Language of document : ECLI:EU:T:2016:385

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

4 juillet 2016 (*)

« Marchés publics de services – Procédure d’appel d’offres – Prestation de “Services transeuropéens pour la télématique entre administrations – Nouvelle génération (TESTA-ng)” – Rejet de l’offre d’un soumissionnaire – Attribution du marché – Transparence – Égalité de traitement – Non-discrimination – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑349/13,

Orange Business Belgium SA, établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes B. Schutyser et T. Villé, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes S. Delaude, S. Lejeune et F. Moro, en qualité d’agents, assistées de Mes P. Wytinck et B. Hoorelbeke, avocats,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission du 19 avril 2013 rejetant l’offre soumise par la requérante dans le cadre de l’appel d’offres restreint DIGIT/R2/PR/2011/039, relatif aux « Services transeuropéens pour la télématique entre administrations – Nouvelle génération (TESTA-ng) », et attribuant le marché à un autre soumissionnaire,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. V. Kreuschitz, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 23 septembre 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par un avis de marché du 27 octobre 2011, publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2011/S 207-336367), la direction générale (DG) « Informatique » de la Commission européenne a lancé l’appel d’offres DIGIT/R2/PR/2011/039, relatif aux « Services transeuropéens pour la télématique entre administrations – Nouvelle génération (TESTA-ng), » élaboré dans le cadre du programme concernant des solutions d’interopérabilité pour les administrations publiques européennes (programme ISA) établi pour la période 2010-2015. Le 3 novembre 2011, un rectificatif à l’avis de marché a été publié au Supplément au Journal officiel (JO 2011/S 233-376812).

2        Le présent appel d’offres avait pour objectif de conclure un nouveau contrat-cadre portant sur un nouveau réseau appelé TESTA-ng pour une durée de trois ans et renouvelable quatre fois.

3        Le marché devait être attribué au soumissionnaire ayant présenté l’offre économiquement la plus avantageuse qui aurait été soumise dans le cadre d’une procédure restreinte comportant deux étapes, à savoir la sélection des candidats et l’évaluation des offres.

4        Aux fins de la sélection des candidats, les personnes intéressées disposaient d’un délai allant jusqu’au 30 novembre 2011 pour soumettre leurs candidatures, accompagnées de certaines données établissant leurs capacités économique, financière, technique et professionnelle à réaliser l’objet du marché en cause.

5        Le 30 novembre 2011, quatre sociétés ont soumis une demande de participation à la procédure de passation de marché en cause, dont la requérante, Orange Business Belgium SA.

6        Par lettre du 26 juillet 2012, toutes les sociétés ayant demandé à participer à la procédure de passation de marché en cause ont été invitées à soumettre une offre. Initialement, la date fixée pour la présentation des offres était le 25 septembre 2012. À la demande des candidats sélectionnés, cette date a été modifiée. Une offre pouvait ainsi être présentée jusqu’au 5 novembre 2012.

7        Le 5 novembre 2012, trois des candidats sélectionnés, dont la requérante, ont présenté une offre dans le cadre de la procédure de passation de marché en cause. Le 8 novembre 2012, le comité d’évaluation des offres (ci-après le « comité d’évaluation »), comportant neuf membres représentant les institutions, agences et organes de l’Union européenne ayant lancé l’appel d’offres, assistés de trois experts externes, a été désigné. L’ouverture desdites offres a eu lieu le 9 novembre 2012.

8        Concernant l’évaluation technique des offres, le cahier des charges énonçait, au point 9, six critères d’attribution. Ensemble, lesdits critères d’attribution permettaient d’octroyer à chaque offre un total de 100 points. La note minimale à obtenir pour chaque critère d’attribution était fixée à 50 %. Les notes attribuées étaient pondérées en fonction de l’importance de chacun des six critères d’attribution. La note minimale pondérée requise était fixée à 70 %.

9        Concernant l’évaluation financière des offres, il était indiqué que celle-ci serait effectuée sur la base, d’une part, des prix mentionnés par les candidats sélectionnés en réponse au questionnaire financier figurant dans l’annexe 14 du cahier des charges et, d’autre part, des volumes estimés dans l’avis de marché et dans le cahier des charges.

10      Le cahier des charges précisait enfin que la détermination du rapport qualité-prix se ferait à l’aide d’une formule mathématique dans la cadre de laquelle la qualité de l’offre, à savoir l’évaluation technique, comptait pour 60 % et le prix proposé, à savoir l’évaluation financière, comptait pour 40 %.

11      Par lettre de la Commission du 19 avril 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la requérante a été informée de ce qui suit :

–        son offre n’a pas été retenue, car ladite offre ne constituait pas l’offre économiquement la plus avantageuse (meilleur rapport qualité-prix) ;

–        elle pouvait demander de plus amples informations au sujet de son offre, ces informations pouvant lui être fournies dans une lettre de suivi ou lors d’une réunion de débriefing ;

–        la communication de certains éléments pouvait être omise dans les cas où ladite communication ferait obstacle à l’application des lois, serait contraire à l’intérêt public, porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d’entreprises publiques ou privées ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre les entreprises.

12      Par courriel du même jour, la requérante a demandé des informations supplémentaires sur les raisons pour lesquelles son offre n’avait pas été retenue ainsi qu’un extrait de l’analyse effectuée par le comité d’évaluation. Par lettre du 23 avril 2013, elle a réitéré sa demande et demandé une prolongation du délai de suspension ainsi qu’une suspension de la signature du contrat-cadre jusqu’à ce qu’elle soumette ses observations sur la procédure de passation de marché en cause.

13      Par lettre du 26 avril 2013, la Commission a communiqué à la requérante les informations suivantes :

–        une précision indiquant que le délai d’attente était fixé par le règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) n °1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1, ci-après le « règlement financier ») ;

–        une précision indiquant que le pouvoir adjudicateur disposait d’un délai maximal de quinze jours de calendrier pour répondre aux demandes des soumissionnaires évincés visant à obtenir des informations supplémentaires ;

–        l’extrait du rapport d’évaluation concernant l’évaluation de l’offre de celle-ci et des informations sur la méthode appliquée pour évaluer les propositions techniques ;

–        une indication selon laquelle les informations qui ne relevaient pas des exceptions visées à l’article 113 du règlement financier, en ce qui concerne l’évaluation technique de l’offre de l’attributaire, seraient communiquées à celle-ci dès que l’examen des commentaires de l’évaluation sera terminé ;

–        le nom de l’attributaire ;

–        un tableau récapitulatif des notes obtenues par la requérante et par l’attributaire lors de l’évaluation technique des offres et un tableau récapitulatif des prix proposés par les deux soumissionnaires dans leurs offres financières ;

–        un tableau établissant le classement des deux offres après application de la formule prévue pour l’identification de l’offre présentant le « meilleur rapport qualité-prix » ;

–        des informations sur la valeur du contrat-cadre.

14      Par lettre du 29 avril 2013, la requérante a demandé une réunion de débriefing.

15      Par lettre du 30 avril 2013, la DG « Informatique » a envoyé à la requérante un extrait du rapport d’évaluation concernant l’évaluation technique de l’offre retenue.

16      Par lettre du 8 mai 2013, la requérante a demandé une « nouvelle confirmation concernant la procédure de passation de marché ».

17      Par lettre du 14 mai 2013, la requérante a réitéré sa demande concernant la tenue d’une réunion de débriefing dans les plus brefs délais et demandé une réponse rapide ainsi qu’une « confirmation » de sa lettre du 8 mai 2013.

18      Par lettre du 15 mai 2013, la DG « Informatique » a invité la requérante à participer à une réunion de débriefing le 16 mai 2013 et, en réponse à la lettre de celle-ci du 8 mai 2013, a fourni l’extrait pertinent du tableau récapitulatif des notes obtenues par la requérante et par l’attributaire lors de l’évaluation technique des offres concernant les sous-critères d’attribution 6a et 6b.

19      La réunion de débriefing s’est tenue le 21 mai 2013.

20      Par lettre du 23 mai 2013, la DG « Informatique » a envoyé une lettre à la requérante comprenant les informations fournies durant la réunion de débriefing, notamment sur le processus d’évaluation. Elle indiquait également que, à ce moment-là, le contrat-cadre n’avait pas encore été signé avec l’attributaire.

21      Par lettre du 24 mai 2013, la requérante a informé la DG « Informatique » que, après application de la règle d’évaluation communiquée aux soumissionnaires en réponse donnée à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses », les 8,5 points octroyés à l’attributaire devraient être remplacés par 5 points, ce qui aboutissait à une note pondérée de 66,65 %, inférieure au seuil requis de 70 %.

22      Par lettre du 27 mai 2013, la requérante a envoyé à la DG « Informatique » une copie des notes de réunion prises par ses représentants durant la réunion de débriefing.

23      Par lettre du 29 mai 2013, la requérante a envoyé à la DG « Informatique » ses observations concernant le processus d’évaluation et la décision d’attribution.

24      Par lettre du 30 mai 2013, la DG « Informatique » a informé les trois soumissionnaires que la signature du contrat-cadre avait été suspendue afin de procéder à un examen complémentaire, conformément à l’article 171, paragraphe 1, du règlement délégué (UE) n° 1268/2012 de la Commission, du 29 octobre 2012, relatif aux règles d’application du règlement financier (JO 2012, L 362, p. 1, ci-après les « règles d’application »), étant donné la nature des observations formulées par les soumissionnaires évincés.

25      Par lettre du 17 juin 2013, la DG « Informatique » a informé les trois soumissionnaires que l’examen complémentaire était terminé et que l’ordonnateur avait confirmé sa décision initiale d’attribuer le marché en cause à l’un d’entre eux. Les soumissionnaires évincés ont reçu un extrait du rapport d’examen complémentaire. Dans cette lettre, elle répondait également à la lettre de la requérante du 27 mai 2013 et l’informait que, n’ayant pas été consultée lors de l’élaboration des notes de réunion prises par les représentants de celle-ci durant la réunion de débriefing, elle les rejetait formellement et que, en tout état de cause, lesdites notes de réunion ne reflétaient pas les informations communiquées durant ladite réunion.

26      Le 12 juillet 2013, le contrat en cause a été signé avec l’attributaire.

27      L’avis d’attribution du marché en cause a été publié le 7 août 2013 au Supplément au Journal officiel (JO 2013/S 152-263766).

 Procédure et conclusions des parties

28      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 1er juillet 2013, la requérante a introduit le présent recours.

29      La requérante a sollicité le traitement confidentiel à l’égard des parties intervenantes éventuelles ainsi que de tout tiers concernant son offre.

30      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

31      Par lettre du 4 février 2015, le Tribunal, au titre des mesures d’organisation de la procédure, a demandé aux parties de répondre par écrit à des questions. Les parties y ont déféré dans le délai imparti. Par la même lettre, il a également été demandé à la Commission de produire, premièrement, certains extraits de l’offre de la requérante portant sur deux sous-critères d’attribution, deuxièmement, les annexes 1 et 10 du cahier des charges, troisièmement, une copie de la méthode d’évaluation signée avant le début de l’évaluation des offres, de l’ordre du jour de la première réunion du comité d’évaluation et de la fiche de circulation de la méthode d’évaluation, quatrièmement, le rapport d’évaluation et le rapport d’examen complémentaire concernant l’offre de l’attributaire, dans leur version intégrale, ainsi que, cinquièmement, les extraits de l’offre de l’attributaire, dans leur version intégrale, relatifs à cinq sous-critères d’attribution. La Commission n’a que partiellement déféré à cette demande.

32      Par ordonnance du 7 avril 2015, le Tribunal a adopté une mesure d’instruction, par laquelle il a ordonné à la Commission de produire deux documents, à savoir la version intégrale du rapport d’évaluation et du rapport d’examen complémentaire concernant l’offre de l’attributaire, ainsi que la version intégrale des extraits de ladite offre concernant les sous-critères d’attribution 3e, 4a, 4d, 5c et 5e. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti.

33      Par lettre du 26 mai 2015, le Tribunal, au titre des mesures d’organisation de la procédure, a demandé à la Commission de produire des documents. La Commission y a déféré dans le délai imparti.

34      Par lettre du 21 juillet 2015, le Tribunal, au titre des mesures d’organisation de la procédure, a décidé que les représentants de la requérante étaient autorisés à consulter, au greffe, des extraits sélectionnés de la version intégrale du rapport d’examen complémentaire concernant l’offre de l’attributaire. Un des représentants de la requérante a consulté les documents en cause au greffe du Tribunal. Les autres documents produits par la Commission ont été retirés du dossier.

35      Par lettre du 13 août 2015, la requérante a introduit une demande de mesures d’organisation de la procédure prévue à l’article 88 du règlement de procédure du Tribunal, afin de lui permettre de présenter par écrit ses observations sur, premièrement, la demande de confidentialité de certains documents relatifs à l’offre de l’attributaire, deuxièmement, la prétendue défense supplémentaire de la Commission en réponse aux demandes de production de documents et, troisièmement, les documents consultés au greffe du Tribunal.

