Language of document : ECLI:EU:T:2024:35

ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

24 janvier 2024 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Procédure disciplinaire – Sanction disciplinaire – Révocation sans réduction des droits à pension – Obligation de motivation – Erreur d’appréciation – Proportionnalité – Responsabilité »

Dans l’affaire T‑371/21,

WV, représentée par Mes É. Boigelot et B. Garzón Real, avocats,

partie requérante,

contre

Service européen pour l’action extérieure (SEAE), représenté par MM. R. Spáč, S. Marquardt et Mme A. Ireland, en qualité d’agents, assistés de Mes M. Troncoso Ferrer, F.-M. Hislaire et L. Lence de Frutos, avocats,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé de Mme O. Porchia, présidente, MM. L. Madise et S. Verschuur (rapporteur), juges,

greffier : M. L. Ramette, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 4 juillet 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, la requérante, [confidentiel] (1), demande, d’une part, l’annulation de la décision du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) du 26 août 2020 par laquelle celui-ci lui a infligé la sanction de révocation sans réduction des droits à pension (ci-après la « décision attaquée ») et, d’autre part, la réparation du préjudice qu’elle aurait subi à la suite de cette décision.

 Antécédents du litige

2        La requérante a été fonctionnaire de l’Union européenne au SEAE, qu’elle a intégré le 1er janvier 2011.

3        Du 1er janvier 2011 au 31 août 2013, elle a exercé ses fonctions au sein de [confidentiel] du SEAE.

4        Le 1er septembre 2013, elle a fait l’objet d’un transfert dans le cadre de la mobilité interne à [confidentiel], au sein de laquelle elle a d’abord été affectée au [confidentiel] puis au [confidentiel].

5        Pendant cette période, elle a fait l’objet d’une mise à disposition temporaire du Parlement européen.

6        Le 23 novembre 2014, la requérante a fait l’objet d’un transfert dans l’intérêt du service. Du 24 novembre 2014 au 31 janvier 2015 et du 1er février 2015 au 30 septembre 2016, la requérante a successivement exercé ses fonctions auprès de [confidentiel] et de [confidentiel] du SEAE.

7        Du 1er octobre au 15 novembre 2016, la requérante a été transférée dans l’intérêt du service vers [confidentiel]. Ce transfert devait être temporaire, dans l’attente d’un nouveau détachement auprès du Parlement, lequel ne s’est toutefois pas produit.

8        Le 16 novembre 2016, la requérante a été transférée dans l’intérêt du service à [confidentiel].

9        Le 8 février 2017, la requérante a transmis au directeur général du SEAE, par courriel et en main propre, un document qui contiendrait une demande d’assistance qui serait également contenue dans un courriel du 2 février 2017. Le 27 juin 2018, la requérante a introduit un recours devant le Tribunal visant, en substance, à l’annulation de la décision de rejet implicite de ladite prétendue demande d’assistance, intervenu le 4 septembre 2017. Ce recours a été rejeté comme étant irrecevable par ordonnance du 29 janvier 2020, WV/SEAE (T‑388/18, non publiée, EU:T:2020:27). Le pourvoi formé contre cette ordonnance a été rejeté par arrêt du 3 mars 2022, WV/SEAE (C‑172/20 P, non publié, EU:C:2022:155).

10      Par courriel du 3 avril 2017, la requérante a envoyé un certificat médical pour justifier ses absences des 30 et 31 mars 2017 et du 3 avril 2017.

11      Par courriel du 10 avril 2017, la requérante a signalé à sa hiérarchie que des absences auraient été indûment introduites dans le système informatique de gestion du personnel Sysper, dont certaines pour des dates futures.

12      Le 11 avril 2017, un échange de courriels a eu lieu entre la requérante et sa hiérarchie au sujet des prétendues absences irrégulières.

13      Le 19 avril 2017, le directeur général du SEAE a communiqué à la requérante une note datée du 12 avril 2017 l’informant des raisons ayant motivé son transfert dans l’intérêt du service du 30 septembre 2016 et son exclusion de [confidentiel]. La note du 12 avril 2017 contenait en annexe une note de son ancien supérieur hiérarchique et chef de [confidentiel].

14      Le 4 juillet 2017, la requérante s’est rendue à un séminaire à [confidentiel] intitulé [confidentiel]. Sur la liste des participants à ce séminaire, elle est indiquée comme étant [confidentiel] du SEAE.

15      Le 12 septembre 2017, le chef d’unité de la requérante lui a adressé une note dans laquelle il était indiqué que, pour la période allant du 1er janvier au 14 juillet 2017, la requérante avait été absente de façon injustifiée pendant 60 jours ouvrés. Il est ajouté que, comme les droits à congé de la requérante étaient épuisés, lesdites absences seraient déduites de son salaire, pour un équivalent de 85 jours calendaires, conformément à l’article 60 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »).

16      Par courriel du 15 septembre 2017, la requérante a répondu à la note du 12 septembre 2017 et a notamment demandé à ce que lui soient transmis les extraits de pointage d’entrée et de sortie des installations du SEAE (ci-après les « extraits de pointage »).

17      Le 25 septembre 2017, le chef de [confidentiel] a indiqué à la requérante ne pas pouvoir, pour des motifs de protection des données, disposer des extraits de pointage.

18      Par courriel du 4 octobre 2017, la requérante a expliqué audit chef, dans un premier temps, que le différend était relatif à ses exclusions prétendument illégales du [confidentiel] et de [confidentiel], lesquelles seraient fondées sur une possible appartenance aux services [confidentiel] et la transmission de sa part d’informations confidentielles aux [confidentiel]. Dans un second temps, la requérante a donné une explication aux absences prétendument injustifiées en annexant à son courriel des échanges qu’elle a eus avec sa hiérarchie ainsi que des certificats médicaux.

19      En réponse au courriel du 4 octobre 2017, le SEAE a envoyé une note du 13 octobre 2017, dans laquelle il est expliqué que la retenue sur salaire annoncée dans la note du 12 septembre 2017 était maintenue, puisque les raisons avancées par la requérante et les certificats médicaux soumis ne pouvaient pas être acceptés.

20      Le 17 octobre 2017, la requérante a envoyé un compte rendu interne à l’attention du [confidentiel] du SEAE, intitulé [confidentiel], à l’adresse d’une tierce personne n’appartenant pas au SEAE.

21      Le 27 novembre 2017, le SEAE a émis une nouvelle note remplaçant celle du 12 septembre 2017 et confirmant que certaines absences auparavant indiquées comme étant non autorisées avaient été transformées en absences pour congé annuel (ci-après la « décision du 27 novembre 2017 »). Par conséquent, la retenue sur salaire envisagée pour 85 jours calendaires a été réduite à 72 jours calendaires. À la suite de la réclamation introduite par la requérante contre la décision du 27 novembre 2017, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a décidé, le 2 mai 2018, de comptabiliser une demi-journée en tant que présence effective pour le 9 janvier 2017, de sorte que la retenue sur salaire a finalement été réduite à 71,5 jours calendaires, tout en rejetant la réclamation de la requérante pour le surplus. La décision du 27 novembre 2017 ainsi que la décision du 2 mai 2018 ont fait l’objet d’un recours en annulation devant le Tribunal, lequel a été rejeté par ordonnance du 29 janvier 2020, WV/SEAE (T‑471/18, non publiée, EU:T:2020:26). Cette ordonnance a été annulée par l’arrêt du 3 mars 2022, WV/SEAE (C‑162/20 P, EU:C:2022:153).

22      Par lettre du 28 novembre 2017, émanant des services du Médiateur européen, la requérante a appris qu’elle faisait l’objet d’une enquête interne de sécurité par les services du SEAE. Un rapport intermédiaire concernant cette enquête a été établi le 11 octobre 2017.

23      Le 30 janvier 2018, l’Office d’investigation et de discipline de la Commission (IDOC) a été mandaté par l’AIPN pour mener une enquête administrative, à laquelle il a procédé le 6 février 2018.

24      Le 6 février 2018, l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission européenne a procédé à la retenue sur salaire de la requérante sur la base de la décision du 27 novembre 2017.

25      Le 12 avril 2018, la requérante a introduit une réclamation, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, à l’encontre, d’une part, de la décision de l’AIPN du 30 janvier 2018 de donner mandat à l’IDOC de procéder à l’ouverture d’une enquête à son égard et, d’autre part, de la décision de l’IDOC d’ouvrir une telle enquête.

26      Le 1er mars 2019, la requérante a intégré, à la suite d’une réorganisation des services du SEAE, [confidentiel].

27      Le 4 juin 2019, à la suite de la transmission du rapport d’enquête par l’IDOC à l’AIPN en date du 21 mai 2019, la requérante a été informée de l’ouverture de la procédure au titre de l’article 3 de l’annexe IX du statut et convoquée à une audition le 24 juin 2019 ayant pour objet de recueillir ses commentaires sur le rapport d’enquête joint, afin de permettre à l’AIPN d’apprécier les griefs qui pourraient être retenus à son égard et de décider, en conséquence, s’il convenait d’ouvrir une procédure disciplinaire.

28      Le 11 juin 2019, la requérante a informé le SEAE qu’elle ne pourrait pas assister à l’audition du 24 juin 2019, en précisant que ses avocats étaient disponibles entre le 15 juillet et le 1er août, ou après le 20 août et, en tout cas, uniquement après transmission des pièces manquantes.

29      Le même jour, l’IDOC a répondu à la requérante qu’il n’y avait pas de pièces manquantes et l’a informée que l’audition aurait lieu le 21 juin 2019.

30      Le 17 juin 2019, l’avocat de la requérante a réclamé des documents à l’IDOC, tout en rappelant la nécessité d’auditionner des témoins essentiels. Il a par ailleurs exprimé son étonnement quant au fait que la date de l’audition avait été avancée et indiqué que ce changement serait abusif et déraisonnable.

31      À la suite d’un second report de l’audition au 12 juillet 2019, l’avocat de la requérante a rappelé, par un courriel du 19 juin 2019, qu’il ne pourrait être disponible avant le 15 juillet 2019. L’audition a finalement été fixée au 16 juillet 2019.

32      En date du 15 juillet 2019, l’avocat de la requérante a informé l’IDOC que cette dernière se trouvait en congé maladie depuis le 26 juin, et ce jusqu’au 30 août 2019, et qu’elle ne pourrait donc pas assister à l’audition.

33      Le 4 octobre 2019, le directeur général du SEAE a adressé un rapport au conseil de discipline, duquel il ressort que la requérante ne s’était pas présentée à l’audition du 16 juillet 2019, après quatre propositions de date, et n’avait pas déposé de certificat médical à cet effet. En conclusion, il est indiqué dans ledit rapport que la requérante avait commis, de façon répétée, des manquements d’une grande gravité à ses obligations statutaires, et qu’elle avait refusé de coopérer dans le cadre de la procédure, sans exprimer aucun regret, et semblait souhaiter poursuivre dans son comportement. Au vu de ce manque de loyauté, le lien de confiance entre la requérante et le SEAE aurait été définitivement rompu.

34      Le 15 octobre 2019, l’avocat de la requérante a demandé, conformément à l’article 13 de l’annexe IX du statut, la communication intégrale du dossier individuel ainsi qu’un délai supérieur à quinze jours, compte tenu de l’ampleur du dossier, afin de pouvoir préparer la défense.

35      Le 25 octobre 2019, le secrétaire du conseil de discipline a informé la requérante et son avocat, notamment, que l’audition devant le conseil de discipline aurait lieu le 5 décembre 2019 au siège du SEAE et qu’il n’était pas en mesure de fournir d’autres pièces de la procédure.

36      Le 31 octobre 2019, l’avocat de la requérante a fourni la liste des témoins à entendre ainsi que des questions à leur poser.

37      Le 18 novembre 2019, le président du conseil de discipline a informé l’avocat de la requérante qu’un des témoins indiqués serait entendu, l’audition des autres étant considérée comme étant non justifiée.

38      Le 19 novembre 2019, la requérante a transmis au secrétaire du conseil de discipline les questions qu’il convenait, selon elle, de poser au témoin qui sera entendu.

39      Le 28 novembre 2019, l’avocat de la requérante a informé le secrétaire du conseil de discipline qu’il ne pourrait pas être présent à l’audition du 5 décembre 2019.

40      L’audition devant le conseil de discipline s’est tenue le 5 décembre 2019, en l’absence de la requérante et de ses avocats.

41      Le 20 décembre 2019, l’avis du conseil de discipline a été transmis à la requérante. Il a proposé à l’unanimité à l’AIPN d’infliger à la requérante la sanction de révocation sans réduction des droits à pension.

42      Le 31 janvier 2020, la directrice de l’IDOC a informé la requérante qu’une AIPN tripartite se réunirait en date du 19 février 2020.

43      Le 17 février 2020, l’avocat de la requérante a demandé le report de la réunion en raison de l’indisponibilité de l’autre avocat de la requérante. La date du 1er avril a été ensuite retenue, puis reportée à nouveau en raison de la crise sanitaire.

