Language of document : ECLI:EU:T:2019:893

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

19 décembre 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne verbale BIANCOFINO – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Obligation de motivation – Article 94 du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑54/19,

Nosio SpA, établie à Mezzocorona (Italie), représentée par Mes J. Graffer et A. Ottolini, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 22 novembre 2018 (affaire R 2434/2017-1), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal BIANCOFINO comme marque de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé, lors des délibérations, de MM. S. Papasavvas, faisant fonction de président, D. Spielmann (rapporteur) et Mme O. Spineanu‑Matei, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 29 janvier 2019,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 10 mai 2019,

vu la désignation d’un autre juge pour compléter la chambre à la suite de l’empêchement d’un de ses membres,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 16 février 2017, la requérante, Nosio SpA, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal BIANCOFINO.  

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, notamment, à la description suivante : « vins ; vins effervescents ». 

4        Par lettre du 29 mars 2017, l’examinatrice a émis des objections à l’enregistrement de la marque demandée, fondées sur des motifs absolus de refus au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), c) et k) du règlement 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous, b), c) et k) du règlement 2017/1001].

5        Le 29 mai 2017, la requérante a répondu à de telles objections, en substance, premièrement, en faisant valoir, que le consommateur comprendrait la marque demandée comme une expression fantaisiste, et, deuxièmement, en contestant le caractère descriptif de cette marque.

6        Par décision du 27 octobre 2017, l’examinateur a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), c) et k) du règlement 2017/1001.

7        Le 15 novembre 2017, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de l’examinateur.

8        Par décision du 22 novembre 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours et confirmé le refus d’enregistrement de la marque demandée, en se fondant seulement sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, au motif que le signe demandé ne présentait pas de caractère distinctif.

9        Premièrement, la chambre de recours a estimé que le public pertinent était composé de consommateurs de vins italophones, raisonnablement attentifs et avisés.  Deuxièmement, en appréciant le caractère distinctif de la marque demandée, la chambre de recours a relevé que, au sein de celle-ci, pouvaient être facilement reconnus les termes italiens « bianco » et « fino ». C’est pourquoi, dans un premier temps, la chambre de recours a examiné ces deux termes pris séparément. Selon elle, le terme « bianco », en œnologie, désigne un vin de couleur paille obtenu par la fermentation de raisins blancs et le terme « fino », quant à lui, a pour signification « raffiné, pur ». De plus, la chambre de recours a précisé que l’impropriété de langage découlant du fait que le terme italien adéquat pour désigner un vin raffiné ou fin soit « fine », et non « fino », qui pouvait être aisément compris dans un sens élogieux, ne suffisait pas à conférer un caractère distinctif à ce dernier terme. Dans un second temps, la chambre de recours a précisé que les deux termes en cause demeuraient dépourvus de caractère distinctif même en étant accolés, puisque le signe BIANCOFINO, dans son ensemble, composé de deux termes dépourvus de caractère distinctif, serait compris par le public pertinent comme indiquant un vin « blanc et fin », et était ainsi inapte à remplir la fonction essentielle d’indication de l’origine commerciale des produits, visée à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, pour l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne. Enfin, la chambre de recours a indiqué que la décision antérieure de l’EUIPO invoquée par la requérante ne saurait remettre en cause ces conclusions.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

12      À l’appui du recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, et, le second, d’un défaut de motivation de la décision attaquée.

13      Le Tribunal estime opportun d’examiner, tout d’abord, le second moyen.

 Sur le second moyen, tiré d’un défaut de motivation de la décision attaquée

14      Dans le cadre de son second moyen, la requérante avance que la conclusion de la chambre de recours développée au point 27 de la décision attaquée, selon laquelle l’expression « vino fino » sera comprise par le public pertinent comme un synonyme de « vino raffinato » (vin raffiné) n’est pas suffisamment motivée, puisqu’elle n’est pas étayée par des éléments de preuve. De plus, la requérante soutient que la décision attaquée revêt un caractère contradictoire du fait que la chambre de recours, au même point de la décision attaquée, estime, d’un côté, que l’emploi du terme « fino » en rapport avec le vin est une impropriété de langage, et, de l’autre côté, au point 29 de la décision attaquée, que le signe BIANCOFINO est formé par deux termes dépourvus de caractère distinctif.

