1. Fonctionnaires - Concours - Jury - Secret des travaux - Portée

Le principe du secret des travaux des jurys de concours est justifié par des considérations impératives d'intérêt public. En effet, ce principe a été institué en vue de garantir l'indépendance des jurys de concours et l'objectivité de leurs travaux, en les mettant à l'abri de toutes ingérences et pressions extérieures, qu'elles proviennent de l'administration communautaire elle-même, des candidats intéressés ou de tiers.

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que les dispositions du code de conduite concernant l'accès du public aux documents du Conseil et de la Commission, qui prévoient le principe du plus grand accès possible du public aux documents, et l'article 1er de la décision 94/90, relative à l'accès du public aux documents de la Commission, qui applique le principe pour ce qui concerne la Commission, ne sauraient primer sur la règle du secret des travaux du jury prévue à l'article 6 de l'annexe III du statut. En effet, en vertu du principe de la hiérarchie des normes, ni le code de conduite ni la décision 94/90 ne peut modifier les effets d'une disposition du statut, dès lors que leur adoption n'a pas suivi la procédure prévue pour la révision des dispositions du statut par l'article 24, paragraphe 1, deuxième alinéa, du traité instituant un Conseil unique et une Commission unique et l'article 10 du statut lui-même. Par ailleurs, les considérations susvisées s'opposent à ce que ce secret soit levé après l'achèvement des travaux du jury.

Arrêt du 7 février 2001, Bonaiti Brighina / Commission (T-118/99, RecFP_p._II-97) (cf. points 46-47)

2. Fonctionnaires - Concours - Décision de non-inscription sur la liste d'aptitude - Obligation de motivation - Principe de transparence - Portée au regard du secret des travaux du jury

L'obligation de motivation des décisions prises par un jury de concours doit être conciliée avec le respect du secret qui entoure les travaux du jury en vertu de l'article 6 de l'annexe III du statut.

Or, même à admettre que, dans des situations particulières, les fonctionnaires et agents temporaires puissent, comme tout autre citoyen européen, se prévaloir de l'article 255 CE ou du principe de transparence affirmé dans le code de conduite concernant l'accès du public aux documents du Conseil et de la Commission, pour avoir accès aux documents de l'administration, ledit article 6 qui vise de manière spécifique l'accès du candidat aux travaux du jury s'oppose à la divulgation des attitudes prises par les membres individuels des jurys et à la révélation de tous éléments ayant trait à des appréciations de caractère personnel ou comparatif concernant les candidats.

Dès lors, étant donné que, au stade de l'examen des aptitudes des candidats, les travaux du jury sont avant tout de nature comparative et sont donc secrets, la communication des notes obtenues par le candidat concerné aux différentes épreuves doit être considérée comme une motivation suffisante de la décision de ne pas l'inscrire sur la liste d'aptitude. En effet, une telle motivation ne lèse pas les droits des candidats évincés et permet au juge communautaire d'effectuer un contrôle juridictionnel approprié pour ce type de litige.

Arrêt du 23 janvier 2003, Angioli / Commission (T-53/00, RecFP_p._II-73) (cf. points 68-70, 84)

3. Fonctionnaires - Concours - Jury - Respect du secret des travaux - Champ d'application - Critères de correction - Inclusion - Communication néanmoins envisageable soit au titre d'une pratique adoptée par l'institution en cause soit au titre des mesures adoptées pour assurer l'accès du public aux documents

Les critères de correction adoptés par le jury d'un concours préalablement aux épreuves font partie intégrante des appréciations de nature comparative auxquelles se livre le jury sur les mérites respectifs des candidats et, dès lors, sont couverts par le secret des délibérations au même titre que les appréciations du jury. Cette conclusion n'implique pas que les candidats à un concours qui en font la demande ne puissent, le cas échéant, obtenir la communication des critères généraux de correction des épreuves ainsi que leurs copies corrigées, en vertu d'une pratique visant à accorder l'accès à de tels documents, adoptée par l'institution qui organise le concours dans le but de concilier les exigences de transparence des procédures de recrutement avec la règle du secret des travaux des jurys, inscrite à l'article 6 de l'annexe III du statut.

De même, il n'est pas exclu qu'une obligation en ce sens, lorsque la divulgation de tels documents s'avère compatible avec le respect de la règle du secret des travaux des jurys et avec les exigences impératives d'ordre public qui la sous-tendent, puisse peser sur les institutions communautaires non pas au titre de l'article 25 du statut et de leur devoir de motivation mais en application des actes visant à donner exécution, conformément à l'article 255, paragraphe 1, CE, au droit d'accès du public aux documents.

