La Cour se prononce sur l'article 10 du règlement (CEE) n· 1907/90 "concernant certaines normes de commercialisation applicables aux oeufs".
Gut Springenheide commercialise des oeufs préemballés sous la mention "6-Korn - 10 frische Eier" (10 oeufs frais - 6 céréales). Selon cette société, les six sortes de céréales en question entrent dans la composition de l'alimentation des poules à concurrence de 60 %. Une notice, glissée dans chaque boîte d'oeufs, vante les qualités que les oeufs tireraient de cette alimentation. Après avoir fait part, à plusieurs reprises, à Gut Springenheide de ses réticences à l'égard de la mention et de cette notice, l'Oberkreisdirektor des Kreises Steinfurt - Amt für Lebensmittelüberwachung (directeur de la circonscription administrative de Steinfurt - Office de contrôle des denrées alimentaires) a, le 24 juillet 1989, mis en demeure cette société de les supprimer. Une amende a par ailleurs été infligée à son gérant le 5 septembre 1990.
Par jugement du 11 novembre 1992, le Verwaltungsgericht Münster a rejeté le recours en constation formé par Gut Springenheide et son gérant au motif que la mention et la notice litigieuses enfreignaient l'article 17, paragraphe 1, du Lebensmittel- und Bedarfsgegenständegesetz (loi sur les denrées alimentaires et les produits de consommation courante) qui interdit les indications trompeuses.
Gut Springenheide et son gérant ont fait en vain appel de ce jugement. La juridiction d'appel a en effet considéré que la mention et la notice en cause méconnaissaient des dispositions communautaires, qui portent organisation commune des marchés dans le secteur des oeufs. Dans ce cadre un règlement communautaire de 1990 "concernant certaines normes de commercialisation applicables aux oeufs" autorise, sur les emballages, la mention d'indications destinées à promouvoir les ventes pour autant qu'elles ne sont pas de nature à induire l'acheteur en erreur. D'après la juridiction d'appel allemande, la mention "10 oeufs frais - 6 céréales", qui est également une marque commerciale, et la notice qui l'accompagne sont de nature à tromper une partie non négligeable des consommateurs dans la mesure où elles suggèrent à tort que l'alimentation des poules est exclusivement composée des six céréales indiquées et que les oeufs présentent des qualités particulières.
Gut Springenheide et son gérant ont alors introduit une demande en "Revision" de cet arrêt devant le Bundesverwaltungsgericht. Selon cette juridiction la disposition communautaire relative à la promotion des ventes peut être interprétée de deux manières. Soit le caractère trompeur des indications en cause doit être déterminé par rapport à l'attente effective des consommateurs, auquel cas cette attente devrait, le cas échéant, être établie par le biais d'un sondage auprès d'un échantillon représentatif de consommateurs ou sur la base d'une expertise, soit la disposition en cause se fonde sur une notion objective de l'acheteur, qui n'appelle qu'une interprétation juridique, indépendante de l'attente concrète des consommateurs. En d'autres termes, quel est le consommateur auquel il convient de se référer afin de déterminer si une indication destinée à promouvoir les ventes d'oeufs est de nature à induire l'acheteur en erreur en violation du règlement communautaire de 1990. C'est dans ces conditions que le Bundesverwaltungsgericht a décidé de surseoir à statuer pour poser à la Cour de Justice des CE des questions préjudicielles, auxquelles la Cour répond aujourd'hui.
Se réfèrant aux dispositions et à la jurisprudence communautaire, destinées à éviter toute tromperie du consommateur, la Cour de Justice estime que pour déterminer si une indication destinée à promouvoir les ventes d'oeufs est de nature à induire l'acheteur en erreur, le juge national doit se référer à l'attente présumée relative à cette indication d'unconsommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Toutefois, le droit communautaire ne s'oppose pas à ce que, si le juge éprouve des difficultés particulières pour évaluer le caractère trompeur de l'indication en cause, il puisse recourir, dans les conditions prévues par son droit national, à un sondage d'opinion ou à une expertise destiné à éclairer son jugement.
C'est maintenant au Bundesverwaltungsgericht d'appliquer ce principe à l'affaire Gut Springenheide.
Document non officiel à l'usage des médias, qui n'engage pas la Cour de justice. Langues disponibles : allemand, anglais et français.
Pour le texte intégral de l'arrêt veuillez consulter notre page Internet www.curia.eu.int aux alentours de 15 heures ce jour.
Pour de plus amples informations veuillez contacter M. de Hemptinne tél. (352) 43 03 3205 fax (352) 43 03 2500.