Language of document : ECLI:EU:C:2016:992


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 21 décembre 2016  (1)






Avis 2/15

Demande d’avis présenté par la Commission européenne en vertu de l’article 218, paragraphe 11, TFUE

« Conclusion de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et la République de Singapour – Répartition des compétences entre l’Union européenne et les États membres »






Table des matières


L’ALEUES

Le droit de l’Union

Le traité sur l’Union européenne

Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

La demande d’un avis de la Cour

Les questions soulevées par la demande d’avis de la Commission

La répartition des compétences entre l’Union et les États membres et la base légale de la conclusion de l’ALEUES

Sur l’article 207, paragraphes 1, 5 et 6, TFUE

Sur l’article 3, paragraphe 2, TFUE

Sur les objectifs et les définitions générales pertinentes pour l’ALEUES (chapitre 1 er de l’ALEUES )

Argument

Analyse

Sur le commerce des marchandises (chapitres 2 à 6 de l’ALEUES  et protocole I de l’ALEUES )

Arguments

Analyse

Sur les services, l’établissement et le commerce électronique (chapitre 8 de l’ALEUES )

Arguments

Arguments généraux

Arguments concernant les transports

Analyse

Introduction

Sur la compétence exclusive sur la base de l’article 207, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, TFUE

Sur les matières exclues du champ d’application de la politique commerciale commune en vertu de l’article 207, paragraphe 5, TFUE

Sur la compétence exclusive sur la base de l’article 3, paragraphe 2, TFUE

– Sur le premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE

– Sur le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE

Sur les investissements (chapitre 9, section A, de l’ALEUES  )

Arguments

Analyse

Introduction

Sur la compétence exclusive sur la base de l’article 207, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, TFUE

– Sur la signification de l’expression « investissements étrangers directs » au sens de l’article 207, paragraphe 1, TFUE

– Sur la réglementation des « investissements étrangers directs » en tant que partie de la politique commerciale commune

Sur la compétence de l’Union sur la base de l’article 63 TFUE, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 2, TFUE

Sur les compétences partagées entre l’Union et les États membres

L’ALEUES peut-il annuler des accords bilatéraux conclus entre les États membres et la République de Singapour ?

Sur les marchés publics (chapitre 10 de l’ALEUES )

Arguments

Analyse

Sur la propriété intellectuelle (chapitre 11 de l’ALEUES )

Arguments

Analyse

Sur la signification de l’expression « aspects commerciaux de la propriété intellectuelle » figurant à l’article 207, paragraphe 1, TFUE

Sur la compétence de l’Union en ce qui concerne le chapitre 11 de l’ALEUES

Sur la concurrence et les questions connexes (chapitre 12 de l’ALEUES )

Arguments

Analyse

Sur les obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable (chapitre 7 de l’ALEUES ) ainsi qu’au commerce et développement durable (chapitre 13 de l’ALEUES )

Arguments

Sur les obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable

Sur le commerce et le développement durable

Analyse

Sur les objectifs liés aux échanges et les objectifs non liés aux échanges : principes généraux

Sur les obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable

Sur le commerce et le développement durable

Sur la transparence et le contrôle administratif et judiciaire des mesures d’application générale (chapitre 14 de l’ALEUES  et dispositions connexes d’autres chapitres )

Arguments

Analyse

Sur le règlement des différends et la médiation (chapitre 9, section B , ainsi que chapitres 13, 15 et 16 de l’ALEUES )

Arguments

Analyse

Sur les dispositions institutionnelles, générales et finales (chapitre 17 de l’ALEUES )

Arguments

Analyse

Sur l’appréciation de la compétence externe de l’Union pour conclure l’ALEUES

Conclusion

ANNEXE – Résumé de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et la République de Singapour



1.        La Commission européenne demande à la Cour, conformément à l’article 218, paragraphe 11, TFUE, de lui fournir un avis sur la répartition des compétences entre l’Union européenne et les États membres en ce qui concerne la conclusion de l’accord de libre-échange que l’Union européenne envisage de passer avec la République de Singapour (ci-après l’« ALEUES ») (2). Le texte de l’ALEUES tel qu’il a été négocié par la Commission dispose que celui-ci doit être conclu en tant qu’accord entre l’Union et la République de Singapour sans participation des États membres. La Commission demande à la Cour de lui indiquer si cette façon de voir est correcte.

2.        La Commission soutient que l’Union jouit d’une compétence exclusive pour conclure l’ALEUES. Elle allègue que la majeure partie de cet accord relève de la compétence que l’article 207 TFUE confère à l’Union en matière de politique commerciale commune, compétence qui est exclusive [article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE] et que la compétence exclusive de l’Union de conclure d’autres parties de l’accord résulte d’un acte législatif qui lui donne le pouvoir de le faire (premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE) ou du fait que la conclusion de l’ALEUES est susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée (troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE). La Parlement européen est globalement d’accord avec la Commission. Toutes les autres parties qui ont présenté des observations rétorquent que l’Union ne peut pas conclure seule cet accord parce que certaines parties de l’ALEUES relèvent de la compétence partagée de l’Union et des États membres, voire même de la compétence exclusive des États membres. La conséquence en est que les États membres devraient également être parties à l’ALEUES.

3.        L’ALEUES fait partie d’une nouvelle génération d’accords sur le commerce et les investissements que l’Union a négociés ou est en train de négocier avec des partenaires commerciaux dans d’autres régions du monde. L’accord n’est pas un « accord homogène » : il ne couvre pas un domaine ou sujet déterminé ni ne poursuit un objectif unique. Il vise, en particulier, à libéraliser le commerce et les investissements, et garantit certaines normes de protection d’une manière qui concilie objectifs économiques et objectifs non économiques. Bien qu’il soit fondé sur des règles existantes puisées dans des accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) (3), l’ALEUES s’étend également à ces disciplines et couvre des matières qui ne font pas (encore) partie de ces accords.

4.        Pour déterminer si l’Union peut conclure l’ALEUES sans les États membres, il est nécessaire, tout d’abord, d’avoir une compréhension claire des matières que couvre cet accord et des objectifs qu’il poursuit (4). Pareille compréhension servira par la suite de base à l’application des différentes règles du traité sur l’allocation de compétences à l’Union et sur la nature de ces compétences. Ce faisant, il convient d’appliquer les règles énoncées à l’article 3, paragraphe 1, TFUE (sur la compétence exclusive expresse) avant d’appliquer celles qui figurent à l’article 3, paragraphe 2, TFUE (sur la compétence exclusive implicite (5)) et, au besoin, celles qu’énumère l’article 4 TFUE (sur la compétence partagée).

 L’ALEUES

5.        Au mois de décembre 2006, la Commission a recommandé que le Conseil de l’Union européenne l’autorise à négocier un accord de libre-échange avec des pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) au nom et pour le compte de la Communauté européenne et des États membres. Au mois d’avril 2007, le Conseil a autorisé la Commission à entamer des négociations. Les négociations relatives à un accord de région à région se sont avérées difficiles et ont donc été suspendues. La Commission a alors suggéré de rechercher des accords de libre-échange bilatéraux avec les pays de l’ANASE en commençant par Singapour. Au mois de décembre 2009, le Conseil, se fondant sur les directives qu’il avait données pour les négociations avec l’ANASE, a autorisé la Commission à négocier un accord commercial avec Singapour. Ces négociations ont débuté au mois de mars 2010. Au mois de septembre 2011, le Conseil a modifié les directives de négociation de façon à ajouter les investissements sur la liste des sujets visés. À cette occasion, le Conseil a déclaré que l’objectif était que le chapitre sur les investissements de l’accord couvre des domaines de compétence partagée, tels que les investissements de portefeuille (6), le règlement des différends ainsi que la propriété et l’expropriation.

6.        Le 20 septembre 2013, l’Union (agissant par le truchement de la Commission) et la République de Singapour ont paraphé le texte de l’ALEUES (ce qui signifie qu’ils l’ont accepté comme étant définitif), à l’exception du chapitre sur les investissements. Ce texte a été publié le jour-même.

7.        Lorsqu’il est apparu que ce texte prévoyait la signature et la conclusion de l’ALEUES par l’Union sans participation des États membres, le comité de la politique commerciale (un comité désigné par le Conseil en application de l’article 207, paragraphe 3, TFUE) a, au mois de février 2014, renvoyé l’affaire devant le Comité des représentants permanents (Coreper). Le comité de la politique commerciale a invité le Coreper à confirmer la procédure de signature et de conclusion de l’ALEUES et lui a demandé d’inviter la Commission, en tant que négociatrice au nom et pour le compte de l’Union et des États membres, à adapter le texte au caractère mixte de ce type d’accord. Le Coreper a indiqué qu’il y avait un large consensus parmi les délégations, qui estiment que l’ALEUES devrait être signé et conclu en tant qu’accord mixte, ce qui signifie qu’aussi bien l’Union que les États membres devraient y être parties.

8.        Les négociations sur le chapitre relatif aux investissements ont été clôturées au mois d’octobre 2014. Au mois de juin 2015, la Commission a envoyé le texte consolidé du chapitre relatif aux investissements au comité de la politique commerciale et lui a indiqué que la totalité de l’accord était désormais paraphée.

9.        L’ALEUES se compose d’un préambule, de dix-sept chapitres, d’un protocole et de cinq clauses interprétatives.

10.      Le chapitre 1er (« Objectifs et définitions générales »)dispose que l’ALEUES a pour objectifs d’établir une zone de libre-échange en conformité avec l’article XXIV du GATT de 1994 (7) et avec l’article V de l’AGCS (8), ainsi que de libéraliser et de faciliter le commerce et les investissements entre les parties conformément aux dispositions de l’ALEUES.

11.      Le chapitre 2  Traitement national et accès au marché en ce qui concerne les marchandises ») commence par réaffirmer l’obligation des parties d’accorder le traitement national (9) conformément à l’article III du GATT de 1994 (que ce chapitre incorpore dans l’ALEUES). Il énonce également certaines obligations concernant des mesures non tarifaires. Des dispositions distinctes s’appliquent à la mise à disposition et à l’échange d’informations, de notifications et d’enquêtes ainsi qu’à l’administration de mesures visées.

12.      Le chapitre 3 (« Mesures commerciales »)énonce des obligations concernant, d’une part, des mesures antidumping et compensatoires ainsi que, d’autre part, deux types de sauvegardes (à savoir les mesures de sauvegarde globales et les mesures de sauvegarde bilatérales).

13.      Le chapitre 4 (« Obstacles techniques au commerce »)a pour objectif de faciliter et d’accroître le commerce des marchandises entre les parties en fournissant un cadre permettant de prévenir, de déceler et d’éliminer les obstacles techniques inutiles aux échanges relevant de l’accord OTC (qui fait partie de l’ALEUES).

