Language of document : ECLI:EU:T:2023:614

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

11 octobre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale SANTARRITA – Marque de l’Union européenne figurative antérieure Santa Rita – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure – Article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑52/23,

Olive Line International, SL, établie à Madrid (Espagne), représentée par Me K. Guridi Sedlak, avocate,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Gája, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Santa Rita Harinas, SLU, établie à Loranca de Tajuña (Espagne),

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes A. Marcoulli, présidente, V. Tomljenović et M. R. Norkus (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Olive Line International, SL, demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 7 décembre 2022 (affaire R 577/2022‑5) (ci‑après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 11 mai 2020, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal SANTARRITA.

3        La marque demandée désignait les produits relevant de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant à la description suivante : « Huile d’olive à usage alimentaire ; olives préparées ».

4        Le 23 juillet 2020, Santa Rita Harinas, SLU, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur la marque figurative antérieure désignant les produits relevant des classes 29 et 30 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante : « Oignons frits ; purée de pommes de terre » et « Farines alimentaires et préparations pour la cuisine ; minoterie (produits de -) ; chapelures ; sauces béchamel », reproduite ci‑après :

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6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient notamment ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1) en ce qui concerne tous les produits relevant des classes 29 et 30 visés au point 5 ci‑dessus.

7        Le 24 février 2021, Santa Rita Harinas a produit des preuves de l’usage de la marque antérieure.

8        Le 1er mars 2022, la division d’opposition, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, a partiellement fait droit à l’opposition en rejetant la demande d’enregistrement pour les « olives préparées » relevant de la classe 29, et a fait droit à cette demande pour l’« huile d’olive à usage alimentaire » relevant de cette classe.

9        Le 6 avril 2022, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition, dans la mesure où l’opposition avait été accueillie en ce qui concerne les « olives préparées » relevant de la classe 29.

10      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours. Premièrement, s’agissant de la preuve de l’usage, elle a relevé que la nature, la durée et le lieu de l’usage de la marque antérieure avaient été prouvés, et que, concernant le volume de l’usage, les factures présentées par Santa Rita Harinas couvraient la majeure partie de la période pertinente, démontrant ainsi un usage constant avec une fréquence très élevée répartie sur une grande partie de la période. En outre, la présence dans les médias ainsi que sur les plateformes de vente sur l’Internet et dans les catalogues et publications confirmerait les intentions sérieuses de prendre pied sur le marché espagnol des « oignons frits ». Deuxièmement, s’agissant du risque de confusion, ladite chambre a indiqué qu’il existait au moins un faible degré de similitude entre les « oignons frits » et les « olives préparées », que les signes en cause présentaient un degré élevé de similitude visuelle, étaient presque identiques sur le plan phonétique et identiques sur le plan conceptuel.

 Conclusions des parties 

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas de convocation à une audience.

 En droit 

13      La requérante invoque deux moyens tirés, le premier, d’un défaut de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure concernant les « oignons frits » relevant de la classe 29 et, le second, d’une absence de risque de confusion du fait que ces produits seraient différents des « olives préparées » relevant de la même classe visées par la marque demandée.

 Sur le premier moyen

14      La requérante avance qu’aucune preuve d’un usage sérieux de la marque antérieure n’a été produite par Santa Rita Harinas pour les « oignons frits » relevant de la classe 29, étant donné qu’il s’agit d’un produit de grande consommation et que les seules preuves produites pour la période pertinente, à savoir les factures présentées, révèlent une étendue d’usage très réduite, avec un prix par produit n’atteignant pas neuf euros.

15      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

16      Aux termes de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque de l’Union européenne antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la date de dépôt ou la date de priorité de la demande de marque de l’Union européenne, la marque de l’Union européenne antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non‑usage, pour autant que, à cette date, la marque antérieure soit enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée.

17      Une telle requête a donc pour effet de faire peser sur l’opposant la charge de prouver l’usage sérieux de sa marque, ou l’existence de justes motifs pour le non-usage, sous peine du rejet de son opposition [voir, en ce sens, arrêt du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI – Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, EU:T:2007:96, point 37 et jurisprudence citée].

18      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43). De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 39 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 37].

19      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (arrêt du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 40 ; voir également, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43).

20      Quant à l’importance de l’usage qui a été fait de la marque antérieure, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part [arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 35, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 41].

21      Toutefois, dans l’interprétation de la notion d’usage sérieux, il convient de prendre en compte le fait que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [arrêts du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 38, et du 2 février 2016, Benelli Q. J./OHMI – Demharter (MOTOBI B PESARO), T‑171/13, EU:T:2016:54, point 68].

