Language of document : ECLI:EU:T:2015:811

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

28 octobre 2015 (*) (1)

« Aides d’État – Vente et location de terrains et d’une unité de production – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et ordonnant sa récupération – Absence de procédure d’appel d’offres – Détermination du prix du marché – Critère de l’investisseur privé – Affectation des échanges entre États membres »

Dans l’affaire T‑253/12,

Hammar Nordic Plugg AB, établie à Trollhättan (Suède), représentée par Mes I. Otken Eriksson et U. Öberg, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. D. Grespan et P.-J. Loewenthal, en qualité d’agents, assistés de Me L. Sandberg-Morch, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2012/293/UE de la Commission, du 8 février 2012, concernant l’aide d’État SA.28809 (C 29/10) (ex NN 42/10 et ex CP 194/09), mise en exécution par la Suède au bénéfice de Hammar Nordic Plugg AB (JO L 150, p. 78),

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 26 mars 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Hammar Nordic Plugg AB, exerce une activité de location de locaux et d’administration de biens immobiliers.

2        Le bien concerné par la mesure en cause (ci-après l’« installation ») est constitué de deux terrains, d’une unité de production, de biens meubles et de droits de propriété intellectuelle, tels que des marques. Il se situe en Suède, sur le territoire de la commune de Vänersborg (ci-après la « commune »), non loin de la frontière norvégienne.

3        Fastighets AB Vänersborg (ci-après « FABV ») est une société immobilière appartenant à la commune.

4        Topp Livsmedel était une entreprise productrice de légumes surgelés, installée sur le territoire de la commune et employant une trentaine de personnes. Elle était détenue par Chips, entreprise productrice de pommes chips faisant partie du groupe international Orkla ASA.

5        Le 13 février 2008, la commune a acheté, par le biais de FABV, l’installation à Chips pour un montant de 17 millions de couronnes suédoises (SEK).

6        Le même jour, FABV a conclu deux conventions avec la requérante. La première était un contrat de bail aux termes duquel FABV lui louait l’ensemble de l’installation. La seconde convention conférait à la requérante une option lui permettant d’acquérir l’installation auprès de FABV au prix fixe de 8 000 000 SEK à tout moment au cours d’une période de deux ans comprise entre le 1er mars 2008 et le 28 février 2010. La requérante a levé l’option et a acheté l’installation le 11 août 2008.

7        Par convention conclue le 1er mars 2008, la requérante a donné en location la plus grande partie de l’installation à des entrepreneurs locaux regroupés sous le nom de Nya Topp, pour un loyer supérieur à celui qu’elle avait convenu avec FABV. Nya Topp a subordonné, par ailleurs, la signature du contrat de bail à la possibilité pour elle d’acheter à l’avenir l’installation, au cas où la requérante en deviendrait propriétaire. L’option d’achat, signée le même jour, conférait à Nya Topp le droit d’acquérir l’installation au prix de 40 000 000 SEK.

8         Le 2 septembre 2008, la requérante a conclu un contrat de vente de l’installation à Nya Topp, au prix convenu.

9        À la suite d’une procédure d’offre ouverte organisée dans le cadre de la procédure d’insolvabilité de Nya Topp, l’installation a été vendue le 2 mai 2011 pour 8 000 000 SEK à Ektornet.

 Procédure administrative

10      Après avoir été saisie d’une plainte, par lettre du 26 mai 2009, portant sur une aide d’État alléguée au bénéfice de la requérante à l’occasion de la vente par la commune d’un bien public, la Commission des Communautés européennes a transmis, le 27 octobre 2009, une version non confidentielle de ladite plainte au Royaume de Suède, lequel a répondu par lettre du 30 novembre 2009.

11      Le 9 mars 2010, la Commission a demandé des informations supplémentaires et le Royaume de Suède lui a répondu par lettre du 20 avril 2010. La Commission a également reçu, le 11 mai 2010, des informations communiquées par Chips.

12      Par lettre du 27 octobre 2010, la Commission a informé le Royaume de Suède de sa décision d’engager la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE. La décision de la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen, invitant les parties intéressées à présenter leurs observations, a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 23 décembre 2010 (JO C 352, p. 22).

13      Le Royaume de Suède a communiqué ses observations à la Commission par lettres des 15 et 17 décembre 2010, de même que la requérante par lettre du 22 janvier 2011.

14      Par lettre du 29 juin 2011, le Royaume de Suède a communiqué de nouvelles informations à la Commission, à la suite d’une demande de cette dernière, et a transmis des observations complémentaires par courriers électroniques du 12 septembre 2011.

15      Le 19 octobre 2011 a eu lieu une réunion entre les services de la Commission et des représentants de la requérante.

16      Le 3 novembre 2011, la requérante a transmis, par courrier électronique, des informations complémentaires à la Commission.

17      Le 8 février 2012, la Commission a adopté la décision 2012/293/UE, concernant l’aide d’État SA.28809 (C 29/10) (ex NN 42/10 et ex CP 194/09), mise à exécution par la Suède au bénéfice de Hammar Nordic Plugg AB (JO L 150, p. 78, ci-après la « décision attaquée »).

 Décision attaquée

18      Aux points 33 à 35 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que la vente de l’installation par FABV à la requérante avait comporté l’utilisation de ressources d’État, qu’elle constituait une mesure sélective et qu’elle menaçait de fausser la concurrence et d’affecter les échanges entre États membres, étant donné que les services immobiliers et liés à l’immobilier faisaient l’objet d’échanges et d’investissements dans l’Union européenne.

19      Au point 38 de la décision attaquée, la Commission a précisé qu’elle avait apprécié la mesure en cause sur le fondement de sa communication concernant les éléments d’aide d’État contenus dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics (JO 1997, C 209, p. 3, ci-après la « communication »).

20      Puis, aux points 39 à 42 de la décision attaquée, la Commission a relevé que, alors que cette communication recommande que, en l’absence de procédure d’offre ouverte et inconditionnelle permettant d’exclure automatiquement la présence d’une aide d’État, une évaluation indépendante soit effectuée par un ou plusieurs experts indépendants préalablement aux négociations précédant la vente, FABV n’a pas eu recours à une telle procédure et n’a pas non plus demandé une telle évaluation.

21      Par ailleurs, aux points 40 et 43 à 49 de la décision attaquée, la Commission a exposé que, au regard des estimations réalisées par Colliers International, organisation commerciale fournissant des services immobiliers, et par Swedbank Kommersiella Fastigheter, filiale du groupe bancaire Swedbank exerçant une activité d’agent immobilier, et des trois estimations effectuées par Price Waterhouse, le montant de 8 000 000 SEK, pour lequel FABV a accepté d’accorder à la requérante une option d’achat de l’installation le 13 février 2008, était nettement inférieur à sa valeur sur le marché, de sorte que la requérante a été avantagée, d’autant que FABV l’avait achetée le même jour 17 000 000 SEK à Chips.

22      Dès lors, au point 50 de la décision attaquée, la Commission a conclu que la mesure en cause constituait une aide d’État, par ailleurs illégale, puisque accordée sans autorisation préalable.

23      De plus, aux points 58 à 61 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que ni la requérante ni les autorités suédoises n’avaient présenté d’arguments visant à démontrer que l’aide serait compatible avec le marché intérieur. Le seul objectif avancé par lesdites autorités était la volonté de maintenir l’activité tout en protégeant l’emploi dans la région.

