Language of document : ECLI:EU:T:2002:302

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

5 décembre 2002 (1)

«Fonctionnaires - Procédure disciplinaire - Condamnation pénale - Révocation sans perte des droits à pension - Audition prévue à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut»

Dans l'affaire T-277/01,

Romuald Stevens, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bertem (Belgique), représenté par Mes J.-N. Louis et V. Peere, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation de la décision de la Commission du 14 décembre 2000, révoquant le requérant sans perte de ses droits à pension,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. J. D. Cooke, président, K. Lenaerts et Mme P. Lindh, juges,

greffier: Mme D. Christensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 27 juin 2002,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    L'article 12, premier alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut») dispose:

«Le fonctionnaire doit s'abstenir de tout acte et, en particulier, de toute expression publique d'opinions qui puisse porter atteinte à la dignité de sa fonction.»

2.
    L'article 86 du statut dispose:

«1. Tout manquement aux obligations auxquelles le fonctionnaire ou l'ancien fonctionnaire est tenu, au titre du présent statut, commis volontairement ou par négligence, l'expose à une sanction disciplinaire.

2. Les sanctions disciplinaires sont les suivantes:

[...]

f.    la révocation avec, le cas échéant, réduction ou suppression du droit à pension d'ancienneté, sans que les effets de cette sanction puissent s'étendre aux ayants droit du fonctionnaire;

[...]

3. Une même faute ne peut donner lieu qu'à une seule sanction disciplinaire.»

3.
    L'article 87 du statut dispose:

«L'autorité investie du pouvoir de nomination peut prononcer la sanction d'avertissement et la sanction de blâme, sans consultation du conseil de discipline, sur proposition du supérieur hiérarchique du fonctionnaire ou de sa propre initiative. L'intéressé doit être préalablement entendu.

Les autres sanctions sont infligées par l'autorité investie du pouvoir de nomination après accomplissement de la procédure disciplinaire prévue à l'annexe IX. Cette procédure est engagée à l'initiative de l'autorité investie du pouvoir de nomination, l'intéressé ayant été préalablement entendu.»

4.
    L'article 7 de l'annexe IX du statut dispose:

«Au vu des pièces produites devant lui et compte tenu, le cas échéant, des déclarations écrites ou verbales de l'intéressé et des témoins, ainsi que des résultats de l'enquête à laquelle il a pu être procédé, le conseil de discipline émet, à la majorité, un avis motivé sur la sanction que lui paraissent devoir entraîner les faits reprochés et transmet cet avis à l'autorité investie du pouvoir de nomination et à l'intéressé dans le délai d'un mois à compter du jour où il a été saisi. Le délai est porté à trois mois lorsque le conseil a fait procéder à une enquête.

En cas de poursuite devant un tribunal répressif, le conseil peut décider qu'il y a lieu de surseoir à émettre son avis jusqu'à ce que soit intervenue la décision du tribunal.

L'autorité investie du pouvoir de nomination prend sa décision dans le délai d'un mois au plus, l'intéressé ayant été entendu par elle.»

Faits et procédure

5.
    Le requérant, ancien fonctionnaire de grade C 2, était affecté à la direction générale «Personnel et administration» de la Commission.

6.
    Par arrêt du 28 novembre 1994, la cour d'appel de Bruxelles a prononcé la condamnation pénale du requérant pour non-assistance à personne en danger. Le 26 mars 1996, la cour de cassation de Belgique a rejeté le pourvoi formé par le requérant contre cet arrêt, lequel est ainsi devenu définitif. Les faits à l'origine de cette condamnation, tels qu'ils ont été établis par les juridictions belges, se résument comme suit: le 5 février 1992, le requérant a emmené à bord de son véhicule Monsieur X et Mme V. Pendant que le requérant conduisait, M. X a violé Mme V à l'arrière du véhicule, sans que le requérant ne porte assistance à cette dernière.

7.
    Estimant que cette condamnation pénale constituait une atteinte à la dignité de la fonction au sens de l'article 12, premier alinéa, du statut, l'autorité investie dupouvoir de nomination (ci-après l'«AIPN») a décidé, le 11 novembre 1997, d'ouvrir une procédure disciplinaire à l'encontre du requérant.

8.
    Le 1er décembre 1997, l'AIPN a entendu le requérant, assisté d'un collègue fonctionnaire, conformément aux dispositions de l'article 87, second alinéa, du statut.

9.
    Le 8 janvier 1998, l'AIPN a décidé de saisir le conseil de discipline, conformément aux dispositions de l'article 87, second alinéa, du statut ainsi que de l'article 1er de son annexe IX.