22      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (arrêts du 8 juillet 2004, HIPOVITON, T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42).

23      En outre, plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que la partie ayant formé l’opposition apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée (arrêt du 8 juillet 2004, HIPOVITON, T‑334/01, EU:T:2004:223, point 37).

24      Enfin, l’usage sérieux d’une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [arrêts du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, EU:T:2004:292, point 28, et du 30 novembre 2009, Esber/OHMI – Coloris Global Coloring Concept (COLORIS), T‑353/07, non publié, EU:T:2009:475, point 24].

25      En l’espèce, la requérante ne conteste pas les considérations de la chambre de recours concernant la durée de l’usage, à savoir que les factures produites couvrent une grande partie de la période pertinente, s’étendant du 11 mai 2015 au 10 mai 2020, et le lieu de l’usage, à savoir que l’usage en Espagne est prouvé, dès lors que ces factures font référence à plusieurs destinataires en Espagne.

26      La requérante remet uniquement en cause l’appréciation de la chambre de recours concernant le volume commercial de l’exploitation de la marque antérieure. Lesdites factures seraient insuffisantes pour établir un usage sérieux de ladite marque pour des oignons frits, dès lors que les ventes, prouvées par les factures, de 7 595 paquets, correspondent à 14 165 euros de recettes, ce qui équivaudrait à la vente de 126 paquets par mois d’un produit de consommation générale destiné au public.

27      Il y a lieu, d’emblée, de constater que la requérante ne conteste pas l’authenticité de ces factures ou leur exactitude, mais uniquement leur caractère suffisant afin de prouver l’usage sérieux de la marque antérieure.

28      Or, premièrement, le fait que chacune des 24 factures produites couvre un mois donné de 2016 à 2020 démontre un usage constant sur la plus grande partie de la période pertinente.

29      Deuxièmement, comme l’a relevé la chambre de recours et sans que la requérante ne le conteste, le fait que chacune de ces factures couvre un mois donné permet de considérer que ces factures représentent seulement une sélection, et qu’elles sont destinées à servir d’exemples de vente et non à représenter la totalité du volume des ventes. Or, des factures ne portant pas de numéros consécutifs et datées d’années et de mois différents constituent des exemples qui ne représentent pas le montant global des ventes réelles [voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 13 juin 2019, MPM-Quality/EUIPO – Elton Hodinářská (MANUFACTURE PRIM 1949), T‑75/18, non publié, EU:T:2019:413, point 48, et du 8 juillet 2020, Euroapotheca/EUIPO – General Nutrition Investment (GNC LIVE WELL), T‑686/19, non publié, EU:T:2020:320, point 72].

30      En outre, et en tout état de cause, à supposer que, comme le soutient la requérante, le nombre de paquets vendus soit peu élevé, comme il a été rappelé au point 21 ci‑dessus, la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux ne vise pas à évaluer la réussite commerciale.

31      Troisièmement, la requérante ne conteste pas la réalité de la présence, dans les médias ainsi que sur les plateformes de vente sur l’Internet et dans les catalogues et les publications, de la marque antérieure pour des « oignons frits », dont il est fait mention dans la décision attaquée. À cet égard, selon la jurisprudence, la publicité réalisée aux fins de promouvoir une marque constitue un des facteurs à prendre en compte dans le cadre de l’appréciation de l’existence d’un usage sérieux de celle-ci [voir arrêt du 7 juillet 2016, Fruit of the Loom/EUIPO – Takko (FRUIT), T‑431/15, non publié, EU:T:2016:395, point 53 et jurisprudence citée].

32      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu que la marque antérieure avait fait l’objet d’une utilisation suffisante pour démontrer un usage sérieux de la marque antérieure pour des « oignons frits ».

33      Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme non fondé.

 Sur le second moyen

34      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée. Ce risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

35      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celles des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

36      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

37      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHM – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

38       En l’espèce, la requérante ne conteste ni la conclusion de la chambre de recours selon laquelle le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure est normal, ni celle selon laquelle les signes en cause présentent un degré élevé de similitude visuelle, sont presque identiques sur le plan phonétique et identiques sur le plan conceptuel.

39      S’agissant de la comparaison des produits opérée par la chambre de recours, la requérante ne conteste pas non plus l’observation de ladite chambre selon laquelle les « olives préparées » relevant de la classe 29 visées par la marque demandée et les « oignons frits » relevant de la même classe visés par la marque antérieure sont des produits peu coûteux qui sont consommés quotidiennement ou très souvent par le grand public, ni la considération de celle-ci selon laquelle le niveau d’attention de ce public sera donc faible.

