Language of document : ECLI:EU:T:2023:518

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

6 septembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative représentant une bouteille avec une flèche – Marque de l’Union européenne figurative antérieure représentant une canette, une bouteille et une flèche – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Absence d’usage sérieux de la marque antérieure – Article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 [devenu article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑774/21,

DPG Deutsche Pfandsystem GmbH, établie à Berlin (Allemagne), représentée par Me J. Götz, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par MM. D. Hanf et A. Ringelhann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Užstato sistemos administratorius VšĮ, établie à Vilnius (Lituanie), représentée par Me Ą. Čekanavičius, avocat,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, G. De Baere et D. Petrlík (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, DPG Deutsche Pfandsystem GmbH, demande l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 23 septembre 2021 (affaire R 117/2020-2) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 17 août 2015, l’intervenante, Užstato sistemos administratorius  VšĮ, a présenté à l’EUIPO, en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p 1)], une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

Image not found

3        La marque demandée désignait des services relevant des classes 35, 40 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 2015/218, du 17 novembre 2015.

5        Le 15 février 2016, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des services désignés par celle-ci.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure portant le numéro 4564993 et reproduite ci-après :

Image not found.

7        Cette marque antérieure désigne notamment les services relevant des classes 35, 39, 40 et 42 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 35 : « Activité de gestion des déchets, conseils techniques en matière de déchets et relations publiques, publicité » ;

–        classe 39 : « Évacuation et stockage de déchets et matières pour le recyclage ; reprise d’emballages jetables vides et de récipients jetables vides ; collecte, reprise, transport et entreposage intermédiaire de récipients à boissons ; exploitation d’un système de consigne (marquage, collecte, reprise, transport et entreposage intermédiaire de récipients à boissons) » ;

–        classe 40 : « Recyclage d’ordures et de déchets ; tri de récipients à boissons » ;

–        classe 42 : « Développement et transposition technique de systèmes de reprise d’emballages de divers types de matières, de tailles et d’origines diverses ainsi que de diverses possibilités de recyclage et dans les divers dépôts de déchets ; services d’un ingénieur lors du développement et de la transposition de concepts de reprise, de traitement, de recyclage et d’évacuation dans tous les domaines des matières recyclables ; exploitation d’un procédé de sécurisation pour prévenir la contrefaçon d’emballages jetables ; services technologiques ».

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8 paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

9        À la suite de la demande formulée par l’intervenante, l’EUIPO a invité la requérante à apporter la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition. Cette dernière a déféré à ladite demande dans le délai imparti en produisant, le 21 novembre 2016, des photographies d’une canette de boisson, d’une bouteille en plastique, d’une étiquette utilisée sur des machines automatiques de recyclage et de tri des emballages participant au système de consigne géré par elle, des extraits de son site Internet « www.dpg-pfandsystem.de » et une traduction anglaise d’un document intitulé « Terms and Conditions of Participation in the DPG system » (Conditions de participation au système DPG), dans sa version du 14 juin 2016 (ci-après les « conditions de participation au système DPG »).

10      Le 18 avril 2017, soit après l’expiration du délai imparti, la requérante a produit des preuves supplémentaires de l’usage du signe antérieur, telles que, notamment, une photographie d’une partie d’une bouteille en plastique portant ledit signe, quatre factures concernant les frais de participation annuels des membres du système DPG pour les années 2011 à 2015 et une capture d’écran d’un site Internet tiers (www.einweg-zukunft.de).

11      Par décision du 22 novembre 2019, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité en concluant que l’usage sérieux de la marque antérieure de la requérante n’avait pas été démontré.

12      Le 16 janvier 2020, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre cette décision en soutenant que la marque antérieure avait été utilisée, à tout le moins pour les services visés au point 7 ci-dessus. Elle a joint à sa requête des éléments de preuve supplémentaires, tels qu’une déclaration sous serment de son directeur et une autre série de factures.

