Language of document : ECLI:EU:T:2012:253

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

22 mai 2012 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale FEMIFERAL – Marques nationales verbale antérieure Feminatal et figurative antérieure feminatal – Motif relatif de refus –Similitude des signes – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑110/11,

Asa sp. z o.o., établie à Głubczyce (Pologne), représentée par Me M. Chimiak, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme D Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Merck sp. z o.o., établie à Varsovie (Pologne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 19 novembre 2010 (affaire R 182/2010-1), relative à une procédure d’opposition entre Merck sp. z o.o. et Asa sp. z o.o.

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O.Czúcz, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. D. Gratsias, juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 18 février 2011,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 13 juillet 2011,

à la suite de l’audience de 14 décembre 2011,

rend le présent

Arrêt

1        Le 18 septembre 2006, la requérante, Asa Sp. z o.o., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal FEMIFERAL.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques et autres préparations à usage médical, alimentation diététique à usage médical, compléments alimentaires à usage médical, compléments diététiques à usage médical, aliments diététiques destinés à un usage médical, boissons à usage médical, aliments pour bébés, compléments nutritionnels à usage médical ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 66/2007, du 10 décembre 2007.

5        Le 7 mars 2008, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours, Merck sp. z o.o., a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque verbale polonaise Feminatal, enregistrée le 30 janvier 2003 sous le numéro 143 507, désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, vitamines » ;

–        la marque figurative polonaise, enregistrée le 1er octobre 2007 sous le numéro 195 270, désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, vitamines, compléments diététiques à usage médical, substances diététiques à usage médical, aliments pour bébés, aliments pour femmes enceintes à usage médical », représentée ci-après :

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7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

8        Le 22 décembre 2009, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité.

9        Le 25 janvier 2010, l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 19 novembre 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a annulé la décision de la division d’opposition et a rejeté la demande de marque communautaire pour l’ensemble des produits demandés. En fondant son analyse sur la comparaison avec les deux marques antérieures, la chambre de recours a considéré, en substance, qu’il existait un risque de confusion entre les marques en cause, notamment, en raison de l’identité et de la similitude des produits couverts par lesdites marques et de la similitude des signes sur les plans visuel et phonétique. Elle a également estimé que les marques en cause possédaient un caractère distinctif d’un degré normal car aucun élément ne permettrait d’étayer l’affirmation de la requérante selon laquelle l’élément « femi » serait compris par le public polonais comme une indication que les produits couverts par les marques en cause seraient destinés aux femmes.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

14      La requérante fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit. Cette dernière n’aurait pas pris en compte la spécificité de la langue polonaise lors de l’appréciation de la similitude phonétique des signes ainsi que la signification conceptuelle des signes pour le public pertinent. En outre, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte du faible caractère distinctif de l’élément « femi » dans les marques en conflit.

15      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

17      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

18      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

19      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

20      C’est à la lumière des principes susmentionnés qu’il convient examiner le présent recours.

21      En ce qui concerne le public pertinent, la chambre de recours a constaté, au point 38 de la décision attaquée, que celui-ci était composé du grand public polonais ainsi que des professionnels du secteur médical. La connaissance des produits en cause et le degré d’attention des professionnels de la médicine sont censés être plus élevés, alors que la connaissance du consommateur final pourrait être moindre en ce qui concerne les produits pharmaceutiques.

22      La requérante insiste sur le fait que l’appréciation de l’existence du risque de confusion doit être effectuée en prenant en compte un public constitué uniquement par des citoyens polonais.

23      En considérant que le public pertinent était composé à la fois par le grand public polonais ainsi que par des professionnels du secteur médical et que le territoire pertinent pour l’appréciation de l’existence du risque de confusion était la Pologne, la chambre de recours est parvenue, en substance, à la même conclusion que la requérante. Il y a dès lors lieu de confirmer cette constatation.

24      En ce qui concerne la comparaison des produits, la chambre de recours, en se référant à la décision de la division d’opposition, a confirmé que les produits pharmaceutiques et les vitamines couverts par la marque verbale antérieure étaient, d’une part, identiques aux produits pharmaceutiques et autres préparations à usage médical, d’autre part, semblables à l’alimentation diététique à usage médical, aux compléments alimentaires à usage médical, aux compléments diététiques à usage médical, aux aliments diététiques destinés à un usage médical, aux boissons à usage médical et aux compléments nutritionnels à usage médical et, enfin, différents des aliments pour bébés couverts par la marque demandée. Elle a également considéré qu’il existait une identité entre les aliments pour bébés couverts par la marque figurative antérieure et par la marque demandée. Aucune des parties ne contestant cette conclusion, il y a lieu de la confirmer.