36      Par lettre du même jour, le Tribunal a demandé à la Commission de soumettre ses observations écrites sur la demande de mesures d’organisation de la procédure introduite par la requérante. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti.

37      Par décision du 21 septembre 2015, le Tribunal a décidé de ne pas donner lieu à la demande de mesures d’organisation de la procédure introduite par la requérante et l’a invitée à présenter ses observations lors de l’audience.

38      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal à l’audience du 23 septembre 2015.

39      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée par laquelle la Commission a décidé de ne pas retenir son offre et d’attribuer le marché à l’attributaire ;

–        dans l’hypothèse où la Commission aurait déjà passé le marché en cause, déclarer la nullité du marché ;

–        à titre subsidiaire, nommer un expert indépendant chargé d’apprécier la conformité de l’offre retenue, suspendre sa décision jusqu’à ce que l’expert remette son rapport et, ensuite, annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

40      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        « déclarer le recours en annulation de la décision attaquée et [du] contrat consécutif intégralement non fondé » ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

1.     Sur le premier chef de conclusions

41      À l’appui de la demande en annulation, la requérante invoque, en substance, deux moyens. Le premier moyen est tiré de la violation du cahier des charges et de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier, en ce que la Commission n’a pas correctement appliqué les critères d’attribution. Le second moyen est tiré de la violation de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier en ce que l’offre de l’attributaire n’était pas conforme aux exigences techniques.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du cahier des charges et de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier en ce que la Commission n’a pas correctement appliqué les critères d’attribution

42      La requérante fait valoir, en substance, que la décision attaquée a été prise en violation du cahier des charges et de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier et, en particulier, des principes de transparence, d’égalité et de non-discrimination consacrés par cette disposition étant donné que la Commission n’a pas correctement appliqué les critères d’attribution.

43      Le présent moyen comporte trois branches.

44      La première branche porte sur l’application erronée du sous-critère d’attribution 6b. La deuxième branche porte sur la communication des critères erronés en fait pour les critères d’attribution 6c et 6d, entraînant ainsi l’application de nouveaux critères d’attribution qui n’étaient pas communiqués. La troisième branche porte sur l’absence de communication de la méthode d’évaluation appliquée avant la soumission des offres.

45      À titre liminaire, il convient de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante que le pouvoir adjudicateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant aux éléments à prendre en considération en vue de la prise d’une décision de passer un marché à la suite d’un appel d’offres et que le contrôle du Tribunal doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation ainsi que de l’exactitude matérielle des faits, de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir arrêts du 15 mars 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑236/09, non publié, EU:T:2012:127, point 88 et jurisprudence citée, et du 24 avril 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑554/08, non publié, EU:T:2012:194, points 37 et 38 et jurisprudence citée). Ce large pouvoir d’appréciation est reconnu au pouvoir adjudicateur tout au long de la procédure de passation du marché, y compris en ce qui concerne le choix et l’évaluation des critères de sélection et d’attribution.

46      En outre, l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier dispose que tous les marchés publics financés totalement ou partiellement par le budget de l’Union respectent les principes de transparence, de proportionnalité, d’égalité de traitement et de non-discrimination.

47      Ainsi, selon une jurisprudence constante, le pouvoir adjudicateur est tenu de veiller, à chaque phase d’une procédure de passation de marché, au respect du principe d’égalité de traitement et, par voie de conséquence, à l’égalité des chances de tous les soumissionnaires (arrêts du 29 avril 2004, Commission/CAS Succhi di Frutta, C‑496/99 P, EU:C:2004:236, point 108 ; du 17 décembre 1998, Embassy Limousines & Services/Parlement, T‑203/96, EU:T:1998:302, point 85, et du 17 mars 2005, AFCon Management Consultants e.a./Commission, T‑160/03, EU:T:2005:107, point 75).

48      Le principe d’égalité de traitement entre les soumissionnaires, qui a notamment pour objectif de favoriser le développement d’une concurrence saine et effective entre les entreprises participant à un marché public, impose que tous les soumissionnaires disposent des mêmes chances dans la formulation des termes de leurs offres et implique donc que celles-ci soient soumises aux mêmes conditions pour tous les soumissionnaires (voir, en ce sens, arrêts du 18 octobre 2001, SIAC Construction, C‑19/00, EU:C:2001:553, point 34, et du 12 décembre 2002, Universale-Bau e.a., C‑470/99, EU:C:2002:746, point 93).

49      Il ressort également de la jurisprudence que le principe d’égalité de traitement implique une obligation de transparence afin de permettre de vérifier son respect (arrêts du 18 juin 2002, HI, C‑92/00, EU:C:2002:379, point 45, et du 12 décembre 2002, Universale-Bau e.a., C‑470/99, EU:C:2002:746, point 91).

50      Dans le contexte des marchés publics, le principe de transparence a essentiellement pour but de garantir l’absence de risque de favoritisme et de comportement arbitraire de la part du pouvoir adjudicateur. Il implique que toutes les conditions et modalités de la procédure de passation de marché soient formulées de manière claire, précise et univoque, dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges (arrêt du 29 avril 2004, Commission/CAS Succhi di Frutta, C‑496/99 P, EU:C:2004:236, point 111).

51      Le principe de transparence implique donc que toutes les informations techniques pertinentes pour la bonne compréhension de l’avis de marché ou du cahier des charges soient mises, dès que possible, à la disposition de l’ensemble des entreprises participant à une procédure de passation de marché, de façon, d’une part, à permettre à tous les soumissionnaires raisonnablement informés et normalement diligents d’en comprendre la portée exacte et de les interpréter de la même manière et, d’autre part, à mettre le pouvoir adjudicateur en mesure de vérifier si effectivement les offres des soumissionnaires correspondent aux critères régissant le marché en cause (arrêt du 12 mars 2008, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑345/03, EU:T:2008:67, point 145).

52      Il convient d’apprécier le présent moyen à la lumière des principes énoncés aux points 45 à 51 ci-dessus.

 Sur la première branche, portant sur l’application erronée du sous-critère d’attribution 6b

53      Dans le cadre d’une première branche, la requérante reproche, en substance, à la Commission de ne pas avoir correctement appliqué, dans le cadre de son évaluation technique des offres, un des sous-critères d’attribution « décisifs », à savoir le sous-critère d’attribution 6b. Une application correcte aurait abouti à l’exclusion de l’offre de l’attributaire. En outre, la Commission aurait modifié a posteriori la méthode d’évaluation, lors de l’évaluation des offres au regard dudit sous-critère d’attribution afin de majorer artificiellement la notation obtenue par l’offre de l’attributaire par rapport à celle obtenue par l’offre de la requérante.

54      À l’appui de son grief, la requérante soutient que la règle d’évaluation du sous-critère d’attribution 6b n’a pas été utilisée dans le sens de la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses », dans laquelle il était indiqué que tant le facteur de multiplication des indemnités forfaitaires (ci-après le « MF ») que le temps de propagation aller-retour (ci-après le « RTD ») seraient évalués. Il ressortirait du rapport d’évaluation que les offres des trois soumissionnaires auraient, cependant, été seulement évaluées compte tenu du MF. La Commission l’aurait d’ailleurs confirmé elle-même lors de la réunion de débriefing ainsi que dans un extrait du rapport d’examen complémentaire envoyé le 17 juin 2013.

55      La Commission rétorque qu’elle a bel et bien comparé les offres des différents soumissionnaires au regard du sous-critère d’attribution 6b, conformément à la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses », ce qui a été confirmé dans un extrait du rapport d’examen complémentaire envoyé le 17 juin 2013, et n’a donc pas enfreint le cahier des charges ni les principes de transparence et d’égalité de traitement. Les notes attribuées auxdites offres au regard dudit sous-critère d’attribution n’auraient dès lors pas été manipulées.

56      Au préalable, il convient de rappeler, tout d’abord, ce que prévoit le cahier des charges concernant le sous-critère d’attribution 6b.

57      Le sous-critère d’attribution 6b prévoit d’évaluer la qualité de l’accord sur le niveau de service (SLA) en ce qui concerne la performance du réseau et est décrit au point 9.6.2. du cahier des charges. Aux fins de cette évaluation, les soumissionnaires devaient :

–        fournir une description très minutieuse de l’infrastructure de suivi en expliquant comment le respect de ces exigences serait assuré ;

–        garantir le meilleur RTD entre chaque emplacement de point d’accès intégré (ci-après le « TAP ») du scénario 2 et une infrastructure centrale de suivi située à Bruxelles (ou dans un rayon de 50 km de Bruxelles) ;

–        assurer la meilleure valeur pour le MF.

58      En réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission a indiqué que le MF visait à calculer le montant des dommages-intérêts dus en cas de mauvaise performance ou de panne du réseau. Dans ce cas, le RTD est utilisé comme un indicateur du comportement du réseau. En fait, le RTD mesure le temps pris par un paquet de données pour atteindre sa destination et revenir au point de départ (aller-retour).

59      Avant la date de clôture pour la réception des offres, les soumissionnaires ont adressé à la Commission trois séries de questions pour obtenir des informations complémentaires ou des éclaircissements. Des réponses à ces questions ont été apportées par la Commission dans le document intitulé « Questions et réponses ».

60      Il convient de rappeler, ensuite, qu’une question écrite a été présentée en ce qui concerne le sous-critère d’attribution 6b.

61      La question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses » était formulée comme suit :

« Cette question concerne le [sous-critère d’attribution] 6b, [intitulé] “[Q]ualité de la performance du réseau SLA”; le point 9.6.2 mentionne qu’au titre de cette section, nous devons fournir une description de haut niveau, le [RTD] et un [MF]. Pouvez-vous préciser comment vous noterez cette section (et, plus précisément, comment vous évaluerez les chiffres du [RTD] et comment vous évaluerez le [MF])? »

62      La réponse à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses » était formulée comme suit :

« Des notes sont attribuées pour le [RTD] et le [MF] séparément, en comparant les résultats de tous les soumissionnaires. Pour obtenir l’évaluation générale, les deux notes sont multipliées. Pour obtenir la note générale, le résultat de l’évaluation sera multiplié par un facteur et arrondi afin d’obtenir 10 points pour le meilleur soumissionnaire. »

63      Il convient de rappeler, enfin, les extraits du rapport d’évaluation concernant l’offre de la requérante et celle de l’attributaire ainsi que l’extrait du rapport d’examen complémentaire.

64      S’agissant du sous-critère d’attribution 6b, l’offre de la requérante a reçu l’évaluation suivante : « [L]e [MF] donné [confidentiel] pour le calcul des indemnités forfaitaires au titre [du SLA] relatif aux performances du réseau a été considéré [comme] Excellent .»

65      Selon l’extrait du rapport d’évaluation concernant l’offre de l’attributaire, « le [MF] fourni (données occultées) pour calculer les indemnités forfaitaires au titre du SLA relatif aux performances du réseau a été apprécié et par conséquent le comité d’évaluation a attribué à la qualité du SLA relatif aux performances du réseau la note Très bien ».

66      L’extrait du rapport d’examen complémentaire indique que, « pour l’évaluation de la qualité du SLA, il a été tenu compte de toutes les exigences susmentionnées, y compris le RTD pour le scénario 2 et le MF » (voir point 57 du présent arrêt).

67      En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel, pour le sous-critère d’attribution 6b, l’extrait du rapport d’évaluation se réfère uniquement au MF et non au RTD (voir point 54 ci-dessus), il y a lieu de constater, à l’instar de la requérante, qu’il ressort clairement de la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses » (voir point 62 ci-dessus), que :

–        une note sera attribuée pour le RTD ;

–        une note sera attribuée pour le MF ;

–        pour obtenir l’évaluation générale, les deux notes seront multipliées ;

–        pour obtenir la note générale, le résultat de l’évaluation sera multiplié par un facteur de simplification et arrondi afin d’obtenir 10 points pour le meilleur soumissionnaire.

68      Cela est d’ailleurs confirmé par la Commission en réponse à une question écrite du Tribunal.

69      Le point de désaccord principal entre les parties porte sur la question de savoir si la Commission avait tenu compte non seulement des informations concernant le MF, mais également des informations concernant le RTD pour l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b.

70      Il y a lieu de constater qu’il ressort de la lecture de l’extrait du rapport d’évaluation qui faisait directement référence au sous-critère d’attribution 6b qu’elles ne concernaient effectivement que le MF (voir point 57 ci-dessus). La Commission elle-même l’admet d’ailleurs.

71      Toutefois, la Commission remarque, à cet égard, que cela ne signifierait pas pour autant que le MF était le seul facteur examiné lors de l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b. Elle précise que le RTD était également un facteur examiné lors de l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6a et qu’il y était mentionné que ce facteur serait utilisé lors de l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b.

