Language of document : ECLI:EU:T:2022:838

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

21 décembre 2022 (1)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale TRADICIÓN CZ, S.L. – Marque de l’Union européenne verbale antérieure RIVERO CZ – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑250/19,

Tradición CZ, SL, établie à Jerez de la Frontera (Espagne), représentée par Me M. Aznar Alonso, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Palmero Cabezas et M. D. Gája, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

María Dolores Rivero Argudo, demeurant à Jerez de la Frontera, représentée par Me A. Vela Ballesteros, avocat,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, I. Gâlea (rapporteur) et T. Tóth, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Tradición CZ, SL, demande l’annulation partielle de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 4 février 2019 (affaire R 257/2018-2) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 5 janvier 2016, la requérante a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal TRADICIÓN CZ, S.L.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 30, 32, 33, 35 39 et 40 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 30 : « Café, thé, cacao et succédanés du café ; riz ; tapioca et sagou ; farines et préparations faites de céréales ; pain, pâtisseries et confiseries ; glaces alimentaires ; sucre, miel, sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; sel ; moutarde ; vinaigres ; sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir » ;

–        classe 32 : « Bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons sans alcool ; boissons à base de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons ; moûts » ;

–        classe 33 : « Boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; vin » ;

–        classe 35 : « Publicité ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres, moûts, vins, liqueurs et boissons alcoolisées de toutes sortes ; services d’approvisionnement pour des tiers (achat de produits et de services pour d’autres entreprises) ; services d’importation et d’exportation » ;

–        classe 39 : « Transport ; emballage et entreposage de marchandises ; organisation de voyages ; stockage, mise en bouteilles et distribution de vinaigres, moûts, vins, liqueurs et boissons alcoolisées de toutes sortes » ;

–        classe 40 : « Production de vins pour le compte de tiers ; services de distillerie de spiritueux ; conservation de vins et boissons alcoolisées ; pressurage de fruits ; services de transformation et traitement du raisin pour l’obtention de boissons alcoolisées ».

4        Le 28 avril 2016 l’intervenante,  Mme María Dolores Rivero Argudo, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée, notamment, sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure RIVERO CZ, déposée le 29 septembre 2008 et enregistrée le 1er février 2013 sous le numéro 7272594 pour les produits relevant de la classe 33 et correspondant à la description suivante : « Boissons alcooliques (à l’exception des bières) ».

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

7        Le 13 décembre 2017, la division d’opposition a rejeté l’opposition, en estimant qu’il n’y avait pas de risque de confusion entre les marques dans l’esprit du public pertinent.

8        Le 3 février 2018, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a partiellement accueilli le recours.

10      En premier lieu, la chambre de recours a estimé que le public pertinent était représenté par le grand public hispanophone, faisant preuve d’un niveau d’attention moyen concernant les produits compris dans la classe 33. Elle a également constaté que le niveau d’attention pouvait être faible s’agissant des produits de consommation courante comme les eaux minérales comprises dans la classe 32 et que, en ce qui concerne les produits et les services s’adressant à un public de professionnels, ceux-ci pouvaient faire preuve d’un niveau d’attention plus élevé.

11      En second lieu, la chambre de recours a procédé à la comparaison des produits et services couverts par les marques en conflit et a conclu à l’identité entre les produits compris dans la classe 33. Elle a considéré que les « bières » comprises dans la classe 32 étaient très similaires aux produits couverts par la marque antérieure. Elle a estimé comme moyennement similaires aux produits couverts par ladite marque les « moûts » compris dans la classe 32, les « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres, moûts, vins, liqueurs et boissons alcoolisées de toutes sortes » compris dans la classe 35 et les « production de vins pour le compte de tiers ; services de distillerie de spiritueux ; conservation de vins et boissons alcoolisées ; pressurage de fruits ; services de transformation et traitement du raisin pour l’obtention de boissons alcoolisées » compris dans la classe 40. Par ailleurs, s’agissant des « vinaigres » compris dans la classe 30, des « eaux minérales et gazeuses et autres boissons sans alcool ; boissons à base de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons » compris dans la classe 32 et des « stockage, mise en bouteilles et distribution de vins, liqueurs et boissons alcoolisées de toutes sortes » compris dans la classe 39, elle a estimé que ceux-ci étaient similaires à un faible degré aux produits couverts par la marque antérieure. Enfin, s’agissant des autres produits et services visés par la demande de marque, elle a considéré qu’ils étaient différents des produits couverts par la marque antérieure.

