiques installés de façon stable dans l'État membre concerné et disposant, de ce fait, de plus grandes facilités que les opérateurs économiques établis à l'étranger pour s'attacher une clientèle. D'autre part, cette même limitation est de nature à empêcher les opérateurs établis dans d'autres États membres d'intégrer dans le tarif de leurs prestations certains coûts que n'ont pas à supporter les opérateurs établis dans l'État membre de la prestation. Enfin, la marge de fluctuation laissée aux opérateurs n'est pas de nature à compenser les effets de la limitation ainsi apportée à la liberté de fixation des tarifs.

Arrêt du 13 décembre 2007, Commission / Italie (C-465/05, Rec._p._I-11091) (cf. points 125-126, 129-130 et disp.)

194. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Dérogations - Activités participant à l'exercice de l'autorité publique - Activité des entreprises et du personnel de sécurité privée - Exclusion - Obligation pour les gardes particuliers de prêter serment de fidélité à l'État membre d'accueil ou de prestation de l'activité - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 43 CE et 49 CE un État membre dont la réglementation prévoit que l'activité de garde particulier ne peut être exercée que sur prestation préalable d'un serment de fidélité à cet État membre et au chef de l'État membre. En effet, en l'état de la législation applicable, les entreprises de sécurité privée ne participent pas, dans cet État membre, directement et spécifiquement, à l'exercice de l'autorité publique, les activités de sécurité privée auxquelles elles se livrent ne pouvant être assimilées aux missions relevant de la compétence des services de sécurité publique, de sorte que les dérogations prévues aux articles 45 CE et 55 CE ne jouent pas dans un tel cas. Par ailleurs, une telle promesse solennelle de fidélité à un État membre et au chef de cet État membre, en raison de sa portée symbolique, est susceptible de recevoir plus aisément l'agrément de ressortissants de cet État membre ou de personnes qui y sont d'ores et déjà installées. Les opérateurs étrangers sont, en conséquence, mis dans une situation désavantageuse par rapport aux opérateurs ressortissants de l'État membre en cause qui se trouvent implantés dans ledit État. Enfin, s'agissant de la justification éventuelle d'une telle entrave à la liberté d'établissement et à la libre prestation des services tenant à la protection de l'ordre public, cette dernière notion suppose une menace réelle et suffisamment grave affectant un intérêt fondamental de la société. Or, il ne saurait être considéré que les entreprises de sécurité privée établies dans des États membres autres que celui où la prestation de serment est instaurée pourraient créer, par l'exercice de leur droit à la liberté d'établissement et à la libre prestation des services et en ayant recours à du personnel n'ayant pas prêté serment de fidélité audit État membre et au chef de cet État membre, une menace réelle et grave à un intérêt fondamental de la société.

Arrêt du 13 décembre 2007, Commission / Italie (C-465/05, Rec._p._I-11091) (cf. points 43-44, 47-50, 130 et disp.)

195. Libre prestation des services - Restrictions - Entreprises de sécurité privée - Obligation d'obtenir une autorisation ayant une validité territoriale limitée, délivrée par les autorités nationales - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre dont la réglementation prévoit que l'activité de sécurité privée ne peut être exercée par les prestataires de services établis dans un autre État membre que sur délivrance d'une autorisation de l'autorité compétente de portée territoriale, sans qu'il soit tenu compte des obligations auxquelles ces prestataires sont déjà soumis dans l'État membre d'origine. En effet, une mesure instituée par un État membre qui, en substance, fait double emploi avec les contrôles déjà effectués dans l'État membre où le prestataire est établi ne saurait être considérée comme nécessaire pour atteindre l'objectif d'assurer un contrôle étroit des activités en cause.

Arrêt du 13 décembre 2007, Commission / Italie (C-465/05, Rec._p._I-11091) (cf. points 63-64, 67, 130 et disp.)

196. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Entreprises de sécurité privée - Obligation d'obtenir une autorisation ayant une validité territoriale limitée, délivrée par les autorités nationales, après prise en compte du nombre et de l'importance des entreprises de sécurité privée opérant déjà sur le territoire en cause - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 43 CE et 49 CE un État membre dont la réglementation prévoit que l'activité de sécurité privée ne peut être exercée par une entreprise établie dans un autre État membre que sur délivrance d'une autorisation de l'autorité compétente ayant une validité territoriale limitée et que la délivrance de ladite autorisation est subordonnée à la prise en compte du nombre et de l'importance des entreprises de sécurité privée opérant déjà sur le territoire en cause.

Arrêt du 13 décembre 2007, Commission / Italie (C-465/05, Rec._p._I-11091) (cf. points 68, 79-80, 130 et disp.)

197. Libre prestation des services - Restrictions - Entreprises de sécurité privée - Obligation d'avoir un siège d'exploitation dans chaque province d'exercice de leur activité et d'obtenir une autorisation individuelle pour chaque membre du personnel - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 49 CE un État membre dont la réglementation prévoit:

- que les entreprises de sécurité privée doivent avoir un siège d'exploitation dans chaque province où elles exercent leur activité;

- le personnel des entreprises doit être individuellement autorisé à exercer l'activité de sécurité privée, sans qu'il soit tenu compte des contrôles et des vérifications déjà effectués dans l'État membre d'origine.

Arrêt du 13 décembre 2007, Commission / Italie (C-465/05, Rec._p._I-11091) (cf. points 88, 93-94, 130 et disp.)

198. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale imposant à des câblodistributeurs une obligation de diffuser les programmes émis par certains organismes privés de radiodiffusion - Admissibilité - Justification - Politique culturelle - Conditions - Appréciation par le juge national

L'article 49 CE doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à une réglementation d'un État membre qui impose aux câblodistributeurs actifs sur le territoire concerné de cet État de diffuser, en vertu d'une obligation dite de "must carry", les programmes télévisés émis par les organismes privés de radiodiffusion relevant des pouvoirs publics dudit État qui ont été désignés par ces derniers lorsque cette réglementation:

- poursuit un but d'intérêt général, tel que le maintien, au titre de la politique culturelle de ce même État membre, du caractère pluraliste de l'offre des programmes de télévision dans ce territoire, et

- n'est pas disproportionnée par rapport à cet objectif, ce qui implique que ses modalités d'application doivent relever d'une procédure transparente fondée sur des critères objectifs, non discriminatoires et connus à l'avance.

En particulier, tout organisme de radiodiffusion doit être en mesure de déterminer préalablement la nature et la portée des conditions précises à remplir ainsi que des obligations de service public auxquelles il est tenu, le cas échéant, de souscrire pour l'octroi du statut de "must carry". À cet égard, la simple énonciation, dans l'exposé des motifs de la réglementation nationale, de déclarations de principe ainsi que d'objectifs de politique générale ne saurait être considérée comme suffisante.