10.
    Après avoir entendu le requérant, assisté de deux avocats et d'un collègue, le conseil de discipline a, le 17 mars 1998, rendu un avis motivé conformément aux dispositions de l'article 7, premier alinéa, de l'annexe IX du statut. Par cet avis, le conseil de discipline a unanimement recommandé à l'AIPN de révoquer le requérant sans perte des droits à pension au motif que son «comportement criminel établi et sanctionné par la juridiction pénale [constituait] une transgression grave de l'obligation qui existe pour tout fonctionnaire d'adopter, en toutes circonstances, une conduite conforme à la dignité de la fonction».

11.
    Après avoir convoqué puis repoussé à plusieurs reprises l'audition du requérant en raison de son état de santé, la Commission a finalement convoqué le requérant pour le 17 octobre 2000, afin de l'entendre conformément à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut.

12.
    Le 17 octobre 2000, le requérant n'était ni présent ni représenté et n'a pas, par ailleurs, soumis de déclarations écrites aux fins de cette audition.

13.
    Le 14 décembre 2000, l'AIPN a adopté une décision portant révocation du requérant sans réduction ou suppression du droit à pension d'ancienneté, en vertu de l'article 86, paragraphe 2, sous f), du statut (ci-après la «décision attaquée»). Cette décision a été, notamment, motivée comme suit:

«Considérant que les faits reprochés sont clairement établis par la voie judiciaire qui n'a retenu aucune circonstance médicale pouvant atténuer la responsabilité de M. Stevens; qu'il en découle que, par son comportement, M. Stevens a manqué très gravement à ses obligations découlant de l'article 12, premier alinéa, du statut;

Considérant que M. Stevens ne s'est pas présenté, en invoquant des raisons médicales, aux différentes convocations, respectivement des 29 mai 1998, 19 avril 1999, 6 juillet 1999, 19 janvier 2000, 25 février 2000 et 17 octobre 2000 aux fins d'être entendu par l'AIPN tripartite au titre de l'article 7 de l'annexe IX du statut; qu'il avait été indiqué à M. Stevens que son déplacement aux auditions des 19 avril 1999, 19 janvier 2000 et 25 février 2000 pouvait être assuré par une voiture de service qui devait se présenter chez lui le jour de l'audition, et ce afin de tenir compte de son état de santé; qu'il a été offert à M. Stevens pour les auditions des25 février 2000 et 17 octobre 2000 la possibilité de faire valoir par écrit son point de vue sur la procédure le concernant dans le cas où il serait dans l'incapacité médicale, dûment certifiée, de se présenter auxdites auditions, possibilité qui a été rappelée par lettre du 29 mars 2000; que l'AIPN a laissé à M. Stevens la possibilité de faire valoir son point de vue par une personne de son choix habilitée par écrit afin de se présenter à sa place à l'audition du 25 février 2000; que l'état de M. Stevens ne l'empêchait pas de comprendre l'objet de ces convocations ou d'y donner une suite; dans ces conditions, que le fonctionnaire ne saurait, par son propre comportement, empêcher l'AIPN de procéder à une décision; que l'AIPN est ainsi en droit de procéder à sa décision en l'absence de cette audition, ses multiples tentatives de permettre à l'intéressé de faire valoir ses éventuelles observations ayant échoué pour des raisons échappant à son contrôle.»

14.
    Au vu de ces éléments, l'AIPN a révoqué le requérant sans réduction ou suppression du droit à pension d'ancienneté, en vertu de l'article 86, paragraphe 2, sous f), du statut.

15.
    Le 14 mars 2001, le requérant a, conformément à l'article 90, paragraphe 2, du statut, introduit une réclamation auprès de la Commission.

16.
    Par lettre du 12 juillet 2001, la Commission a rejeté cette réclamation.

17.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 octobre 2001, le requérant a introduit, conformément à l'article 91 du statut, le présent recours.

18.
    Par acte séparé déposé le 29 octobre 2001, le requérant a introduit une demande de statuer selon une procédure accélérée conformément à l'article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal ainsi qu'une demande d'assistance judiciaire gratuite.

19.
    Le 27 novembre 2001, le Tribunal a décidé de ne pas accueillir la demande de statuer selon la procédure accélérée.

20.
    Par ordonnance du 25 janvier 2002, le président de la cinquième chambre du Tribunal a admis le requérant au bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite, la Commission ayant été entendue.

21.
    Par lettre du 4 février 2002, le requérant a renoncé au dépôt du mémoire en réplique et a demandé l'audition du médecin-conseil de la Commission en qualité de témoin.

22.
    Par lettre du 15 février 2002, la Commission a présenté ses observations sur cette demande et a sollicité l'audition du médecin traitant du requérant. Le requérant n'a émis aucune objection sur cette demande d'audition de témoin.

23.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale.

24.
    Dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, le Tribunal a demandé au requérant la production de certains documents. Celui-ci a satisfait à cette demande dans les délais impartis. Le Tribunal a informé les parties qu'il réservait sa décision quant aux offres de témoignage.