44      Le 7 mai 2020, une nouvelle date a été communiquée à la requérante, fixant la réunion tripartite par visioconférence au 27 mai 2020. En réponse, l’avocat de la requérante ainsi que cette dernière ont soutenu que cette convocation était inappropriée au regard de la crise sanitaire dans un dossier aussi sensible, estimant que les droits de la défense n’étaient pas garantis. Il a donc été proposé de reporter la réunion au 5 juin 2020 et de la tenir dans les installations du SEAE en présence de la requérante, ses avocats y participant en visioconférence.

45      Le 3 juin 2020, l’avocat de la requérante a sollicité le report de la réunion prévue le 5 juin 2020, estimant que l’organisation proposée n’était pas sérieuse. Par la suite, l’audition a été reportée au 24 juillet 2020. La requérante a fait part de son impossibilité de se déplacer et a demandé l’avis de l’AIPN concernant l’opportunité de maintenir la réunion à cette date. L’AIPN a estimé ne pas être au courant de ses problèmes de déplacement, mais a néanmoins proposé à la requérante d’assister à la réunion par visioconférence ou de s’y faire représenter.

46      L’audition s’est tenue le 24 juillet 2020 en la seule présence de l’un des avocats de la requérante.

47      Le 26 août 2020, la décision attaquée a été transmise à la requérante. Dans ladite décision, il est indiqué que, par ses absences injustifiées au sein des [confidentiel], son refus explicite de travailler dans [confidentiel], ainsi que ses comportements actifs contraires aux obligations statutaires, en particulier sa participation au séminaire [confidentiel] et l’envoi non autorisé d’informations à une tierce personne n’appartenant pas au SEAE, la requérante avait systématiquement enfreint l’article 17, paragraphe 1, l’article 21, premier alinéa, l’article 55, paragraphe 1, et l’article 60, premier alinéa, du statut.

48      Le 25 novembre 2020, la requérante a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut à l’encontre de la décision attaquée, suivie d’un complément de réclamation daté du 11 décembre 2020.

49      Par décision du 19 mars 2021, l’AIPN a rejeté la réclamation.

 Conclusions des parties

50      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et, pour autant que de besoin, tous les actes et décisions préparatoires ;

–        ordonner « la réparation de l’intégralité du dommage qu’elle subit et subira du fait de la prise et de la mise en exécution de cette décision attaquée et de l’ensemble du comportement dénoncé dans lequel cette décision a été prise », fixé provisoirement et sous réserve d’augmentation en cours d’instance, ex æquo et bono, à 3 500 000 euros ;

–        condamner le SEAE aux dépens.

51      Le SEAE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant irrecevable ou, à tout le moins, comme étant non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

52      Le SEAE fait valoir que le recours est irrecevable compte tenu du manque de clarté et de précision de la requête. Selon le SEAE, le texte de la requête n’est pas structuré de façon à lui permettre de comprendre les arguments de la requérante. La requête contiendrait des affirmations générales non étayées par des éléments de preuve et des références à des faits ou à des actes qui n’ont aucun lien avec la décision attaquée et qui n’ont pas fait l’objet d’une réclamation. Par ailleurs, certains griefs sont évoqués sans être développés et des griefs de légalité externe sont mêlés à des griefs de légalité interne.

53      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige et un exposé sommaire des moyens invoqués. Il ressort de la jurisprudence que cet exposé doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal d’exercer son contrôle. Il en découle que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours est fondé doivent ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même. La requête doit, de ce fait, expliciter en quoi consistent les moyens sur lesquels le recours est fondé, de sorte que leur seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences du règlement de procédure (voir, en ce sens, ordonnance du 29 janvier 2020, WV/SEAE, T‑471/18, non publiée, EU:T:2020:26, point 59 et jurisprudence citée).

54      En l’espèce, sous le titre « Énoncé », la requérante soulève quatre moyens par lesquels elle allègue une multitude de violations du statut, de principes généraux du droit de l’Union, de règlements, de directives, de résolutions, de conventions, de pactes et de déclarations. La requérante ajoute que les mêmes faits ou actes juridiques peuvent donner lieu à plusieurs violations soulevées dans le cadre de différents moyens invoqués et que, afin d’éviter des redites et d’en faciliter la compréhension, ils seront examinés comme un tout. Ainsi, la requête comporte sous le titre « Quant au fond » l’argumentation invoquée par la requérante au soutien des quatre moyens, sans que ces derniers soient subdivisés.

55      Il ressort de la requête que celle-ci comporte des arguments juridiques développés de façon suffisamment claire et identifiable pouvant se rapporter aux quatre moyens invoqués. En conséquence, contrairement à ce que prétend le SEAE, le recours est recevable.

 Sur le fond

 Sur la demande en annulation

56      À l’appui de ses conclusions en annulation, la requérante invoque quatre moyens, tirés, en substance, le premier, de l’absence de matérialité des faits reprochés, de la violation de l’obligation de motivation et du principe ne bis in idem, le deuxième, de vices de forme et de procédure entachant la procédure disciplinaire, le troisième, de la violation de l’article 10 de l’annexe IX du statut, du principe de sécurité juridique, du principe de proportionnalité, du principe de protection de la confiance légitime et d’une erreur manifeste d’appréciation, et, le quatrième, de la violation des articles 12 bis, 22 bis, 22 ter et 24 du statut, du principe de non-discrimination et du devoir d’assistance, d’un abus de pouvoir et d’un détournement de pouvoir.

57      Il convient d’examiner d’abord le quatrième moyen, puis le deuxième moyen et, enfin, les premier et troisième moyens.

–       Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de plusieurs dispositions du droit de l’Union relatives au principe de non-discrimination, au devoir d’assistance, à l’abus de pouvoir et au détournement de pouvoir

58      En premier lieu, la requérante fait valoir que les faits retenus par le SEAE pour lui infliger la sanction de la révocation sans réduction des droits à pension, d’une part, trouvent leur origine dans des événements qui se sont produits lorsqu’elle travaillait au [confidentiel] et, d’autre part, s’inscrivent dans un cadre de harcèlement à son égard, en violation de l’article 12 bis du statut, et de discrimination, en violation de l’article 1er quinquies du statut et de l’article 2 TFUE ainsi que des dispositions de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO 2000, L 303, p. 16), et de la directive 2000/43/CE du Conseil, du 29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique (JO 2000, L 180, p. 22).

59      Selon la requérante, le contexte de la révocation est clairement [confidentiel]. Ainsi, elle allègue avoir fait l’objet de rumeurs selon lesquelles, [confidentiel], elle serait [confidentiel]. Ces rumeurs auraient conduit à la mise en œuvre de l’enquête de sécurité, aboutissant à l’écarter de son poste de travail, à la stigmatiser et à l’isoler, dans le but de sa révocation ultérieure. La requérante reproche au SEAE de ne pas avoir enquêté de façon impartiale et autonome sur ces allégations, d’avoir ignoré ses demandes d’éclaircissements et, par conséquent, d’avoir fait obstacle à l’établissement des faits ainsi qu’à l’exercice adéquat de ses droits de la défense.

60      En deuxième lieu, la requérante fait valoir que, en violation de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut ainsi que des dispositions de la directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2019, sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union (JO 2019, L 305, p. 17), et du règlement (UE) 2018/1725 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2018, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les institutions, organes et organismes de l’Union et à la libre circulation de ces données et abrogeant le règlement (CE) n° 45/2001 et la décision n° 1247/2002/CE (JO 2018, L 295, p. 39), elle a subi un préjudice du fait d’actes de représailles et de persécution pour avoir dénoncé des faits répréhensibles, tels que les dysfonctionnements dans le traitement des plaintes pour [confidentiel] au sein du SEAE, à la Médiatrice européenne, au président de la Cour des comptes, au président du Parlement, au Contrôleur européen de la protection des données (CEPD), à l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et au Haut représentant des Nations unies chargé de [confidentiel].

61      Dans ce cadre, la requérante soutient également que l’AIPN s’est abstenue de répondre à l’institution interfédérale belge de lutte contre les discriminations (UNIA) et à ses demandes formulées dans ses courriers des 11 septembre et 18 décembre 2020, et que le SEAE a également omis de répondre de façon substantielle aux demandes d’éclaircissement de la présidente du groupe de travail [confidentiel] du Parlement, ce qui constituerait une violation grave de l’obligation de coopération loyale à l’égard du Parlement et de la résolution du Parlement [confidentiel].

62      Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

63      En premier lieu, il convient de constater que l’argumentation de la requérante relative aux événements qui se seraient produits lorsqu’elle travaillait au [confidentiel] et qui s’inscriraient dans un cadre de harcèlement, de discrimination, de représailles et de persécution à son égard doit être rejetée comme étant inopérante. En effet, ladite argumentation est fondée sur des affirmations selon lesquelles d’autres personnes se seraient comportées de manière inappropriée, alors que la décision attaquée porte sur le comportement de la requérante elle-même.

64      En tout état de cause, il convient de constater que le dossier ne comporte aucun élément de preuve à l’appui des allégations relatives aux événements décrits aux points 58 à 60 ci-dessus. Dans ses écritures et lors de l’audience, la requérante n’a pas apporté davantage d’éclaircissements à cet égard.

65      En deuxième lieu, il convient de constater, à l’instar du SEAE, que les prétendus contexte [confidentiel] et actes de harcèlement de la part du SEAE à l’égard de la requérante n’ont jamais fait l’objet d’un quelconque constat de la part des entités indépendantes invoquées par la requérante.

66      Quant à l’allégation selon laquelle le SEAE n’aurait pas donné suite aux demandes de renseignements du représentant des Nations unies et de l’UNIA, il convient de constater que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, d’une part, le dossier ne comporte pas de demande de renseignements du représentant des Nations unies, et, d’autre part, que le SEAE a bien répondu aux sollicitations de l’UNIA, notamment par courriers des 20 octobre 2020 et 19 février 2021, dans lesquels le SEAE a fourni des explications sur plusieurs points.

67      S’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle le SEAE n’a pas respecté son devoir de coopération loyale envers le Parlement, ni la résolution du Parlement [confidentiel], il suffit de constater, à l’instar du SEAE, que la requérante n’explique pas pourquoi les réponses données par le SEAE aux membres du Parlement n’auraient pas été suffisantes. En tout état de cause, il revenait au Parlement de soulever un éventuel manque au devoir de coopération loyale de la part du SEAE, ce que le Parlement n’a pas fait.

68      Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le quatrième moyen comme étant partiellement inopérant et partiellement non fondé.

–       Sur le deuxième moyen, tiré de vices de forme et de procédure entachant la procédure disciplinaire

69      Il convient d’examiner les griefs avancés dans le cadre du deuxième moyen dans un ordre suivant les différentes étapes de ladite procédure en cause.

1)      Sur le premier grief, tiré de l’exclusion du mandat d’enquête de la période allant du 1er septembre 2013 au 24 novembre 2014, constitutive d’un abus de pouvoir, d’un excès de pouvoir et d’un détournement de procédure

70      La requérante reproche au SEAE un abus de pouvoir, un excès de pouvoir ainsi qu’un détournement de procédure, en ce qu’il a exclu de la durée du mandat donné à l’IDOC la période allant du 1er septembre 2013 au 24 novembre 2014 correspondant à l’activité de la requérante au [confidentiel].

71      Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

72      À cet égard, il convient de rappeler que, conformément aux articles 1er, 2 et 3 de l’annexe IX du statut, toute procédure disciplinaire est précédée d’une enquête administrative. Conformément aux articles 1er et 2 de la décision C(2019) 4231 final de la Commission, du 12 juin 2019, établissant les dispositions générales d’exécution concernant la conduite des enquêtes administratives et des procédures disciplinaires (ci-après les « DGE 2019 »), l’IDOC est l’organe chargé d’effectuer, à la demande de l’AIPN, les enquêtes administratives. L’article 12 de la même décision prévoit que l’AIPN accorde à l’IDOC un mandat définissant l’objectif et la portée de chaque enquête administrative qu’elle décide d’ouvrir.

73      En l’espèce, la requérante n’a pas démontré que l’AIPN s’était rendue coupable d’un abus de pouvoir, d’un excès de pouvoir ainsi que d’un détournement de procédure en ce qu’elle aurait exclu du mandat de l’enquête la période en cause. En effet, elle n’explique pas en quoi les événements et circonstances intervenus au sein du [confidentiel] auraient revêtu une importance telle que l’AIPN aurait dû les prendre en considération lorsqu’elle a mandaté l’IDOC de mener une enquête sur le comportement de la requérante à partir du 24 novembre 2014, à savoir après son transfert dans l’intérêt du service à [confidentiel].

74      Partant, il convient de rejeter le premier grief.

2)      Sur le deuxième grief tiré de la transmission tardive du rapport de l’enquête de sécurité

75      La requérante fait valoir que, en violation des articles 3 et 10 de l’annexe IX du statut et de ses droits de la défense, le SEAE lui a transmis de façon tardive le rapport de l’enquête de sécurité, lequel était annexé au rapport de l’enquête administrative de l’IDOC et constituait la base de cette dernière.