15      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

16      Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Il est de jurisprudence constante que cette obligation a la même portée que celle consacrée par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et que la motivation exigée par ledit article doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte. En effet, l’obligation de motivation des décisions de l’EUIPO a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union européenne d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [arrêts du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, EU:C:2004:649, points 64 et 65, et du 23 septembre 2015, Mechadyne International/OHMI (FlexValve), T‑588/14, non publié, EU:T:2015:676, point 57]. Toutefois, les chambres de recours ne sont pas obligées, dans la motivation des décisions qu’elles sont amenées à adopter, de prendre position sur tous les arguments que les intéressés invoquent devant elles. Il suffit qu’elles exposent les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [voir arrêt du 30 avril 2014, Beyond Retro/OHMI – S&K Garments (BEYOND VINTAGE), T‑170/12, non publié, EU:T:2014:238, point 88 et jurisprudence citée].

17      En particulier, lorsque l’EUIPO refuse l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne, il doit, pour motiver sa décision, indiquer le motif de refus, absolu ou relatif, qui s’oppose à cet enregistrement ainsi que la disposition dont ce motif est tiré et exposer les circonstances factuelles qu’il a retenues comme étant prouvées et qui, selon lui, justifient l’application de la disposition invoquée. Une telle motivation est, en principe, suffisante pour satisfaire aux exigences évoquées au point 16 ci-dessus [voir arrêts du 26 mars 2015, Royal County of Berkshire Polo Club/OHMI – Lifestyle Equities (Royal County of Berkshire POLO CLUB), T‑581/13, non publié, EU:T:2015:192, point 20 et jurisprudence citée, et du 20 mars 2019, Grammer/EUIPO (Représentation d’une forme), T‑762/17, non publié, EU:T:2019:171, point 24 et jurisprudence citée].

18      En l’espèce, il ressort des points 19 à 29 de la décision attaquée que la chambre de recours a examiné si, comme le soutenait la requérante, l’examinateur avait commis une erreur d’appréciation en concluant que la marque demandée était dépourvue de tout caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

19      À cette fin, la chambre de recours a pris soin de préciser que l’expression « vino fino » serait comprise par le public pertinent comme étant un synonyme de « vino raffinato » (vin raffiné), autrement dit comme une indication élogieuse. Par ailleurs, d’une part, elle a indiqué la signification en l’espèce des termes « bianco » et « fino » et, d’autre part, constaté que, compte tenu de ces significations et des produits concernés, le public pertinent percevrait la marque demandée comme une indication élogieuse des produits en cause, ce qui constitue une explication suffisamment claire de son raisonnement, même si une telle motivation n’est pas étayée par d’autres éléments de preuve, comme le soutient la requérante.

20      En outre, la chambre de recours a ajouté que, même si le terme adéquat utilisé en italien pour désigner un vin fin ou raffiné était « fine » et non « fino », cette impropriété de langage n’avait pas de conséquence sur la détermination du caractère distinctif de la marque demandée. À cet égard, contrairement à ce que soutient la requérante, la décision attaquée ne présente pas de contradiction. En effet, la chambre de recours a pris en considération cette impropriété de langage, tout en expliquant les raisons pour lesquelles celle-ci n’avait pas d’incidence sur le fait que le mot « fino » est dépourvu de caractère distinctif s’agissant des produits en cause.

21      Il ressort, par ailleurs, des arguments présentés par la requérante dans le cadre du présent moyen, mais également dans le recours dans son ensemble, qu’elle a été en mesure de comprendre les raisons pour lesquelles la chambre de recours a estimé que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

22      Il résulte de tout ce qui précède que la chambre de recours a, conformément à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, fait apparaître de façon claire et non équivoque les motifs essentiels pour lesquels elle a considéré que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif.

23      Dès lors, il y a lieu d’écarter le présent moyen.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

24      Dans le cadre de ce moyen, la requérante fait valoir, en substance, que, contrairement à ce qu’a estimé la chambre de recours, la marque demandée présente le caractère distinctif requis pour qu’il soit procédé à son enregistrement. Par ailleurs, la requérante fait observer que, si la chambre de recours, par la décision attaquée, a rejeté sa demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, elle a néanmoins suivi un raisonnement relevant exclusivement de l’article 7, paragraphe, 1, sous c), dudit règlement.