72      D’une part, il y a lieu de relever qu’il ressort du point 9.6.1 du cahier des charges, concernant le sous-critère d’attribution 6a, que les soumissionnaires devaient garantir les caractéristiques propres à chacune des classes fournies, relative à la latence, au RTD, à la gigue, à la perte de paquets et à la gestion de la bande passante. Il s’ensuit que le RTD faisait déjà partie des paramètres que les soumissionnaires devaient indiquer au regard dudit sous-critère d’attribution.

73      Il y a lieu de relever, à cet égard, que le RTD proposé dans les offres et devant être examiné lors de l’évaluation desdites offres au regard des sous-critères d’attribution 6a et 6b était identique et que les conclusions sur le RTD proposé ont déjà été exposées dans l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6a. Il ressort en effet de l’extrait du rapport d’évaluation concernant l’offre de la requérante que le RTD a été pris en compte dans le cadre de l’évaluation de ladite offre au regard du sous-critère d’attribution 6a en ces termes : « les paramètres de RTD, en particulier étaient très bons » et « [d]es précisions ont été demandées pour avoir une certitude concernant les chiffres de RTD ». Dans ces circonstances, force est de constater que rien ne devrait empêcher le pouvoir adjudicateur dans le rapport d’évaluation de se concentrer dans ses commentaires relatifs à l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b sur le facteur qui n’avait pas encore été évalué, à savoir le MF.

74      D’autre part, il ne saurait être inféré du seul extrait du rapport d’évaluation relatif à l’évaluation des offres au sous-critère d’attribution 6b que l’évaluation du RTD proposé dans les offres a été exclue lors de l’évaluation desdites offres au regard de ce sous-critère d’attribution.

75      En premier lieu, il ressort explicitement du rapport d’examen complémentaire que le RTD a été pris en considération pour l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b. Le fait que ce rapport soit postérieur à la décision d’attribution ne saurait remettre en cause ni la validité ni la fiabilité des commentaires qui y sont formulés. En effet, il y a lieu de rappeler que l’article 171, paragraphe 1, des règles d’application prévoit la possibilité de procéder à un examen complémentaire à la demande expresse des soumissionnaires évincés. Cette disposition deviendrait caduque si tout examen complémentaire de ce type était automatiquement jugé biaisé ou sujet à caution.

76      En second lieu, la Commission a fourni, dans le mémoire en défense, le résultat de l’application de la formule, telle que décrite au point 62 ci-dessus, pour les offres des soumissionnaires au regard du sous-critère d’attribution 6b.

 

RTD ms

MF

Points %

Score RTD

Score MF

Total

Score

Orange

[confidentiel]

[confidentiel]

100

10

10

100

Excellent

[Attributaire]

[confidentiel]

[confidentiel]

85

9

9,5

85,5

Très bien


77      Il ressort du tableau figurant au point 76 ci-dessus que la note obtenue par les offres des soumissionnaires au regard du sous-critère d’attribution 6b a été attribuée en prenant en compte aussi bien le RTD que le MF, conformément à la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses ».

78      En réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission a confirmé que le tableau reproduit au point 76 ci-dessus avait été élaboré au cours de la procédure administrative et avant l’introduction du présent recours.

79      Partant, l’argument de la requérante selon lequel l’extrait du rapport d’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b se réfère uniquement au MF et non au RTD doit être rejeté.

80      En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel la Commission a confirmé lors de la réunion de débriefing qu’elle avait uniquement évalué compte tenu du MF les offres au regard du sous-critère d’attribution 6b (voir point 54 ci-dessus), tout d’abord, il y a lieu de relever que cette affirmation, qui est fondée sur le point 4.6 des notes de réunion prises par ses représentants durant la réunion de débriefing, n’est corroborée par aucun autre document devant le Tribunal, tel que le cahier des charges, le rapport d’évaluation ou le rapport d’évaluation complémentaire.

81      Ensuite, il y a lieu de constater que les notes de réunion prises par les représentants de la requérante durant la réunion de débriefing ont non seulement été élaborées sans que la Commission ait été consultée, mais ont également été formellement rejetées par cette dernière dans sa lettre du 17 juin 2013 en ce que lesdites notes de réunions ne reflétaient pas, en tout état de cause, les informations communiquées durant ladite réunion.

82      Enfin, il y a lieu de remarquer qu’il ressort clairement de la question posée par la requérante, mentionnée au point 4.2 des notes de réunion prises par ses représentants durant la réunion de débriefing, qu’il n’y avait, au moment où ladite réunion s’était tenue, aucun doute sur le fait que les deux facteurs, à savoir le RTD et le MF, avaient été pris en compte lors de l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b. La requérante avait seulement demandé des précisions concernant la méthode d’évaluation.

83      En effet, les notes de réunion prises par les représentants de la requérante durant la réunion de débriefing mentionnent, en leur point 4.2., intitulé « Règles pour l’évaluation technique du RTD et du MF, utilisées pour le [sous-critère d’attribution] 6b », ce qui suit :

« Plus spécifiquement, pour le [sous-critère d’attribution] 6b, [la requérante] a demandé sur la base de quels critères le RTD et le MF étaient évalués.

La Commission a confirmé que le RTD et le MF étaient également évalués sur la base des sept niveaux d’estimation mentionnés dans le tableau ci-dessus. »

84      Partant, l’argument de la requérante selon lequel la Commission a confirmé lors de la réunion de débriefing avoir évalué les offres au regard du sous-critère d’attribution 6b en tenant uniquement compte du MF doit être rejeté.

85      En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel la Commission a confirmé dans le rapport d’examen complémentaire qu’aucune comparaison entre les offres des soumissionnaires n’avait été réalisée au regard du sous-critère d’attribution 6b (voir point 54 ci-dessus), il est certes vrai, comme le souligne la requérante, que le rapport d’examen complémentaire mentionne à la première page qu’« [a]ucune comparaison entre les offres n’a été effectuée, sauf dans le cas des sous-critères [d’attribution] 6c et 6d, demandant les valeurs de différents facteurs de multiplication ». Toutefois, il ne ressort pas pour autant que cette déclaration et la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses » sont contradictoires.

86      La Commission admet, à cet égard, que le rapport d’examen complémentaire indique effectivement que les points accordés aux offres au regard des sous-critères d’attribution 6c et 6d étaient les seuls points qui constituaient le résultat direct et automatique d’une comparaison entre les offres des soumissionnaires. En revanche, pour ce qui est de l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b, elle fait valoir qu’il y avait une comparaison entre les offres des soumissionnaires pour les RTD et les MF proposés et que les notes finales ont été obtenues après l’application d’une formule qui avait été expliquée dans la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses » (voir point 62 ci-dessus).

87      Il ressort du tableau figurant au point 76 ci-dessus que la Commission a effectué une comparaison des offres des différents soumissionnaires au regard du sous-critère d’attribution 6b en prenant en compte tous les éléments, conformément à la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 du document intitulé « Questions et réponses ».

88      Dans ces circonstances, les explications fournies dans le rapport d’examen complémentaire concernant offre de l’attributaire ne font que confirmer cette constatation. En effet, ledit rapport indique, en ce qui concerne le sous-critère d’attribution 6b, que, « pour l’évaluation de la qualité de l’accord de niveau de service concernant les performances du réseau, il a été tenu compte de toutes les exigences susmentionnées, y compris le RTD pour le scénario 2 et le [MF] » et que « [l]e comité d’évaluation a appliqué les règles d’évaluation conformément à la [réponse donnée à la question figurant au point] 1.88 [du document intitulé ‘Questions et réponses’] comme expliqué ci-après ».

89      Partant, l’argument de la requérante selon lequel la Commission a confirmé dans le rapport d’examen complémentaire qu’aucune comparaison entre les offres des soumissionnaires n’avait été réalisée au regard du sous-critère d’attribution 6b doit être rejeté.

90      Par conséquent, il ne ressort pas de l’examen des arguments invoqués à l’appui de la première branche que le cahier des charges a été méconnu en ce qui concerne le sous-critère d’attribution 6b.

91      Néanmoins, il y a lieu de rappeler que la requérante fait également valoir que les notes attribuées aux offres des soumissionnaires au regard du sous-critère d’attribution 6b ne peuvent pas s’expliquer sur la base de la méthode d’évaluation utilisée par le comité d’évaluation. Elle affirme que, en appliquant cette méthode d’évaluation a posteriori, la Commission a manipulé le sous-critère en cause afin de majorer artificiellement la notation obtenue par l’offre de l’attributaire par rapport à celle obtenue par son offre.

92      La Commission soulève que cet argument a été introduit pour la première fois au stade de la réplique.

93      Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que, en vertu de l’article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Toutefois, un moyen qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable. Une solution analogue s’impose pour un grief invoqué au soutien d’un moyen (voir arrêt du 21 mars 2002, Joynson/Commission, T‑231/99, EU:T:2002:84, point 156 et jurisprudence citée). Par ailleurs, les arguments dont la substance présente un lien étroit avec un moyen énoncé dans la requête introductive d’instance ne peuvent être considérés comme des moyens nouveaux et leur présentation est admise au stade de la réplique ou de l’audience (arrêt du 12 septembre 2012, Italie/Commission, T‑394/06, non publié, EU:T:2012:417, point 48).

94      Or, il y a lieu de rappeler que la requérante a déjà fait valoir, dans la requête, ses observations selon lesquelles une application exacte de la méthode d’évaluation lors de l’évaluation des offres au regard du sous-critère d’attribution 6b menait inévitablement à l’attribution à l’offre de l’attributaire d’une note inférieure au seuil minimal de 70 %, aboutissant au rejet de ladite offre. Après que la requérante a pris connaissance du résultat de l’évaluation tel que divulgué par la Commission dans sa défense, son argument selon lequel la méthode d’évaluation utilisée lors de l’évaluation des offres au regard dudit sous-critère d’attribution a été modifiée a posteriori afin de majorer artificiellement la notation obtenue par ladite offre par rapport à la sienne s’est fondé sur le postulat selon lequel les sept niveaux d’appréciation de la « grille de notation » avaient également été utilisés pour obtenir les notes générales des paramètres RTD et MF avant la multiplication de ces notes, ce qui constituait, selon elle, une application incorrecte de la méthode d’évaluation. Cet argument, introduit pour la première fois au stade de la réplique, constitue donc une ampliation de l’argument énoncé antérieurement et qui présente un lien étroit avec celui-ci, au sens de la jurisprudence rappelée au point 93 ci-dessus.

95      Avant de pouvoir examiner le bien-fondé de cette allégation de la requérante, il convient d’observer ce qui suit.

96      Premièrement, il y a lieu de rappeler que le comité d’évaluation a été désigné le 8 novembre 2012 (voir point 7 ci-dessus).

97      Deuxièmement, la Commission a, en réponse à une question écrite du Tribunal, apporté la preuve qu’elle avait décidé d’appliquer la méthode d’évaluation (y compris la grille de notation non linéaire) avant que l’évaluation n’ait lieu.

98      En effet, la Commission a produit l’agenda de la première réunion du comité d’évaluation envoyé par courriel du 6 novembre 2012, la fiche de circulation sur la méthode d’évaluation, datée du 8 novembre 2012, ainsi qu’une copie de la méthode d’évaluation signée par tous les membres du comité d’évaluation lors de la première réunion dudit comité du 12 novembre 2012.

99      Il s’ensuit que la méthode d’évaluation a été déterminée et approuvée par le comité d’évaluation avant le commencement des travaux d’évaluation des offres qui ont été jugées recevables après l’ouverture des offres le 9 novembre 2012.

100    Quant à la détermination d’une méthode d’évaluation par le comité d’évaluation, il y a lieu de relever que ledit comité doit pouvoir disposer d’une certaine liberté dans l’accomplissement de ses tâches. Ainsi, il peut, sans modifier les critères d’attribution du marché établis dans le cahier des charges ou dans l’avis de marché, structurer son propre travail d’examen et d’analyse des offres présentées (arrêt du 21 juillet 2011, Evropaïki Dynamiki/EMSA, C‑252/10 P, non publié, EU:C:2011:512, point 35).

101    La détermination d’une méthode d’évaluation a pour objectif de faciliter l’accomplissement des tâches du comité d’évaluation et de garantir que toutes les offres seront évaluées sur la base des mêmes standards afin d’assurer le traitement égal et équitable de tous les soumissionnaires retenus ou candidats sélectionnés.

102    Deuxièmement, il convient d’examiner la méthode d’évaluation appliquée par la Commission en l’espèce pour apprécier techniquement les offres au regard chaque critère et sous-critère d’attribution. Cette méthode d’évaluation a été communiquée par lettre du 26 avril 2013 à la requérante (voir point 13 ci-dessus).

