Language of document : ECLI:EU:T:2020:193

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

13 mai 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne figurative pantys – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001– Absence de caractère distinctif acquis par l’usage – Article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑532/19,

EC Brand Comércio, Importação e Exportação de Vestuário em Geral Ltda, établie à Sorocaba (Brésil), représentée par Mes B. Bittner et U. Heinrich, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 22 mai 2019 (affaire R 314/2019‑5), concernant une demande d’enregistrement de la marque figurative pantys comme marque de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. C. Iliopoulos et R. Norkus (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 29 juillet 2019,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 17 octobre 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 6 mars 2018, la requérante, EC Brand Comércio, Importação e Exportação de Vestuário em Geral Ltda, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 5, 25 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, notamment, à la description suivante :

–        classe 5 : « Absorbants hygiéniques ; slips hygiéniques ; serviettes hygiéniques, renforts pour incontinence ; protections pour culottes [articles d’hygiène] ; culottes hygiéniques » ;

–        classe 25 : « Renforts constitués de couches de tissu pour sous-vêtements ; sous-vêtements féminins ; ceintures gainantes, à savoir culottes ; lingerie féminine ; vêtements de maternité, à savoir culottes » ;

–        classe 35 : « Vente au détail en ligne de sous-vêtements féminins ; lingerie, sous-vêtements et produits hygiéniques ».

4        Par décision du 10 décembre 2018, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 2, du même règlement, pour les produits et services visés au point 3 ci-dessus, en raison, d’une part, de l’absence de caractère distinctif du signe demandé et, d’autre part, de son caractère descriptif.

5        Le 8 février 2019, la requérante a formé un recours contre la décision de l’examinateur auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001.

6        Par décision du 22 mai 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En premier lieu, s’agissant du public pertinent, elle a estimé que celui-ci était composé du grand public, qui fera preuve d’un degré d’attention moyen. En deuxième lieu, elle a relevé que le lien entre la marque demandée, qui est une graphie déformée du mot anglais « panties », et les produits et services en cause était suffisamment étroit pour que le signe soit considéré comme descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. En troisième lieu, elle a écarté les arguments de la requérante selon lesquels ladite marque avait acquis un caractère distinctif par l’usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du même règlement. À cet égard, elle a estimé que les éléments de preuve soumis par la requérante ne permettaient pas de conclure que cette marque avait acquis, en tant que tel, un caractère distinctif du point de vue du public pertinent à la date du dépôt de la demande d’enregistrement.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, en ce qu’elle a rejeté le recours, s’agissant, d’une part, de certains produits relevant de la classe 5, à savoir « [les] absorbants hygiéniques, serviette hygiéniques, renforts pour incontinence » et, d’autre part, de certains services relevant de la classe 35, à savoir « [la] vente en détail en ligne de produits hygiéniques féminins » ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

8        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        À l’appui du recours, la requérante invoque trois moyens, tirés, le premier de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement et, le troisième, de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c) du règlement 2017/1001

10      La requérante fait, en substance, grief à la chambre de recours d’avoir erronément conclu au caractère descriptif de la marque demandée pour certains produits relevant de la classe 5, à savoir « [les] absorbants hygiéniques ; serviettes hygiéniques ; renforts pour incontinence » et certains services relevant de la classe 35 à savoir « [la] vente en détail en ligne des produits hygiéniques féminins ».

11      L’EUIPO conteste l’ensemble des arguments avancés par la requérante.

12      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci.

13      Les signes ou indications visés par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service [arrêts du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 30, et du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, EU:T:2002:41, point 37].

14      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir arrêts du 12 janvier 2005, Deutsche Post EURO EXPRESS/OHMI (EUROPREMIUM), T‑334/03, EU:T:2005:4, point 25 et jurisprudence citée, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, point 25 et jurisprudence citée].

15      Partant, l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [arrêts du 16 mars 2006, Telefon & Buch/OHMI – Herold Business Data (WEISSE SEITEN), T‑322/03, EU:T:2006:87, point 90, et du 18 novembre 2014, Think Schuhwerk/OHMI – Müller (VOODOO), T‑50/13, non publié, EU:T:2014:967, point 20].

16      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner les arguments des parties relatifs à l’appréciation faite par la chambre de recours dans la décision attaquée.