25      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

26      Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

27      Il résulte d’une jurisprudence constante que le caractère distinctif d’une marque, au sens de cette disposition, signifie que cette marque permet d’identifier les produits et les services pour lesquels l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ces produits et ces services de ceux d’autres entreprises [voir arrêt du 24 février 2016, Coca-Cola/OHMI (Forme d’une bouteille à contours sans cannelures), T‑411/14, EU:T:2016:94, point 34 et jurisprudence citée].

28      Ainsi, les signes dépourvus de caractère distinctif visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine du produit ou du service couvert par celle-ci, afin de permettre au consommateur qui acquiert ce produit ou ce service de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative [voir arrêt du 28 juin 2017, Colgate-Palmolive/EUIPO (AROMASENSATIONS), T‑479/16, non publié, EU:T:2017:441, point 16 et jurisprudence citée].

29      Le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent qui est constitué par le consommateur de ces produits ou services (voir arrêt du 24 février 2016, Forme d’une bouteille à contours sans cannelures, T‑411/14, EU:T:2016:94, point 35 et jurisprudence citée).

30      Un signe est inapte à remplir la fonction essentielle de la marque, et n’est donc pas distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, lorsque le lien établi entre sa teneur sémantique et les produits et services en cause est suffisamment concret et direct pour que, dans l’esprit du public pertinent, ce signe permette une identification immédiate de ces produits et services [voir, en ce sens, arrêts du 16 mai 2013, Restoin/OHMI (EQUIPMENT), T‑356/11, non publié, EU:T:2013:253, point 42, et du 27 juin 2013, International Engine Intellectual Property Company/OHMI (PURE POWER), T‑248/11, non publié, EU:T:2013:333, point 20 et jurisprudence citée].

31      Par ailleurs, un minimum de caractère distinctif suffit à faire obstacle à l’application du motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 [voir arrêt du 4 juillet 2018, Deluxe Entertainment Services Group/EUIPO (deluxe), T‑222/14 RENV, non publié, EU:T:2018:402, point 56 et jurisprudence citée].

32      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si, comme le soutient la requérante, la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 en concluant que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif.

33      En premier lieu, il y a lieu de confirmer les appréciations de la chambre de recours figurant aux points 22 à 24 de la décision attaquée, au demeurant non contestées par la requérante, selon lesquelles le public pertinent comprend, en l’espèce, des consommateurs de vins, à savoir des produits destinés à une catégorie de consommateurs très large. Dans la mesure où la marque demandée est composée de termes issus de la langue italienne, le consommateur qui doit être pris en considération est le consommateur de vins italophone, raisonnablement attentif et avisé.

34      À cet égard, la chambre de recours a pertinemment rappelé que, en vertu de l’article 7, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, le paragraphe 1 de ce même article est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

35      En second lieu, s’agissant de la signification de la marque demandée, la requérante, d’une part, estime que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant que le signe verbal BIANCOFINO constituait une simple indication descriptive des produits en question. D’autre part, elle reproche à la chambre de recours de ne pas avoir examiné le signe demandé dans son ensemble et de s’être contentée d’affirmer que celui-ci était composé de deux termes dénués de caractère distinctif, alors que, selon elle, l’union de ces termes constitue une expression fantaisiste. Plus particulièrement, la requérante ne conteste pas la signification du terme « bianco » retenue par la chambre de recours, mais se focalise sur la signification du terme « fino ».

36      Dès lors, il s’agit d’examiner si, à travers la marque BIANCOFINO, le consommateur identifie l’origine des produits qu’elle désigne, en lui permettant de distinguer, sans confusion possible, ces produits de ceux qui ont une autre provenance. En effet, lorsque, dans le domaine visé par la marque, le public pertinent perçoit un signe comme fournissant des informations sur la nature des produits ou des services qu’elle désigne et non comme indiquant l’origine des produits ou des services en cause, la marque ne satisfait pas aux conditions prévues par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 [voir, en ce sens, arrêt du 29 avril 2010, Kerma/OHMI (BIOPIETRA), T‑586/08, non publié, EU:T:2010:171, point 22 et jurisprudence citée].

37      À cet égard, il est de jurisprudence constante que, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y aurait pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen successif des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque. En effet, il peut être utile, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs de la marque concernée (voir arrêt du 4 octobre 2007, Henkel/OHMI, C‑144/06 P, EU:C:2007:577, point 39 et jurisprudence citée).