24      Ainsi, aux points 68 à 70 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que la mesure, en tant qu’aide illégale et incompatible avec le marché intérieur, devait faire l’objet d’une récupération par le Royaume de Suède. La Commission a fixé les éléments d’aide d’État, outre les intérêts, à un montant de 14 500 000 SEK, correspondant à la différence entre le prix de l’installation sur le marché, selon l’estimation que la Commission considère la plus crédible, 21 000 000SEK, et le prix payé par la requérante, 8 000 000 SEK, à savoir 13 000 000 SEK, à laquelle s’ajoute le montant à récupérer lié au contrat de bail, 1 500 000 SEK, ce dernier correspondant à la différence entre le loyer convenu entre FABV et la requérante et celui convenu entre la requérante et Nya Topp.

 Procédure et conclusions des parties

25      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 juin 2012, la requérante a introduit le présent recours.

26      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en tout ou en partie ;

–        condamner la Commission aux dépens.

27      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme dénué de tout fondement ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

28      À l’appui du présent recours, la requérante avance trois moyens. Par le premier moyen, la requérante conteste l’existence d’une aide d’État dans la cession et la location de l’installation par FABV. Par le deuxième moyen, la requérante fait valoir que les mesures d’aide alléguées ne faussent pas la concurrence et n’affectent pas les échanges entre États membres. Par le troisième moyen, la requérante avance que la Commission a méconnu ses obligations d’examen et de motivation, ainsi que les droits de la défense.

 Sur le premier moyen, tiré d’erreurs d’appréciation dans le cadre de la qualification d’aide d’État

29      À titre liminaire, la requérante rappelle que le juge de l’Union doit exercer un entier contrôle en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Dans la présente affaire, aucune des appréciations de la Commission ne porterait sur des domaines économiques complexes ou ne s’inscrirait dans le cadre de la marge d’appréciation dont elle jouit dans les affaires d’aides d’État. Le Tribunal devrait donc exercer un contrôle de pleine juridiction de la décision attaquée.

30       À cet égard, en ce qui concerne l’étendue du contrôle du Tribunal, il convient de rappeler que, au vu de la jurisprudence, si ce contrôle est en principe un contrôle entier en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, la Cour a jugé qu’un tel contrôle juridictionnel était limité lorsque les appréciations portées par la Commission présentaient un caractère technique ou complexe (voir arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, Rec, EU:C:2008:757, point 114, et jurisprudence citée).

31      Le contrôle que les juridictions de l’Union exercent sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission est un contrôle restreint qui se limite nécessairement à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (arrêt du 2 septembre 2010 Commission/Scott, C‑290/07 P, Rec, EU:C:2010:480, point 66).

32      Pour vérifier si la vente d’un terrain par une autorité publique à une personne privée constitue une aide d’État il y a lieu, pour la Commission, d’appliquer le critère de l’investisseur privé dans une économie de marché, afin de vérifier si le prix payé par le présumé bénéficiaire de l’aide correspond au prix qu’un investisseur privé, agissant dans des conditions de concurrence normales, aurait pu fixer. En général, l’usage de ce critère implique de la part de la Commission une appréciation économique complexe (arrêt Commission/Scott, point 31 supra, EU:C:2010:480, point 68).

33      En l’espèce, il n’est pas contesté que la vente de l’installation est caractérisée par l’absence d’une procédure d’offre inconditionnelle. Une telle circonstance peut rendre complexe la tâche de la Commission (voir, en sens, arrêt Commission/Scott, point 31 supra, EU:C:2010:480, point 70).

34      Par ailleurs, il ressort de la décision attaquée que les différentes estimations réalisées, ainsi qu’il est relevé aux points 44 et suivants ci‑après, divergent dans le prix de vente auquel elles sont parvenues, ce qui illustre bien la difficulté de déterminer la valeur de l’installation.

35      Par conséquent, il convient de conclure que c’est à tort que la requérante soutient que les appréciations de la Commission ne portaient pas sur des appréciations économiques complexes. Dès lors, seule une erreur manifeste d’appréciation commise par la Commission serait de nature à entacher d’illégalité la décision attaquée.

36      Le présent moyen de la requérante comporte six branches. Premièrement, elle estime que la Commission n’a pas pris en compte le prix de cession de 8 000 000 SEK dans le cadre de l’appréciation de la valeur de marché de l’installation. Deuxièmement, elle avance que la Commission n’aurait pas dû exclure, dès la procédure préliminaire d’examen, que l’acquisition de l’installation par FABV pourrait contenir un élément d’aide d’État. Troisièmement, la requérante considère que la Commission n’a pas pris en compte le critère de l’investisseur privé en économie de marché. Quatrièmement, la requérante soutient que l’estimation de la valeur de l’installation retenue par la Commission n’est pas fiable. Cinquièmement, la requérante prétend que la vente de l’installation pour un prix de 8 000 000 SEK, dans le cadre de la procédure d’insolvabilité de Nya Topp, constitue une preuve que ce prix correspond à la valeur de marché de l’installation. Sixièmement, la requérante fait valoir que les erreurs d’appréciation de la Commission devraient également entraîner l’annulation de la décision attaquée en ce qui concerne le prétendu avantage généré par le contrat de bail entre elle et Nya Topp.

 Sur l’absence de prise en compte du prix de cession de 8 000 000 SEK

37      La requérante avance qu’il n’est pas compatible avec l’article 107, paragraphe 1, TFUE de ne pas accorder d’importance au prix de cession de 8 000 000 SEK dans le cadre de l’appréciation de la valeur de marché de l’installation, au seul motif que la commune n’a pas procédé avant la cession à une procédure d’offre formelle, transparente et ouverte. En outre, l’installation serait restée sur le marché en vue d’être vendue pendant un certain temps avant le 13 février 2008, mais tous les efforts pour la vendre au prix demandé par Chips seraient restés infructueux. Dès lors, il n’y aurait eu aucune raison de recourir à une « procédure de cession ouverte et transparente » lorsque FABV et la requérante ont convenu de l’option pour cette dernière d’acquérir l’installation au prix de 8 000 000 SEK. En outre la Commission aurait arbitrairement retenu une évaluation erronée et postérieure de la valeur de l’installation en fondant la décision attaquée sur la troisième estimation figurant dans le rapport de Price Waterhouse et en ignorant totalement la deuxième estimation figurant dans ce rapport.

38      Il convient de constater, en ce qui concerne le premier argument de la requérante, selon lequel le prix de cession qu’elle a payé n’aurait pas été pris en compte au motif que la commune n’avait pas procédé à une procédure d’offre formelle, que la Commission n’a pas ignoré le prix de vente de 8 000 000 SEK, mais a considéré, à la lumière des estimations disponibles, ci-après énumérées (voir points 43 et suivants), que ce prix était inférieur à celui du marché.

39      Quant au deuxième argument de la requérante, selon lequel les efforts pour vendre l’installation au prix demandé par Chips sont restés infructueux pendant un certain temps, force est de constater que la requérante ne tire elle-même aucune conclusion de cet argument non étayé.

40      Il convient ensuite de rappeler, en ce qui concerne le troisième argument de la requérante, selon lequel il n’y aurait eu aucune raison de recourir à une procédure d’offre formelle avant la vente, que la Commission est tenue par les encadrements et les communications qu’elle adopte, dans la mesure où ils ne s’écartent pas des normes du traité FUE et où ils sont acceptés par les États membres (arrêt du 16 juillet 2014, Zweckverband Tierkörperbeseitigung/Commission, T‑309/12, EU:T:2014:676, point 212).