13      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que la requérante n’avait pas démontré que le signe antérieur avait fait l’objet d’un usage sérieux conformément à la fonction essentielle des marques individuelles, à savoir celle d’indiquer l’origine commerciale des produits et des services pour lesquels il a été enregistré.

14      La chambre de recours a notamment considéré que le signe antérieur ne serait pas perçu par le public pertinent comme indiquant que les produits ou services concernés provenaient d’une entreprise déterminée sous le contrôle de laquelle ils étaient fabriqués ou fournis. Ce signe serait perçu comme une indication descriptive informant que les produits appartenaient à une catégorie particulière de produits, à savoir des produits dont l’emballage est à usage unique et est soumis à un système de consigne obligatoire. Au surplus, pour les consommateurs professionnels ayant participé à ce système et ayant pris connaissance des documents administratifs et juridiques de la requérante, ledit signe était utilisé comme un marquage officiel et non pas comme une marque indiquant l’origine commerciale des services visés par ce même signe. Enfin, sur les documents et sur son site Internet, la requérante et ses services étaient identifiés par son nom, alors que l’utilisation du signe antérieur n’avait qu’un but décoratif.

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

16      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

17      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 17 août 2015, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis  par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009, dans sa version antérieure à la modification par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, modifiant le règlement no 207/2009 et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire, et abrogeant le règlement (CE) no 2869/95 de la Commission relatif aux taxes à payer à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 2015, L 341, p. 21) (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

18      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée, par la requérante dans l’argumentation soulevée ainsi que par l’EUIPO et par l’intervenante à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, comme visant, respectivement, l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009.

19      Au soutien de son recours, la requérante invoque un moyen unique tiré de la violation de l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009. Elle soutient, en substance, que la chambre de recours a considéré, à tort, qu’elle n’avait pas démontré l’usage sérieux du signe antérieur.

20      Elle soutient, en premier lieu, que la chambre de recours a conclu, à tort, que le public pertinent auquel s’adressent les services de recyclage compris dans les classes 39 et 40 serait exclusivement composé des consommateurs professionnels. Ces services s’adresseraient en effet tant auxdits consommateurs qu’au grand public, ce dernier jouant un rôle important dans le cadre du système de consigne, ainsi que du recyclage des emballages de boissons.

21      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

22      À cet égard, la chambre de recours a considéré, au point 68 de la décision attaquée, que l’usage du signe antérieur, conformément à la fonction essentielle d’indication de l’origine commerciale, ne peut être apprécié que du point de vue du public pertinent. Ensuite, elle a estimé, au point 71 de cette décision, que les services de recyclage relevant des classes 39 et 40 n’étaient pas sélectionnés par le grand public, mais par un public professionnel, à savoir des entités commerciales ou administratives faisant usage des services de recyclage, et que le public pertinent de ces services était donc composé de consommateurs professionnels.

23      Bien que la requérante conteste cette appréciation, elle ne présente aucun argument ou élément de preuve susceptible de démontrer que l’analyse de l’usage sérieux du signe antérieur devrait être différente si le public pertinent était également composé du grand public, de sorte que le grief doit être rejeté comme inopérant [voir, en ce sens, arrêts du 27 juin 2018, NCL/EUIPO (FEEL FREE), T‑362/17, non publié, EU:T:2018:390, point 35, et du 28 mai 2020, Martínez Albainox/EUIPO – Taser International (TASER), T‑341/19, non publié, EU:T:2020:233, point 62 et jurisprudence citée].