76      Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

77      À cet égard, il convient de constater, à titre liminaire, qu’il ressort du dossier que ladite enquête de sécurité avait pour but de vérifier l’affirmation de la requérante selon laquelle elle avait fait l’objet d’allégations imprécises d’ordre diffamatoire et pouvant être considérées comme étant des outrages, des injures et des diffamations ne reposant sur aucun élément tangible. En outre, la requérante contestait la comptabilisation de ses heures de travail. L’enquête avait dès lors pour but premier de vérifier lesdites affirmations et contestations de la requérante.

78      À l’issue de l’enquête, il a été conclu que l’analyse des courriels et des documents de la requérante avait montré que celle-ci entretenait un réseau solide avec [confidentiel]. Le rapport a conclu que la requérante ne respectait pas les règles administratives concernant la gestion du temps, ni les règles de sécurité concernant le stockage des informations classifiées.

79      Ensuite, il convient de rappeler que l’article 2 de l’annexe IX du statut, lequel concerne les enquêtes administratives effectuées par l’AIPN, prévoit que cette dernière informe l’intéressé de la fin de l’enquête et lui communique les conclusions du rapport d’enquête et, sur sa demande et sous réserve de la protection des intérêts légitimes de tierces parties, lui transmet tous les documents en rapport direct avec les allégations formulées à son égard. En outre, il ressort de l’article 3 de ladite annexe que l’AIPN, sur la base du rapport d’enquête, peut prendre la décision d’ouvrir une procédure disciplinaire, après avoir communiqué au fonctionnaire concerné toutes les pièces du dossier et l’avoir entendu.

80      En l’espèce, comme le fait valoir à juste titre le SEAE, le 6 juin 2019, l’IDOC a, au titre des articles 2 et 3 de l’annexe IX du statut, communiqué à la requérante son rapport d’enquête du 21 mai 2019, auquel était annexé le rapport de l’enquête de sécurité du 11 octobre 2017 dont elle avait fait l’objet, tout en l’informant qu’elle serait invitée à une audition organisée en vertu de l’article 3 de l’annexe IX du statut. Ainsi qu’il est indiqué aux points 27 à 33 ci-dessus, ladite audition a in fine eu lieu le 16 juillet 2019, en l’absence de la requérante, après quatre propositions de date et sans que la requérante ait déposé un certificat médical à cet effet. La requérante a dès lors eu la possibilité de faire valoir ses observations sur le rapport de l’enquête de sécurité.

81      Il en résulte qu’aucune violation des articles 3 et 10 de l’annexe IX du statut, ni des droits de la défense de la requérante n’a été commise. De plus, la requérante ne démontre pas que le SEAE aurait eu l’obligation, en vertu d’une quelconque autre disposition statutaire, de lui transmettre ledit rapport de l’enquête de sécurité à un stade antérieur de la procédure.

82      Partant, il convient de rejeter le deuxième grief.

3)      Sur le troisième grief, tiré d’une violation de l’article 12 de l’annexe IX du statut et de la présomption d’innocence

83      La requérante indique que le directeur général du SEAE a déjà, en date du 4 octobre 2019, dans le rapport au conseil de discipline (voir point 33 ci-dessus) et donc avant la procédure devant ledit conseil, manifesté de façon explicite et expresse la volonté de l’AIPN de la révoquer, en énonçant que « l’AIPN consid[érait] que le lien de confiance entre elle et le SEAE [étai]t irrémédiablement rompu ». Ainsi, le SEAE aurait violé l’article 12 de l’annexe IX du statut ainsi que la présomption d’innocence.

84      Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

85      À cet égard, il convient de constater que les allégations de la requérante reposent sur une méconnaissance du déroulement de la procédure disciplinaire et des règles statutaires applicables à ladite procédure.

86      En effet, ainsi qu’il ressort du point 33 ci-dessus, l’AIPN a, sur la base du rapport d’enquête de l’IDOC, décidé d’ouvrir une procédure disciplinaire à l’égard de la requérante et a transmis à cette fin un rapport au conseil de discipline, lequel présentait, conformément à l’article 12 de l’annexe IX du statut, l’ensemble des circonstances dans lesquelles les faits reprochés avaient été commis, y compris les circonstances aggravantes et atténuantes. Ainsi, comme le fait valoir à juste titre le SEAE, ce rapport ne préjuge aucunement de la décision finale de l’AIPN.

87      Par ailleurs, le fait que l’AIPN ait affirmé, avant que le conseil de discipline n’ait formulé son avis, que le lien de confiance entre la requérante et le SEAE était irrémédiablement rompu n’implique pas que l’AIPN ait définitivement décidé de révoquer la requérante. En revanche, il s’agit d’une prise de position de l’AIPN qui était, à ce stade, par nature préalable et qui a été suivie d’une procédure contradictoire au cours de laquelle la requérante a pu s’exprimer sur les allégations à son égard et la sanction prévue.

88      Partant, il convient de rejeter le troisième grief.

4)      Sur le quatrième grief, tiré, en substance, de la violation de l’article 13 de l’annexe IX du statut tenant à la communication partielle du dossier individuel de la requérante

89      La requérante fait valoir que, en violation de l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), du principe de l’égalité des armes, du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), de l’article 25 et de l’article 26, deuxième alinéa, du statut et de l’article 13 de l’annexe IX du statut, elle n’a pas reçu l’intégralité de son dossier, en dépit de sa demande explicite à cet égard.

90      Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

91      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 13 de l’annexe IX du statut, « dès la réception [du rapport émanant de l’AIPN], le fonctionnaire concerné a le droit d’obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et de prendre copie de toutes les pièces de la procédure, y compris celles qui sont de nature à le disculper ».

92      Le 11 juin 2019, la requérante a accusé réception du dossier. En outre, à plusieurs reprises, le SEAE a confirmé à la requérante que l’intégralité du dossier lui avait été transmise.

93      En ce qui concerne les documents demandés par la requérante, mais n’appartenant pas au dossier, le SEAE a indiqué que ces documents n’existaient pas.

94      La requérante n’a avancé aucun argument susceptible de remettre en cause lesdites allégations du SEAE.

95      Par conséquent, étant donné qu’elle n’a pas démontré que les documents qu’elle a reçus ne constituaient pas l’intégralité du dossier, elle ne saurait se prévaloir des violations indiquées au point 89 ci-dessus.

96      Partant, il convient de rejeter le quatrième grief.

5)      Sur le cinquième grief, tiré du rejet par le conseil de discipline de l’audition de la majorité des témoins

97      La requérante soutient que, en violation de ses attentes relatives à un examen complet, impartial et contradictoire du dossier soumis au conseil de discipline, il n’a pas été réservé une réponse favorable à sa demande de témoignages, sous réserve d’une seule exception.

98      Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

99      À cet égard, il convient d’observer que le conseil de discipline dispose d’un large pouvoir d’appréciation en ce qui concerne la conduite des enquêtes administratives, notamment pour évaluer la qualité et l’utilité de la coopération fournie par les témoins (voir, par analogie, arrêts du 16 mai 2012, Skareby/Commission, F‑42/10, EU:F:2012:64, point 38, et du 11 juillet 2013, Tzirani/Commission, F‑46/11, EU:F:2013:115, point 124).

100    Par conséquent, le conseil de discipline pouvait décider, en l’espèce, de n’entendre qu’un seul témoin parmi tous ceux dont l’audition avait été suggérée par la requérante. De plus, aucun élément du dossier soumis au Tribunal ne suggère que le choix du conseil de discipline aurait été partial ou aurait méconnu le caractère contradictoire de la procédure.

101    Partant, il convient de rejeter le cinquième grief.

6)      Sur le sixième grief, tiré, en substance, de la violation des droits de la défense, du droit à une bonne administration, du droit à un procès équitable ainsi que de l’article 22 de l’annexe IX du statut en raison du refus de reporter les auditions devant le conseil de discipline et l’AIPN tripartite

102    La requérante soutient que ses droits de la défense, son droit à une bonne administration, son droit à un procès équitable ainsi que l’article 22 de l’annexe IX du statut ont été violés en ce que ni l’audition devant le conseil de discipline du 5 décembre 2019, ni celle devant l’AIPN tripartite du 24 juillet 2020 n’ont été reportées, alors que des problèmes indépendants de sa volonté et de celle de ses conseils les empêchaient d’y assister. La requérante ajoute, en ce qui concerne l’audition devant le conseil de discipline, que la possibilité de soumettre une note écrite, conformément à l’article 4 de l’annexe IX du statut, n’est qu’une solution subsidiaire.

103    Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

104    À cet égard, il convient de rappeler que, en application de l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, toute personne a le droit d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son égard.

105    Dans le cadre de la procédure disciplinaire telle que régie par le statut, le droit d’être entendu est mis en œuvre, au sens de la Charte, d’une part, notamment par l’article 16, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut, lequel prévoit que « [l]e fonctionnaire concerné est entendu par le conseil ; à cette occasion, il peut présenter des observations écrites ou verbales, personnellement ou par l’intermédiaire d’un représentant de son choix », ainsi que par l’article 22, paragraphe 1, de l’annexe IX du statut, qui précise que, « [a]près avoir entendu le fonctionnaire, l’[AIPN] prend sa décision ». D’autre part, l’article 4 de cette même annexe prévoit que, « [s]i, pour des raisons objectives, le fonctionnaire ne peut être entendu au titre des dispositions de la présente annexe, il peut être invité à formuler ses observations par écrit ou peut se faire représenter par une personne de son choix ».

106    À cet égard, la jurisprudence a admis que le fait de ne pas avoir entendu l’intéressé n’entraînait pas l’annulation de la décision lui imposant une sanction disciplinaire si ce manquement était imputable à l’intéressé lui-même. En particulier, l’AIPN n’est pas tenue de repousser indéfiniment la date de la dernière audition jusqu’à ce que l’intéressé soit en mesure d’y participer. Au contraire, tant dans l’intérêt du fonctionnaire que dans celui de l’administration, la décision mettant fin à la procédure disciplinaire ne peut être retardée sans justification (voir arrêt du 5 décembre 2002, Stevens/Commission, T‑277/01, EU:T:2002:302, point 41 et jurisprudence citée).

107    En l’espèce, le conseil de discipline a été saisi par le directeur général du SEAE le 4 octobre 2019 par un rapport duquel il ressort que la requérante ne s’était déjà pas présentée à l’audition du 16 juillet 2019, après quatre propositions de date. En effet, la requérante ayant expliqué qu’elle ne pouvait assister à l’audition de l’AIPN initialement prévue le 24 juin 2019, celle-ci a été avancée au 21 juin 2019, puis reportée, à la suite d’une nouvelle demande de la requérante, au 12 juillet 2019 pour enfin, après une autre demande de report de la part de la requérante, avoir lieu le 16 juillet 2019. La requérante et ses avocats ne se sont finalement pas présentés à ladite audition, sans que la requérante ait déposé de certificat médical, ni fourni une autre justification valable pour son absence.

108    Par la suite, s’agissant de la procédure devant le conseil de discipline, il convient de relever que le délai de près de deux mois entre la convocation (le 15 octobre 2019) et la tenue de l’audition devant le conseil de discipline (le 5 décembre 2019), que les avocats de la requérante ont demandé et le conseil de discipline a accordé, ne peut être considéré comme étant déraisonnablement bref. En effet, le délai statutaire minimal est fixé à quinze jours en vertu de l’article 13, paragraphe 2, de l’annexe IX du statut.

109    Une semaine avant l’audition devant le conseil de discipline, l’un des deux avocats de la requérante a informé ce dernier qu’il ne serait pas disponible pour l’audition du 5 décembre 2019, sans demander un nouveau report, alors que la requérante pouvait assister à l’audition avec son autre avocat.

110    Enfin, quant à l’audition devant l’AIPN tripartite, il convient de constater que celle-ci a eu lieu le 24 juillet 2020 en la seule présence de l’avocat de la requérante, après trois reports effectués à la demande de cette dernière, et ce quand bien même il aurait été proposé à la requérante d’y assister en visioconférence en raison de la pandémie de la Covid‑19.

111    Partant, il convient de rejeter le sixième grief.

7)      Sur le septième grief, tiré de la violation de l’obligation de bonne foi

112    La requérante invoque que l’AIPN, en violation du principe de bonne foi, a ignoré ses explications données tout au long de la procédure, et notamment celles relatives à l’envoi d’un courriel du 17 octobre 2017 à une personne n’appartenant pas au SEAE comportant un compte rendu.

113    Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

114    À cet égard, il convient de rappeler que le principe de bonne foi peut apparaître comme étant le corollaire de celui de protection de la confiance légitime ou comme s’apparentant au devoir de sollicitude, dans la mesure où il implique de tenir compte des intérêts légitimes des fonctionnaires (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2010, Bleser/Cour de justice, F‑25/07, EU:F:2010:163, point 143).

115    Or, dans la mesure où l’argument de la requérante tend à démontrer que ses explications n’ont pas été dûment prises en compte dans la décision sur la réclamation, il s’agit d’une question liée davantage à la motivation de ladite décision qu’à une éventuelle violation de l’obligation de bonne foi.