17      En premier lieu, il convient de relever que, au point 13 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que les produits et services en cause s’adressaient au grand public, dont le niveau d’attention était moyen. La requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours. Au demeurant, aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause une telle appréciation. En outre, dans la mesure où, en l’espèce, la même chambre a, en substance, fait siennes les observations de l’examinateur et a fondé la motivation de la décision attaquée sur la signification en anglais de ladite marque, il convient d’apprécier le caractère descriptif de cette marque par référence à la perception du consommateur moyen anglophone.

18      En second lieu, il convient, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, d’examiner, sur la base d’une signification donnée du signe en cause, s’il existe, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret entre le signe en cause et les produits et les services pour lesquels l’enregistrement est demandé [voir, en ce sens, arrêt du 27 octobre 2016, Caffè Nero Group/EUIPO (CAFFÈ NERO), T‑29/16, non publié, EU:T:2016:635, point 22].

19      À cet égard, la chambre de recours, à l’instar de l’examinateur, a relevé, au point 14 de la décision attaquée, que l’élément verbal « pantys » de la marque demandée constitue une graphie déformée de mot anglais « panties » (culottes), lequel désigne une forme de sous-vêtements féminins.

20      À cet égard, la chambre de recours a observé, au point 16 de la décision attaquée, que le mot anglais « panties » figurant dans plusieurs dictionnaires anglais correspond en français à « culottes » ou « slips pour femmes et jeunes filles, en particulier culottes à jambes courtes ou sans jambes, avec une taille élastiquée » ou « collants ».

21      Ces considérations de la chambre de recours doivent être approuvées. En effet, l’élément verbal « pantys » de la marque demandée sera perçu par le public pertinent comme un terme désignant une forme de sous-vêtements féminins, à savoir la culotte. Lorsque ce terme est utilisé pour désigner les produits en cause, lesquels sont tous des produits hygiéniques, notamment pour les femmes, il sera immédiatement compris par le public pertinent comme décrivant leurs qualités, à savoir, d’une part, que ceux-ci peuvent être proposés sous forme de culotte et, d’autre part, que lesdits produits peuvent être intégrés à cette forme de sous-vêtements féminins. Dans ces circonstances, force est de constater qu’il existe un rapport suffisamment direct, au sens de la jurisprudence citée au point 14 et 18 ci-dessus, entre les produits en cause et la marque demandée.

22      Aucun des arguments de la requérante ne permet de remettre en cause ces considérations.

23      En premier lieu, ne saurait prospérer l’argument de la requérante selon lequel l’existence de l’élément verbal « pantys » de la marque demandée ne peut être prouvée du point de vue lexical. Contrairement à ce qu’avance la requérante, la chambre de recours n’est pas tenue de prouver que ledit élément verbal figure dans le dictionnaire. En effet, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque de l’Union européenne ne doit être apprécié que sur la base de la réglementation de l’Union pertinente telle qu’interprétée par le juge de l’Union. Dès lors, il suffit que la chambre de recours ait appliqué le critère du caractère descriptif, tel qu’interprété par la jurisprudence, pour prendre sa décision, sans qu’elle ait à se justifier par la production d’éléments de preuve [arrêts du 8 juillet 2004, Telepharmacy Solutions/OHMI (TELEPHARMACY SOLUTIONS), T‑289/02, EU:T:2004:227, point 54, et du 21 janvier 2009, Korsch/OHMI (PharmaCheck), T‑296/07, non publié, EU:T:2009:12, point 44].

24      En outre, même à supposer que, ainsi que le prétend la requérante, le terme « pantys » ne soit pas utilisé dans le langage courant en tant qu’indication descriptive par rapport aux produits et services visés par la marque demandée, cette circonstance est sans pertinence en l’espèce. En effet, pour que l’EUIPO oppose un refus d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il n’est pas nécessaire que les signes ou indications composant la marque soient effectivement utilisés, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives de produits ou de services tels que ceux pour lesquels la demande est présentée ou de leurs caractéristiques. Il suffit, comme l’indique la lettre même de cette disposition, que ces signes ou indications puissent être utilisés à de telles fins (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 32), ce qui est le cas en l’espèce (voir point 30 ci-après).