14.      Le chapitre 5 (« Mesures sanitaires et phytosanitaires »)a pour objet a) de protéger la santé et la vie des personnes et des animaux ainsi que de préserver les végétaux sur le territoire respectif des parties tout en facilitant les échanges commerciaux entre les parties en ce qui concerne les mesures sanitaires et phytosanitaires (ci-après les « mesures SPS ») ; b) de contribuer à la poursuite de la mise en œuvre de l’accord sur l’application de mesures sanitaires et phytosanitaires (ci-après « l’accord SPS »), ainsi que c) de fournir un moyen d’améliorer la communication, la coopération et la résolution de problèmes liés à l’application de mesures SPS ayant une incidence sur le commerce entre les parties.

15.      Au chapitre 6  Douanes et facilitation des échanges »), les parties reconnaissent l’importance des questions relatives aux douanes et à la facilitation des échanges dans le contexte évolutif du commerce mondial et conviennent de renforcer leur coopération dans ce domaine. Ce chapitre énonce les principes sur lesquels doivent être fondées les dispositions et procédures des parties en matière de douane.

16.      Le chapitre 7 (« Obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable ») a pour objectifs de promouvoir, de développer et d’accroître la production d’énergie à partir de sources non fossiles renouvelables et durables (énergie verte), notamment grâce à la facilitation des échanges et des investissements. Ce chapitre s’applique aux mesures susceptibles d’avoir une incidence sur les échanges et les investissements entre les parties en ce qui concerne la production d’énergie verte, mais pas aux produits à partir desquels l’énergie est produite.

17.      Au chapitre 8 (« Services, établissement et commerce électronique »), les parties réaffirment leurs engagements respectifs en vertu de l’accord OMC (10). Ce chapitre énonce les dispositions nécessaires à la libéralisation progressive et réciproque du commerce des services, c’est-à-dire de la fourniture transfrontière de services en provenance du territoire d’une partie et à destination du territoire de l’autre partie ainsi que de la fourniture transfrontière de services sur le territoire d’une partie à l’intention d’un consommateur de services de l’autre partie, de l’établissement et de la présence temporaire de personnes physiques à des fins professionnelles. Ce chapitre traite du commerce électronique séparément. Il contient également des dispositions concernant la réglementation des services informatiques, des services postaux, des services de télécommunications, des services financiers et des services de transport maritime international.

18.      Le chapitre 9 (« Investissements ») est constitué de deux parties.

19.      La section A contient les dispositions matérielles sur la protection des investissements. Aux fins du chapitre 9, un « investissement » désigne « tout type d’avoir qui présente les caractéristiques d’un investissement, notamment l’engagement de capitaux ou d’autres ressources, la perspective de gains ou de profits, la prise de risque ou encore une certaine durée ». Les principales exigences concernent le traitement national, un traitement juste et équitable, une protection et une sécurité intégrales ainsi qu’une indemnisation des pertes subies en raison de situations de guerre ou de conflit armé, de révolution, d’état d’urgence nationale, de révolte, d’émeute ou d’insurrection sur le territoire de l’autre partie. La section A dispose également qu’aucune partie ne peut, directement ou indirectement, nationaliser ou exproprier les investissements des investisseurs visés de l’autre partie ou les assujettir à des mesures ayant des effets équivalents à une nationalisation ou à une expropriation sauf lorsque certaines conditions sont remplies. Chaque partie doit également autoriser que tout transfert se rapportant à un investissement visé soit effectué dans une devise librement convertible sans restriction ni retard. Dès l’entrée en vigueur de l’ALEUES, les accords bilatéraux conclus entre des États membres de l’Union et la République de Singapour qui sont cités à l’annexe 9-D doivent cesser d’être appliqués et être annulés et remplacés par l’ALEUES.

20.      La section B met en place un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (ci-après le mécanisme « RDIE »). Ce mécanisme, qui peut comporter un arbitrage, s’applique à tout différend opposant un requérant d’une partie à l’accord à l’autre partie à l’accord en raison d’un traitement (y compris en cas d’inertie) que ce requérant estime contraire aux dispositions énoncées sous la section A et qui aurait prétendument occasionné une perte ou un préjudice à ce requérant ou à son entreprise établie localement. Une disposition distincte stipule qu’en principe, aucune des parties à l’accord n’accorde de protection diplomatique ni n’introduit de recours au niveau international en ce qui concerne tout différend que l’un de ses investisseurs et l’autre partie à l’accord ont consenti à soumettre ou ont soumis à l’arbitrage en application du chapitre 9, section B.

21.      Le chapitre 10 (« Marchés publics »)s’applique à toute mesure ayant trait à une forme de marché visée par l’accord, c’est-à-dire à tout marché public passé par une entité dont l’accord dresse la liste et dont la valeur dépasse un seuil donné.

22.      Le chapitre 11 (« Propriété intellectuelle »)énonce les droits et obligations concernant sept catégories de droits de propriété intellectuelle qui sont également visées par l’accord ADPIC et une catégorie qui n’est pas couverte par cet accord, à savoir les droits protégeant les obtentions végétales. La structure de cette section est calquée sur celle de l’accord ADPIC : chaque sous-section est consacrée à un droit de propriété intellectuelle visé par l’ALEUES et comprend également des droits et obligations prévus dans d’autres accords multilatéraux (dont certains font partie de l’accord ADPIC et d’autres non).

23.      Le chapitre 12 (« Concurrence et questions connexes »)met l’accent sur l’importance d’une concurrence libre et non faussée dans les relations commerciales entre les parties. Il énonce des principes concernant les activités antitrust et les concentrations, les entreprises publiques, les entreprises bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs et les monopoles d’État ainsi que les subventions.

24.      Au chapitre 13 (« Commerce et développement durable »), les parties s’engagent à développer et à promouvoir les échanges internationaux et leurs relations commerciales et économiques bilatérales de manière à contribuer au développement durable. Les principales obligations imposent à chaque partie d’établir ses propres niveaux de protection en matière d’environnement et de travail, et d’adopter ou de modifier en conséquence ses législations et politiques de manière cohérente avec les principes des normes ou accords internationalement reconnus auxquels elles sont parties. Ce chapitre énonce également des obligations distinctes en ce qui concerne le commerce du bois et des produits dérivés ainsi que des produits de la pêche, de même que des dispositions spécifiques régissant le règlement des différends.

25.      Le chapitre 14 (« Transparence »)impose certaines obligations aux parties afin qu’elles mettent en place un environnement réglementaire transparent et prévisible pour les opérateurs économiques, qu’elles apportent des clarifications et qu’elles prévoient des modalités améliorées pour permettre la transparence, la consultation et une meilleure administration des mesures d’application générale. Ces obligations s’appliquent en principe sans préjudice de règles plus spécifiques énoncées dans d’autres chapitres de l’ALEUES.

26.      Le chapitre 15 (« Règlement des différends ») énonce les règles d’application générale qui visent à prévenir et à régler toute divergence qui pourrait survenir entre les parties quant à l’interprétation et à l’application de l’ALEUES et de parvenir, dans la mesure du possible, à une solution mutuellement acceptable. Cette procédure de règlement des différends comporte les étapes suivantes : la demande de consultations, l(a demande d)’ouverture d’une procédure d’arbitrage, l’établissement d’un rapport intermédiaire et l’adoption d’une décision finale. Des dispositions distinctes règlent la procédure de mise en œuvre et les mesures visant à assurer la mise en conformité.

27.      Le chapitre 16 (« Mécanisme de médiation ») met en place un mécanisme de médiation destiné à faciliter la recherche d’une solution mutuellement convenue par une procédure détaillée et rapide avec l’aide d’un médiateur. Sauf disposition contraire, il s’applique à toute mesure relevant du champ d’application de l’ALEUES qui a une incidence négative sur les échanges commerciaux ou les investissements entre les parties.

28.      Le chapitre 17 (« Dispositions institutionnelles, générales et finales ») contient trois catégories de dispositions : la première catégorie instaure une structure institutionnelle composée de différents comités au sein desquels les parties doivent se rencontrer afin de surveiller et faciliter la mise en œuvre et l’application de l’ALEUES. Une deuxième catégorie vise le processus de décision, les amendements, l’entrée en vigueur, l’effet direct, les adhésions futures, l’application territoriale de l’ALEUES, les différentes annexes et autres textes faisant partie intégrante de l’ALEUES et les versions authentiques du texte de l’ALEUES. Une troisième catégorie concerne les questions de droit matériel, notamment la fiscalité, le compte des transactions courantes et des mouvements de capitaux, les fonds souverains, les restrictions visant à préserver l’équilibre de la balance des paiements et les exceptions concernant la sécurité.

29.      Sont annexés au texte des chapitres de l’ALEUES un protocole concernant les règles d’origine, des clauses interprétatives concernant l’article 17.6 (fiscalité), la rémunération des arbitres, des dispositions additionnelles relatives aux douanes, la reconnaissance mutuelle des programmes relatifs aux opérateurs économiques agréés et les contraintes spécifiques d’espace de Singapour ou l’accès aux ressources naturelles.

30.      Un résumé plus détaillé de l’ALEUES est repris dans l’annexe aux présentes conclusions. Cette annexe a pour objet non pas de résumer chaque aspect de l’ALEUES, mais plutôt de fournir un résumé des points principaux qui sont pertinents aux fins des présentes conclusions. Tant la description de la demande et les observations des parties que mon analyse de la demande devraient être lues conjointement avec cette annexe.

 Le droit de l’Union

 Le traité sur l’Union européenne

31.      L’article 5 TUE énonce le principe d’attribution, conformément auquel toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres (11). L’article 5, paragraphe 2, TUE dispose que « l’Union n’agit que dans les limites des compétences que les États membres lui ont attribuées dans les traités pour atteindre les objectifs que ces traités établissent » et que « [t]oute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres ».

32.      L’article 21, paragraphe 2, TUE renvoie aux principes que l’Union doit respecter et aux objectifs qu’elle doit poursuivre lorsqu’elle définit et mène des politiques et actions communes. Les mêmes principes et objectifs s’appliquent à l’élaboration et à la mise en œuvre de l’action extérieure de l’Union et de ses autres politiques dans leurs aspects extérieurs (article 21, paragraphe 3, TUE). L’Union poursuit notamment l’objectif « d’encourager l’intégration de tous les pays dans l’économie mondiale, y compris par la suppression progressive des obstacles au commerce international » [article 21, paragraphe 2, sous e), TUE] et « de contribuer à l’élaboration de mesures internationales pour préserver et améliorer la qualité de l’environnement et la gestion durable des ressources naturelles mondiales afin d’assurer un développement durable » [article 21, paragraphe 2, sous f), TUE].

 Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

33.      L’article 2 TFUE dispose notamment ce qui suit :

« 1.      Lorsque les traités attribuent à l’Union une compétence exclusive dans un domaine déterminé, seule l’Union peut légiférer et adopter des actes juridiquement contraignants, les États membres ne pouvant le faire par eux‑mêmes que s’ils sont habilités par l’Union ou pour mettre en œuvre les actes de l’Union.

2.      Lorsque les traités attribuent à l’Union une compétence partagée avec les États membres dans un domaine déterminé, l’Union et les États membres peuvent légiférer et adopter des actes juridiquement contraignants dans ce domaine. Les États membres exercent leur compétence dans la mesure où l’Union n’a pas exercé la sienne (12). Les États membres exercent à nouveau leur compétence dans la mesure où l’Union a décidé de cesser d’exercer la sienne.

[…] ».

34.      L’article unique du protocole no 25 (13) sur l’exercice des compétences partagées dispose ce qui suit : « En ce qui concerne l’article 2, paragraphe 2, [TFUE] relatif aux compétences partagées, lorsque l’Union mène une action dans un certain domaine, le champ d’application de cet exercice de compétence ne couvre que les éléments régis par l’acte de l’Union en question et ne couvre donc pas tout le domaine. »

35.      L’article 3, paragraphe 1, TFUE énumère les domaines dans lesquels l’Union dispose d’une compétence exclusive, à savoir, notamment :

« a)       l’union douanière ;

[…]

d)      la conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la politique commune de la pêche ;

e)      la politique commerciale commune ».

36.      Conformément à l’article 3, paragraphe 2, TFUE, l’Union dispose également d’une compétence exclusive pour la conclusion d’un accord international « lorsque cette conclusion est prévue dans un acte législatif de l’Union [premier cas de figure] ou est nécessaire pour lui permettre d’exercer sa compétence interne [deuxième cas de figure] ou dans la mesure où elle est susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée [troisième cas de figure] ».

37.      L’article 4 TFUE est consacré aux compétences partagées et dispose ce qui suit :

« 1.      L’Union dispose d’une compétence partagée avec les États membres lorsque les traités lui attribuent une compétence qui ne relève pas des domaines visés aux articles 3 et 6 [(14)].

2.      Les compétences partagées entre l’Union et les États membres s’appliquent aux principaux domaines suivants :

a)      le marché intérieur ;

b)      la politique sociale, pour les aspects définis dans le présent traité ;

[…]

d)      l’agriculture et la pêche, à l’exclusion de la conservation des ressources biologiques de la mer ;

e)      l’environnement ;

[…]

g)      les transports ;

[…]

i)      l’énergie ;

[…] ».

38.      Conformément à l’article 9 TFUE, qui fait partie des dispositions d’application générale, lorsqu’elle définit et met en œuvre ses politiques et actions, « l’Union prend en compte les exigences liées à la promotion d’un niveau d’emploi élevé [et] à la garantie d’une protection sociale adéquate […] ».

39.      L’article 11, qui fait lui aussi partie des dispositions d’application générale, dispose que « [l]es exigences de la protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des politiques et actions de l’Union, en particulier afin de promouvoir le développement durable ».

40.      La cinquième partie, titre I, TFUE, qui contient les articles 205 à 207 TFUE, énonce les dispositions générales relatives à l’action extérieure de l’Union.

41.      L’article 206 TFUE dispose que, « [p]ar l’établissement d’une union douanière conformément aux articles 28 à 32, l’Union contribue, dans l’intérêt commun, au développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs, ainsi qu’à la réduction des barrières douanières et autres ».

42.      L’article 207, paragraphe 1, TFUE, est rédigé comme suit :

« La politique commerciale commune est fondée sur des principes uniformes, notamment en ce qui concerne les modifications tarifaires, la conclusion d’accords tarifaires et commerciaux relatifs aux échanges de marchandises et de services, et les aspects commerciaux de la propriété intellectuelle, les investissements étrangers directs, l’uniformisation des mesures de libéralisation, la politique d’exportation, ainsi que les mesures de défense commerciale, dont celles à prendre en cas de dumping et de subventions. La politique commerciale commune est menée dans le cadre des principes et objectifs de l’action extérieure de l’Union. »

43.      Conformément à l’article 207, paragraphe 5, TFUE, « [l]a négociation et la conclusion d’accords internationaux dans le domaine des transports relèvent du titre VI de la troisième partie, et de l’article 218 ».

44.      L’article 207, paragraphe 6, TFUE dispose que « [l]’exercice des compétences attribuées par le présent article dans le domaine de la politique commerciale commune n’affecte pas la délimitation des compétences entre l’Union et les États membres et n’entraîne pas une harmonisation des dispositions législatives ou réglementaires des États membres dans la mesure où les traités excluent une telle harmonisation ».

45.      L’article 216 TFUE précise les conditions auxquelles l’Union peut conclure un accord international avec un ou plusieurs pays tiers. Conformément à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, elle peut le faire « lorsque les traités le prévoient [premier cas de figure] ou lorsque la conclusion d’un accord, soit est nécessaire pour réaliser, dans le cadre des politiques de l’Union, l’un des objectifs visés par les traités [deuxième cas de figure], soit est prévue dans un acte juridique contraignant de l’Union [troisième cas de figure], soit encore est susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée [quatrième cas de figure] ». L’article 216, paragraphe 2, TFUE dispose que de tels accords lient les institutions de l’Union et les États membres.

46.      L’article 218 TFUE énonce les règles de procédure qui régissent, notamment, la négociation, la signature et la conclusion d’accords internationaux :

« 1.      Sans préjudice des dispositions particulières de l’article 207, les accords entre l’Union et des pays tiers ou organisations internationales sont négociés et conclus selon la procédure ci-après.

2.      Le Conseil autorise l’ouverture des négociations, arrête les directives de négociation, autorise la signature et conclut les accords.

3.      La Commission […] présente des recommandations au Conseil, qui adopte une décision autorisant l’ouverture des négociations […].

4.      Le Conseil peut adresser des directives au négociateur et désigner un comité spécial, les négociations devant être conduites en consultation avec ce comité.

5.      Le Conseil, sur proposition du négociateur, adopte une décision autorisant la signature de l’accord et, le cas échéant, son application provisoire avant l’entrée en vigueur.

6.      Le Conseil, sur proposition du négociateur, adopte une décision portant conclusion de l’accord.

[…]

11.       Un État membre, le Parlement européen, le Conseil ou la Commission peut recueillir l’avis de la Cour de justice sur la compatibilité d’un accord envisagé avec les traités. En cas d’avis négatif de la Cour, l’accord envisagé ne peut entrer en vigueur, sauf modification de celui-ci ou révision des traités. »

 La demande d’un avis de la Cour

47.      Par demande datée du 10 juillet 2015, la Commission a, en application de l’article 218, paragraphe 11, TFUE, demandé à la Cour de lui rendre un avis sur la question suivante :

« L’Union a-t-elle la compétence requise pour signer et conclure seule [l’ALEUES] ? En particulier,

–        quelles dispositions de l’accord relèvent de la compétence exclusive de l’Union ?

–        quelles dispositions de l’accord relèvent de la compétence partagée de l’Union ? et

–        l’accord comporte-t-il une quelconque disposition qui relève de la compétence exclusive des États membres ? »

48.      Ont présenté des observations sur la demande de la Commission le Conseil, le Parlement et les gouvernements de tous les États membres, à l’exception du Royaume de Belgique, de la République d’Estonie, de la République de Croatie et du Royaume de Suède. Une audience a été tenue les 12 et 13 septembre 2016, à laquelle ont comparu la Commission, le Conseil et le Parlement ainsi que les gouvernements belge, tchèque, danois, allemand, irlandais, grec, espagnol, français, italien, lituanien, néerlandais, autrichien, polonais, roumain, slovène et finlandais.

 Les questions soulevées par la demande d’avis de la Commission

49.      La demande d’avis présentée par la Commission est manifestement recevable puisque l’ALEUES n’a pas encore été conclu et qu’il s’agit donc d’un accord « envisagé » au sens de l’article 218, paragraphe 11, TFUE. La demande se compose essentiellement de deux parties.

50.      La première partie porte sur la question de savoir si l’Union peut signer et conclure l’ALEUES seule, c’est-à-dire sans y associer les États membres.

51.      La seconde partie porte sur la question de savoir quelles dispositions de l’ALEUES relèvent de la compétence exclusive de l’Union, de la compétence partagée de l’Union et de la compétence exclusive des États membres.

52.      Si la Cour répond affirmativement à la première partie de la demande parce que l’ensemble de l’ALEUES relève de la compétence externe exclusive de l’Union (sur la base soit de l’article 3, paragraphe 1, TFUE, soit de l’article 3, paragraphe 2, TFUE), il n’est pas nécessaire d’examiner la seconde partie. L’ALEUES doit alors être conclu par la seule Union.

53.      Si l’Union n’a pas une compétence exclusive pour l’ensemble de l’ALEUES, la situation se complique. Si la compétence de conclure l’ALEUES relève en partie de la compétence exclusive de l’Union (en application de l’article 3 TFUE) et en partie de sa compétence partagée (en vertu de l’article 4 TFUE), qui peut (ou devrait) signer cet accord (15) ?

54.      Il s’avère nécessaire à ce stade que j’explique la manière dont je comprends les relations réciproques propres à un système de compétence interne et de compétence externe.

55.      Les articles 2 à 4 TFUE doivent être lus à la lumière des articles 4 et 5 TUE. Ils doivent également être lus en tenant compte de leur situation tout au début du TFUE (« Première partie : Les principes » ; « Titre I : Catégories et domaines de compétences de l’Union ») et en s’instruisant du contexte antérieur dans des versions plus anciennes des traités.

56.      Il importe ici de rappeler les versions de ce qui est devenu le TFUE telles qu’elles ont résulté des traités de Maastricht (1992), Amsterdam (1997) et Nice (2001). En particulier, l’article 3b du traité CE, tel qu’amendé par le traité sur l’Union européenne à Maastricht [devenu ultérieurement article 5 CE (Amsterdam, puis Nice)] contenait, dans les trois paragraphes qui le constituaient, une analyse de compétence qui incorporait successivement les principes d’attribution, de subsidiarité et de proportionnalité (16). Tout au long de cette période, il n’existait cependant aucune liste détaillée des compétences. Le traité établissant une constitution pour l’Europe (JO 2004, L 310, p. 1) aurait introduit une telle liste, et le contenu ainsi que les éléments essentiels de ce qui figure désormais aux articles 2, 3 et 4 TFUE ont été repris plus ou moins directement du projet de Constitution et insérés par le traité de Lisbonne (17).