103    Il en ressort que, au regard de chaque sous-critère d’attribution, chacune des offres a été évaluée et transcrite en une appréciation correspondant à un des sept niveaux d’appréciation figurant ci-après :

 

Niveaux d’appréciation

Pondération correspondante

A

Excellent

1,00

B

Très bien

0,85

C

Bien

0,70

D

Satisfaisant

0,50

E

Passable

0,30

F

Très passable

0,15

G

Insuffisant

0


A Excellent

La proposition du soumissionnaire est très claire et compréhensible. Elle répond aux attentes à tous égards et dépasse les attentes à de nombreux égards. Compréhension excellente et complète de la question. D’importants aspects supplémentaires et pertinents sont présentés et des solutions efficaces sont proposées. En tant que client, vous seriez extrêmement satisfait des services ou solutions proposés.

B Très bien

La proposition du soumissionnaire est très claire et compréhensible. Elle répond aux attentes à tous égards et dépasse les attentes à certains égards. Compréhension très bonne et complète de la question. Plusieurs aspects supplémentaires et pertinents sont présentés et des solutions efficaces sont proposées. En tant que client, vous seriez très satisfait des services ou solutions proposés.

C Bien

La proposition du soumissionnaire est claire et compréhensible. Elle répond aux attentes à tous égards. Bonne compréhension et traitement de la question. En tant que client, vous seriez satisfait de la qualité proposée.

D Satisfaisant

La proposition du soumissionnaire est généralement claire et acceptable. Certains éléments sont inférieurs aux attentes. La plupart des questions semblent être correctement comprises ou traitées. En tant que client, vous seriez en général satisfait de la qualité proposée mais certains aspects nécessitent des améliorations.

E Passable

La proposition du soumissionnaire est insuffisante. De nombreux aspects ne répondent pas aux attentes. De nombreuses questions semblent ne pas être comprises ou traitées. En tant que client, vous n’accepteriez pas certains des services ou solutions proposés.

F Très passable

La proposition du soumissionnaire est très faible et inadéquate. De trop nombreuses questions semblent ne pas être comprises ou traitées. En tant que client, vous n’accepteriez pas de nombreux services ou solutions proposés.

G Insuffisant

La qualité de la proposition du soumissionnaire est inférieure à la norme. La plupart des questions semblent ne pas être comprises ou traitées. En tant que client, vous n’accepteriez pas les services ou solutions proposés.


104    Une offre ayant obtenu une notation devant être transcrite en une appréciation « Bien » au regard de l’ensemble des sous-critères d’attribution atteint la note minimale pondérée de 70 % requise dans le cahier des charges.

105    Premièrement, il y a lieu de rappeler que la note générale au titre du sous-critère d’attribution 6b résulte de la formule suivante, telle que rappelée au point 62 du présent arrêt : [(note RTD) x (note MF)] x facteur de simplification = note générale pour le sous-critère.

106    La note générale ainsi obtenue par chaque offre au regard du sous-critère d’attribution 6b était transcrite en une appréciation correspondant à l’un des sept niveaux d’appréciation visés au point 103 ci-dessus, conformément à la méthode d’évaluation transmise aux soumissionnaires. Le facteur de simplification servait à ramener la note à une échelle de 10.

107    Deuxièmement, contrairement à ce que prétend la requérante, les notes obtenues par les offres compte tenu du RTD et du MF n’ont pas été transcrite en une appréciation correspondant à l’un des sept niveaux d’appréciation visés au point 103 ci-dessus, ce qui est d’ailleurs confirmé par la Commission. À cet égard, cette dernière avance, à juste titre, que l’application desdits niveaux d’appréciation respectivement auxdites notes aurait donné une note mathématiquement incorrecte et aurait créé une distorsion dans l’évaluation technique des offres.

108    Plus précisément, selon le tableau figurant au point 76 ci-dessus, l’évaluation des offres par le comité d’évaluation compte tenu du RTD et du MF ont été chiffrées en points. Ainsi, l’offre contenant le meilleur RTD a obtenu 10 points et celle contentant le RTD le plus bas a obtenu 9 points. Pour ce qui est du MF, le comité d’évaluation a estimé que l’offre contenant le meilleur MF méritait 10 points et celle devant être classée deuxième méritait 9,5. Les chiffres relatifs aux « notes RTD » et « note MF » reflètent donc les appréciations du comité d’évaluation et sont des points attribués au regard du sous-critère d’attribution 6b compte tenu des différents éléments des offres. Seule la multiplication des points « note RTD » et « note MF » débouche sur une note générale obtenue par chaque offre au regard dudit sous-critère d’attribution, laquelle est transcrite en une appréciation correspondant à l’un des sept niveaux d’appréciation visés au point 103 ci-dessus, ce qui est tout à fait conforme à la formule reprise au point 105 ci-dessus.

109    En revanche, s’il convenait de transcrire les points « note RTD » et « note MF » en l’un des sept niveaux d’appréciation visés au point 103 ci-dessus avant la multiplication de ces points, en suivant la méthode préconisée par la requérante, force est de constater que la note générale obtenu par l’offre de l’attributaire au regard du sous-critère d’attribution 6b aurait été 72,25 (correspondant à l’appréciation « Bien ») au lieu de 85,5 (correspondant à l’appréciation « Très bien »), étant donné que la « note RTD » aurait été arrondie à 8,5 (au lieu de 9) et la « note MF » aurait été arrondie à 8,5 (au lieu de 9,5), ce qui aurait créé une distorsion dans l’évaluation des offres.

110    Il s’ensuit de ce qui précède que les sept niveaux d’appréciation visés au point 103 ci-dessus n’ont servi qu’à attribuer une pondération correspondante à chaque offre au regard du sous-critère d’attribution 6b et non à évaluer les différents éléments des offres au regard dudit sous-critère d’attribution. Dès lors, il y a lieu de conclure que les calculs présentés par la requérante dans ses écritures sont erronés et dénués de fondement.

111    En tout état de cause, il y a lieu de constater que la requérante n’apporte aucune preuve à l’appui de son allégation selon laquelle la Commission a manipulé le sous-critère d’attribution 6b a posteriori afin de majorer artificiellement la notation obtenue par l’offre de l’attributaire par rapport à celle obtenue par l’offre de la requérante. En effet, les éléments avancés par la requérante ne permettent pas d’établir que la Commission a poursuivi un but autre que celui d’attribuer le marché au soumissionnaire ayant présenté l’offre économiquement la plus avantageuse compte tenu des critères d’attribution prévus dans le cahier des charges. Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que, selon la jurisprudence, la notion de détournement de pouvoir a une portée précise en droit de l’Union et vise la situation dans laquelle une autorité administrative use de ses pouvoirs dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. À cet égard, une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles invoquées (voir arrêt du 2 octobre 2014, Euro-Link Consultants et European Profiles/Commission, T‑199/12, non publié, EU:T:2014:848, point 103 et jurisprudence citée).

112    En outre, aucun élément n’indique que la méthode d’évaluation n’a pas été appliquée à toutes les offres présentées dans le cadre de la procédure de passation de marché en cause. Partant, la requérante ne saurait soutenir qu’une telle méthode méconnaît le principe d’égalité de traitement.

113    Par conséquent, la première branche du premier moyen doit être rejetée dans son intégralité.

 Sur la deuxième branche, portant sur la communication des critères d’attribution erronés en fait pour les critères d’attribution 6c et 6d, entraînant ainsi l’application de nouveaux critères d’attribution qui n’étaient pas communiqués

114    Dans le cadre d’une deuxième branche, la requérante affirme que la Commission a communiqué des critères d’attribution erronés en fait en ce qui concerne les sous-critères d’attribution 6c et 6d, ce qui a abouti à l’application de critères d’attribution nouveaux non communiqués au préalable aux soumissionnaires. Cet argument se fonde sur les réponses données aux questions figurant aux points 1.89 et 1.90 du document intitulé « Questions et réponses ».

115    La Commission fait valoir que les réponses données aux questions figurant aux points 1.89 et 1.90 du document intitulé « Questions et réponses » n’ont pas donné lieu à l’application de critères d’attribution non communiqués. Elle considère que tous les soumissionnaires se trouvaient dans les mêmes conditions durant la préparation de leurs offres et qu’elle a appliqué uniformément la même méthode d’évaluation à tous les soumissionnaires. Par conséquent, elle estime que les soumissionnaires ont été traités de manière égale, non discriminatoire, et ont eu exactement les mêmes chances lors de la préparation de leur offre.

116    À titre liminaire, il y a lieu de relever que, lorsque l’attribution d’un marché se fait par attribution au soumissionnaire ayant présenté l’offre économiquement la plus avantageuse, conformément à l’article 110, paragraphe 2, du règlement financier ainsi qu’à l’article 149, paragraphe 1, des règles d’application, comme dans le cas d’espèce, le pouvoir adjudicateur doit définir et préciser, dans le cahier des charges, les critères d’attribution permettant l’évaluation du contenu des offres. Ces critères doivent, en outre, conformément au même article, paragraphe 2, être justifiés par l’objet du marché. Selon le paragraphe 3 de cet article, le pouvoir adjudicateur doit aussi préciser, dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges, la pondération relative qu’il confère à chacun des critères choisis pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse. Ces dispositions visent à garantir le respect de l’égalité de traitement et de la transparence au stade de l’évaluation des offres en vue de l’attribution du marché (voir, par analogie, arrêts du 20 septembre 1988, Beentjes, 31/87, EU:C:1988:422, points 21 et 22, et du 12 décembre 2002, Universale-Bau e.a., C‑470/99, EU:C:2002:746, points 90 à 92).

117    Par conséquent, afin de garantir le respect des principes d’égalité de traitement et de transparence, il importe que tous les éléments pris en considération par le pouvoir adjudicateur pour identifier l’offre économiquement la plus avantageuse et si possible leur importance relative soient connus des soumissionnaires potentiels au moment de la préparation de leurs offres (voir, en ce sens, arrêts du 24 novembre 2005, ATI EAC e Viaggi di Maio e.a., C‑331/04, EU:C:2005:718, point 24, et du 24 janvier 2008, Lianakis e.a., C‑532/06, EU:C:2008:40, point 36).

118    Il s’ensuit qu’un pouvoir adjudicateur ne saurait appliquer, pour les critères d’attribution, des sous-critères qu’il n’a pas préalablement portés à la connaissance des soumissionnaires (voir, en ce sens, arrêt du 24 janvier 2008, Lianakis e.a., C‑532/06, EU:C:2008:40, point 38).

119    En l’espèce, dans un premier temps, il convient de rappeler le contenu du sous-critère d’attribution 6c, de la question figurant au point 1.89 du document intitulé « Questions et réponses », de la réponse donnée à cette question figurant au même point et du rapport d’évaluation.

120    Le sous-critère d’attibution 6c prévoit d’évaluer la qualité du respect de la planification du SLA et est décrit au point 9.6.3 du cahier des charges. Aux fins de cette évaluation, les soumissionnaires devaient fournir la valeur du MF dans la formule « [LD = (SQI_ATP_WP# - 0,05) x Coût du chapitre travail (Work Package) x MF) »] où SQI_ATP_WP = (durée réelle – durée planifiée)/durée réelle ».

121    En réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission a expliqué que ce paramètre visait à calculer le montant des dommages-intérêts dus en cas de non-respect de la planification. Elle précise, à cet égard, que plus la valeur MF est élevée, plus le prestataire estime pouvoir fournir à temps un service planifié et plus les dommages-intérêts seront élevés en cas de retard.

122    La question figurant au point 1.89 du document intitulé « Questions et réponses » était formulée comme suit :

« Cette question se rapporte au [sous-critère d’attribution] 6c, [intitulé] “Qualité du respect de la planification SLA”.

Le point 9.6.3 [du cahier des charges] mentionne que nous devons fournir un facteur de multiplication. Pourriez-vous préciser comment vous noterez cette question ? »

123    La réponse donnée à la question figurant au point 1.89 du document intitulé « Questions et réponses » était formulée comme suit :

« Le calcul sera [semblable] à celui décrit au point 1.88 [du document intitulé “Questions et réponses”]. »

124    Selon l’extrait du rapport d’examen complémentaire, « seule la valeur du facteur de multiplication MF a été prise en compte » et « [l]a référence, [figurant au point 1.89 du document intitulé “Questions et réponses”], à la [méthode] expliquée [dans la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 dudit document] est une erreur d’écriture évidente, car les [RTD] ne sont pas applicables à l’évaluation de la qualité du respect de la planification SLA ».

125    Dans un second temps, il convient de rappeler le contenu du sous-critère d’attribution 6d, de la question figurant au point 1.90 du document intitulé « Questions et réponses », de la réponse donnée à cette question figurant au même point, du rapport d’évaluation ainsi que du rapport d’examen complémentaire.

126    Le sous-critère d’attribution 6d prévoit d’évaluer la qualité de la disponibilité des services SLA et est décrit au point 9.6.4 du cahier des charges. Aux fins de cette évaluation, les soumissionnaires devaient fournir la valeur du MF dans la formule « [LD = (0,9985 - SQI_xxxA) x Coût mensuel du service x MF_SQI_xxxA)] où SQI_xxxA = (disponibilité totale escomptée – défaillance totale du service)/disponibilité totale escomptée ».