Ensuite, l'octroi dudit statut doit être fondé sur des critères objectifs qui sont propres à garantir le pluralisme en permettant, le cas échéant, par la voie d'obligations de service public, l'accès, notamment, aux informations nationales et locales sur le territoire concerné. Ainsi, un tel statut ne saurait être automatiquement accordé à toutes les chaînes de télévision diffusées par un même organisme privé de radiodiffusion, mais il doit être strictement limité à celles dont le contenu global des programmes est apte à réaliser un tel objectif. En outre, le nombre de canaux réservés aux organismes privés de radiodiffusion relevant dudit statut ne doit pas manifestement excéder ce qui est nécessaire pour réaliser cet objectif.

Enfin, l'octroi du statut "must carry" ne saurait, ni en droit ni en fait, être subordonné à une exigence d'établissement sur le territoire national. Par ailleurs, pour autant que les exigences requises pour l'octroi d'un tel statut, alors même qu'elles seraient indistinctement applicables, sont susceptibles d'être plus facilement remplies par des organismes de radiodiffusion établis sur le territoire national, en raison notamment du contenu des programmes à émettre, elles doivent être indispensables pour atteindre l'objectif légitime d'intérêt général poursuivi.

Il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer si lesdites conditions sont remplies.

Arrêt du 13 décembre 2007, United Pan-Europe Communications Belgium e.a. (C-250/06, Rec._p._I-11135) (cf. points 46-52 et disp.)

199. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Prestation de services postaux réservés en conformité avec la directive 97/67 - Attribution, en dehors des règles de passation des marchés publics, à une société anonyme publique, prestataire du service postal universel, entièrement détenue par les pouvoirs publics - Admissibilité

Le droit communautaire doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation d’un État membre qui permet aux administrations publiques de confier, en dehors des règles de passation des marchés publics, la prestation de services postaux réservés en conformité avec la directive 97/67 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l’amélioration de la qualité du service, à une société anonyme publique dont le capital est entièrement détenu par les pouvoirs publics et qui est, dans cet État, le prestataire du service postal universel.

En effet, l’article 7 de ladite directive permet aux État membres de réserver certains services postaux au(x) prestataire(s) du service postal universel dans la mesure où cela est nécessaire au maintien de ce service. Par conséquent, pour autant que des services postaux sont, en conformité avec cette directive, réservés à un seul prestataire du service universel, de tels services sont nécessairement soustraits à la concurrence, aucun autre opérateur économique n’étant autorisé à offrir lesdits services. Dès lors, ne peuvent trouver à s’appliquer les règles communautaires en matière de passation de marchés publics, dont l’objectif principal est la libre circulation des marchandises et des services ainsi que l’ouverture à la concurrence non faussée dans tous les États membres.

Arrêt du 18 décembre 2007, Asociación Profesional de Empresas de Reparto y Manipulado de Correspondencia (C-220/06, Rec._p._I-12175) (cf. points 39-41, disp. 1)

200. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Impôts sur le revenu - Bénéfice d'une exonération fiscale réservé aux contribuables exerçant des activités d'enseignement à titre accessoire au service d'universités nationales - Inadmissibilité - Justification - Absence

La restriction à la libre prestation des services qui réside dans le fait qu'une réglementation nationale réserve l'application d'une exonération d'impôt sur le revenu aux rémunérations versées, en contrepartie d'une activité d'enseignement exercée à titre accessoire, par des universités, personnes morales de droit public, établies sur le territoire national et la refuse lorsque ces rémunérations sont versées par une université établie dans un autre État membre n'est pas justifiée par des raisons impérieuses d'intérêt général.

En effet, une telle réglementation qui s'applique de la même manière aux ressortissants nationaux et étrangers qui exercent des activités auprès de personnes morales de droit public nationales, institue un traitement moins favorable des services fournis à des destinataires situés dans d'autres États membres par rapport au traitement réservé à ceux rendus sur le territoire national. Ladite restriction à la libre prestation des services ne peut être justifiée par la promotion de l'enseignement, de la recherche et du développement dans la mesure où elle porte atteinte à la liberté des enseignants exerçant leur activité à titre accessoire de choisir le lieu de leurs prestations de services au sein de la Communauté sans qu'il ait été établi que, pour atteindre l'objectif allégué de promotion de l'enseignement, il soit nécessaire de réserver le bénéfice de l'exonération fiscale en cause au principal aux seuls contribuables qui exercent une activité accessoire d'enseignement dans des universités situées sur le territoire national. En outre, cette restriction ne saurait être justifiée par la nécessité d'assurer la cohérence du régime fiscal, dès lors qu'il n'existe pas de lien direct, du point de vue du régime fiscal, entre l'exonération fiscale des indemnités pour frais professionnels versées par des universités nationales et une compensation de cet avantage par un prélèvement fiscal déterminé.

Par ailleurs, le fait que les États membres sont compétents pour décider eux-mêmes de l'organisation de leur système éducatif n'est pas de nature à rendre compatible avec le droit communautaire ladite réglementation qui réserve le bénéfice d'une exonération fiscale aux contribuables exerçant des activités au service ou pour le compte d'universités publiques nationales. Cette réglementation n'est pas une mesure portant sur le contenu de l'enseignement ou relative à l'organisation du système éducatif, mais une mesure fiscale de nature générale qui octroie un avantage fiscal lorsqu'un particulier se consacre à des activités au bénéfice de la collectivité. Même si une telle réglementation constituait une mesure liée à l'organisation du système éducatif, elle n'en demeurerait pas moins incompatible avec le traité dans la mesure où elle affecte le choix des enseignants exerçant leur activité à titre accessoire quant au lieu de leurs prestations de services.

Arrêt du 18 décembre 2007, Jundt (C-281/06, Rec._p._I-12231) (cf. points 54, 56-57, 61, 69, 71, 73, 83-85, 88-89, disp. 2-3)

201. Libre prestation des services - Réseaux et services de communications électroniques - Cadre réglementaire, autorisation et concurrence - Directives 2002/21, 2002/20 et 2002/77 - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Attribution de radiofréquences d'émission - Législation nationale mettant dans l'impossibilité d'émettre un opérateur titulaire d'une concession à défaut de radiofréquences octroyées sur la base de critères objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnés - Inadmissibilité

L'article 49 CE et, à compter de leur applicabilité, l'article 9, paragraphe 1, de la directive 2002/21, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, les articles 5, paragraphes 1 et 2, second alinéa, et 7, paragraphe 3, de la directive 2002/20, relative à l'autorisation de réseaux et de services de communications électroniques, ainsi que l'article 4 de la directive 2002/77, relative à la concurrence dans les marchés des réseaux et des services de communications électroniques, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent, en matière de radiodiffusion télévisuelle, à une législation nationale dont l'application conduit à ce qu'un opérateur titulaire d'une concession soit dans l'impossibilité d'émettre à défaut de radiofréquences d'émission octroyées sur la base de critères objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnés.