41      Dès lors, la Commission pouvait, en l’absence d’une procédure d’offre ouverte et inconditionnelle, s’appuyer sur les estimations qui étaient à sa disposition, conformément au point 2, sous a), de la communication.

42      En ce qui concerne le quatrième argument de la requérante selon lequel la Commission aurait arbitrairement retenu une évaluation erronée en se fondant sur la troisième évaluation du rapport de Price Waterhouse et aurait totalement ignoré la deuxième évaluation figurant dans ce rapport, il convient de constater que la Commission, aux points 43 à 49 de la décision attaquée, a clairement établi les raisons pour lesquelles certaines estimations étaient fiables alors que d’autres ne l’étaient pas.

43      À cet égard, il convient de relever qu’il existe, au total, cinq estimations.

44      Ainsi, une estimation de Colliers International, réalisée à la demande de Chips lors de la mise en vente de l’installation à la fin de 2007 et indiquant un prix de vente de 27 000 000 SEK, a été estimée comme étant réaliste par la Commission pour quatre raisons : l’estimation a été réalisée avant la négociation de la vente ; elle a été commandée par Chips dans le cadre de la vente de l’installation, c’est-à-dire dans un contexte dans lequel le vendeur n’avait raisonnablement pas d’autre intérêt que celui d’obtenir une estimation correcte de la valeur du marché ; l’examen a été fait par un tiers n’ayant de lien de dépendance ni à l’égard du vendeur ni à l’égard de l’acheteur ; Colliers International possède une expérience solide du secteur immobilier.

45      Une autre estimation, réalisée en juin 2008 par Swedbank Kommersiella Fastigheter à la demande d’entrepreneurs locaux, a été considérée par la Commission comme un indicateur possible du prix de l’installation. La valeur de l’installation a été estimée à 30 000 000 SEK, alors même que l’estimation ne portait pas sur la totalité de l’installation.

46      Enfin, le rapport de Price Waterhouse, élaboré à la demande de la requérante, contient trois estimations de la valeur de l’installation. Ainsi, une première estimation, réalisée le 8 février 2008, au moment de la vente de l’installation par Chips à FABV, était d’environ 9 000 000 SEK, alors qu’une deuxième, réalisée au moment où l’installation a été donnée en location par FABV à la requérante, c’est-à-dire le même jour, était d’environ 5 500 000 SEK, et une troisième, réalisée le 1er mars 2008, lorsque la requérante a donnée l’installation en location aux entrepreneurs locaux, était d’environ 21 000 000 SEK. Dans la décision attaquée, la Commission a relevé que ces estimations concluaient ainsi à des résultats nettement différents, alors-même qu’elles avaient été effectuées sur une période très courte.

47      La Commission a indiqué, au point 47 de la décision attaquée, que les deux premières estimations de ce rapport lui paraissaient irréalistes en comparaison des estimations contemporaines concluant respectivement à une valeur de l’installation de 27 000 000 SEK et de 30 000 000 SEK. Ainsi, en ce qui concerne l’estimation aboutissant à un chiffre de 5 500 000 SEK, la décision attaquée expose que Price Waterhouse, qui s’est fondée sur les flux de liquidités que représentaient les loyers payés par la requérante à FABV pour l’installation, reconnaît elle-même que ces loyers sont très peu élevés en comparaison avec le rendement normal d’un site industriel comparable, ce qui apparaît encore plus clairement si ces loyers sont comparés avec les loyers versés à la requérante par les entrepreneurs locaux, c’est-à-dire Nya Topp, quelques jours après la vente, qui étaient environ sept fois plus élevés. En ce qui concerne l’estimation aboutissant à un chiffre de 9 000 000 SEK, la Commission a relevé, dans la décision attaquée, qu’elle reposait sur la prémisse d’un taux de vacance de 100 % durant les deux premières années de propriété, passant à 75 % la troisième année et à 50 % la quatrième, et se stabilisant à 60 % durant le reste de la période couverte par l’estimation, ce taux de vacance présumé ne tenant pas compte du fait que, à la date de la vente, il était notoire que les entrepreneurs locaux étaient disposés à louer l’installation et, partant, que la valeur à apprécier était celle de l’installation donnée en location.

48      La Commission a donc bien pris en compte la deuxième estimation figurant dans le rapport et a expliqué la raison pour laquelle elle ne l’avait pas retenue. C’est donc à tort que la requérante soutient que la Commission a ignoré celle-ci.

49      La Commission a également indiqué, au point 48 de la décision attaquée, que la troisième estimation de ce rapport, aboutissant à une valeur de l’installation d’environ 21 000 000 SEK à la date de la vente de celle-ci par la requérante aux entrepreneurs locaux, sans même prendre en compte l’intégralité de la superficie de l’installation, était fondée essentiellement sur la même méthode que celles ayant abouti à des montants de 27 000 000 SEK et de 30 000 000 SEK (voir points 44 et 45 ci-dessus) et reposait principalement sur les conditions prévues dans le contrat de bail entre la requérante et les entrepreneurs locaux, c’est-à-dire celles applicables à la date de la vente. La Commission a ajouté, dans la décision attaquée, que lesdites clauses contractuelles étaient probablement conformes au marché, étant donné, en particulier, qu’elles avaient été convenues entre deux opérateurs privés sur le marché qui n’avaient sans doute tenu compte que de considérations rationnelles sur le plan économique. La Commission en a conclu que cette estimation était la plus plausible.

50      Ainsi, la Commission a conclu, au point 49 de la décision attaquée, que, au regard des estimations réalisées par Colliers International et Swedbank Kommersiella Fastigheter et au regard de la troisième estimation contenue dans le rapport de Price Waterhouse, le prix de 8 000 000 SEK auquel FABV avait vendu l’installation à la requérante était nettement inférieur à la valeur de celle-ci sur le marché.

51      La Commission a donc justifié, dans la décision attaquée, la raison pour laquelle elle avait considéré comme fiable tant les estimations réalisées par Colliers International et Swedbank Kommersiella Fastigheter que la troisième estimation contenue dans le rapport de Price Waterhouse. C’est donc à tort que la requérante soutient que la Commission a arbitrairement retenu une évaluation erronée en fondant la décision attaquée uniquement sur cette dernière estimation.

52      En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel la Commission, en se basant sur la troisième estimation du rapport de Price Waterhouse, se serait fondée sur une estimation postérieure à la vente de l’installation, il convient de relever, d’une part, ainsi qu’il vient d’être constaté, que la Commission ne s’est pas fondée sur cette seule estimation et, d’autre part, que, si cette estimation est effectivement postérieure, puisqu’elle a été réalisée lors de la vente par la requérante de l’installation aux entrepreneurs locaux, elle a été effectuée le 1er mars 2008, soit seulement quelques jours après que l’option d’acquisition de l’installation a été conféré par FABV à la requérante, le 13 février 2008.

53      De plus, cette troisième estimation du rapport de Price Waterhouse a abouti à une valeur proche des estimations réalisées par Colliers International et Swedbank Kommersiella Fastigheter. Or, la première de ces estimations a été réalisée à la fin de 2007 et la deuxième en juin 2008, ce qui démontre que le prix de l’installation n’était pas sujet à des variations sensibles sur une courte période.

54      Enfin, force est de constater que la requérante n’a apporté aucun autre élément ou argument permettant de remettre en cause les appréciations de la Commission.

