Language of document : ECLI:EU:T:2002:211

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

11 septembre 2002 (1)

«Fonctionnaires - Indemnité de dépaysement - Article 4, paragraphe 1, sous a), de l'annexe VII du statut - Services effectués pour une organisation internationale»

Dans l'affaire T-127/00,

Michael Nevin , fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Tervuren (Belgique), représenté par Me N. Lhoëst, avocat, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité d'agent, assisté de Mes D. Waelbroeck et A. Vroninks, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d'une part, une demande d'annulation de la décision de la Commission du 9 avril 1999 refusant au requérant le bénéfice de l'indemnité de dépaysement prévue à l'article 4 de l'annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes et, d'autre part, une demande de paiement de cette indemnité augmentée des intérêts moratoires,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. M. Vilaras, président, Mme V. Tiili et M. P. Mengozzi, juges,

greffier: M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 11 avril 2002,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    Aux termes de l'article 4, paragraphe 1, de l'annexe VII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut»):

«L'indemnité de dépaysement égale à 16 % du montant total du traitement de base ainsi que de l'allocation de foyer et de l'allocation pour enfant à charge versées au fonctionnaire est accordée:

a)    au fonctionnaire:

    -    qui n'a pas et n'a jamais eu la nationalité de l'État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation,

    

    et

    -    qui n'a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire européen dudit État. Pour l'application de cette disposition, les situations résultant deservices effectués pour un autre État ou une organisation internationale ne sont pas à prendre en considération;

[...]»

Faits à l'origine du litige

2.
    M. Nevin, de nationalité irlandaise, réside en Belgique depuis le 5 février 1990.

3.
    Du 5 février 1990 au 15 mars 1993, il a travaillé sur le territoire belge pour différentes entreprises privées.

4.
    Du 19 juillet 1993 au 15 février 1995, sous réserve d'une interruption allant du 15 juillet au 7 août 1994, il a été employé par des sociétés d'intérim pour être mis à la disposition de la Commission en tant que commis.

5.
    Du 16 février 1995 au 15 février 1996, il a travaillé auprès de la Commission, toujours en tant que commis, sous un contrat d'agent auxiliaire. Pendant cette période, la Commission lui a versé l'indemnité de dépaysement prévue à l'article 4, paragraphe 1, de l'annexe VII du statut.

6.
    Du 16 février au 31 juillet 1996, le requérant a de nouveau été employé par une société d'intérim, pour être mis à la disposition de la Commission en tant que commis.

7.
    Du 16 décembre 1996 au 31 mars 1999, il a été engagé par la Commission, toujours comme commis, par un contrat d'agent temporaire. Durant cette période, il n'a pas bénéficié de l'indemnité de dépaysement. Une indemnité d'expatriation lui a été accordée en application de l'article 4, paragraphe 2, de l'annexe VII du statut.

8.
    Par lettre du 25 mars 1999, la Commission a offert au requérant un poste de fonctionnaire stagiaire de grade D 3, échelon 1, auprès de la direction générale «Emploi, relations industrielles et affaires sociales» (DG V). Dans cette lettre, il était indiqué que, une fois confirmées les informations contenues dans l'acte de candidature du requérant, son salaire net mensuel, y compris les allocations familiales et les indemnités de dépaysement, s'élèverait à 2 342,53 euros.

9.
    Le requérant a pris ses fonctions en tant que fonctionnaire stagiaire le 1er avril 1999.

10.
    Par décision du 9 avril 1999, la Commission lui a refusé l'octroi de l'indemnité de dépaysement.

11.
    Par note du 29 juin 1999, le requérant a introduit une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut à l'encontre de cette décision.

12.
    Ensuite, par une note complémentaire du 25 octobre 1999, il a développé l'argumentation contenue dans sa réclamation.

13.
    Par décision du 9 février 2000, l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l'«AIPN») a rejeté la réclamation du requérant.

14.
    Il ressort de cette décision que l'indemnité de dépaysement a été refusée au requérant au motif qu'il a habité et/ou exercé son activité professionnelle sur le territoire belge pendant la période de cinq ans expirant six mois avant son entrée en fonctions, en application de l'article 4, paragraphe 1, sous a), de l'annexe VII du statut. Plus particulièrement, l'AIPN a considéré que, au cours de la période visée audit article - les cinq années ayant précédé le 30 septembre 1998 -, le requérant a effectué un service pour une organisation internationale seulement lorsqu'il était agent auxiliaire (du 16 février 1995 au 15 février 1996) ou agent temporaire (du 16 décembre 1996 au 31 mars 1999) de la Commission. L'AIPN a ainsi neutralisé, au titre de la dernière phrase dudit article, une période de trois ans, trois mois et quinze jours et a constaté que, en dehors de celle-ci, la période de cinq ans à prendre en considération était entièrement couverte par des périodes au cours desquelles le requérant avait soit travaillé en Belgique pour des entreprises privées (parmi lesquelles des entreprises de travail intérimaire), soit habité à Bruxelles sans travailler. L'AIPN, en particulier, a estimé que les périodes de travail en qualité d'intérimaire auprès de la Commission ne peuvent pas être neutralisées au titre de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut.