25      Dans ces conditions, il n’y a pas lieu, en tout état de cause, de se prononcer sur la recevabilité de l’extrait de dictionnaire figurant à l’annexe A6 de la requête fourni par la requérante pour la première fois devant le Tribunal.

26      En second lieu et dans le même contexte, la requérante fait également valoir que le fait que la marque demandée n’est pas conforme aux règles de la langue anglaise confère, en substance, à celui-ci un écart perceptible par rapport à l’orthographie correcte du mot, lequel attirera l’attention du public pertinent.

27      Une telle argumentation ne saurait être retenue. Premièrement, il y a lieu d’approuver la considération de la chambre de recours selon laquelle l’élément verbal « pantys » de la marque demandée ne s’éloigne pas du langage courant d’une manière telle que le public pertinent y verrait plus qu’une simple graphie déformée du mot anglais « panties » (voir les points 14 à 18 de la décision attaquée).

28      Deuxièmement, la présence de la lettre « s » à la fin de l’élément verbal « pantys » de la marque demandée, alors que, selon les règles grammaticales de la langue anglaise, le pluriel du mot anglais « panty » est « panties », ne confère pas pour autant à ce dernier une quelconque originalité. À cet égard, il convient de rappeler que les graphies déformées ne contribuent généralement pas à surmonter le refus d’enregistrement résultant du fait que le contenu du signe est immédiatement compréhensible comme étant élogieux ou descriptif [voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2014, FTI Touristik/OHMI (BigXtra), T‑81/13, non publié, EU:T:2014:140, point 40 et jurisprudence citée]. Par ailleurs, une graphie déformée ne constitue généralement pas la preuve d’un élément d’ordre créatif susceptible de distinguer les produits et les services de la requérante de ceux d’autres entreprises [voir, en ce sens, arrêt du 16 octobre 2018, DNV GL/EUIPO (Sustainablel), T‑644/17, non publié, EU:T:2018:684, point 23].

29      Troisièmement, lorsque la graphie déformée d’une marque verbale n’est pas perceptible phonétiquement, elle est sans incidence sur l’éventuel contenu conceptuel que le public pertinent attribuera à ladite marque [voir, en ce sens, arrêt du 26 novembre 2008, Avon Products/OHMI (ANEW ALTERNATIVE), T‑184/07, non publié, EU:T:2008:532, point 26].

30      À cet égard, il convient d’observer que, en l’espèce, la graphie déformée de l’élément verbal « pantys » de la marque demandée est perceptible plutôt visuellement que phonétiquement, de sorte qu’elle n’aura qu’une incidence limitée sur la perception de celui-ci par le public pertinent. Ainsi, lorsque le consommateur concerné sera confronté à ladite marque, il la percevra comme étant une variante du mot anglais « panty », nonobstant l’adjonction de la lettre « s » finale, d’autant plus que le pluriel de ce mot est « panties ». Or, ledit mot est un mot courant en anglais qui est susceptible de décrire, ainsi qu’il a été constaté au point 21 ci-dessus, une de qualités pertinentes des produits en cause, à savoir le fait que ceux-ci peuvent être présentés sous une forme de culotte ou bien intégrés dans ce type de sous-vêtement féminin.

31      Il s’ensuit que l’élément verbal « pantys » de la marque demandée sera, malgré la graphie déformée, immédiatement perçu et compris par le public pertinent comme ayant le sens de « culotte » ou de « culottes », ce qui éclipsera toute impression que ladite marque pourrait indiquer sur l’origine commerciale des produits et des services en cause, de telle sorte que cette marque ne sera pas mémorisée par ce public comme une indication de provenance commerciale.

32      En troisième lieu, la requérante invoque dans ses écritures des décisions de juridictions allemandes en vue de se prévaloir de certaines des appréciations y figurant en ce qui concerne, notamment, l’usage et les caractéristiques de certains des produits relevant de la classe 5.