 Sur la comparaison des signes

25      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

26      S’agissant, en premier lieu, de la comparaison visuelle, la chambre de recours a constaté, au point 31 de la décision attaquée, que la marque demandée ainsi que la marque verbale antérieure étaient toutes les deux composées de huit lettres, que les deux marques partageaient le même préfixe « femi » ainsi que la même terminaison « al » et qu’elles différaient uniquement au niveau des trois lettres placées au milieu de chacun des mots les composant, à savoir, respectivement, « n », « a » et « t », d’une part, et « f », « e » et « r », d’autre part. Les deux signes ont été en considérés comme étant similaires. Elle a également estimé qu’il existait une similitude visuelle et phonétique entre la marque demandée et la marque figurative antérieure. Selon elle, la légère stylisation de la lettre « f » dans la marque figurative antérieure ne saurait mettre en cause cette similitude.

27      La requérante estime que l’analyse de la chambre de recours est incomplète dans la mesure où cette dernière n’aurait pas tenu compte de tous les faits pertinents en la matière, en particulier des spécificités de l’industrie pharmaceutique. Elle fait également valoir que le fait que les deux signes comportent le même nombre des lettres ne serait pas pertinent en l’espèce.

28      Il y a lieu d’approuver les conclusions de la chambre de recours. En effet, comme elle l’a constaté, les signes « feminatal » et « femiferal » diffèrent uniquement au niveau des trois lettres situées au milieu desdits signes qui ne sauraient rendre ces derniers différents. C’est également à juste titre qu’elle a considéré que l’élément figuratif dans la marque figurative antérieure, en l’occurrence la lettre « f », n’était que légèrement stylisé. En effet, cette stylisation n’a qu’une faible influence sur la perception visuelle de la marque antérieure et n’empêchera nullement le consommateur pertinent d’identifier la lettre « f » dans celle-ci.

29      Par ailleurs, il ne saurait être tenu compte lors de l’appréciation de la similitude visuelle des signes de règles de formation des noms de médicaments dans l’industrie pharmaceutique invoquées par la requérante. La requérante a invoqué une règle appliquée par l’Agence européenne des médicaments (EMA), selon laquelle, lors de l’enregistrement des noms commerciaux des produits médicaux, il n’existerait pas de risque de confusion si au moins trois lettres dans ces noms commerciaux étaient différentes. Invitée par le Tribunal à produire une preuve de l’existence d’une telle règle, la requérante a soumis uniquement des documents des instances polonaises dont la recevabilité est contestée par l’OHMI. En tout état de cause, il y a lieu de noter que l’EMA, lors de l’examen des noms commerciaux des produits médicaux, poursuit un objectif totalement différent de celui du droit de la propriété intellectuelle, à savoir, des préoccupations de santé publique ainsi que la prévention des risques liés à la commercialisation de produits potentiellement dangereux pour les consommateurs.

30      De surcroît, il y a lieu de rappeler que la partie initiale des marques verbales peut être susceptible de retenir davantage l’attention du consommateur que les parties suivantes [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, Rec. p. II‑965, point 81, et du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec. p. II‑949, points 64 et 65].

31      S’agissant, en deuxième lieu, de la comparaison phonétique, la chambre de recours a considéré, au point 32 de la décision attaquée, que les signes en cause étaient composés de quatre syllabes, qu’ils coïncidaient dans leurs deux premières syllabes « fe » et « mi » et qu’ils avaient une terminaison similaire, respectivement « tal » et « ral ». Les signes sont différents dans la prononciation de leurs troisièmes syllabes « fe » et « na » sur lesquelles tombe l’accent selon les règles de prononciation polonaise.

32      La requérante reproche à la chambre de recours le fait qu’aucun des experts s’étant prononcés sur l’affaire devant elle n’ait été originaire de Pologne. Par conséquent, la décision attaquée ne serait compatible ni avec la réalité de l’espèce ni avec la langue polonaise. Nonobstant le fait que les éléments verbaux utilisés sont d’origine étrangère, ils seraient prononcés selon les règles propres à la langue polonaise. Ainsi les différences fondamentales existant entre les troisièmes syllabes des signes en cause, accentuées et, en conséquence, bien audibles, et la différence entre les quatrièmes syllabes rendraient lesdits signes différents sur le plan phonétique.