Procédure et conclusions des parties

15.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 mai 2000, le requérant a introduit le présent recours.

16.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, a invité les parties à produire certains documents et la défenderesse à répondre à une question écrite. Les parties ont déféré à ces demandes dans le délai qui leur avait été imparti.

17.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries lors de l'audience qui s'est déroulée le 11 avril 2002.

18.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la décision du 9 avril 1999 refusant de lui octroyer l'indemnité de dépaysement;

-    pour autant que de besoin, annuler la décision de la Commission du 9 février 2000 portant rejet de sa réclamation;

-    condamner la Commission à lui verser l'indemnité de dépaysement à partir du 1er avril 1999, majorée des intérêts moratoires au taux de 8 % l'an;

-    condamner la Commission aux dépens.

19.
    La défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours dans son ensemble comme non fondé;

-    statuer comme de droit sur les dépens.

En droit

Sur les conclusions du requérant tendant à l'annulation de la décision explicite de rejet de sa réclamation

20.
    Bien que les conclusions du requérant visent également à l'annulation de la décision de la Commission du 9 février 2000 qui a rejeté la réclamation introduite au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut, le présent recours a pour effet de saisir le Tribunal de l'acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée. Il en résulte que le chef de conclusions du requérant concernant l'annulation de la décision explicite de la Commission de rejet de sa réclamation se confond avec celui relatif à l'annulation de la décision explicite de la Commission du 9 avril 1999 portant refus de lui octroyer l'indemnité de dépaysement (voir ordonnance du Tribunal du 24 avril 2001, Pierard/Commission, T-172/00, RecFP p. I-A-91 et II-429, point 22, et la jurisprudence citée).

Sur les conclusions du requérant tendant à l'annulation de la décision du 9 avril 1999 portant refus de lui octroyer l'indemnité de dépaysement

21.
    À l'appui de son recours, le requérant soulève un moyen unique, tiré de la violation de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut. Selon le requérant, toutes les conditions prévues pour l'octroi de l'indemnité de dépaysement sont réunies en l'espèce. Non seulement il n'aurait jamais eu la nationalité belge, mais encore il n'aurait pas, de façon habituelle, exercé une activité professionnelle en Belgique pendant la période de référence de cinq ans expirant six mois avant son entrée en fonctions. Plus particulièrement, la Commission aurait à tort omis de neutraliser, au titre de «situations résultant de services effectués pour une organisation internationale», les périodes du 19 juillet 1993 au 15 février 1995 et du 16 février au 31 juillet 1996, pendant lesquelles il a travaillé auprès d'elle sous le couvert de contrats de travail intérimaire (ci-après les «périodes litigieuses»).

22.
    Ce moyen se subdivise en deux branches. Par la première branche, le requérant fait valoir que, nonobstant le fait que la Commission ait eu recours au régime du travail intérimaire, il doit être considéré comme ayant été employé directement par elle sous un contrat de travail à durée indéterminée pendant les périodes litigieuses. Par la seconde branche du moyen, le requérant soutient que, en tout état de cause, son travail en qualité d'intérimaire auprès de la Commission pendant les périodes litigieuses est couvert par la dérogation prévue à l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut.

est

Sur la première branche du moyen unique, relative à la requalification des contrats de travail intérimaire du requérant

- Arguments des parties

23.
    Selon le requérant, les contrats de travail intérimaire par lesquels il a été mis à la disposition de la Commission au cours des périodes litigieuses ont été conclus en violation du code de bonne conduite contenant les dispositions d'ensemble régissant les relations entre les services de la Commission et certaines catégories de personnel, approuvé par la Commission le 18 octobre 1994, et en violation de la loi belge du 24 juillet 1987 sur le travail temporaire, le travail intérimaire et la mise de travailleurs à la disposition d'utilisateurs (Moniteur belge du 20 août 1987, p. 12405, ci-après la «loi du 24 juillet 1987»). Partant, les contrats en question devraient, sur la base de ces même textes, et notamment de l'article 31, paragraphe 3, de la loi du 24 juillet 1987, être requalifiés de contrats de travail à durée indéterminée conclus directement avec la Commission dès le début de l'exécution des travaux.

24.
    À cet égard, le requérant fait observer que, aux termes du code de bonne conduite, l'engagement continu d'un intérimaire par la Commission ne peut dépasser, en Belgique, une période de six mois et qu'un nouvel engagement de la même personne comme intérimaire peut être demandé seulement après une interruption d'au moins trois mois. Or, l'engagement du requérant comme intérimaire auprès de la Commission du 19 juillet 1993 au 15 février 1995 et du 16 février au 31 juillet 1996, soit pour une période correspondant à deux ans et quinze jours, dépasserait largement la limite prévue.