24      En tout état de cause, les éléments de preuve apportés par la requérante, aux fins de démontrer l’usage sérieux du signe antérieur, n’établissent pas que les services relevant des classes 39 et 40 sont également destinés au grand public. D’une part, les conditions de participation au système DPG s’adressent aux consommateurs professionnels, à savoir aux opérateurs spécialisés dans la collecte, le traitement et le recyclage des déchets qui souhaitent participer au système de consigne obligatoire de la requérante (ci-après le « système DPG »). De même, les factures émises par cette dernière de 2011 à 2015 (ci-après les « factures ») ont pour destinataires des opérateurs économiques qui ont adhéré à ce système. D’autre part, bien que le grand public ait accès au site Internet de la requérante, ce site ne contient pas d’informations susceptibles d’établir en quoi les services compris dans les classes 39 et 40 s’adressent également au grand public. Au contraire, les éléments figurant sur ledit site portent notamment sur le rôle des consommateurs professionnels dans le fonctionnement du système DPG, ainsi qu’il découle notamment de la partie intitulée « foire aux questions » (FAQ).

25      En second lieu, la requérante fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que le signe antérieur n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux conformément à sa fonction essentielle en tant que marque individuelle pour les services compris dans les classes 35, 39, 40 et 42.

26      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

27      En vertu de l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, une opposition formée à l’encontre de l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne est rejetée si le titulaire de la marque antérieure en cause n’apporte pas la preuve que celle-ci a fait l’objet d’un usage sérieux au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque de l’Union européenne.

28      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour les produits et services désignés par la marque, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque [arrêts du 22 octobre 2020, Ferrari, C‑720/18 et C‑721/18, EU:C:2020:854, point 32, et du 19 janvier 2022, Masterbuilders, Heiermann, Schmidtmann/EUIPO – Cirillo (POMODORO), T‑76/21, non publié, EU:T:2022:16, point 61].

29      S’agissant des marques individuelles, cette fonction essentielle consiste à garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance. En effet, pour que la marque puisse jouer son rôle d’élément essentiel du système de concurrence non faussé que le traité entend établir et maintenir, elle doit constituer la garantie que tous les produits ou services qu’elle désigne ont été fabriqués ou fournis sous le contrôle d’une entreprise unique à laquelle peut être attribuée la responsabilité de leur qualité (arrêt du 8 juin 2017, W. F. Gözze Frottierweberei et Gözze, C‑689/15, EU:C:2017:434, point 41).

30      En vue d’apprécier l’usage sérieux d’une marque individuelle conformément à sa fonction essentielle, il convient de tenir compte de l’ensemble des facteurs pertinents, tels que, notamment, les caractéristiques du marché en cause et la nature des produits ou des services protégés par la marque (voir arrêt du 17 juillet 2014, Reber Holding/OHMI, C‑141/13 P, non publié, EU:C:2014:2089, point 29 et jurisprudence citée).

31      En particulier, si le public pertinent perçoit la marque individuelle comme un signe qui vise à certifier la composition ou la qualité des produits ou des services, sans pour autant garantir aux consommateurs que ces produits ou ces services proviennent d’une entreprise unique sous le contrôle de laquelle ils sont fabriqués ou fournis et à laquelle, par conséquent, peut être attribuée la responsabilité de la qualité desdits produits ou services, l’usage d’un tel signe n’est pas fait conformément à la fonction d’indication d’origine commerciale (arrêt du 8 juin 2017, W. F. Gözze Frottierweberei et Gözze, C‑689/15, EU:C:2017:434, point 45).

32      Enfin, il ressort de l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 qu’il incombe au titulaire de la marque antérieure de prouver l’usage sérieux de cette marque conformément à sa fonction essentielle [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2018, C=Holdings/EUIPO – Trademarkers (C=commodore), T‑672/16, EU:T:2018:926, point 21].

33      À cet égard, l’usage sérieux d’une telle marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de ladite marque sur le marché concerné [voir, en ce sens, arrêt du 6 novembre 2014, Popp et Zech/OHMI – Müller-Boré & Partner (MB), T‑463/12, non publié, EU:T:2014:935, point 34].