25.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience qui s'est déroulée le 27 juin 2002.

Conclusions des parties

26.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-     annuler la décision attaquée;

-     condamner la Commission aux dépens.

27.
    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-     rejeter le recours;

-     statuer comme de droit sur les dépens.

En droit

28.
    À l'appui de son recours, le requérant développe trois moyens. Le premier est tiré d'une violation de la procédure disciplinaire. Le deuxième vise à contester le bien-fondé de la décision attaquée. Le dernier est tiré d'une violation de l'obligation de motivation.

Sur le premier moyen, tiré d'une violation de la procédure disciplinaire

Arguments des parties

29.
    Le requérant reproche à la Commission d'avoir prononcé sa révocation sans qu'il ait été entendu par l'AIPN dans les conditions prévues à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut. Il explique que des raisons de santé l'ont empêché de se rendre aux diverses convocations qui lui avaient été adressées. Il souligne avoir produit des certificats médicaux attestant de son incapacité et s'insurge contre l'adoption de la décision attaquée par l'AIPN sans que le certificat de son médecin-traitant, excusant son absence du 17 octobre 2000, ait été pris en considération.

30.
    Sur ce dernier point, le conseil du requérant expose avoir, après le rejet de la réclamation, confié à un médecin la mission de prendre connaissance des avis des médecins-conseils de la Commission. Ce médecin aurait, le 9 février 2001, émis la conclusion suivante:

«Sur base de ces données médicales documentées, il est permis d'affirmer qu[e,] en 1999 et 2000, [les] troubles neuropsychologiques [du requérant], attestés, et la polymédication (neuroleptiques, anxyolitiques, antidépresseurs), ne permettaient pas au [requérant] d'assurer et d'assumer la défense de ses intérêts légitimes.»

31.
    Le requérant reproche à la Commission de ne pas avoir prouvé qu'il était en mesure d'être entendu le 17 octobre 2000. Certes, le dossier médical établi par la Commission contiendrait une mention faisant état de sa capacité à témoigner. Le requérant estime cependant que cette mention remonte au mois de juillet 2000 et ne suffit pas à prouver qu'il était en état d'être entendu le 17 octobre 2000.

32.
    Le requérant conclut que la Commission a estimé, à tort, dans la décision attaquée qu'il avait, par son propre comportement, empêché l'AIPN de procéder à l'audition.

33.
    La Commission reconnaît que le requérant n'a pas été entendu conformément à l'article 7 de l'annexe IX du statut. Elle considère cependant qu'un tel manquement n'est pas de nature à entraîner l'annulation de la décision attaquée.

34.
    Elle rappelle en effet que la Cour, dans son arrêt du 7 mai 1969, X/Commission de contrôle (12/68, Rec. p. 109) a rejeté un moyen pris de la violation de l'article 7 de l'annexe IX du statut, après avoir considéré que le défaut d'audition était imputable à l'intéressé et non à la Commission. En outre, le Tribunal aurait jugé dans son arrêt du 16 mai 2000, Irving/Commission (T-121/99, RecFP p. I-A-85 et II-357), que l'intéressé peut toujours soumettre des observations par écrit aux fins de l'audition visée à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut, même si la Commission ne l'a pas expressément proposé. Ainsi, malgré le défaut d'audition de l'intéressé, le Tribunal n'aurait pas prononcé l'annulation de la décision de l'AIPN imposant une sanction disciplinaire.

35.
    S'agissant plus précisément des circonstances de l'espèce, la Commission affirme que toute violation des droits de la défense est exclue en l'occurrence. Elle estime avoir pleinement tenu compte de tous les éléments du dossier avant d'arrêter la décision attaquée. En particulier, elle souligne avoir pris en considération les auditions qui se sont déroulées devant le conseil de discipline et la situation médicale du requérant.

36.
    Enfin, la Commission fait remarquer que le requérant semble avoir retrouvé ses capacités pour introduire le présent recours. Elle relève que le requérant a toujours été en mesure d'invoquer une raison médicale, liée à un traitement ou à d'autres circonstances, à la date des diverses auditions auxquelles il a été convoqué.

37.
         La Commission est d'avis que le requérant n'a pas été entendu, en personne ou par représentation, par écrit ou oralement, en raison d'un choix qui lui était propre, de telle sorte que le défaut d'audition lui est imputable et ne saurait, dès lors, conduire à l'annulation de la décision attaquée.