12      En troisième lieu, en ce qui concerne la comparaison des signes en conflit, la chambre de recours a constaté que ceux-ci étaient faiblement similaires sur le plan phonétique et visuel et que la comparaison sur le plan conceptuel était dénuée de pertinence. Considérant que la marque antérieure présentait un caractère distinctif normal, elle a conclu que le public pertinent serait susceptible de considérer que les marques en conflit provenaient de la même entreprise et qu’il existait un risque de confusion pour les produits et services identiques et similaires à un degré élevé ou moyen. S’agissant des produits et services peu similaires ou différents, elle a estimé que la similitude entre les marques n’était pas suffisante afin d’établir un risque de confusion entre les marques en conflit.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        surseoir à statuer jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue dans la procédure de déchéance de la marque antérieure devant l’EUIPO ;

–        annuler partiellement la décision attaquée en concluant à l’absence de risque de confusion entre les marques en conflit ;

–        à titre subsidiaire, annuler partiellement la décision attaquée en concluant à l’absence de risque de confusion entre les marques en conflit s’agissant des services de vente de vinaigres et de moûts relevant de la classe 35 ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

14      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit 

 Sur la demande de suspension de la procédure 

15      La requérante a introduit une demande suspension de la présente procédure au motif que, le 6 mars 2019, elle a présenté à l’EUIPO une demande en déchéance de la marque antérieure, dans laquelle elle a allégué que cette dernière n’avait pas fait l’objet d’un usage sérieux.

16      Par décision du 11 août 2021 (affaire R 1993/2020-5), l’EUIPO a partiellement fait droit à la demande en déchéance. La marque antérieure demeure enregistrée pour les produits « vins » compris dans la classe 33 et la déchéance est prononcée concernant les autres produits de la classe 33 pour laquelle ladite marque était enregistrée.

17      Le 1er décembre 2021, la requérante a introduit une demande de reprise de la procédure. L’intervenante n’ayant pas soumis d’observation et l’EUIPO ne s’y opposant pas, la procédure a repris par décision du 14 janvier 2022.

18      À cet égard, il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, aux termes de l’article 65, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 72, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO que « pour incompétence, violation des formes substantielles, violation du traité, [dudit] règlement ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir ». Il s’ensuit que le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision objet du recours que si, à la date à laquelle celle-ci a été prise, elle était entachée de l’un de ces motifs d’annulation ou de réformation. En revanche, le Tribunal ne saurait annuler ou réformer ladite décision pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement à son prononcé (voir arrêt du 26 octobre 2016, Westermann Lernspielverlage/EUIPO, C‑482/15 P, EU:C:2016:805, point 27 et jurisprudence citée).

19      En outre, la Cour a déjà jugé que la caducité de la marque antérieure, survenue après l’introduction du recours devant le Tribunal, n’a pas privé de son objet ni de ses effets la décision de la chambre de recours de l’EUIPO et que l’appréciation contenue dans cette décision, selon laquelle il existait un risque de confusion entre les marques en conflit, continuait donc de produire ses effets au moment où le Tribunal a prononcé son arrêt (voir, en ce sens, ordonnance du 8 mai 2013, Cadila Healthcare/OHMI, C‑268/12 P, non publiée, EU:C:2013:296, points 31 à 34).

20      En l’espèce, compte tenu de ces considérations et dans la mesure où, en l’occurrence, la date effective de la déchéance partielle de la marque antérieure fondant l’opposition à l’enregistrement de la marque demandée par la requérante, à savoir le 11 août 2021, est postérieure à l’adoption de la décision attaquée, qui date du 4 février 2019, il y a lieu de constater que le Tribunal n’est pas tenu, lors de son contrôle de la légalité de la décision attaquée, de prendre en compte la décision de l’EUIPO déclarant cette déchéance partielle (voir, en ce sens, arrêt du 26 octobre 2016, Westermann Lernspielverlage/EUIPO, C‑482/15 P, EU:C:2016:805, point 30).