34      En l’espèce, pendant la période pertinente, qui s’étendait du 17 novembre 2010 au 16 novembre 2015, la réglementation allemande en matière de gestion des déchets, et notamment la Verordnung über die Vermeidung und Verwertung von Verpackungsabfällen (décret relatif à la prévention et à la valorisation des déchets d’emballages), du 21 août 1998 (BGBl. 1998 I, p. 2379), a obligé les premiers distributeurs d’emballages de boissons à usage unique (ci-après les « premiers distributeurs ») à participer à un système de consigne de tels emballages.

35      Il est constant que la requérante était le principal opérateur d’un tel système de consigne en Allemagne, en ce qu’elle exploitait le système DPG auquel a adhéré la majorité des premiers distributeurs. Ce système comprend, en particulier, une procédure de marquage permettant d’identifier si un emballage est soumis ou non à la consigne obligatoire, étant précisé que ce marquage placé sur l’emballage comprend le signe antérieur.

36      À ce titre, il convient de rappeler que le signe antérieur ne constitue pas une marque de certification, au sens de l’article 83 du règlement 2017/1001, mais a été enregistré en tant que marque individuelle. Les preuves de l’usage produites par la requérante doivent dès lors démontrer un usage sérieux du signe antérieur en tant que marque individuelle, à savoir un usage conforme à sa fonction essentielle d’indication de l’origine commerciale des produits et des services désignés par ledit signe.

37      Or, concernant les produits couverts par le signe antérieur, la requérante ne conteste pas que les premiers distributeurs ont utilisé ce signe, dans le cadre du système DPG, en tant qu’élément de marquage qu’ils ont apposé sur les emballages de boissons à usage unique et dont la première fonction était d’identifier les emballages qui font partie de ce même système.

38      Sur ce point, la requérante ne critique notamment pas la conclusion de la chambre de recours selon laquelle, lorsque les premiers distributeurs apposaient le signe antérieur sur les produits relevant des classes 6, 20 et 21, tels que les produits dont l’emballage est à usage unique, ce signe remplissait une fonction de certification en informant le public pertinent que lesdits emballages relevaient du système DPG et que ceux-ci étaient, de ce fait, soumis à une consigne obligatoire.

39      À cet égard, il ressort d’ailleurs des observations de la requérante déposées devant l’EUIPO que, pendant la période pertinente, un nombre significatif des premiers distributeurs a apposé annuellement le signe antérieur sur, selon une estimation, 15 à 16 milliards d’emballages de boissons à usage unique qui étaient mis sur le marché allemand. Il s’ensuit que, dès le début de cette période, ledit signe faisait l’objet d’une utilisation étendue sur ces emballages, étant entendu que l’ampleur de cette utilisation s’est confirmée tout au long de ladite période.

40      Dans ces conditions, il convient de constater que les consommateurs professionnels avaient, pendant la période pertinente, un degré élevé de connaissance du signe antérieur ainsi que du fait que ce signe était utilisé, à titre principal, en tant qu’élément de marquage visant à certifier que les emballages de boissons à usage unique étaient soumis à un système de consigne, à savoir au système DPG.

41      Cela étant, il convient d’examiner si, outre cette fonction de certification de tels produits, le signe antérieur remplissait, au regard des éléments de preuve apportés par la requérante, également la fonction d’identification de l’origine commerciale des services visés par ce signe.

42      À cet égard, la requérante soutient que, lorsque les consommateurs professionnels voyaient le signe antérieur sur les conditions de participation au système DPG et sur les factures, ainsi que sur son site Internet, ils le percevaient comme une marque individuelle, indiquant l’origine commerciale des services visés par ce signe.

43      À titre liminaire, il convient de préciser que l’argumentation de la requérante ne porte que sur la nature de l’usage du signe antérieur par rapport aux services visés par ce signe, à savoir les services visés au point 7 ci-dessus.

44      En ce qui concerne, premièrement, la nature de l’usage du signe antérieur sur les conditions de participation au système DPG, il est vrai que ce signe est apposé sur toutes les pages de celles-ci.

