Language of document : ECLI:EU:T:2012:312

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

20 juin 2012(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative CORONA – Marques nationales verbales antérieures KARUNA et KARŪNA – Motifs relatifs de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑357/10,

Kraft Foods Schweiz Holding GmbH, établie à Zug (Suisse), représentée par Mes P. Péters et T. de Haan, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Geroulakos, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Compañia Nacional de Chocolates, SA, établie à Medellín (Colombie), représentée par Me I. Temiño Ceniceros, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 29 juin 2010 (affaire R 696/2009-4), relative à une procédure d’opposition entre Kraft Foods Schweiz Holding GmbH et Compañia Nacional de Chocolates, SA,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, président, V. Vadapalas et K. O’Higgins (rapporteur), juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 27 août 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 16 décembre 2010,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 25 novembre 2010,

à la suite de l’audience du 29 mars 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 9 mai 2006, l’intervenante, Compañia Nacional de Chocolates SA a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Chocolat ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 43/2006, du 23 octobre 2006.

5        Le 21 novembre 2006, la requérante, Kraft Foods Schweiz Holding GmbH, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009) à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque estonienne verbale KARUNA, déposée le 30 janvier 1995 et enregistrée le 28 août 1998 sous le numéro 20 671 pour désigner des produits compris dans la classe 30, correspondant notamment à la description suivante : « Chocolat » ;

–        la marque lettone verbale KARUNA, déposée le 1er février 1995 et enregistrée le 20 avril 1997 sous le numéro M 36 592 pour désigner des produits compris dans la classe 30, correspondant notamment à la description suivante : « Chocolat » ;

–        la marque lituanienne verbale KARŪNA, déposée le 22 décembre 1994 et enregistrée le 12 juin 1998 sous le numéro 28 143 pour désigner des produits compris dans la classe 30, correspondant notamment à la description suivante : « Chocolat ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 207/2009].

8        Par décision du 29 avril 2009, la division d’opposition a fait droit à l’opposition pour tous les produits concernés, au motif, notamment, qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 pour le public estonien, letton et lituanien.

9        Le 24 juin 2009, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 29 juin 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours a accueilli le recours et a annulé la décision de la division d’opposition. En substance, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit, pris dans leur ensemble, étaient dissemblables, eu égard principalement au fait que les produits en cause étaient normalement choisis dans les rayons des magasins par les consommateurs, ce qui rendait l’aspect visuel desdits signes plus pertinent. Les marques en conflit n’étant pas similaires de ce point de vue, la chambre de recours a conclu à l’absence de risque de confusion entre lesdites marques. Dans ces conditions, et malgré les éléments de preuve qui établiraient que les marques antérieures avaient acquis une renommée sur leurs territoires respectifs, la chambre de recours a estimé qu’il n’y avait pas lieu d’examiner si la marque demandée ne tirerait pas indûment profit de la renommée desdites marques, ni ne nuirait à leur image ou à leur caractère distinctif.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

13      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité de certaines annexes de la requête

14      Il convient de relever que les annexes A.7.a, A.7.b, A.8, A.9.a, A.9.b, A.9.c et A.10 de la requête ne figurent pas dans le dossier administratif. Ces pièces ont été produites pour la première fois devant le Tribunal.

15      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les pièces produites pour la première fois devant le Tribunal, ne peuvent être prises en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 19, et la jurisprudence citée]. Il convient donc d’écarter l’annexe A.10 de la requête, qui contient des exemples d’emballages de chocolat sur lesquels la marque antérieure est écrite en alphabet cyrillique, sans qu’il soit nécessaire d’examiner sa force probante.