25.
    De même, le code de bonne conduite ne permettrait à la Commission de bénéficier de la mise à disposition de personnel intérimaire que dans les conditions fixées par les dispositions réglementaires et législatives en vigueur en Belgique. Or, la loi du 24 juillet 1987 autoriserait le recours au travail intérimaire dans les seuls cas de remplacement d'un travailleur permanent dont le contrat est suspendu ou a pris fin, de surcroît extraordinaire de travail ou d'exécution d'un travail exceptionnel. En l'espèce, ces dispositions auraient été violées, étant donné que, malgré la mention «remplacement suspension» figurant sur ses contrats de travail intérimaire, le requérant n'aurait remplacé aucun travailleur permanent dont le contrat aurait été suspendu. La Commission aurait également commis un détournement de pouvoir,puisqu'elle aurait engagé sous des contrats de travail intérimaire un travailleur qu'elle aurait dû engager sous un contrat de travail à durée indéterminée.

26.
    La défenderesse conteste la recevabilité de l'argument du requérant concernant la requalification de ses contrats de travail intérimaire de contrats de travail à durée indéterminée, dans la mesure où cette requalification suppose l'application du droit belge et échappe à la compétence d'annulation du Tribunal. Quant au fond, elle rappelle que, conformément à la jurisprudence (arrêt du Tribunal du 10 mai 2000, Simon/Commission, T-177/97, RecFP p. I-A-75 et II-319), une personne mise à la disposition d'une institution communautaire par une tierce personne ne peut pas prétendre a posteriori avoir eu une relation de travail statutaire avec l'institution, une telle relation ne pouvant notamment découler que d'un acte de l'autorité communautaire compétente.

27.
    Par ailleurs, la défenderesse fait valoir qu'aucune violation de la loi du 24 juillet 1987 n'a été commise en l'espèce, cette loi n'exigeant pas que le travail intérimaire soit limité à six mois lorsque l'intérimaire remplace un travailleur permanent dont l'exécution du contrat a été suspendue. De plus, étant donné que le code de bonne conduite constitue un acte purement interne qui ne crée pas et n'a pas vocation à créer des droits subjectifs au profit des personnes concernées, la prétendue violation de la limite de six mois prévue audit code, à la supposer établie, ne pourrait constituer un motif autonome d'annulation dans le cadre d'un recours fondé sur les articles 236 CE et 91 du statut. Enfin, le code de bonne conduite ne prévoirait pas une quelconque sanction de requalification des contrats de travail intérimaire de plus de six mois de contrats avec l'institution comme le prétend le requérant.

- Appréciation du Tribunal

28.
    Selon la jurisprudence, la procédure précontentieuse a pour objet de permettre un règlement amiable des différends surgis entre les fonctionnaires ou agents et l'administration. Pour qu'une telle procédure puisse atteindre son objectif, il faut que l'AIPN soit en mesure de connaître de façon suffisamment précise les critiques que les intéressés formulent à l'encontre de la décision contestée. En outre, dans les recours de fonctionnaires, les conclusions présentées devant le juge communautaire ne peuvent avoir que le même objet que celles exposées dans la réclamation et ne contenir que des chefs de contestation reposant sur une cause identique à celle des chefs de contestation invoqués dans la réclamation. Ces chefs de contestation peuvent, devant ce juge, être développés par la présentation de moyens et arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s'y rattachant étroitement. Enfin, puisque la procédure précontentieuse a un caractère informel et que les intéressés agissent, en général, à ce stade sans le concours d'un avocat, l'administration ne doit pas interpréter les réclamations de façon restrictive, mais doit, au contraire, les examiner dans un esprit d'ouverture (arrêt de la Cour du 14 mars 1989, Del Amo Martinez/Parlement, 133/88, Rec. p. 689, points 9 à 11;arrêt du Tribunal du 23 janvier 2002, Gonçalves/Parlement, T-386/00, non encore publié au Recueil, point 42).

29.
    Il s'ensuit que tout chef de contestation qui n'a pas été invoqué dans la réclamation précontentieuse, alors que l'intéressé a été mis en mesure de le formuler, doit être rejeté comme irrecevable. Pour autant que cette question de recevabilité n'a pas été soulevée par la partie défenderesse, le Tribunal peut l'examiner d'office en vertu de l'article 113 du règlement de procédure, étant donné qu'il s'agit d'une question d'ordre public (voir, arrêt du Tribunal du 4 mai 1999, Z/Parlement, T-242/97, RecFP p. I-A-77 et II-401, point 58, et la jurisprudence citée).

30.
    En l'espèce, si les conclusions formulées dans le recours ont le même objet que celles formulées dans la réclamation, à savoir la contestation de la décision de la défenderesse refusant d'accorder au requérant l'indemnité de dépaysement, force est de constater que les arguments relatifs à la requalification des contrats de travail intérimaire du requérant de contrats de travail avec la Commission, y compris celui tiré d'un prétendu détournement de pouvoir, ne figuraient nullement dans la réclamation, et n'ont, par conséquent, pas été examinés dans la décision prise en réponse à cette réclamation.