Arrêt du 31 janvier 2008, Centro Europa 7 (C-380/05, Rec._p._I-349) (cf. point 116 et disp.)

202. Libre prestation des services - Services postaux de la Communauté - Directive 97/67 - Services réservés aux prestataires du service postal universel - Tarifs spéciaux accordés aux clients professionnels du prestataire national du service postal universel pour le dépôt de quantités minimales d'envois prétriés - Refus d'accorder de tels tarifs aux intermédiaires regroupant, à titre professionnel et en leur propre nom, les envois de plusieurs expéditeurs - Inadmissibilité

L’article 12, cinquième tiret, de la directive 97/67 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l’amélioration de la qualité du service, telle que modifiée par la directive 2002/39, faisant obligation aux États membres de prendre des mesures pour que les tarifs de chacun des services faisant partie de la prestation du service universel soient conformes aux principes de transparence et de non-discrimination et prévoyant que ces tarifs s'appliquent, tout comme les conditions y afférentes, de la même manière tant dans les relations entre les tiers que dans les relations entre les tiers et les prestataires du service universel fournissant des services équivalents, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que soit refusé aux entreprises regroupant, à titre professionnel et en leur propre nom, les envois postaux de plusieurs expéditeurs le bénéfice des tarifs spéciaux que le prestataire national du service postal universel accorde, dans le domaine de sa licence exclusive, à des clients professionnels pour le dépôt dans ses centres postaux de quantités minimales d’envois prétriés.

Une activité telle que la collecte par des intermédiaires auprès de différents expéditeurs d’envois postaux, le prétriage de ceux-ci et leur transport jusqu’à des points d’accès ne relève pas du domaine susceptible d’être réservé au prestataire du service postal universel en vertu de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 97/67 de sorte que cette disposition ne saurait être invoquée pour justifier un traitement des intermédiaires concernés différent de celui dont bénéficient les clients professionnels de ladite société.

Par ailleurs, s'il est vrai que l’article 12, cinquième tiret, de ladite directive ne vise pas à régler la question de principe consistant à savoir si un prestataire du service postal universel doit ou non accorder un accès à la chaîne postale à des conditions et en des points différents de ceux du service de la poste aux lettres traditionnel, il ressort toutefois du libellé de ladite disposition que celle-ci impose aux États membres une stricte obligation de respecter les principes de transparence et de non-discrimination dans l’hypothèse où un tel accès à des tarifs spéciaux est, en fait, accordé par ce prestataire.

Arrêt du 6 mars 2008, Deutsche Post e.a. (C-287/06 à C-292/06, Rec._p._I-1243) (cf. points 27-28, 31, 35, 41, 44 et disp.)

203. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Impôts sur les sociétés - Régime de déduction des dépenses afférentes à des activités de recherche, de développement et d'innovation technologique moins favorable pour les dépenses effectuées à l'étranger que pour celles réalisées sur le territoire national - Inadmissibilité - Justification - Absence



Arrêt du 13 mars 2008, Commission / Espagne (C-248/06, Rec._p._I-47*) (cf. points 25, 42-43 et disp.)

204. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation d'un État membre imposant à ses résidents le paiement de l'intégralité d'une taxe d'immatriculation lors de la première utilisation sur le réseau routier national de véhicules de location immatriculés dans un autre État membre - Inadmissibilité - Critères



Ordonnance du 22 mai 2008, Ilhan (C-42/08, Rec._p._I-83*) (cf. point 25 et disp.)

205. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale conférant à des centres agréés le droit exclusif de fournir le service d'insémination artificielle des bovins sur un territoire donné et subordonnant l'exercice de cette activité à une exigence de licence - Obligation de stockage des semences bovines dans ces centres - Inadmissibilité

Le fait, pour un État membre, d'exiger des prestataires transfrontaliers voulant pratiquer l'insémination artificielle des bovins sur le territoire de cet État l'obtention d'une licence d'inséminateur et le fait d'imposer, après l'obtention de cette licence, que les opérateurs ne puissent effectuer la mise en place de la semence bovine que sous l'autorité d'un centre d'insémination territorialement compétent constituent, indépendamment des conditions de délivrance de ladite licence, une restriction à la libre prestation des services, car ces exigences sont susceptibles de gêner ou de rendre moins attrayante la prestation du service d’insémination par des opérateurs établis et opérant déjà légitimement dans d’autres États membres.

Il en va de même en ce qui concerne l'obligation de stockage des semences dans les centres agréés d'insémination artificielle qui en assurent seuls la livraison aux éleveurs. En effet, même si les éleveurs disposent de la faculté de faire commander par le centre dont ils dépendent des semences spécifiques provenant d’un producteur établi dans un autre État membre, l’obligation de stockage de ces semences dans ledit centre, après leur expédition, est susceptible de gêner ou de rendre moins attrayante la prestation du service de distribution par ce producteur.

Arrêt du 17 juillet 2008, Commission / France (C-389/05, Rec._p._I-5337) (cf. points 61, 64-65)

206. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale conférant à des centres agréés le droit exclusif de fournir le service d'insémination artificielle des bovins sur un territoire donné et subordonnant l'exercice de cette activité à une exigence de licence - Justification - Protection de la santé publique - Inadmissibilité

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 43 CE et 49 CE un État membre qui réserve le droit de fournir le service d'insémination artificielle des bovins à des centres d'insémination artificielle agréés, disposant d'une exclusivité géographique, ainsi qu'aux personnes titulaires d'une licence d'inséminateur dont la délivrance est subordonnée à la conclusion d'une convention avec l'un de ces centres.

Certes, il est légitime que, afin de s’assurer de l’aptitude du candidat aux fonctions d’inséminateur, un État membre soumette l’exercice de l’activité d’insémination à une exigence de licence. Or, s’agissant d’une procédure d’autorisation d’exercice d’une activité, dans l’application qu’il fait des dispositions nationales, l’État membre concerné doit tenir compte des connaissances et des qualifications déjà acquises par l’intéressé dans un autre État membre. En outre, un régime d’autorisation administrative préalable doit être fondé, notamment, sur des critères objectifs, non discriminatoires et connus à l’avance, de manière à encadrer l’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités afin que celui-ci ne soit pas utilisé de manière arbitraire.

Une réglementation qui subordonne la délivrance d'une licence d'inséminateur à la conclusion d'une convention avec un centre d'insémination artificielle qui est en concurrence potentielle, sur le marché de l’insémination, avec le même opérateur dont il est censé vérifier les compétences d’inséminateur et qui, en outre, laisse la conclusion de cette convention à la discrétion des présidents de ces centres, qui ne sont pas tenus de la signer même si le candidat remplit les critères d’aptitude objectifs, non discriminatoires et connus à l’avance, à supposer même qu’elle soit propre à garantir la réalisation de la protection de la santé animale et de celle de l’agent pratiquant la mise en place de la semence, va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi.