 Sur le fond

21      À titre liminaire, il convient de relever que la requérante se réfère, dans ses écritures, aux dispositions du règlement 2017/1001. Toutefois, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, en l’occurrence le 5 janvier 2016, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, le présent litige est régi par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

22      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par la requérante, l’EUIPO et l’intervenante dans leurs écritures à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, d’une teneur identique.

23      À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

24      La requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit. Elle estime que les différences qui existent sur les plans visuel, phonétique et conceptuel sont suffisamment importantes afin d’écarter tout risque de confusion et d’association, même en ce qui concerne les produits identiques.

25      À titre subsidiaire, la requérante estime que la chambre de recours a commis une erreur lors de l’appréciation de la similitude des produits et services en cause, s’agissant des « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres, moûts » relevant de la classe 35.

26      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

27      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

28      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

29      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

30      Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

31      La chambre de recours a estimé que le public pertinent se composait du grand public, qui fait preuve d’un niveau d’attention moyen, en ce qui concerne les produits tels que ceux compris dans la classe 33. S’agissant des produits de consommation courante comme les eaux minérales comprises dans la classe 32, elle a considéré que les consommateurs feraient preuve d’un niveau d’attention faible et que, en ce qui concerne les produits et les services s’adressant à un public professionnel, par exemple les services de vente en gros de vins compris dans la classe 35, celui-ci pouvait faire preuve d’un niveau d’attention élevé. Elle a conclu qu’il y avait lieu de prendre en considération le public hispanophone ayant le niveau d’attention le moins élevé afin d’évaluer le risque de confusion.

32      Cette appréciation n’a pas été contestée par les parties.

 Sur la comparaison des produits et des services en cause

33      Pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 14 mai 2013, Sanco/OHMI – Marsalman (Représentation d’un poulet), T‑249/11, EU:T:2013:238, point 21 et jurisprudence citée].

34      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les produits visés par la marque demandée compris dans la classe 33, à savoir les « boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; vin », étaient identiques à ceux couverts par la marque antérieure.

35      S’agissant des produits compris dans la classe 32, à savoir les « bières », la chambre de recours a considéré que ceux-ci étaient très similaires à ceux couverts par la marque antérieure.

36      Ensuite, elle a apprécié comme étant moyennement similaires aux produits couverts par la marque antérieure les « moûts » compris dans la classe 32, les « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres, moûts, vins, liqueurs et boissons alcoolisées de toutes sortes » compris dans la classe 35 et les « production de vins pour le compte de tiers ; services de distillerie de spiritueux ; conservation de vins et boissons alcoolisées ; pressurage de fruits ; services de transformation et traitement du raisin pour l’obtention de boissons alcoolisées » compris dans la classe 40.

37      S’agissant des « vinaigres » compris dans la classe 30, des « eaux minérales et gazeuses et autres boissons sans alcool ; boissons à base de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons » compris dans la classe 32 et des « stockage, mise en bouteilles et distribution de vins, liqueurs et boissons alcoolisées de toutes sortes » compris dans la classe 39, elle a considéré qu’ils étaient similaires à un faible degré aux produits couverts par la marque antérieure.

38      Enfin, elle a estimé que tous les autres produits et services étaient différents des produits couverts par la marque antérieure.

39      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir considéré que les « services de vente de vinaigres » relevant de la classe 35 étaient moyennement similaires aux produits couverts par la marque antérieure, qui relèvent de la classe 33, alors qu’elle a estimé que les « vinaigres », compris dans la classe 30 étaient similaires à un faible degré aux mêmes produits. De plus, elle estime que les « services de vente de moûts » devraient également être considérés comme similaires à un faible degré avec les produits couverts par la marque antérieure.

40      L’EUIPO affirme que même dans l’hypothèse où le degré de similitude entre les « services de vente de vinaigres » et les « services de vente de moûts » relevant de la classe 35 et les produits couverts par la marque antérieure serait faible, et non moyen, comme il a été conclu dans la décision attaquée, il devrait tout de même être considéré que la conclusion selon laquelle il existe un risque de confusion (qui comprend le risque d’association) entre les marques en conflit en ce qui concerne ces produits et services pourrait rester exacte et que toute éventuelle erreur qu’aurait pu commettre la chambre de recours n’entraînerait pas l’annulation de la décision attaquée.