Arrêt du 25 juin 2003, Pyres / Commission (T-72/01, RecFP_p._II-861) (cf. points 69-71)

4. Fonctionnaires - Concours - Appréciation des mérites des candidats - Droit d'accès du public aux documents - Exclusion en raison du secret des travaux du jury

Comme toute norme de caractère général, le droit d'accès aux documents du Conseil, prévu par l'article 255, paragraphe 1, CE et par le règlement nº 1049/2001 relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, peut être limité ou exclu - selon le principe suivant lequel la règle spéciale déroge à la règle générale (lex specialis derogat legi generali) - lorsqu'il existe des normes spéciales qui régissent des matières spécifiques.

À cet égard, l'article 6 de l'annexe III du statut, adopté sur la base de l'article 283 CE et visant de manière spécifique la procédure de concours, dispose que les travaux du jury sont secrets. Ce secret a été institué en vue de garantir l'indépendance des jurys de concours et l'objectivité de leurs travaux, en les mettant à l'abri de toutes ingérences ou pressions extérieures, qu'elles proviennent de l'administration communautaire elle-même, des candidats intéressés ou de tiers. Le respect de ce secret s'oppose dès lors tant à la divulgation des attitudes prises par les membres individuels des jurys qu'à la révélation de tous les éléments ayant trait à des appréciations de caractère personnel ou comparatif concernant les candidats.

Partant, un candidat à un concours ne peut se prévaloir de l'article 255, paragraphe 1, CE et du règlement nº 1049/2001 pour mettre en cause l'applicabilité de l'article 6 de l'annexe III du statut.

Arrêt du 5 avril 2005, Hendrickx / Conseil (T-376/03, RecFP_p._II-379) (cf. points 55-57)

5. Fonctionnaires - Concours - Appréciation des mérites des candidats - Droit d'accès du public aux documents - Exclusion en raison du secret des travaux du jury - Acceptation antérieure par le Conseil d'une recommandation du Médiateur européen visant la transmission d'une copie corrigée d'une épreuve - Absence d'engagement du Conseil dans d'autres cas similaires

Comme toute norme de caractère général, le droit d'accès aux documents du Conseil, prévu par l'article 255, paragraphe 1, CE et par le règlement nº 1049/2001 relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, peut être limité ou exclu - selon le principe suivant lequel la règle spéciale déroge à la règle générale (lex specialis derogat legi generali) - lorsqu'il existe des normes spéciales qui régissent des matières spécifiques.

À cet égard, l'article 6 de l'annexe III du statut, adopté sur la base de l'article 283 CE et visant de manière spécifique la procédure de concours, dispose que les travaux du jury sont secrets. Ce secret a été institué en vue de garantir l'indépendance des jurys de concours et l'objectivité de leurs travaux, en les mettant à l'abri de toutes ingérences ou pressions extérieures, qu'elles proviennent de l'administration communautaire elle-même, des candidats intéressés ou de tiers. Le respect de ce secret s'oppose dès lors tant à la divulgation des attitudes prises par les membres individuels des jurys qu'à la révélation de tous les éléments ayant trait à des appréciations de caractère personnel ou comparatif concernant les candidats.

Partant, un candidat à un concours ne peut valablement se fonder sur la notion de transparence pour mettre en cause l'applicabilité de l'article 6 de l'annexe III du statut.

Cette conclusion ne saurait être remise en cause du fait de l'acceptation par le Conseil d'une recommandation du Médiateur européen visant la transmission d'une copie corrigée à un plaignant, le Conseil ne s'étant aucunement engagé par une telle acceptation à une divulgation future systématique des épreuves corrigées, et la portée de cette décision du Conseil étant limitée au cas d'espèce.

Arrêt du 14 juillet 2005, Le Voci / Conseil (T-371/03, RecFP_p._II-957) (cf. points 122-126)

6. Concurrence - Procédure administrative - Secret professionnel - Détermination des informations couvertes par le secret professionnel - Mise en balance de l'intérêt général à la transparence de l'action communautaire et des intérêts légitimes s'opposant à la divulgation

Ni l'article 287 CE ni le règlement nº 17 n'indiquent explicitement quelles informations, en dehors des secrets d'affaires, sont couvertes par le secret professionnel. À cet égard, on ne saurait déduire de l'article 20, paragraphe 2, du règlement nº 17 que tel serait le cas de toutes les informations recueillies en application dudit règlement, à l'exception de celles dont la publication est obligatoire en vertu de son article 21. En effet, à l'instar de l'article 287 CE, l'article 20, paragraphe 2, du règlement nº 17, qui met en oeuvre cette disposition du traité dans le domaine des règles de concurrence applicables aux entreprises, s'oppose uniquement à la divulgation des informations "qui, par leur nature, sont couvertes par le secret professionnel".

