1. Responsabilité non contractuelle - Conditions - Procédures de passation des marchés publics de fournitures - Illégalité du comportement reproché - Préjudice - Lien de causalité - Absence
L'engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté suppose que la partie requérante prouve l'illégalité du comportement reproché à l'institution concernée, la réalité du dommage et l'existence d'un lien de causalité entre ce comportement et le préjudice invoqué. Dès lors que l'une de ces conditions n'est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres conditions de ladite responsabilité.
S'agissant de la première condition, relative à l'existence d'un comportement illégal, constitue une faute grave le comportement de la Commission, au cours d'une procédure d'appel d'offres publié dans le cadre de la directive 93/36 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures, niant de façon réitérée l'existence de documents qui existaient en réalité et refusant de communiquer ces documents ainsi que des extraits de l'offre de l'attributaire lorsqu'à la suite de l'introduction d'un recours devant le Tribunal elle les a communiqués de sa propre initiative et sans la moindre réserve. Toutefois, même s'il est vrai que la Commission a commis, au cours de ladite procédure, une série de fautes graves, qui, individuellement ou à tout le moins prises ensemble, sont à considérer comme remplissant la première des trois conditions nécessaires pour engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté, le soumissionnaire écarté n'a pas démontré que la Commission aurait dû lui attribuer le marché.
2. Responsabilité non contractuelle - Conditions - Rupture illégale, par le pouvoir adjudicateur, des négociations précontractuelles dans le cadre d'une procédure négociée d'un marché public - Préjudice consistant dans la perte d'une chance de contracter et de réaliser les gains contractuels - Lien de causalité - Absence
Dans le cadre d'une procédure négociée de passation d'un marché public communautaire, la rupture unilatérale des pourparlers contractuels relève du pouvoir de l'autorité adjudicatrice de ne pas conclure le contrat de bail projeté en vertu des dispositions de l'article 101, premier alinéa, du règlement nº 1605/2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes. En conséquence, l'opérateur économique n'acquiert jamais aucun droit à la conclusion de ce contrat. Par ailleurs, en l'absence d'accord ferme et définitif entre les parties, le soumissionnaire ne peut acquérir aucun droit en vertu du contrat ni, par conséquent, aucun droit à obtenir le gain contractuel attendu. Il en résulte que le comportement illégal adopté par l'institution, qui procède des seules circonstances qui ont entouré l'exercice par celle-ci de son droit de renoncer au marché et de rompre unilatéralement les pourparlers précontractuels, ne peut être regardé comme la cause du préjudice consistant dans la perte d'une chance de contracter et de réaliser les gains que permettait d'espérer la conclusion du contrat.
Arrêt du 8 mai 2007, Citymo / Commission (T-271/04, Rec._p._II-1375) (cf. points 161-162)
3. Responsabilité non contractuelle - Conditions - Illicéité - Préjudice - Lien de causalité - Absence de l'une des conditions - Rejet du recours en indemnité dans son ensemble
L’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté, au sens de l’article 288, deuxième alinéa, CE, est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le dommage invoqué.
Dans la mesure où ces trois conditions d’engagement de la responsabilité sont cumulatives, le fait que l’une d’entre elles fait défaut suffit pour rejeter un recours en indemnité.
À cet égard, et concernant une décision de l’Agence européenne pour la reconstruction (AER) portant annulation d'un appel d'offres pour un marché de travaux, le seul fait qu'un laps de plus de six mois se soit écoulé entre l’envoi de la dernière demande d’éclaircissements aux soumissionnaires et la communication de la décision d’annuler l'appel d’offres ne saurait être qualifié de comportement illégal de la part de l'AER. D'ailleurs, il ne peut exister aucun lien de causalité entre le temps pris par l’AER pour prendre et communiquer la décision d’annulation de l'appel d’offres et les frais exposés par un soumissionnaire pour l’élaboration de son offre.
Arrêt du 8 octobre 2008, Sogelma / AER (T-411/06, Rec._p._II-2771) (cf. points 146-147, 149-150)
4. Responsabilité non contractuelle - Comportement illégal des institutions - Décision de la Commission modifiant une condition d'adjudication d'un marché - Décision ayant permis le comportement d'un adjudicataire provoquant le préjudice allégué - Absence de preuve d'un lien direct entre ledit préjudice et ladite décision - Absence de lien de causalité