31.
    À cet égard, il convient d'observer, d'une part, que non seulement le requérant n'a fait aucune allusion, dans sa réclamation administrative, à la requalification de ses contrats de travail intérimaire en raison des irrégularités qui les auraient affectés, mais encore il n'a avancé aucun élément dont la défenderesse aurait pu déduire, même en s'efforçant d'interpréter la réclamation dans un esprit d'ouverture, qu'il entendait invoquer une telle requalification (voir, en ce sens, arrêt Del Amo Martinez/Parlement, précité, point 13; arrêts du Tribunal du 29 mars 1990, Alexandrakis/Commission, T-57/89, Rec. p. II-143, point 10; du 30 novembre 1994, G/Commission, T-588/93, RecFP p. I-A-277 et II-875, point 29, et du 3 octobre 2000, Cubero Vermurie/Commission, T-187/98, RecFP p. I-A-195 et II-885, point 37).

32.
    D'autre part, à supposer même que les arguments relatifs à ladite requalification puissent être considérés comme étant liés à ceux déjà avancés lors de la procédure précontentieuse, en ce qu'ils visent, comme ces derniers, à soutenir le moyen unique tiré de la violation de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut, un tel lien n'apparaît pas étroit, dans la mesure où il ne s'agit plus d'étayer la thèse selon laquelle le travail intérimaire au sein d'une institution communautaire constitue un service effectué pour une organisation internationale au sens dudit article, mais de faire constater que les prestations du requérant au cours des périodes litigieuses ont été effectuées, en droit, dans le cadre d'un contrat de travail conclu avec l'institution défenderesse et non pas sous le régime du travail intérimaire.

33.
    Dès lors, la première branche du moyen unique de recours doit être rejetée comme étant irrecevable en raison du défaut de concordance avec la réclamation administrative préalable.

Sur la seconde branche du moyen unique, relative à l'interprétation de la notion de «situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale»

- Arguments des parties

34.
    Le requérant soutient que, même si la requalification de ses contrats de travail intérimaire devait être écartée, ses prestations en tant qu'intérimaire auprès de la Commission au cours des périodes litigieuses devraient en tout état de cause être couvertes par la dérogation prévue à l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut.

35.
    À cet égard, le requérant rappelle que, selon la jurisprudence du Tribunal, la notion de «services effectués pour une organisation internationale» ne doit pas être interprétée de manière restrictive (arrêt du Tribunal du 30 mars 1993, Vardakas/Commission, T-4/92, Rec. p. II-357, points 34, 36 et 37). En outre, le Tribunal aurait précisé, dans son arrêt du 14 décembre 1995, Diamantaras/Commission (T-72/94, RecFP p. I-A-285 et II-865), que ladite notion ne concerne pas seulement le personnel d'un autre État ou d'une organisation internationale, mais vise toutes les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale.

36.
    En l'espèce, selon le requérant, il ne peut être contesté que, durant les périodes litigieuses, il a uniquement travaillé pour la Commission. En effet, c'est cette institution qui lui aurait fourni tout le travail et toutes les instructions, qui aurait bénéficié de son travail et contrôlé la bonne exécution de celui-ci. De plus, le requérant aurait disposé d'une carte d'intérimaire portant la mention «en service auprès de la Commission». Cette mention confirmerait qu'il faisait partie, en tant qu'intérimaire, du personnel de la Commission. Enfin, des lettres de recommandation de M. P. Flynn, à l'époque membre de la Commission, et du chef de cabinet adjoint de celui-ci attesteraient que le requérant a travaillé pour la Commission pendant les périodes litigieuses.

37.
    Dans ces conditions, il serait totalement abusif de la part de la Commission d'exiger l'existence d'un lien contractuel direct entre elle et le requérant pour l'application de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut, et ce d'autant plus que, dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt du Tribunal du 15 juin 2000, Fantechi/Commission (T-51/99, RecFP p. I-A-111 et II-485, point 14), la Commission aurait adopté une position totalement opposée, en considérant que la période pendant laquelle la requérante dans cette affaire avait travaillé comme intérimaire auprès de l'entreprise commune Joint European Torus (JET) ne devait pas être prise en compte en vertu de ladite disposition.

38.
    Par ailleurs, le requérant fait remarquer qu'il ne saurait lui être opposé l'arrêt du Tribunal du 22 mars 1995, Lo Giudice/Parlement (T-43/93, RecFP p. I-A-57 et II-189), dans lequel le Tribunal aurait affirmé qu'en l'absence de liens juridiques directs entre le travailleur et l'institution en cause la dérogation prévue à l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut ne serait pas applicable. Selon le requérant, la situation de M. Lo Giudice, qui avait été employé auprès de sociétés ayant conclu des contrats d'entreprise avec la Commission et le Parlement, était sensiblement différente de la sienne. En effet, dans le contrat d'entreprise, le travailleur ne travaillerait que pour l'entreprise qui l'a employé et ne recevrait pas d'instructions du maître de l'ouvrage, alors que, dans le contrat de travail intérimaire, le travailleur effectuerait ses prestations directement pour l'utilisateur et serait soumis au pouvoir de direction de celui-ci. En outre, dans le contrat de travail intérimaire, l'institution choisirait directement l'intérimaire qui travaillera pour elle, alors que, dans le contrat d'entreprise, elle accepterait en principe la personne déléguée par l'entreprise pour effectuer le travail convenu. Enfin, le code de bonne conduite lui-même ferait la différence entre le contrat d'entreprise et le contrat de travail intérimaire.