57.      Ces versions antérieures montrent clairement que cette section initiale de ce qui est devenu le TFUE ne porte pas sur les relations externes en tant que telles. Elle vise la question constitutionnelle élémentaire du partage du pouvoir entre l’Union et ses États membres, à savoir du principe d’attribution des pouvoirs. Les compétences sont conférées à l’Union essentiellement afin de lui permettre de légiférer dans différents domaines de politique et d’activité économique sur son territoire. Il s’agit d’une vision du monde qui est centrée sur l’Union (bien plus que d’une Weltanschauung). Il s’agit d’établir l’équilibre souhaité entre l’autorité centrale (supranationale) unificatrice instaurée par les traités et les États membres, toujours souverains, qui constituent l’Union (et qui sont les Herren der Verträge). Il doit apparaître clairement de la répartition des compétences sur laquelle tout le projet d’Union est fondé qui a la compétence d’agir dans des domaines spécifiques. La perspective essentielle est la suivante « Qui est compétent pour agir sur le territoire de l’Union : l’Union ou les États membres ? » Cela étant dit, la répartition des compétences entre l’Union et les États membres aura nécessairement des implications pour l’exercice de la compétence externe.

58.      Quel a été l’effet des modifications introduites par le traité de Lisbonne ?

59.      Les compétences dans des domaines dont la liste est brève et exhaustive sont irrévocablement attribuées à l’Union (sous réserve de modification du traité) (article 3, paragraphe 1, TFUE). La plupart des domaines de compétence apparaissent, cependant, dans la liste des « principaux domaines », c’est-à-dire dans une liste non exhaustive, de compétences partagées (article 4, paragraphe 2, TFUE). Une compétence définie comme étant « partagée » ne se métamorphose jamais dans une compétence a priori exclusive de l’Union au sens de l’article 3, paragraphe 1, TFUE. Il est vrai que, si l’Union a effectivement occupé le terrain en exerçant le droit de préemption que lui confère l’article 2, paragraphe 2, TFUE (sur lequel je vais me pencher dans un instant), le terrain ainsi occupé devient un domaine dans lequel elle jouit de facto d’une compétence exclusive. Néanmoins, la différence entre les compétences a priori exclusives conférées à l’Union par l’article 3, paragraphe 1, TFUE, d’une part, et les compétences qui deviennent de facto des compétences exclusives de l’Union à la faveur du mécanisme institué à l’article 2, paragraphe 2, TFUE (18), d’autre part, est la suivante : la compétence a prioriexclusive de l’Union ne peut jamais (sauf modification du traité) être transformée en une compétence non exclusive de l’Union. En revanche, il est possible, en théorie, qu’un domaine actuellement régi par une réglementation adoptée dans l’exercice du droit de préemption prévu à l’article 2, paragraphe 2, puisse être rétrocédé aux États membres. Le pouvoir législatif de l’Union devrait uniquement décider de ne plus légiférer et de rapporter les réglementations de l’Union qui existent dans ce domaine.

60.      Les compétences partagées conférées par l’article 4 TFUE sont, en outre, indissociablement liées à l’existence d’une disposition (distincte) du traité conférant à l’Union une compétence qui n’est ni une compétence exclusive (article 3 TFUE) ni une compétence d’accompagnement (article 6 TFUE : « Compétence pour mener des actions pour appuyer, coordonner ou compléter l’action des États membres »). Il en est ainsi parce que l’article 4, paragraphe 1, TFUE prévoit que « l’Union dispose d’une compétence partagée avec les États membres lorsque les traités lui attribuent une compétence qui ne relève pas des domaines visés aux articles 3 et 6 » (19). L’article 4 TFUE détermine donc l’existence de différentes compétences que se partagent l’Union et les États membres.

61.      L’article 2 TFUE traite par la suite de différents aspects de l’exercice d’une compétence. En particulier, la deuxième phrase de l’article 2, paragraphe 2, énonce le « droit d’antériorité » de l’Union. Cette disposition donne à l’Union le droit de choisir d’exercer l’une des compétences partagées énumérées à l’article 4. Dans la mesure où elle exerce cette compétence (mais uniquement dans cette mesure-là), les États membres ne peuvent plus exercer leur compétence partagée dans ce domaine spécifique. C’est ainsi que le protocole no 25 dispose expressément que, « lorsque l’Union mène une action dans un certain domaine, le champ d’application de cet exercice de compétence ne couvre que les éléments régis par l’acte de l’Union en question et ne couvre donc pas tout le domaine ». Le mécanisme de préemption prévu à l’article 2, paragraphe 2, TFUE est donc expressément déclaré réversible. Si l’Union cesse d’exercer une compétence partagée déterminée ou une certaine partie de celle-ci, cette compétence retourne aux États membres. En outre les parties doivent toujours composer un tout : toute compétence exercée dans un domaine partagé est exercée soit par l’Union, soit par les États membres. Elle ne peut pas se trouver dans les limbes entre les deux.

62.      Une grande partie de l’exercice de la compétence de l’Union demeure concernée par ce qui advient « au plan interne », c’est-à-dire sur son territoire. Certains aspects de la répartition des compétences continuent nécessairement à avoir des implications pour l’action externe. C’est vrai à la fois des domaines dans lesquels l’Union dispose d’une compétence exclusive et des domaines où elle n’a qu’une compétence partagée. Lorsqu’une telle action externe est entreprise, elle doit respecter la répartition convenue des compétences entre l’Union et les États membres qui la composent. Ces principes doivent être respectés dans toute action entreprise par l’Union, qu’elle soit interne ou externe (20).

63.      La compétence en matière d’union douanière et la compétence en matière de politique commerciale commune (qui figurent l’une comme l’autre dans la liste des compétences exclusives de l’Union dressée à l’article 3, paragraphe 1, TFUE) sont reconnues et formulées de façon détaillée à l’article 206 TFUE (l’union douanière) et à l’article 207 TFUE (la politique commerciale commune) de la cinquième partie du TFUE, qui est intitulée « L’action extérieure de l’Union ». La politique commerciale commune est l’un des rares exemples d’une compétence purement externe de l’Union. Comme l’article 207, paragraphe 2, TFUE habilite le Parlement et le Conseil, statuant par voie de règlements conformément à la procédure législative ordinaire, à adopter les mesures définissant le cadre dans lequel est mise en œuvre la politique commerciale commune, de tels règlements sont des mesures d’action externe (qui ont pour objet de réglementer, par des actes législatifs de l’Union, le commerce avec des pays tiers). La compétence interne équivalente est la compétence de rapprochement des lois que les articles 114 et 115 TFUE instituent pour réglementer le marché intérieur, compétence que l’article 4, paragraphe 2, sous a), définit comme étant une compétence partagée.

64.      Contrairement à l’article 3, paragraphe 1, TFUE, qui ne parle pas expressément de compétences externes, l’article 3, paragraphe 2, TFUE se réfère aux circonstances dans lesquelles l’Union « dispose également d’une compétence exclusive pour la conclusion d’un accord international ». Les quatre (21) cas de figure prévus par les auteurs du projet de traité (« lorsque cette conclusion est prévue dans un acte législatif de l’Union », « [lorsque cette conclusion] est nécessaire pour […] permettre [à l’Union] d’exercer sa compétence interne », « dans la mesure où [cette conclusion] est susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée ») reflètent principalement la jurisprudence antérieure de la Cour (22). L’article 216 TFUE (qui contient les dispositions détaillées qui s’appliquent lorsque l’Union « peut conclure un accord avec un ou plusieurs pays tiers ou organisations internationales ») reflète lui aussi et codifie la jurisprudence de la Cour relative à l’existence d’une compétence externe de l’Union ; il est directement lié à la répartition des compétences opérée par les articles 2 à 4 TFUE. L’article 216, paragraphe 1, TFUE détermine l’existence de la compétence externe de l’Union, mais non pas sa nature exclusive, cette dernière étant déterminée par l’article 3, paragraphes 1 et 2, TFUE.

65.      C’est devant cette toile de fond que je vais examiner la compétence externe plus en détail.

66.      En ce qui concerne la politique commerciale commune, l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE établit que l’Union dispose d’une compétence exclusive dans ce domaine. L’article 207 TFUE indique clairement que la politique commerciale commune « est fondée sur […] la conclusion d’accords tarifaires et commerciaux relatifs [à divers domaines] ». Le premier des cas de figure visés à l’article 216, paragraphe 1, prévoit que l’Union peut conclure un accord international « lorsque les traités le prévoient ». Ainsi, lorsqu’il est prévu qu’une matière particulière relève de la politique commerciale commune (question épineuse à laquelle sera consacrée une grande partie de l’analyse à laquelle je dédie le reste des présentes conclusions), l’Union disposera d’une compétence externe exclusive pour conclure un accord international portant sur cette matière. D’autres compétences exclusives dont la liste figure à l’article 3, paragraphe 1, TFUE peuvent se rattacher à d’autres cas de figure visés à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, notamment au deuxième de ceux-ci (« lorsque la conclusion d’un accord […] est nécessaire pour réaliser, dans le cadre des politiques de l’Union, l’un des objectifs visés par les traités »).

67.      Si l’un des cas de figure visés à l’article 3, paragraphe 2, TFUE se présente et si l’Union dispose d’une compétence externe conformément aux règles détaillées à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, qui lui confèrent la compétence de conclure des accords internationaux, cette compétence externe sera exclusive. Examinons à présent chacun des cas de figure l’un après l’autre.

68.      Premièrement, pouvons-nous identifier un « acte juridique contraignant de l’Union » prévoyant que celle-ci conclut un tel accord international (troisième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE) ? Dans l’affirmative, et si cet acte est un « acte législatif de l’Union » (premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE) (23), la compétence externe de l’Union qui en résulte sera exclusive (24).

69.      Deuxièmement, la conclusion d’un accord international est-elle « nécessaire pour réaliser, dans le cadre des politiques de l’Union, l’un des objectifs visés par les traités » (deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE) ? Dans l’affirmative, et si une compétence interne de l’Union ne peut simplement pas être exercée en pratique sans qu’il y ait également une composante externe (deuxième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE), la compétence externe de l’Union qui en résulte sera elle aussi exclusive. Comme l’indique la jurisprudence antérieure au traité de Lisbonne, de telles situations sont rares, mais possibles (25).

70.      Troisièmement, l’activité législative de l’Union a-t-elle déjà été à ce point abondante que cette dernière dispose désormais d’une compétence externe exclusive par l’« effet AETR » codifié (26) ? Démontrer que la conclusion d’un accord international « est susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée » (27) remplit automatiquement les conditions du quatrième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE et du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE ; en outre l’Union aura donc une compétence externe exclusive.