127    En réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission a expliqué que ce paramètre visait à calculer le montant des dommages-intérêts dus en cas de défaillance de services génériques, tels que les relais de messagerie, l’infrastructure de clés publiques et le point de terminaison du réseau. Elle précise, à cet égard, que ledit paramètre n’a rien à voir avec le RTD. Le paramètre en question ne mesure pas la disponibilité du réseau. En outre, l’évaluation du sous-critère d’attribution 6d était uniquement fondée sur l’appréciation de ce facteur de multiplication.

128    La question figurant au point 1.90 du document intitulé « Questions et réponses » était formulée comme suit :

« Cette question se rapporte au [sous-critère d’attribution] 6d, [intitulé] “Qualité de la disponibilité des services SLA”

Le point 9.6.4 [du cahier des charges] mentionne que nous devons fournir un facteur de multiplication. Pourriez-vous préciser comment vous noterez cette question ? »

129    La réponse à la question figurant au point 1.90 du document intitulé « Questions et réponses » était formulée comme suit :

« Le calcul sera [semblable] à celui décrit au point 1.88 [du document intitulé “Questions et réponses”]. »

130    C’est en tenant compte de ces éléments qu’il convient d’examiner la seconde branche du premier moyen.

131    En premier lieu, il y a lieu de constater qu’il ressort des sous-critères d’attribution 6c et 6d (voir, respectivement, points 120 et 126 ci-dessus) et des réponses données aux questions figurant aux points 1.89 et 1.90 du document intitulé « Questions et réponses » (voir, respectivement, points 123 et 129 ci-dessus) que seul le MF serait évalué d’une manière semblable à celle décrite dans la réponse donnée à la question figurant au point 1.88 dudit document.

132    En deuxième lieu, il résulte clairement, pour tous les soumissionnaires raisonnablement informés et normalement diligents, de la lecture des sous-critères d’attribution 6c et 6d que le RTD ne pourrait être et ne serait pas évalué dans le cadre desdits sous-critères d’attribution, comme le fait valoir la Commission à juste titre. Il importe de souligner, à cet égard, que ce point était à l’évidence clair pour la requérante, étant donné qu’elle n’avait pas fourni la moindre information concernant le RTD dans son offre relative à ces sous-critères d’attribution.

133    En troisième lieu, il ne ressort pas non plus de ce qui précède que la Commission a utilisé des critères d’attribution non communiqués au préalable pour effectuer son évaluation, contrairement à ce que la requérante prétend. Ils ne constituent donc pas de nouveaux critères d’attribution par rapport à ceux contenus dans le cahier des charges.

134    Dans ces conditions, et même en admettant qu’il se soit agi dans les réponses données aux questions figurant aux points 1.89 et 1.90 du document intitulé « Questions et réponses » d’une erreur de plume, comme cela a été avancé par la Commission dans le rapport d’examen complémentaire (voir point 124 ci-dessus), il y a lieu de conclure que tous les soumissionnaires étaient en mesure de comprendre la portée exacte des sous-critères d’attribution 6c et 6d et de les interpréter de la même manière et se trouvaient dès lors dans les mêmes conditions lors de la préparation de leurs offres.

135    Partant, il y a lieu de rejeter la deuxième branche du premier moyen comme non fondée.

 Sur la troisième branche, portant sur l’absence de communication, avant la date limite de réception des offres, de la méthode d’évaluation qui allait être utilisée

136    Dans le cadre d’une troisième branche, d’une part, la requérante prétend que la Commission n’a pas communiqué, avant la date limite de réception des offres, la méthode d’évaluation qu’elle comptait appliquer, privant ainsi les soumissionnaires de la possibilité de prendre cette méthode en compte lors de la préparation de leur offre. D’autre part, elle affirme que la Commission a pu maintenir, par l’application de cette méthode d’évaluation, une note générale de 70,15 % lors de l’évaluation technique de l’offre de l’attributaire, alors qu’une méthode d’évaluation correcte aurait nécessairement eu pour conséquence que ladite offre aurait obtenu une note inférieure à 70 % et aurait été jugée non conforme.

137    La Commission répond qu’elle n’était nullement tenue de communiquer la méthode d’évaluation avant la soumission des offres. En effet, elle serait seulement tenue de communiquer les critères d’attribution applicables et leur pondération relative.

138    En premier lieu, en complément de la jurisprudence citée aux points 116 à 118 ci-dessus, il y a lieu de rappeler que, quant à la question de savoir si le pouvoir adjudicateur était obligé de communiquer, avant la soumission des offres, la méthode d’évaluation, le Tribunal a donné une réponse négative à cette question. En effet, dans son arrêt du 23 novembre 2011, bpost/Commission (T‑514/09, non publié, EU:T:2011:689, point 86), le Tribunal a jugé que le règlement financier n’obligeait pas la Commission à divulguer son système de notation ou sa méthode d’évaluation. De même, une telle obligation ne saurait non plus être tirée des dispositions des règles d’application.

139    Selon la jurisprudence applicable en l’espèce, la Commission était seulement tenue de communiquer les critères d’attribution applicables, les éventuels sous-critères ainsi que leur pondération relative.

140    À cet égard, tout d’abord, il convient d’observer que le point 9 du cahier des charges mentionne les critères d’attribution à utiliser lors de l’évaluation technique des offres, les sous-critères et leur pondération relative. Ensuite, les critères d’attribution à utiliser lors de l’évaluation financière des offres figurent au point 10 du cahier des charges. Enfin, le point 11 du cahier des charges prévoit la formule permettant de déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse.

141    Partant, il y a lieu de constater que, concernant les critères d’attribution applicables, les sous-critères ainsi que leur pondération relative, la Commission n’a pas manqué à ses obligations découlant du règlement financier et des règles d’application.

142    En second lieu, il convient de rappeler que la Cour a précisé qu’un pouvoir adjudicateur ne saurait appliquer des sous-critères pour les critères d’attribution qu’il n’a pas préalablement portés à la connaissance des soumissionnaires (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 24 janvier 2008, Lianakis e.a., C‑532/06, EU:C:2008:40, point 38).

143    Il est, néanmoins, possible pour un pouvoir adjudicateur de déterminer, après l’expiration du délai de présentation des offres, des coefficients de pondération pour les sous-critères d’un critère d’attribution établis au préalable, sous trois conditions, à savoir que cette détermination ex post, en premier lieu, ne modifie pas les critères d’attribution du marché définis dans le cahier des charges ou dans l’avis de marché, en deuxième lieu, ne contienne pas d’éléments qui, s’ils avaient été connus lors de la préparation des offres, auraient pu influencer cette préparation et, en troisième lieu, n’ait pas été adoptée en prenant en compte des éléments susceptibles d’avoir un effet discriminatoire envers l’un des soumissionnaires (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 24 novembre 2005, ATI EAC e Viaggi di Maio e.a., C‑331/04, EU:C:2005:718, point 32).

144    Or, premièrement, il y a lieu de rappeler que, en l’espèce, les critères d’attribution applicables, les sous-critères ainsi que leur pondération relative ont été mentionnés dans le cahier des charges.

145    Deuxièmement, le contenu des critères d’attribution et les sous-critères ainsi que leur pondération relative ne sont pas davantage affectés par la méthode d’évaluation utilisée par le comité d’évaluation. Le seuil minimal pour chaque critère d’attribution et chaque sous-critère reste identique (à savoir 50 % du maximum des points pour chaque critère) tout comme la note maximale qui peut être attribuée pour chaque critère d’attribution. En effet, il y a lieu d’observer, à cet égard, que l’application, en l’espèce, d’une méthode d’évaluation linéaire aurait pu avoir pour conséquence qu’une offre qui aurait obtenu une notation devant être transcrite en l’appréciation « Bien », ce qui signifiait qu’elle remplissait toutes les exigences techniques telles que décrites dans le cahier des charges et était d’une qualité satisfaisante, n’obtiendrait qu’une note de 66,70 % alors qu’un minimum de 70 % était requis et n’aurait dès lors pas passé le stade de l’évaluation technique. Le tableau ci-après, qui démontre que la méthode d’évaluation en cause ne fausse pas la pondération relative des critères d’attribution et produit des résultats conformes aux critères énoncés dans le cahier des charges, présente une comparaison entre les notes utilisées dans le cadre de la méthode d’évaluation à laquelle la Commission a eu recours et les notes qui auraient été appliquées si un système de notation linéaire avait été utilisé :

 

Méthode non linéaire utilisée par la Commission

Méthode linéaire

Excellent

1,00

1,00

Très bien

0,85

0,833

Bien

0,70

0,667

Passable

0,50

0,500

Médiocre

0,30

0,333

Très médiocre

0,15

0,167

Insuffisant

0

0


146    Troisièmement, contrairement à ce que prétend la requérante, la méthode d’évaluation n’a pas d’incidence sur la préparation des offres. Il y a lieu de souligner, à cet égard, que le cahier des charges énonce, au point 4.2.2, que « la proposition technique doit répondre aux spécifications techniques […] et fournir, au minimum, toutes les informations nécessaires aux fins de la passation de marché ». L’exigence de conformité est absolue et les offres qui ne satisfont pas aux exigences techniques essentielles minimales telles que décrites dans le cahier des charge doivent être éliminées. Quant aux sept niveaux d’appréciation visés au point 103 ci-dessus, ils portent sur la qualité de la solution proposée par chacune des offres au regard de chaque sous-critère, en faisant référence au traitement de la question et au niveau de détail présenté (voir point 4.2.2 du cahier des charges).

147    Quatrièmement, aucun élément du dossier n’indique que la méthode d’évaluation, qui a été élaborée et approuvée avant le début de la procédure d’évaluation (voir point 99 ci-dessus), n’a pas été appliquée de manière uniforme et non discriminatoire à toutes les offres.

148    Force est de constater que la requérante se limite à des affirmations générales, non étayées et non corroborées par un quelconque élément probant. En effet, il ressort de tout ce qui précède que, tout d’abord, les critères d’attribution applicables, les sous-critères ainsi que leur pondération relative ont été communiqués à tous les soumissionnaires, ensuite, ces critères étaient suffisamment clairs et précis pour permettre aux soumissionnaires de préparer leurs offres et de permettre à la Commission d’évaluer la qualité des offres au regard desdits critères d’attribution et sous-critères, enfin, les offres de tous les soumissionnaires ont été évaluées au regard de ces critères d’attribution et sous-critères de manière uniforme et non discriminatoire afin d’exclure tout favoritisme ou toute décision arbitraire.

149    Il convient, dès lors, de conclure que l’argumentation de la requérante ne saurait fonder la troisième branche du premier moyen.

150    Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier, en ce que l’offre de l’attributaire n’était pas conforme aux exigences techniques

151    La requérante fait valoir, en substance, que la Commission a violé l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier et, en particulier, les principes de transparence, d’égalité et de non-discrimination consacrés par cette disposition, en déclarant l’offre de l’attributaire conforme au cahier des charges, ce qui invaliderait la décision de la Commission constatant que l’offre de l’attributaire était l’offre économiquement la plus avantageuse.

152    Ce moyen s’articule en deux branches. La première branche porte sur la prétendue non-conformité de l’offre de l’attributaire aux exigences techniques énoncées dans le cahier des charges. La seconde branche porte sur l’incompatibilité entre les modalités du cahier des charges et la manière selon laquelle elles ont été appliquées.

 Sur la première branche, portant sur la prétendue non-conformité de l’offre de l’attributaire aux exigences techniques énoncées dans le cahier des charges

153    Dans le cadre de la première branche, la requérante conteste, en substance, la validité des appréciations faites par le comité d’évaluation au regard des sous-critères d’attribution 3e, 4a, 4d, 5c et 5e dans le rapport d’évaluation concernant l’offre retenue. Elle estime que ledit comité a violé l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier et, en particulier, les principes de transparence, d’égalité et de non-discrimination consacrés par cette disposition.

154    La Commission rétorque que l’offre de l’attributaire était conforme à toutes les exigences techniques prescrites. Partant, elle n’aurait enfreint ni le règlement financier, ni les règles d’application, ni les principes de transparence, d’égalité de traitement et de non-discrimination.

155    Selon la requérante, le cahier des charges identifie un certain nombre d’éléments, parmi les spécifications techniques décrites dans la partie II du cahier des charges, que le futur contractant doit obligatoirement respecter au regard des spécifications de l’offre, et les désigne comme étant obligatoires ou interdits. Il résulterait de la terminologie employée dans le cahier des charges et dans le document intitulé « Questions et réponses » que la conformité à un certain nombre de spécifications était obligatoire. Il s’ensuit, selon elle, que la Commission avait l’obligation de vérifier la conformité aux exigences techniques du cahier des charges et d’« exclure » les offres des soumissionnaires qui ne respectaient pas ces exigences.

156    À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’exigence de conformité est absolue et que l’offre qui ne contient pas tous les éléments essentiels exigés dans les documents d’appels d’offres est éliminée (voir point 146 ci-dessus).