33      À cet égard, il convient de rappeler que le régime des marques de l’Union européenne est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. En conséquence, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque de l’Union européenne ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation pertinente. L’EUIPO et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont pas liés, même s’ils peuvent les prendre en considération, par des décisions intervenues à l’échelle des États membres, voire d’un pays tiers, et aucune disposition du règlement 2017/1001 n’oblige l’EUIPO ou, sur recours, le Tribunal à parvenir à des résultats identiques à ceux atteints par les administrations ou les juridictions nationales dans une situation similaire [voir arrêt du 15 juillet 2015, Australian Gold/OHMI – Effect Management & Holding (HOT), T‑611/13, EU:T:2015:492, point 60 et jurisprudence citée].

34      En tout état de cause, force est de constater que la décision du Tribunal allemand des brevets n’est pas pertinente en l’espèce dans la mesure où celle-ci porte sur la similitude entre les produits relevant de la classe 5 et ceux relevant de la classe 25, alors que le présent recours vise uniquement des produits relevant de la classe 5 ainsi que des services relevant de la classe 35.

35      Quant au caractère descriptif de la marque demandée pour les services de vente au détail en ligne des produits d’hygiène féminine relevant de la classe 35, il convient d’observer qu’il a été conclu au point 21 ci-dessus au caractère descriptif de ladite marque pour les produits en cause, en raison, notamment, de l’existence d’un lien entre ceux-ci. Ainsi, lorsque le public pertinent sera confronté à la signification évidente de cette marque au moment de la décision d’achat de ces produits, l’élément verbal « pantys » de la même marque sera également descriptif de l’activité de vente desdits produits, que ce soit dans le cadre d’un commerce de détail ou par Internet [voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2015, Volkswagen/OHMI (STREET), T‑321/14, non publié, EU:T:2015:619, point 19].

36      Au vu de ces éléments, il convient de rejeter le premier moyen comme étant non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

37      Dans le cadre du présent moyen, la requérante semble reprocher à la chambre de recours de n’avoir fourni aucun détail en ce qui concerne le caractère distinctif de la marque demandée, alors que, selon elle, la marque demandée est dotée d’un tel caractère.

38      L’EUIPO conteste l’argumentation de la requérante.

39      Même à supposer que l’argumentation de la requérante doive être comprise comme reprochant à la chambre de recours de ne pas s’être prononcée sur l’existence d’un éventuel caractère distinctif de la marque demandée, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il ressort clairement du libellé de l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 qu’il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés par cette disposition s’applique pour que le signe demandé ne puisse être enregistré comme marque de l’Union [ordonnance du 13 février 2008, Indorata-Serviços e Gestão/OHMI, C‑212/07 P, non publiée, EU:C:2008:83, points 27 et 28, et arrêt du 2 mai 2012, Universal Display/OHMI (UniversalPHOLED), T‑435/11, non publié, EU:T:2012:210, point 41].

40      En l’espèce, l’existence du motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 ayant été établie, la chambre de recours n’était pas, en tout état de cause, tenue d’examiner si la marque demandée était distinctive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

41      En toute hypothèse, dans la mesure où la chambre de recours a conclu, à juste titre, au caractère descriptif de la marque demandée au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du même règlement (voir point 21 ci-dessus), il n’est pas nécessaire, à la lumière de la jurisprudence citée au point 39 ci-dessus, d’examiner le bien-fondé d’un grief tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

42      Le deuxième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le troisième moyen tiré, en substance, de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 

43      À titre liminaire, il convient de relever que, dans le cadre du troisième moyen, la requérante n’invoque aucune disposition particulière susceptible d’avoir été violée par la chambre de recours.

44      Or, il peut être aisément déduit des écritures de la requérante et, notamment de l’intitulé du troisième moyen, que, en avançant que « la marque demandée a été largement utilisée dans l’UE », cette dernière vise à démontrer que ladite marque a acquis un caractère distinctif par l’usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001.

45      À cet égard, la requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas accordé une valeur probante à des éléments de preuve qu’elle avait fournis lors de la procédure devant l’EUIPO. En particulier, elle lui reproche de ne pas avoir pris en considération, comme une preuve pertinente, une commande figurant à l’annexe A9 de la requête au motif que celle-ci a été établie postérieurement à la date du dépôt de la demande d’enregistrement.

46      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

47      Il y a lieu de rappeler que l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 ne prévoit pas un droit autonome à l’enregistrement d’une marque. Il comporte une exception aux motifs de refus édictés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement 2017/1001 [voir arrêt du 6 juillet 2011, Audi et Volkswagen/OHMI (TDI), T‑318/09, EU:T:2011:330, point 40 et jurisprudence citée].