55      Partant, il convient de rejeter la première branche du premier moyen dans son ensemble comme étant non fondée.

 Sur l’absence d’examen de l’existence d’une aide d’État lors de l’acquisition de l’installation par FABV pour 17 000 000 SEK

56      La requérante avance que la Commission n’aurait pas dû exclure, dès la procédure préliminaire d’examen, que l’acquisition de l’installation par FABV contienne un élément d’aide d’État, au motif que le prix payé par FABV ne paraissait pas plus élevé que le prix estimé par des experts indépendants.

57      Par ailleurs, la requérante considère que l’estimation de Colliers International ayant conclu à une valeur de vente de 27 000 000 SEK reposait sur des hypothèses qui n’étaient pas réalisées à l’époque, notamment en ce qui concerne le taux de vacance des locaux, et ne pourrait être qualifiée d’évaluation indépendante.

58      En outre, la requérante soutient qu’il était loisible à la Commission de rouvrir la procédure administrative à l’encontre de Chips ou d’en ouvrir une nouvelle sur la base des éléments qu’elle lui a communiqués.

59      Enfin, la requérante expose qu’il ne lui était pas loisible de former un recours contre la décision de la Commission de clore la procédure ouverte à l’encontre de Chips. Un tel recours n’aurait sans doute pas été recevable, car, d’une part, elle n’était pas une concurrente directe de Chips et, d’autre part, à cette époque, elle n’avait qu’un intérêt très hypothétique à contester cette décision, étant donné qu’il n’était pas encore connu que la Commission considérerait que la cession de l’installation à son profit renfermait un élément d’aide d’État.

60      En premier lieu, il convient de relever que, dans le résumé de sa décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen de la vente de l’installation par FABV à la requérante, la Commission a indiqué, en ce qui concerne la vente de ladite installation de Chips à FABV, ce qui suit : 

« Le prix d’achat de l’installation de production acquitté par FABV ne semble pas supérieur à la valeur marchande, ainsi que l’ont indiqué des consultants extérieurs indépendants. On peut dès lors exclure la présence d’un élément d’aide dans cette première opération, qui ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE. »

61      La Commission a ainsi, en ce qui concerne la vente de l’installation de Chips à FABV, pris une décision, conformément à l’article 4, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO L 83, p. 1), dont les termes laissent clairement entendre qu’elle est définitive.

62      Or, si une décision de la Commission déclare qu’une mesure ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE sans ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et si un intéressé vise à faire sauvegarder les droits procéduraux qu’il tire de la même disposition, il doit former devant le Tribunal un recours contre cette décision dans le délai imparti par l’article 263, sixième alinéa, TFUE (ordonnance du 27 novembre 2001, Wöhr/Commission, T‑222/00, Rec, EU:T:2001:274, point 34 ).

63      En l’espèce, force est de constater que la requérante n’a pas formé un tel recours dans ce délai.

64      En deuxième lieu, comme l’indique la Commission, la procédure permettant la révocation d’une décision définitive dans laquelle elle a constaté qu’une mesure ne constituait pas une aide d’État est établie à l’article 9 du règlement n° 659/1999, en vertu duquel la Commission peut révoquer une telle décision si elle a été adoptée sur la base d’informations inexactes d’une importance déterminante.

65      Or, le seul argument de la requérante concernant de prétendues informations inexactes est celui concernant le taux de vacance des locaux pris en compte dans la première estimation. La requérante expose que le mémorandum de vente de l’installation de Chips à FABV repose sur un taux de vacance de 10 % alors que celui-ci était en fait de 100 % en ce qui concerne les locaux vides. La requérante conteste également l’indication de la Commission selon laquelle elle aurait été informée par les autorités locales qu’un locataire aurait été trouvé dès le 13 février 2008.

66      À cet égard, il convient de constater que la requérante n’apporte aucune preuve à l’appui de ces affirmations et n’explique d’ailleurs même pas quel taux de vacance aurait, selon elle, été exact pour l’ensemble de l’installation.

67      Les autres arguments de la requérante ne sont que des affirmations, non démontrées, et qui ne répondent pas aux prescriptions posées par l’article 9 du règlement n° 659/1999.

68      En troisième lieu, il ne peut qu’être constaté que la Commission n’avait pas de raison de douter de l’absence d’aide d’État dans le cadre de la cession de l’installation de Chips à FABV.

69      En effet, ainsi qu’il est indiqué au point 28 de la décision d’ouverture, la Commission s’est fondée sur l’estimation réalisée par Colliers International, seule estimation dont elle disposait à cette époque. Cette estimation a conclu à un montant de 27 000 000 SEK, soit un montant nettement supérieur au prix de 17 000 000 SEK que FABV a payé à Chips.

70      Le cabinet ayant préparé cette estimation est présenté audit point 28 de la décision d’ouverture comme étant un tiers indépendant disposant d’une vaste expérience dans le secteur immobilier de la région concernée. Force est de constater que l’allégation de la requérante selon laquelle cette évaluation n’a pas été réalisée de manière indépendante n’est pas étayée.

71      La Commission indique également audit point 28 de la décision d’ouverture que ladite estimation avait été commanditée par Chips aux fins de la vente de l’installation, soit dans un contexte dans lequel Chips n’avait logiquement pas d’autre intérêt que d’obtenir une évaluation correcte de la valeur marchande de l’installation.

72      En quatrième lieu, il convient encore de relever que certaines des raisons pour lesquelles Chips a accepté un prix moindre que celui déterminé dans ladite estimation sont exposées dans la décision d’ouverture. Ainsi, au point 19 de la décision d’ouverture, trois raisons sont exposées : Chips pouvait ainsi sauver des emplois et donc sa renommée, FABV était d’accord pour acheter en l’état, c’est-à-dire sans garantie de responsabilité pour dégâts environnementaux, et la vente avec FABV pouvait être conclue rapidement. Il est encore rappelé, au point 29 de la décision d’ouverture, que Chips, en tant que grand groupe international, souhaitait se séparer de l’installation parce que son activité était modeste et déficitaire et que sa vente sous condition de poursuite de l’activité permettrait de sauver des emplois.

73      Ainsi, la Commission a conclu au point 29 de la décision d’ouverture qu’il n’apparaissait pas que le prix payé par FABV pour acquérir l’installation de Chips ait été supérieur à la valeur de marché et que, par conséquent, il n’y avait aucune raison de considérer que cette vente constituait une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

74      Dès lors, il résulte de tout ce qui précède qu’il convient de rejeter la deuxième branche du premier moyen.

 Sur l’absence de prise en compte du critère de l’investisseur privé en économie de marché

75      La requérante considère que la valeur de 8 000 000 SEK, convenue avec FABV, constitue un indicateur plus exact et plus fiable de la valeur réelle de l’installation que les estimations établies a posteriori.

76      La requérante aurait pris un risque économique significatif en concluant les transactions avec FABV, puis avec Nya Topp. Lors de la conclusion de la transaction avec FABV, la possibilité pour les investisseurs dans Nya Topp d’obtenir les financements nécessaires pour redémarrer l’activité aurait été très incertaine.

77      La requérante produit ainsi notamment deux lettres de FABV à la Commission, du 27 novembre 2009 et du 19 avril 2010, témoignant que, du fait du mauvais état de l’installation, le prix de 8 000 000 SEK était plus prêt de la valeur du marché que celui de 17 000 000 SEK payé à Chips.

78      En l’espèce, il n’est pas contesté que, le même jour, c’est-à-dire le 13 février 2008, FABV a acquis l’installation pour un montant de 17 000 000 SEK et a accordé à la requérante une option d’achat pour un montant de 8 000 000 SEK.

79      En premier lieu, il convient de constater qu’il est douteux qu’un investisseur privé aurait réalisé une telle opération.