41      L’intervenante estime que, même si les « services de distribution du vinaigre » devaient être considérés comme faiblement similaires aux produits couverts par la marque antérieure, il n’en demeure pas moins que les « moûts » sont moyennement similaires à ces derniers.

42      Il y a lieu de relever que, lorsqu’il est établi qu’il existe une faible similitude entre le vinaigre et le vin, compte tenu du lien étroit unissant tout produit à sa commercialisation, il convient également de conclure à l’existence d’une similitude de même intensité entre, d’une part, les services de commercialisation expressément spécifiés comme étant « en rapport avec les vinaigres », à savoir les « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres » compris dans la classe 35, et, d’autre part, le vin [voir, en ce sens, arrêt du 9 juin 2010, Muñoz Arraiza/OHMI – Consejo Regulador de la Denominación de Origen Calificada Rioja (RIOJAVINA), T‑138/09, EU:T:2010:226, point 43]. Or, en l’espèce, la chambre de recours a estimé que les « vinaigres » compris dans la classe 30 étaient similaires à un faible degré aux produits couverts par la marque antérieure. Partant, c’est à tort qu’elle a estimé que les « services de vente en gros et au détail de vinaigres » étaient moyennement similaires aux mêmes produits.

43      Dès lors, il y a lieu de considérer que le degré de similitude entre les « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres » et les produits couverts par la marque antérieure, compris dans la classe 33, doit être qualifié de faible.

44      En revanche, l’argument de la requérante selon lequel les « services de vente de moûts » devraient également être considérés comme similaires à un faible degré avec les produits couverts par la marque antérieure, compris dans la classe 33, doit être rejeté eu égard à la jurisprudence issue du point 43 de l’arrêt du 9 juin 2010, RIOJAVINA (T‑138/09, EU:T:2010:226), citée au point 42 ci-dessus. En effet, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu à un degré moyen de similitude entre les « boissons alcooliques (à l’exception des bières) » et les « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de moûts », étant donné que les « moûts » présentent une similitude moyenne avec les produits couverts par la marque antérieure.

45      Ce constat n’est pas infirmé par l’arrêt du 5 mai 2015, Lidl Stiftung/OHMI – Horno del Espinar (Castello) (T‑715/13, non publié, EU:T:2015:256), invoqué par la requérante. En effet, dans cette affaire, la comparaison portait, d’une part, sur des « services de vente au détail dans les commerces liés à tous types de produits alimentaires, principalement, pâtisserie et confiserie » et, d’autre part, sur divers types de produits alimentaires. Dès lors, les services de vente visés par la marque antérieure couvraient une catégorie de produits relativement large qui était susceptible d’englober les produits couverts par la marque demandée sans pour autant qu’il y soit fait référence expressément. C’est la raison pour laquelle le Tribunal a jugé que c’était sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours avait estimé qu’il existait un faible degré de similitude entre les produits et les services en cause. Toutefois, ce raisonnement n’est pas transposable en l’espèce et l’argument de la requérante doit donc être écarté à cet égard.

 Sur la comparaison des signes en conflit

46      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

47      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée).

48      Il convient de constater que les marques en conflit sont toutes deux des marques verbales. La marque antérieure est composée des éléments « rivero » et « cz ». La marque demandée est composée des éléments « tradición », « cz » et « s.l. ».

49      Avant de traiter la question de la similitude des signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il convient d’examiner l’appréciation faite par la chambre de recours du caractère dominant et distinctif des éléments composant les marques en conflit.

–       Sur le caractère dominant et distinctif des éléments composant les signes en conflit

50      Selon la jurisprudence, pour déterminer le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’apprécier l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [voir ordonnance du 3 mai 2018, Siberian Vodka/EUIPO – Schwarze und Schlichte (DIAMOND ICE), T‑234/17, non publiée, EU:T:2018:259, point 38 et jurisprudence citée].

51      Le caractère dominant d’un élément composant une marque implique de s’interroger sur la question de savoir si l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par cette marque est dominée ou non par un ou plusieurs des éléments la composant. Ce n’est que si tous les autres éléments composant la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude des signes en conflit pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

52      Tel pourrait notamment être le cas lorsque cet élément est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres éléments de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

53      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier l’existence éventuelle d’éléments distinctifs et dominants dans les marques en conflit.

