1. Fonctionnaires - Détachement - Charges supplémentaires entraînées par le détachement - Notion
L'article 38, lettre d), du statut n'oblige pas l'administration à rembourser toute dépense causée par les décisions, aussi raisonnables qu'elles puissent être, que le fonctionnaire a prises en raison de son détachement, mais uniquement les dépenses qui peuvent être qualifiées de charges supplémentaires entraînées par le détachement même.
On ne saurait qualifier de charges supplémentaires entraînées par le détachement, les dépenses occasionnées par la décision du fonctionnaire de garder, pendant la période du détachement, son appartement, au lieu de son affectation antérieure ni, à plus forte raison, les frais de garde-meuble entraînés par sa décision de faire l'économie d'un loyer.
Arrêt du 14 janvier 1982, Novi / Commission (56/81, Rec._p._00001) (cf. al. 5, 7)
2. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Réintégration - Droit au maintien du grade attribué dans l'emploi de détachement - Absence
L'article 38 du statut ne garantit pas au fonctionnaire détaché dans l'intérêt du service le maintien, lors de sa réintégration dans l'emploi qu'il occupait antérieurement, du grade, et de la rémunération y afférente, dont il bénéficiait dans l'emploi de détachement.
3. Fonctionnaires - Détachement - Détachement dans l'intérêt du service - Détachement sur demande - Distinction - Justification
Tout en relevant d'une même position statutaire, le détachement dans l'intérêt du service et celui sur demande du fonctionnaire obéissent à des règles distinctes prévues respectivement aux articles 38 et 39 du statut, de sorte qu'un fonctionnaire détaché sur sa demande ne saurait revendiquer, en se prévalant du silence de l'article 39, un droit, tel celui à l'avancement, qui n'est expressément prévu que pour les seuls fonctionnaires détachés dans l'intérêt du service. En effet, les dispositions du statut des fonctionnaires comportent une terminologie précise dont l'extension par analogie à des cas non visés de façon explicite est exclue.
Une telle interprétation de la réglementation différenciée introduite par les articles 38 et 39 du statut est justifiée par la considération que le détachement dans l'intérêt du service peut être décidé contre la volonté du fonctionnaire concerné, de sorte qu'il est permis de penser que le législateur communautaire a voulu garantir à ce dernier que son changement d'affectation n'affectera, pour autant, ni sa rémunération ni les perspectives de sa carrière au sein de son institution d'origine. En revanche, une telle garantie n'apparaît pas indispensable dans le cas du détachement sur demande, puisque, dans ce cas, il appartient au fonctionnaire concerné d'évaluer les avantages du détachement dont il demande à faire l'objet, en dépit de l'éventuelle diminution de son traitement et de la perte de la vocation à la promotion acquise dans son institution d'origine.
Arrêt du 28 février 1996, do Paço Quesado / Commission (T-15/95, RecFP_p._II-171) (cf. points 26-30)
4. Fonctionnaires - Promotion - Mise à la disposition du service antérieur - Détachement dans l'intérêt du service - Détournement de pouvoir - Absence
Un acte n'est entaché de détournement de pouvoir que s'il apparaît, sur la base d'indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif ou, à tout le moins, déterminant d'atteindre des fins autres que celles excipées ou d'éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l'espèce.
Ne constituent pas de tels indices la nomination, dans le cadre d'une procédure de promotion, d'un fonctionnaire à un emploi au sein d'une direction générale d'une institution, sa mise à la disposition successive de son service antérieur pour une courte durée et son détachement ultérieur en application de l'article 37, sous a), deuxième tiret, du statut, sans qu'il ait jamais exercé les fonctions décrites dans l'avis publié aux fins de pourvoir à la vacance dudit emploi.
S'agissant du détachement en application de l'article 37, sous a), deuxième tiret, du statut, ce dernier ne subordonnant pas un tel détachement à la condition que le fonctionnaire concerné ait effectivement exercé les fonctions attachées à cet emploi, il serait contraire audit statut de proscrire le détachement d'un fonctionnaire nouvellement nommé à un emploi. De même, le statut ne subordonnant pas une promotion au titre de l'article 45 du statut à la condition que le fonctionnaire concerné n'ait aucune perspective d'être détaché, une promotion ne saurait être interdite pour la seule raison que ce fonctionnaire pourrait éventuellement être détaché dans l'intérêt du service à la suite de sa nomination.
Arrêt du 9 juin 1998, Hick / CES (T-176/97, RecFP_p._II-845) (cf. points 27-34)
5. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Notion
Un fonctionnaire doit être considéré comme étant dans la position administrative de détachement dans l'intérêt du service, au sens de l'article 37 du statut, dès lors que, par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination dans l'intérêt du service, il est désigné pour occuper temporairement un emploi en dehors de son institution.