71.      Si l’Union ne dispose pas d’une compétence externe exclusive en application de l’article 3 TFUE, a-t-elle une compétence externe partagée en application des articles 2 et 4 TFUE (qui régissent la compétence partagée) et de l’article 216 TFUE (qui lui confère une compétence externe), ou bien n’y a-t-il absolument aucune compétence externe de l’Union autre qu’une éventuelle compétence externe d’accompagnement (28) ? La situation qui se présente ici est plus compliquée.

72.      Tout d’abord, il est nécessaire de vérifier qu’il existe bel et bien une compétence partagée conformément à l’article 4 TFUE. À supposer que la réponse à cette question soit affirmative, on se retournera alors vers l’article 216, paragraphe 1, TFUE afin de déterminer si un des cas de figure qu’il énonce et dans lesquels l’Union est compétente pour conclure un accord international se présente. Comme, en pareille hypothèse, il n’y a pas de compétence externe exclusive par l’effet de l’article 3, paragraphe 2, TFUE, il est probable que ce seront les premier, deuxième et troisième cas de figure visés par cette disposition qui seront pertinents. La combinaison de l’article 4 TFUE et de l’article 216, paragraphe 1, TFUE crée les conditions nécessaires à l’existence d’une compétence externe partagée de l’Union. Qu’en est-il alors de son exercice ?

73.      Il est ici nécessaire de revenir à l’article 2, paragraphe 2, TFUE et au droit de préemption de l’Union. Si l’Union choisit de ne pas exercer ce droit, ce sont les États membres qui conserveront la compétence externe (tout comme la compétence interne) et, par conséquent, ce seront eux (et non l’Union) qui seront compétents pour négocier, signer et conclure un accord international dont l’objet relève de ce domaine de compétence partagée. Néanmoins, le texte de l’article 2, paragraphe 2, TFUE peut être interprété en ce sens qu’il permet à l’Union d’exercer son droit de préemption à l’égard tant de la compétence externe que de la compétence interne.

74.      Admettre cette proposition n’implique pas que l’Union jouit d’un droit illimité à se prévaloir d’une compétence externe dans n’importe quel domaine de compétence partagée dont la liste figure à l’article 4 TFUE indépendamment du point de savoir si elle a choisi d’exercer ce droit au plan interne. Lors de l’audience, le Conseil a souligné que la question de savoir si l’Union ou les États membres exercent une compétence externe de conclure un accord international déterminé dans un domaine de compétence partagée est « un choix politique ». Selon moi, les sauvegardes qui entourent ce droit politique résident dans les procédures détaillées qui sont exposées à l’article 218 TFUE. L’article 218, paragraphe 2, dispose que « [l]e Conseil autorise l’ouverture des négociations, arrête les directives de négociation, autorise la signature et conclut les accords ». Il résulte des paragraphes suivants que l’ouverture des négociations (article 218, paragraphe 3, TFUE), la signature de l’accord (article 218, paragraphe 5, TFUE) et sa conclusion (article 218, paragraphe 6, TFUE) requièrent chacun une décision distincte du Conseil, c’est-à-dire une décision des États membres agissant en leur capacité de membres du Conseil, lequel autorise l’institution appropriée de l’Union à agir. Tout au long de la procédure, le Conseil statue à la majorité qualifiée, sauf pour certains domaines qui requièrent l’unanimité (article 218, paragraphe 8, TFUE). Dans la mesure où elle représente l’exercice d’une compétence externe de l’Union, la conclusion de l’accord exige normalement aussi le consentement du Parlement, ou, du moins, sa consultation [article 218, paragraphe 6, sous a) et b), TFUE, respectivement].

75.      Il en résulte qu’un accord international portant sur des domaines qui relèvent d’une compétence externe partagée qui est finalement signé et conclu par la seule Union est, conceptuellement, tout à fait différent d’un accord international qui ne couvre que des domaines relevant de la compétence externe exclusive de l’Union. Dans la première hypothèse, les États membres agissant de concert (en leur capacité de membres du Conseil) ont le pouvoir de consentir à ce que l’Union agisse ou bien d’indiquer clairement qu’ils continueront à exercer une compétence externe individuelle. Dans la seconde hypothèse, ils n’ont pas un tel choix parce qu’une compétence externe exclusive appartient déjà à l’Union.

76.      Lorsqu’un accord international est signé à la fois par l’Union et par les États membres qui la composent, tant l’Union que les États membres sont, du point de vue du droit international, parties à cet accord. Cela aura des conséquences, en particulier en termes de responsabilité en cas de violation de cet accord et de droit de recours à l’encontre de pareilles violations. Il semblerait dès lors souhaitable, pour assurer la transparence à l’intérieur de l’Union et garantir les intérêts du (ou des) pays tiers avec lequel (ou lesquels) cet accord international est conclu, que ces décisions indiquent très clairement les aspects précis de compétence partagée que les États membres (agissant en leur qualité de membres du Conseil) ont accepté qu’ils soient exercés par l’Union, d’une part, et les aspects de cette compétence partagée qui sont (toujours) exercés par les États membres, d’autre part. Une déclaration de compétence annexée à l’accord en question ne serait, selon moi, pas non plus superflue.

77.      Enfin, lorsqu’un accord international est signé à la fois par l’Union et par ses États membres, chaque État membre demeure libre, aux yeux du droit international, de mettre fin à cet accord conformément à toute procédure de dénonciation que prévoit cet accord. Après tout, il a participé à cet accord en qualité d’État souverain et non comme un simple appendice de l’Union (et le fait que l’Union puisse avoir joué le rôle de meneur dans les négociations de l’accord est dénué de pertinence à cet égard). Si l’État membre devait prendre une telle décision, cependant, l’article 216, paragraphe 2, TFUE aura pour effet qu’au regard du droit de l’Union, il continuerait à être lié par cet accord dans les domaines qui relèvent de la compétence de l’Union (parce qu’il est un État membre de celle-ci) à moins et jusqu’à ce que l’Union dénonce l’accord (29). La possibilité qu’a l’État membre d’agir indépendamment en tant qu’acteur en droit international illustre le fait qu’il conserve sa compétence internationale ; c’est non pas par l’effet du droit international que l’État membre demeure partiellement lié par l’accord même s’il le dénonce en sa qualité d’acteur du droit international, mais bien par l’effet du droit de l’Union.

78.      La situation est différente lorsque les États membres jouissent d’une compétence exclusive pour une ou plusieurs parties d’un accord international (lorsque le reste de l’accord relève de la compétence exclusive ou de la compétence partagée de l’Union) : en pareille hypothèse, l’accord doit être conclu tant par les États membres que par l’Union (30).

79.      Néanmoins, en admettant toujours qu’il soit nécessaire que la Cour réponde à la seconde partie de la requête, faut-il qu’elle détermine qui détient la compétence pour chacune des dispositions de l’ALEUES ?

80.      Selon moi, cela n’est pas nécessaire.

81.      Dans son avis 2/00, la Cour a clairement indiqué qu’à supposer que la compétence de conclure un accord international soit partagée entre l’Union et ses États membres, l’étendue précise des compétences exclusives de l’Union et des compétences partagées (ou exclusives) des États membres concernant un accord spécifique ne saurait, en tant que telle, avoir d’incidence sur la compétence qu’a l’Union de conclure cet accord et, d’une manière plus générale, sur la validité matérielle ou la régularité formelle de la décision qu’a prise l’Union de le conclure (31). La procédure mise en place à l’article 218, paragraphe 11, TFUE a pour objet spécifique de prévenir les complications qui pourraient surgir, tant au niveau international qu’au niveau de l’Union, si la décision de conclure l’accord était jugée invalide (32). Ce n’est pas à la Cour qu’il appartient de fournir, dans le contexte de cette procédure, des indications spécifiques concernant le point de savoir qui détient la compétence pour chacune des dispositions individuelles de l’accord concerné ni à qui il incomberait de s’acquitter des obligations internationales qu’il comporte (33).

82.      Lorsque je répondrai à la deuxième partie de la demande de la Commission, j’examinerai, bien plutôt, pour quelles parties de l’ALEUES l’Union dispose d’une compétence exclusive (fondée soit sur l’article 3, paragraphe 1, TFUE, soit sur l’article 3, paragraphe 2, TFUE), si certaines parties relèvent de la compétence partagée avec les États membres (en application de l’article 4 TFUE) et s’il y a d’autres parties encore pour lesquelles l’Union n’a aucune compétence. L’ALEUES est un accord hautement hétérogène. Cela signifie qu’au besoin, l’analyse destinée à déterminer la compétence et sa nature (exclusive ou partagée) exigera (en fonction du contexte) que je concentre mon regard sur un chapitre individuel ou sur des groupes de chapitres de l’ALEUES, sur une ou plusieurs parties de cet accord et, à l’occasion, sur une disposition individuelle.

83.      Bien que la demande porte uniquement sur la répartition des compétences entre l’Union et les États membres, certaines observations écrites (en particulier celles du Conseil) suggèrent que la procédure suivant laquelle la Commission a négocié l’ALEUES et propose aujourd’hui de la signer pourrait également soulever un problème. Bien que les directives de négociation prévoyaient la négociation d’un accord mixte, la Commission a négocié l’ALEUES comme s’il s’agissait d’un accord entre l’Union et la République de Singapour uniquement. La Commission a-t-elle ainsi méconnu l’article 218, paragraphe 4, TFUE ainsi que le principe de coopération loyale énoncé à l’article 13, paragraphe 2, TUE ?

84.      Selon moi, il n’est ni nécessaire ni opportun de prendre position sur cette question dans le contexte de la présente procédure. La procédure suivant laquelle l’ALEUES a été négocié n’affecte pas, en tant que telle, la répartition des compétences entre l’Union et ses États membres en vue d’une telle conclusion. Elle se situe donc en dehors du champ de la demande de la Commission. Le non‑respect des règles qu’énonce le droit de l’Union sur la manière de procéder ne saurait (en principe) pas davantage affecter la validité de l’accord en tant que matière de droit international (34). C’est la raison pour laquelle je n’aborderai pas cette question plus avant.

85.      Il est également important de garder présent à l’esprit que la demande de la Commission ne concerne pas la compatibilité matérielle (d’une quelconque partie) de l’ALEUES avec les traités. La Commission n’a donc pas demandé à la Cour d’examiner, par exemple, la compatibilité d’un mécanisme RDIE avec les traités. Ce type de règlement est prévu non seulement dans l’ALEUES, mais également dans d’autres accords sur les échanges commerciaux et les investissements qui sont actuellement négociés par l’Union ou en cours de négociation. Dans la présente procédure, la question qui se pose à propos du mécanisme RDIE (ou de toute autre forme de règlement des différends prévue dans l’ALEUES) est uniquement celle de savoir « qui peut décider ». L’analyse que je vais effectuer dans les présentes conclusions ne préjuge donc pas d’éventuelles questions (s’il y en a) concernant la compatibilité matérielle avec l’ALEUES, y compris des dispositions concernant le mécanisme RDIE (35).