54      La chambre de recours a considéré que les marques en conflit ne contenaient pas d’éléments qui attiraient l’attention sur le plan visuel. Néanmoins, elle a souligné que l’élément « cz » qui était présent dans les deux marques n’avait pas de contenu sémantique pour le public hispanophone et qu’il avait, dès lors, un caractère distinctif moyen. S’agissant de l’élément « rivero » de la marque antérieure, la chambre de recours a constaté que le public pertinent le percevrait comme un nom de famille et qu’il possédait un caractère distinctif moyen. D’autre part, elle a considéré que le terme « tradición » serait compris par le public hispanophone comme signifiant « une transmission de rites, de coutumes de génération en génération » et qu’il était descriptif et laudatif des produits et services en cause, dès lors qu’il transmettait des informations sur leurs caractéristiques. S’agissant de l’élément « s.l. », elle a constaté que celui-ci serait immédiatement perçu comme l’abréviation de « société limitée » et qu’il était dépourvu de caractère distinctif.

55      La requérante fait valoir que l’élément « cz » n’est pas l’élément le plus distinctif de la marque antérieure, ni de la marque demandée. En effet, selon elle, ce sont les éléments « rivero » et « tradición » qui domineraient respectivement dans chacune de ces deux marques, en raison de leur position au début de chacune d’elles, de leur longueur et de leur dominance sur un plan visuel.

56      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

57      En premier lieu, il convient d’analyser le caractère distinctif des différents éléments composant les marques en conflit.

58      Premièrement, s’agissant du terme « cz » présent à l’identique dans la marque antérieure et dans la marque demandée, il convient de relever qu’il ne véhicule aucune signification en ce qui concerne les produits et les services en cause. Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’il possédait un caractère distinctif moyen.

59      Deuxièmement, s’agissant du caractère distinctif de l’élément « tradición » présent dans la partie initiale de la marque demandée, il y a lieu de relever que celui-ci sera compris par le public hispanophone comme signifiant « une transmission de rites, de coutumes, de génération en génération », renvoyant ainsi à l’image d’un produit issu d’un savoir-faire traditionnel qui aurait été transmis à travers les générations et qui en attesterait de ses qualités. Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu qu’il était descriptif, voire laudatif des produits et services en cause et dépourvu de caractère distinctif.

60      Troisièmement, s’agissant de l’élément « s.l. », c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que celui-ci serait immédiatement perçu comme l’abréviation de « société limitée » et qu’il était dépourvu de caractère distinctif [voir, en ce sens, arrêts du 5 juillet 2012, Deutscher Ring/OHMI (Deutscher Ring Sachversicherungs-AG), T‑209/10, non publié, EU:T:2012:347, point 22, et du 23 novembre 2018, Chypre/EUIPO – Papouis Dairies (Papouis Halloumi), T‑703/17, non publié, EU:T:2018:835, point 49]. Par ailleurs, une grande partie du public pertinent ne prononcera pas cet élément en raison de sa signification.

61      Enfin, s’agissant de l’élément « rivero » composant la marque antérieure, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que celui-ci sera associé à un nom de famille et possède dès lors un caractère distinctif moyen, et non élevé, comme l’affirme la requérante [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 19 janvier 2022, Construcciones Electromecánicas Sabero/EUIPO – Magdalenas de las Heras (Heras Bareche), T‑99/21, non publié, EU:T:2022:14, point 89].

62      En second lieu, s’agissant du point de savoir si les éléments « rivero » et « tradición » sont respectivement dominants dans chacune des deux marques en conflit, il convient, tout d’abord, de constater que le fait que ces éléments soient placés au début de chacune de ces marques ne suffit pas à lui seul pour établir qu’ils sont dominants [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 10 octobre 2017, Asna/EUIPO – Wings Software (ASNA WINGS), T‑382/16, non publié, EU:T:2017:713, point 64].

63      Ensuite, bien que la longueur des deux termes « rivero » et « tradición » soit importante par rapport au terme composé de deux lettres « cz », ils ne produisent pas une impression telle qu’elle leur confère une dominance visuelle. Sur le plan phonétique, il importe de souligner que ces termes sont composés de trois syllabes et que l’ensemble des lettres « cz » sera également prononcé en trois syllabes, à savoir « cé-cé-ta ». Dès lors, eu égard à la jurisprudence citée aux points 51 et 52 ci-dessus, il ne saurait être considéré que l’élément « cz » est négligeable et que l’appréciation de la similitude pourrait se faire uniquement sur la base des éléments « rivero » et « tradición ».