38      En l’espèce, il est constant que le signe BIANCOFINO se décompose aisément et résulte de la juxtaposition de deux termes communs de la langue italienne « bianco » et « fino ».

39      Comme le relève la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée, sans que la requérante ne le conteste, le terme « bianco » est un adjectif qui désigne, en œnologie, un vin de couleur paille obtenu par la fermentation de raisins blancs. Il s’ensuit que, s’agissant des produits en question, le terme « bianco » donne des indications tenant à leur nature même et doit être considéré comme dépourvu de caractère distinctif.

40      Quant au terme « fino », la requérante ne conteste pas la signification que la chambre de recours emprunte au dictionnaire italien Treccani, à savoir « raffiné, pur », mais elle précise qu’il s’agit d’une des nombreuses significations de ce terme, qui n’est pas utilisé dans le domaine du vin. La requérante ajoute que le terme « fino » ne figure ni dans le glossaire du vin italien ni dans la législation italienne relative au vin, et que le terme exact pour définir un vin au parfum élégant et harmonieux en bouche est « fine ».

41      Il convient de relever que le fait que la marque demandée, ou les mots qui la composent, puissent avoir d’autres significations ne fait pas obstacle à l’application du motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. En effet, selon une jurisprudence constante, un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de ladite disposition, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [voir arrêt du 23 janvier 2014, Novartis/OHMI (CARE TO CARE), T‑68/13, non publié, EU:T:2014:29, point 41 et jurisprudence citée].

42      En l’espèce, le mot « fino » est défini dans la version en ligne du dictionnaire Treccani, comme une variante du mot « fine » et possède un très grand nombre de significations, dont celle qui recouvre, comme précisé à juste titre par la chambre de recours, l’indication de « raffiné ». Dès lors, le signe demandé, par la présence du mot « fino », sera perçu par le public pertinent, en au moins une de ses significations potentielles, comme une référence à la qualité supérieure ou au caractère haut de gamme des produits en cause et, partant, comme une indication de qualité de ces produits.

43      Il convient cependant de rechercher si, outre cette perception d’indication de qualité, le signe demandé pourrait néanmoins être perçu comme une indication d’origine commerciale des produits en cause, notamment parce qu’il ne se réduit pas à une telle indication de qualité, mais possède une certaine originalité ou prégnance, nécessite un minimum d’effort d’interprétation ou déclenche un processus cognitif auprès du public pertinent [voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2015, Steinbeck/OHMI – Alfred Sternjakob (BE HAPPY), T‑707/13 et T‑709/13, non publié, EU:T:2015:252, point 24 et jurisprudence citée].

44      À cet égard, il importe de relever que le terme « fino » ne contient aucune caractéristique intrinsèque permettant de considérer que, au-delà de sa perception en tant qu’indication de qualité par le public pertinent, celui-ci pourrait également être perçu par ce public comme étant une indication d’origine commerciale. Comme le fait observer à bon droit l’EUIPO, le simple fait que le terme « fine » soit plus usuel dans le domaine du vin que « fino » ne suffit pas pour que le public pertinent n’attribue à ce dernier aucune signification au sein du signe BIANCOFINO.

45      En ce qui concerne l’impression d’ensemble du signe BIANCOFINO, la requérante fait valoir que celui-ci constitue une combinaison inhabituelle et fantaisiste dotée de caractère distinctif, puisque le terme « fino » n’est pas utilisé par le public pertinent pour désigner une caractéristique du vin.

46      À cet égard, il convient de relever que, contrairement aux allégations de la requérante, la combinaison « biancofino » n’est pas inhabituelle dans sa structure, puisqu’elle ne s’écarte pas du langage courant. En effet, ainsi qu’il découle des points 24 et 29 de la décision attaquée, la marque demandée représente la simple juxtaposition de deux termes aisément compréhensibles, laquelle ne suscite pas une impression suffisamment différente de celle produite par chacun de ces termes et allant, par conséquent, au-delà de la somme de ceux-ci [voir, en ce sens, arrêts du 12 juin 2007, MacLean-Fogg/OHMI (LOKTHREAD), T‑339/05, non publié, EU:T:2007:172, point 52, et du 7 juillet 2011, Cree/OHMI (TRUEWHITE), T‑208/10, non publié, EU:T:2011:340, point 22].