86.      Enfin (ce qui va peut-être de soi), les conclusions que je présente dans cette affaire se limitent à l’ALEUES. Elles ne préjugent donc en rien la répartition des compétences entre l’Union et les États membres pour ce qui concerne d’autres accords sur les échanges commerciaux et les investissements.

87.      Dans la suite des présentes observations, tout d’abord, je vais énoncer les principes de base qui gouvernent la répartition des compétences externes entre l’Union et les États membres ainsi que la base légale de l’action de l’Union. Ensuite, je discuterai les caractéristiques de base de la compétence exclusive expresse dont l’Union dispose en matière de politique commerciale commune (article 207, paragraphe 1, TFUE), sa compétence exclusive implicite (article 3, paragraphe 2, TFUE) et sa compétence partagée (article 4 TFUE) en matière d’action externe. C’est sur cette toile de fond générale que je me tournerai alors vers la répartition des compétences dans les matières couvertes dans l’ALEUES.

 La répartition des compétences entre l’Union et les États membres et la base légale de la conclusion de l’ALEUES

88.      Il est apparu lors de l’audience que le Conseil et un certain nombre d’États membres considèrent que la répartition des compétences entre l’Union et les États membres en ce qui concerne l’ALEUES doit d’abord être établie avant de déterminer, par la suite, la base légale sur laquelle devrait reposer la décision qu’a prise l’Union de signer et de conclure l’ALEUES.

89.      Il est évident que ce n’est pas sur cette seconde question que la Cour est invitée à se prononcer en l’espèce. Selon moi, néanmoins, le Conseil et un certain nombre d’États membres ont une compréhension incorrecte de la relation entre les principes qui gouvernent la répartition des compétences (externes) et ceux qui régissent le choix de la base légale de l’action de l’Union.

90.      L’Union ne dispose que de pouvoirs d’attribution (36). C’est la raison pour laquelle elle doit fonder toute mesure qu’elle adopte sur une disposition du traité l’habilitant à prendre cette mesure (37). Le choix de cette base juridique d’un acte de l’Union doit se fonder sur des éléments objectifs susceptibles de contrôle juridictionnel, notamment la finalité et le contenu de cet acte (38).

91.      Dans l’avis 1/08, la Cour a expliqué que le caractère, exclusif ou non, de la compétence qu’a l’Union de conclure des accords et la base juridique à laquelle elle doit recourir à cet effet sont deux questions intimement liées (39). En effet, la question de savoir si l’Union dispose seule de la compétence pour conclure un accord ou si une telle compétence est partagée avec les États membres dépend, notamment, de la portée des dispositions du droit de l’Union susceptibles d’attribuer aux institutions de celle-ci le pouvoir de participer à un tel accord (40).

92.      Établir que l’Union est compétente à agir dans un domaine particulier (et donc identifier la base juridique d’une telle action) est ainsi une condition préalable à la détermination de la répartition des compétences entre l’Union et les États membres, conformément aux articles 3 et 4 TFUE, en ce qui concerne une action externe spécifique (41).

93.      Lorsqu’il s’agit d’identifier la base juridique, il résulte d’une jurisprudence bien établie que, lorsqu’un accord de l’Union poursuit plus d’un objectif ou comprend deux ou plusieurs composants dont l’un peut être identifié comme étant l’objectif ou composant principal ou prédominant alors que le ou les autres sont simplement incidents ou ont une portée extrêmement limitée, l’Union doit conclure cet accord en se fondant sur une base juridique unique, à savoir celle qu’exige l’objectif ou le composant principal ou prédominant (42). Donc, si l’objectif prédominant de l’ALEUES est de poursuivre la politique commerciale commune et si d’autres aspects de cet accord doivent être correctement considérés soit comme étant un accessoire nécessaire de ce composant principal, soit comme ayant une portée extrêmement limitée, la base juridique matérielle permettant de conclure cet accord serait l’article 207, paragraphe 1, TFUE (43). Il résulterait alors de l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE que l’Union détient une compétence exclusive pour conclure l’ALEUES (44).

94.      Par ailleurs, si la Cour devait dire pour droit que l’ALEUES poursuit à la fois plusieurs objectifs ou a plusieurs composants qui sont liés de façon indissociable sans qu’aucun soit accessoire par rapport à un autre de sorte que différentes dispositions des traités sont applicables, l’acte par lequel l’Union a conclu cet accord devrait être fondé sur les différentes bases juridiques correspondant à ces composants (45).

95.      C’est dans ce contexte que je vais à présent me tourner vers la portée de la politique commerciale commune au sens de l’article 207 TFUE.

 Sur l’article 207, paragraphes 1, 5 et 6, TFUE

96.      La Cour a précisé la compétence exclusive de l’Union en matière de politique commerciale commune bien avant l’entrée en vigueur de l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE, qui confirme désormais expressément la compétence exclusive de l’Union à l’égard de cette politique. C’est ainsi que, dans le tout premier avis qu’elle a rendu sur la base de (ce qui est devenu) l’article 218, paragraphe 11, TFUE, la Cour a dit pour droit que la compétence exclusive en matière de politique commerciale commune était justifiée parce que permettre aux États membres d’exercer des pouvoirs concurrents dans ce domaine « équivaudrait […] à reconnaître que les États membres peuvent prendre, dans les rapports avec les pays tiers, des positions divergentes de celles que l[’Union] entend assumer, et reviendrait de ce fait à fausser le jeu institutionnel, à ébranler les rapports de confiance à l’intérieur de l[’Union] et à empêcher celle-ci de remplir sa tâche dans la défense de l’intérêt commun » (46). Ce raisonnement s’inscrit dans la logique de la mise en place de l’union douanière prévue par le traité de Rome. Sur le plan interne, cette union se traduit par une interdiction absolue de tous droits de douane sur les importations et les exportations, et de toutes taxes d’effet équivalent entre les États membres (47). Dans le même temps, les traités chargent l’Union et ses institutions de défendre ses intérêts commerciaux à l’extérieur. Permettre aux États membres de mener leurs propres politiques commerciales avec le monde extérieur (et donc de poursuivre leurs propres intérêts dans ce contexte) parallèlement aux actions de l’Union risquerait manifestement de compromettre cette fonction essentielle.

97.      Dans la présente procédure, la Commission invite la Cour à revoir sa jurisprudence concernant l’étendue de la politique commerciale commune. Dans quelle mesure la portée de cette politique s’est-elle étendue par l’effet des changements introduits par le traité de Lisbonne (en particulier en ce qui concerne les aspects commerciaux de la propriété intellectuelle, les investissements étrangers directs, le commerce des services, l’exception concernant les transports qui est énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE et les limites résultant de l’article 207, paragraphe 6, TFUE) ?

98.      Certains États membres ont suggéré qu’à la lumière de l’avis 1/94 de la Cour, il n’est plus approprié de considérer la politique commerciale commune comme étant « dynamique ».

99.      Je ne suis pas convaincue qu’il soit particulièrement utile de débattre sur le point de savoir si la politique commerciale commune est « dynamique » ou non. Ce qui compte, c’est que l’article 207, paragraphe 1, TFUE devrait être interprété d’une manière qui, à la fois, respecte le libellé de cette disposition et garantit que l’Union est en mesure de mener une politique commerciale commune efficace dans un environnement commercial international en évolution permanente.

100. Je partage l’opinion de l’avocat général Wahl lorsqu’il déclare, comme il l’a fait dans le contexte de la procédure d’avis 3/15, que, comme les pratiques commerciales, les schémas et les tendances évoluent au cours du temps, l’objet des échanges internationaux ne peut pas être déterminé de manière abstraite ni identifié d’une manière statique et rigide (48). Néanmoins, ce qu’il y a lieu de considérer comme « politique commerciale » ou « politique d’investissement » dans les relations internationales n’est pas nécessairement la même chose que ce qui constitue la politique commerciale commune en tant que domaine du droit de l’Union.

101. La Cour a également souligné la nécessité de garantir l’efficacité de la politique commerciale commune de l’Union. Dans l’avis 1/78, la Cour a expliqué qu’il ne serait plus possible de continuer à mener une quelconque politique commerciale commune digne de ce nom si l’Union n’était plus en mesure de recourir à des moyens d’action plus élaborés que des instruments destinés à avoir une prise sur les seuls aspects traditionnels du commerce extérieur. Une « politique commerciale » ainsi comprise serait vouée à devenir graduellement insignifiante (49) et empêcherait ainsi graduellement l’Union de remplir son rôle en tant que partenaire commercial global à la fois par des relations bilatérales avec des pays non membres et par une action multilatérale (50). La politique commerciale commune n’est dès lors pas limitée à des mesures à visées commerciales. Elle peut comprendre des mesures qui poursuivent des objectifs qui ne sont pas purement commerciaux, tels que le développement (51), la PESC (52) ou la protection de l’environnement et de la santé humaine (53), à condition toujours que ces mesures aient également des effets directs et immédiats sur les échanges commerciaux. L’interaction entre la politique commerciale commune et les (autres) principes et objectifs de l’action externe de l’Union est expressément reconnue à l’article 207, paragraphe 1, dernière phrase, TFUE.

102. Néanmoins, cela ne signifie pas que la portée de la politique commerciale commune ne connaît aucune limite. Le fait qu’une matière soit réglée dans un accord commercial (et d’investissement) n’est pas non plus suffisant pour que cette matière relève de la politique commerciale commune. Les accords ou dispositions que d’autres acteurs du droit international peuvent concevoir comme faisant partie de la politique commerciale commune ne relèvent pas nécessairement de la définition de la notion de « politique commerciale commune » au sens des traités. Lorsqu’elle définit cette politique, la Cour doit le faire dans les limites du libellé des articles 206 et 207 TFUE.

103. Ce qui importe aux fins de l’article 207 TFUE, c’est que l’action (interne ou externe) de l’Union devrait avoir spécifiquement trait au commerce international, c’est-à-dire au commerce avec des pays non membres (et non aux échanges sur le marché intérieur) (54), en ce que l’acte concerné est essentiellement destiné à promouvoir, à faciliter ou à régir ces échanges et a des effets directs et immédiats sur ceux-ci (55). Ainsi, le simple fait qu’un acte de l’Union soit susceptible d’avoir des implications sur les échanges internationaux n’est pas suffisant pour qu’il puisse être rangé dans la politique commerciale commune.