80      En deuxième lieu, il convient de relever qu’il résulte du point 16 de la décision d’ouverture que FABV a accepté un prix de revente moins élevé dans l’espoir d’assurer la poursuite de l’activité de l’installation et de sauver des emplois. Il est d’ailleurs constant entre les parties que la commune a toujours eu ce but, la requérante le rappelant elle-même dans la requête. Il est également indiqué, au point 58 de la décision attaquée, que cet objectif est également le seul mentionné par les autorités suédoises à la Commission.

81      En outre, il résulte de la lettre du 27 novembre 2009, citée par la requérante, que FABV a considéré que le projet selon lequel elle achetait l’installation puis la donnait en location à la requérante, qui à son tour la donnerait en location à Nya Topp, permettrait la poursuite de l’exploitation de l’installation et préserverait les emplois menacés par la fermeture de celle-ci.

82      FABV a alors décidé, ainsi qu’il est indiqué dans cette lettre, de demander à la commune un apport de 9 000 000 SEK, destiné à couvrir la perte inhérente à la vente de l’installation à la requérante pour 8 000 000 SEK. À cet égard, la Commission a produit une copie d’un arrêt due kammarrätt i Göteborg (cour d’appel administrative de Göteborg, Suède) du 1er décembre 2012, relatif à une demande de FABV de pouvoir déduire une perte de capital à la suite de la vente de l’installation à la requérante.

83      En troisième lieu, il convient de constater qu’aucun des arguments de la requérante n’est convainquant.

84      En effet, premièrement, l’argument de la requérante selon lequel le prix de l’installation qu’elle a payé à FABV constitue l’indicateur le plus exact de la valeur réelle de l’installation, bien davantage que les estimations établies par des experts, revient à remettre en cause totalement les règles relatives aux aides d’État en matière de vente de biens immobiliers, telles qu’elles découlent notamment de la communication, puisque, en pareil hypothèse, cela reviendrait à considérer que le prix effectivement payé serait le seul indicateur de ce qu’il conviendrait de considérer comme étant le prix du marché.

85      Deuxièmement, en ce qui concerne le prétendu risque économique encouru par la requérante, au prétexte que, lors de la conclusion de la transaction avec FABV le 13 février 2008, elle n’était pas assurée que Nya Topp trouveraient les financements nécessaires, il y a lieu de relever que la Commission n’a pas conclu à l’existence d’une aide d’État en comparant le prix d’achat de l’installation à FABV avec le prix de sa revente à Nya Topp, mais qu’elle est arrivée à une telle conclusion, au point 49 de la décision attaquée, en comparant le prix d’achat de l’installation à FABV avec trois des estimations disponibles (voir point 50 ci-dessus).

86      D’ailleurs, l’argument de l’existence d’un risque économique significatif n’apparaît pas pertinent. En effet, le 13 février 2008, la requérante a obtenu de FABV une option d’achat de l’installation valable jusqu’au 28 février 2010. En cas de trop grands risques, il lui suffisait, comme l’a relevé la Commission, de ne pas lever cette option.

87      Troisièmement, si la requérante considérait que les frais d’entretien pour l’installation étaient trop élevés, il lui appartenait, là encore, de ne pas lever l’option d’achat.

88      Il convient encore de relever que, d’une part, entretenir l’installation était dans son intérêt en vue de la revente et, d’autre part, elle avait dû logiquement prêter attention à l’état de l’installation lors de son acquisition, et donc devait être consciente des frais d’entretien susceptibles de devoir être exposés.

89      Quatrièmement, il peut encore être relevé, ainsi qu’il est indiqué en note en bas de page n° 8 de la décision attaquée, que les montants annuels des loyers prévus entre la requérante et Nya Topp par le contrat du 1er mars 2008 s’élevaient, pour les six premières années, respectivement à 3 500 000 SEK au titre des deux premières années, à 7 000 000 SEK au titre des troisième et quatrième années, à 10 500 000 SEK au titre de la cinquième année et à 10 000 000 SEK au titre de la sixième année.

90      Ainsi, d’une part, la requérante ne courait qu’un risque économique limité, étant donné le montant important des loyers, et, d’autre part, Nya Topp avait tout intérêt à lever rapidement l’option de vente, du fait du caractère progressif dudit montant.

91      Au regard de ce qui précède, il convient de rejeter la troisième branche du premier moyen.

 Sur le défaut de fiabilité de la dernière estimation, retenue par la Commission

92      La requérante conteste le choix de la Commission, au point 56 de la décision attaquée, d’avoir considéré qu’il y avait lieu d’utiliser la valeur sur le marché de l’installation ressortant de la troisième estimation contenu dans le rapport Price Waterhouse, alors même, ainsi qu’il est indiqué dans ce point, que cette estimation a été effectuée après le déroulement des opérations.

93      De plus, s’il était notoire que quelques investisseurs étaient intéressés par la reprise de l’activité de l’installation, il n’était pas certain que Nya Topp pourrait réunir les investissements nécessaires pour faire redémarrer l’activité. Établir la valeur de marché de l’installation, à la date du 1er mars 2008, sur le seul fondement du contrat de bail entre la requérante et Nya Topp aurait donné un résultat trompeur, ce contrat de bail n’existant pas encore lors de la conclusion du contrat d’option de vente entre FABV et la requérante le 13 février 2008.

94      La requérante relève encore qu’il est expressément écrit dans la deuxième estimation contenue dans le rapport de Price Waterhouse que, compte tenu du contrat de bail, le prix convenu pour le contrat d’option était peut-être un prix de marché, plus vraisemblablement un prix élevé, qu’il paraissait improbable qu’un autre investisseur ait été disposé à payer plus pour le bien en vente, compte tenu du bail en cours avec la requérante, et que l’acquisition de l’installation par celle-ci a été faite aux conditions du marché.

95      En ce qui concerne le premier argument de la requérante relatif au fait que la Commission a utilisé une estimation établie a posteriori, d’une part, il convient de rappeler que la Commission pouvait, en la circonstance, recourir à une ou à plusieurs estimations (voir point 41 ci-dessus) et, d’autre part, il convient de constater que, en tout état de cause, la seule estimation réalisée avant la date du 13 février 2008 est l’estimation de Colliers International, laquelle a abouti à un montant de 27 000 000 SEK, soit une valeur plus élevée que celle de l’estimation retenue par la Commission. Ce premier argument n’est donc pas pertinent. À cet égard, la Commission a expliqué, au point 48 de la décision attaquée, la raison pour laquelle elle avait considéré comme fiable la troisième estimation de Price Waterhouse (voir point 49 ci-dessus).

96      En ce qui concerne le deuxième argument de la requérante selon lequel la Commission ne pouvait pas prendre en compte, dans la troisième estimation de Price Waterhouse, datée du 1er mars 2008, le loyer de location prévu entre elle et Nya Topp, étant donné que, au jour de l’option de vente, le 13 février 2008, il n’était pas certain que Nya Topp obtienne les crédits nécessaires, la Commission explique qu’elle a choisi d’utiliser cette estimation parce que celle-ci prenait pour base les flux de liquidités générés par le contrat de bail conclu avec Nya Topp et donc dans des conditions de marché effectives.