116    Partant, il convient de rejeter le septième grief.

8)      Sur le huitième grief, tiré, en substance, de la violation du droit à une bonne administration et de l’article 15 des DGE 2019 en ce que le SEAE n’aurait pas mené l’enquête de manière impartiale, autonome et approfondie

117    La requérante fait valoir que, en violation du droit à une bonne administration et de l’article 15 des DGE 2019, le SEAE n’a pas mené l’enquête de manière impartiale, autonome et approfondie, dès lors que toute la procédure semble se fonder sur des allégations de nature politique et des préjugés. Le SEAE n’aurait lancé aucune procédure de nature à permettre un réel examen contradictoire, précis, impartial et autonome des comportements allégués. Les arguments et preuves avancés par la requérante ayant systématiquement été rejetés, l’enquête ainsi que la décision attaquée n’auraient retenu que les éléments à charge sans même prendre en compte les éléments à décharge.

118    Le SEAE conteste les arguments de la requérante.

119    À cet égard, il convient de rappeler que l’article 41 de la Charte consacre le droit à une bonne administration, lequel impose à l’administration d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce dont elle est saisie et de réunir tous les éléments de fait et de droit nécessaires à l’exercice de son pouvoir d’appréciation ainsi que d’assurer le bon déroulement et l’efficacité des procédures qu’elle met en œuvre (voir arrêt du 26 septembre 2014, B&S Europe/Commission, T‑222/13, non publié, EU:T:2014:837, point 39 et jurisprudence citée). Ce droit à une bonne administration est repris à l’article 15, paragraphe 1, des DGE 2019, qui prévoit que « les enquêtes administratives sont conduites de manière indépendante, impartiale et exhaustive, dans le respect des principes de légalité, de proportionnalité et de confidentialité ».

120    En l’espèce, il convient d’observer que le SEAE a fait preuve d’indulgence dans la conduite de la procédure, en accordant systématiquement à la requérante le report des auditions auxquelles elle était invitée. Par ailleurs, le SEAE lui a fourni l’ensemble des documents afin de lui permettre de préparer utilement sa défense. De surcroît, toutes les étapes de la procédure disciplinaire ont été respectées et la requérante a pu, à chaque étape, présenter ses observations et être entendue. En outre, ainsi que l’indique le SEAE, la requérante ne démontre pas concrètement en quoi l’enquête n’aurait pas été menée de manière impartiale, autonome et approfondie.

121    Par conséquent, la requérante n’apportant aucune preuve susceptible de démontrer une absence d’impartialité, le grief qui s’y rapporte ne saurait prospérer.

122    Partant, il convient de rejeter le huitième grief ainsi que le deuxième moyen dans son ensemble.

–       Sur le premier moyen, tiré de l’absence de matérialité des faits reprochés, de la violation de l’obligation de motivation et du principe ne bis in idem

123    Dans le cadre du premier moyen, la requérante fait valoir, premièrement, que la matérialité des faits reprochés n’a pas été établie et que, partant, la qualification juridique desdits faits est incorrecte. Deuxièmement, la décision attaquée ne serait pas dûment motivée et elle aurait violé les droits de la défense. Troisièmement, le principe ne bis in idem aurait été violé.

9)      Sur l’absence de matérialité et la qualification juridique incorrecte des faits reprochés

124    Il ressort de la décision attaquée que la sanction de révocation sans réduction des droits à pension a été imposée pour six comportements de la requérante, lesquels sont liés à un refus de travailler, d’une part, et à des agissements contraires aux obligations statutaires, d’autre part.

125    Plus particulièrement, l’AIPN est parvenue à la conclusion que la requérante avait refusé de travailler après avoir relevé quatre comportements spécifiques. Ainsi, la requérante aurait, lors de son affectation à [confidentiel], été absente, de façon injustifiée, du 13 juillet 2015 au 7 septembre 2015, ce qui a été qualifié de violation de l’article 55, paragraphe 1, et de l’article 60, premier alinéa, du statut. La requérante aurait également, lors de son affectation à [confidentiel], été absente, de façon injustifiée, du 1er janvier au 14 juillet 2017, ce qui a été qualifié de violation de l’article 21, premier alinéa, de l’article 55, paragraphe 1, et de l’article 60, premier alinéa, du statut. De même, lors de son affectation aux [confidentiel], la requérante aurait refusé, du 16 novembre 2016 à mars 2017 et du 1er mars au 8 avril 2019, d’effectuer des tâches qui lui avaient été attribuées, ce qui a été qualifié de violation de l’article 21, premier alinéa, et de l’article 55, paragraphe 1, du statut.

126    Quant aux agissements contraires aux obligations statutaires, le SEAE a retenu, dans la décision attaquée, deux comportements spécifiques. Premièrement, contrairement aux instructions données par sa hiérarchie de ne plus avoir d’activités liées aux dossiers [confidentiel] et alors que la requérante n’était plus affectée à [confidentiel], elle aurait participé au séminaire [confidentiel], ce qui a été qualifié de violation de l’article 21, premier alinéa, du statut. Deuxièmement, la requérante aurait transmis, sans autorisation, un courriel à l’adresse d’une personne n’appartenant pas au SEAE comportant un compte rendu qui était à l’attention du [confidentiel] du SEAE, ce qui a été qualifié de violation de l’article 17, paragraphe 1, du statut.

127    À cet égard, il convient de rappeler que la légalité d’une sanction disciplinaire présuppose que la réalité des faits reprochés à l’intéressé soit établie (voir arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 179 et jurisprudence citée).

128    Dans ces conditions, l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte exige que le juge de l’Union exerce un contrôle entier sur la matérialité des faits. À cet égard, il doit vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence. Ainsi, même les appréciations complexes ou délicates auxquelles l’administration procède doivent être étayées par des preuves solides. Il incombe, dès lors, au juge de procéder, même dans ce contexte, à un examen approfondi des éléments de preuve (voir arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 180 et jurisprudence citée).

129    C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner, pour chacun des six comportements susmentionnés, en premier lieu, si l’exactitude matérielle des faits qui sont reprochés à la requérante a été établie conformément au niveau de preuve requis et, en second lieu, si les faits établis sont constitutifs des violations retenues, à savoir des violations de l’article 17, paragraphe 1, de l’article 21, premier alinéa, de l’article 55, paragraphe 1, ou de l’article 60, premier alinéa, du statut.

i)      Sur les absences injustifiées du 13 juillet 2015 au 7 septembre 2015

130    Dans la décision attaquée, il est considéré que, entre le 13 juillet et le 7 septembre 2015, la requérante était absente sans justification pour un total de 13,8 jours, alors qu’elle était affectée au sein de [confidentiel].

131    À cet égard, il ressort du dossier que, initialement, le SEAE avait constaté que la requérante était absente sans justification lors de ladite période pour un total de 38,2 jours et, sur cette base, ce dernier avait effectué une retenue de salaire correspondante. Après contestation par la requérante, qui estimait que son absence pendant une large partie de la période concernée était justifiée par de graves dysfonctionnements dans la gestion des ressources humaines au sein du SEAE, et à la suite d’échanges entre la requérante et l’administration, le SEAE a décidé de limiter la déduction de ses congés annuels à 13,8 jours.

132    Cette absence irrégulière pendant 13,8 jours n’étant pas contestée autrement par la requérante, il convient d’en confirmer l’exactitude matérielle.

133    S’agissant de la qualification juridique desdits faits, il convient de constater que, dans la décision attaquée, l’AIPN a considéré que les absences de la requérante pendant la période du 13 juillet au 7 septembre 2015 étaient constitutives d’un manquement aux obligations statutaires prévues par l’article 55, paragraphe 1, et l’article 60, premier alinéa, du statut.

134    Or, force est de constater que, lorsqu’elle était absente des installations du SEAE sans y avoir été autorisée, la requérante manquait à son obligation statutaire au titre de l’article 55, paragraphe 1, du statut, selon lequel les fonctionnaires en activité sont à tout moment à la disposition de leur institution.

135    En outre, puisqu’elle était physiquement absente de son lieu de travail sans y avoir préalablement été autorisée par ses supérieurs, les absences irrégulières de la requérante contrevenaient à l’article 60 du statut, qui prévoit que, sauf en cas de maladie ou d’accident, le fonctionnaire ne peut s’absenter sans y avoir été préalablement autorisé par son supérieur hiérarchique.

136    Il en résulte que l’AIPN a pu conclure à bon droit que, en étant absente sans justification lors de son affectation à [confidentiel] pour un total de 13,8 jours, la requérante avait violé l’article 55, paragraphe 1, et l’article 60, premier alinéa, du statut.

ii)    Sur les absences irrégulières du 1er janvier au 14 juillet 2017 

137    Dans la décision attaquée, il est considéré que la requérante était absente sans justification pour un total de 71,5 jours entre le 1er janvier et le 14 juillet 2017. Le rapport du conseil de discipline et l’avis du conseil de discipline indiquent à cet égard que, durant cette période, la requérante était régulièrement soit absente toute la journée de son lieu de travail, soit présente dans le bâtiment durant quelques heures, à des horaires ne correspondant pas aux horaires normaux de travail.

138    La requérante conteste que lesdites absences puissent être retenues dans la décision attaquée. D’une part, elle fait valoir que celles-ci ont été déclarées « définitivement inexistantes » par l’arrêt du 3 mars 2022, WV/SEAE (C‑162/20 P, EU:C:2022:153), dans lequel la Cour aurait annulé la décision du 27 novembre 2017 comportant une retenue sur salaire à concurrence de 71,5 jours calendaires. D’autre part, la requérante soutient que les extraits de pointage confirment que, aux jours concernés, elle était présente dans les installations du SEAE.

139    À cet égard, il convient de constater qu’il ressort du dossier que, ainsi qu’il n’est pas contesté par les parties, les 71,5 jours mentionnés dans la décision attaquée font suite à la décision du 27 novembre 2017, qui a mené à une retenue sur salaire en raison d’absences non autorisées (voir point 21 ci-dessus). Le 3 janvier 2018, la requérante a introduit une réclamation contre la décision du 27 novembre 2017, que le SEAE a rejetée par décision du 2 mai 2018.

140    Dans cette décision du 2 mai 2018, le SEAE a répondu à l’affirmation de la requérante, soulevée dans sa réclamation, selon laquelle elle était présente dans les installations du SEAE lors des jours concernés. Or, au lieu d’étayer les absences constatées en présentant des éléments de fait et des preuves, le SEAE a soulevé des arguments de nature juridique visant à justifier la retenue sur salaire envisagée.

141    Plus précisément, le SEAE a considéré qu’un fonctionnaire était présent au sein de son service lorsqu’il remplissait les deux conditions cumulatives découlant de l’article 21, premier alinéa, et de l’article 55 du statut, à savoir assister sa hiérarchie en exécutant les tâches qui lui étaient confiées et être à tout moment à la disposition de l’institution. À cet égard, le SEAE a estimé qu’un fonctionnaire qui a déclaré son intention de ne pas assister sa hiérarchie et de ne pas exécuter les tâches qui lui étaient confiées ne réunissait pas les conditions de présence effective au sein du service et se trouvait en situation d’absence injustifiée. Le SEAE a déduit d’un prétendu manquement aux obligations requises par l’article 21, premier alinéa, et l’article 55 du statut que la requérante se trouvait dans une situation d’absence irrégulière au sens de l’article 60 du statut.

142    Le 2 août 2018, la requérante a introduit un recours devant le Tribunal visant notamment à l’annulation des décisions des 27 novembre 2017 et 2 mai 2018.

143    Dans son ordonnance du 29 janvier 2020, WV/SEAE (T‑471/18, non publiée, EU:T:2020:26), le Tribunal a rejeté ledit recours, en confirmant, en substance, la position du SEAE selon laquelle le refus par la requérante d’assister sa hiérarchie et d’exécuter les tâches qui lui étaient confiées suffisait pour justifier la retenue sur salaire au titre de l’article 60 du statut.

144    Dans son arrêt du 3 mars 2022, WV/SEAE (C‑162/20 P, EU:C:2022:153, points 108 à 110), la Cour a annulé l’ordonnance du 29 janvier 2020, WV/SEAE (T‑471/18, non publiée, EU:T:2020:26), en décidant, en substance, qu’une retenue sur salaire au titre de l’article 60 du statut ne pouvait être fondée que sur une absence physique du fonctionnaire concerné de son lieu de travail, sans toutefois se prononcer sur l’absence physique de la requérante fondant, en l’espèce, la retenue à concurrence de 71,5 jours en raison d’absences irrégulières.

145    Ainsi, il y a lieu d’examiner comment ces absences ont été établies et calculées par le SEAE.

146    À cet égard, il convient de constater que, conformément à l’article 55, paragraphe 2, du statut, à la décision C(2014) 2502 de la Commission, du 15 avril 2014, relative au temps de travail, et à la décision Ares(2014) 2156025, du 30 juin 2014, portant instruction du directeur général administratif (chief operating officer) sur le temps de travail au SEAE, le nombre d’heures de travail est de 40 heures par semaine, réparties sur cinq jours ouvrables. Le temps de travail standard est de huit heures par jour ouvrable. Les horaires de travail des fonctionnaires n’étant pas soumis au régime de l’horaire flexible sont de 8 h 30 à 12 h 30 et de 13 h 30 à 17 h 30. Il est constant que la requérante ne bénéficiait pas du régime de l’horaire flexible, de sorte qu’elle était soumise auxdites heures normales de présence, à savoir de 8 h 30 à 12 h 30 et de 13 h 30 à 17 h 30.