Appréciation du Tribunal

38.
    Il convient, tout d'abord, de rappeler le principe selon lequel toute administration, lorsqu'elle prend une mesure de nature à léser gravement des intérêts individuels, est tenue de mettre l'intéressé à même de faire connaître son point de vue (arrêts de la Cour du 27 octobre 1977, Moli/Commission, 121/76, Rec. p. 1971, point 20, et du 13 avril 1978, Mollet/Commission, 75/77, Rec. p. 897, point 21). En effet, le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l'encontre d'une personne et susceptible d'aboutir à un acte faisant grief à celle-ci constitue un principe fondamental du droit communautaire et doit être assuré même en l'absence d'une réglementation spécifique (arrêt de la Cour du 5 octobre 2000, Allemagne/Commission, C-288/96, Rec. p. I-8237, point 99, et arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, Enso Española/Commission, T-348/94, Rec. p. II-1875, point 80).

39.
    Dans le cadre de la procédure disciplinaire, ces principes sont notamment mis en oeuvre par l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut, selon lequel l'AIPN prend la décision mettant un terme à ladite procédure après avoir entendu l'intéressé.

40.
    Ainsi, le présent moyen pose la question de savoir si l'AIPN était en droit de prononcer une sanction disciplinaire sans avoir entendu le requérant dans les conditions prévues à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut.

41.
    À cet égard, il y a lieu de rappeler que la jurisprudence a admis que le fait de ne pas entendre l'intéressé conformément à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut n'entraînait pas l'annulation de la décision lui imposant une sanction disciplinaire si ce manquement est imputable à l'intéressé lui-même (arrêts Irving/Commission et X/Commission de contrôle, précités). En effet, l'AIPN n'est pas tenue de repousser indéfiniment la date de la dernière audition jusqu'à ce que l'intéressé soit en mesure d'y participer. Au contraire, tant dans l'intérêt du fonctionnaire que de l'administration, la décision mettant fin à la procédure disciplinaire ne peut être retardée sans justification. Tel est l'objet du délai d'un mois prévu à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut, qui constitue une «règle de bonne administration» (arrêts de la Cour du 4 février 1970, Van Eick/Commission, 13/69, Rec. p. 3, point 4, et du 27 novembre 2001, Z/Parlement, C-270/99 P, Rec. p. I-9197, point 21; arrêts du Tribunal du 18 décembre 1997, Daffix/Commission, T-12/94, RecFP p. I-A-453 et II-1197, points 130 et 131, et Irving/Commission, précité, point 53).

42.
    Dans la décision attaquée, après avoir souligné que «le fonctionnaire ne saurait, par son propre comportement, empêcher l'AIPN de procéder à une décision», l'AIPN a conclu qu'elle était «en droit de procéder à sa décision en l'absence [d']audition, ses multiples tentatives de permettre à l'intéressé de faire valoir ses éventuelles observations ayant échoué pour des raisons échappant à son contrôle». Il convient donc de vérifier si ces appréciations sont fondées, c'est-à-dire si le défaut d'audition est imputable au requérant.

43.
    Il ressort des éléments du dossier que le requérant, bien que dûment convoqué à l'audition prévue à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut, a manqué de se présenter, de soumettre des observations par écrit ou de se faire représenter en vue de l'audition du 17 octobre 2000. À cet égard, il importe de préciser les circonstances dans lesquelles l'AIPN a arrêté la décision attaquée.

44.
    Après l'avis unanime du conseil de discipline du 17 mars 1998 (voir ci-dessus point 10) selon lequel le comportement criminel du requérant constituait une transgression grave de l'article 12, premier alinéa, du statut, l'AIPN a convoqué une première fois le requérant par lettre du 7 mai 1998 en vue de procéder, le 29 mai 1998, à l'audition prévue à l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut. Le 20 mai, invoquant des «raisons de santé graves», le requérant a informé l'AIPN qu'il ne pourrait être présent.

45.
    L'AIPN a convoqué une deuxième fois le requérant par lettre du 26 mars 1999 pour une audition fixée au 19 avril 1999, en lui proposant d'être pris en charge par une voiture de service. Le 16 avril 1999, le requérant a informé l'AIPN qu'il ne pourrait pas se rendre à cette audition en raison de son hospitalisation effective depuis le 14 avril 1999.

46.
    Par lettre du 24 juin 1999, l'AIPN a convoqué le requérant une troisième fois pour une audition fixée au 6 juillet 1999. En raison du traitement de ce dernier en hôpital de jour, les agents de la Commission n'ont pas été en mesure de lui remettre cette convocation en main propre avant la soirée du 5 juillet 1999. Le requérant a alors décliné cette convocation, déclarant «ne pas jouir d'un état de santé lui permettant d'assister» à l'audition.

47.
    L'AIPN a convoqué une quatrième fois le requérant par lettre du 10 janvier 2000 pour une audition fixée au 19 janvier 2000 et a proposé de mettre à sa disposition une voiture de service. Le 15 janvier 2000, le requérant a répondu à l'AIPN - certificat médical à l'appui - qu'il ne pourrait se rendre à cette audition, car, depuis le 6 septembre 1999, il faisait l'objet de soins en hôpital de jour.