Arrêt du 17 juillet 2008, Commission / France (C-389/05, Rec._p._I-5337) (cf. points 91-95, 97, 108 et disp.)

207. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Concession de service public attribuée sans procédure de mise en concurrence - Réglementation nationale prorogeant la durée de la période transitoire précédant la cessation anticipée d'une telle concession - Inadmissibilité - Justification - Principe de sécurité juridique - Appréciation par le juge national

Les articles 43 CE, 49 CE et 86, paragraphe 1, CE ne s’opposent pas à ce que la réglementation d’un État membre visant à mettre en oeuvre les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel par le biais d'une cessation anticipée, au terme d'une période transitoire, des concessions de distribution de gaz naturel, attribuées sans procédure de mise en concurrence, prévoie l’allongement, dans certaines conditions, de la durée de ladite période transitoire, pour autant qu’un tel allongement puisse être considéré comme nécessaire afin de permettre aux cocontractants de dénouer leurs relations contractuelles dans des conditions acceptables tant du point de vue des exigences du service public que du point de vue économique.

Nonobstant le fait qu'une telle concession de service public n’entre pas dans le champ d’application des directives relatives aux différentes catégories de marchés publics, les autorités publiques sont néanmoins tenues, lorsqu’elles envisagent d’attribuer une telle concession, de respecter les règles fondamentales du traité en général et le principe de non-discrimination en raison de la nationalité en particulier. Plus particulièrement, dans la mesure où une telle concession présente un intérêt transfrontalier certain, son attribution, en l’absence de toute transparence, à une entreprise située dans l’État membre dont relève le pouvoir adjudicateur est constitutive d’une différence de traitement au détriment des entreprises susceptibles d’être intéressées par celle-ci qui sont situées dans un autre État membre. À moins qu’elle ne se justifie par des circonstances objectives, une telle différence de traitement, qui, en excluant toutes les entreprises situées dans un autre État membre, joue principalement au détriment de celles-ci, est constitutive d’une discrimination indirecte selon la nationalité, interdite en application des articles 43 CE et 49 CE. Par ailleurs, l’article 86, paragraphe 1, CE s’oppose à ce que les États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, maintiennent en vigueur une réglementation nationale contraire aux articles 43 CE et 49 CE.

Une telle différence de traitement peut cependant se justifier par la nécessité de respecter le principe de sécurité juridique, principe qui fait partie de l'ordre juridique communautaire et qui s'impose à toute autorité nationale chargée d'appliquer le droit communautaire. Dès lors que la directive 2003/55, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 98/30, ne prévoit pas la mise en cause des concessions de distributions de gaz existantes, qu'il s'agit en l'espèce d'une ancienne concession devant sortir ses effets pendant plusieurs décennies et que celle-ci a été attribuée à une époque où la Cour n'avait pas encore jugé que les contrats présentant un intérêt transfrontalier certain pourraient être soumis à des obligations de transparence découlant du droit primaire, le principe de sécurité juridique qui exige, notamment, que les règles de droit soient claires, précises et prévisibles dans leurs effets, non seulement permet mais aussi impose que la résiliation d'une telle concession soit assortie d'une période transitoire qui permette aux cocontractants de dénouer leurs relations contractuelles dans des conditions acceptables tant du point de vue des exigences du service public que du point de vue économique. Il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier si, en particulier, l’allongement de la durée de la période transitoire, opéré par une réglementation de droit interne, peut être considéré comme nécessaire afin de respecter le principe de sécurité juridique.

Arrêt du 17 juillet 2008, ASM Brescia (C-347/06, Rec._p._I-5641) (cf. points 57-61, 64-65, 67-73, disp. 2)

208. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Législation nationale interdisant la publicité relative aux traitements médicaux et chirurgicaux dans le domaine des soins esthétiques effectués dans des structures médicales privées sur les chaînes de télévision nationales et l'autorisant sur les chaînes locales - Inadmissibilité - Justification - Absence

Les articles 43 CE et 49 CE, lus en combinaison avec les articles 48 CE et 55 CE, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation nationale qui interdit, sur les chaînes de télévision nationales, la publicité relative aux traitements médicaux et chirurgicaux dans le domaine des soins esthétiques effectués dans des structures médicales privées, tout en autorisant une telle publicité, sous certaines conditions, sur les chaînes de télévision à diffusion locale.

En effet, un tel régime de publicité comporte une interdiction qui dépasse celle prévue à l’article 14, paragraphe 1, de la directive 89/552 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle. Bien que l’article 3, paragraphe 1, de cette même directive donne aux États membres la possibilité de prévoir des règles plus détaillées ou plus strictes dans les domaines couverts par celle-ci, une telle compétence doit être exercée dans le respect des libertés fondamentales garanties par le traité CE.

Or, un tel régime de publicité est susceptible de gêner ou de rendre moins attrayant l’exercice des libertés fondamentales garanties par les articles 43 CE et 49 CE. Ainsi, pour les sociétés établies dans des États membres autres que l'État membre en cause, une telle interdiction représente un obstacle sérieux à l’exercice de leurs activités par l’intermédiaire d’une filiale implantée dans ce dernier État membre et, dès lors, elle est de nature à rendre plus difficile l’accès de ces opérateurs économiques au marché dudit État membre. En outre, ce régime de publicité constitue une restriction à la libre prestation de services en tant qu'il empêche des sociétés d'autres États membres de bénéficier de prestations de services de diffusion de la publicité télévisée.

Si, en principe, une réglementation de la publicité télévisée relative aux traitements médicaux et chirurgicaux dispensés par les établissements médicaux privés est susceptible d’être justifiée au regard de l’objectif de protection de la santé publique, toutefois, un régime qui interdit une telle publicité sur les chaînes de télévision nationales, tout en l'autorisant, sous certaines conditions, sur les chaînes de télévision locales, présente une incohérence et n'est donc pas de nature à répondre utilement à l’objectif susmentionné qu’il entend poursuivre.

Arrêt du 17 juillet 2008, Corporación Dermoestética (C-500/06, Rec._p._I-5785) (cf. points 31-33, 37-39 et disp.)

209. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Législation nationale imposant à un travailleur non salarié résidant sur le territoire national d'immatriculer son véhicule pris en leasing et essentiellement utilisé dans un autre État membre - Inadmissibilité - Justification - Absence

Les articles 43 CE et 49 CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale d’un État membre en vertu de laquelle un travailleur non salarié résidant dans cet État membre est tenu d’y immatriculer un véhicule pris en leasing auprès d’une société établie dans un autre État membre lorsque ce véhicule n’est ni destiné à être essentiellement utilisé sur le territoire du premier État membre à titre permanent ni, en fait, utilisé de cette façon.