157    En effet, il ressort clairement du point 4.2.2 du cahier des charges que « la proposition technique doit répondre aux spécifications techniques exposées ci-dessous et fournir, au minimum, toutes les informations nécessaires aux fins de la passation de marché ». Il est précisé au même point du cahier des charges que « le niveau de détail de l’offre sera extrêmement important pour l’évaluation de l’offre ».

158    De surcroît, les exigences techniques portaient sur les services transeuropéens pour la télématique entre administrations et pouvaient être satisfaites par différents moyens techniques qui ne comprenaient pas nécessairement les mêmes dispositifs et logiciels. En outre, l’appel d’offres encourageait la concurrence en matière technique et incitait les concurrents à proposer une solution innovante allant au-delà des exigences minimales, ce qui permettait aux soumissionnaires d’obtenir davantage de points.

159    Le comité d’évaluation devait examiner les offres au regard de chacun des six critères d’attribution ainsi que des sous-critères. Cet examen supposait avant tout que chacune des parties des offres soit formellement, mais aussi substantiellement, consacrée à chacun desdits critères. Si une offre répondait à cette exigence minimale, ledit comité lui accorderait alors un certain nombre de points.

160    En effet, le respect du principe d’égalité de traitement des soumissionnaires exige que toutes les offres soient conformes aux prescriptions du cahier des charges afin de garantir une comparaison objective entre les offres soumises par les différents soumissionnaires (voir, par analogie, arrêts du 22 juin 1993, Commission/Danemark, C‑243/89, EU:C:1993:257, point 37, et du 25 avril 1996, Commission/Belgique, C‑87/94, EU:C:1996:161, point 70).

161    À titre liminaire, il convient d’observer que le représentant de la requérante a consulté au greffe du Tribunal des extraits de la version intégrale du rapport d’examen complémentaire concernant l’offre de l’attributaire relatifs aux sous-critères d’attribution 3e, 4a, 4d, 5c et 5e. Lors de l’audience, il a indiqué, en réponse à une question du Tribunal à cet égard, que la consultation desdits extraits ne lui était pas indispensable pour présenter et étayer ses arguments, de sorte qu’aucune atteinte n’a été portée aux droits de la défense de la requérante.

–       Sur le sous-critère d’attribution 3e, intitulé « Qualité de la sécurité physique du centre de sécurité et des opérations »

162    La requérante avance que l’offre de l’attributaire n’était pas conforme aux exigences énoncées à l’annexe 1 et à l’annexe 10, chapitre 3, du cahier des charges concernant la sécurité physique du centre de sécurité et des opérations (ci-après le « SOC »).

163    Le sous-critère d’attribution 3e prévoit d’évaluer la qualité de la sécurité physique du SOC. Le cahier des charges expose, en son point 9.3, que, au regard de ce sous-critère d’attribution, chacune des offres sera évaluée en tenant compte des exigences énoncées à l’annexe 1 et à l’annexe 10, chapitre 3, du cahier des charges. Il ajoute également qu’une visite du site aura lieu afin de vérifier l’aménagement et la conformité des locaux ou, si elle n’était pas disponible au moment de la soumission de l’offre, la faisabilité de la solution proposée pour rendre l’offre conforme, notamment, aux exigences énumérées au chapitre 3 de son annexe 10.

164    L’extrait du rapport d’évaluation concernant l’offre de l’attributaire énonce que « [ce dernier] a donné une description approfondie des mesures de sécurité en place », mais que « la visite du site du SOC (données occultées) » et que, « [d]ès lors, la qualité de la sécurité physique a été évaluée comme satisfaisante ».

165    Il y a lieu de constater, premièrement, que le comité d’évaluation a confirmé que l’offre de l’attributaire était conforme aux exigences prescrites et acceptable en termes de qualité et, deuxièmement, qu’il a constaté, lors de la visite sur place, une anomalie qui a conduit à octroyer à ladite offre une notation devant être transcrite en l’appréciation « Satisfaisant ».

166    Le rapport d’examen complémentaire énonce, à cet égard, que, « en ce qui concerne la sécurité physique du SOC, [l’attributaire] a donné une description approfondie des mesures mises en place », que « [d]urant la visite sur site, l’équipe chargée de cette visite a remarqué qu’un niveau de sécurité particulier (données occultées) pouvait être amélioré », que « [d]es mesures de sécurité supplémentaires étaient présentes (données occultées) » et que « [l]e comité d’évaluation confirme une notation [devant être transcrite en l’appréciation] “Satisfaisant” basée sur le fait que la proposition, qui [était] conforme aux exigences et acceptable en termes de qualité, [pouvait] être améliorée comme mentionné ci-dessus ».

167    La Commission soutient, à cet égard, que la référence contenue dans le rapport d’évaluation concernant l’offre de l’attributaire à la marge d’amélioration présente dans le domaine de la sécurité physique implique que certains aspects de l’offre de l’attributaire n’excédaient pas ses attentes, ladite offre ne pouvant dès lors atteindre le niveau plus élevé qui y était afférent. Néanmoins, elle considère que l’offre de l’attributaire satisfaisait aux exigences minimales du cahier des charges, ce qui a conduit à lui attribuer une notation devant être transcrite en l’appréciation « Satisfaisant ».

168    Il ressort du rapport d’examen complémentaire que le comité d’évaluation a confirmé que l’attributaire avait non seulement donné une description approfondie des mesures de sécurité mises en place, mais également expliqué en quoi consistait l’anomalie observée lors de la visite sur place. En fait, ledit comité a constaté qu’un niveau de sécurité particulier pouvait être amélioré, mais que les mesures de sécurité supplémentaires étaient présentes. En d’autres termes, toutes les exigences du cahier des charges et plus précisément celles figurant dans les annexes 1 et 10 de celui-ci étaient remplies, bien que, le jour de la visite des lieux, certaines mesures de sécurité en place n’aient pas été mises en œuvre.

169    Partant, il y a lieu de rejeter les allégations avancées par la requérante concernant la non-conformité de l’offre de l’attributaire au regard du sous-critère d’attribution 3e.

–       Sur le sous-critère d’attribution 4a, intitulé « Qualité des solutions de cryptage (eurodomain, SIS II et VIS) »

170    La requérante avance trois arguments à l’appui de son affirmation selon laquelle l’offre de l’attributaire a obtenu une notation devant être transcrite en l’appréciation « Bien », alors que la solution proposée n’était pas « conforme ».

171    Premièrement, selon la requérante, les boîtiers de cryptage « SINA » proposés par l’attributaire ne pouvaient fournir un service conforme aux exigences du cahier des charges étant donné qu’un autre dispositif, tel qu’un pare-feu, était nécessaire pour assurer le relais entre les sites principaux et qu’il n’apparaissait pas clairement que l’attributaire avait assuré correctement le mécanisme de relais, notamment sur les sites ne disposant pas de pare-feu « SIS/VIS ».

172    Le sous-critère d’attribution 4a prévoit d’évaluer la qualité des solutions de cryptage (eurodomain, SIS II et VIS). L’exigence technique s’y rapportant est mentionnée au point 9.4 du cahier des charges, intitulé « qualité du service de sécurité spécifique », qui se lit comme suit :

« Il est demandé au soumissionnaire de :

–        présenter une description de la solution de cryptage des réseaux à distance d’eurodomain, SIS II et VIS et décrire la conformité à :

–        EAL4+

–        Conditions essentielles [et] en matière d’algorithme

–        Exigences générales en matière de sécurité du réseau à l’égard de la topologie (démontrer comment la gestion et le contrôle de la connexion et les équipements de sécurité sont exploités par les différents centres de service)

–        Procédure de gestion essentielle (cycle de vie complet, création, distribution, révocation, récupération, destruction). »

173    L’extrait du rapport d’évaluation concernant l’offre de l’attributaire énonce ce qui suit :

« L’offre de [l’attributaire] est présentée dans un très grand détail dans la section II-4.

Pour le chiffrement de l’information non classifiée, les propositions (données occultées) sont certifiées par le BSI allemand pour une utilisation dans des environnements classés au niveau de classification équivalent allemand de “restreint UE”. Le (données occultées). (données occultées). Le (données occultées).

Pour ICUE [Information classifiée de l’Union européenne], [l’attributaire] a proposé la (données occultées). (données occultées). [il] a également souligné la conformité à (données occultées) certification. La version commerciale de (données occultées) est actuellement utilisée pour crypter le trafic s-TESTA non-ICUE.

L’offre concernant les dispositifs de cryptage gérés proposés est détaillée, tandis que les boîtiers de cryptage non gérés (SIS/VIS) sont très brièvement expliqués.

La proposition répond aux exigences demandées et a été évaluée “Bien” ».

174    Tout d’abord, il y a lieu d’observer que, selon la Commission, l’argument de la requérante se fonde sur l’hypothèse erronée selon laquelle l’attributaire a proposé les boîtiers « SINA » en tant que dispositifs de cryptage non classifiés. Elle soutient, à cet égard, que la référence à l’équipement « certifié par le BSI allemand » figurant dans le rapport d’évaluation se rapporte à un autre dispositif de cryptage d’une autre marque, proposé pour le cryptage d’informations non classifiées.

175    Ensuite, il convient d’observer que la requérante n’explique pas clairement dans quelle mesure l’attributaire n’a pas fourni de solution conforme en proposant les boîtiers « SINA ». En outre, à l’instar de la Commission, il y a lieu de remarquer que le cahier des charges n’interdit pas une proposition combinant les dispositifs de cryptage proposés avec un matériel ou un pare-feu supplémentaire.

176    Enfin, force est de constater que les explications présentées devant le Tribunal par la Commission sont convaincantes. En effet, d’après la Commission, les solutions de cryptage fournies par l’attributaire présentaient des fonctionnalités de routage dynamique et aucun autre dispositif, tel qu’un pare-feu, n’était requis à l’arrière des dispositifs de cryptage pour assurer le mécanisme de liaison. Elle a précisé, en outre, que cette solution pourrait également être mise en œuvre pour les sites « SIS II/VIS » (dépourvus de pare-feu). Il y a lieu d’observer que la requérante n’a fourni aucun élément sérieux visant à remettre en cause ces explications.

177    Deuxièmement, la requérante fait valoir que, dans le rapport d’évaluation, il n’est pas fait mention du mécanisme de liaison des dispositifs non classifiés et classifiés malgré le fait que les réponses données aux questions figurant aux points 1.10 et 1.11 du document intitulé « Questions et réponses » indiquaient qu’il devait s’agir d’un élément important dans l’évaluation. Par conséquent, la Commission n’aurait pas démontré que l’offre de l’attributaire était « conforme » à cet égard.

178    Il y a lieu de considérer, à l’instar de la Commission, que l’absence d’un commentaire concernant les capacités de routage et de repli des dispositifs de cryptage proposées par l’attributaire dans le rapport d’évaluation ne signifie pas automatiquement que l’offre n’était pas « conforme ».

179    En tout état de cause, il y a lieu de constater qu’il ressort du point 7.2.1.2 du cahier des charges, intitulé « Dispositifs de cryptages approuvés ICUE », qu’un dispositif de cryptage certifié pour le traitement de documents « Restreint UE » ne sera exigé qu’en cas d’accréditation d’une application recourant à TESTA-ng. Le cahier des charges ne prévoit à aucun endroit de la description des sept scénarios de mise en œuvre envisagés que des dispositifs de cryptage classifiés (approuvés « ICUE ») doivent être déployés sur le réseau par le futur contractant. Cela est confirmé par la réponse donnée à la question figurant au point 1.71 du document intitulé « Questions et réponses » et réitéré dans la réponse donnée à la question figurant au point 1.122 dudit document.

180    En outre, il ressort du point 7.2.1.2 du cahier des charges que l’exigence pour l’appréciation du sous-critère d’attribution 4a en ce qui concerne les services de cryptage classifiés gérés et classifiés non gérés prévoit uniquement que les dispositifs proposés doivent figurer dans la liste de dispositifs cryptographiques agréés « ICUE ».

181    À cet égard, il y a lieu d’observer que la Commission a confirmé, lors de l’audience, que le boîtier « SINA » proposé par l’attributaire figurait sur la liste de dispositifs cryptographiques agréés « ICUE », à la date de la soumission des offres, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

182    Par conséquent, les solutions de cryptage pour le trafic classifié et non classifié répondent aux exigences du cahier des charges, de sorte que l’offre de l’attributaire ne devait être assortie d’aucune condition, contrairement à ce qu’affirme la requérante.

183    Troisièmement, la requérante prétend qu’il résulte du rapport d’évaluation que les boîtiers de cryptage non gérés (SIS II/VIS) n’ont été que brièvement expliqués. Elle en déduit que la solution non gérée n’est pas « conforme » aux critères du cahier des charges.