39.
    Le requérant souligne, en tout état de cause, que de nombreux liens juridiques directs ont existé entre lui-même et la Commission pendant les périodes litigieuses. Ces liens découleraient des dispositions communautaires, de la loi belge, des contrats d'intérim en question ainsi que de la pratique.

40.
    En particulier, le code de bonne conduite prévoirait que, en cas de défaillance de la société d'intérim, la Commission est obligée d'assurer la couverture sociale du personnel mis à sa disposition. En outre, l'article 19 de la loi du 24 juillet 1987 imposerait à l'utilisateur le respect des dispositions légales en matière de réglementation et de protection du travail applicables au lieu de travail.

41.
    Ensuite, le contrat d'intérim, conclu et signé par le requérant, la société d'intérim et la Commission, stipulerait que la Commission est responsable de tous les dommages causés par le travailleur intérimaire (article 10 des conditions générales) et qu'elle doit faire bénéficier ce dernier des mêmes avantages en nature (cantine, boissons, transport...) que ceux alloués à son personnel (article 14 des conditions générales).

42.
    Enfin, selon le requérant, le fait d'avoir reçu les instructions de travail directement et uniquement de la Commission aurait entraîné un lien de subordination avec elle et donc la création de droits et obligations réciproques.

43.
    Au cours de l'audience, le représentant du requérant a souligné que l'existence de liens juridiques directs entre la défenderesse et les travailleurs intérimaires qui sont mis à sa disposition est confirmée par le fait que la défenderesse verse à ceux-ci des primes ou des indemnités de fin d'année comme elle le fait avec son propre personnel, ce qui ressortirait d'une lettre d'une société d'intérimdu 30 novembre 1994 (annexe 2 de la réponse du requérant à la demande de production de documents du Tribunal).

44.
    La défenderesse est d'avis que le travail intérimaire accompli auprès d'une institution communautaire n'est pas assimilable à un travail pour une organisation internationale et ne doit donc pas être neutralisé au titre de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut.

45.
    En effet, dans l'arrêt Lo Giudice/Parlement, précité (point 36), le Tribunal aurait interprété cette disposition en ce sens qu'elle exigerait, pour bénéficier de la dérogation qu'elle prévoit, que «l'intéressé ait, au moins, eu des liens juridiques directs avec l'institution en cause». Or, la situation du requérant, pour ce qui est des périodes litigieuses, serait tout à fait comparable à celle de M. Lo Giudice. Dans les deux cas, il s'agirait de travailleurs qui n'ont pas été engagés directement par une institution, par contrat ou sous une quelconque autre forme, conformément au régime applicable aux autres agents des Communautés européennes. Aussi bien l'un que l'autre auraient travaillé pour une personne morale relevant strictement du droit national et n'auraient pas effectué des services «pour» une institution communautaire, au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut.

46.
    Selon la défenderesse, le requérant ne saurait se prévaloir des arrêts Vardakas/Commission et Diamantaras/Commission, précités. En effet, dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt Vardakas/Commission, le lien contractuel direct du requérant avec le comité européen de normalisation n'aurait pas été remis en cause. En outre, il résulterait clairement de l'arrêt Diamantaras/Commission que la dérogation prévue à l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut concerne seulement les personnes qui ont eu un lien juridique direct avec un autre État ou une organisation internationale.

47.
    Par ailleurs, la Commission conteste la pertinence de l'arrêt Fantechi/Commission, précité, en ce que, dans cet arrêt, le Tribunal ne se serait pas prononcé sur la question de savoir si, pendant la période au cours de laquelle la requérante avait travaillé comme intérimaire auprès du JET, elle avait effectué un service «pour» une organisation internationale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut. Toutefois, même à supposer que la Commission ait apprécié erronément la situation visée dans cette affaire, la jurisprudence communautaire exclurait qu'une telle erreur puisse profiter au requérant (arrêt du Tribunal du 14 mai 1991, Zoder/Parlement, T-30/90, Rec. p. II-207, point 26).

48.
    La circonstance que l'engagement du requérant devait être préalablement approuvé par la Commission ou le fait que cette institution disposait d'un pouvoir de surveillance et d'instruction vis-à-vis de celui-ci ne suffiraient pas pour transformer le travail du requérant auprès de la Commission en un travail «pour» la Commission, au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, del'annexe VII du statut. En effet, ces circonstances seraient inhérentes à la nature même du contrat d'intérim et seraient sans influence sur la qualification du lien entre le travailleur intérimaire et la société d'intérim, qui est et reste une relation de travail directe. À cet égard, il ne faut pas perdre de vue, selon la défenderesse, d'une part, que le travailleur intérimaire reste en tous cas assujetti à l'autorité générale de la société d'intérim et, d'autre part, que c'est celle-ci et non pas la Commission qui rémunère le travailleur intérimaire.

49.
    Enfin, la mention «en service auprès de la Commission» figurant sur la carte d'intérimaire du requérant et les lettres de recommandation dont il se prévaut ne donneraient aucune indication sur la nature juridique des rapports entre le requérant et la Commission. En particulier, la carte d'intérimaire aurait eu la seule fonction de donner au requérant accès aux bâtiments de l'institution.