64      C’est en tenant compte de ces considérations qu’il y a lieu de comparer la marque antérieure et la marque demandée prises dans leur ensemble.

–       Sur la comparaison visuelle

65      La chambre de recours a souligné que, sur le plan visuel, les marques en conflit coïncidaient par la présence de l’élément verbal « cz », situé en deuxième position, et qu’elles se différenciaient par les éléments « rivero » et « tradición », situés au début des marques. S’agissant de l’élément « s.l. », qui se trouve à la fin de la marque demandée, elle a estimé qu’une partie du public pourrait ne pas le prononcer. Elle a conclu que, en raison de leurs différences sur le plan visuel, les marques en conflit étaient peu similaires.

66      La requérante estime que, sur le plan visuel, les marques en conflit ont une structure et une longueur nettement différentes. À cet égard, elle fait valoir que la marque antérieure est composée de deux mots alors que la marque demandée est composée de trois mots et de trois signes de ponctuation. Elle souligne notamment que leurs longueurs sont différentes et que l’élément commun « cz » se situe à des endroits différents, à savoir à la fin de la marque antérieure et au milieu de la marque demandée.

67      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

68      Tout d’abord, il convient de rappeler que les marques à comparer sont la marque antérieure, RIVERO CZ, et la marque demandée, TRADICIÓN CZ, S.L. Les lettres « s » et « l » composant l’élément final de la marque demandée sont séparées par des points et précédés par une virgule. Ainsi qu’il a été apprécié au point 60 ci-dessus, cet élément pourra ne pas être pris en compte par une partie du public pertinent, en raison de sa signification, qui renvoie à un type de forme juridique, à savoir une société limitée.

69      Ensuite, il y a lieu de constater l’identité de l’élément « cz » qui est situé en deuxième position dans les deux marques. Celles-ci diffèrent par la présence, en première position, des termes « tradición » et « rivero », composés respectivement de neuf et de six lettres.

70      La requérante fait valoir que le public pertinent portera son attention sur les éléments différents « rivero » et « tradición », en raison de leur position au début de la marque. À son avis, leur caractère dominant et leurs différences écartent tout risque de confusion.

71      À cet égard, il y a lieu de relever que le juge de l’Union a admis que, si l’attention du consommateur était souvent attirée par la partie initiale des mots, son attention visuelle pouvait tout aussi bien se focaliser sur les lettres finales des signes [voir arrêt du 13 juillet 2017, Migros-Genossenschafts-Bund/EUIPO – Luigi Lavazza (CReMESPRESSO), T‑189/16, non publié, EU:T:2017:488, point 49 et jurisprudence citée].

72      Au vu des considérations figurant aux points 68 et 69 ci-dessus, ainsi que de la jurisprudence citée au point 60 ci-dessus, il convient de constater que, en l’espèce, la présence de l’élément commun identique « cz » permet de conclure que c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours, a estimé, en substance, que les marques en conflit sont similaires à un faible degré sur le plan visuel.

73      Cette appréciation ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante tirés de la pratique décisionnelle de l’EUIPO, dès lors que, dans le cadre de son contrôle de légalité, le Tribunal n’est pas lié par la pratique décisionnelle de l’EUIPO [voir, en ce sens, arrêt du 30 mars 2022, Copal Tree Brands/EUIPO – Sumol + Compal Marcas (COPALLI), T‑445/21, non publié, EU:T:2022:198, point 49 et jurisprudence citée].

–       Sur la comparaison phonétique

74      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a estimé que les marques en conflit coïncidaient par la suite des lettres « cz », située en deuxième position, et qu’elles se différenciaient par les mots « rivero » et « tradición », situés au début des marques. S’agissant de l’élément « s.l. » qui se trouve à la fin de la marque demandée, elle a estimé qu’une partie du public pourrait ne pas le prononcer. Elle en a conclu que, en raison de leurs différences sur le plan phonétique, les marques en conflit étaient peu similaires.

