Le code de la propriété intellectuelle français qui prévoit, à la demande des constructeurs bénéficiant de la protection de leur marque, un mécanisme de retenue en douane, n'est pas conforme au droit communautaire
"L'European Automobile Panel Association" s'est plainte auprès de la Commission du comportement des autorités douanières françaises. Celles-ci retiennent, en effet, à la frontière avec l'Espagne, des pièces détachées de véhicules automobiles de marque française fabriquées en Espagne et destinées, notamment, à être commercialisées en Italie.
La réglementation française (code de la propriété intellectuelle) prévoit un mécanisme de retenue, par les autorités douanières, de marchandises présumées de contrefaçon, à la demande écrite du titulaire du droit protégé. La Cour de cassation française a ainsi jugé à plusieurs reprises que des pièces détachées de véhicule automobile fabriquées par un tiers qui ne font que circuler sur le territoire français, portent atteinte au droit du propriétaire d'une marque ou d'un modèle, même si cette marchandise a été légalement fabriquée dans un Etat membre (par exemple en Espagne) en vue d'être commercialisée légalement dans un autre Etat membre (par exemple, l'Italie).
La Commission demande à la Cour de condamner la France pour non respect de la réglementation communautaire relative à la libre circulation des marchandises.
La Cour considère, tout d'abord, qu'une telle pratique constitue bien une restriction à la libre circulation des marchandises : la retenue des pièces détachées, pendant une période pouvant aller jusqu'à 10 jours, peut, en effet, retarder la circulation de ces marchandises, voire aboutir à leur blocage complet (confiscation prononcée par la juridiction française qui sera saisie éventuellement).
La Cour examine, dans un deuxième temps, si la restriction à la libre circulation des marchandises est justifiée.
La Cour estime que les textes communautaires en vigueur ne permettent pas un tel mécanisme. Si les Etats membres peuvent maintenir en vigueur leurs dispositions juridiques en matière de protection des dessins et des modèles, ces mesures doivent néanmoins respecter le traité et, notamment, la libre circulation des marchandises à l'intérieur de la Communauté.
Le traité permet des mesures dérogatoires au principe de libre circulation lorsqu'elles sont justifiées par la sauvegarde des droits qui constituent l'objet spécifique de la propriété industrielle et commerciale.
La Cour distingue cependant entre la mise en circulation d'une marchandise qui relève de cet objet spécifique et son simple transport physique qui n'en relève pas. Elle vérifie, en effet, si le titulaire d'un modèle protégé de pièces détachées dispose de la faculté d'empêcher des tiers de faire transiter ces produits sans son consentement. Le transit intracommunautaire consistant à transporter des marchandises d'un Etat membre vers un autre Etat membre en traversant le territoire d'un ou de plusieurs autres Etats membres, il n'implique pas, au contraire de la fabrication, de la vente ou de l'importation d'un produit, une utilisation de l'apparence du modèle ou du dessin protégé. Le simple transport physique des marchandises ne peut donc pas être assimilé à la mise en circulation ou à la commercialisation des marchandises concernées.
La Cour ajoute que la retenue de 10 jours est disproportionnée par rapport à l'objectif de vérification de l'origine et de la destination des pièces détachées.
Dans ces conditions, la réglementation française est jugée non conforme au droit communautaire.
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