- Appréciation du Tribunal

50.
    Il y a lieu de rappeler qu'il ressort de la jurisprudence que la dérogation prévue à l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut, en faveur des fonctionnaires ayant, pendant la période de référence, effectué des services pour une organisation internationale, trouve sa raison d'être dans le fait que, dans de telles conditions, ces fonctionnaires ne peuvent pas être considérés comme ayant établi des liens durables avec le pays d'affectation (arrêts de la Cour du 15 janvier 1981, Vutera/Commission, 1322/79, Rec. p. 127, point 8, et du 2 mai 1985, De Angelis/Commission, 246/83, Rec. p. 1253, point 13). Il ressort de cette jurisprudence que le statut a établi des critères concrets et précis auxquels doivent satisfaire les personnes qui prétendent au bénéfice de l'indemnité de dépaysement et que, dans l'application de cette réglementation, l'AIPN doit se baser sur des éléments objectifs (arrêt Lo Giudice/Parlement, précité, point 36).

51.
    Selon la jurisprudence du Tribunal, si la dérogation figurant à l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut ne peut être limitée aux seules personnes ayant fait partie du personnel d'un autre État ou d'une organisation internationale, puisqu'elle vise toutes «les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale» (arrêts du Tribunal Diamantaras/Commission, précité, point 52, et du 3 mai 2001, Liaskou/Conseil, T-60/00, RecFP p. I-A-107 et II-489, point 49), son bénéfice exige toutefois que l'intéressé ait, au moins, eu des liens juridiques directs avec l'institution en cause. Une telle interprétation est d'ailleurs conforme à l'autonomie dont jouissent les institutions dans l'organisation interne de leurs services, qui les habilite, par voie d'appel d'offres, à inviter des personnes tierces qui n'appartiennent pas à leur structure hiérarchique à proposer leurs services afin d'assurer l'exécution de travaux bien précis ou afin de mettre à leur disposition, en vue de l'exécution d'un travail temporaire ou ponctuel, du personnel employé et rémunéré par celles-ci (arrêt Lo Giudice/Parlement, précité, point 36).

52.
    Il convient, dès lors, de déterminer si, pendant les périodes litigieuses, il existait entre le requérant et la défenderesse des liens juridiques directs.

53.
    Il y a lieu de rappeler, liminairement, que le travail intérimaire est souvent décrit comme une relation triangulaire, en ce qu'elle implique trois personnes, à savoir le travailleur intérimaire, l'entreprise de travail intérimaire et l'utilisateur. Elle se fonde normalement sur la conclusion de deux contrats: un premier contrat entre l'entreprise de travail intérimaire et l'utilisateur et un deuxième contrat entre le travailleur intérimaire et l'entreprise de travail intérimaire. La directive 91/383/CEE du Conseil, du 25 juin 1991, complétant les mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé au travail des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire (JO L 206, p. 21), définit cette dernière relation comme celle existant «entre une entreprise de travail intérimaire qui est l'employeur et le travailleur, ce dernier étant mis à disposition afin de travailler pour une entreprise et/ou un établissement utilisateurs et sous leur contrôle».

54.
    S'agissant du droit belge, auquel étaient soumis les contrats conclus pour les missions de travail intérimaire du requérant au cours des périodes litigieuses, il y a lieu de se référer à la loi du 24 juillet 1987, dont l'article 7, point 2, définit le contrat de travail intérimaire comme étant «le contrat par lequel un intérimaire s'engage vis-à-vis d'une entreprise de travail intérimaire, contre rémunération, à effectuer chez un utilisateur un travail temporaire autorisé par ou en vertu du chapitre Ier de la présente loi», c'est-à-dire une activité ayant pour objet de pourvoir au remplacement d'un travailleur permanent, ou de répondre à un surcroît extraordinaire de travail ou encore d'assurer l'exécution d'un travail exceptionnel (article 1er de ladite loi).

55.
    L'article 8 de la même loi édicte la présomption irréfragable que le contrat visé au point précédent est un contrat de travail. C'est donc l'entreprise de travail intérimaire qui, en droit belge, est juridiquement l'employeur du travailleur intérimaire, bien que l'intérimaire exerce son activité auprès de l'utilisateur et qu'il reçoive de celui-ci des instructions.

56.
    L'entreprise de travail intérimaire et l'utilisateur sont, à leur tour, liés par une relation contractuelle sui generis, par laquelle la première met un travailleur à la disposition du second, moyennant paiement.

57.
    Enfin, en ce qui concerne la relation entre le travailleur intérimaire et l'utilisateur, il s'agit d'une relation purement factuelle, dès lors que c'est l'entreprise de travail intérimaire qui a la faculté juridique d'exercer l'autorité patronale sur le travailleur intérimaire et qui transmet de fait à l'utilisateur l'exercice d'une partie de cette autorité pendant la période de mise à disposition du travailleur. L'utilisateur ne dispose d'aucun droit à la prestation de travail vis-à-vis de l'intérimaire. Seule l'entreprise de travail intérimaire est, vis-à-vis de ce dernier, le créancier d'une telle prestation. Elle est également le seul débiteur des sommes dues au travailleurintérimaire en contrepartie de cette prestation. À cet égard, il y a lieu de souligner que, contrairement à ce que prétend le requérant, la lettre d'une société d'intérim du 30 novembre 1994 qu'il a produite n'atteste nullement que la défenderesse versait à celui-ci ou aux autres intérimaires travaillant chez elle des primes ou des indemnités de fin d'année.