En effet, un État membre peut soumettre à une obligation d’immatriculation un véhicule automobile pris en leasing par un travailleur résidant dans cet État membre auprès d’une société établie dans un autre État membre lorsque ledit véhicule est destiné à être essentiellement utilisé sur le territoire du premier État membre à titre permanent ou qu’il est, en fait, utilisé de cette façon.

En revanche, si ces conditions ne sont pas réunies, le rattachement à un État membre du véhicule immatriculé dans un autre État membre est moindre, de sorte qu’une autre justification de la restriction en cause est nécessaire. À cet égard, dès lors qu'un travailleur n’utilise pas son véhicule dans lesdites conditions, la circonstance qu’il exerce son activité non salariée dans un État membre autre que celui de sa résidence en tant que personne physique y possédant un établissement stable et non en tant qu’administrateur ou gérant d’une société y établie ou le fait qu’il a lui-même pris un véhicule en leasing auprès d’une société de cet État membre et non par l’intermédiaire d’un employeur qui mettrait ensuite un véhicule à sa disposition ne sauraient justifier une obligation d’immatriculation du véhicule dans l'État membre de la résidence dudit travailleur.

Ordonnance du 24 octobre 2008, Vandermeir (C-364/08, Rec._p._I-8087) (cf. points 32-36 et disp.)

210. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Réglementation nationale refusant le bénéfice d'une prime à l'investissement aux entreprises pour des investissements dans des biens corporels mis à disposition, à titre onéreux, à des entreprises employant ces biens principalement dans d'autres États membres - Inadmissibilité - Justification - Absence

L’article 49 CE s’oppose à une réglementation d’un État membre en vertu de laquelle le bénéfice d’une prime à l’investissement est refusé aux entreprises qui se procurent des biens corporels, au seul motif que les biens au titre desquels cette prime est revendiquée et qui sont mis à disposition à titre onéreux sont employés principalement dans d’autres États membres.

En effet, une telle réglementation qui soumet les investissements portant sur des biens, lesquels, mis à disposition à titre onéreux, sont utilisés dans d’autres États membres, à un régime fiscal moins favorable que celui réservé aux investissements portant sur de tels biens utilisés sur le territoire national constitue, en principe, une restriction à la libre prestation des services en ce qu'elle est susceptible de décourager les entreprises pouvant prétendre à cet avantage fiscal de fournir des services de location aux opérateurs économiques exerçant des activités dans d’autres États membres; dans une situation où une entreprise met, à titre onéreux, des biens à la disposition d’une autre entreprise, ces deux entreprises étant étroitement liées sur le plan économique, ladite réglementation est également susceptible de décourager l’entreprise preneur en location d’exercer des activités transfrontalières.

Une telle réglementation ne saurait être justifiée par l'exigence d'une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres, dès lors que les revenus de location tirés de la mise à disposition des biens corporels au titre desquels la prime à l'investissement est revendiquée sont imposables dans l'État membre d'octroi de ladite prime et que, partant, à défaut de la réglementation en cause, le droit de cet État membre d'exercer sa compétence fiscale en relation avec les activités réalisées sur son territoire ne serait pas compromis.

Une telle réglementation ne saurait en outre être justifiée par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal national, car il n'existe pas de lien direct, du point de vue du régime fiscal, entre, d’une part, la prime à l’investissement, octroyée au donneur en location au titre des biens corporels qu’il s’est procurés, et, d’autre part, l’imposition ultérieure, dans le chef du preneur en location, des revenus réalisés grâce à l’utilisation de ces biens mis à sa disposition à titre onéreux.

Par ailleurs, dès lors qu'elle ne permet pas de limiter le refus du bénéfice de la prime à l'investissement aux seuls montages purement artificiels, mais affecte tout donneur en location pouvant prétendre à la prime à l’investissement, qui met, à titre onéreux, des biens à la disposition des entreprises exerçant des activités transfrontalières, et ceci nonobstant l’absence d’éléments objectifs susceptibles de démontrer l’existence d’un tel montage, cette réglementation ne saurait être justifiée par la nécessité de prévenir les pratiques abusives.

Arrêt du 4 décembre 2008, Jobra (C-330/07, Rec._p._I-9099) (cf. points 24-26, 32-35, 38-41 et disp.)

211. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Justification - Lutte contre des pratiques abusives - Conditions - Octroi d'une prime à l'investissement à une entreprise mettant, à titre onéreux, des biens à la disposition d'une entreprise les employant principalement dans d'autres États membres

Une mesure nationale restreignant la libre prestation des services peut être justifiée lorsqu’elle vise spécifiquement les montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, dont la seule fin est l’obtention d’un avantage fiscal. Toutefois, la circonstance qu’une entreprise pouvant prétendre à la prime à l’investissement mette, à titre onéreux, des biens à la disposition d’une entreprise qui les emploie principalement dans d’autres États membres ne constitue pas, en tant que telle, un abus. Une telle mise à disposition ne saurait non plus fonder une présomption générale de l’existence d’une pratique abusive et justifier une mesure portant atteinte à l’exercice d’une liberté fondamentale garantie par le traité.

Arrêt du 4 décembre 2008, Jobra (C-330/07, Rec._p._I-9099) (cf. points 35-37)

212. Droit communautaire - Principes - Égalité de traitement - Discrimination en raison de la nationalité - Libre prestation des services - Activités de radiodiffusion télévisuelle - Directive 89/552 - Obligation imposée aux opérateurs de télévision d'affecter une partie de leurs recettes d'exploitation au financement anticipé de films européens, notamment à des œuvres dans les langues officielles de l'État membre concerné - Admissibilité - Justification - Défense et promotion des langues officielles de l'État membre concerné

La directive 89/552, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, telle que modifiée par la directive 97/36, et, plus particulièrement, son article 3 ainsi que l'article 12 CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à une mesure prise par un État membre, obligeant les opérateurs de télévision à affecter 5 % de leurs recettes d'exploitation au financement anticipé de films cinématographiques et de télévision européens ainsi que, plus spécifiquement, 60 % de ces 5 % à des œuvres dont la langue originale est l'une des langues officielles de cet État membre.

En effet, indépendamment de la question de savoir si une telle mesure relève des domaines couverts par ladite directive, les États membres restent, en principe, compétents pour l'adopter, à condition qu'ils respectent les libertés fondamentales garanties par le traité.

Certes, une telle mesure en tant qu'elle concerne l'obligation d’affecter à des œuvres dont la langue originale est l’une des langues officielles de l'État membre concerné 60 % des 5 % des recettes d'exploitation affectées au financement anticipé de films cinématographiques et de télévision européens constitue une restriction à plusieurs libertés fondamentales, à savoir la libre prestation des services, la liberté d’établissement, la libre circulation des capitaux et la libre circulation des travailleurs.

Cependant, ladite mesure peut être justifiée par l'objectif de défendre et de promouvoir l'une ou plusieurs des langues officielles de l'État membre concerné. À cet égard, une telle mesure en tant qu'elle instaure une obligation d'investir dans des films cinématographiques et de télévision dont la langue originale est l'une des langues officielles de cet État membre apparaît propre à garantir la réalisation d'un tel objectif.