45      Cependant, les éléments graphiques dudit signe, tels que la bouteille, la canette et la flèche courbée pointant vers la gauche, sont des symboles utilisés dans toute l’Union européenne pour désigner le processus de recyclage ou les services de recyclage et sont placés sur les articles à recycler [voir, en ce sens, arrêt du 11 avril 2019, Užstato sistemos administratorius/EUIPO – DPG Deutsche Pfandsystem (Représentation d’une bouteille avec une flèche), T‑477/18, non publié, EU:T:2019:240, points 32 à 34].

46      Ainsi, lorsqu’un tel signe est apposé sur un document juridique comme les conditions de participation au système DPG, il serait vraisemblablement compris comme renvoyant, dans l’esprit des consommateurs professionnels, au processus de recyclage en tant que tel et au fait que certains produits sont soumis à un système particulier de recyclage, à savoir au système DPG, et non comme indiquant l’origine commerciale des services visés par le signe antérieur.

47      Cette perception est corroborée par le texte desdites conditions de participation car, ainsi que l’a constaté la chambre de recours, celles-ci présentent systématiquement le signe antérieur comme un élément de marquage des emballages des boissons à usage unique aux fins de certifier que ces produits relèvent du système DPG.

48      Ainsi, notamment, l’article 1.2 de la partie I des conditions de participation au système DPG, qui fait partie de la section intitulée « Principes fondamentaux du système DPG et fonctions des participants au système », précise que le signe antérieur sert de « symbole » pour la consigne obligatoire. De même, l’article 1.1 de la section 1 de la partie II de ces conditions dispose que le marquage des emballages concernés doit être fait de manière à ne pas nuire à la signification du signe antérieur, à savoir que ces emballages sont « soumis à la consigne obligatoire ».

49      De même, lorsque l’annexe 1 des conditions de participation au système DPG, dans leur version de 2013 – qui ne diffère pas substantiellement de la version de 2016 – décrit les caractéristiques du signe antérieur, elle ne le met pas en perspective avec les services désignés par ledit signe. Cette annexe, intitulée « Précisions aux premiers distributeurs concernant le marquage des emballages DPG », se limite à présenter le signe antérieur dans ses différentes composantes en vue d’aider les premiers distributeurs pour le marquage des emballages des boissons à usage unique. La manière dont le signe antérieur est présenté, au sein de ladite annexe, renvoie ainsi à sa fonction de certifier que les produits concernés sont soumis au système DPG.

50      De plus, les conditions de participation au système DPG associent le signe antérieur davantage aux activités des professionnels participant au système DPG qu’aux services visés par ce signe. En particulier, selon l’article 2 de la section 1 de la partie V de ces conditions, les collecteurs sont encouragés à faire apparaître ledit signe dans le cadre de leur activité en vue de « divulguer [leur] participation au système DPG ». Dans cette optique, le signe antérieur sert à indiquer que certains opérateurs, spécialisés dans la collecte, le traitement et le recyclage des déchets, contribuent à la mise en œuvre du système DPG en tant que collecteurs, plutôt qu’à désigner les services concernés.

51      Dans ces conditions, rien n’indique que les consommateurs professionnels percevaient l’apposition du signe antérieur sur les conditions de participation au système DPG, indépendamment de sa fonction de certification, comme une indication de l’origine commerciale des services visés par ledit signe.

52      En ce qui concerne, deuxièmement, les factures présentées par la requérante, il convient tout d’abord de relever que le signe antérieur est apposé sur celles-ci en haut à droite et qu’il est juxtaposé à la dénomination sociale de la requérante, à savoir « DPG Deutsche Pfandsystem GmbH », laquelle figure, en grandes lettres écrites en gras et soulignées, en haut à gauche.