La définition de la position de détachement dans l'intérêt du service, donnée à l'article 37, premier alinéa, sous a), du statut, ne précise ni la nature, ni aucune des caractéristiques de l'"emploi" qu'un fonctionnaire est susceptible d'occuper temporairement, en dehors de son institution, dans le cadre d'un détachement décidé par l'autorité investie du pouvoir de nomination. Rien n'indique, en particulier, que ce terme doive être pris dans son acception technique au sens du statut, qui vise un poste permanent créé par décision de l'autorité budgétaire. Il n'est pas davantage exigé que l'"emploi" en cause existe indépendamment de la mesure de détachement, ni même que le détachement se fasse auprès d'une autorité publique dont les agents occupent des "emplois" répondant à la définition du statut.
Arrêt du 16 juillet 1998, Forcheri / Commission (T-162/96, RecFP_p._II-1203) (cf. points 65, 75)
6. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Faculté pour l'autorité investie du pouvoir de nomination d'y mettre fin de manière anticipée - Conditions d'exercice
Les articles 37 et 38 du statut ne prévoient pas de manière explicite la possibilité pour l'autorité investie du pouvoir de nomination de mettre fin au détachement dans l'intérêt du service avant l'expiration de la durée initialement prévue. Toutefois, l'article 38, sous b), du statut, qui dispose que la durée du détachement est fixée par l'autorité investie du pouvoir de nomination, doit être interprété en tenant compte du fait que "l'intérêt du service" participe de l'essence même du détachement prévu à l'article 37, premier alinéa, sous a), du statut et constitue, dès lors, une condition essentielle de son maintien. En conséquence, si cela s'avère indispensable afin d'assurer que le détachement reste conforme à l'intérêt du service, l'autorité investie du pouvoir de nomination a, à tout moment, la faculté de modifier la durée initialement prévue et, partant, de mettre fin au détachement avant l'expiration de cette durée.
Cette interprétation est nécessaire afin de préserver l'effet utile de l'article 38, sous b), du statut. En effet, dans l'hypothèse où un détachement devient incompatible avec l'intérêt du service, notamment en raison de la disparition des rapports de confiance mutuelle entre le fonctionnaire détaché et le service ou la personne auprès desquels celui-ci a été détaché, l'impossibilité, pour l'autorité investie du pouvoir de nomination, de mettre fin au détachement avant l'expiration de la durée initialement prévue serait de nature à nuire à l'efficience de ce service ou de cette personne et plus généralement de l'administration communautaire.
Les articles 37 et 38 du statut ne prévoient pas de manière explicite la possibilité pour l'autorité investie du pouvoir de nomination de mettre fin au détachement dans l'intérêt du service avant l'expiration de la durée initialement prévue. Toutefois, l'article 38, sous b), du statut dispose que la durée du détachement dans l'intérêt du service est fixée par l'autorité investie du pouvoir de nomination. Cette disposition doit être interprétée en tenant compte du fait que l'"intérêt du service" participe de l'essence même du détachement prévu à l'article 37, premier alinéa, sous a), du statut et constitue, dès lors, une condition essentielle de son maintien. En conséquence, elle doit être interprétée en ce sens que, en cas de disparition de l'intérêt du service, l'autorité investie du pouvoir de nomination a, à tout moment, la faculté de modifier la durée initialement prévue pour le détachement et, partant, de mettre fin au détachement avant l'expiration de cette durée.
Cette interprétation est nécessaire afin de préserver l'effet utile de cette disposition. En effet, dans l'hypothèse où un détachement devient incompatible avec l'intérêt du service, notamment en raison de la disparition des rapports de confiance mutuelle entre le fonctionnaire détaché et le service ou la personne auprès desquels celui-ci a été détaché, l'impossibilité, pour l'autorité investie du pouvoir de nomination, de mettre fin au détachement avant l'expiration de la durée initialement prévue serait de nature à nuire à l'efficience de ce service ou de cette personne et, plus généralement, à l'intérêt de l'administration communautaire.