16      En revanche, dans les circonstances de l’espèce, les annexes A.7.a, A.7.b, A.8, A.9.a, A.9.b et A.9.c de la requête doivent être déclarées recevables. Bien qu’elles aient été produites pour la première fois devant le Tribunal, elles visent à établir un fait notoire, à savoir le fait que la langue russe serait comprise par la population des pays baltes. Or, un requérant est en droit de présenter devant le Tribunal des documents afin d’étayer l’exactitude d’un fait notoire qui n’a pas été établie dans la décision de l’organe de l’OHMI attaquée devant le Tribunal (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 10 novembre 2011, LG Electronics/OHMI, C‑88/11 P, non encore publié au Recueil, points 29 et 30, et la jurisprudence citée). Les annexes A.7.a, A.7.b, A.8, A.9.a, A.9.b et A.9.c de la requête doivent donc être déclarées recevables.

 Sur le fond

17      À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et, le second, d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, de ce même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009

18      Par ce premier moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a conclu à tort qu’il n’existait pas de risque de confusion dans la mesure où les signes en conflit n’étaient pas similaires.

19      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

20      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

21      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

22      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

23      Il y a lieu de relever que la requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle, le territoire pertinent pour l’analyse du risque de confusion est l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie et le public pertinent est constitué des consommateurs de ces pays. En l’espèce, eu égard au fait que les produits en cause sont des produits de consommation courante destinés au grand public, le public pertinent est le consommateur moyen. Celui-ci est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26).

24      Par ailleurs, aucune des parties ne conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les produits en cause sont identiques.

–       Sur la comparaison des signes en conflit

25      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

26      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt OHMI/Shaker, point 25 supra, point 41, et la jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts de la Cour OHMI/Shaker, précité, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, point 43). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt Nestlé/OHMI, précité, point 43).

27      Par ailleurs rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence d’une similitude visuelle entre une marque verbale et une marque figurative, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique capable de donner lieu à une impression visuelle [voir arrêt du Tribunal du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, Rec. p. II‑1515, point 43, et la jurisprudence citée].

28      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, aux points 19 à 21 de la décision attaquée, que les signes en cause n’étaient pas similaires aux motifs qu’ils produisaient une impression globale différente sur le plan visuel, qu’ils ne présentaient qu’un faible degré de similitude sur le plan phonétique, et qu’aucune comparaison sur le plan conceptuel n’était possible entre eux.

29      Ces conclusions, qui sont contestées par la requérante, doivent être approuvées.

30      S’agissant, en premier lieu, de la comparaison visuelle, les signes en conflit diffèrent non seulement en raison de la présence des éléments figuratifs dans le signe demandé, à savoir des lettres blanches reproduites dans un ovale vert, l’ensemble reproduit sur un fond rectangulaire jaune, mais également en raison de leurs éléments verbaux. En dépit du fait que les éléments verbaux des marques en conflit ont trois lettres sur six en commun, la différence résulte du fait que les marques antérieures commencent par la suite de lettres « ka » et la marque demandée par la suite de lettres « co » et que le consommateur attache normalement plus d’attention à la partie initiale des mots [arrêt du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, Rec. p. II‑965, point 81].

31      L’argument de la requérante, selon lequel les éléments figuratifs de la marque demandée sont banals et ordinaires, ne saurait être retenu. En effet, dans la marque figurative demandée, l’élément verbal est entouré par un ovale et l’ensemble par un rectangle, ce qui, en soi, la distingue des marques antérieures purement verbales, cette différence s’ajoutant en outre à celles existant entre les éléments verbaux détaillées au point 30 ci-dessus.

32      En ce qui concerne, en deuxième lieu, la comparaison phonétique, il y a lieu de relever que le début des signes en conflit se prononce différemment, dans la mesure où les marques antérieures commencent par la syllabe « ka » et la marque demandée par la syllabe « co ». La deuxième syllabe desdits signes diffère en raison des voyelles qui la composent, la syllabe « ru » étant prononcée de manière plus longue que la syllabe « ro » en estonien, en letton et en lituanien. Toutefois, en raison de l’identité de la dernière syllabe « na » et de la séquence des consonnes analogues desdits signes, il existe une faible similitude phonétique entre ces derniers pris dans leur ensemble [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 septembre 2009, Dominio de la Vega/OHMI – Ambrosio Velasco (DOMINIO DE LA VEGA), T‑458/07, non publié au Recueil, point 42].

