1. Acte d'une institution - Validité - Suspension - Conditions

L'administration ne peut suspendre la validité d'un acte émanant d'elle que par une déclaration faisant apparaître sa volonté d'une manière claire et non équivoque.

Arrêt du 13 juillet 1972, Heinemann / Commission (79-71, Rec._p._00579)

2. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Conditions

Le retrait d'un acte illégal est permis s'il intervient dans un délai raisonnable et si l'institution dont il émane tient suffisamment compte de la mesure dans laquelle le destinataire de l'acte a éventuellement pu se fier à la légalité de celui-ci. Si ces conditions ne sont pas respectées, le retrait est attentatoire aux principes de la sécurité juridique et de la protection de la confiance légitime et doit être annulé.

Arrêt du 26 février 1987, Consorzio Cooperative d'Abruzzo / Commission (15/85, Rec._p._01005) (cf. al. 12, 17)

Le respect du principe de légalité autorise le retrait, avec effet rétroactif, des décisions illégales adoptées par les autorités communautaires, même lorsqu'elles ont pu créer des droits subjectifs dans le chef de leurs destinaires, à la condition toutefois que ce retrait intervienne dans un délai raisonnable, de manière à ce que soit préservé l'intérêt particulier du destinataire de la décision retirée au respect du principe de la sécurité juridique, et qu'il soit tenu compte de la mesure dans laquelle le destinataire de la décision retirée a pu avoir une confiance légitime en sa légalité.

Arrêt du 26 janvier 1995, de Compte / Parlement (T-90/91 et T-62/92, RecFP_p._II-1) (cf. points 37, 51, 59)

S'il convient de reconnaître à toute institution communautaire qui constate que l'acte qu'elle vient d'adopter est entaché d'une illégalité le droit de le retirer dans un délai raisonnable avec effet rétroactif, ce droit peut se trouver limité par la nécessité de respecter la confiance légitime du bénéficiaire de l'acte qui a pu se fier à la légalité de celui-ci. Ce principe peut non seulement être invoqué par le destinataire d'un acte administratif individuel mais peut également trouver application à propos d'un acte de portée générale.

Arrêt du 21 juillet 1998, Mellett / Cour de justice (T-66/96 et T-221/97, RecFP_p._II-1305) (cf. points 120-121)

3. Actes des institutions - Retrait - Conditions - Adoption d'un nouvel acte rapportant le précédent ou s'y substituant

Le retrait d'un acte d'une institution communautaire ne peut résulter que d'un acte de cette même institution qui, soit rapporte expressément une décision antérieure, soit en contient une nouvelle qui se substitue à la précédente.

Arrêt du 20 mai 1987, Gherardi Dandolo / Commission (214/85, Rec._p._02163) (cf. al. 13)

4. Droit communautaire - Principes - Protection de la confiance légitime - Retrait d'un acte dans un délai raisonnable - Absence de confiance légitime

Si l'acte pouvant fonder la confiance légitime d'un particulier est retiré par l'administration dans un délai raisonnable, la naissance de la confiance légitime ne saurait être constatée.

Arrêt du 16 octobre 1996, Efisol / Commission (T-336/94, Rec._p._II-1343) (cf. point 34)

5. Pourvoi - Moyens - Motifs d'un arrêt entachés d'une violation du droit communautaire - Retrait d'un acte administratif - Conditions - Respect d'un délai raisonnable - Respect du principe de la confiance légitime - Date à prendre en considération en vue de l'acquisition d'une confiance légitime dans le chef du destinataire d'un acte administratif - Pourvoi fondé

Le retrait d'un acte administratif favorable est généralement soumis à des conditions très strictes. Ainsi, s'il convient de reconnaître à toute institution communautaire qui constate que l'acte qu'elle vient d'adopter est entaché d'une illégalité le droit de le retirer dans un délai raisonnable avec effet retroactif, ce droit peut se trouver limité par la nécessité de respecter la confiance légitime du bénéficiaire de l'acte qui a pu se fier à la légalité de celui-ci. À cet égard, le moment déterminant quant à l'appréciation de l'acquisition d'une confiance légitime dans le chef du destinataire d'un acte administratif est la notification de l'acte, et non pas la date d'adoption ou de retrait de celui-ci.