De même, il n'apparaît pas qu'une telle mesure aille au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ledit objectif. En effet, cette mesure ne concerne, tout d'abord, que 3 % des recettes d’exploitation des opérateurs, un tel pourcentage ne pouvant pas être considéré comme disproportionné par rapport à l'objectif poursuivi. Par ailleurs, une telle mesure ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi, du seul fait qu'elle ne prévoit pas de critères permettant de classer les oeuvres concernées en tant que "produits culturels". La langue et la culture étant intrinsèquement liées, il ne saurait être considéré que l'objectif, poursuivi par un État membre, consistant à défendre et à promouvoir l'une ou plusieurs de ses langues officielles doit nécessairement être assorti d’autres critères culturels pour qu’il puisse justifier une restriction à l'une des libertés fondamentales garanties par le traité. Une telle mesure ne va pas non plus au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi, du seul fait que les bénéficiaires du financement concerné sont majoritairement des entreprises productrices de cinéma établies dans cet État membre. Le fait que le critère sur lequel se fonde ladite mesure, à savoir le critère linguistique, puisse constituer un avantage pour des entreprises productrices de cinéma, qui travaillent dans la langue visée par ledit critère et qui, dès lors, peuvent, en pratique, être majoritairement originaires de l'État membre dont cette langue constitue une langue officielle, apparaît comme étant inhérent à l'objectif poursuivi. Une telle situation ne saurait constituer, en elle-même, la preuve du caractère disproportionné de ladite mesure, sous peine de vider de son sens la reconnaissance, en tant que raison impérieuse d’intérêt général, de l'objectif, poursuivi par un État membre, de défendre et de promouvoir l'une ou plusieurs de ses langues officielles.

Enfin, s'agissant de l'article 12 CE, cette disposition n'a vocation à s’appliquer de façon autonome que dans des situations régies par le droit communautaire pour lesquelles le traité ne prévoit pas de règle spécifique de non-discrimination. Or, le principe de non-discrimination a été mis en oeuvre, dans les domaines de la libre circulation des travailleurs, du droit d'établissement, de la libre prestation des services et de la libre circulation des capitaux, respectivement, par les articles 39, paragraphe 2, CE, 43 CE, 49 CE et 56 CE. Dès lors qu'il résulte de ce qui précède que la mesure en cause n'apparaît pas contraire auxdites dispositions du traité, elle ne saurait non plus être considérée comme étant contraire à l'article 12 CE.

Arrêt du 5 mars 2009, UTECA (C-222/07, Rec._p._I-1407) (cf. points 20, 24, 27, 29-34, 36-40, disp. 1)

213. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale instaurant un régime d'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles - Justification par des raisons d'intérêt général - Équilibre financier d'une branche de la sécurité sociale - Respect du principe de proportionnalité - Vérification incombant à la juridiction nationale

Une réglementation nationale instaurant un régime d'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, qui poursuit un objectif social, opère selon un système mettant en oeuvre le principe de solidarité et est placé sous le contrôle de l'État, est susceptible de constituer une restriction à la libre prestation des services en ce qu'elle gêne ou rend moins attrayant, voire empêche, directement ou indirectement, l'exercice de cette liberté par des prestataires de service d'assurance établis dans d'autres États membres qui souhaitent proposer des contrats d'assurance couvrant de tels risques dans l'État membre concerné, et par des entreprises relevant dudit régime qui souhaitent s'adresser à de tels prestataires. Toutefois, une telle réglementation répond à des raisons impérieuses d'intérêt général visant à assurer l'équilibre financier d'une branche de la sécurité sociale, car l'obligation d'affiliation, en ce qu'elle assure le regroupement de toutes les entreprises relevant du régime concerné au sein de communautés de risques, permet la mise en oeuvre du principe de solidarité. Dans ces conditions, les articles 49 CE et 50 CE ne s'opposent pas à une telle réglementation, pour autant que ce régime n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif consistant à assurer l'équilibre financier d'une branche de la sécurité sociale, ce qu'il appartient à la juridiction nationale de vérifier.

À cet égard, le fait que ce régime offre une couverture minimale, de sorte que, en dépit de l'obligation d'affiliation qu'il comporte, il est loisible aux entreprises qui en relèvent de compléter cette couverture en souscrivant des assurances supplémentaires, à supposer que celles-ci soient disponibles sur le marché, constitue un facteur militant en faveur de la proportionnalité.

Arrêt du 5 mars 2009, Kattner Stahlbau (C-350/07, Rec._p._I-1513) (cf. points 77, 82-89, disp. 2)

214. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 92/49 - Liberté tarifaire - Réglementation nationale instaurant un cadre technique pour le calcul des primes des entreprises d'assurances - Admissibilité

Les articles 6, 29 et 39 de la directive 92/49, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357 (troisième directive "assurance non-vie"), interdisent à un État membre d'introduire un régime d'approbation préalable ou de communication systématique des tarifs qu'une entreprise d'assurance se propose d'utiliser sur son territoire dans ses relations avec les preneurs d'assurance. Tel n'est pas le cas d'une réglementation nationale qui,

- premièrement, n'introduit pas un système d'approbation préalable ou de communication systématique des tarifs,

- deuxièmement, n'impose pas aux entreprises d'assurances d’orienter leur tarifs sur la moyenne du marché mais, bien au contraire, prévoit que les entreprises d'assurances calculent leurs tarifs en conformité avec leurs propres bases techniques, tout en précisant que, lorsque de telles bases ne sont pas disponibles, les entreprises d'assurances peuvent avoir recours à des relevés statistiques du marché, et,

- troisièmement, dans la mesure où elle est susceptible d'avoir des répercussions sur les tarifs en ce qu'ils dessinent un cadre technique dans lequel les entreprises d'assurances doivent calculer leurs primes, introduit une limitation de la liberté tarifaire qui n'est pas interdite par la directive 92/49. En effet, une harmonisation complète du domaine tarifaire en matière d'assurance non-vie excluant toute mesure nationale susceptible d'avoir des répercussions sur les tarifs ne saurait être présumée en l'absence d'une volonté clairement exprimée en ce sens par le législateur communautaire.