48.
    L'AIPN a convoqué une cinquième fois le requérant par lettre du 8 février 2000 pour une audition fixée au 25 février 2000. Elle lui a proposé d'être assisté d'un médecin de la Commission et conduit par une voiture de service. L'AIPN a également précisé dans cette convocation que, si l'état de santé du requérant l'empêchait d'être entendu, un certificat médical attestant de cette incapacité devaitlui être communiqué. L'AIPN a, en outre, rappelé au requérant qu'il disposait de la faculté de faire une déposition écrite ou de se faire représenter par la personne de son choix.

49.
    Par lettre du 23 février 2000, la fille du requérant a répondu que ce dernier ne pourrait se présenter à l'audition en raison de son hospitalisation et a fourni un certificat médical en ce sens. Par lettre du 29 mars 2000, l'AIPN a informé le requérant du report de la décision à son égard. L'AIPN a néanmoins demandé au requérant de produire un certificat médical attestant de son incapacité à être entendu.

50.
    L'AIPN a convoqué une sixième fois le requérant par lettre du 2 octobre 2000 pour une audition fixée au 17 octobre 2000. L'AIPN a rappelé que, si, pour des raisons médicales, le requérant ne pouvait pas répondre à cette convocation en personne, il pouvait toujours faire valoir ses explications par écrit. Le requérant a décliné cette convocation et a transmis à l'AIPN un certificat de son médecin justifiant son absence à l'audition.

51.
    Malgré l'absence du requérant, de tout représentant et de déclaration écrite, l'AIPN n'a pas reporté l'audition mais a proposé que le requérant soit révoqué sans perte de ses droits à pension d'ancienneté, sanction disciplinaire définitivement adoptée le 14 décembre 2000.

52.
    Il ressort de ces éléments que l'AIPN a reporté à cinq reprises l'audition prévue par l'article 7, troisième alinéa, de l'annexe IX du statut, en raison de l'état de santé du requérant. Ainsi, plus de deux ans et cinq mois se sont écoulés entre la première et la dernière convocations adressées au requérant. L'AIPN a également prêté attention à l'état de santé du requérant en offrant de mettre à la disposition de celui-ci un véhicule ainsi que les services d'un médecin de l'institution en vue de se rendre à l'audition. Par ailleurs, l'AIPN n'a pas manqué d'informer le requérant que, dans l'hypothèse où son état de santé ne lui permettrait pas de se rendre en personne à l'audition, il disposait de la faculté de s'y faire représenter par la personne de son choix et de soumettre des observations par écrit.

53.
    Dans ces circonstances, il convient de conclure que l'AIPN a agi avec diligence et loyauté à l'égard du requérant, en prêtant une attention particulière à l'état de santé de ce dernier. Il apparaît donc, à ce stade intermédiaire du raisonnement, que le défaut d'audition semble imputable au requérant et que, par conséquent, l'AIPN était en droit de considérer, dans la décision attaquée, qu'elle pouvait «procéder à sa décision en l'absence [d']audition, ses multiples tentatives de permettre à l'intéressé de faire valoir ses éventuelles observations ayant échoué pour des raisons échappant à son contrôle».

54.
    Toutefois, par son argumentation, le requérant vise à infirmer cette conclusion intermédiaire en soutenant que, en raison de son état de santé, il ne pouvait saisir la portée des convocations qui lui ont été adressées. Il prétend, en substance, queson discernement se trouvait altéré de telle sorte qu'il se trouvait dans l'incapacité non seulement de se rendre à l'audition, mais encore de donner mandat à un tiers afin de se faire représenter ou de soumettre des observations par écrit. Il estime que, dans ces conditions, le défaut d'audition ne lui était pas imputable, mais résultait de son état de santé.

55.
    Afin de répondre à ces arguments, il y a lieu de rappeler que, conformément aux principes régissant la charge de la preuve, c'est à la partie requérante qu'il incombe de démontrer l'existence de l'incapacité médicale dont elle se prévaut. Force est de constater que le requérant n'est pas parvenu à établir qu'il se trouvait dans un état d'incapacité physique ou psychique l'empêchant, d'une part, de comprendre la portée des convocations et autres communications que l'AIPN lui a adressées et, d'autre part, d'exercer utilement son droit d'être entendu.