Une fois acquise, la confiance légitime en la légalité d'un acte administratif favorable ne saurait par la suite être entamée. Dans les circonstances de l'espèce, aucun intérêt d'ordre public ne prime l'intérêt du bénéficiaire au maintien d'une situation qu'il pouvait tenir pour stable. Aucune indication n'est fournie selon laquelle le bénéficiaire a provoqué l'acte moyennant des indications fausses ou incomplètes.

Dès lors, est entaché d'une erreur de droit l'arrêt du Tribunal qui constate que, si, à la date de l'adoption d'une décision retirée près de trois mois après son adoption, le requérant pouvait encore se fier à l'apparence de légalité et prétendre au maintien de cette décision, cette confiance avait été par la suite, et très rapidement, entamée, en sorte que, à la date à laquelle l'institution en cause avait procédé au retrait litigieux, l'intéressé n'était plus fondé à placer une confiance légitime dans la légalité de la décision retirée à la date à laquelle l'institution en cause avait procédé au retrait litigieux.

Arrêt du 17 avril 1997, De Compte / Parlement (C-90/95 P, Rec._p._I-1999) (cf. points 35-37, 39-40)

6. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Décision infligeant des amendes pour violation du droit de la concurrence - Conditions

S'il n'existe pas de dispositions spécifiques régissant le retrait ou la révocation des décisions prises par la Commission au titre des articles 3 et 15 du règlement nº 17, constatant des infractions aux articles 85 ou 86 du traité et infligeant des amendes en raison de telles infractions, ce dernier règlement ne s'oppose cependant pas à ce que la Commission réexamine en faveur du justiciable une telle décision lorsque celle-ci est entachée d'un élément d'illégalité.

Sous réserve de la protection de la confiance légitime et du principe de sécurité juridique, les institutions communautaires se sont vu reconnaître le droit de retirer, pour motif d'illégalité, des décisions ayant octroyé un bénéfice à leur destinataire. A fortiori, elles ont ce droit dans le cas de figure où la décision en question se borne à imposer des charges au justiciable ou à lui infliger des sanctions.

Arrêt du 10 juillet 1997, AssiDomän Kraft Products e.a. / Commission (T-227/95, Rec._p._II-1185) (cf. points 89-91)

7. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Conditions - Respect du principe de protection de la confiance légitime

S'il convient de reconnaître à toute institution communautaire qui constate que l'acte qu'elle vient d'adopter est entaché d'une illégalité le droit de le retirer dans un délai raisonnable avec effet rétroactif, ce droit peut se trouver limité par la nécessité de respecter la confiance légitime du bénéficiaire de l'acte qui a pu se fier à la légalité de celui-ci.

La confiance légitime en l'acte retiré est acquise lorsque son destinataire peut se fier à l'apparence de sa légalité, le moment déterminant quant à l'appréciation de l'acquisition d'une telle confiance légitime étant la date de la notification de l'acte. Une fois acquise, la confiance légitime en la légalité d'un acte administratif ne saurait par la suite être entamée, à moins qu'un intérêt d'ordre public ne prime l'intérêt du bénéficiaire au maintien d'une situation qu'il pouvait tenir pour stable.

Dès lors que la décision retirée, accordant au bénéficiaire un avancement d'échelon supplémentaire, est fondée sur une disposition du statut qui ne lui est plus applicable et est, par conséquent, dépourvue de base légale, l'administration est en droit de retirer cet acte à condition d'agir dans un délai raisonnable.

Un délai d'un peu plus de deux mois doit être considéré comme raisonnable, alors qu'un délai de plus de deux ans doit être considéré comme excessif.

La période postérieure à la date à laquelle le bénéficiaire de l'acte retiré a été informé que l'administration considérait ledit acte comme illégal ne saurait être prise en compte dans l'appréciation du caractère raisonnable de ce délai.

Arrêt du 27 novembre 1997, Pascall / Commission (T-20/96, RecFP_p._II-977) (cf. points 72-73, 75-79)

8. Actes des institutions - Retrait - Conditions - Décision d'octroi d'une double allocation pour enfant à charge

Le retrait rétroactif d'un acte administratif favorable est généralement soumis à des conditions très strictes. Parmi ces conditions figure, notamment, celle que l'institution ayant adopté l'acte constate que celui-ci est entaché d'une illégalité.