75      La requérante estime que, en ce qui concerne la comparaison phonétique des marques en conflit, le nombre de syllabes ainsi que la syllabe tonique sont différents. Elles auraient donc un rythme et une intonation nettement différents.

76      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

77      À l’instar de la chambre de recours, il convient de rappeler, ainsi qu’il a été souligné au point 60 ci-dessus, que l’élément « s.l. » positionné à la fin de la marque demandée aura tendance à ne pas être prononcé en raison de sa fonction d’indication de la forme juridique. Par conséquent, les éléments différents des marques en conflit, à savoir « rivero » et « tradición », sont composés tous deux de trois syllabes et que l’élément « cz » présent à l’identique est également prononcé en trois syllabes « cé-cé-ta ». Partant, pour une grande partie du public pertinent qui ne prononcera pas l’élément « s.l. », les deux marques auront une longueur similaire en raison du nombre identique de syllabes.

78      Ensuite, bien que la syllabe tonique se situe à différents endroits dans les éléments « rivero » et « tradición », il n’en reste pas moins que la présence de l’élément « cz » à l’identique dans les deux marques en conflit permet de retrouver le même rythme et la même intonation pour chacune des marques en conflit.

79      Partant, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a constaté, en substance, que les marques en conflit étaient similaires à un faible degré sur le plan phonétique.

–       Sur la comparaison conceptuelle

80      La chambre de recours a estimé que les marques en conflit, prises dans leur ensemble, ne formaient pas des expressions dont la signification serait différente de celle de la somme de leurs éléments. Elle a considéré qu’aucun des signes n’avait de sens pour le public pertinent et qu’il était dès lors impossible de les comparer sur le plan conceptuel. Partant, la comparaison sur ce plan serait dénuée de pertinence aux fins de l’évaluation de la similitude entre les signes.

81      La requérante estime que les marques en conflit sont nettement différentes sur le plan conceptuel, puisque les termes « tradición » et « rivero » évoquent des notions complètement différentes. À son avis, cette différence conceptuelle est claire et estompe la faible similitude qui existe en raison de la coïncidence des lettres « cz ».

82      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

83      Selon la jurisprudence, lorsqu’aucun des signes en cause n’a de signification, pris dans son ensemble, il doit être constaté que la comparaison sur le plan conceptuel n’est pas possible [arrêt du 6 avril 2022, Agora Invest/EUIPO – Transportes Maquinaria y Obras (TRAMOSA), T‑219/21, non publié, EU:T:2022:219, point 117].

84      Certes, les termes « rivero » et « tradición », pris séparément, ont une signification distincte et renvoient dès lors à des concepts différents. Toutefois, lorsque ces mots seront lus chacun avec, respectivement, les lettres « c » et « z » et « c », « z », « s » et « l », force est de constater que, pour le public hispanophone, les marques en conflit, prises dans leur ensemble, n’auront aucune signification précise.

85      Partant, il convient de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’aspect conceptuel était dénué de pertinence aux fins de l’évaluation de la similitude entre les deux signes en conflit.

 Sur le risque de confusion

86      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

87      Il convient en outre de rappeler que l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24 ; du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

88      La chambre de recours a rappelé que l'intervenante n’était pas parvenue à démontrer le caractère distinctif acquis et que la marque antérieure possédait dès lors un caractère distinctif normal.

89      Ensuite, s’agissant de la comparaison des marques en conflit, elle a estimé que, bien que les éléments divergents soient situés au début de chacune de ces deux marques et bien qu’il soit exact que le public accorde généralement plus d’importance au début d’une marque qu’à sa fin, il convenait toutefois de prendre en considération l’impression d’ensemble produite par les marques en conflit. Elle a considéré que l’élément « cz » était l’élément le plus distinctif dans la marque demandée et a souligné qu’il était positionné à la même place dans les deux marques, si bien que le public pertinent serait amené à percevoir ledit élément comme étant l’indicateur de l’origine commerciale des produits.

90      La chambre de recours en a déduit qu’il y avait un risque de confusion entre les deux marques, dès lors que la mention « cz » à la fin de chacune des deux marques concernées pourrait amener le public pertinent à penser que les produits désignés par chacune de ces deux marques proviennent de la même entreprise.