Arrêt du 8 décembre 2005, Reynolds / Parlement (T-237/00, RecFP_p._II-1731) (cf. points 63-66)
7. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Demande tendant à y mettre fin de manière anticipée émanant du service de détachement - Marge d'appréciation de l'autorité investie du pouvoir de nomination - Portée
La demande tendant à mettre fin de manière anticipée, dans l'intérêt du service, au détachement d'un fonctionnaire, qui émane du service ou de la personne auprès desquels celui-ci est détaché, bien que revêtant un caractère déterminant, ne signifie pas que l'autorité investie du pouvoir de nomination ne dispose d'aucune marge d'appréciation à cet égard et est tenue de satisfaire à cette demande. En effet, lorsqu'elle reçoit une telle demande, l'autorité investie du pouvoir de nomination est, à tout le moins, tenue de vérifier, de manière neutre et objective, que sont satisfaites les conditions minimales pour l'adoption d'une telle décision, à savoir, d'une part, si la demande qui lui est présentée constitue, sans aucun doute, l'expression valable du service ou de la personne auprès desquels le fonctionnaire a été détaché et, d'autre part, si elle ne repose pas sur des motifs manifestement illégaux.
Cette conclusion n'est pas altérée par la circonstance que la demande émane d'un groupe politique du Parlement européen et qu'elle vise à mettre fin au détachement d'un fonctionnaire au poste de secrétaire général de ce groupe.
8. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Décision y mettant fin de manière anticipée - Respect des droits de la défense - Obligation d'entendre préalablement l'intéressé s'imposant même en l'absence de disposition expresse - Limites
L'absence d'une disposition explicite dans le statut prévoyant une consultation du fonctionnaire détaché dans l'intérêt du service préalablement à l'adoption d'une décision mettant fin à ce détachement avant l'expiration de la durée initialement prévue ne permet pas d'exclure une telle obligation à charge de l'autorité investie du pouvoir de nomination.
En effet, le principe de respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l'encontre d'une personne et susceptible d'aboutir à un acte faisant grief constitue un principe fondamental de droit communautaire qui s'impose même en l'absence d'une disposition expresse prévue à cette fin par la réglementation concernant la procédure en cause.
Le fait qu'une procédure de réclamation soit prévue à l'article 90 du statut ne suffit pas, en tant que tel, pour exclure l'existence d'une obligation à charge de l'autorité investie du pouvoir de nomination d'entendre le fonctionnaire intéressé avant l'adoption d'une décision qui lui fait grief. En effet, le principe de respect des droits de la défense exige impérativement que l'intéressé soit entendu avant l'adoption de la décision lui faisant grief. Ce n'est que dans des circonstances particulières, où il s'avère impossible en pratique ou incompatible avec l'intérêt du service de procéder à une consultation préalable de l'intéressé avant l'adoption de la décision attaquée, que les exigences découlant du principe de respect des droits de la défense peuvent être satisfaites par une audition dans les plus brefs délais après l'adoption de la décision attaquée.
9. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Détachement auprès d'un groupe politique du Parlement - Décision de mettre fin au détachement - Pouvoir discrétionnaire du groupe politique et compétence liée de l'autorité investie du pouvoir de nomination - Absence de nécessité impérieuse d'entendre l'intéressé avant l'adoption de la décision
En vertu de l'article 37, premier alinéa, sous a), deuxième tiret, du statut, un fonctionnaire peut être détaché, dans l'intérêt du service, afin d'exercer temporairement des fonctions auprès d'un groupe politique du Parlement. S'il incombe à l'autorité investie du pouvoir de nomination de prendre la décision de détacher un fonctionnaire auprès d'un groupe politique ainsi que celle de mettre fin à ce détachement, elle est tenue de respecter le choix effectué à cet égard par le groupe politique qui sollicite une telle mesure. En effet, le groupe politique concerné dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour choisir les collaborateurs qu'il souhaite engager pour exercer des fonctions temporaires auprès de lui ainsi que pour mettre fin à l'engagement de ces derniers. Ce pouvoir discrétionnaire est justifié notamment par la nature spécifique des fonctions exercées auprès d'un groupe politique et par la nécessité de maintenir, dans un tel environnement politique, des rapports de confiance mutuelle entre ce groupe et les fonctionnaires détachés auprès de celui-ci. En acceptant d'exercer de telles fonctions temporaires auprès d'un groupe politique, les fonctionnaires concernés doivent avoir conscience du fait que celui-ci pourrait souhaiter mettre fin à leur engagement avant le terme initialement prévu pour ce détachement.
En effet, lorsque la confiance mutuelle est rompue, pour quelque raison que ce soit, le fonctionnaire en cause n'est plus en mesure d'assurer ses fonctions. Dans une telle situation, il est dès lors de bonne administration que l'institution concernée prenne à l'égard de ce fonctionnaire, dans les meilleurs délais, une décision mettant fin au détachement. Une telle décision constitue, du point de vue procédural, un acte faisant grief au fonctionnaire qui, dès lors, a un intérêt personnel à en demander l'annulation. On ne saurait toutefois en déduire automatiquement, sans avoir égard à la nature de la procédure ouverte à l'encontre de l'intéressé, que l'autorité investie du pouvoir de nomination avait l'obligation d'entendre utilement le fonctionnaire concerné avant l'adoption d'une telle décision.