97      À cet égard, d’une part, il convient de constater que la requérante ne démontre pas que les chances d’obtenir les crédits en cause étaient faibles, alors qu’il ne peut qu’être constaté que ces crédits ont bien été obtenus avant le 1er mars 2008, soit au cours des quelques jours suivants le 13 février 2008. D’autre part, ainsi que la requérante l’indique elle-même, il existait, en tout état de cause, d’autres investisseurs intéressés. Il convient encore de relever que le rapport de Colliers International, rédigé avant la vente de l’installation par Chips à FABV le 13 février 2008, qui reposait lui aussi sur l’hypothèse d’une mise en location de l’installation, avait estimé la valeur de celle-ci à 27 000 000 SEK. En retenant la troisième estimation figurant dans le rapport de Price Waterhouse, à savoir 21 000 000 SEK, la Commission a donc adopté une position prudente.

98      Enfin, en ce qui concerne le troisième argument selon lequel il est indiqué dans la deuxième estimation du rapport de Price Waterhouse qu’il n’y aurait guère eu d’autres investisseurs que Nya Topp pour acquérir l’installation, surtout au prix convenu, cet argument, faute de pertinence, ne peut être retenu, étant donné que, premièrement, il résulte de ce qui précède que la requérante savait, le 13 février 2008, que Nya Topp louerait l’installation, que, deuxièmement, ainsi que la requérante l’a elle-même indiqué, il existait d’autres investisseurs intéressé et que, troisièmement, la Commission a suffisamment expliqué, sans être valablement contredite par la requérante, les raisons pour lesquelles cette estimation ne saurait être retenue (voir point 47 ci-dessus).

99      Au regard de ce qui précède, il convient de rejeter la quatrième branche du premier moyen.

 Sur l’absence de prise en compte de la cession ultérieure de l’installation pour un montant de 8 000 000 SEK

100    La requérante considère que le fait que l’installation a été adjugée, dans le cadre de la procédure d’insolvabilité de Nya Topp, pour un montant de 8 000 000 SEK le 2 mai 2011 constitue une preuve que le même prix figurant dans le contrat d’option était la juste expression de la valeur de marché de l’installation. La requérante relève à cet égard que, tout comme à l’époque de la vente publique dans le cadre de ladite procédure, aucune activité n’était exercée dans l’installation lorsque le contrat d’option a été conclu.

101    À cet égard, il convient de relever que la vente réalisée dans le cadre de la procédure d’insolvabilité s’est déroulée le 2 mai 2011, soit plus de trois ans après la date à laquelle la requérante a bénéficié d’une option d’achat, le 13 février 2008, dans le contexte d’une crise financière qui n’avait pas encore éclaté lors de la conclusion de cette option.

102    Au demeurant, la requérante explique elle-même dans la requête que, en raison notamment de l’attention des médias et de l’opposition politique autour des opérations entourant l’installation, ainsi que de la plainte auprès de la Commission relative à une possible aide d’État, Nya Topp a connu d’importantes difficultés de trésorerie et a eu le plus grand mal à obtenir des crédits d’exploitation. La requérante explique encore que Nya Topp n’a pas réussi à trouver des financements, malgré le développement positif de l’activité, vraisemblablement à cause des restrictions de crédit et à la prudence dont les établissements bancaires suédois ont fait preuve dans le contexte de la crise financière de l’époque.

103    En outre, les circonstances factuelles et économiques propres à l’installation ont été modifiées. En effet, lors de l’option d’achat, ainsi qu’il a été relevé au point 81 ci-dessus, l’installation devait être prise en location par Nya Topp, alors que, dans le cadre de la procédure d’insolvabilité, elle a été vendue en tant que simple ensemble d’actifs, sans locataire. À cet égard, les actifs eux-mêmes ont pu voir leur valeur se déprécier. En effet, comme le souligne la Commission, il ressort des documents produits par la requérante qu’un des terrains composant l’installation, non bâti et ne pouvant être donné en location, était estimé à 380 000 SEK dans l’estimation réalisée par Colliers International du 24 septembre 2007 et que sa valeur, lors de la procédure d’insolvabilité, n’était que de 280 000 SEK.

104    Dès lors, le montant obtenu dans le cadre de la procédure d’insolvabilité ne saurait constituer un critère adéquat aux fins de la détermination de la valeur marchande de l’installation à la date de l’option.

105    En tout état de cause, il convient de constater que la requérante ne parvient pas à démontrer que le prix payé dans le cadre de la procédure d’insolvabilité est un juste prix, que la Commission aurait dû prendre en compte.

106    D’ailleurs, la requérante se contredit en soutenant à la fois que la Commission ne pourrait se fonder sur des estimations datées de seulement quelques jours après la conclusion de la vente pour une valeur de 8 000 000 SEK, le 2 septembre 2008, et que la Commission devrait prendre en compte une vente qui s’est tenue plus de trois ans après cette date.

107    Au regard de ce qui précède, il convient de rejeter la cinquième branche du premier moyen.

 Sur le contrat de bail entre la requérante et Nya Topp

108    La requérante considère que les erreurs d’appréciations reportées ci-dessus doivent entraîner l’annulation de la décision attaquée également en ce qui concerne le prétendu avantage de 1 500 000 SEK généré par le contrat de bail conclu entre elle et Nya Topp.

109    Plus précisément, la requérante soutient que, lorsqu’elle a conclu le contrat de bail avec FABV le 13 février 2008, aucun preneur n’occupait l’installation vide et elle ne savait pas alors s’il serait possible de trouver un preneur susceptible d’utiliser l’installation en l’état, alors que, lorsqu’elle a conclu un contrat de bail avec Nya Topp le 1er mars 2008, la valeur de l’installation s’en était trouvée accrue, puisque la requérante avait trouvé un preneur disposé à utiliser l’installation en l’état et pour la destination pour laquelle elle avait été conçue.

110    En outre, la Commission n’aurait pas mesuré l’incidence du fait que FABV ne disposait pas des structures et des ressources suffisantes pour gérer l’installation, contrairement à la requérante, qui, à ce titre, aurait assumé pleinement des obligations d’entretien et de maintenance, ce qui justifierait son droit de réclamer des frais de gestion et de réaliser un bénéfice pour la gestion de l’installation et de sa location.

111    Enfin, dans les faits, la requérante n’aurait jamais perçu de loyer de Nya Topp. En effet, le montant des loyers aurait fait l’objet d’inscriptions au crédit dans le cadre de la cession. Par conséquent, la requérante n’aurait pas perçu un avantage économique à ce titre.

112    Il convient de relever que la caractérisation de l’aide d’État et la détermination de son importance sont exposées aux points 63 et suivants de la décision attaquée. La Commission a considéré que les motifs qu’elle avait indiqués en ce qui concerne la vente de l’installation par FABV à la requérante étaient également valables en ce qui concerne le contrat de bail conclu entre ces deux opérateurs. Plus spécifiquement, la Commission a exposé que les loyers payés par la requérante à FABV étaient inférieurs au niveau du marché, comme il a été indiqué dans la deuxième estimation du rapport de Price Waterhouse, que la requérante considère comme la plus valable (voir points 37 et 47 ci-dessus), et ont donc engendré un avantage pour celle-ci. La Commission a également exposé que les conditions prévues dans le contrat de location conclu entre la requérante et Nya Topp correspondaient à la valeur de l’installation sur le marché locatif, étant donné que ce contrat avait été conclu entre deux opérateurs privés sur la base de considérations économiques rationnelles. La requérante n’ayant payé de loyer à la commune qu’entre le 1er mars et le 11 août 2008, date à laquelle elle a exercé son option d’achat, c’est-à-dire pendant environ six mois, la Commission a effectué un calcul au prorata de l’avantage de 3 000 000 SEK, qui correspond à la différence entre le loyer convenu entre FABV et la requérante et celui convenu entre la requérante et Nya Topp, et a ainsi abouti à un résultat de 1 500 000 SEK (point 64 de la décision attaquée).