Arrêt du 28 avril 2009, Commission / Italie (C-518/06, Rec._p._I-3491) (cf. points 100, 103-106)

215. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Assurance directe autre que sur la vie - Directive 92/49 - Contrôle exercé par l'État membre d'accueil sur les modalités du calcul des primes d'assurance, appliquées par des entreprises d'assurances établies dans d'autres États membres, et application de sanctions - Admissibilité

L'article 9 de la directive 92/49, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239 et 88/357 (troisième directive "assurance non-vie"), définit de manière non exhaustive le champ d'application du principe du contrôle par l'État membre d’origine, en énonçant que la surveillance financière comprend "notamment" la vérification de l'état de solvabilité et de la constitution de provisions techniques. Néanmoins, cette disposition ne saurait être interprétée comme signifiant dans l'esprit du législateur communautaire que l'État membre d'origine a une compétence exclusive de contrôle s'étendant aux comportements commerciaux des entreprises d'assurances. Il s'ensuit que cette disposition n'exclut pas la possibilité de contrôles exercés par l'État membre d'accueil sur les modalités suivant lesquelles les entreprises d'assurances opérant dans cet État en vertu de la liberté d'établissement ou de la libre prestation des services calculent leurs primes d'assurance, ainsi que l'application de sanctions.

Arrêt du 28 avril 2009, Commission / Italie (C-518/06, Rec._p._I-3491) (cf. points 109, 116-117)

216. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale imposant une obligation de contracter aux entreprises d'assurances dans le domaine de la responsabilité civile automobile - Justification - Protection sociale des victimes d'accidents de la route - Admissibilité

L'obligation, imposée par la réglementation d'un État membre, de souscrire une assurance responsabilité civile automobile pour toutes les entreprises d’assurances, y compris celles dont le siège principal est situé dans un autre État membre, mais qui exercent leurs activités dans le premier État membre, restreint la liberté d'établissement et la libre prestation des services conscacrées par les articles 43 CE et 49 CE. En effet, une telle mesure affecte l'accès au marché des opérateurs concernés, en particulier lorsqu'elle soumet les entreprises d'assurances non seulement à l'obligation de prendre en charge tous les risques qui leur sont proposés, mais également à des exigences de modération tarifaire. En ce qu'elle entraîne des adaptations et des coûts d'envergure pour lesdites entreprises, l'obligation de contracter rend moins attrayant l'accès au marché de cet État membre et, en cas d'accès à ce marché, réduit la capacité des entreprises concernées de livrer d'emblée une concurrence efficace aux entreprises qui y sont traditionnellement implantées.

Toutefois, cette obligation est propre à garantir la réalisation de l'objectif qu'elle poursuit et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l'atteindre. Ainsi, le but même de l'assurance obligatoire responsabilité civile automobile est de garantir l'indemnisation des victimes d'accidents de la route. Cet objectif de protection sociale, qui s'analyse essentiellement comme une garantie d'indemnisation adéquate desdites victimes, peut être pris en compte en tant que raison impérieuse d'intérêt général. D'autre part, il n'est pas indispensable, au regard du critère de proportionnalité, que la mesure restrictive édictée par les autorités d'un État membre corresponde à une conception partagée par l'ensemble des États membres en ce qui concerne les modalités de protection de l'intérêt légitime. Dès lors, le fait que certains États membres ont choisi d’établir un régime différent pour garantir que tout propriétaire de véhicule puisse conclure à un tarif non excessif un contrat d'assurance responsabilité civile automobile n'est pas de nature à démontrer que l'obligation de contracter va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis. Enfin, au regard du critère de proportionnalité, l'obligation de contracter n'empêche pas les entreprises d'assurances de calculer un tarif plus élevé pour un preneur d'assurance domicilié dans une zone caractérisée par un nombre important de sinistres que pour un preneur d'assurance domicilié dans une zone à risque moins élevé.

Arrêt du 28 avril 2009, Commission / Italie (C-518/06, Rec._p._I-3491) (cf. points 67, 70-71, 74-75, 83, 85, 91, 93)

217. Libre prestation des services - Restrictions



Arrêt du 11 juin 2009, Commission / Autriche (C-564/07, Rec._p._I-100*) (cf. points 31, 32, 35-37, 47-53, 55 et disp.)

218. Libre circulation des personnes - Liberté d'établissement - Libre prestation des services - Dispositions du traité - Champ d'application - Action n'émanant pas des autorités publiques - Règlement de l'ordre des médecins imposant à ses membres établis sur le territoire national l'obligation d'ouvrir un compte bancaire auprès d'une banque déterminée - Inclusion



Arrêt du 25 juin 2009, Commission / Autriche (C-356/08, Rec._p._I-108*) (cf. point 37)

219. Libre prestation des services - Restrictions - Règlement de l'ordre des médecins imposant à ses membres établis sur le territoire national l'obligation d'ouvrir un compte bancaire auprès d'une banque déterminée - Inadmissibilité - Justification - Absence - Violation du principe de proportionnalité



Arrêt du 25 juin 2009, Commission / Autriche (C-356/08, Rec._p._I-108*) (cf. points 40-49, 51, disp. 1)

220. Libre prestation des services - Restrictions - Réglementation nationale interdisant à des opérateurs privés établis dans d'autres États membres de proposer des jeux de hasard par l'Internet sur le territoire de l'État membre concerné - Justification - Lutte contre la fraude et la criminalité

L’article 49 CE ne s’oppose pas à une réglementation d’un État membre qui interdit à des opérateurs privés établis dans d’autres États membres, où ils fournissent légalement des services analogues, de proposer des jeux de hasard par l’Internet sur le territoire dudit État membre.

Certes, une telle réglementation donne lieu à une restriction à la libre prestation des services garantie par l’article 49 CE, en imposant en outre une restriction à la liberté des résidents de l’État membre concerné de bénéficier, par l’Internet, de services offerts dans d’autres États membres.

Toutefois, la restriction en cause peut, eu égard aux particularités liées à l’offre de jeux de hasard par l’Internet, être considérée comme justifiée par l’objectif de lutte contre la fraude et la criminalité. En effet, l’octroi de droits exclusifs pour l’exploitation des jeux de hasard par l’Internet à un opérateur unique qui est soumis à un contrôle étroit des pouvoirs publics peut permettre de canaliser l’exploitation de ces jeux dans un circuit contrôlé et être considéré comme apte à protéger les consommateurs contre des fraudes commises par des opérateurs.

S’agissant de l’examen du caractère nécessaire du régime en cause, le secteur des jeux de hasard offerts par l’Internet ne fait pas l’objet d’une harmonisation communautaire. Un État membre est donc en droit de considérer que le seul fait qu’un opérateur privé propose légalement des services relevant de ce secteur par l’Internet dans un autre État membre, où il est établi et où il est en principe déjà soumis à des conditions légales et à des contrôles de la part des autorités compétentes de ce dernier État, ne saurait être considéré comme une garantie suffisante de protection des consommateurs nationaux contre les risques de fraude et de criminalité, eu égard aux difficultés susceptibles d’être rencontrées, dans un tel contexte, par les autorités de l’État membre d’établissement pour évaluer les qualités et la probité professionnelles des opérateurs. En outre, en raison du manque de contact direct entre le consommateur et l’opérateur, les jeux de hasard accessibles par l’Internet comportent des risques de nature différente et d’une importance accrue par rapport aux marchés traditionnels de tels jeux en ce qui concerne d’éventuelles fraudes commises par les opérateurs contre les consommateurs. Par ailleurs, ne saurait être exclue la possibilité qu’un opérateur qui parraine certaines des compétitions sportives sur lesquelles il prend des paris ainsi que certaines des équipes participant à ces compétitions se trouve dans une situation qui lui permette d’influencer directement ou indirectement le résultat de celles-ci et ainsi d’augmenter ses profits.