33      Plus spécifiquement, la requérante se réfère à l’arrêt du Tribunal du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Backer (HOOLIGAN) (T‑57/03, Rec. p. II‑287, points 58 et 59) pour soutenir, d’une part, que l’OHMI, du fait des diverses nationalités de ses agents ou membres, pouvait, éventuellement, venir confirmer les éléments tendant à définir la prononciation du consommateur moyen polonais et, d’autre part, que la prononciation d’un mot d’origine étrangère n’est pas obligatoirement celle de la langue d’origine.

34      Il convient de relever que la chambre de recours a apprécié globalement les signes en conflit et a tenu compte des règles de prononciation de la langue polonaise dans la mesure où l’accentuation de la troisième syllabe a été prise en compte comme étant un facteur atténuant la similitude des signes. Néanmoins, à l’instar de la chambre de recours, il convient de constater que les différences existant entre les signes en cause,au titre de leurs troisièmes et quatrièmes syllabes, ne suffisent pas à neutraliser la similitude globale de ceux-ci, même en accordant une importance particulière aux syllabes accentuées. En conséquence, les signes présentent un certain degré de similitude sur le plan phonétique ainsi que l’a relevé la chambre de recours.

35      Quant à la référence à l’arrêt HOOLIGAN, précité, par la requérante, il y a lieu de constater, d’une part, que la possibilité de se référer à ses agents ou membres de diverses nationalités pour établir la prononciation du consommateur moyen ne saurait constituer une obligation pour l’OHMI et, d’autre part, que, au point 58 dudit arrêt, le Tribunal a expressément relevé que la prononciation par le consommateur moyen d’un mot d’une langue étrangère dans sa langue maternelle pouvait difficilement être établie avec certitude. Les réserves exprimées par la chambre de recours, au point 32 de la décision attaquée, sur la manière dont les signes en cause seraient prononcés sont conformes aux principes de l’arrêt susmentionné.

36      S’agissant, en troisième lieu, de la comparaison conceptuelle, la chambre de recours a constaté, au point 33 de la décision attaquée, qu’il n’était pas certain que le public polonais aurait discerné une évocation commune du concept « femina » ou « feminin » dans les signes en cause. Elle fait valoir notamment que le mot polonais pour féminin est « kobiecy » et que d’autres mots, comme « feministka » « feministyczna » ou « feminizm », comportent le préfixe « femini » et non le préfixe « femi ». De même, les autres éléments composant les signes en cause, à savoir « feral » et « natal », n’auraient pas de signification en polonais. Ainsi, lesdits signes seraient susceptibles d’être perçus comme des mots inventés et aucune comparaison conceptuelle ne saurait être établie.

37      La requérante fait valoir que les signes en cause sont différents sur le plan conceptuel car le public comprendrait, en raison de l’existence des mots comportant l’élément « femi » dans la langue polonaise, que l’élément verbal « feminatal » se réfère à des préparations pharmaceutiques pour les femmes enceintes alors que « femiferal » signifie que les préparations destinées aux femmes contiennent du fer.

38      Il convient de relever que, si le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails, il n’en demeure pas moins que, en percevant un signe verbal, il décomposera celui-ci en des éléments verbaux qui, pour lui, ont une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal RESPICUR, précité, point 57, et du 13 février 2008, Sanofi-Aventis/OHMI – GD Searle (ATURION), T‑146/06, non publié au Recueil, point 58]. Il a été précisé dans l’arrêt du Tribunal du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT) (T‑356/02, Rec. p. II‑3445, point 51) qu’il était possible pour le consommateur pertinent de décomposer un signe verbal même si un seul des éléments le composant lui était familier.

39      En l’espèce, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, qu’aucun des éléments composant les signes en cause, à savoir l’élément commun « femi » ou les éléments différents « natal » et « feral », n’a de signification en langue polonaise. L’utilisation du préfixe « femi » dans les mots tels que « feministka », « feministyczna » ou « feminizm » ne saurait être suffisante pour que le consommateur moyen puisse attribuer une signification aux éléments verbaux constituant les marques en cause. Par conséquent, le consommateur polonais moyen ne sera pas en mesure d’identifier dans les signes en cause des mots familiers.

40      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’aucune comparaison conceptuelle n’était possible en ce qui concerne le consommateur final.

41      En outre, même s’il y avait lieu de considérer que le public pertinent aurait été en mesure d’identifier dans les signes en cause une référence à des produits destinés aux femmes, il aurait convenu, dans une telle hypothèse, de constater que lesdits signes étaient similaires.

 Sur le risque de confusion

42      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

43      En l’espèce, ainsi qu’il a été constaté au point 24 ci-dessus, les produits couverts par les marques en cause sont en partie identiques et en partie similaires. De même, il existe une similitude des signes sur le plan visuel et une certaine similitude sur le plan phonétique. Enfin, aucune comparaison conceptuelle n’a pu être établie en ce qui concerne le consommateur final.