147    Le respect de ces horaires de travail par les fonctionnaires et agents, telle la requérante, relève du lien de confiance entre ceux-ci et l’institution concernée. Il appartient, le cas échéant, au supérieur hiérarchique direct de ces derniers de contrôler leur présence.

148    Ainsi, comme le SEAE l’a expliqué sans être contesté à cet égard par la requérante, les absences irrégulières de cette dernière ont été enregistrées dans le système Sysper sur la base de contrôles effectués par son supérieur hiérarchique quant à sa présence physique dans les installations du SEAE.

149    Au vu de ce qui précède, et contrairement à ce qu’allègue la requérante, la circonstance que la Cour a statué qu’il n’était pas permis d’effectuer une retenue sur salaire, au titre de l’article 60 du statut, en raison d’un manquement aux obligations statutaires prévues à l’article 21, premier alinéa, et à l’article 55, paragraphe 1, du statut n’invalide pas la référence faite dans la décision attaquée aux absences de la requérante constatées pendant la période allant du 1er janvier au 14 juillet 2017. En effet, ces jours portent sur des absences physiques de la requérante des installations du SEAE constatées par le supérieur hiérarchique de celle-ci.

150    Ensuite, il convient de vérifier, sur la base des extraits de pointage, l’exactitude matérielle de cette constatation factuelle, qui est contestée par la requérante.

151    Ainsi, s’agissant des jours indiqués dans la décision du 27 novembre 2017 lors desquels la requérante aurait été absente sans justification, il ressort des extraits de pointage qu’elle était en effet en grande partie absente des installations du SEAE.

152    Plus précisément, quant à la période du 1er janvier au 7 février 2017 mentionnée dans la décision du 27 novembre 2017, les extraits de pointage démontrent que la requérante n’était aucunement présente certains jours et que, d’autres jours, elle entrait et quittait les installations du SEAE à sa guise, souvent à des heures inhabituelles, et ne restait pas longtemps au bureau.

153    Par ailleurs, les extraits de pointage confirment que la requérante était absente pendant tous les autres jours mentionnés dans la décision du 27 novembre 2017, à l’exception du 27 mars 2017, où elle est arrivée au bureau à 17 h 09 pour repartir à 18 h 24, du 28 mars 2017, où elle est arrivée à 12 h 34 pour repartir à 16 h 06, du 24 avril 2017, où elle est entrée à 10 h 16, puis sortie à 13 heures pour revenir seulement à 15 heures et repartir à 18 h 55 et du 27 avril 2017, où elle est entrée à 10 h 22, puis sortie à 14 h 47 pour revenir à 15 h 24 et repartir à 22 h 13. Ces jours-là, sauf exception, la requérante n’était présente dans les installations du SEAE que quelques heures et elle n’a aucunement respecté ses horaires de travail.

154    En conclusion, les absences auxquelles il est fait référence dans la décision attaquée sont dans les grandes lignes confirmées par les extraits de pointage.

155    Certes, il y a un certain décalage entre les absences constatées et les extraits de pointage, mais celui-ci s’explique par le régime d’horaire de travail auquel la requérante était soumise. En effet, la présence au travail d’un fonctionnaire soumis aux horaires normaux, tel que la requérante, est vérifiée par le supérieur hiérarchique (voir point 148 ci-dessus). La nature d’un tel contrôle emporte le risque de certaines imprécisions, notamment lorsque le fonctionnaire concerné n’est présent qu’à des horaires inhabituels. En outre, il ressort du dossier que, ainsi que la requérante l’a confirmé lors de l’audience, elle s’est parfois installée dans un bureau qui ne lui était pas attribué et qui se trouvait à un étage supérieur à celui où se trouvait la division à laquelle elle était assignée, ce qui rendait le contrôle de ses présences d’autant plus difficile.

156    Enfin, il convient de constater qu’il ressort des extraits de pointage qu’il y a eu de multiples jours pendant la période allant du 1er janvier au 14 juillet 2017 qui ne sont pas mentionnés dans la décision du 27 novembre 2017, lors desquels la requérante n’est aucunement entrée dans les installations du SEAE ou s’y est rendue seulement quelques heures.

157    Au vu de ce qui précède, il convient de confirmer l’exactitude matérielle des faits allégués et de conclure que, dans le contexte de sanction disciplinaire, c’est sans commettre d’erreur qu’il a été considéré que la requérante avait été absente sans justification lors de la période allant du 1er janvier au 14 juillet 2017 pendant (au moins) 71,5 jours.

158    S’agissant de la qualification juridique des faits reprochés, retenue dans la décision attaquée, l’AIPN a considéré que lesdites absences étaient constitutives d’un manquement aux obligations statutaires prévues par l’article 21, premier alinéa, l’article 55, paragraphe 1, et l’article 60, premier alinéa, du statut.

159    Or, dans la mesure où il ressort de ce qui précède qu’il s’agit d’absences physiques, force est de constater que, lorsqu’elle était physiquement absente des installations du SEAE, sans y avoir été autorisée, la requérante a méconnu ses obligations statutaires d’assister ses supérieurs et d’effectuer les tâches qui lui étaient confiées, telles que prévues à l’article 21, premier alinéa, du statut, ainsi qu’à celle d’être à la disposition de l’institution, telle que prévue à l’article 55, paragraphe 1, du statut.

160    En outre, les absences de la requérante étaient constitutives d’un manquement à l’article 60 du statut, qui prévoit que, sauf en cas de maladie ou d’accident, le fonctionnaire ne peut s’absenter sans y avoir été préalablement autorisé par son supérieur hiérarchique.

161    Au vu de ce qui précède, il convient de constater que c’est sans commettre d’erreur de droit que l’AIPN a conclu que, en étant absente sans justification durant la période allant du 1er janvier au 14 juillet 2017, la requérante avait violé l’article 21, premier alinéa, l’article 55, paragraphe 1, et l’article 60, premier alinéa, du statut.

iii) Sur le refus d’effectuer des tâches attribuées

162    Dans la décision attaquée, il est considéré que, à partir du 16 novembre 2016, et ce jusqu’au mois de mars 2017, quand la requérante était affectée au sein de [confidentiel], elle a systématiquement et explicitement refusé toute tâche, en dépit de la sollicitude de sa hiérarchie pour l’intégrer dans [confidentiel] et pour lui attribuer des tâches correspondant à son expérience passée.

163    En outre, dans la décision attaquée, l’AIPN affirme que, entre le 1er mars et le 8 avril 2019, date de l’envoi de la note sur les faits à la requérante, cette dernière a refusé d’effectuer ses nouvelles tâches au sein de [confidentiel] qu’elle venait d’intégrer à la suite d’une réorganisation des services du SEAE, à l’exception d’une tâche liée à [confidentiel], qui ne représentait qu’environ 25 % du travail attendu d’un fonctionnaire de son grade et de son expérience.

164    À cet égard, il convient de constater, s’agissant de la période allant du 16 novembre 2016 à mars 2017, qu’il ressort du dossier, et plus particulièrement du rapport de notation de la requérante pour l’année 2016, que cette dernière a indiqué qu’elle n’accepterait pas de travailler au sein de [confidentiel] et qu’elle avait comme seule intention de se concentrer sur le règlement des problèmes administratifs liés à son poste au sein de [confidentiel]. Dans les commentaires audit rapport, la requérante a explicitement indiqué que, pendant la période qui a suivi son transfert obligatoire à [confidentiel], elle avait dû se concentrer sur les aspects administratifs de sa nouvelle situation, à savoir, premièrement, se débarrasser de ses affaires de plus de 15 ans de service, en raison du transfert non désiré dans un espace ouvert et non privé, deuxièmement, expliquer à ses divers contacts un changement soudain et non désiré, troisièmement, rechercher une solution équitable à la situation aggravée par un transfert non désiré et, quatrièmement, rechercher une carrière alternative à l’extérieur du SEAE, en utilisant ses congés annuels.

165    Dans le rapport de notation de la requérante pour l’année 2017, il est affirmé qu’elle avait indiqué à plusieurs reprises ne pas vouloir rejoindre [confidentiel] et préférer se concentrer sur les problèmes administratifs et juridiques liés à son poste antérieur. Le rapport mentionne que ce n’est qu’après quelques mois que la requérante a commencé à effectuer certaines tâches.

166    Cela ressort également du courriel de la requérante du 11 avril 2017 à son supérieur hiérarchique, dans lequel elle admet qu’elle ne se trouve pas nécessairement toute la journée derrière son bureau, dès lors qu’elle tente de résoudre la situation dans laquelle elle a été mise à la suite de l’exclusion de [confidentiel] et du transfert à [confidentiel].

167    Quant à la période allant du 1er mars au 8 avril 2019, il convient de constater qu’il ressort d’un courriel du 4 avril 2019 du supérieur hiérarchique de la requérante à un membre de l’IDOC que, durant le premier trimestre de l’année 2019, tout le personnel de [confidentiel] avait été transféré dans une nouvelle [confidentiel], et que la requérante n’a participé à aucune réunion, ni répondu aux projets d’organigramme qui indiquaient les rôles envisagés pour les différents membres du personnel de ladite [confidentiel], y compris la requérante elle-même. Il est également indiqué dans ledit courriel que, lors d’un dialogue d’évaluation entre la requérante et son supérieur hiérarchique, celle-ci a exprimé son manque d’intérêt à discuter de son futur au sein de cette nouvelle [confidentiel], car elle avait prévu de partir en détachement aux Nations unies. En outre, il est indiqué qu’elle a refusé de discuter des objectifs pour l’année 2019, car elle considérait son expérience dans [confidentiel] comme étant achevée. Enfin, dans ledit courriel, le supérieur hiérarchique a également affirmé que, depuis quelques mois, la requérante avait indiqué ne plus compter suivre le dossier concernant [confidentiel].

168    Ces allégations concernant l’attitude de la requérante se trouvent confirmées par des courriels de cette dernière, dans lesquels, d’une part, elle indique explicitement ne pas être d’accord avec son transfert, dans l’intérêt du service, à [confidentiel], ni avec la description de son poste telle que prévue dans ledit organigramme. D’autre part, en faisant référence à un éventuel détachement, elle demande à son supérieur hiérarchique de ne pas envoyer l’organigramme au directeur jusqu’à ce qu’elle obtienne des éclaircissements sur ce sujet.

169    Enfin, dans le rapport de notation pour l’année 2019, il est indiqué qu’il n’était pas possible de noter la requérante dès lors qu’elle avait refusé d’effectuer toute tâche qui était liée à son poste. En outre, il y est confirmé qu’elle n’a participé à aucune des réunions auxquelles elle avait été invitée.

170    Les constats effectués aux points 164 à 169 ci-dessus n’étant, au demeurant, pas contestés par la requérante, il convient de conclure que l’AIPN a démontré à suffisance de droit que la requérante avait refusé d’effectuer les tâches qui lui étaient confiées lors des périodes allant du 16 novembre 2016 à mars 2017 et du 1er mars au 8 avril 2019. Il convient donc de confirmer l’exactitude matérielle des faits reprochés.

171    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

172    En effet, la requérante fait valoir que les situations décrites dans la décision attaquée s’inscrivent dans un contexte plus général, relatif à son exclusion du [confidentiel] et de [confidentiel] et à la gestion des différents transferts aux [confidentiel], dont elle aurait fait l’objet contre son gré. En outre, lesdites exclusions auraient été fondées sur de fausses rumeurs largement répandues au sein du SEAE, en ce qui concerne sa possible appartenance aux services [confidentiel] ainsi que la prétendue transmission de sa part d’informations confidentielles aux autorités [confidentiel], puis aux autorités [confidentiel]. La requérante fait ainsi valoir qu’elle a été « plongée […] dans une situation […] d’incapacité » d’exercer ses fonctions et qu’elle a été victime d’agissements et de comportements constitutifs d’un faisceau de faits, d’indices et de preuves d’un harcèlement avéré, en violation de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut, ainsi que de mesures intimidantes, constitutives de violences psychologiques clairement identifiées, interdites par l’article 19 de la directive 2019/1937.

173    Or, à supposer même que l’exactitude factuelle des allégations de la requérante soit établie, celles-ci ne sauraient remettre en cause le constat que la requérante a refusé d’effectuer les tâches qui lui étaient confiées. Au demeurant, il convient de constater que la requérante ne conteste pas avoir manifesté son refus d’effectuer les tâches en cause, mais cherche, par les allégations susmentionnées, à justifier ledit refus. Or, une violation du statut a, en l’espèce, eu lieu, indépendamment des motifs pour lesquels la requérante a agi comme elle l’a fait.

174    De même, la requérante réitère qu’il lui a semblé légitime de ne pas effectuer de tâche tant qu’elle n’avait pas reçu d’explications sur ce qu’elle considérait comme étant une exclusion illégale de [confidentiel].

175    Cette position ne saurait toutefois être acceptée, puisqu’un fonctionnaire ne saurait subordonner le respect de ses obligations statutaires à des conditions qu’il détermine unilatéralement. En outre, ainsi qu’il ressort du point 13 ci-dessus, le 19 avril 2017, la requérante a bien reçu des explications relatives à son exclusion de [confidentiel].