113    En ce qui concerne le premier argument de la requérante, relatif au risque qu’elle aurait encouru de ne pas trouver de preneur, il suffit, encore une fois, de constater qu’un tel risque n’existait pas, puisque la requérante savait déjà, le 13 février 2008, qu’elle donnerait en location l’installation à Nya Topp, ainsi que cela résulte de la lettre du 27 novembre 2009.

114    En ce qui concerne le deuxième argument de la requérante, relatif à de prétendus coûts de gestion, il convient de constater que le contrat de location conclu entre FABV et la requérante et celui conclu entre la requérante et Nya Topp ne comportent pas de différences notoires.

115    Enfin, quant au dernier argument de la requérante selon lequel elle n’aurait jamais perçu de loyers de la part de Nya Topp, mais se serait vu créditer les montants des loyers lors de la vente ultérieure de l’installation à Nya Topp, il doit être constaté que la requérante a, du moins, tiré avantage desdits loyers, même non acquittés, dès lors qu’ils ont été portés à son crédit dans l’estimation de la valeur de l’installation lors de la vente de cette dernière à Nya Topp.

116    Au regard de ce qui précède, il convient de rejeter la sixième branche du premier moyen comme non fondée et, partant, ledit moyen dans son ensemble.

 Sur le deuxième moyen, relatif à l’affectation des échanges entre États membres et à la distorsion de la concurrence

117    La requérante fait valoir que la Commission n’a pas établi que les mesures en cause ont eu une incidence sur les échanges entre États membres ou ont faussé la concurrence.

118    Plus précisément, la requérante avance que, ainsi que l’a établi le cabinet Copenhagen Economics, elle n’opère que sur le marché local et seuls existent des propriétaires locaux sur ce marché.

119    Le fait que le propriétaire antérieure, Chips, est un acteur international serait dénué de pertinence, contrairement à ce qu’a considéré la Commission dans la décision attaquée.

120    La requérante avance également que la Commission n’a pas été en mesure d’établir l’information, formulée dans la décision d’ouverture, selon laquelle des acheteurs norvégiens auraient manifesté leur intérêt pour acquérir l’installation.

121    En outre, la seule circonstance que la commune se situe à environ 130 km de la frontière avec la Norvège ne pourrait raisonnablement être considérée comme un élément déterminant pour l’application du critère de l’incidence sur les échanges entre États membres et du risque de fausser la concurrence.

122    Enfin, la Commission n’aurait pas défini, dans la décision attaquée, le marché pertinent, qui semblerait être celui de la gestion et de la location de biens immobiliers, et n’indiquerait pas quels éventuels concurrents de la requérante pourraient subir un préjudice en raison des avantages prétendument accordés à celle-ci.

123    Il y a lieu de rappeler que la Commission est tenue non d’établir une incidence réelle des aides sur les échanges entre États membres et une distorsion effective de la concurrence, mais seulement d’examiner si ces aides sont susceptibles d’affecter ces échanges et de fausser la concurrence (voir arrêt du 16 juillet 2014, Allemagne/Commission, T‑295/12, EU:T:2014:675, point 151 et jurisprudence citée).

124    En outre, il convient également de rappeler qu’il n’est nullement exclu qu’une mesure publique accordée à une entreprise qui ne fournit que des services au niveau local ou régional et ne fournit pas de services en dehors de son État d’origine puisse, néanmoins, avoir une incidence sur les échanges entre États membres (voir arrêt du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg, C‑280/00, Rec, EU:C:2003:415, point 77 et jurisprudence citée).

125    Il convient de constater que, aux points 35 et 36 de la décision attaquée, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission ne s’est pas contentée d’indiquer que les mesures en cause étaient susceptibles d’avoir une incidence sur les échanges entre États membres ou de fausser la concurrence.

126    En effet, la Commission a relevé que les services immobiliers et liés à l’immobilier font l’objet d’échanges et d’investissements au sein de l’Union. En l’espèce, cela est confirmé par le fait que le propriétaire antérieur de l’installation, à savoir Chips, est une filiale, établie en Finlande, d’Orkla, groupe international établi en Norvège. Ainsi que la Commission l’a constaté dans la décision attaquée, cela démontre l’existence d’un intérêt dépassant le cadre national pour cette installation, intérêt qui apparaît suffisant pour établir un risque d’affectation des échanges entre États membres et de fausser la concurrence.

127    Il y a donc lieu de rejeter les arguments de la requérante tenant au caractère local de l’installation et au fait que Chips n’en est plus le propriétaire.

128     De même, il y a lieu de rejeter les arguments de la requérante relatifs à l’existence de potentiels acheteurs norvégiens ainsi qu’à la localisation de l’installation à proximité de la Norvège, étant donné que, en tout état de cause, la Commission ne s’est pas fondée sur ces éléments pour déterminer si les mesures en cause étaient susceptibles d’affecter les échanges et de fausser la concurrence.

129    Enfin, la requérante soutient également que la Commission aurait dû définir le marché pertinent.

130    Or, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, si la Commission est tenue d’évoquer, dans les motifs de sa décision, à tout le moins les circonstances dans lesquelles une aide a été accordée lorsqu’elles permettent de démontrer que l’aide est de nature à affecter les échanges entre États membres et à fausser ou à menacer de fausser la concurrence, elle n’est pas tenue de procéder à une analyse économique de la situation réelle des marchés concernés, de la part de marché des entreprises bénéficiaires des aides, de la position des entreprises concurrentes et des courants d’échanges entre États membres. En outre, dans le cas d’aides accordées illégalement, la Commission n’est pas tenue de faire la démonstration de l’effet réel que ces aides ont eu sur la concurrence et sur les échanges entre États membres. Si tel était le cas, en effet, cette exigence aboutirait à favoriser les États membres qui versent des aides illégales au détriment de ceux qui notifient les aides à l’état de projet (voir arrêt du 15 juin 2010, Mediaset/Commission, T‑177/07, Rec, EU:T:2010:233, point 145 et jurisprudence citée).

131    En particulier, il suffit que la Commission établisse que l’aide litigieuse est de nature à affecter les échanges entre les États membres et fausse ou menace de fausser la concurrence, sans qu’il soit nécessaire de délimiter le marché en cause (voir arrêt Mediaset/Commission, point 130 supra, EU:T:2010:233, point 146 et jurisprudence citée).

132    La Commission ayant établi, au point 35 de la décision attaquée, que la mesure en cause est susceptible d’affecter les échanges entre les États membres et fausse ou menace de fausser la concurrence, elle n’était pas tenue de délimiter le marché en cause.

133    Parant, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, relatif aux obligations d’examen et de motivation, ainsi qu’aux droits de la défense

134    Le présent moyen de la requérante comporte trois branches. Elle affirme que, au cours de la procédure administrative, la Commission a méconnu, premièrement, son obligation d’examen, deuxièmement, son obligation de motivation et, troisièmement, ses droits de la défense.

 Sur l’obligation d’examen de la Commission

135    Selon la requérante, la Commission a omis d’examiner si le prix d’acquisition de l’installation par FABV auprès de Chips pour 17 000 000 SEK ne constituait pas un prix surévalué, d’autant que la requérante a fait valoir que cette opération était susceptible de renfermer un élément d’aide d’État et que les autorités suédoises ont elles-mêmes expressément relevé cette possibilité. La Commission aurait également omis d’exiger des autorités suédoises ou de Chips de communiquer toutes informations relatives aux éventuelles offres ou parties ayant manifesté un intérêt à l’acquisition de l’installation avant que FABV ne l’acquiert.