40      La requérante soutient uniquement que c’est à tort que la chambre de recours a conclu qu’il existait au moins un faible degré de similitude entre les produits en cause. Les « oignons frits » ne seraient pas similaires aux « olives préparées », en raison des différences au niveau de leur processus de production et de leurs valeurs nutritionnelles. En outre, ils ne coïncideraient ni par leur nature ni par leur origine commerciale. Par ailleurs, ils ne seraient ni complémentaires ni concurrents, ne partageraient pas les mêmes points de vente et différeraient quant à leur mode de consommation.

41      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

42      Pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

43      En premier lieu, la requérante remet en cause le constat de la chambre de recours selon lequel « “les oignons frits” […] contiennent principalement des oignons transformés qui, en tant que tels, relèvent de la catégorie des végétaux transformés ». Selon elle, à partir du moment où il s’agit d’un aliment frit, c’est-à-dire d’une friture, ce qui caractérise le plus les « oignons frits » est leur texture croustillante. Par conséquent, il conviendrait d’associer ces produits aux produits frits dans la farine. Or, les consommateurs considéreraient les fritures comme une catégorie d’aliments indépendante. Ladite chambre aurait, par ailleurs, commis une erreur en considérant les « oignons frits » comme étant des légumes en conserve, alors qu’il s’agirait d’un condiment servant à apporter une nuance à la saveur des aliments.

44      Il convient d’abord de relever que la requérante ne produit aucun élément au soutien de son affirmation selon laquelle les consommateurs considéreraient les fritures comme une catégorie d’aliments indépendante.

45      Dès lors, la conclusion que la requérante en tire, à savoir que les « oignons frits » n’entrent pas dans la « catégorie des végétaux transformés », puisqu’ils sont frits, ne saurait prospérer.

46      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a commis une erreur en considérant les « oignons frits » comme étant des légumes en conserve, il convient de relever que ladite chambre a exposé, au point 61 de la décision attaquée, que les « oignons frits » contenaient principalement des oignons transformés qui, en tant que tels, relevaient de la catégorie des végétaux transformés. Au point suivant, elle a indiqué que, sur cette base, il avait été jugé, au point 91 de la décision de la seconde chambre de recours du 12 décembre 2016 (affaire R 2367/2015‑2), que « les fruits transformés » étaient similaires aux « légumes conservés, séchés et cuits ». Elle a ajouté que les fruits et légumes « rendus durables » ou traités pour la conservation étaient souvent produits par les mêmes entités. Ils s’adresseraient au même consommateur final, seraient vendus dans des rayons similaires de supermarchés et seraient concurrents.

47      La chambre de recours n’a donc pas considéré les « oignons frits » comme étant, spécifiquement, des « légumes en conserve », mais a fait un raisonnement par analogie en considérant que les « olives préparées », qui étaient des « fruits transformés », et les « oignons frits », qui s’apparentaient aux « légumes conservés, séchés et cuits » étaient des fruits et des légumes « rendus durables ». Elle a ensuite tiré des conséquences, quant aux entités qui les produisaient, aux consommateurs visés et à leur mode de commercialisation, du fait que ces produits avaient été « rendus durables ». Or, la requérante ne remet pas en cause le fait que les « oignons frits » et les « olives préparées » sont des produits « rendus durables ».

48      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les « oignons frits » ne sont qu’un condiment, il convient de relever, d’une part, que tant les « olives préparées » que les « oignons frits » sont des aliments susceptibles d’être consommés seuls, notamment comme produits apéritifs, ou en accompagnement d’autres aliments.

49      D’autre part, en tout état de cause, quand bien-même il devrait être considéré, comme le soutient la requérante, que les « oignons frits » ne sont qu’un « condiment », une telle circonstance n’exclurait nullement une similitude au moins faible avec les « olives préparées », lesquelles pourraient également être utilisées pour condimenter d’autres aliments.

50      En deuxième lieu, la requérante avance que les « olives préparées » sont soumises à un procédé de production totalement différent de celui de la friture de n’importe quel aliment. Contrairement à la friture, le procédé de production des « olives préparées » requerrait une cuisson spéciale, une conservation en saumure avec trempage dans de l’eau salée, procédé à l’évidence incompatible avec celui de la friture et son résultat croustillant. Par conséquent, la différence entre les « olives préparées » et les « oignons frits » serait la même que celle existant entre ces produits et l’« huile d’olive à usage alimentaire », à savoir le produit pour lequel la division d’opposition aurait fait droit à la demande d’enregistrement de la marque demandée.