48      En effet, en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, les motifs absolus de refus visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du même règlement ne s’opposent pas à l’enregistrement d’une marque si celle-ci, pour les produits ou services pour lesquels l’enregistrement a été demandé, a acquis un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait.

49      Dans l’hypothèse visée par l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, le fait que le signe constituant la marque en question est effectivement perçu par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale d’un produit ou d’un service, est le résultat d’un effort économique du demandeur de marque. Or, cette circonstance justifie que soient écartées les considérations d’intérêt général sous-jacentes à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement 2017/1001, lesquelles exigent que les marques visées par ces dispositions puissent être librement utilisées par tous, afin d’éviter de créer un avantage concurrentiel illégitime en faveur d’un seul opérateur économique [arrêts du 3 décembre 2003, Audi/OHMI (TDI), T‑16/02, EU:T:2003:327, point 50, et du 14 décembre 2017, bet365 Group/EUIPO – Hansen (BET 365), T‑304/16, EU:T:2017:912, point 25].

50      En premier lieu, l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage d’une marque exige que le public pertinent identifie grâce à la marque les produits ou les services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée. Cette identification doit être effectuée grâce à l’usage du signe en tant que marque et, donc, grâce à la nature et à l’effet de celui-ci, qui le rendent propre à distinguer les produits ou les services concernés de ceux d’autres entreprises [voir arrêt du 29 septembre 2010, CNH Global/OHMI (Combinaison des couleurs rouge, noire et grise pour un tracteur), T‑378/07, EU:T:2010:413, points 28 et 29 et jurisprudence citée].

51      En deuxième lieu, pour qu’une marque puisse être enregistrée sur le fondement de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, le caractère distinctif acquis par l’usage de cette marque doit être démontré dans la partie de l’Union européenne où elle en était dépourvue au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), de ce même règlement (voir arrêt du 25 juillet 2018, Société des produits Nestlé e.a./Mondelez UK Holdings & Services, C‑84/17 P, C‑85/17 P et C‑95/17 P, EU:C:2018:596, point 75 et jurisprudence citée).

52      En troisième lieu, l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage doit avoir eu lieu antérieurement au dépôt de la demande (voir arrêt du 29 septembre 2010, Combinaison des couleurs rouge, noire et grise pour un tracteur, T‑378/07, EU:T:2010:413, point 34 et jurisprudence citée).

53      En quatrième lieu, pour déterminer si le signe en question a acquis un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait, il faut apprécier globalement les éléments qui peuvent démontrer que la marque est devenue apte à identifier les produits ou les services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée et, donc, à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Aux fins de cette appréciation, peuvent être prises en considération, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie les produits ou les services comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles (voir arrêt du 29 septembre 2010, Combinaison des couleurs rouge, noire et grise pour un tracteur, T‑378/07, EU:T:2010:413, points 31 et 32 et jurisprudence citée).

54      En cinquième lieu, le caractère distinctif d’un signe, y compris celui acquis par l’usage qui en a été fait, doit être apprécié par rapport, d’une part, aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé et, d’autre part, à la perception présumée d’un consommateur moyen de la catégorie des produits ou des services en cause, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [voir arrêt du 28 octobre 2009, BCS/OHMI – Deere (Combinaison des couleurs verte et jaune), T‑137/08, EU:T:2009:417, point 29 et jurisprudence citée].

55      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si, en l’espèce, la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en considérant que la marque demandée n’avait pas acquis de caractère distinctif après l’usage qui en avait été fait, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001.

56      En l’espèce, il ressort de la décision attaquée ainsi que du dossier de l’EUIPO que la requérante a présenté, lors de la procédure administrative, comme éléments de preuve tendant à établir le caractère distinctif acquis par l’usage de la marque demandée, deux types de documents, à savoir, d’une part, une commande de produits commercialisés par celle-ci en date du 29 septembre 2017 et, d’autre part, les statistiques du nombre des visiteurs de son site Internet provenant, notamment, du Royaume-Uni et d’Irlande.