56.
    En effet, il apparaît, premièrement, que, malgré les invitations de l'AIPN lors de la procédure disciplinaire, le requérant n'a pas fourni de certificat médical attestant de son incapacité à être entendu. Il convient en effet de rappeler que l'AIPN a pris soin, par lettres des 8 février et 29 mars 2000 (voir points 48 et 49 ci-dessus), d'inviter le requérant à fournir un certificat médical permettant de vérifier son incapacité à être entendu. En réponse à ces demandes répétées, le requérant a fait parvenir un certificat médical en date du 10 octobre 2000, rédigé dans les termes suivants: «Pour des raisons médicales et afin de prévenir une aggravation de sa décompensation dépressive avec tendances suicidaires, [le patient] n'est pas en mesure de prendre part à l'audition proposée par la Commission.» Ce certificat médical permet d'excuser l'absence du requérant à l'audition. Toutefois, ce certificat ne permet pas de démontrer l'affirmation selon laquelle le requérant aurait été dans l'incapacité de comprendre la portée des convocations qui lui ont été adressées, de donner mandat à un tiers pour le représenter ou de soumettre des observations par écrit, ainsi que l'AIPN l'a invité à le faire.

57.
    Deuxièmement, il y a lieu de relever que, au moins à deux reprises, les médecins consultés n'ont pas conclu à l'incapacité du requérant à être entendu, représenté ou à faire des observations par écrit. Ainsi, dans un rapport du 2 septembre 1999, le médecin-contrôleur de la Commission a, d'une part, estimé que le requérant ne pouvait pas reprendre le travail et, d'autre part, considéré que le requérant était en mesure de se déplacer aux fins d'être entendu, ce dernier étant «en mesure d'assister à une audition en matière de discipline». En outre, le 18 juillet 2000, le médecin traitant du requérant a transmis à la Commission un rapport sur l'état de santé de son patient. Selon ce rapport, le requérant souffrait d'un syndrome dépressif majeur avec diverses composantes phobiques lié notamment à sa situation professionnelle, affection pour laquelle il suivait un traitement psychothérapeutique associé à une pharmacothérapie. Interrogé téléphoniquement par le médecin-conseil de la Commission, l'auteur de ce rapport a déclaré que le requérant était en mesure de faire une déclaration écrite dans le cadre de la procédure disciplinaire. Le médecin-conseil a consigné cette déclaration dans le dossier médical du requérant.

58.
    Troisièmement, le comportement et les déclarations du requérant au cours de la procédure disciplinaire ne permettent pas de conclure que les facultés du requérant étaient à ce point altérées qu'il demeurait dans l'incapacité de se faire assister ou représenter.

59.
    Tout d'abord, il est constant que, lors de l'ouverture de la procédure disciplinaire et de l'adoption de l'avis du conseil de discipline, le requérant était successivement assisté d'un collègue fonctionnaire, puis de deux avocats et d'un collègue (voir points 8 et 10 ci-dessus). De même, lors de l'introduction de la réclamation formée à l'encontre de la décision attaquée, le requérant était représenté par un avocat.

60.
    Par ailleurs, dans sa réponse initiale à la lettre de convocation du 7 mai 1998, le requérant a, par lettre du 14 mai 1998, manifesté le souhait d'être «accompagné de [ses] deux avocats et de M. André Hecq pour l'audition [en] question». Ce n'est que le 20 mai 1998 qu'il a finalement décliné cette convocation en raison de son hospitalisation (voir ci-dessus point 43).

61.
    Ensuite, le 5 juillet 1999, le requérant a déclaré aux agents de la Commission qui lui notifiaient la troisième convocation:

«Je souhaite à l'avenir être prévenu plus tôt de manière à pouvoir avertir mon avocat.»

62.
    Enfin, lorsque, le 23 février 2000, le médecin-conseil de la Commission a rendu visite au requérant dans la clinique où il était hospitalisé, ce dernier a déclaré, ainsi que cela est inscrit dans le rapport du docteur Dolmans du 24 février 2000, qu'«il ne se sentait pas encore assez bien pour se présenter lui-même et qu'il ne désirait pas se faire représenter».

63.
    Ces diverses déclarations et comportements ne permettent pas de considérer que le requérant se trouvait, au cours de la procédure disciplinaire, dans l'incapacité de se faire représenter.

64.
    Quatrièmement, le rapport du 9 février 2001 du docteur Ismail (voir point 30 ci-dessus) ne suffit pas à remettre en cause les éléments qui viennent d'être exposés. En effet, ce rapport ne repose pas sur un examen direct du requérant par son auteur; il se fonde exclusivement sur les pièces du dossier médical du requérant. En outre, ce rapport a été établi postérieurement à la décision attaquée, environ quatre mois après l'envoi, le 2 octobre 2000, de la sixième et dernière convocation. Les conclusions de ce rapport ne pouvaient donc être prises en considération par l'AIPN. Dans ces conditions, il ne saurait être conféré à ce document une valeur probante permettant de remettre en question les éléments précédemment exposés, qui reposent sur des constatations faites directement à l'époque des faits.

