La Cour de justice examine des marchés d'une valeur globale d'environ 360 millions de ATS, passés entre le 27 novembre 1995 et le 6 février 1996
En 1986, le gouvernement du Land de Basse-Autriche a décidé de transférer son siège, établi jusqu'alors à Vienne, à Sankt Pölten. Les travaux entrepris en vue de la réalisation de ce projet (construction complète des nouveaux bâtiments destinés à accueillir le gouvernement et l'administration et d'un centre culturel à Sankt Pölten), ont débuté en 1992. Leur achèvement était prévu pour 1996.
Informée par une plainte, en février 1995, de l'existence d'un appel d'offres concernant un marché public de fournitures à passer dans le cadre de ce projet, la Commission a considéré les conditions générales en matière d'offres et cahier des charges («AAVB» «Allgemeine Angebots- und Vertragsbedingungen») comme contraires au droit communautaire (directives communautaires sur les procédures de passation des marchés publics de travaux) pour violation, notamment, des règles de publicité, des règles en matière de spécifications et des obligations en matière d'information et de protection des soumissionnaires.
Dans une lettre du 12 avril 1995, la Commission a informé le gouvernement autrichien de ses constatations. Quelques mois plus tard, la Commission a reçu notification d'une loi relative à la passation de marchés, promulguée le 31 mai 1995 par le Land de Basse-Autriche. Cette loi a appelé des objections de la Commission: elle excluait, en effet, de son champ d'application, les marchés relatifs au projet en cause. Des marchés d'une valeur considérable devant encore être passés, la Commission a exigé, en novembre 1995, que le respect du droit communautaire soit assuré avec effet immédiat. Les autorités autrichiennes se sont engagées à procéder aux modifications requises. Elles ont cependant invoqué la nécessité de disposer d'une période de transition suffisamment raisonnable en raison des problèmes techniques liés à l'adaptation. La Commission a considéré que cette déclaration était insuffisante, du moins s'agissant de la modification des AAVB et des pratiques en matière de passation de marchés, qui pouvaient être immédiatement adaptées par une simple décision du pouvoir adjudicateur (la Niederösterreichische Landeshauptstadt Planungsgesellschaft mbH, «NÖPLAN»).
Le gouvernement autrichien a réagi à l'engagement d'une procédure en manquement par la Commission: les AAVB ont été modifiées; la NÖPLAN a pris la décision «d'appliquer dès à présent les directives communautaires lors de tous les appels d'offres»; un projet de loi modifiant la loi relative à la passation de marchés adoptée par le Land de Basse-Autriche a été élaborée. Le gouvernement autrichien a cependant précisé que les marchés (d'une valeur globale d'environ 360 millions de ATS), passés entre le 27 novembre 1995 (date de la réunion entre les services autrichiens et ceux de la Commission) et le 6 février 1996, ne pouvaient pas être suspendus ou annulés pour diverses raisons.
La Cour, saisie par la Commission sur les conditions de passation de ces marchés, constate que la république d'Autriche a manqué à ses obligations au regard des directives communautaires concernées ainsi qu'au principe communautaire de la libre circulation des marchandises dans le cadre de la construction à Sankt Pölten du nouveau centre administratif et culturel pour le Land de Basse-Autriche. La Cour précise que les marchés concernés par le recours de la Commission sont les marchés qui, à la date que la Commission avait fixé à la république d'Autriche dans sons avis motivé pour s'y conformer, n'avaient pas encore été excécutés ou étaient susceptibles de faire, dans la mesure du possible, l'objet d'une annulation.
La Cour écarte les objections formulées par la république d'Autriche quant à l'applicabilité des directives mentionnées. Selon la Cour, la NÖPLAN est un pouvoir adjudicateur au sens de la directive correspondante, et, comme le gouvernement autrichien l'admet lui-même, le Land contrôle et finance toutes les activités dans le cadre de la construction du centre administratif. Dans ces conditions, la NÖPLAN était tenue de respecter les dispositions communautaires en matière de passation de marchés, indépendamment de l'éventuelle possibilité des opérateurs concernés d'invoquer à son égard celles de ces dispositions qui ont un effet direct. Par ailleurs, les dispositions communautaires en matière de passation des marchés publics seraient privées de leur effet utile si le comportement d'un pouvoir adjudicateur, tel que la NÖPLAN, n'était pas imputable à l'État membre concerné: la république d'Autriche peut donc être tenue pour responsable du comportement de la NÖPLAN.
Le gouvernement autrichien n'a pas contesté le bien-fondé des infractions qui lui sont reprochées. La Commission a rappelé que, dès son adhésion à l'Union européenne, le 1er janvier 1995, la république d'Autriche était tenue de respecter la réglementation communautaire, dont font partie les directives relatives à la passation de marchés publics. Or, la NÖPLAN n'a respecté ni les règles de publicité ni un certain délai minimum de réception des offres. La NÖPLAN n'a pas non plus respecté l'obligation d'information à l'égard des soumissionnaires écartés. Il n'a été tenu compte ni des critères de sélection qualitative, tels que les motifs d'exclusion, lorsqu'il s'agissait d'établir si une entreprise remplissait les conditions nécessaires pour pouvoir participer à l'appel d'offres, ni des critères d'attribution du marché. Enfin, la NÖPLAN a, au moins pour la procédure de passation relative au système centralisé de gestion du centre administratif de Sankt Pölten, enfreint également le droit communautaire: elle a fait figurer dans les documents relatifs à l'appel d'offres une spécification déterminée concernant le système d'exploitation destiné au centre de contrôle des bâtiments pour favoriser les «produits Unix».
La Commission reproche également à la république d'Autriche d'avoir enfreint ses obligations découlant du principe communautaire de libre circulation des marchandises. L'introduction de la spécification technique favorisant les «produits Unix» implique, selon la Cour, une entrave à la libre circulation des marchandises. De même, s'agissant de la préférence que les AAVB ont accordé en présence d'autres offres équivalentes, aux matériaux produits en Basse-Autriche ou aux entreprises qui y ont leur siège. Enfin, les AAVB excluaient, dès le départ et sans conditions, tous les droits que les soumissionnaires pourraient faire valoir dans le cadre d'une procédure de sélection, ce qui était contraire aux principes relatifs à la protection des soumissionnaires.
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