57      À cet égard, il y a lieu de rappeler, ainsi que cela a été indiqué au point 51 ci-dessus, qu’une marque ne peut être enregistrée en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 que si la preuve est rapportée qu’elle a acquis un caractère distinctif par l’usage qui en a été fait dans la partie de l’Union concernée par le motif de refus d’enregistrement.

58      En ce qui concerne, en premier lieu, la commande apportée par la requérante datée du 29 septembre 2017, il convient de relever que, dans la mesure où ce document a été établi, contrairement à ce qui est indiqué au point 27 de la décision attaquée, antérieurement à la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque demandée, à savoir le 6 mars 2018, c’est à tort que la chambre de recours a considéré qu’il s’agissait d’un élément de preuve établi après le dépôt de la marque en cause.

59      En outre, il convient de rappeler qu’il ne saurait être exclu pour l’EUIPO de prendre en considération des éléments qui, bien que postérieurs à la date du dépôt de la demande d’enregistrement, permettent de tirer des conclusions sur la situation telle qu’elle se présentait avant cette même date (voir, par analogie, arrêt du 17 juillet 2008, L & D/OHMI, C‑488/06 P, EU:C:2008:420, point 71 et jurisprudence citée)

60      Néanmoins, cette erreur n’est pas de nature à entraîner l’annulation de la décision attaquée.

61      En effet, indépendamment de la question de la date d’établissement du document en question par la chambre de recours, il y a lieu d’observer que, la chambre de recours ayant constaté au point 27 de la décision attaquée que ledit document émane d’un consommateur portugais, il n’est pas, en tout état de cause, à même de démontrer la perception de la marque demandée par le public pertinent, lequel est en l’espèce le public anglophone, comme l’a relevé également en substance la chambre de recours. Dans ces circonstances, il y a lieu d’écarter comme inopérant le grief de la requérante selon lequel le document en question a été établi antérieurement à la date de dépôt de la marque demandée.

62      S’agissant, en second lieu, des statistiques des visites du site Internet de la requérante, il y a lieu de relever, premièrement, qu’il s’agit d’un document ne comportant aucune indication relative à la période sur laquelle portent lesdites données. Il n’est, dès lors, pas possible, ainsi que le relève la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée, de déterminer s’il s’agit d’un document portant sur une période pertinente.

63      Deuxièmement, il convient de souligner, ainsi que l’observe à juste titre l’EUIPO, qu’il ne découle nullement du dossier que l’objet de ces visites consistait effectivement à des achats de produits commercialisés par la requérante.

64      Troisièmement, même à supposer que l’objet de ces visites aurait effectivement été l’achat des produits en cause et que celles-ci portaient sur une période pertinente, force est de constater que les nombres, d’une part, de 1 569 visites en provenance du Royaume-Uni, et, d’autre part, de 1 140 visites en provenance d’Irlande, constituent un total particulièrement peu élevé eu égard aux populations respectives de ces deux pays.

65      Ainsi, il y a lieu de constater que c’est sans commettre une erreur de droit que la chambre de recours a considéré que cet élément de preuve « n’étayait pas l’allégation selon laquelle la marque aurait acquis un caractère distinctif par l’usage ».

66      Eu égard à ce qui précède, et même à supposer que les statistiques fournies par la requérante portaient sur la période pertinente, cette circonstance n’aurait pas été, en tout état de cause, de nature à modifier la conclusion de la chambre de recours figurant au point 27 de la décision attaquée relative à l’absence de caractère distinctif acquis par la marque demandée. En effet, les éléments produits par la requérante devant ladite chambre sont, ainsi qu’il découle des points 60 à 65 ci-dessus, manifestement insuffisants, aussi bien qualitativement que quantitativement, en l’absence des autres éléments de preuves tels que mentionnés au point 55 ci-dessus, aux fins de démontrer que le public pertinent ou, à tout le moins, une fraction significative de celui-ci identifierait, grâce à ladite marque, les produits et les services en cause comme provenant de la requérante.

67      C’est donc sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a estimé que les preuves soumises de l’utilisation de la marque demandée ne permettaient pas de conclure que celle-ci avait acquis un caractère distinctif par l’usage.

68      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, comme non fondé et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

69      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      EC Brand Comércio, Importação e Exportação de Vestuário em Geral Ltda est condamnée aux dépens.

Marcoulli

Iliopoulos

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 mai 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.