184    La Commission fait valoir que les dispositifs de cryptage pour les services gérés et non gérés (c’est-à-dire aux endroits du « SIS II/VIS ») sont identiques. Elle précise que la remarque du comité d’évaluation concernant les services non gérés a seulement mis en évidence l’absence d’explication détaillée au sujet du mode de gestion (installation, maintenance) des dispositifs de cryptage non gérés.

185    Il y a lieu d’observer, à cet égard, que le fait que l’attributaire n’a décrit que brièvement les dispositifs de cryptage non gérés, à savoir ceux situés aux emplacements de « SIS II/VIS », n’implique pas que les solutions proposées n’étaient pas conformes aux exigences techniques du cahier des charges.

186    Partant, il y a lieu de rejeter les arguments de la requérante concernant la non-conformité de l’offre de l’attributaire au regard du sous-critère d’attribution 4a, étant donné qu’ils résultent de déductions incertaines et non étayées par des éléments de preuve.

–       Sur le sous-critère d’attribution 4d, intitulé « Qualité du service de détection/prévention des intrusions proposé »

187    La requérante avance que l’offre de l’attributaire a obtenu une notation devant être transcrite en l’appréciation « Satisfaisant », alors que la solution proposée n’était pas conforme à au moins deux exigences techniques au regard du sous-critère d’attribution 4d, étant donné que le système de détection/prévention d’intrusion (ci-après l’« IDS/IPS ») et les fonctions de pare-feu étaient combinés dans un boîtier et que l’aspect spécifique de la séparation des fonctions n’était pas expliqué dans ladite offre, contrairement à ce qui avait été exigé dans le cahier des charges et confirmé par les réponses données aux questions figurant aux points 1.33 et 3.10 du document intitulé « Questions et réponses ». Elle ajoute qu’une solution à deux boîtiers, telle qu’elle l’a proposée, est plus onéreuse qu’une solution à un boîtier, telle que proposée par l’attributaire.

188    Le sous-critère d’attribution 4d vise la « qualité du service de détection/prévention des intrusions proposé ». L’exigence technique s’y rapportant est mentionnée au point 9.4 du cahier des charges, intitulé « Qualité du service de sécurité spécifique », qui se lit comme suit :

« Il est demandé au soumissionnaire de :

–        présenter une description de la solution de détection/prévention des intrusions pour le réseau à distance eurodomain, SIS II et VIS et décrire sa conformité :

–        aux exigences de sécurité générales du réseau à l’égard de la topologie (démontrer comment la gestion et le contrôle de la connexion et des dispositifs de sécurité sont effectuées par les différents centres de service)

–        à la détection des événements, corrélation et réponse

–        le soumissionnaire fournissant une description tant pour les solutions préventives de détection des intrusions gérées que non gérées. »

189    L’extrait du rapport d’évaluation concernant l’offre de l’attributaire énonce :

« [L’attributaire] décrit l’utilisation de (données occultées). La coopération entre les (données occultées) et (données occultées) est soutenue par une approche basée sur un fournisseur unique.

L’IDS est considéré comme un élément rajouté (add-on) sur le système de pare-feu. Toutefois, (données occultées). (données occultées) séparation des fonctions en rapport avec la gestion des systèmes de sécurité. Cet aspect spécifique de la séparation des fonctions n’a pas été expliqué dans l’offre.

Par conséquent, pour assurer la pleine conformité avec le contenu de l’appel d’offres, des améliorations peuvent être apportées (données occultées). Le service IDS géré comprend (données occultées) par communauté. L’offre de [l’attributaire] explique que le (données occultées) “non géré” est équivalent au service géré excluant la dimension de gestion.

La section décrit également les responsabilités de [l’attributaire] brièvement liées à la livraison, l’installation, la configuration, les tests, l’acceptation et la maintenance ainsi que la formation et du transfert aux administrateurs du système communautaire. Toutefois, le service IDS non géré n’est pas décrit en détail.

La proposition peut être améliorée et a été évaluée “Satisfaisant”. »

190    L’extrait du rapport d’examen complémentaire énonce ce qui suit :

« La solution de [l’attributaire] concernant l’IDS/IPS et les fonctions de pare-feu est basée sur des équipements matériels séparés. Elle est dès lors conforme à l’exigence technique. Plus précisément, la configuration des dispositifs séparés (données occultées).

Toutefois, l’aspect de gestion ne répondait pas aux attentes. Bien que formellement conforme, une amélioration reste possible en ce qui concerne la description de la mise en œuvre de la gestion de l’IDS pour répondre aux attentes dans ce domaine.

En dehors de cet aspect, la solution proposée est dans l’ensemble acceptable en termes de qualité. Par conséquent, la notation [devant être transcrite en l’appréciation “Satisfaisant”] est confirmée. »

191    En premier lieu, en ce qui concerne l’allégation de la requérante selon laquelle l’IDS/IPS et les fonctions de pare-feu étaient combinées dans un boîtier, il y a lieu de relever que, selon la réponse donnée à la question 1.33 du document intitulé « Questions et réponses », il n’est pas permis de combiner la détection des intrusions d’un protocole internet (ci-après l’« IP ») avec le pare-feu dans un boîtier.

192    En outre, la réponse donnée à la question figurant au point 3.10 du document intitulé « Questions et réponses », relative à la confirmation que les capacités en matière d’IDS/IPS et de pare-feu ne peuvent pas être combinées dans un boîtier, se lit comme suit : « Oui, elles ne sauraient être combinées. »

193    La requérante prétend qu’il ressort du rapport d’évaluation, notamment du passage selon lequel l’IDS est considéré comme un composant rapporté sur le système de pare-feu » que la solution proposée par l’attributaire combine les capacités en matière d’IDS/IPS et de pare-feu dans un seul boîtier.

194    Il y a lieu de remarquer, à cet égard, que le comité d’évaluation a précisé dans le rapport d’examen complémentaire que « la solution de [l’attributaire] concernant l’IDS/IPS et les capacités en matière de pare-feu [était] fondée sur des périphériques matériels distincts ».

195    À première vue, une discordance entre le rapport d’évaluation et le rapport d’examen complémentaire pourrait ressortir. En effet, la question est de savoir si un élément rajouté au-dessus du système de pare-feu est un équipement séparé dudit système ou non.

196    La Commission fait valoir que, même si l’« IDS est considéré comme un élément rajouté », il sera mis en œuvre au moyen d’un dispositif séparé, ce qui est confirmé dans le rapport d’examen complémentaire.

197    En réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission confirme que la solution de l’attributaire concernant l’IDS/IPS ne consiste pas en un seul boîtier, mais repose, comme l’exige le cahier des charges, sur deux dispositifs distincts. À l’appui de sa réponse, elle se réfère à l’extrait de l’offre de l’attributaire, reproduit dans le cadre de la duplique, selon lequel :

« [L]a solution telle que conçue par [l’attributaire] intègre une approche hybride de service pare-feu dédié, complété par un service de dispositif de cryptage et de dispositif IDS/IPS. Cette configuration en dispositifs séparés suit la stratégie de sécurité et de défense en niveaux mise en œuvre pour retirer le “boîtier unique” chargé de l’intégralité de la configuration. Chaque dispositif met en place une protection de la sécurité optimale en fonction de ses propres fonctionnalités de sécurité, c’est-à-dire pare-feu dynamique, détection et prévention de trafic hostile IDS/IPS, dispositif de cryptage supprimant du texte lisible en recourant au niveau le plus élevé de mécanismes de cryptage algorithmique. »

198    Il ressort de cette explication que la fonctionnalité IDS/IPS est fournie sur un dispositif séparé et que l’offre de l’attributaire est donc en conformité avec les exigences du cahier des charges.

199    En second lieu, en ce qui concerne l’allégation de la requérante selon laquelle l’aspect spécifique de la séparation des fonctions n’était pas expliqué dans l’offre de l’attributaire, il y a lieu de de relever que, selon le point 7.2.3, intitulé « Détection/prévention des intrusions IP du TESTA-ng », la solution proposée doit être conforme aux exigences de sécurité minimales décrites à l’annexe 1 du cahier des charges.

200    Selon la requérante, il ressort de l’annexe 1 du cahier des charges que la séparation des tâches est une exigence claire. Elle estime que l’absence de description laisse entendre que l’attributaire n’a pas fourni deux boîtiers physiques en ce qui concerne l’IDS/IPS et le pare-feu, puisque, techniquement, avoir deux boîtiers séparés pour l’IDS/IPS et le pare-feu n’a aucun sens s’il n’y a pas de séparation des fonctions concernant la gestion des systèmes de sécurité.

201    Il y a lieu de rappeler que le simple fait qu’une description complète de la séparation des fonctions concernant la gestion des systèmes de sécurité ne soit pas fournie ne signifie pas que l’offre de l’attributaire est non conforme aux exigences du cahier des charges. Cela signifie seulement que la présence de plus amples détails aurait pu faire augmenter la note attribuée à ladite offre (voir points 157 et 158 ci-dessus).

202    Partant, il y a lieu de rejeter les allégations avancées par la requérante concernant la non-conformité de l’offre de l’attributaire au regard du sous-critère d’attribution 4d.

–       Sur le sous-critère d’attribution 5c, intitulé « Qualité de la surveillance du rack »

203    La requérante avance que l’offre de l’attributaire a obtenu une notation devant être transcrite en l’appréciation « Satisfaisant », alors que la solution proposée ne répondait pas aux exigences du cahier des charges. Premièrement, ladite offre ne répondrait pas aux mesures de durcissement de baie (ci-après le « rack ») qui ne semble pas être un modèle robuste. Deuxièmement, l’attributaire n’aurait pas fourni d’informations sur le nombre de détecteurs, sur les événements et sur l’enregistrement local des événements.

204    Le sous-critère d’attribution 5c prévoit d’évaluer la qualité de la surveillance du rack. L’exigence technique s’y rapportant est mentionnée au point 9.5 du cahier des charges, intitulé « Qualité de TAP résistant et connexion fédératrice », qui se lit comme suit :

« Réf § 7.1.6 : Expliquer comment le rack sécurisé, tant à la disposition du client que du fournisseur, sera contrôlé de manière centralisée, sécurisée et contrôlée. Le soumissionnaire fournit une description pour la sécurité du support (rack) gérée comme non gérée. »

205    L’extrait du rapport d’évaluation concernant l’offre de l’attributaire énonce :

« [L]a description du système de surveillance et de contrôle du rack est incomplète et prête à confusion.

Le rack proposé est un produit de (données occultées).

Des mesures de durcissement supplémentaires ne sont pas décrites (données occultées). De plus amples détails concernant le type et le nombre de détecteurs, les événements et l’enregistrement local des événements ne sont pas décrits dans la proposition.

La qualité de la surveillance du rack a été jugée “Satisfaisant” ».

206    L’extrait du rapport d’examen complémentaire se lit comme suit :

« [L’attributaire] présente une description succincte des mesures prévues pour surveiller, sécuriser et contrôler un rack sécurisé. En ce qui concerne cet aspect, la proposition est généralement claire et acceptable.

Cependant, en dépit du fait que toutes les exigences sont correctement comprises et que les mesures requises sont assurées, le comité d’évaluation considère que la description de la façon dont certaines mesures sont mises en œuvre est incomplète (par exemple, la surveillance du flux du trafic du rack était expliquée dans un diagramme mais pas détaillée dans le texte, d’où une confusion) et que certains aspects sont par conséquent susceptibles d’amélioration. Il y a lieu de noter que ce flux de trafic prêtant à confusion n’a pas d’impact sur la solution globale qui est acceptable en tout état de cause.

La notation [devant être transcrite en l’appréciation] “Satisfaisant” est confirmée après l’examen complémentaire de l’offre. »

207    Il ressort du rapport d’évaluation et du rapport d’examen complémentaire que l’offre de l’attributaire satisfaisait aux exigences prescrites par le cahier des charges et que la présence de plus amples détails, notamment concernant la surveillance du flux du trafic du rack ainsi que le type et le nombre de détecteurs, les événements et l’enregistrement local des événements, auraient pu augmenter la note attribuée à ladite offre. Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que le niveau de détail était extrêmement important pour l’évaluation des offres (voir points 157 et 158 ci-dessus).

208    Partant, il y a lieu de rejeter les allégations avancées par la requérante concernant la non-conformité de l’offre de l’attributaire au regard du sous-critère d’attribution 5c.

–       Sur le sous-critère d’attribution 5e, intitulé « Qualité de l’intégration IPv6 »

209    La requérante allègue que la description de la solution proposée par l’attributaire mérite une notation devant être transcrite en l’appréciation « Très passable » et non en l’appréciation « Satisfaisant » et qu’il en résulte donc que l’offre de l’attributaire n’était pas « conforme ». Elle considère que, à cause de la « non-conformité » de ladite offre, l’attributaire était en mesure de présenter une offre à un prix extrêmement bas.

