Les fruits de jardin étant inévitablement exposés à la pollution et aux pesticides, la directive communautaire relative à l'étiquetage ne s'oppose pas à l'utilisation de la mention "purement naturelle" pour une confiture de fraises contenant des teneurs très faibles en résidus de plomb, de cadmium et de pesticides
Darbo fabrique en Autriche une confiture de fraises commercialisée dans cet État ainsi qu'en Allemagne sous la marque «d'arbo naturrein» (purement naturelle) et sous la désignation de «Garten Erdbeer» (fraise de jardin).
L'étiquette figurant sur l'emballage de la confiture comporte des mentions concernant sa composition.
Elle indique notamment, au titre des ingrédients, la présence d'un gélifiant pectine. Ce dernier est constitué d'acides dilués, provenant principalement des parties internes d'écorces d'agrumes, de restes de fruits ou de cossettes de betteraves à sucre.
Selon des analyses effectuées en Allemagne, la confiture contient également, sous forme de traces ou de résidus, les teneurs suivantes de différentes substances: moins de 0,01 mg/kg de plomb, 0,008 mg/kg de cadmium, 0,016 mg/kg de procymidone (pesticide) et 0,005 mg/kg de vinclozoline (pesticide).
"L'association de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles dans le commerce et l'industrie" (Verein gegen Unwesen in Handel und Gewerbe) a saisi les tribunaux allemands (Landgericht Köln, qui a rejeté sa demande, puis en appel, l'Oberlandesgericht Köln) afin d'obtenir la cessation de l'utilisation de la mention «naturrein» sur les étiquettes de la confiture d'arbo. Le gélifiant pectine constituerait un additif que le consommateur ne s'attendrait pas à trouver dans cette confiture en raison de l'indication «naturrein». Cette indication serait susceptible d'induire en erreur le consommateur dans la mesure où l'air ainsi que les terrains dont proviennent les fruits seraient contaminés par la pollution. Enfin, compte tenu de la présence de résidus de plomb, de cadmium et de pesticides, la confiture en question ne pourrait être qualifiée de «purement naturelle».
L'Oberlandesgericht Köln a décidé de surseoir à statuer et d'interroger la Cour de justice des Communautés européennes: la directive communautaire relative à l'étiquetage s'oppose-t-elle à l'utilisation de la mention «purement naturelle» pour qualifier une confiture de fraises qui contient du gélifiant pectine ainsi que des traces ou résidus de plomb, de cadmium et de pesticides dans les quantités susmentionnées.
La Cour répond que la directive ne s'oppose pas à l'utilisation de la mention «purement naturelle» pour désigner une confiture de fraises qui contient du gélifiant pectine ainsi que des traces ou résidus de plomb, de cadmium et de pesticides dans les teneurs suivantes: 0,01 mg/kg de plomb, 0,008 mg/kg de cadmium, 0,016 mg/kg de procymidone et 0,005 mg/kg de vinclozoline.
La Cour rappelle, tout d'abord, que la directive est destinée, notamment, à éviter toute tromperie du consommateur et qu'il incombe à la juridiction nationale d'apprécier le caractère éventuellement trompeur d'une dénomination, d'une marque ou d'une indication publicitaire en prenant en considération l'attente présumée d'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.
La Cour relève qu'en ce qui concerne la pectine, sa présence dans la confiture d'arbo est indiquée sur l'étiquette figurant sur l'emballage, conformément à la directive. Les consommateurs, dont la décision d'achat est déterminée par la composition des produits lisent d'abord la liste des ingrédients dont la mention est obligatoire. Dans ces conditions, un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, ne peut être induit en erreur par la mention «purement naturelle» inscrite sur l'étiquette. La pectine figure par ailleurs au nombre des substances susceptibles d'être ajoutées aux confitures extra.
Les résidus de plomb, de cadmium et de pesticides ne constituent pas des ingrédients de la denrée alimentaire et ne figurent donc pas sur la liste des mentions obligatoires. Selon la Cour, l'environnement naturel comporte la présence de plomb et de cadmium en raison, notamment, de la pollution de l'air ambiant ou du milieu aquatique. Les fruits de jardin étant cultivés dans un tel environnement, ils sont inévitablement exposés à ces agents polluants. Dans ces conditions, à supposer même que, dans certains cas, des consommateurs puissent ignorer cette réalité et être ainsi induits en erreur, ce risque demeure minime et ne peut par conséquent justifier une entrave à la libre circulation des marchandises. La même conclusion s'impose pour la présence de traces ou de résidus de pesticides dans la confiture d'arbo. En effet, l'utilisation de pesticides, y compris par les particuliers, constitue l'un des moyens les plus courants pour combattre la présence d'organismes nuisibles aux produits végétaux et agricoles. Les fraises de jardin étant cultivées de façon «naturelle», toute présence de résidus de pesticides ne peut donc être exclue.
Concernant les teneurs de ces résidus, la confiture d'arbo contient des résidus de plomb et de cadmium, respectivement 50 fois et 25 fois inférieures aux valeurs maximales autorisées par la législation allemande. Les résidus des pesticides procymidone et vinclozoline contenus dans la confiture sont respectivement 312 fois et 1 000 fois inférieures aux valeurs maximales autorisées par la réglementation communautaire applicable.
Dans ces conditions, la Cour considère que, nonobstant la présence de traces ou de résidus de plomb, de cadmium et de pesticides dans la confiture d'arbo, la mention «purement naturelle» sur l'étiquette de l'emballage de cette denrée alimentaire n'est pas de nature à induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques de celle-ci.
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