Le retrait rétroactif d'une décision portant octroi d'une double allocation pour enfant à charge au titre de l'article 67, paragraphe 3, du statut ne peut donc pas être justifié au seul motif que l'autorité investie du pouvoir de nomination a connaissance de circonstances de nature à susciter des doutes sur le point de savoir si les conditions d'octroi de l'allocation sont remplies, mais présuppose qu'elle constate définitivement que, pendant la période visée par le retrait, l'octroi de l'allocation était illégal.

Arrêt du 8 novembre 2000, E / Commission (T-210/98, RecFP_p._II-1113) (cf. points 60-61)

9. Actes des institutions - Présomption de légalité - Retrait - Acte légal conférant des droits subjectifs - Illégalité

Les actes des institutions communautaires bénéficient d'une présomption de légalité en l'absence de tout indice de nature à mettre en cause cette légalité. Le retrait à titre rétroactif d'un acte légal qui a conféré des droits subjectifs ou des avantages similaires est contraire aux principes généraux du droit.

Arrêt du 5 décembre 2000, Gooch / Commission (T-197/99, RecFP_p._II-1247) (cf. points 51-52)

10. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Conditions - Respect du principe de protection de la confiance légitime - Charge de la preuve

Si toute institution communautaire, constatant que l'acte qu'elle vient d'adopter est entaché d'une illégalité, a le droit de le retirer dans un délai raisonnable avec effet rétroactif, un tel droit peut, néanmoins, se trouver limité par la nécessité de respecter la confiance légitime du bénéficiaire de l'acte qui a pu se fier à la légalité de celui-ci.

À cet égard, la preuve de l'illégalité de l'acte retiré incombe à l'institution.

Arrêt du 5 décembre 2000, Gooch / Commission (T-197/99, RecFP_p._II-1247) (cf. point 53)

11. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Conditions - Respect des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime

L'administration peut retirer avec effet rétroactif un acte administratif favorable entaché d'une illégalité, sous réserve de n'enfreindre ni le principe de sécurité juridique ni celui du respect de la confiance légitime. Cette possibilité, admise lorsque le bénéficiaire de l'acte n'a pas contribué à son illégalité, l'est d'autant plus lorsque l'illégalité trouve sa cause dans le fait de celui-ci.

Arrêt du 24 janvier 2002, Conserve Italia / Commission (C-500/99 P, Rec._p._I-867) (cf. point 90)

12. Actes des institutions - Retrait rétroactif - Conditions - Illégalité de l'acte retiré - Respect du principe de protection de la confiance légitime - Charge de la preuve

L'organe compétent pour adopter un acte juridique déterminé est également compétent pour l'abroger ou le modifier par l'adoption d'un actus contrarius, à moins qu'une disposition expresse ne confère cette compétence à un autre organe.

À cet égard, si le retrait rétroactif d'un acte administratif légal ayant conféré des droits subjectifs ou des avantages similaires est contraire aux principes généraux du droit, le retrait rétroactif d'un acte administratif illégal doit en revanche être admis, mais à des conditions très strictes. Il n'est, en effet, admis que s'il intervient dans un délai raisonnable et s'il est suffisamment tenu compte de la confiance légitime du bénéficiaire de l'acte qui a pu se fier à la légalité de celui-ci.

Il appartient à l'institution dont émane l'acte retiré de prouver son illégalité et de démontrer que les autres conditions pour le retrait rétroactif d'un acte illégal sont satisfaites.

Arrêt du 20 novembre 2002, Lagardère et Canal+ / Commission (T-251/00, Rec._p._II-4825) (cf. points 130, 139-141)

13. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Conditions - Respect des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime

Si le retrait à titre rétroactif d'un acte légal qui a conféré des droits subjectifs ou des avantages similaires est contraire aux principes généraux du droit, l'administration peut retirer avec effet rétroactif un acte administratif favorable entaché d'une illégalité, sous réserve de n'enfreindre ni le principe de sécurité juridique ni celui du respect de la confiance légitime. Cette possibilité de retrait, admise lorsque le bénéficiaire de l'acte n'a pas contribué à son illégalité, l'est d'autant plus lorsque l'illégalité trouve sa cause dans le fait de celui-ci.

Arrêt du 5 mars 2003, Ineichen / Commission (T-293/01, RecFP_p._II-441) (cf. point 91)

L'administration peut retirer avec effet rétroactif un acte administratif favorable entaché d'une illégalité, sous réserve de n'enfreindre ni le principe de sécurité juridique ni celui du respect de la confiance légitime. Cette possibilité, admise lorsque le bénéficiaire de l'acte n'a pas contribué à son illégalité, l'est d'autant plus lorsque l'illégalité trouve sa cause dans le fait de celui-ci.