53      Or, comme il ressort des points 45 et 46 ci-dessus, les éléments dont le signe antérieur est composé n’ont pas vocation à renvoyer, dans l’esprit des consommateurs professionnels, à l’origine commerciale d’une certaine catégorie de services, mais plutôt au fait que certains produits sont soumis à un système particulier de recyclage, à savoir au système DPG.

54      En outre, la requérante fait valoir que, selon la jurisprudence, l’usage conjoint du signe antérieur avec la dénomination sociale de son titulaire sur les factures n’exclut pas par principe que ledit signe puisse indiquer l’origine commerciale des services visés par ce même signe.

55      À cet égard il convient de relever que, aux points 74 et 77 de la décision attaquée, la chambre de recours n’a pas affirmé que le signe antérieur apposé sur les factures n’était pas perçu comme une indication de l’origine commerciale des services visés par ce signe au motif qu’il était utilisé conjointement avec la dénomination sociale de la requérante.

56      S’agissant du contenu des factures, celles-ci font apparaître le montant des frais de participation dont devaient s’acquitter les participants au système DPG. Les factures ont ainsi indiqué que ces frais sont calculés en fonction du nombre approximatif d’emballages DPG, que le premier distributeur estime mettre en circulation sur le marché allemand. Or, au regard de ce libellé, la facturation des services fournis par la requérante et visés, au demeurant, par le signe antérieur n’a qu’un lien indirect avec ce signe, celui-ci étant davantage mis en perspective avec l’activité des premiers distributeurs et, par là même, avec son utilisation aux fins de certifier que les emballages concernés relèvent du système DPG.

57      Eu égard à ce qui précède, la requérante, sur qui repose la charge de la preuve, n’a pas démontré que, en plus de la fonction principale de certification du signe antérieur, les consommateurs professionnels percevaient l’apposition de ce signe sur les factures comme une indication de l’origine commerciale des services visés par ledit signe.

58      Troisièmement, l’utilisation du signe antérieur sur le site Internet de la requérante ne suffit pas non plus à démontrer que le public pertinent perçoit ce signe comme faisant référence à l’origine commerciale des services désignés par ce même signe.

59      En effet, ainsi que l’a considéré la chambre de recours, sur le site Internet de la requérante, les services que celle-ci fournit et qui sont d’ailleurs désignés par le signe antérieur sont associés notamment à sa dénomination sociale, à savoir « DPG Deutsche Pfandsystem GmbH ». En revanche, le signe antérieur figure uniquement en haut à gauche sur ledit site, de sorte que les consommateurs professionnels ne sont guidés, sur le site Internet de la requérante, par aucun élément qui serait suffisamment clair pour leur permettre d’associer les services concernés audit signe.

60      Qui plus est, ce site indique dans sa rubrique FAQ, en substance, que, en vue de respecter les prescriptions réglementaires concernant le marquage des emballages de boissons à usage unique, il est nécessaire de faire apparaître le signe antérieur sur les emballages en question. Ce signe y est ainsi présenté comme un élément de marquage, utilisé aux fins de certifier que les emballages concernés faisaient partie du système DPG.

61      Dans ces conditions, rien n’indique que, outre la fonction principale du signe antérieur consistant à certifier les emballages concernés comme participant au système DPG, les consommateurs professionnels percevaient l’utilisation de ce signe sur le site Internet de la requérante comme une indication de l’origine commerciale des services visés par ledit signe.

62      Eu égard à l’ensemble de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la requérante n’a pas présenté des éléments de preuve suffisants pour établir que le signe antérieur a fait l’objet d’un usage sérieux, conformément à la fonction essentielle de marque individuelle, sur le territoire de l’Union pour les services pour lesquels il a été enregistré.

63      Par conséquent, il convient de rejeter le moyen unique de la requérante et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

64      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.  

65      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      DPG Deutsche Pfandsystem GmbH est condamnée aux dépens.

Kornezov

De Baere

Petrlík

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 septembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.