104. Lorsque l’on établit une distinction entre les engagements (internationaux) relevant de la politique commerciale commune et ceux qui ont pour objectif premier d’améliorer le fonctionnement du marché intérieur, il est important de déterminer si l’accord a ou non pour objet essentiel d’étendre au-delà du territoire de l’Union le rapprochement des lois des États membres qui a déjà été « largement réalisé » par le droit dérivé de l’Union dans le domaine des échanges commerciaux dans le marché intérieur (56). Si tel est le cas, cet accord peut être présumé avoir pour objectif de promouvoir le commerce international et sa conclusion relève donc de la politique commerciale commune. Inversement, lorsque ce rapprochement « interne » est précisément l’objet de l’accord, la finalité prédominante de l’accord est d’améliorer le fonctionnement du marché intérieur et il ne relève donc pas de la politique commerciale commune, même s’il a des effets sur le commerce international (57).

105. Plusieurs parties craignent, que ce soit de manière générale ou dans le contexte d’un chapitre spécifique de l’ALEUES, que l’interprétation large que la Commission donne de la portée de la politique commerciale commune depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne neutralise l’article 207, paragraphe 6, TFUE.

106. Selon moi, l’article 207, paragraphe 6, TFUE vise uniquement l’exercice des compétences que l’Union puise dans l’article 207, paragraphe 1, TFUE. Il présuppose que cette compétence a été établie. Il ne saurait dès lors pas modifier la compétence externe exclusive que l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union. L’article 207, paragraphe 6, TFUE impose deux limites, même si la seconde a les traits d’une application de la première.

107. Tout d’abord, l’exercice de la compétence en matière de politique commerciale commune ne saurait affecter la délimitation des compétences entre l’Union et les États membres. À mon avis, cette première restriction est une expression du principe d’attribution énoncé à l’article 2, paragraphes 1 et 2, TFUE et développé dans la déclaration no 18 concernant la délimitation des compétences (58). En d’autres termes, l’exercice de la compétence exclusive de l’Union en matière de politique commerciale commune ne saurait modifier ou affecter d’une quelconque autre manière les dispositions du traité relatives à l’attribution de compétences dans d’autres domaines qui ne relèvent pas du champ d’application de cette compétence (comme, les échanges commerciaux dans le marché intérieur). Je suis confortée dans cette interprétation par l’article 207, paragraphe 2, TFUE, qui institue une base juridique pour l’adoption des « mesures définissant le cadre dans lequel est mise en œuvre la politique commerciale commune » au lieu d’affirmer que l’Union a une compétence exclusive pour toutes mesures qui pourraient devoir être adoptées en vue de l’exécution d’obligations résultant d’un accord conclu par l’Union dans l’exercice de sa compétence exclusive en matière de politique commerciale commune.

108. C’est ainsi que l’exercice par l’Union de la compétence exclusive que l’article 207, paragraphe 1, TFUE lui confère en ce qui concerne la totalité de l’accord ADPIC (59) ne signifie pas qu’elle est compétente à réglementer chaque matière visée par cet accord dans le marché intérieur. Un tel exercice ne saurait pas davantage modifier la répartition de compétences externes entre les États membres et l’Union en ce qui concerne les droits de propriété intellectuelle en général.

109. Inversement, je n’interprète pas la première restriction en ce sens qu’elle signifierait que l’exercice par l’Union de sa compétence en matière de politique commerciale commune dépendrait du point de savoir si elle détient une compétence interne sur une quelconque autre base ou si elle a exercé cette compétence (60). En particulier, insister sur le parallélisme entre l’aspect externe de la politique commerciale commune et l’aspect interne d’autres politiques de l’Union ne trouve aucun support dans d’autres parties de l’article 207 TFUE. Ainsi, l’article 207, paragraphe 4, TFUE confirme expressément que la politique commerciale commune peut inclure le commerce des services culturels et audiovisuels ainsi que le commerce des services sociaux, d’éducation et de santé. Les compétences internes de l’Union en matière de santé publique sont toutefois limitées, car elles ne font que compléter les actions des États membres (61). De surcroît, l’action de l’Union doit respecter les responsabilités des États membres en matière de définition de leurs politiques de santé ainsi qu’en matière d’organisation et d’administration des services de santé et médicaux (62).

110. La seconde restriction imposée à l’article 207, paragraphe 6, TFUE est que l’exercice de compétences dans le domaine de la politique commerciale commune ne peut pas entraîner une harmonisation des dispositions législatives ou réglementaires des États membres dans la mesure où les traités excluent une telle harmonisation. Comme l’article 207, paragraphe 4, TFUE le confirme expressément, cette restriction ne signifie pas que la politique commerciale commune ne peut pas viser les échanges commerciaux dans des matières pour lesquelles d’autres dispositions du traité excluent toute harmonisation (par exemple, dans le domaine de la politique sociale, de l’éducation, de la santé publique ou de la culture) (63). Cela signifie plutôt que l’Union ne peut pas exercer les compétences que lui confère l’article 207 TFUE de manière à contourner l’interdiction d’harmonisation que lui imposent les traités. Cette restriction est donc une application particulière de la première.

111. La présente procédure d’avis exige également de la Cour qu’elle interprète l’article 207, paragraphe 5, TFUE, en particulier en ce qui concerne les engagements en matière de transports qui figurent au chapitre 8 de l’ALEUES (« Services, établissement et commerce électronique ») (64). Aux termes de cette disposition, la négociation et la conclusion d’accords internationaux dans le domaine des transports relèvent du titre VI de la troisième partie du TFUE, c’est‑à‑dire des dispositions du traité relatives à la politique des transports de l’Union. De tels accords ne relèvent donc pas du champ d’application de la politique commerciale commune.

112. Cette exception n’est pas nouvelle. Les traités ont toujours maintenu la politique des transports en dehors de la politique commerciale commune. En fait, c’est cette exception qui a amené la Cour à établir, dans son arrêt AETR, le principe des compétences externes exclusives implicites, par opposition à la compétence exclusive expresse en matière de politique commerciale commune (65).

113. Bien que l’arrêt AETR (22/70, EU:C:1971:32) porte sur un accord instaurant des règles de sécurité, la Cour n’a pas jugé, dans son avis 1/94, avoir un quelconque motif de tirer une conclusion différente à propos des accords commerciaux qui traitent également des transports, tels que l’AGCS (66). Elle a confirmé « [l]’idée sous-jacente à [l’arrêt AETR] que les accords internationaux en matière de transports ne relèvent pas de [la politique commerciale commune] » (67). La position est demeurée inchangée dans le traité de Nice (68) et le traité de Lisbonne (69). En ce qui concerne le commerce international des services de transport, les traités visent donc à « maintenir un parallélisme de principe entre la compétence interne qui s’exerce par l’adoption unilatérale de règles [de l’Union] et la compétence externe qui opère par voie de conclusion d’accords internationaux, l’une et l’autre compétences demeurant […] ancrées dans le titre du traité spécialement afférent à la politique commune des transports » (70).

114. C’est la raison pour laquelle l’application de l’article 207, paragraphe 5, TFUE ne se limite pas aux accords internationaux qui ont trait exclusivement ou de manière prédominante au commerce des services de transport. Comme la Cour l’a déclaré dans son avis 1/08, toute autre conclusion aurait pour conséquence que des dispositions internationales d’objet rigoureusement identique contenues dans un accord relèveraient tantôt de la politique des transports, tantôt de la politique commerciale, en fonction de la seule circonstance que les parties contractantes à l’accord ont décidé de ne traiter que du commerce des services de transport ou qu’elles sont convenues de traiter à la fois d’un tel commerce et du commerce de tel ou tel autre type de services ou de l’ensemble de ceux-ci (71).

115. Nonobstant le large champ d’application de l’article 207, paragraphe 5, TFUE, il me semble que l’expression « accords internationaux dans le domaine des transports » ne devrait pas signifier que tout accord applicable aux transports (c’est-à-dire, en substance, le service qui consiste à transporter des marchandises ou des personnes par un ou plusieurs moyens de transport d’un point à un autre) doive être exclu de la politique commerciale commune. Le fait qu’en pratique, des mesures d’application générale peuvent également s’appliquer aux transports ne déclenche pas nécessairement l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE. Un accord international « dans le domaine des transports » est, bien plutôt, un accord qui contient des dispositions concernant spécifiquement les transports. Cela explique pourquoi, dans son avis 1/08, la Cour a concentré son attention sur les engagements spécifiques au secteur (et sur les engagements horizontaux qui s’appliquaient en plus de ceux-ci) avant de conclure que les conditions d’application de l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE étaient remplies.

116. La présente procédure montre qu’une certaine incertitude demeure quant au champ d’application de l’article 207, paragraphe 5, TFUE. Les questions concernant les engagements relatifs au commerce de services de transport portent notamment sur le point de savoir si l’exception inscrite à l’article 207, paragraphe 5, TFUE couvre l’établissement (tel qu’il est défini dans l’ALEUES) même si celui-ci n’est pas régi par le titre VI de la troisième partie du TFUE ainsi que celle de savoir si des services « accessoires » de services de transport relèvent de l’exception. J’examinerai ces questions dans mon analyse du chapitre 8 de l’ALEUES (72).

 Sur l’article 3, paragraphe 2, TFUE

117. Lorsque l’Union ne dispose d’aucune compétence exclusive expresse en vertu de l’article 3, paragraphe 1, TFUE qui lui permettrait de conclure un accord international, elle peut néanmoins jouir d’une compétence exclusive externe implicite sur la base de l’article 3, paragraphe 2, TFUE. Ces deux paragraphes de l’article 3 TFUE concernent spécifiquement la répartition des compétences entre l’Union et les États membres. Néanmoins, contrairement à l’article 3, paragraphe 1, TFUE, l’article 3, paragraphe 2, TFUE vise uniquement la compétence externe. Toutefois, les différents cas de figure qu’il énonce impliquent tous nécessairement un certain exercice de compétence interne.

118. La Commission se prévaut de deux cas de figure visés à l’article 3, paragraphe 2, TFUE pour établir la compétence externe exclusive de l’Union.

119. Pour une partie du chapitre 8 concernant les services, l’établissement et le commerce électronique (73), la Commission se fonde sur le premier cas de figure prévu à l’article 3, paragraphe 2, TFUE, conformément auquel l’Union dispose d’une compétence exclusive « lorsque cette conclusion est prévue dans un acte législatif de l’Union ». Conformément à la jurisprudence de la Cour, l’idée qui sous-tend cette disposition est qu’il peut y avoir des situations dans lesquelles, bien que les traités eux-mêmes ne confèrent aucune compétence externe à l’Union, des règles communes adoptées par les institutions instaurent une telle compétence de négocier des accords internationaux (74). En pareilles situations, l’Union acquiert une compétence exclusive en application de règles communes (75) dans la mesure où permettre aux États membres de conclure leurs propres accords internationaux risquerait de compromettre l’action externe concertée dans les domaines couverts par ses règles (76).