176    S’agissant de la qualification juridique des faits reprochés, il convient de constater que, dans la décision attaquée, l’AIPN a considéré que, en refusant d’effectuer les tâches qui lui étaient confiées lors des périodes concernées, la requérante avait enfreint ses obligations statutaires visées par l’article 21, premier alinéa, et l’article 55 du statut.

177    Or, il convient de relever que, dès lors qu’un fonctionnaire refuse de travailler, il manque aux obligations statutaires d’assister ses supérieurs et d’effectuer les tâches qui lui sont confiées, telles que prévues à l’article 21, premier alinéa, du statut, ainsi qu’à celle d’être à la disposition de l’institution, telle que prévue à l’article 55, paragraphe 1, du statut.

178    Contrairement à ce que semble prétendre la requérante, il ne suffit pas, en vue de respecter l’article 55, paragraphe 1, du statut, d’être physiquement présent dans les bureaux, encore faut-il être disponible pour l’institution, ce qui n’est pas le cas lorsqu’un fonctionnaire refuse des tâches qui lui sont confiées, ni, a fortiori, lorsqu’il annonce refuser toute tâche qui lui serait confiée.

179    Au vu de ce qui précède, c’est sans commettre d’erreur de droit que l’AIPN a conclu que, tant pour la période du 16 novembre 2016 à mars 2017 que pour celle comprise entre le 1er mars et le 8 avril 2019, la requérante avait violé l’article 21, premier alinéa, et l’article 55, paragraphe 1, du statut.

iv)    Sur la participation au séminaire [confidentiel]

180    Dans la décision attaquée, l’AIPN affirme que la requérante s’est rendue au séminaire [confidentiel] où elle était présentée comme étant membre de [confidentiel] du SEAE, alors qu’elle n’était plus affectée à ladite [confidentiel] et qu’elle avait reçu, le 6 février 2017, des instructions claires et écrites de la part du directeur général du service « Budget et administration » du SEAE de ne plus intervenir dans les questions relatives à [confidentiel].

181    À cet égard, il ressort du dossier que, le 4 juillet 2017, le séminaire [confidentiel] a eu lieu et que le nom de la requérante figurait sur la liste des participants, avec la précision qu’elle était [confidentiel] auprès de [confidentiel] du SEAE. La requérante ne conteste d’ailleurs pas avoir été présente audit séminaire.

182    En outre, il ressort du dossier que, le 6 février 2017, ledit directeur général a adressé un courriel à la requérante dans lequel il explique avoir été informé du fait qu’elle avait contacté des membres des [confidentiel] afin de les rencontrer, alors qu’elle ne faisait plus partie de [confidentiel] et, par conséquent, n’avait plus de raison de traiter des affaires concernant [confidentiel]. Le directeur général ajoute que, après avoir vérifié que la requérante n’était pas mandatée par la Commission pour prendre lesdits contacts, qu’elle n’était pas en mission et qu’elle était absente sans justification, il lui a ordonné de cesser immédiatement les contacts non autorisés avec des interlocuteurs [confidentiel].

183    Au vu de ce qui précède, il convient de confirmer l’exactitude matérielle des faits allégués et de conclure que c’est sans commettre d’erreur de fait que le SEAE a estimé que la requérante avait participé au séminaire [confidentiel] alors qu’elle n’était plus affectée à [confidentiel] du SEAE, d’une part, et qu’elle avait reçu, en date du 6 février 2017, des instructions de la part du directeur général du service « Budget et administration » du SEAE de cesser immédiatement les contacts non autorisés avec des interlocuteurs [confidentiel], d’autre part.

184    S’agissant de la qualification juridique des faits reprochés, il convient de constater que, dans la décision attaquée, il est indiqué que, par sa participation au séminaire [confidentiel], la requérante a méconnu l’article 21, premier alinéa, du statut, lequel prévoit que le fonctionnaire est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées.

185    À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, l’article 21, premier alinéa, du statut est une manifestation particulière du devoir fondamental de loyauté qui incombe à tout fonctionnaire à l’égard de l’institution dont il relève ainsi que de ses supérieurs. L’observation de ce devoir de loyauté ne s’impose pas seulement dans la réalisation des tâches spécifiques qui sont confiées au fonctionnaire, mais s’étend aussi à toute la sphère des relations existant entre le fonctionnaire et l’institution (voir, en ce sens, arrêt du 26 novembre 1991, Williams/Cour des comptes, T‑146/89, EU:T:1991:61, point 72). En outre, il convient de rappeler que ledit article ne définit pas de façon exhaustive les formes que les obligations d’assistance et de conseil peuvent prendre (arrêt du 15 février 2023, Das Neves/Commission, T‑357/22, non publié, EU:T:2023:72, point 35).

186    L’article 21, premier alinéa, du statut peut être rapproché de l’article 12, dudit statut, en vertu duquel le fonctionnaire doit s’abstenir de tout acte et, en particulier, de toute expression publique d’opinions qui puisse porter atteinte à la dignité de sa fonction (voir, par analogie, arrêt du 15 mai 1997, N/Commission, T‑273/94, EU:T:1997:71, points 126 à 128).

187    Il se dégage de l’ensemble de ces dispositions une obligation de loyauté du fonctionnaire à l’égard de son institution, qui doit le conduire, à plus forte raison s’il a un grade élevé, à faire preuve d’un comportement au-dessus de tout soupçon, afin que les liens de confiance existant entre cette institution et lui-même soient toujours préservés (voir, par analogie, arrêt du 15 mai 1997, N/Commission, T‑273/94, EU:T:1997:71, point 129).

188    En l’occurrence, il convient de constater que, en participant au séminaire [confidentiel] après avoir reçu des instructions de la part de sa hiérarchie de ne plus entrer en contact avec des interlocuteurs [confidentiel], la requérante n’a pas fait preuve d’un comportement au-dessus de tout soupçon requis pour un fonctionnaire de son grade.

189    Par ailleurs, à la suite du courriel du 6 février 2017, la requérante aurait dû adopter une conduite prudente en limitant les contacts avec les interlocuteurs [confidentiel]. La requérante aurait dû comprendre que, dans son courriel, le directeur du SEAE visait potentiellement des personnalités [confidentiel] chargées des relations internationales entre [confidentiel] et l’Union. Il en découle que, eu égard à ce contexte, la requérante pouvait présumer que sa participation au séminaire [confidentiel] comportait un risque qu’elle s’engage à nouveau dans le type de contact qui lui avait été interdit par sa hiérarchie.

190    Dans ces circonstances, la requérante ne pouvait pas participer au séminaire [confidentiel] sans avoir obtenu l’autorisation préalable de sa hiérarchie.

191    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

192    Premièrement, contrairement à ce qu’allègue la requérante, même une participation passive au séminaire [confidentiel] pouvait conduire, au sein ou en marge dudit séminaire, au type de contacts avec des interlocuteurs [confidentiel] tels que visés par son supérieur hiérarchique dans son courriel du 6 février 2017.

193    Deuxièmement, s’agissant de la circonstance, à la supposer avérée, que sa demande de congé spécial pour participer au séminaire [confidentiel] avait d’abord été approuvée, puis rejetée en manipulant le système Sysper, il ressort du dossier que, ayant soumis ladite demande peu avant la tenue dudit séminaire, la requérante n’avait pas obtenu de réponse avant qu’elle s’y soit rendue. En outre, ainsi que le SEAE l’a expliqué lors de l’audience sans avoir été contesté sur ce point par la requérante, l’approbation qu’avait donnée son supérieur hiérarchique après le séminaire avait un caractère provisoire et a été ultérieurement rétirée par l’AIPN, seule autorité compétente pour statuer sur des demandes de congés spéciaux.

194    Troisièmement, contrairement à ce qu’allègue la requérante, un intérêt personnel à l’égard d’un certain sujet ne permet pas à un fonctionnaire d’ignorer des instructions données par sa hiérarchie.

195    Quatrièmement, l’affirmation de la requérante selon laquelle d’autres fonctionnaires qui n’étaient plus chargés des relations avec [confidentiel] continuaient à participer activement à des activités qui y étaient relatives sans qu’ils aient fait l’objet d’un traitement semblable au sien ne saurait remettre en cause le fait qu’elle a participé au séminaire [confidentiel] en dépit des instructions qu’elle avait reçues de sa hiérarchie.En outre, il ressort de la jurisprudence que nul ne saurait invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2019, Italmobiliare e.a./Commission, T‑523/15, non publié, EU:T:2019:499, point 36).

196    Au vu de ce qui précède, il convient de constater que c’est sans commettre d’erreur de droit que le SEAE a conclu que, en participant au séminaire [confidentiel], la requérante avait enfreint l’article 21, premier alinéa, du statut.

v)      Sur l’envoi du courriel à l’adresse d’une personne tierce

197    Dans la décision attaquée, il est considéré que, le 17 octobre 2017, la requérante a envoyé à l’adresse d’une personne n’appartenant pas au SEAE un courriel comportant un compte rendu interne.

198    À cet égard, il convient de relever qu’il ressort du dossier que, le 17 octobre 2017, la requérante a envoyé un courriel à l’adresse [confidentiel] et que, à ce courriel, était joint un document comportant un compte rendu interne relatif à une présentation qui a eu lieu le 21 septembre 2017 et qui était adressé au [confidentiel] du SEAE. Dans le cadre de l’enquête administrative, il est expliqué à cet égard que ce compte rendu, préparé par [confidentiel], était pour l’usage personnel du [confidentiel] et qu’il n’était, en principe, pas diffusé plus largement.

199    La requérante, au demeurant, ne contestant pas ces faits, il y a lieu d’en confirmer l’exactitude matérielle.

200    S’agissant de la qualification juridique des faits reprochés, il convient de constater que, selon l’AIPN, l’envoi dudit courriel constitue un manquement à l’article 17, paragraphe 1, du statut, lequel prévoit que « [tout] fonctionnaire s’abstient de toute divulgation non autorisée d’informations portées à sa connaissance dans l’exercice de ses fonctions, à moins que ces informations n’aient déjà été rendues publiques ou ne soient accessibles au public. »

201    Ainsi, il est établi que, en envoyant à une personne extérieure au SEAE un courriel comportant un compte rendu interne qui était à l’attention du [confidentiel] du SEAE, la requérante a enfreint l’article 17, paragraphe 1, du statut.

202    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

203    En effet, une violation de l’article 17, paragraphe 1, du statut a lieu indépendamment des motifs poursuivis par le fonctionnaire en agissant comme il l’a fait. En d’autres termes, la circonstance, avancée par la requérante, que ledit courriel a été envoyé à une adresse de l’hôtel où elle séjournait à des fins d’impression pour son propre usage est non pertinente.

204    En outre, accepter l’interprétation de la requérante selon laquelle l’envoi dudit courriel ne pourrait être considéré comme étant une divulgation interdite opérée en violation de l’article 17, paragraphe 1, du statut, dès lors qu’il s’agit d’un document qu’elle a établi elle-même, impliquerait, ainsi que l’indique le SEAE, que tout fonctionnaire puisse reproduire par lui-même un document confidentiel ou des informations confidentielles dans un document écrit de sa main pour l’envoyer à des tiers.

205    Enfin, l’argument de la requérante selon lequel il n’y a pas eu de violation d’une quelconque obligation statutaire dès lors que le courriel n’a jamais été transmis, l’adresse courriel du destinataire comportant une erreur typographique, a été soulevé pour la première fois lors de l’audience, sans qu’il peut être regardé comme étant une ampliation d’un moyen ou d’un grief antérieurement énoncé (voir en ce sens, arrêt du 25 janvier 2023, De Capitani/Conseil, T‑163/21, EU:T:2023:15 point 26). Il doit, dès lors, être rejeté comme étant irrecevable.

206    Au vu de ce qui précède, c’est sans commettre d’erreur de droit que le SEAE a conclu que, en envoyant un courriel à l’adresse d’une personne n’appartenant pas au SEAE, la requérante avait enfreint l’article 17, paragraphe 1, du statut.

10)    Sur la violation de l’obligation de motivation et des droits de la défense

207    À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante, l’obligation de motivation prescrite par l’article 296 TFUE, qui a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte, constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celle-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. Les griefs et les arguments visant à contester le bien-fondé d’un acte sont, dès lors, dénués de pertinence dans le cadre d’un moyen tiré du défaut ou de l’insuffisance de motivation (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, ZQ/Commission, T‑647/18, non publié, EU:T:2019:884, points 117 et 120 et jurisprudence citée).

208    La requérante fait valoir, dans le cadre du grief tiré de la violation de l’obligation de motivation, que la motivation de la sanction infligée repose, pour l’essentiel, à tort, sur les absences irrégulières qui lui sont reprochées. Il convient néanmoins de constater que l’argumentation avancée à cet égard par la requérante ne concerne pas une éventuelle violation de l’obligation de motivation, mais la question du bien-fondé de cette dernière.