58.
    Dans ces conditions, le requérant ne saurait prétendre avoir eu avec la défenderesse, au cours des périodes litigieuses, un lien juridique direct ouvrant droit au bénéfice de la dérogation prévue à l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut. En effet, le requérant, au cours des périodes litigieuses, n'a pas été engagé directement par la défenderesse par contrat ou sous une quelconque autre forme, conformément au régime applicable aux autres agents des Communautés européennes ou à un autre texte communautaire. Ainsi qu'il ressort des points 53 à 57 ci-dessus, le requérant a entretenu, au cours desdites périodes, des relations contractuelles uniquement avec les sociétés d'intérim, qui, pour leur part, avaient conclu des contrats de mise à disposition de personnel avec la Commission (voir, en ce sens, arrêt Lo Giudice/Parlement, précité, point 34).

59.
    Cette constatation n'est pas susceptible d'être infirmée par les arguments du requérant rappelés aux points 39 à 42 ci-dessus, lesquels, par ailleurs, sont également dépourvus de fondement à d'autres titres.

60.
    Premièrement, est dénuée de pertinence la précision, apportée par le code de bonne conduite, selon laquelle la clause à insérer dans les contrats de mise à disposition de personnel, stipulant l'obligation des sociétés d'intérim d'assurer la couverture sociale des personnels mis à disposition conformément au droit applicable au lieu d'exécution de la prestation, «n'est pas libératoire, pour la Commission, des conséquences d'une défaillance éventuelle du cocontractant». En effet, la loi du 24 juillet 1987, contrairement aux législations d'autres États membres, n'instaure pas à la charge de l'utilisateur une obligation solidaire pour l'acquittement des cotisations sociales en faveur du travailleur intérimaire. La précision apportée par le code de bonne conduite vise simplement à attirer l'attention des services de la Commission sur les conséquences que, dans certains pays, peut avoir pour la Commission la défaillance de l'entreprise de travail intérimaire à l'égard de la couverture sociale de l'intérimaire, mais ne saurait fonder en soi une obligation solidaire de la Commission vis-à-vis de l'intérimaire qui ne soit pas prévue par le droit local applicable.

61.
    Deuxièmement, l'article 19 de la loi du 24 juillet 1987 se limite à prévoir que, «pendant la période où l'intérimaire travaille chez l'utilisateur, celui-ci est responsable de l'application des dispositions de la législation en matière de réglementation et de protection du travail applicables au lieu du travail», les dispositions applicables au lieu de travail étant «celles qui ont trait à la durée de travail, aux jours fériés, au repos du dimanche, au travail des femmes, au travail des jeunes, au travail de nuit, aux règlements de travail, à la santé et la sécurité des travailleurs ainsi qu'à la salubrité du travail et des lieux de travail [...]». Cet article,en substance, ne fait que préciser que, dans le cas du travail intérimaire, la personne responsable de l'application des dispositions en matière de réglementation et de protection du travail applicables au lieu de travail, et donc passible des sanctions pénales ou administratives prévues en cas d'infractions, est l'utilisateur et non pas l'entreprise de travail intérimaire. En tout état de cause, même à supposer que le travailleur intérimaire puisse, sur la base dudit article, agir à l'encontre de l'utilisateur pour obtenir le respect des obligations imposées par ces dispositions, une telle possibilité ne caractérise pas un lien juridique direct aux fins de l'application de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut (voir point 58 ci-dessus).

62.
    Troisièmement, s'agissant des contrats de travail intérimaire produits par le requérant, il y a lieu de souligner, tout d'abord, que c'est à tort que le requérant affirme qu'ils ont été conclus et signés également par la défenderesse. En effet, les documents contractuels en cause mentionnent la conclusion d'un contrat de travail intérimaire «entre [la société d'intérim] et l'intérimaire» et sont signés exclusivement par ces derniers. L'apposition des cachets de la DG V et des signatures sur les «feuilles de prestations» visant à attester le nombre d'heures réellement accomplies par le travailleur ne saurait, en tout état de cause, avoir pour effet de conférer à la défenderesse la qualité de partie auxdits contrats de travail intérimaire.