91      Ainsi, elle en a conclu qu’il existait un risque de confusion des marques en conflit dans l’esprit du public pertinent pour les produits et services identiques et similaires à un degré élevé ou moyen et que la similitude entre les marques était insuffisante pour qu’il existe un tel risque de confusion pour les produits et services peu similaires.

92      La requérante estime que les marques en conflit présentent des différences importantes dans leur composition et leur structure d’ensemble, ce qui permettrait de les distinguer clairement sur les plans visuels et phonétiques. Selon elle, ces différences, auxquelles s’ajoutent la différence conceptuelle et le fait que les éléments dominants soient divergents, suffisent à exclure tout risque de confusion.

93      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

94      En premier lieu, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle les éléments « rivero » et « tradición » seraient les éléments dominants des marques en conflit, ainsi qu’il résulte des considérations exposées aux points 58 à 63 ci-dessus, l’élément « cz » est l’élément le plus distinctif de la marque demandée et est présent à l’identique dans la marque antérieure. Par ailleurs, ainsi qu’il a été souligné aux points 62 et 63 ci-dessus, il ne saurait être considéré que l’appréciation de la similitude pourrait se faire uniquement sur la base des éléments « rivero » et « tradición ».

95      En l’espèce, en raison de la l’importance que revêt l’élément « cz » au regard de son caractère distinctif dans chacune des deux marques en conflit et notamment dans la marque demandée, il y a lieu de considérer que le public pertinent peut être amené à croire que les deux marques sont proposées sous le contrôle d’une même entreprise ou d’entreprises liées économiquement, identifiées par la suite de lettres « cz ».

96      Il convient également de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n'a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l'image non parfaite qu'il en a gardée en mémoire (voir, par analogie, arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26).

97      Partant, même à supposer que le public pertinent soit en mesure de distinguer entre les deux marques en conflit, fort de son caractère distinctif, l’élément « cz » sera susceptible de rester dans la mémoire des consommateurs, étant à lui seul de nature à amener le public pertinent à croire que les deux marques en conflit se trouvent sous le contrôle économique de la même entreprise.

98      Compte tenu de cette appréciation, il convient de conclure que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à un risque de confusion entre les marques en conflit pour les produits visés par la marque demandée identiques à ceux visés par la marque antérieure, à savoir les « boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; vin » compris dans la classe 33, et pour les produits très similaires à cette dernière, à savoir les « bières » comprises dans la classe 32. Elle a également estimé à juste titre qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit pour ce qui concerne les produits et services visés par la marque demandée similaires à un degré moyen aux produits visés par la marque antérieure, à savoir les « moûts » compris dans la classe 32, les « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de moûts, vins, liqueurs et boissons alcoolisées de toutes sortes » compris dans la classe 35 et les « production de vins pour le compte de tiers ; services de distillerie de spiritueux ; conservation de vins et boissons alcoolisées ; pressurage de fruits ; services de transformation et traitement du raisin pour l’obtention de boissons alcoolisées » compris dans la classe 40.

99      En second lieu, il convient de rappeler que la chambre de recours a conclu qu’il n’existait pas de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent en ce qui concerne les produits et les services qui présentaient un faible degré de similitude. Or, il y a lieu de rappeler qu’il a été constaté, ainsi qu’il ressort du point 43 ci-dessus, que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en estimant que les « services vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres » étaient similaires à un degré moyen aux produits couverts par la marque antérieure alors que ces services devaient être considérés comme similaires à un faible degré. Par conséquent, compte tenu du faible degré de similitude des signes en cause sur les plans visuel et phonétique, ce constat exclut l’existence d’un risque de confusion à leur égard.

100    Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’annuler la décision attaquée en ce qui concerne les « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres » relevant de la classe 35 et de rejeter le recours pour le surplus.

 Sur les dépens

Selon l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. En l’espèce, le recours n’étant accueilli que pour une partie des produits et services en cause, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle du 4 février 2019 (affaire R 257/2018-2) est annulée en tant qu’elle concerne les « services de vente en gros et au détail dans les commerces et par des réseaux informatiques mondiaux de vinaigres » relevant de la classe 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Tradición CZ, SL, l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et Mme María Dolores Rivero Argudo supporteront chacun leurs propres dépens.

Spielmann

Gâlea

Tóth

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 décembre 2022.

Signatures


1 Langue de procédure : l’espagnol.