33      S’agissant, en troisième lieu, de la comparaison conceptuelle, il convient de constater que, ainsi qu’il ressort du point 21 de la décision attaquée, le mot « corona », signifiant « couronne » en espagnol, n’a aucune signification en estonien, en letton, ou en lituanien. Aucune comparaison conceptuelle n’est donc possible entre les signes en cause dans les trois pays baltes. Le simple fait que le mot lituanien « karūna » signifie « couronne » ne suffit pas pour établir que le public pertinent associe les termes « karuna » ou « karūna » avec le mot « corona » qui demeure un mot étranger.

34      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de la requérante selon lequel le fait que le public estonien, letton et lituanien possède une bonne maîtrise de la langue russe est un fait notoire et que, par conséquent, le mot russe « корона », transcrit « korona » en alphabet latin, et signifiant « couronne », serait directement associé à la marque demandée CORONA ainsi qu’aux marques antérieures KARUNA et KARŪNA.

35      À cet égard, force est de constater que, à supposer même que le public pertinent sache que le mot russe « корона » signifie « couronne », il ne ressort d’aucun élément que ledit public associera ce terme en alphabet cyrillique, ou le terme équivalent en alphabet latin, « korona », à l’élément verbal « corona » du signe demandé, mot étranger sans aucune signification en estonien, en letton et en lituanien.

36      Quant à l’argument de la requérante selon lequel les marques antérieures KARUNA et KARŪNA ont été continuellement utilisées pendant des années, pour le chocolat, accompagnées d’une représentation graphique d’une couronne, ce qui renforcerait l’association du consommateur de chocolat avec la représentation d’une couronne, force est de constater que les marques antérieures invoquées devant la chambre de recours et le Tribunal ne contiennent aucune représentation graphique (voir les annexes A.3 à A.5 de la requête) et qu’il s’agit, en fait, de marques verbales.

37      À cet égard, il convient de rappeler que les marques verbales sont des marques constituées exclusivement de lettres, de mots ou d’associations de mots, écrits en caractères d’imprimerie dans une police normale, sans élément graphique spécifique [arrêt du Tribunal du 20 avril 2005, Faber Chimica/OHMI – Industrias Quimicas Naber (Faber), T‑211/03, Rec. p. II‑1297, point 33]. La protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale porte sur le mot indiqué dans la demande d’enregistrement et non sur les aspects graphiques ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Ontex/OHMI – Curon Medical (CURON), T‑353/04, non publié au Recueil, point 74].

38      En tout état de cause et pour des raisons déjà évoquées au point 15 ci-dessus, le Tribunal ne saurait comparer le signe demandé avec des signes figuratifs qui ne formaient pas la base de la procédure d’opposition en l’espèce. Par ailleurs, dans la mesure où le caractère distinctif d’une marque antérieure s’avère important et jouit d’une protection plus étendue que les marques dont le caractère distinctif est faible, il convient de rappeler que cette considération s’effectue au niveau de l’appréciation du risque de confusion entre la marque antérieure et la marque demandée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 18).

39      Enfin, contrairement à ce que prétend la requérante, la chambre de recours a procédé, de manière implicite, au point 22 de la décision attaquée, à une appréciation globale de la similitude entre les signes en conflit. Ainsi, eu égard à l’absence de similitude visuelle, à la faible similitude phonétique et à l’absence de similitude conceptuelle entre les marques en conflit, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu qu’il n’existait « aucune possibilité » que le public pertinent les confonde et, partant, que lesdites marques n’étaient ni identiques ni similaires.

–       Sur le risque de confusion

40      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt Canon, point 38 supra, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, et, Rec. p. II‑5409, point 74]. Toutefois, une telle appréciation globale du risque de confusion n’est exigée que lorsque les deux conditions cumulatives d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 sont a priori remplies [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 7 octobre 2010, Accenture Global Services/OHMI – Silver Creek Properties (acsensa), T‑244/09, non publié au Recueil, point 27, et la jurisprudence citée].