Pour que des informations tombent, par leur nature, sous le coup du secret professionnel, il est nécessaire, tout d'abord, qu'elles ne soient connues que par un nombre restreint de personnes. Ensuite, il doit s'agir d'informations dont la divulgation est susceptible de causer un préjudice sérieux à la personne qui les a fournies ou à des tiers. Enfin, il est nécessaire que les intérêts susceptibles d'être lésés par la divulgation de l'information soient objectivement dignes de protection. L'appréciation du caractère confidentiel d'une information nécessite ainsi une mise en balance entre les intérêts légitimes qui s'opposent à sa divulgation et l'intérêt général qui veut que les activités des institutions communautaires se déroulent dans le plus grand respect possible du principe d'ouverture.

Une mise en balance de l'intérêt général à la transparence de l'action communautaire et des intérêts susceptibles de s'y opposer a été effectuée par le législateur communautaire dans différents actes de droit dérivé, notamment par le règlement nº 45/2001, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données, et par le règlement nº 1049/2001, relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission. S'il est vrai que la notion de "secret professionnel" relève du droit primaire dans la mesure où elle figure à l'article 287 CE et que le droit dérivé ne peut en aucun cas modifier les dispositions du traité, l'interprétation du traité faite par le législateur communautaire à propos d'une question qui n'y est pas expressément réglée constitue néanmoins un indice important de la façon dont une disposition doit être comprise.

Il s'ensuit que, dans la mesure où de telles dispositions de droit dérivé interdisent la divulgation d'informations au public ou excluent l'accès du public à des documents les contenant, ces informations doivent être considérées comme couvertes par le secret professionnel. En revanche, dans la mesure où le public a un droit d'accès à des documents contenant certaines informations, ces informations ne sauraient être considérées comme étant couvertes, par leur nature, par le secret professionnel.

Arrêt du 30 mai 2006, Bank Austria Creditanstalt / Commission (T-198/03, Rec._p._II-1429) (cf. points 70-72, 74)

7. Concurrence - Règles communautaires - Infractions - Décision constatant une infraction ou infligeant une amende - Obligation de publication - Limites - Informations relevant du secret des affaires et protégées par des règles de droit dérivé relatives au traitement des données à caractère personnel et à l'accès du public aux documents

S'agissant de la publication des décisions de la Commission prises en application du règlement nº 17, l'article 20 de ce règlement interdit, outre la divulgation de secrets d'affaires, notamment la publication d'informations qui relèvent des exceptions au droit d'accès aux documents prévues à l'article 4 du règlement nº 1049/2001, relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, ou qui sont protégées en vertu d'autres règles de droit dérivé, telles que le règlement nº 45/2001, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions et organes communautaires et à la libre circulation de ces données. En revanche, il ne s'oppose pas à la publication d'informations dont le public a le droit de prendre connaissance par le biais du droit d'accès aux documents.

Arrêt du 30 mai 2006, Bank Austria Creditanstalt / Commission (T-198/03, Rec._p._II-1429) (cf. point 75)

8. Communautés européennes - Institutions - Droit d'accès du public aux documents - Règlement nº 1049/2001 - Règles d'accès et exceptions - Application générale - Entreprise partie à une concentration ne disposant pas du droit d'accès aux documents internes du dossier administratif en application du règlement nº 802/2004 - Absence d'incidence

En application de l'article 2, paragraphe 1, du règlement nº 1049/2001, relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, le droit d'accès aux documents de la Commission est très largement ouvert, puisqu'il bénéficie à tout citoyen de l’Union et à toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un État membre sans que d'autres conditions soient précisées. Il ressort également de l'article 2, paragraphe 3, dudit règlement que les dispositions relatives à l'accès du public aux documents de la Commission s'appliquent à tous les documents détenus par cette institution, c'est-à-dire tous les documents établis ou reçus par elle et en sa possession, dans tous les domaines d'activité de l'Union européenne.

Par ailleurs, l'article 4, paragraphe 3, second alinéa, du règlement nº 1049/2001 définit expressément les conditions dans lesquelles l'accès à un document contenant des avis destinés à l'utilisation interne dans le cadre de délibérations et de consultations préliminaires au sein de l'institution concernée peut être refusé, même après que la décision a été prise, en indiquant que dans un tel cas la divulgation du document doit porter gravement atteinte au processus décisionnel de l'institution concernée. Cette disposition est d'application générale, et ce quels que soient les domaines d'activités de la Commission ou les règles applicables aux procédures qui y sont relatives.

En conséquence, le fait qu'une entreprise partie à une concentration ne dispose pas du droit d'accès aux documents internes du dossier administratif en application de l’article 17, paragraphe 3, du règlement nº 802/2004, concernant la mise en oeuvre du règlement nº 139/2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises, ne permet pas d'exclure que toute personne, quelle qu'elle soit, dispose du droit d'accès à de tels documents sur la base des principes consacrés dans le règlement nº 1049/2001.

Arrêt du 9 septembre 2008, MyTravel / Commission (T-403/05, Rec._p._II-2027) (cf. points 87-89)