63.
    S'agissant, plus particulièrement, des articles 10 et 14 des conditions générales figurant à l'annexe 9 de la requête, il convient de relever que, contrairement à ce que le requérant a allégué, ces conditions générales ne sont pas afférentes à un contrat de travail intérimaire. En effet, ainsi qu'il ressort de leur article 2, il s'agit de conditions générales «formant partie intégrante du contrat préalablement établi entre l'utilisateur et [la société d'intérim] conformément au prescrit de l'article 17 de la loi [du 24 juillet 1987]». Dès lors, même à supposer qu'elles soient relatives à un contrat de mise à disposition conclu entre une entreprise de travail intérimaire et la Commission et ayant pour objet une mission de travail intérimaire du requérant, leur article 14, qui dispose que «l'utilisateur a l'obligation de faire bénéficier le travailleur intérimaire des mêmes avantages en nature que ceux alloués à son personnel, tels que cantine, boissons, transport, etc.» n'aurait pu, en l'absence d'autres éléments, faire naître au profit du requérant des droits opposables directement à la défenderesse. En outre, l'article 10 desdites conditions générales, évoquant la responsabilité de l'utilisateur pour les dommages causés par le travailleur intérimaire, n'a pour objet que l'identification de la personne responsable vis-à-vis des tierces victimes au titre de l'article 1384, troisième alinéa, du code civil belge, visant la responsabilité civile du fait dommageable du préposé. En conséquence, aucun lien juridique direct n'en pouvait découler entre le requérant et la Commission au cours des périodes litigieuses.

64.
    Quatrièmement, le fait que le requérant, durant ses missions à la Commission, recevait des instructions uniquement de la part de celle-ci est tout à fait conforme à la nature même du travail intérimaire et compatible avec le fait que la relation d'emploi, et donc le lien de subordination, se créent avec une autre personne, l'entreprise de travail intérimaire. En définitive, par cet argument le requérant tend en vain à remettre indirectement en cause la présomption irréfragable édictée par l'article 7, point 2, de la loi du 24 juillet 1987. En se conformant aux instructions de la défenderesse, le requérant ne faisait qu'accomplir les obligations qu'il avait contractées vis-à-vis des entreprises de travail intérimaire qui étaient ses employeurs. Le non-respect éventuel de ces obligations n'aurait eu de conséquences juridiques que dans le cadre de ses relations contractuelles avec celles-ci.

65.
    Dès lors, si le fait que le requérant était juridiquement soumis aux instructions de la défenderesse marque, certes, une certaine différence par rapport à l'espèce ayant fait l'objet de l'arrêt Lo Giudice/Parlement, précité, il n'en demeure pas moins que, tout comme dans cette affaire, il n'y a pas eu entre les parties de liens juridiques directs susceptibles d'entraîner le bénéfice de la dérogation prévue à l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut.

66.
    Il en est de même, par ailleurs, de la circonstance que la défenderesse ait pu choisir ou approuver la personne du requérant et que ce choix ou cette approbation ait constitué un préalable à l'engagement du requérant par les entreprises de travail intérimaire. Une telle circonstance, en effet, est sans influence sur l'appréciation juridique relative au travail intérimaire selon le droit national applicable et les contrats en cause et n'empêche pas, notamment, que l'employeur est la personne morale avec laquelle a été conclu le contrat de travail, et non pas l'institution utilisatrice (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 11 juillet 1985, Salerno e.a./Commission et Conseil, 87/77, 130/77, 22/83, 9/84 et 10/84, Rec. p. 2523, point 43, et arrêt Simon/Commission, précité, point 43).

67.
    En outre, sont dénués de toute pertinence les arguments du requérant fondés sur les mentions figurant sur sa carte d'intérimaire et dans les lettres de recommandation qu'il a produites, lesquelles, de par leur nature et leur contenu générique, ne sont pas susceptibles d'apporter d'éléments utiles aux fins de l'appréciation juridique nécessaire à l'application de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut.

68.
    Enfin, à supposer que, dans les circonstances ayant donné lieu à l'arrêt Fantechi/Commission, précité, le service accompli auprès du JET, que l'institution défenderesse a entendu neutraliser au titre de ladite disposition, ait été effectué par l'intéressée en qualité d'intérimaire et dans le contexte d'une situation juridique équivalente à celle qui a été constatée aux points 54 et suivants ci-dessus, le requérant ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir d'une telle circonstance, nul ne pouvant invoquer à son profit une illégalité commise à l'égard d'autrui (arrêts de la Cour du 9 octobre 1984, Witte/Parlement, 188/83, Rec. p. 3465,point 15, et du 4 juillet 1985, Williams/Cour des comptes, 134/84, Rec. p. 2225, point 14; arrêts du Tribunal Zoder/Parlement, précité, point 26, et du 22 février 2000, Rose/Commission, T-22/99, RecFP p. I-A-27 et II-115, point 39).

69.
    Compte tenu de l'ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer que les services effectués par le requérant au cours des périodes litigieuses l'ont été pour les entreprises de travail intérimaire auxquelles il a été successivement lié par des contrats de travail intérimaire, et non pas pour la défenderesse. Par conséquent, il ne saurait être admis que le requérant s'est trouvé dans une situation «résultant de services effectués pour une organisation internationale», au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous a), dernière phrase, de l'annexe VII du statut.

70.
    Dès lors, il convient d'écarter la seconde branche du moyen unique de recours comme étant non fondée. Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

Sur les dépens

71.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. En l'espèce, chaque partie supportera donc ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté.

2) Chaque partie supportera ses propres dépens.

Vilaras                Tiili                Mengozzi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 septembre 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

M. Vilaras


1: Langue de procédure: le français.