209    En tout état de cause, il convient de constater que la décision attaquée est suffisamment motivée. En effet, dans ladite décision, l’AIPN, après avoir énuméré les différents documents et agissements de la requérante et du SEAE qu’elle a pris en considération, a donné un aperçu des faits qui ont été pris en compte à charge de la requérante. L’AIPN a, ensuite, analysé, pour chaque fait retenu, son exactitude factuelle ainsi que sa qualification juridique, et, au regard des critères énumérés à l’article 10 de l’annexe IX du statut, a conclu que la sanction appropriée était la révocation sans perte des droits à pension.

210    Il en résulte que la décision attaquée a permis, d’une part, à la requérante de connaître les justifications de la mesure prise à son égard, ce qui ressort d’ailleurs de la multitude d’arguments et des différents moyens qu’elle a soulevés, et, d’autre part, au Tribunal d’exercer son contrôle.

211    Il en résulte que le grief tiré d’une violation de l’obligation de motivation doit être rejeté.

11)    Sur la violation du principe ne bis in idem

212    La requérante fait valoir que, en décidant, par la décision du 27 novembre 2017, d’effectuer une retenue sur salaire et en infligeant par la décision attaquée une sanction disciplinaire pour le même comportement reproché (à savoir des absences irrégulières), le SEAE a violé le principe ne bis in idem.

213    Dans ce contexte, il convient de relever que le principe ne bis in idem se trouve exprimé à l’article 50 de la Charte, selon lequel « [n]ul ne peut être poursuivi ou puni pénalement en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné dans l’Union par un jugement pénal définitif conformément à la loi », à l’article 4, paragraphe 1, du protocole n° 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ainsi qu’à l’article 9, paragraphe 3, de l’annexe IX du statut, relative à la procédure disciplinaire, qui prévoit qu’« [u]ne même faute ne peut donner lieu qu’à une seule sanction disciplinaire ».

214    À cet égard, il convient de constater, d’une part, que l’article 60, premier alinéa, du statut prévoit explicitement que c’est « [s]ans préjudice de l’application éventuelle des dispositions prévues en matière disciplinaire » qu’une absence irrégulière au sens dudit article peut être imputée sur la durée du congé annuel de l’intéressé et, en cas d’épuisement de ce congé, donner lieu à une retenue sur salaire. D’autre part, il a été déjà jugé que la décision du 27 novembre 2017 comportant une retenue sur salaire ne constituait ni une sanction disciplinaire ni une mesure équivalente (voir arrêt du 3 mars 2022, WV/SEAE, C‑162/20 P, EU:C:2022:153, point 104 et jurisprudence citée), contrairement à la mesure infligée par la décision attaquée.

215    Il en résulte que le grief tiré d’une violation du principe ne bis in idem doit être rejeté comme étant non fondé et, partant, le premier moyen dans son intégralité.

–       Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 10 de l’annexe IX du statut, du principe de sécurité juridique, du principe de proportionnalité, du principe de protection de la confiance légitime et d’une erreur manifeste d’appréciation

216    Dans le cadre du troisième moyen, la requérante fait valoir que, en infligeant la sanction de la révocation sans réduction des droits à pension, le SEAE a violé l’article 10 de l’annexe IX du statut et le principe de proportionnalité.

217    Dans ce contexte, il convient de rappeler qu’il résulte de l’article 86, paragraphe 1, du statut que tout manquement d’un fonctionnaire à ses obligations statutaires est susceptible d’entraîner l’application d’une sanction disciplinaire à son égard. Selon l’article 10 de l’annexe IX du statut, « [l]a sanction disciplinaire infligée est proportionnelle à la gravité de la faute commise ».

218    À cet égard, il convient tout d’abord de relever que, en matière disciplinaire, le statut ne prévoit pas de rapport fixe entre les sanctions qui s’y trouvent indiquées et les catégories de manquements commis par les fonctionnaires (voir arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 215 et jurisprudence citée).

219    L’article 10 de l’annexe IX du statut énumère différentes catégories de critères devant être pris en compte par l’AIPN au moment de déterminer la gravité de la faute et de décider de la sanction disciplinaire à infliger, parmi lesquels figurent notamment « la nature de la faute et [l]es circonstances dans lesquelles elle a été commise » (arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 216).

220    Cette disposition exige, de manière explicite, l’existence d’une proportionnalité entre la sanction disciplinaire infligée et la gravité de la faute commise, en conformité avec l’exigence générale de proportionnalité régissant l’action des institutions de l’Union, comme le prévoient l’article 5, paragraphe 4, TUE et le principe général reconnu sur ce point par la jurisprudence (arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 217).

221    La jurisprudence a déduit de ces éléments, au titre de la proportionnalité, que la détermination de la sanction devait être fondée sur une évaluation globale, à effectuer par l’AIPN, de tous les faits concrets et de toutes les circonstances propres à chaque cas d’espèce (voir arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 218 et jurisprudence citée).

222    Ainsi, l’AIPN doit établir, dans la décision infligeant la sanction, les raisons l’ayant amenée à imposer, au regard des faits et des circonstances de l’affaire, une sanction plutôt qu’une autre (arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 219).

223    De son côté, lorsqu’il est saisi de ces questions, le juge de l’Union vérifie notamment si les faits et les circonstances particulières de l’affaire relèvent des notions légales de circonstances aggravantes ou atténuantes (voir arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 221 et jurisprudence citée).

224    Dans la même mesure, il doit vérifier si la pondération des circonstances a été effectuée par l’AIPN d’une façon proportionnée, que ces circonstances soient aggravantes ou atténuantes (voir arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 222 et jurisprudence citée).

225    En l’espèce, après avoir considéré, « au regard de tous les éléments du dossier, que les actes d’insubordination systématique de [la requérante] [avaient] entravé et porté préjudice au bon fonctionnement du SEAE, ainsi qu’à la réputation et l’image de l’Union européenne », d’une part, et que « [la requérante] a[vait] délibérément rompu de manière unilatérale et définitive le lien de confiance qui la liait au SEAE [et] a[vait] manqué gravement à son devoir de loyauté envers l’institution et l’Union européenne », d’autre part, l’AIPN a décidé d’infliger, dans la décision attaquée, la sanction de révocation sans réduction des droits à pension à la requérante.

226    L’AIPN a ajouté, dans la décision attaquée, que, pour déterminer la sanction appropriée, elle avait notamment pris en compte plusieurs éléments au regard des critères énumérés à l’article 10 de l’annexe IX du statut, lesquels ont été examinés par elle dans ladite décision.

227    Ainsi, la décision attaquée fournit les éléments permettant d’établir dans quelle mesure la sanction finalement choisie s’imposait au regard de la proportionnalité devant exister entre la sanction disciplinaire infligée et la gravité de la faute commise (voir, en ce sens, arrêt du 1er juin 2022, Cristescu/Commission, T‑754/20, non publié, EU:T:2022:316, point 231).

228    En effet, premièrement, s’agissant du critère relatif à la nature de la faute et aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, il est exposé dans la décision attaquée que la requérante a intentionnellement commis des fautes d’une grande gravité et la sollicitude de sa hiérarchie pour l’intégrer y est relevée.

229    Quant à l’argument de la requérante selon lequel elle n’a pas commis de faute grave, il convient de rappeler que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, l’exactitude matérielle des faits qui lui sont reprochés ainsi que leur qualification juridique comme des manquements aux obligations statutaires ont été établis à suffisance de droit (voir points 130 à 206 ci-dessus). En outre, au vu du nombre et de la nature des obligations statutaires non respectées, la requérante ne saurait prétendre que les fautes commises ne présentent pas une grande gravité.

230    Quant aux circonstances prétendument atténuantes, il convient de constater que la requérante n’a pas produit le moindre élément de preuve susceptible de venir au soutien de ses allégations selon lesquelles le contexte d’harcèlement dans lequel elle aurait dû travailler constituait une circonstance atténuante.

231    En outre, ainsi qu’il est indiqué aux points 64 et 65 ci-dessus, aucun harcèlement ou comportement inapproprié n’a été constaté par son institution et aucune des autorités qu’elle a saisies, telles que le Médiateur européen, le président de la Cour des comptes, le président du Parlement, le CEPD, l’OLAF ou le Haut représentant des Nations unies, n’a constaté une discrimination ou une mauvaise gestion de la part du SEAE.

232    Par ailleurs, dans la mesure où la requérante invoque les rejets par le SEAE de ses demandes de détachement auprès du Parlement ou des Nations unies comme circonstance atténuante, il suffit de constater que la décision quant à ces demandes de détachement relevait de la seule compétence des institutions concernées. Par ailleurs, il ressort du dossier que les différents transferts dont la requérante a fait l’objet ont été organisés, notamment, à la suite des difficultés que celle-ci éprouvait dans les différents postes concernés. Ainsi, la note du 12 avril 2017 adressée à la requérante indique que cette dernière a été transférée, dans l’intérêt du service, de [confidentiel] à [confidentiel] en raison de son incapacité d’établir une coopération constructive avec sa hiérarchie. Par la suite, lorsque le Parlement a rejeté sa demande d’être détachée auprès de cette institution, la requérante a rejeté les propositions du SEAE de rester dans ladite [confidentiel]. Ces circonstances ont justifié qu’elle soit à nouveau transférée, dans l’intérêt du service, à [confidentiel].

233    Deuxièmement, s’agissant du critère relatif à l’importance du préjudice porté à l’intégrité, à la réputation ou aux intérêts des institutions, l’AIPN a exposé dans la décision attaquée que le comportement de la requérante au cours de la période concernée comprise entre l’été 2015 et le 8 avril 2019 « a[vait] été de caractère à nuire au bon fonctionnement du service », au cours des trois affectations distinctes.

234    À cet égard, il convient de constater que la requérante n’a apporté aucun élément pouvant remettre en cause le constat fait par le SEAE que ses absences irrégulières et ses refus de travailler ont nui au bon fonctionnement du service. Au contraire, des déclarations attestent que le travail de la requérante a dû être réparti parmi ses collègues et de multiples échanges de courriels, de notes et de lettres sont intervenus entre la requérante et ses supérieurs hiérarchiques ainsi qu’entre ces derniers afin de répondre aux allégations de la requérante et l’amener à respecter ses obligations statutaires.

235    Troisièmement, s’agissant du critère relatif au degré d’intentionnalité ou de négligence dans la faute commise, il est indiqué dans la décision attaquée que les fautes de la requérante ont été commises de manière délibérée et assumée par cette dernière, sans aucune remise en question, ni changement de comportement.

236    À cet égard, il ressort du dossier, ainsi que l’indique le SEAE dans son mémoire en défense, que, malgré les différents avertissements et échanges de courriels concernant ses absences, la requérante a continué à commettre des fautes sans changer son comportement.

237    S’agissant de l’argument soulevé par la requérante à cet égard, selon lequel la violation de l’article 60 du statut n’a pu être volontaire dès lors que, seulement après qu’elle a agi comme elle l’a fait, l’AIPN a décidé d’assimiler une présence dans les locaux à une absence au sens dudit article, il convient de constater qu’il manque en fait. En effet, comme il est indiqué aux points 130 à 161 ci-dessus, il est établi que la requérante a été physiquement absente des installations du SEAE.

238    De plus, ainsi qu’il est indiqué au point 192 ci-dessus, l’argument de la requérante selon lequel elle n’a participé que passivement au séminaire [confidentiel] n’est pas pertinent, l’intentionnalité de la requérante étant démontrée par le fait qu’elle s’y est présentée, alors qu’elle ne faisait plus partie de [confidentiel] et qu’elle avait reçu des instructions explicites de cesser les contacts non autorisés avec des interlocuteurs [confidentiel].

239    Enfin, ainsi qu’il est indiqué au point 203 ci-dessus, l’argument de la requérante selon lequel elle a envoyé le courriel du 17 octobre 2017 à l’adresse d’une personne n’appartenant pas au SEAE à de seules fins d’impression n’est pas non plus pertinent, la requérante ayant, par négligence, enfreint son devoir de confidentialité en transmettant un document à un tiers, et ce indépendamment des motifs qui l’avaient amenée à agir de cette façon.

240    Quatrièmement, s’agissant du critère relatif aux motifs ayant amené le fonctionnaire à commettre la faute, il est exposé au point 54 de la décision attaquée que, la requérante n’ayant pas loyalement collaboré à la procédure, l’AIPN ne disposait pas d’autres éléments que ceux apportés par la requérante et son avocat, lesquels n’ont toutefois pas emporté sa conviction. En outre, il est indiqué que, la requérante n’ayant à aucun moment considéré que les faits qui lui étaient reprochés étaient constitutifs d’une faute de sa part, elle ne les a pas motivés à cette aune.

241    À cet égard, il suffit, en ce qui concerne les motifs avancés par la requérante, de renvoyer au point 64 ci-dessus, où il est constaté que la requérante n’a pas produit le moindre élément matériel susceptible de venir au soutien de ses allégations liées, notamment, à des faits de harcèlement ou de discrimination.

242    Cinquièmement, s’agissant du critère relatif au grade et à l’ancienneté du fonctionnaire, il est exposé dans la décision attaquée, sans que cela soit contesté par la requérante que, au moment des faits, celle-ci était classée AD 11 et avait une ancienneté de 23 ans au sein des institutions de l’Union.