44      Cependant, il y a lieu de relever que, en l’espèce, la chambre de recours n’a pas effectué d’appréciation des signes sur le plan conceptuel par rapport à la perception du public professionnel. Il ressort clairement du point 33 de la décision attaquée que cette comparaison a été effectuée uniquement par rapport au consommateur moyen polonais. Lors de l’audience, l’OHMI a fait valoir que la chambre de recours pouvait se concentrer sur le grand public.

45      À cet égard, il y a lieu de rappeler la jurisprudence citée au point 19 ci‑dessus selon laquelle, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Or, ainsi qu’il a été constaté au point 21 ci‑dessus, le public pertinent en l’espèce est composé du grand public polonais ainsi que des professionnels du secteur médical. Il s’ensuit que la chambre de recours avait l’obligation d’effectuer une comparaison des signes en cause sur le plan conceptuel également par rapport à la perception du public professionnel.

46      Toutefois, cette erreur n’est pas de nature à invalider la décision attaquée. En effet, dès lors que, dans le cadre de son appréciation des faits aux points 28 à 33 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que les produits en cause étaient en partie identiques et en partie similaires et que les signes en cause étaient similaires sur les plans visuel et phonétique pour la partie du public pertinent constituée par le consommateur final, elle a pu, sans méconnaître la portée de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en déduire, aux points 43 et 52 de la décision attaquée, qu’il existait un risque de confusion entre lesdits signes au sens de cette disposition (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec. p. I‑3569, point 99).

47      En outre, selon une jurisprudence constante, si, dans les circonstances particulières du cas d’espèce, une erreur n’a pu avoir une influence déterminante quant au résultat, l’argumentation fondée sur une telle erreur est inopérante et ne saurait donc suffire à justifier l’annulation de la décision attaquée [voir arrêt du Tribunal du 9 février 2011, Ineos Healthcare/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (ALPHAREN), T‑222/09, non encore publié au Recueil, point 33, et la jurisprudence citée].

48      De même, la requérante fait valoir que l’élément « femi » commun aux marques en cause possède un faible caractère distinctif. Elle avance, en particulier, le fait que les consommateurs polonais percevront cet élément comme faisant référence aux femmes et associeront les produits revêtus des marques comportant cet élément à des produits destinés aux femmes.

49      Il y a lieu de constater que c’est à tort que la requérante se réfère, de manière isolée, à l’élément verbal « femi ». En effet, les éléments verbaux pertinents des marques en conflit sont, d’une part, « feminatal » et, d’autre part, « femiferal ». De même, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il a été constaté au point 39 ci‑dessus, que les éléments verbaux constituant les marques en cause n’ont pas de signification en langue polonaise. En l’espèce, il ne serait dès lors pas possible de constater que l’élément verbal « femi » composant les marques en cause possède un faible caractère distinctif.

50      En outre, même à supposer que la marque antérieure présente un caractère faiblement distinctif, cette circonstance n’empêche pas de constater l’existence d’un risque de confusion en l’espèce.

51      En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou des services visés [voir arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, Rec. p. II‑5213, point 70, et la jurisprudence citée].

52      Quant aux décisions nationales invoquées par la requérante, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que les enregistrements d’ores et déjà effectués dans des États membres ne constituent que des éléments qui, sans être déterminants, peuvent seulement être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque communautaire [arrêts du Tribunal du 16 février 2000, Procter & Gamble/OHMI (Forme d’un savon), T‑122/99, Rec. p. II‑265, point 61, et du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T‑337/99, Rec. p. II‑2597, point 58].

53      Il ressort également de la jurisprudence que l’OHMI est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union. Si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’OHMI doit prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C-51/10 P, non encore publié au Recueil, points 73 à 77, et la jurisprudence citée). En l’espèce, ainsi qu’il ressort des points 16 à 51 ci-dessus, la chambre de recours a considéré à bon droit que la marque demandée se heurtait au motif de refus tiré de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, de sorte que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’OHMI.

54      Au vu de tout ce qui précède, c’est à bon droit, que la chambre de recours a constaté qu’il existait un risque de confusion entre les marques antérieures et la marque demandée. Il y a donc lieu de rejeter le moyen unique de la requérante ainsi que le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

56      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Asa sp. z o.o. est condamnée aux dépens.

Czúcz

Labucka

Gratsias

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 mai 2012.

Signatures


* Langue de procédure : le polonais.