47      Dès lors, comme le relève la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée, le signe verbal BIANCOFINO, dans son ensemble, sera perçu par le public pertinent, comme indiquant un « vin blanc et fin » et donc comme étant inapte à remplir la condition d’indication de l’origine commerciale des produits, visée à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. En effet, il y a bien un lien suffisamment direct et concret, au sens de la jurisprudence rappelée au point 30 ci-dessus, entre la teneur sémantique de la marque demandée et les produits en cause. À cet égard, il y a lieu de relever que, puisque la décision attaquée est fondée, à juste titre, sur l’existence d’un tel lien au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, il convient de rejeter aussi l’allégation de la requérante, rappelée au point 24 ci-dessus, selon laquelle ladite décision n’est fondée que sur un raisonnement relatif au caractère descriptif de la marque demandée, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce même règlement.

48      Ces conclusions ne sont pas remises en cause par l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas tenu compte des décisions antérieures de l’EUIPO, dans lesquelles aucun motif absolu de refus d’enregistrement n’avait été retenu en ce qui concernait les marques NERO FINO, NEROFINO et GRIGIOFINO.

49      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence bien établie, l’EUIPO est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union. Si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’EUIPO doit prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées ou annulées de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (voir, en ce sens, arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 73 à 77, et ordonnance du 26 mai 2016, Hewlett Packard Development Company/EUIPO, C‑77/16 P, non publiée, EU:C:2016:373, point 6).

50      D’une part, il appartient aux chambres de recours, lorsqu’elles décident de retenir une appréciation différente de celle adoptée dans des décisions antérieures relatives à des demandes similaires invoquées devant elles, de motiver explicitement cette divergence par rapport auxdites décisions [voir arrêt du 14 février 2019, Bayer Intellectual Property/EUIPO (Représentation d’un cœur), T‑123/18, EU:T:2019:95, point 35 et jurisprudence citée].

51      D’autre part, il résulte de la jurisprudence citée au point 49 ci-dessus que les décisions concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne, qui sont prises par les chambres de recours en vertu du règlement 2017/1001, relèvent d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire, si bien que la légalité des décisions de ces mêmes chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union. Par conséquent, les chambres de recours ne sauraient être liées par des décisions antérieures de l’EUIPO (voir arrêt du 14 février 2019, Représentation d’un cœur, T‑123/18, EU:T:2019:95, point 36 et jurisprudence citée). Cela est d’autant plus vrai lorsque, comme en l’espèce, la requérante, tant devant la chambre de recours que devant le Tribunal, n’a invoqué que des décisions par lesquelles les examinateurs de l’EUIPO, et non les chambres de recours, n’ont pas soulevé de motif absolu de refus en ce qui concerne des signes prétendument semblables à la marque demandée. En effet, selon une jurisprudence constante, les chambres de recours ne sauraient être liées par les décisions d’instances inférieures de l’EUIPO [arrêts du 22 mai 2014, NIIT Insurance Technologies/OHMI (EXACT), T‑228/13, non publié, EU:T:2014:272, point 48, et du 26 novembre 2015, Nürburgring/OHMI – Biedermann (Nordschleife), T‑181/14, non publié, EU:T:2015:889, point 44].

52      En tout état de cause, dans la présente affaire, la motivation que la chambre de recours a fournie explicite les raisons pour lesquelles une solution analogue à celle retenue à l’égard de la marque NERO FINO ne pouvait pas être retenue. En se prononçant explicitement sur cette marque, la chambre de recours s’est également implicitement prononcée sur la marque NEROFINO, que la requérante avait invoquée devant elle, tout comme la marque NERO FINO. Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante  concernant la marque GRIGIOFINO, il doit être rejeté comme inopérant, étant donné que la décision de l’examinateur relative à cette marque n’a pas été invoquée devant la chambre de recours et qu’elle n’est pas mentionnée dans la décision attaquée.

53      Par conséquent, il y a lieu de rejeter le présent moyen.

54      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que, contrairement aux allégations de la requérante, d’une part, la décision attaquée respecte l’obligation de motivation, et d’autre part, la chambre de recours a considéré, à bon droit, que la marque demandée se heurtait au motif de refus tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, et, partant, il convient de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens de la procédure devant le Tribunal, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Nosio SpA est condamnée aux dépens.

Papasavvas

Spielmann

Spineanu-Matei

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 décembre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.