51      À cet égard, il y a lieu de relever que, s’agissant de produits alimentaires, le fait que le procédé de production est différent ne saurait, en principe, être un critère à lui seul décisif, la nature, la destination et les canaux de distribution des produits concernés étant également pertinents, en particulier au regard du fait que, en l’espèce, il n’est pas contesté que le risque de confusion doit être apprécié au regard du grand public dont l’attention sera faible. Or, indépendamment des différences dans les procédés de productions des « oignons frits » et des « olives préparées », rien ne permet d’exclure que ces produits « rendus durables » soient produits par les mêmes entreprises ou aient les mêmes canaux de distribution.

52      Quant à la conclusion de la requérante selon laquelle la différence entre les « olives préparées » et les « oignons frits » est la même que celle existant entre ces produits et l’« huile d’olive à usage alimentaire », elle est erronée, dès lors que l’huile est, selon le dictionnaire de l’Académie royale espagnole, un liquide gras obtenu notamment à partir de fruits ou de grains. Un tel produit diffère donc nettement tant des « olives préparées » que des « oignons frits », ces deux derniers produits n’étant pas des huiles ou d’autres matières grasses, mais, à la différence de l’« huile d’olive à usage alimentaire », sont des produits susceptibles d’être consommés seuls et ne servent pas à assaisonner, cuire ou conserver les aliments.

53      En troisième lieu, la requérante considère que c’est à tort que la chambre de recours, s’agissant du mode de consommation, se réfère uniquement, dans sa comparaison entre les produits en cause, aux « rondelles d’oignons », qui ne sont pas les produits avec lequel les « olives préparées » doivent être comparées. Les « oignons frits » et les « olives préparées » ne seraient pas des produits de substitution ou complémentaires, ces produits n’étant, d’un point de vue nutritionnel, ni comparables ni substituables. Leur différence de nature aurait pour conséquence que les entreprises qui vendent l’un ou l’autre ne seraient pas les mêmes.

54      À cet égard, premièrement, en ce qui concerne le mode de consommation, la chambre de recours a considéré que les « olives préparées » sont consommées non seulement seules comme produits apéritifs, mais aussi en tant qu’accompagnement. Par ailleurs, les « oignons frits » ne constitueraient pas seulement un accompagnement dans les sandwiches ou les hamburgers, mais seraient également consommés en tant que produits apéritifs, comme par exemple les rondelles d’oignons frits.

55      Ainsi, d’une part, ce n’est qu’à titre d’exemple que la chambre de recours cite les « rondelles d’oignons frits » pour indiquer que les « oignons frits » peuvent être consommés comme produits apéritifs, à l’instar des « olives préparées ». Or, ce seul exemple suffit à démontrer que les « oignons frits » peuvent être consommés comme des produits apéritifs.

56      D’autre part, la requérante ne remet pas en cause la constatation de la chambre de recours selon laquelle tant les « oignons frits » que les « olives préparées » sont consommés en tant qu’accompagnement.

57      Il y a donc lieu de rejeter l’argument de la requérante relatif au mode de consommation.

58      Deuxièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les « oignons frits » et les « olives préparées » ne sont pas des produits de substitution ou complémentaires, il convient de constater que, ainsi qu’il vient d’être relevé, les « oignons frits » et les « olives préparées » peuvent être tant des produits apéritifs qu’être consommés en tant qu’accompagnement. Ils sont donc substituables et pourraient être consommés ensemble.

59      Troisièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les produits en cause ne sont pas vendus par les mêmes établissements, il y a lieu de relever que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que ces produits pouvaient être proposés à la vente sur les étals des marchés spécialisés en condiments et produits apéritifs.

60      En outre, au moins en tant que produits apéritifs, les produits en cause sont généralement présentés, notamment en supermarchés, dans les mêmes rayons ou à proximité, de sorte que le public pertinent est susceptible de croire qu’ils peuvent provenir des mêmes producteurs [voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2019, ZPC Flis/EUIPO – Aldi Einkauf (Happy Moreno choco), T‑498/18, EU:T:2019:763, point 64 et jurisprudence citée].

61      Il y a donc lieu de rejeter les arguments de la requérante selon lesquels ce serait à tort que la chambre de recours a conclu qu’il existait au moins un faible degré de similitude entre les produits en cause.

62      Par conséquent, c’est sans commettre d’erreur que, en prenant en compte tous les éléments pertinents, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

63      Partant, il y a lieu de rejeter le second moyen comme non fondé.

64      Le recours est rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

65      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

66      En l’espèce, même si la requérante a succombé, l’EUIPO n’a conclu à ce que celle-ci soit condamnée aux dépens que dans l’hypothèse où les parties seraient convoquées à une audience. Partant, le Tribunal ayant décidé de statuer sans phase orale de la procédure, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Marcoulli

Tomljenović

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 octobre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.