65.
    Ainsi, sans minimiser l'importance des troubles psychiques dont pouvait souffrir le requérant, les considérations qui précèdent ne permettent pas de considérer quele requérant est parvenu à démontrer qu'il se trouvait dans l'incapacité de comprendre la portée des convocations, de se faire représenter ou de produire des observations écrites en vue de son audition. Dans de telles circonstances, l'AIPN était fondée à considérer que le défaut d'audition était imputable au requérant.

66.
    Il y a donc lieu de rejeter le premier moyen du recours comme non fondé, sans qu'il soit nécessaire de procéder à l'audition de témoins.

Sur les deuxième et dernier moyens, visant à contester le bien-fondé de la décision attaquée et à faire valoir un défaut de motivation de cette dernière

Arguments des parties

67.
    Le requérant estime que la sanction qui lui a été infligée est disproportionnée et que la décision attaquée est entachée d'erreurs d'appréciation. Il reproche à la Commission de ne pas avoir indiqué les raisons précises pour lesquelles elle n'a pas pris en considération les circonstances atténuantes dont il s'était prévalu, ainsi que ses excellents états de service et sa conduite irréprochable depuis son entrée au service de la Commission.

68.
    Le requérant fait valoir qu'il appartenait à l'AIPN de fixer la sanction après avoir procédé à une évaluation globale des faits, parmi lesquels figurent les circonstances aggravantes et atténuantes propres à chaque cas individuel (arrêt du Tribunal du 28 juin 1996, Y/Cour de justice, T-500/93, RecFP p. I-A-335 et II-977). Il reproche à la Commission d'avoir méconnu ces principes en omettant de prendre en considération certaines circonstances atténuantes, en particulier les déclarations de la victime de l'infraction pénale, Mme V, qui a témoigné à sa décharge devant le conseil de discipline. Le requérant en déduit que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

69.
    La Commission estime que l'AIPN est liée par l'arrêt de la juridiction belge ayant prononcé la condamnation du requérant, cet arrêt définitif ayant l'autorité de la chose jugée. Elle fait en outre valoir qu'une condamnation pénale doit prévaloir sur une procédure disciplinaire, ainsi que le confirme l'article 88, cinquième alinéa, du statut. Le juge pénal ayant écarté toutes circonstances atténuantes, l'AIPN ne pouvait retenir de telles circonstances au bénéfice du requérant. La décision serait donc fondée et proportionnée. Quant à la motivation de la décision attaquée, la Commission estime qu'elle était suffisante au regard de la condamnation pénale du requérant.

Appréciation du Tribunal

70.
    En premier lieu, s'agissant des arguments du requérant relatifs à la motivation de la décision attaquée, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante,la motivation d'une décision faisant grief doit permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision et doit fournir à l'intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est bien fondée (arrêt de la Cour du 20 novembre 1997, Commission/V, C-188/96 P, Rec. p. I-6561, points 26 à 29, et arrêt du Tribunal du 19 mai 1999, Connolly/Commission, T-34/96 et T-163/96, RecFP p. I-A-87 et II-463, point 93).

71.
    La question de savoir si la motivation de la décision de l'AIPN imposant une sanction satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais également de son contexte ainsi que de l'ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. À cet égard, si le conseil de discipline et l'AIPN sont tenus de mentionner les éléments de fait et de droit dont dépend la justification légale de leurs décisions et les considérations qui les ont amenés à les prendre, il n'est pas pour autant exigé qu'ils discutent tous les points de fait et de droit qui ont été soulevés par l'intéressé au cours de la procédure (arrêt Connolly/Commission, précité, point 93). Si l'AIPN choisit la même sanction que celle proposée par le conseil de discipline, ce qui est le cas en l'espèce, il n'y a pas lieu à un surcroît de motivation sur le caractère approprié de la sanction (arrêt du Tribunal du 16 juillet 1998, Y/Parlement, T-144/96, RecFP p. I-A-405 et II-1153).

72.
    En l'espèce, l'AIPN n'était pas tenue, dans la décision attaquée, d'adopter une motivation spécifique sur les circonstances à l'origine de la condamnation du requérant, celles-ci ayant été définitivement établies par le juge pénal. La motivation de la décision attaquée apparaît suffisante pour permettre au requérant d'assurer sa défense et au Tribunal d'effectuer son contrôle. Les arguments du requérant relatifs à la motivation de la décision attaquée doivent être rejetés.