210    Le sous-critère d’attribution 5e prévoit d’évaluer la qualité de l’intégration en format protocole Internet version 6 (ci-après l’ « IPv6 »). L’exigence technique s’y rapportant est mentionnée au point 9.5 du cahier des charges, intitulé « Qualité de TAP résistant et connexion fédératrice », lequel se lit comme suit :

« Réf § 7.1.9 : Fournir une solution pour un nuage consacré aux éventuelles connexions IPv6 pures en mettant particulièrement en exergue le mécanisme de passerelle à utiliser pour intégrer le nuage IPv4 ».

211    Il s’ensuit que deux exigences techniques peuvent être identifiées dans le cahier des charges : d’une part, la capacité à fournir une solution pour un nuage consacré aux éventuelles connexions IPv6 pures et, d’autre part, la capacité à fournir un mécanisme de liaison à utiliser pour intégrer le nuage en format protocole Internet version 4 (ci-après l’« IPv4 »).

212    L’extrait du rapport d’évaluation concernant l’offre de l’attributaire énonce :

« [L’attributaire] soutient que le soutien IPv6 sera disponible sur un réseau distinct à distance. L’intégration entre les IPv6 et IPv4 à distance est fondée sur une approche en double pile (dual stack), qui n’est pas perçue comme étant une solution viable pour le réseau sTESTA. De plus, la description d’un mécanisme de liaison était très passable. Les données de la feuille de route du soutien IPv6 au niveau du TAP étaient également insuffisantes.

La qualité de la mise en œuvre IPV6 proposée a été évaluée “Satisfaisant”. »

213    L’extrait du rapport d’examen complémentaire énonce :

« Le réseau de [l’attributaire] soutient pleinement IPv6 dans tous les éléments requis et l’architecture proposée est acceptable.

Cependant, pour certains aspects, notamment le mécanisme de liaison, la description fournie fondée sur l’approche en double pile (dual stack) était inférieure aux attentes, car cette option n’est pas viable dans les cas où un mécanisme de traduction IPv6/IPv4 est requis (la Commission européenne ne contrôle pas les nœuds clients et, par conséquent, il ne peut dès lors être considéré que, du côté client, l’approche en double pile puisse être mise en œuvre). L’absence de description de cette traduction a conduit à la notation [devant être transcrite en l’appréciation] “Satisfaisant”.

Il est à noter que ces mécanismes sont pleinement supportés par les dispositifs proposés par [l’attributaire] et que la solution est conforme aux exigences de l’appel d’offres. Le comité d’évaluation confirme l’évaluation “Satisfaisant”. »

214    La Commission explique que la solution proposée par l’attributaire pour la mise en œuvre de l’IPv6 était une approche fondée essentiellement sur l’assistance logicielle permettant de supporter simultanément les formats IPv4 et IPv6, afin d’assurer la coexistence à long terme escomptée de l’IPv4 et l’IPv6. Pour certains aspects, principalement le mécanisme de liaison, la description fournie, fondée sur l’approche en double pile, ne répondait pas, selon elle, aux attentes parce qu’il ne s’agissait pas d’une option viable lorsqu’une traduction IPv6/IPv4 était nécessaire.

215    Concernant la capacité à supporter des nuages IPv6 purs, la Commission précise que la proposition de l’attributaire est fondée sur la norme et l’approche la plus utilisée. En adoptant cette approche, l’attributaire serait parfaitement à même de supporter des nuages dédiés à IPv6 en omettant évidemment d’utiliser ou de faire tourner IPv4 sur ces nuages. Ce volet de la solution serait donc pleinement conforme au cahier des charges.

216    Concernant le mécanisme de liaison entre l’IPv6 et l’IPv4, la Commission précise que l’attributaire a décrit le mécanisme de liaison en double pile entre les configurations IPv4 et IPv6, qui est fondé sur la sélection du système des noms de domaine. Bien que ce soit l’approche standard qui ait été expliquée dans la proposition de l’attributaire, ce dernier prend pleinement en charge tout mécanisme de liaison supplémentaire. Par conséquent, le comité d’évaluation a conclu que, même si la description faisait parfois défaut, les dispositifs et la solution proposés possédaient les capacités de liaison nécessaires (mécanismes de traduction) et étaient donc conformes d’un point de vue technique aux exigences définies dans le cahier des charges.

217    En réponse à une question écrite du Tribunal, en premier lieu, la Commission fait valoir que l’IPv6 n’a jamais été appliqué au réseau TESTA et les spécifications de l’appel d’offres visaient à garantir sa disponibilité au cas où il serait exigé dans le futur. En second lieu, elle rappelle que les commentaires figurant dans le rapport d’évaluation et le rapport d’examen complémentaire ne résument pas toute l’évaluation, mais mettent en évidence certains aspects de l’offre de l’attributaire. Elle précise que le commentaire « non viable » concernait uniquement l’approche en double pile proposée par l’attributaire, qui pourrait théoriquement avoir des limites dans certains scénarios où les dispositifs utilisés ne sont pas contrôlés de bout en bout par des membres de son personnel.

218    Dans ces circonstances, il y a lieu de confirmer que l’offre de l’attributaire était conforme au cahier des charges du point de vue du fonctionnement, puisqu’elle contenait tous les éléments requis pour prendre en charge les exigences techniques prescrites, y compris la liaison. En outre, l’insuffisance constatée, étant liée aux cas limités et purement théoriques, a été prise en compte par le comité d’évaluation de sorte que l’attributaire n’a pas pu obtenir une meilleure notation que celle devant être transcrite en l’appréciation « Satisfaisant ».

219    Par conséquent, il y a lieu de rejeter les allégations avancées par la requérante concernant la non-conformité de l’offre de l’attributaire au regard du sous-critère d’attribution 5e ainsi que l’argument de celle-ci selon lequel, à cause de la non-conformité de son offre, l’attributaire était en mesure de présenter une offre à un prix extrêmement bas.

220    Toutes les allégations avancées par la requérante concernant la non-conformité de l’offre de l’attributaire ayant été rejetées, il s’ensuit qu’il convient également de rejeter l’argument de celle-ci selon laquelle la non-conformité de ladite offre a permis à ce dernier de faire une proposition financière sensiblement plus basse que la sienne.

221    Partant, la première branche du second moyen doit être rejetée.

 Sur la seconde branche, portant sur l’incompatibilité entre les modalités du cahier des charges et la manière selon laquelle elles ont été appliquées

222    Dans le cadre de la seconde branche, la requérante avance que l’absence de communication de la méthode d’évaluation utilisée avant la présentation des offres aurait nui à la préparation de son offre et l’a conduite à présenter une offre dont le prix était nettement plus élevé que celui de l’offre retenue. En outre, la révélation de chaque niveau d’appréciation aurait aidé les soumissionnaires à mieux se prononcer sur la nécessité d’être « conforme » ou pas. Partant, les principes de transparence, d’égalité de traitement et de non-discrimination n’auraient pas été respectés.

223    La Commission fait valoir qu’elle a uniquement évalué les offres qui étaient pleinement conformes aux exigences techniques minimales telles qu’énoncées dans le cahier des charges. La méthode d’évaluation et les sept niveaux d’appréciation correspondants n’auraient pas pour effet de permettre la prise en considération d’offres non conformes au cahier des charges dans le cadre de l’évaluation des offres. En effet, la méthode d’évaluation servirait uniquement de cadre pour évaluer la qualité et le niveau de détail des offres techniques qui satisfaisaient aux exigences techniques minimales énoncées dans le cahier des charges.

224    Contrairement à ce qu’affirme la Commission, la requérante n’a pas modifié la seconde branche du présent moyen dans la réplique. Il y a lieu de constater, à cet égard, que l’argumentation de la requérante dans la réplique constitue une réitération de l’argumentation développée dans le cadre de la troisième branche du premier moyen.

225    En ce qui concerne l’absence de communication, avant la date limite de réception des offres, de la méthode d’évaluation qui allait être utilisée, le Tribunal a constaté, dans le cadre de la troisième branche du premier moyen (voir point 138 ci-dessus), que la Commission n’était pas obligée en vertu du règlement financier ou de ses règles d’application de divulguer son système de notation ou sa méthodologie d’évaluation. De surcroît, la méthode d’évaluation ne contient pas d’éléments qui auraient pu influencer la préparation des offres des soumissionnaires (voir point 146 ci-dessus). Même dans l’hypothèse ou tel serait le cas, la méthode d’évaluation a été communiquée aux trois soumissionnaires après la soumission de leur offre. Par conséquent, il y a lieu d’observer que les soumissionnaires ont tous les trois préparé leur offre en méconnaissance de cette méthode d’évaluation et se trouvaient dès lors dans la même situation durant la préparation de leurs offres.

226    Partant, il y a lieu de rejeter la seconde branche du second moyen.

227    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’écarter le second moyen comme non fondé.

228    Tous les moyens et arguments visant la décision attaquée ayant été écartés, il y a lieu de rejeter la demande tendant à son annulation.

2.     Sur le deuxième chef de conclusions

229    La requérante demande au Tribunal de déclarer la nullité du marché dans l’hypothèse où la Commission aurait déjà passé le marché en cause.

230    À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette personne a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de l’acte attaqué soit susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir arrêt du 23 mai 2014, European Dynamics Luxembourg/BCE, T‑553/11, non publié, EU:T:2014:275, point 94 et jurisprudence citée).

231    Or, même à supposer que la décision de passer le marché soit détachable du contrat et puisse faire l’objet d’un recours en annulation, le résultat d’un tel recours n’est pas susceptible de procurer un bénéfice à la requérante, la légalité de la décision attaquée par laquelle la Commission a décidé de ne pas retenir son offre et d’attribuer le marché à un autre soumissionnaire ayant été confirmée (voir point 230 ci-dessus).

232    Partant, le deuxième chef de conclusions doit être rejeté comme irrecevable.

3.     Sur le troisième chef de conclusions

233    Dans la réplique, la requérante formule, à titre subsidiaire, une demande tendant à la désignation d’un expert indépendant afin d’examiner de manière complète la conformité de l’offre de l’attributaire avec les exigences techniques telles que définies dans le cahier des charges.

234    La Commission considère que cette demande, introduite pour la première fois dans la réplique, est irrecevable en vertu de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du 2 mai 1991, puisque la demande n’est fondée sur aucun nouvel élément de droit ou de fait qui se soit révélé pendant la procédure. En outre, la désignation d’un tel expert équivaudrait à une réévaluation de l’offre retenue par le Tribunal, ce qui serait contraire à une jurisprudence constante en ce qui concerne l’étendue du contrôle juridictionnel en la matière.

235    En l’espèce, eu égard aux écrits des parties, aux pièces versées au dossier et aux résultats de l’audience, le Tribunal s’estime suffisamment informé pour statuer sur le présent litige.

236    Ainsi qu’il ressort des considérations relatives au premier chef de conclusions, l’examen de la première branche du second moyen, tiré de la violation de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier en ce que l’offre de l’attributaire n’aurait pas été conforme aux exigences techniques, n’a révélé aucune absence de conformité de ladite offre avec les exigences techniques telles que définies dans le cahier des charges.

237    Dans ces conditions, la demande de la requérante en vue de la désignation d’un expert doit être rejetée sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité de ladite demande.

238    Partant, le présent recours est rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

239    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Orange Business Belgium SA est condamnée aux dépens.

Prek

Labucka

Kreuschitz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 juillet 2016.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

1.  Sur le premier chef de conclusions

Sur le premier moyen, tiré de la violation du cahier des charges et de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier en ce que la Commission n’a pas correctement appliqué les critères d’attribution

Sur la première branche, portant sur l’application erronée du sous-critère d’attribution 6b

Sur la deuxième branche, portant sur la communication des critères d’attribution erronés en fait pour les critères d’attribution 6c et 6d, entraînant ainsi l’application de nouveaux critères d’attribution qui n’étaient pas communiqués

Sur la troisième branche, portant sur l’absence de communication, avant la date limite de réception des offres, de la méthode d’évaluation qui allait être utilisée

Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 102, paragraphe 1, du règlement financier, en ce que l’offre de l’attributaire n’était pas conforme aux exigences techniques

Sur la première branche, portant sur la prétendue non-conformité de l’offre de l’attributaire aux exigences techniques énoncées dans le cahier des charges

–  Sur le sous-critère d’attribution 3e, intitulé « Qualité de la sécurité physique du centre de sécurité et des opérations »

–  Sur le sous-critère d’attribution 4a, intitulé « Qualité des solutions de cryptage (eurodomain, SIS II et VIS) »

–  Sur le sous-critère d’attribution 4d, intitulé « Qualité du service de détection/prévention des intrusions proposé »

–  Sur le sous-critère d’attribution 5c, intitulé « Qualité de la surveillance du rack »

–  Sur le sous-critère d’attribution 5e, intitulé « Qualité de l’intégration IPv6 »

Sur la seconde branche, portant sur l’incompatibilité entre les modalités du cahier des charges et la manière selon laquelle elles ont été appliquées

2.  Sur le deuxième chef de conclusions

3.  Sur le troisième chef de conclusions

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’anglais.