Division de la Presse et de l'Information

COMMUNIQUÉ DE PRESSE N· 19/97

17 avril 1997

Arrêt de la Cour de justice dans l'affaire préjudicielle C-147/95
Dimossia Epicheirissi Ilektrismou (DEI) / Efthimios Evrenopoulos

VEUVES ET VEUFS ÉGAUX FACE AUX PENSIONS

La Cour de justice étend le principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes à l'octroi de la pension de survie dans le cadre d'un régime professionnel


Cadre juridique

La loi grecque 4491/1966 règle le fonctionnement du régime d'assurances de la Dimossia Epicheirissi Ilektrismou (DEI, entreprise publique d'électricité), qui est un organisme public sui generis, relevant plutôt du droit privé. Ce régime est obligatoire pour les employés de la DEI et la pension de retraite est calculée sur la base des rémunérations de la dernière année de travail et en fonction du temps de service accompli. La loi prévoit que «en cas de décès de la personne retraitée ou assurée ... ont droit à une pension la veuve ou, lorsque l'assuré était de sexe féminin, le veuf sans ressources et totalement incapable de travailler, dont l'entretien a été assumé par la défunte pendant toute la période de cinq ans précédant le décès».

Faits

M. Evrenopoulos, ressortissant grec, a été marié avec une femme travaillant à la DEI. À la suite du décès de celle-ci, il a demandé l'octroi d'une pension de survie. Cette demande a été rejetée, du fait qu'il ne remplissait pas les conditions exigées par la loi. M. Evrenopoulos a alors formé un recours contre la décision du conseil des assurances devant le juge administratif, qui a déclaré la disposition non applicable, parce que contraire à l'interdiction de toute discrimination fondée sur le sexe, consacré par la constitution hellénique et par le droit communautaire et a annulé la décision du conseil des assurances. La DEI a interjeté appel et la Cour administrative d'appel d'Athènes a posé à la Cour de Justice différentes questions préjudicielles.

Décision de la Cour

a. L'article 119 et les pensions de survie

La Cour considère d'abord que le régime d'assurance de la DEI entre dans le champ d'application de l'art. 119 du traité ¾ relatif au principe de l'égalité des rémunérations entre hommes et femmes pour un même travail - (et non de la directive 79/7/CEE, qui autorise les États membres à maintenir des discriminations dans les cas des pensions de survie versées par des régimes légaux). Les prestations que ce régime octroie relèvent de la notion de rémunération. La pension à laquelle Mme Evrenopoulou avait droit est versée en raison de la relation de travail; en outre elle intéresse une catégorie particulière de travailleurs, est fonction du temps de service et est calculée sur la base du dernier traitement. La pension de survie pour M. Evrenopoulos, prévue par un régime professionnel de pensions, est un avantage qui trouve son origine dans l'affiliation au régime du conjoint du survivant. Par voie de conséquence, elle se rattache à la rémunération et relève de l'art. 119 du traité.

Ensuite la Cour déclare - selon une jurisprudence déjà établie - que l'art. 119 interdit toute discrimination en matière de rémunération entre travailleurs masculins et féminins, quel que soit le mécanisme qui détermine cette inégalité. Par conséquent, une disposition qui soumet l'octroi d'une pension de veuf relevant de la notion de rémunération à des conditions particulières qui ne sont pas imposées aux veuves est directement discriminatoire pour les hommes et ne peut pas être maintenue en vigueur.

Enfin, l'art. 119 du traité exige que, aussi longtemps que des mesures rétablissant l'égalité de traitement ne sont pas adoptées, afin de respecter l'art. 119, la catégorie défavorisée se voie octroyer les mêmes avantages que ceux dont bénéficie la catégorie privilégiée. Ainsi, les veufs victimes d'une discrimination (dans le présent cas, M. Evrenopoulos) doivent obtenir une pension de conjoint survivant aux mêmes conditions que les veuves.

b. Précisions concernant les effets dans le temps

Conformément à l'arrêt Barber de la Cour de justice, repris par le Protocole n· 2 annexé au traité sur l'Union européenne, l'effet direct de l'art. 119 du traité ne peut être invoqué à l'appui de revendications portant sur des prestations versées par des régimes professionnels dans la mesure où ces prestations peuvent être attribuées aux périodes d'emploi antérieures au 17 mai 1990 (date de l'arrêt Barber), exception faite pour les personnes qui ont, avant cette date, engagé une action en justice ou introduit une réclamation équivalente selon le droit national applicable. La Cour précise que cette dernière exception couvre un cas comme celui de M. Evrenopoulos, où un premier recours introduit avant le 17 mai 1990 avait été rejeté comme irrecevable, sous réserve de la possibilité pour l'intéressé de procéder à sa régularisation dans un délai de trois mois, ce qu'il avait effectivement fait.

Exclusivement à l'usage des médias - Document non officiel qui n'engage pas la Cour. Pour compléments d'information ou pour obtenir copie de l'arrêt, veuillez contacter Mme M.-F. Contet, tél. (352)4303.2497.