Arrêt du 11 mars 2003, Conserve Italia / Commission (T-186/00, Rec._p._II-719) (cf. point 77)

14. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Portée en cas de vice de procédure - Décision de retrait emportant explicitement annulation de toute la procédure - Obligation, aux fins de remplacer l'acte retiré, de reprendre la procédure ab initio - Limitation aux seules phases entachées d'illégalité - Violation du principe de protection de la confiance légitime

Lorsque l'administration décide de retirer un acte en raison d'un vice dont est entachée sa procédure d'adoption, de même que lorsqu'elle remplace une décision annulée pour vice de procédure par le juge communautaire, elle a la faculté de diligenter à nouveau la procédure d'adoption tout entière sans se limiter à ce qu'impose la rectification du vice constaté. Par conséquent, si, en procédant au retrait d'un acte, l'administration donne à l'intéressé l'assurance formelle qu'elle reprendra la procédure d'adoption ab initio, l'administration ne peut, sans violer le principe de protection de la confiance légitime, revenir sur l'engagement pris en limitant la portée du retrait aux seules phases de la procédure entachées d'illégalité.

Arrêt du 25 avril 2007, Lebedef-Caponi / Commission (F-50/06, RecFP_p._II-A-1-597) (cf. points 38, 45-46)

15. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Décisions de la Commission en matière d'aides d'État - Conditions - Respect d'un délai raisonnable et du principe de protection de la confiance légitime - Possibilité de retrait ne se limitant pas à la seule situation visée à l'article 9 du règlement nº 659/1999

Il résulte du libellé de l'article 9 du règlement nº 659/1999, relatif à l'application de l'article 88 CE, que la procédure prévue par cette disposition s'applique exclusivement pour la révocation de décisions positives en matière d'aides d'État prises en application de l'article 4, paragraphes 2 ou 3, ou de l'article 7, paragraphes 2, 3 ou 4, de ce règlement, adoptées sur la base d'informations inexactes transmises au cours de la procédure. Elle n'est donc pas applicable aux décisions négatives, constatant l'application abusive d'une aide autorisée ou l'incompatibilité d'une aide avec le marché commun.

Cela étant, la possibilité pour la Commission de retirer une décision statuant sur des aides d'État n'est pas limitée à la seule situation visée à l'article 9 du règlement nº 659/1999. En effet, cette disposition n'est qu'une expression spécifique du principe général du droit selon lequel le retrait rétroactif d'un acte administratif illégal ayant créé des droits subjectifs est admis, notamment lorsque l'acte administratif en cause a été adopté sur la base d'indications fausses ou incomplètes fournies par l'intéressé. La possibilité de retirer de manière rétroactive un acte administratif illégal ayant créé des droits subjectifs n'est toutefois pas limitée à cette seule circonstance, un tel retrait pouvant toujours être opéré, sous réserve de l'observation par l'institution dont émane l'acte des conditions relatives au respect d'un délai raisonnable et de la confiance légitime du bénéficiaire de l'acte qui a pu se fier à la légalité de celui-ci.

Arrêt du 12 septembre 2007, González y Díez / Commission (T-25/04, Rec._p._II-3121) (cf. points 96-97)

16. Actes des institutions - Retrait - Actes illégaux - Conditions - Délai raisonnable - Calcul

Le retrait d’un acte administratif illégal doit intervenir dans un délai raisonnable, lequel doit être apprécié en fonction des circonstances propres à chaque affaire, tels l’enjeu du litige pour l’intéressé, la complexité de l’affaire, le comportement des parties en présence, le caractère créateur ou non de droits subjectifs de l’acte en cause ainsi que la balance des intérêts. Il y a lieu de considérer, en règle générale, comme raisonnable un délai de retrait qui correspondrait au délai de recours de trois mois visé à l’article 91, paragraphe 3, du statut. Dès lors que ce délai s’impose à l’administration elle-même, il convient de prendre en compte, comme point de départ, la date d’adoption de l’acte que cette dernière envisage de retirer.

Arrêt du 11 septembre 2008, Bui Van / Commission (F-51/07, RecFP_p._II-A-1-1533) (cf. points 63, 67-69)