243    Sixièmement, s’agissant du critère relatif au degré de responsabilité personnelle du fonctionnaire et au niveau de ses fonctions, il est indiqué dans la décision attaquée que la requérante est responsable des actes commis, dès lors que, au moment des faits, elle exerçait les « fonctions d’une administratrice expérimentée au sein de services qui offr[ai]ent des responsabilités élevées et une visibilité certaine à l’intérieur et à l’extérieur de l’institution ».

244    À cet égard, il convient de constater, à l’instar du SEAE, que, travaillant pour le SEAE qui, eu égard à sa mission, est constamment exposé au regard extérieur, la requérante était tenue d’agir avec la plus grande prudence, notamment dans ses contacts externes.

245    Septièmement, s’agissant du critère relatif à la récidive de l’acte ou du comportement fautif et du critère de la conduite du fonctionnaire tout au long de sa carrière, l’AIPN a exposé dans la décision attaquée que les faits ayant conduit à ladite décision s’inscrivaient dans la continuité du comportement de la requérante tout au long de sa carrière au sein des institutions, et ce depuis son entrée en service au sein de la Commission, et que ce comportement était caractérisé par un non-respect des instructions de sa hiérarchie et par de sérieux problèmes à s’intégrer dans son environnement professionnel.

246    À cet égard, il ressort du dossier que, au début de la carrière de la requérante, sa période de stage a été prorogée pour des raisons liées à ses performances, à sa personnalité et à des difficultés à suivre des instructions, ainsi qu’à un incident survenu en 2004. En outre, les comportements reprochés à la requérante ne se limitent pas à un incident isolé, mais se caractérisent par une multitude d’actions pendant une période plus longue (de l’été 2015 à avril 2019) et s’inscrivent donc dans la durée.

247    Quant à l’argument de la requérante relatif à un supposé incident survenu en 2005 lors de son stage de titularisation, lequel serait lié à la dénonciation d’actes de harcèlement sexuel, force est de constater qu’il est sans pertinence, dès lors qu’il ne ressort pas du dossier que ledit incident, à le supposer avéré, a été retenu à sa charge dans la décision attaquée.

248    À la lumière des considérations qui précèdent, notamment au vu du constat de la rupture définitive du lien de confiance entre la requérante et le SEAE et de l’examen des critères énumérés à l’article 10 de l’annexe IX du statut, il convient de constater que l’AIPN a établi le caractère approprié et, par suite, proportionné de la sanction infligée à la requérante. À cet égard, il convient également de relever que la requérante est restée en défaut de démontrer que l’AIPN aurait commis une erreur d’appréciation, de sorte qu’aucun élément ne permet de considérer que la sanction infligée est disproportionnée au regard des comportements reprochés.

249    Il s’ensuit que le troisième moyen doit être rejeté.

250    Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter la demande en annulation dans son intégralité sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de la requérante visant à l’annulation, pour autant que de besoin, de « tous les actes et décisions préparatoires ».

 Sur la demande en indemnité

251    La requérante fait valoir que le préjudice subi ne sera pas suffisamment réparé par l’annulation de la décision attaquée, ni par la nécessaire reconstitution de carrière qui s’en suivrait. Le contexte dans lequel les événements se sont déroulés justifierait qu’elle soit indemnisée de l’intégralité de son dommage matériel et moral.

252    Ainsi, s’agissant du préjudice matériel, la requérante fait valoir que, jusqu’à l’âge de sa retraite, soit durant 14 années, elle est privée de rémunérations, de droits à pensions et de droit à couverture médicale. Elle subirait une perte d’avancement de carrière et des avantages qui y sont relatifs et ferait face à des pertes certaines de chances de carrière au sein des institutions et des organisations internationales et d’opportunités de mutation possibles au sein du service.

253    En outre, selon la requérante, elle a perdu une possibilité de détachement auprès des Nations unies à New York (États-Unis) pendant deux ans et auprès du Parlement, où l’avancement de la carrière est plus rapide. La requérante allègue à cet égard que ces détachements étaient possibles, mais que la mauvaise volonté de l’AIPN a empêché de les réaliser.

254    S’agissant du préjudice moral, la requérante fait valoir qu’elle a enduré des douleurs et des souffrances infligées délibérément par sa hiérarchie, ce qui a entraîné chez elle des troubles d’anxiété et une incertitude ainsi qu’une perte de repères et de confiance en elle. La requérante aurait également subi des menaces d’atteinte à son intégrité physique ainsi que des humiliations répétées, en étant forcée de [confidentiel], en étant confrontée à des exclusions visibles et publiques et en raison de son départ anticipé de l’institution pour cause de révocation. Son préjudice moral aurait encore été aggravé par le refus qui lui a été opposé quant à la communication des pièces réclamées en cours de procédure, la privant ainsi de moyens de défense, les difficultés liées à la crise de la Covid-19 et la volonté de l’AIPN de gérer la procédure dans la précipitation malgré ses demandes légitimes de moratoires et ses indisponibilités, ainsi qu’il aurait été exposé dans le cadre du deuxième moyen.

255    La requérante évalue ce préjudice matériel et moral, dont le lien de causalité avec les actes et comportements fautifs allégués ne fait, selon elle, aucun doute, ex æquo et bono, à 3 500 000 euros.

256    Le SEAE conteste l’argumentation de la requérante.

257    À cet égard, il y a lieu de relever que, selon une jurisprudence constante en matière de fonction publique, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice matériel ou moral doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont, elles-mêmes, été rejetées comme étant irrecevables ou non fondées (arrêt du 24 novembre 2021, CX/Commission, T‑743/16 RENV II, non publié, EU:T:2021:824, point 417).

258    En l’occurrence, la requérante a conclu à ce qu’il soit fait droit à sa demande de réparation pour l’intégralité du dommage qu’elle subit ou subira « du fait de la prise et de la mise en exécution » de la décision attaquée et « de l’ensemble du comportement dénoncé dans lequel cette décision a été prise ».

259    Dans ce cadre, d’une part, elle invoque des préjudices de nature matérielle et morale qui découlent de la décision attaquée et des circonstances de son adoption, à savoir une perte de rémunération, des droits à pension, de la couverture médicale, de l’avancement de carrière et des avantages qui y sont relatifs, des « douleurs et souffrances », des troubles d’anxiété et une incertitude et la perte de confiance et de repères aggravés par le refus de communiquer les pièces demandées et de reporter des auditions. D’autre part, elle invoque un préjudice de nature uniquement morale causé par le comportement de sa hiérarchie et de ses collègues de travail, à savoir des « douleurs et souffrances », des troubles d’anxiété et une incertitude, une perte de confiance et des humiliations répétées liées à [confidentiel].

260    Or, dans la mesure où le préjudice matériel et une partie du préjudice moral dont la requérante se prévaut trouvent leur origine dans la décision attaquée et les circonstances de son adoption, les conclusions indemnitaires relatives à ces préjudices sont étroitement liées aux conclusions en annulation. Étant donné que celles-ci doivent être rejetées comme étant non fondées, il convient de rejeter également les conclusions en indemnité en ce qu’elles portent sur ces préjudices (voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2021, CX/Commission, T‑743/16 RENV II, non publié, EU:T:2021:824, point 418).

261    S’agissant de la partie du préjudice moral qui trouve son origine dans un prétendu comportement de sa hiérarchie et de ses collègues de travail, il convient de constater, ainsi qu’il est indiqué dans le cadre de l’examen du quatrième moyen, que le dossier ne comporte aucun élément à l’appui des allégations de la requérante quant à l’illégalité du comportement reproché à l’institution. Il convient donc de rejeter les prétentions de la requérante à cet égard.

262    Enfin, la requérante est restée en défaut d’apporter les éléments de preuve permettant d’établir l’existence et l’ampleur du préjudice allégué.

263    Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter la demande en indemnité.

 Sur la demande de mesures d’organisation de la procédure

264    Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 4 novembre 2022, la requérante a sollicité le Tribunal, conformément à l’article 88 du règlement de procédure, d’ordonner au SEAE la production d’une multitude de documents, à savoir a) le dossier parallèle prétendument constitué par un membre du SEAE ; b) une note relative à « l’incident de juillet 2016 » tel que rapporté par la hiérarchie de l’époque ; c) un courriel échangé entre des membres du SEAE relatif aux présumés « problèmes de comportement » de la requérante ; d) l’organigramme de [confidentiel] d’août 2015 ; e) la description de poste des experts nationaux détachés assignés à [confidentiel] en août 2015 ; f) le compte rendu d’une réunion qui a eu lieu en 2015 concernant ses présumées absences ; g) la preuve de la réattribution des tâches aux autres collègues ; h) le suivi réservé à la demande d’assistance du 2 février 2016 ; i) les registres et preuves des prétendues absences de la requérante tels que relevés par son supérieur hiérarchique ; j) la preuve de l’attribution de tâches à la requérante, prétendument non accomplies, de décembre 2016 à mars 2017 ; k) la preuve du refus de ces tâches par la requérante et de leur réattribution à d’autres collègues ; l) la suite réservée à la demande d’assistance à l’encontre de son supérieur hiérarchique ; m) les documents relatifs à l’incident survenu lors d’un briefing du bureau de sécurité et faisant l’amalgame entre [confidentiel] et [confidentiel] ; n) les extraits du dossier de « hand-over » entre les commissaires relatifs à cette affaire ; o) la note du 10 juillet 2017 faisant rapport au SEAE de la brève présence de la requérante au séminaire [confidentiel], p) le dossier tel que communiqué aux avocats externes du SEAE dans le cadre des procédures engagées dans les affaires T‑43/19 et C‑171/20 P, T‑388/18 et C‑172/20 P et T‑471/18 et C‑162/20 P, y compris la présente procédure.

265    Tout en se remettant à la sagesse du Tribunal, le SEAE s’oppose à la demande de la requérante en soutenant que la majorité des documents demandés n’existe pas ou est manifestement sans rapport avec l’objet du litige.

266    À cet égard, il convient de constater, à l’instar du SEAE, que la demande de mesures d’organisation de la procédure n’a été présentée qu’après la clôture de la phase écrite de la procédure sans que la requérante expose les raisons pour lesquelles elle n’a pu la présenter antérieurement, comme le requiert l’article 88, paragraphe 2, du règlement de procédure.

267    Or, étant donné que les documents demandés ont un lien avec le rapport d’enquête administrative et ses annexes, lequel a été transmis à la requérante lors de la procédure disciplinaire, donc antérieurement à l’introduction du présent recours, rien ne permet d’établir que la demande de mesures d’organisation de la procédure n’aurait pas pu être présentée déjà au stade de la requête.

268    Ladite demande est donc irrecevable.

269    En tout état de cause, selon la jurisprudence, pour permettre au Tribunal de déterminer s’il est utile au bon déroulement de la procédure d’ordonner la production de certains documents, la partie qui en fait la demande doit non seulement identifier les documents sollicités, mais aussi fournir un minimum d’éléments accréditant l’utilité de ces documents pour les besoins de l’instance (voir arrêt du 13 décembre 2018, Pipiliagkas/Commission, T‑689/16, non publié, EU:T:2018:925, point 83 et jurisprudence citée).

270    Or, il convient de constater, à l’instar du SEAE, que la requérante omet de démontrer l’utilité de la production des documents demandés pour les besoins de la présente procédure. Elle se limite en effet à énoncer, de façon générale, que les documents demandés permettront un examen complet et transparent de la légalité de la décision attaquée et donneront au Tribunal tout l’éclairage qu’il est en droit d’avoir.

271    En outre, ainsi que l’indique à juste titre le SEAE, certains documents et éléments demandés par la requérante, comme la note relative à « l’incident de juillet 2016 », l’organigramme de [confidentiel] d’août 2015, la preuve de la réattribution des tâches aux autres collègues ou la description de poste des experts nationaux détachés assignés à cette [confidentiel] ne présentent aucun intérêt pour la résolution du litige. D’autres, comme les registres et preuves des prétendues absences de la requérante tels que relevés par son supérieur hiérarchique figurent déjà dans le dossier. Enfin, d’autres encore, comme les documents relatifs à l’incident survenu lors d’un briefing du bureau de sécurité et faisant l’amalgame entre [confidentiel] et [confidentiel], reposent sur une mauvaise compréhension des éléments du dossier dans la mesure où l’incident se rapporte à deux événements qui ne concernent pas la requérante.

272    Quant aux documents dont le SEAE indique qu’ils n’existent pas, il convient de constater que la requérante omet de fournir ne serait-ce qu’un commencement de preuve de leur existence. Or, des documents qui n’existent pas ne sauraient être produits.

273    En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que le Tribunal est seul juge de la nécessité éventuelle de compléter les éléments d’information dont il dispose sur les affaires dont il est saisi (voir arrêt du 13 décembre 2018, Pipiliagkas/Commission, T‑689/16, non publié, EU:T:2018:925, point 87 et jurisprudence citée).

274    Or, dans le cas d’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier.

275    Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter la demande de mesures d’organisation de la procédure présentée par la requérante.

276    Il en résulte qu’il convient de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

277    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

278    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le SEAE, conformément aux conclusions de ce dernier.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      WV est condamnée aux dépens.

Porchia

Madise

Verschuur

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 janvier 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : le français.


1 Données confidentielles occultées.