Arrêt du 8 septembre 2009, Liga Portuguesa de Futebol Profissional et Bwin International (C-42/07, Rec._p._I-7633) (cf. points 53-54, 67-73 et disp.)

221. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Exonération des gains provenant des loteries, des jeux et des paris organisés par certains organismes publics et entités exerçant des activités à caractère social ou d'assistance à but non lucratif - Exonération limitée aux gains provenant des loteries, des jeux et des paris organisés par de tels organismes et entités établis sur le territoire national - Inadmissibilité - Justification - Absence

Manque aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 49 CE et 36 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) un État membre maintenant en vigueur une législation fiscale qui exonère les gains tirés d’une participation à des loteries, à des jeux et à des paris organisés en cet État membre par certains organismes publics et entités établis dans cet État membre et exerçant des activités à caractère social ou d’assistance à but non lucratif, sans que cette même exonération soit accordée aux gains provenant de loteries, de jeux et de paris organisés par les organismes et les entités établis dans un autre État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen et exerçant des activités de même type.

En effet, les organismes publics et les entités exerçant des activités à caractère social ou d’assistance à but non lucratif établis dans des États membres autres que l'État membre concerné et poursuivant les mêmes objectifs que ceux poursuivis par les organismes et entités dudit État membre se trouvent dans une situation comparable à celle de ces derniers.

Dans ces conditions, dès lors qu’elle a pour effet de traiter de manière plus favorable les gains distribués par les organismes et entités établis sur le territoire national, une telle exonération fiscale constitue une restriction discriminatoire à la libre prestation des services au détriment des organismes publics et des entités exerçant des activités à caractère social ou d’assistance à but non lucratif établis dans un autre État membre et poursuivant les mêmes objectifs que les organismes et entités du premier État membre.

Dans la mesure où elle a un caractère discriminatoire, cette restriction ne saurait être justifiée qu'à condition que les objectifs poursuivis par le législateur national relèvent des motifs d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique au sens de l'article 46, paragraphe 1, CE et qu'elle soit conforme au principe de proportionnalité.

À cet égard, elle n'est pas justifiée par un objectif de prévention de blanchiment de capitaux et de lutte contre la fraude fiscale, dès lors que les autorités d’un État membre ne sauraient valablement présumer, de manière générale et sans distinction, que les organismes et entités établis dans un autre État membre se livrent à des activités criminelles. De surcroît, le fait d’exclure de manière générale du bénéfice d’une exonération fiscale ces organismes et ces entités apparaît comme disproportionné, car allant au-delà de ce qui est nécessaire pour combattre la criminalité. En ce qui concerne la lutte contre l’addiction au jeu, s’il ne saurait être exclu que cet objectif puisse être considéré comme relevant de la notion de protection de la santé publique, l’exonération des gains est, toutefois, susceptible d’encourager les consommateurs à participer aux loteries, aux jeux de hasard et aux paris pouvant en bénéficier et n’est donc pas propre à garantir de manière cohérente la réalisation de l’objectif prétendument poursuivi. Quant au financement des infrastructures et des projets d'utilité publique grâce aux revenus perçus par les organismes visés par l'exonération, il s'agit de motifs économiques qui ne font pas partie non plus des motifs de l'article 46 CE qui pourraient justifier une restriction de la libre prestation de services garantie par le traité. Il en va de même de la protection de l'ordre social et de la protection des consommateurs, qui constituent des raisons impérieuses d'intérêt général et ne peuvent donc justifier des restrictions revêtant un caractère discriminatoire.

Il s’ensuit que cette discrimination n’est pas justifiée au sens de l’article 46, paragraphe 1, CE.

Dans la mesure où les stipulations de l’article 36 de l’accord EEE revêtent la même portée juridique que celle des dispositions, identiques en substance, de l’article 49 CE, les considérations qui précèdent sont transposables mutatis mutandis audit article.

Arrêt du 6 octobre 2009, Commission / Espagne (C-153/08, Rec._p._I-9735) (cf. points 33-34, 38-41, 43, 45,47-49 et disp.)

222. Libre prestation des services - Restrictions - Législation fiscale - Taxe régionale sur l'escale touristique des aéronefs et des unités de plaisance frappant uniquement les personnes ayant leur domicile fiscal en dehors du territoire régional - Inadmissibilité - Justification - Absence

L'article 49 CE doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une législation fiscale d'une autorité régionale qui institue une taxe régionale sur l'escale touristique des aéronefs destinés au transport privé de personnes ainsi que des unités de plaisance frappant uniquement les personnes physiques et morales ayant leur domicile fiscal en dehors du territoire régional, dès lors que l'application de cette législation fiscale a pour conséquence de rendre, pour tous les assujettis à la taxe ayant leur domicile fiscal en dehors du territoire régional et établis dans d'autres États membres, les services concernés plus onéreux que ceux fournis pour les exploitants établis sur ce territoire.

Certes, en matière de fiscalité directe, la situation des résidents et celle des non-résidents d'un État membre donné ne sont, en règle générale, pas comparables, car elles présentent des différences objectives du point de vue tant de la source du revenu que de la capacité contributive personnelle du contribuable ou de la prise en compte de la situation personnelle et familiale de ce dernier. Cependant, aux fins de la comparaison de la situation des contribuables, il importe de prendre en considération les caractéristiques spécifiques de la taxe en cause. Dès lors, une différence de traitement entre les résidents et les non-résidents constitue une restriction à la libre circulation interdite par l'article 49 CE lorsqu'il n'existe aucune différence de situation objective, par rapport à l'imposition en cause, de nature à fonder la différence de traitement entre les diverses catégories de contribuables.

Une telle restriction ne peut pas être justifiée par des raisons tirées de la protection de l'environnement si l'application de la taxe régionale repose sur une différenciation entre les personnes sans rapport avec cet objectif environnemental. Elle ne peut pas non plus être justifiée par des raisons tirées de la cohérence du système fiscal de la région concernée dans la mesure où le non-assujettissement à la taxe régionale d'escale des résidents ne saurait être considéré comme une compensation des autres impôts auxquels ces derniers sont soumis, dès lors que cette taxe ne poursuit pas les mêmes objectifs que les impôts acquittés par les assujettis résidant dans ladite région.

Arrêt du 17 novembre 2009, Presidente del Consiglio dei Ministri (C-169/08, Rec._p._I-10821) (cf. points 31, 34-35, 45, 48-50, disp. 1)