Dès lors que l'autorité investie du pouvoir de nomination est saisie d'une demande visant à mettre fin au détachement d'un fonctionnaire auprès d'un groupe politique, elle est en principe tenue d'y donner suite dans les meilleurs délais, après avoir vérifié que cette demande provient effectivement de la personne ou du service compétent pour la présenter.
10. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Charges supplémentaires entraînées par le détachement - Notion
Le remboursement, prévu par l'article 38, sous d), du statut, des charges supplémentaires supportées par le fonctionnaire détaché dans l'intérêt du service pour occuper temporairement un emploi en dehors de son institution ne vise pas à compenser la mise en oeuvre d'autres dispositions du statut. La suppression de l'indemnité de dépaysement et l'application du coefficient correcteur du pays d'affectation ne sauraient par conséquent constituer une charge au sens de cette disposition. Seules les dépenses peuvent être qualifiées de charges supplémentaires entraînées par le détachement.
11. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Droit du fonctionnaire concerné d'être entendu - Respect des droits de la défense - Portée
Dans l'hypothèse du détachement dans l'intérêt du service qui, contrairement au détachement sur demande, est décidé par l'autorité investie du pouvoir de nomination et peut l'être contre la volonté du fonctionnaire concerné, l'administration doit l'en informer et l'entendre avant de prendre sa décision, selon le principe du respect des droits de la défense. À cet égard, l'administration satisfait à ses obligations lorsque, dans le cas d'un fonctionnaire dont elle est, compte tenu de son grade, en droit d'attendre un degré élevé de connaissance des procédures administratives et statutaires, elle indique à l'intéressé, qui est toujours en droit de demander des précisions, les principales caractéristiques du détachement envisagé.
12. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Lieu d'affectation - Détermination
Le lieu d'affectation d'un fonctionnaire détaché dans l'intérêt du service se trouve au lieu du détachement, avec toutes les conséquences qui en découlent quant au droit à l'indemnité de dépaysement et à l'application des coefficients correcteurs. À cet égard, les dispositions de l'article 38 du statut relatives au maintien de l'emploi et de la rémunération globale du fonctionnaire dans son institution d'origine sont neutres quant à la détermination du lieu d'affectation du fonctionnaire détaché, car elles ne visent qu'à préserver ses droits. L'emploi constitue donc un concept fonctionnel et non géographique.
13. Fonctionnaires - Détachement dans l'intérêt du service - Chef de représentation de la Commission - Champ d'application de la procédure de détachement
Le "caractère politique et sensible" des fonctions exercées par les chefs de représentation de la Commission ne suffit pas comme tel à justifier le recours à la position de détachement d'un fonctionnaire. Une telle interprétation de l'article 37, premier alinéa, sous a), deuxième tiret, du statut reviendrait à permettre le détachement auprès des commissaires respectifs de tous les fonctionnaires exerçant des fonctions "politiques et sensibles" au sein de l'institution relevant normalement du personnel d'encadrement supérieur et porterait ainsi atteinte à la structure même de la fonction publique européenne, telle qu'elle est établie à l'article 35 du statut, en remettant notamment en cause la lisibilité des liens hiérarchiques.
Par ailleurs, un détachement dans l'intérêt du service "auprès d'une personne remplissant un mandat prévu par les traités" suppose l'existence d'une relation de confiance intuitu personae entre cette dernière et le fonctionnaire détaché, laquelle relation implique que des rapports directs et étroits puissent en permanence être noués entre les intéressés, en fonction des méthodes de travail propres au membre concerné et de celles de l'ensemble de son cabinet. Les circonstances que des rapports établis par un chef de représentation soient directement adressés au commissaire responsable, que des contacts téléphoniques, des échanges de courriels ou des réunions aient lieu entre le chef de représentation et le commissaire ou les membres de son cabinet, ou encore que le contenu de ces échanges soit confidentiel, ne permettent pas en elles-mêmes d'établir le caractère intuitu personae du rapport de travail entre le commissaire et le chef de représentation.
L'applicabilité de l'article 37, premier alinéa, sous a), deuxième tiret, du statut dépend uniquement des conditions énoncées dans cette disposition, mais nullement des conséquences administratives qui découleraient de son application. Toute autre interprétation reviendrait à permettre le recours à l'article 37 du statut dans un but autre que celui pour lequel il a été prévu et donc à légitimer un détournement de procédure.