136    À cet égard, il suffit de renvoyer aux points 56 à 74 ci-dessus, dans lesquels la deuxième branche du premier moyen, par laquelle la requérante a déjà développé le même argument, tiré d’une prétendue obligation d’examen des conditions de vente de l’installation par Chips à FABV, a été examinée et rejetée.

 Sur l’obligation de motivation

137    La requérante affirme que la Commission a méconnu, dans la décision attaquée, son obligation de motivation en ne répondant pas à des arguments décisifs qu’elle a présenté au cours de la procédure administrative. Ainsi, la Commission n’aurait pas répondu aux arguments de la requérante selon lesquels l’acquisition de l’installation par FABV pour un montant de 17 000 000 SEK pourrait renfermer un élément d’aide d’État, ni à l’argumentation selon laquelle l’installation a effectivement été cédée lors d’une vente publique dans le cadre de la procédure d’insolvabilité pour un prix de 8 000 000 SEK. De même, la motivation de l’incidence sur les échanges entre États membres et l’atteinte à la concurrence serait défectueuse.

138    Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec, EU:C:1998:154, point 63 et jurisprudence citée).

139    Il convient d’abord de relever, à propos des deux premiers arguments selon lesquels la Commission n’a pas répondu, dans le cadre de la décision attaquée, à l’argumentation développée par la requérante au cours de la procédure administrative en ce qui concerne l’acquisition de l’installation par FABV et sa cession dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité, qu’ils ne concernent pas un éventuel défaut de motivation, en ce sens que la requérante serait dans l’impossibilité de comprendre le raisonnement de la Commission, mais une remise en cause du bien-fondé des appréciations de la Commission, lesquelles ont fait l’objet, quant à ces deux arguments, des deuxième et cinquième branches du premier moyen.

140    De plus, en ce qui concerne le premier argument, concernant l’acquisition de l’installation par FABV pour un montant de 17 000 000 SEK, il y a lieu de constater que, comme le relève la Commission, la décision attaquée ne porte pas sur cette opération, laquelle a été tranchée dans le cadre de la décision d’ouverture, contre laquelle la requérante n’a pas déposé de recours (voir point 63 ci-dessus). En tout état de cause, cette décision d’ouverture indique clairement que c’est parce que le prix acquitté par FABV ne semblait pas supérieur à la valeur marchande, telle qu’estimée par des consultants extérieurs indépendants, qu’elle a exclu la présence d’un élément d’aide d’État dans cette opération (voir point 59 ci-dessus).

141    En ce qui concerne le deuxième argument, relatif à la vente publique de l’installation dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité, il suffit de constater que la Commission a bien expliqué, aux points 47 et 48 de la décision attaquée, les raisons pour lesquelles elle avait écarté les deux premières estimations du rapport de Price Waterhouse, élaboré à la demande de la requérante, et avait retenu la troisième estimation dudit rapport (voir points 47 à 49 ci-dessus). En outre, ainsi qu’il résulte des arguments présentés par la requérante dans le cadre de la cinquième branche du premier moyen, la requérante a bien été en mesure de comprendre et de contester le raisonnement de la Commission.

142    Enfin, en ce qui concerne l’argument relatif à la motivation de l’incidence sur les échanges entre États membres et l’atteinte à la concurrence, les motifs rappelés au point 126 ci-dessus étaient suffisant pour assurer la motivation de la décision attaquée à cet égard.

143    Il résulte de ce qui précède qu’il convient de rejeter la deuxième branche comme non fondée.

 Sur les droits de la défense de la requérante

144    La requérante affirme que la Commission aurait dû l’entendre avant de décider l’ouverture de la procédure formelle d’examen. Ce serait en effet avec cette décision que la Commission aurait focalisé son examen sur l’opération à laquelle la requérante était partie, tout en renonçant à tout examen de la question de savoir si celle conclue entre FABV et Chips était susceptible de renfermer un élément d’aide d’État. La méconnaissance par la Commission des droits de la défense ressortirait encore plus nettement du fait que Chips aurait effectivement eu connaissance de la plainte dont la Commission avait été saisie dès le début de la procédure administrative et aurait ainsi pu lui présenter des observations qui auraient servi de base à la décision, alors que la requérante n’aurait été informée de l’existence de la plainte que le 4 novembre 2010, soit après que la Commission avait décidé d’ouvrir la procédure formelle d’examen.

145    Il résulte de la jurisprudence que les intéressés, comme la requérante, autres que l’État membre concerné ont, dans la procédure de contrôle des aides d’État, uniquement la faculté d’adresser à la Commission toute information destinée à éclairer celle-ci dans son action future et qu’ils ne sauraient prétendre eux-mêmes à un débat contradictoire avec la Commission tel que celui ouvert au profit dudit État membre (voir arrêt du 15 novembre 2011, Commission et Espagne/Government of Gibraltar et Royaume-Uni, C‑106/09 P et C‑107/09 P, Rec, EU:C:2011:732, point 181 et jurisprudence citée).

146    Ils ont donc pour l’essentiel un rôle de source d’information pour la Commission (voir arrêt du 1er juillet 2010, ThyssenKrupp Acciai Speciali Terni/Commission, T‑62/08, Rec, EU:T:2010:268, point 162 et jurisprudence citée).

147    À cet égard, aucune disposition de la procédure de contrôle des aides d’État ne réserve un rôle particulier, parmi les intéressés, au bénéficiaire de l’aide. Il y a d’ailleurs lieu de rappeler que la procédure de contrôle des aides d’État n’est pas une procédure ouverte « à l’encontre » du bénéficiaire des aides qui impliquerait que ce dernier puisse se prévaloir de droits aussi étendus que les droits de la défense en tant que tels (voir arrêt ThyssenKrupp Acciai Speciali Terni/Commission, point 146 supra, EU:T:2010:268, point 163 et jurisprudence citée).

148    Par ailleurs, dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État, doivent être distinguées, d’une part, la phase préliminaire d’examen des aides instituée par l’article 108, paragraphe 3, TFUE et régie par les articles 4 et 5 du règlement n° 659/1999, qui a seulement pour objet de permettre à la Commission de se former une première opinion sur la compatibilité partielle ou totale de l’aide en cause avec le marché intérieur, et, d’autre part, la phase d’examen proprement dit, visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et régie par les articles 6 et 7 dudit règlement, qui est destinée à permettre à la Commission d’avoir une information complète sur l’ensemble des données de l’affaire (voir arrêt du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission, C‑521/06 P, Rec, EU:C:2008:422, point 33 et jurisprudence citée).

149    Ce n’est que dans le cadre de la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, qui est destinée à permettre à la Commission d’avoir une information complète sur l’ensemble des données de l’affaire, que le traité FUE prévoit l’obligation, pour la Commission, de mettre en demeure les intéressés de présenter leurs observations (voir arrêt Athinaïki Techniki/Commission, point 148 supra, EU:C:2008:422, point 33 et jurisprudence citée).

150    Dès lors, c’est à tort que la requérante prétend que la Commission aurait dû l’entendre avant de décider l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

151    Il convient donc de rejeter la troisième branche du troisième moyen et, partant, le troisième moyen dans son ensemble.

152    En conséquence, le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

153    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Hammar Nordic Plugg AB supportera, outre ses propres dépens, ceux de la Commission européenne.

Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 octobre 2015.

Signatures


* Langue de procédure : le suédois.


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.