73.
    En second lieu, s'agissant du bien-fondé et de la proportionnalité de la sanction imposée au requérant, il importe de souligner que, selon une jurisprudence constante, dès lors que la réalité des faits retenus à la charge d'un fonctionnaire est établie, le choix de la sanction adéquate appartient à l'AIPN. Une décision infligeant une sanction de révocation implique nécessairement des considérations délicates de la part de l'institution, compte tenu des conséquences sérieuses qui en découlent. L'AIPN dispose, à cet égard, d'un large pouvoir d'appréciation et le contrôle juridictionnel se limite à une vérification de l'exactitude matérielle des faits retenus, de l'absence d'erreur manifeste dans l'appréciation des faits et de l'absence de détournement de pouvoir (arrêt du Tribunal du 15 mai 1997, N/Commission, T-273/94, RecFP p. I-A-97 et II-289, point 125). Le Tribunal ne saurait substituer son appréciation à celle de l'AIPN (arrêt de la Cour du 29 janvier 1985, F/Commission, 228/83, Rec. p. 275, point 34, et arrêt du Tribunal du 17 octobre 1991, de Compte/Parlement, T-26/89, Rec. p. II-781, point 220).

74.
    Afin de répondre à l'argument du requérant selon lequel l'AIPN aurait omis de prendre en considération les déclarations de la victime de l'infraction pénale, Mme V, qui a témoigné en sa faveur devant le conseil de discipline, il convient de distinguer les motifs de la décision attaquée qui concernent l'existence d'uneviolation de l'article 12, premier alinéa, du statut et ceux relatifs à la détermination de la sanction adéquate.

75.
    S'agissant de ce premier point, il y a lieu de souligner que, dans la décision attaquée, le manquement aux obligations prévues à l'article 12, premier alinéa, du statut qui a été retenu à l'encontre du requérant est constitué par les faits qui ont donné lieu à sa condamnation pénale par les juridictions belges.

76.
    Or, l'AIPN est en droit de se fonder sur des constatations factuelles opérées dans une décision pénale devenue définitive, même si le fonctionnaire en question conteste la matérialité de ces faits au cours de la procédure disciplinaire. L'article 88, cinquième alinéa, du statut, qui consacre le principe selon lequel «le pénal tient le disciplinaire en l'état», se justifie notamment par le fait que les juridictions pénales nationales disposent de pouvoirs d'investigation plus importants que ceux de l'AIPN (arrêt du Tribunal du 19 mars 1998, Tzoanos/Commission, T-74/96, RecFP p. I-A-129 et II-343, point 34). Ainsi, l'AIPN peut se baser sur des constatations factuelles d'un arrêt pénal devenu définitif (arrêt du Tribunal du 21 novembre 2000, A/Commission, T-23/00, RecFP p. I-A-263 et II-1211, point 37).

77.
    Par conséquent, dans la mesure où les faits à la base de la condamnation du requérant ont été définitivement établis par le juge pénal belge, l'AIPN ne pouvait revenir sur leur qualification juridique en prenant en considération les déclarations de la victime de l'infraction à titre de circonstances atténuantes. Compte tenu de la nature et de la gravité des faits à l'origine de la condamnation pénale du requérant, l'AIPN était fondée à conclure, dans la décision attaquée, que le requérant a «manqué très gravement à ses obligations découlant de l'article 12, premier alinéa, du statut».

78.
    S'agissant, deuxièmement, de la question de savoir si l'AIPN aurait dû prendre en considération les déclarations de la victime, Mme V, dans le cadre de la détermination de la sanction disciplinaire adéquate, il importe de rappeler que, les articles 86 et 89 du statut ne prévoyant pas de rapports fixes entre les sanctions disciplinaires et les différentes sortes de manquement et ne précisant pas dans quelle mesure l'existence de circonstances aggravantes ou atténuantes intervient dans le choix de la sanction, la détermination de la sanction à infliger doit être fondée sur une évaluation globale par l'AIPN de tous les faits concrets et circonstances propres à chaque cas individuel (arrêt du Tribunal du 7 mars 1996, Williams/Cour des comptes, T-146/94, RecFP p. I-A-103 et II-329, point 107).

79.
    En l'espèce, force est de constater que l'AIPN a pris en considération l'avis du conseil de discipline, auquel la décision attaquée se réfère expressément. Dans cet avis, le conseil de discipline a mentionné le témoignage de la victime de l'infraction, témoignage repris sous la forme d'une déclaration signée par cette dernière et annexée audit avis. Il apparaît ainsi que l'AIPN, en adoptant la décision attaquée, a dûment pris en considération les renseignements qui avaient été portés à la connaissance du conseil de discipline, dont le témoignage de la victime del'infraction invoqué par le requérant à titre de circonstance atténuante. Par conséquent, l'AIPN a déterminé la sanction applicable, après avoir procédé à une évaluation globale de tous les faits concrets et des circonstances propres à la situation du requérant, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation ou enfreindre le principe de proportionnalité. Les arguments du requérant n'étant pas fondés, le deuxième moyen doit être rejeté dans son ensemble.

80.
    Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

Sur les dépens

81.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Chaque partie supportera donc ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté.

2)    Chacune des parties supportera ses propres dépens.

Cooke Lenaerts Lindh

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 décembre 2002.

Le greffier

Le président

H. Jung

J. D. Cooke


1: Langue de procédure: le français.