41      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 22 de la décision attaquée, que, malgré l’identité des produits en cause, les différences entre les signes en conflit excluaient que les consommateurs pertinents aient pu être induits en erreur en ce qui concernait l’origine commerciale desdits produits. En outre, le fait que le chocolat n’est pas commandé verbalement, mais simplement choisi dans les rayons des magasins par les consommateurs, rendra l’aspect visuel desdits signes plus pertinent. À cet égard, il convient de relever que le degré d’attention du public pertinent à prendre en considération pour apprécier le risque de confusion par rapport aux produits de consommation courante n’est ni particulièrement élevé ni particulièrement faible (voir point 23 ci-dessus).

42      Il ressort des considérations qui précèdent qu’une des conditions cumulatives d’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 fait défaut. Eu égard à l’absence de similitude entre les marques en cause, il n’y a pas lieu de procéder à l’appréciation globale du risque de confusion (voir point 40 ci-dessus) ou d’examiner les autres arguments de la requérante concernant cette appréciation.

43      Au vu de tous ces éléments, les différences entre les signes en cause excluent que le public pertinent puisse croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. C’est à tort que la requérante invoque, en l’espèce, la jurisprudence selon laquelle les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (arrêt de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 24). Dès lors, la chambre de recours a considéré, à juste titre, qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les signes en cause.

44      À cet égard, la décision de la division d’opposition de l’OHMI du 8 octobre 2010 produite par la requérante n’est pas susceptible de remettre en cause cette conclusion. En effet, il y a lieu de relever que cette décision, qui concerne une autre procédure d’opposition, est postérieure à la décision attaquée et que, en tout état de cause, la requérante n’avance aucun élément de nature à démontrer l’incidence de ladite décision sur la solution du litige.

45      Il s’ensuit que le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009

46      Dans le cadre du deuxième moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a omis de statuer sur l’existence d’un lien entre les signes en cause au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

47      Il convient de rappeler que, aux termes dudit article, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans la Communauté et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice.

48      Il ressort du libellé de l’article 8, paragraphe 5, que son application est soumise aux conditions suivantes : premièrement, l’identité ou la similitude des marques en conflit ; deuxièmement, l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée dans le cadre de l’opposition et, troisièmement, l’existence d’un risque que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice. Ces conditions sont cumulatives et l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [arrêt du Tribunal du 25 mai 2005, Spa Monopole/OHMI – Spa-Finders Travel Arrangements (SPA‑FINDERS), T‑67/04, Rec. p. II‑1825, point 30].

49      En ce qui concerne la condition relative à l’identité ou à la similitude entre les marques antérieures et la marque demandée, telle que prévue à l’article 8, paragraphes 1, sous b), et 5 du règlement n° 207/2009, il y a lieu de constater que l’appréciation factuelle de la similitude est effectuée selon les mêmes critères. En effet, lorsque la condition de similitude n’est pas remplie dans le cadre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, il convient également de considérer, en se fondant sur la même analyse, que cette condition n’est pas non plus satisfaite au regard du paragraphe 5 du même article (ordonnance de la Cour du 14 mars 2011, Ravensburger/OHMI, C‑370/10 P, non encore publiée au Recueil, point 63).

50      Il s’ensuit que c’est à bon droit que la chambre de recours a, au point 23 de la décision attaquée, écarté l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 en se fondant sur l’absence de similitude des signes en conflit telle qu’elle résulte de l’examen de ceux-ci au regard de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

51      Par conséquent, il convient de rejeter le deuxième moyen comme non fondé.

52      Eu égard aux considérations qui précèdent, le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Kraft Foods Schweiz Holding GmbH est condamnée aux dépens.

Papasavvas

Vadapalas

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 juin 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.