120. Pour certaines autres parties de l’ALEUES (77), la Commission se fonde sur le troisième cas de figure prévu à l’article 3, paragraphe 2, TFUE. Conformément à celui-ci, l’Union détient une compétence exclusive de conclure un accord international « dans la mesure où [cette conclusion] est susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée ». Ce cas de figure correspond au critère que la Cour a défini dans son arrêt AETR (22/70, EU:C:1971:32) pour définir « la nature des engagements internationaux qu’il est interdit aux États membres de prendre en dehors du cadre des institutions de l’Union lorsque des règles communes de l’Union ont été arrêtées pour réaliser les buts du traité » (78).

121. Ce qu’il est convenu d’appeler le « principe AETR» fournit une base permettant à l’Union de disposer d’une compétence exclusive implicite pour conclure un accord international. Il a été développé, à l’origine, en tenant compte, d’une part, de l’exigence de droit primaire imposant aux États membres de prendre toutes les mesures propres à assurer l’exécution des obligations qui leur incombent en vertu des traités ou résultant des actes des institutions et, d’autre part, de s’abstenir de toutes mesures susceptibles de mettre en péril la réalisation des buts du traité (79). L’Union est donc exclusivement compétente lorsqu’il existe un risque que les États membres agissant en dehors du cadre de ses institutions souscrivent à des obligations internationales affectant des règles communes ou en altérant la portée. En agissant de la sorte, ils contourneraient les règles qu’énoncent les traités pour la mise en œuvre des politiques de l’Union et risqueraient donc de remettre en cause l’essence même du processus d’intégration de l’Union.

122. La jurisprudence de la Cour offre certaines indications sur la manière de vérifier si les conditions d’application du troisième cas de figure sont remplies. Il est indispensable d’analyser spécifiquement la relation entre l’accord international envisagé et le droit de l’Union tel qu’il est en vigueur au moment des faits. Aux fins d’une telle analyse, et compte tenu du principe d’attribution, c’est à la partie qui se prévaut d’une compétence externe exclusive qu’il appartient d’en démontrer l’existence (80).

123. La première étape de cette analyse consiste à définir le domaine visé par l’accord international de manière à identifier les règles communes pertinentes. L’objet de l’accord peut être déterminé en tenant compte du contenu et de la finalité de l’accord. À ce propos, bien qu’il soit possible, lorsque l’on analyse ce qu’il est convenu d’appeler des accords homogènes, de décrire la totalité de l’accord comme couvrant « un domaine » et de vérifier par la suite si des règles communes harmonisent complètement ce domaine ou si ce domaine est couvert en grande partie par de telles règles communes (81), cette approche ne peut pas être transposée aussi facilement à un accord tel que l’ALEUES, qui régit différents « domaines » dans différents chapitres ou dans certaines parties de ceux-ci.

124. Les arguments que la Commission a présentés en l’espèce soulèvent une question inédite. Le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE s’applique-t-il uniquement lorsque des « règles communes » ont déjà été adoptées par les institutions de l’Union dans l’exercice de leurs compétences législatives ou bien des dispositions du traité elles-mêmes peuvent-elles également être, à certaines conditions, des « règles communes » ? La Commission soutient que la compétence exclusive dont jouit l’Union en ce qui concerne les dispositions de l’ALEUES concernant des formes d’investissements autres que des investissements étrangers directs résulte des « règles communes » énoncées à l’article 63 TFUE lui-même. Je reviendrai à cette question lorsque j’analyserai le chapitre 9, section A, de l’ALEUES (82).

125. La deuxième étape est d’identifier quelles règles communes existent dans ce domaine. Toutefois, le champ d’application de l’accord international et les règles communes ne doivent pas nécessairement concorder complètement (83). Il pourrait suffire que ce domaine dont relève l’accord international soit couvert en grande partie par ces règles communes (84). Les règles communes pertinentes peuvent inclure non seulement de la législation applicable au domaine spécifique couvert par l’accord, mais également de la législation dont le champ d’application est plus vaste (85). Il est tout aussi indifférent que de telles règles communes (ne) figurent (pas) dans un seul et même instrument de droit de l’Union (86).

126. Les règles communes ne sont pas seulement celles qui règlent des situations impliquant un élément étranger à l’Union et qui ont donc une dimension externe (87). Pour identifier les règles communes, il est nécessaire de considérer tant le droit de l’Union tel qu’en vigueur et l’évolution future de ces règles dans la mesure où cette évolution est prévisible au moment de l’analyse (88).

127. Les arguments des parties concernant les règles pertinentes pour l’application du principe AETR aux domaines des services de transport et aux formes d’investissement autres que les investissements étrangers directs suggèrent que différents malentendus pèsent sur la notion de « règles communes ». La présente procédure offre à la Cour l’occasion de fournir les éclaircissements nécessaires (89).

128. La troisième étape consiste à examiner l’(éventuel) impact de la conclusion de l’accord international sur les règles communes pertinentes. Il n’est pas nécessaire de démontrer qu’il existe un tel impact : le risque que des règles communes puissent être affectées ou que leur portée soit altérée est suffisant (90). Un tel risque existe lorsque les engagements que comporte l’accord international relèvent du champ d’application des règles communes (91). Il n’est pas nécessaire de désigner une éventuelle contradiction, c’est-à-dire un conflit, entre l’accord international et les règles communes (92).

129. Lorsque des règles communes harmonisent complètement le domaine régi par l’accord international (93), la compétence exclusive de conclure cet accord est facile à établir. Les règles harmonisées sont présumées être affectées par les engagements internationaux résultant de la conclusion de cet accord.

130. Lorsque l’harmonisation n’est que partielle, le fait qu’un accord international (ou une ou plusieurs parties de celui-ci) concerne un domaine qui est « couvert en grande partie » par des règles de l’Union n’entraîne pas en soi automatiquement la conclusion que l’Union est exclusivement compétente à négocier cet accord international en entier (ou la partie pertinente de celui-ci) sans examiner si le principe AETR s’applique. Tout dépend du contenu des engagements pris et de leur éventuel lien avec des règles de l’Union (94).

131. Le protocole no 25 sur l’exercice des compétences partagées n’entame aucunement les principes que je viens d’exposer. Ce protocole vise uniquement l’article 2, paragraphe 2, TFUE. Il a pour seul objet de définir le champ d’application de l’exercice par l’Union d’une compétence partagée avec les États membres. Il précise que le champ d’application de l’exercice de cette compétence « ne couvre que les éléments régis par l’acte de l’Union en question et ne couvre donc pas tout le domaine ». Le protocole no 25 ne saurait dès lors être interprété comme limitant le champ d’application de la compétence externe exclusive dont jouit l’Union dans les cas visés à l’article 3, paragraphe 2, TFUE, tel que clarifié par la jurisprudence (95).

132. C’est sur cette toile de fond que je vais à présent examiner la répartition des compétences entre l’Union et les États membres en ce qui concerne l’ALEUES.

 Sur les objectifs et les définitions générales pertinentes pour l’ALEUES (chapitre 1er de l’ALEUES (96))

 Argument

133. La Commission soutient que le chapitre 1er relève entièrement de la politique commerciale commune. Selon elle, les objectifs globaux énoncés aux articles 1.1 et 1.2 de l’ALEUES coïncident, dans une large mesure, avec les objectifs de la politique commerciale commune prévus à l’article 206 TFUE. Les objectifs de l’ALEUES ne sont plus étendus que ceux de la politique commerciale commune que de manière marginale. Lorsque c’est le cas, ces objectifs tombent néanmoins dans le domaine des objectifs du TFUE (en particulier dans le domaine de ceux qui sont énoncés à l’article 63, paragraphe 1, aux articles 91 et 100 TFUE).

134. Les autres parties n’ont exposé aucun argument spécifique concernant le chapitre 1er.

 Analyse

135. À mon avis, l’Union dispose d’une compétence exclusive, en application de l’article 207, paragraphe 1, TFUE, pour décider de mettre en place une zone de libre-échange conforme à l’article XXIV du GATT de 1994 et à l’article V de l’AGCS (97) et pour convenir que les objectifs de l’ALEUES sont de libérer et de faciliter les échanges commerciaux ainsi que les investissements. De telles matières relèvent manifestement de la politique commerciale commune.

136. De surcroît, les dispositions dressant la liste des définitions applicables de manière générale sont purement accessoires. Ces dispositions ne sont pas de nature à modifier la répartition des compétences entre l’Union et les États membres en ce qui concerne les autres dispositions de l’ALEUES.

137. C’est la raison pour laquelle je conclus que le chapitre 1er relève entièrement de la compétence exclusive de l’Union en vertu de l’article 207 TFUE.

 Sur le commerce des marchandises (chapitres 2 à 6 de l’ALEUES (98) et protocole I de l’ALEUES (99))

 Arguments

138. La Commission allègue que les chapitres 2 à 6 relèvent entièrement de la politique commerciale commune.

139. La Commission affirme que toutes les dispositions du chapitre 2 ont spécifiquement trait au commerce international des marchandises parce qu’elles ont pour objet de libéraliser le commerce des marchandises entre les parties et ont un effet direct et immédiat sur celui-ci. Il en est ainsi aussi bien en ce qui concerne les dispositions de ce chapitre relatif aux mesures tarifaires, auxquelles l’article 207, paragraphe 1, TFUE se réfère, qu’en ce qui concerne les mesures non tarifaires, qui reproduisent, incorporent par référence ou développent des dispositions existantes du GATT de 1994 et d’autres accords multilatéraux sur le commerce des marchandises (et qui, comme la Cour l’a déclaré dans son avis 1/94, relèvent automatiquement de la politique commerciale commune).

140. La Commission avance des arguments analogues en ce qui concerne le chapitre 3 (l’article 207, paragraphe 1, TFUE couvre les « mesures de défense commerciale, dont celles à prendre en cas de dumping et de subventions » ; le chapitre 4 (parce qu’il facilite le commerce des marchandises en fournissant un cadre permettant de prévenir, de déceler et d’éliminer les obstacles inutiles aux échanges relevant de l’accord OTC) et le chapitre 5 (parce qu’il a pour objet de réduire au maximum les effets négatifs des mesures SPS sur le commerce). L’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (GATT) (JO 1994, L 336, p. 103) (ci-après l’« accord antidumping »), l’accord sur les subventions et les mesures compensatoires (ci-après l’« accord SMC »), l’accord sur les sauvegardes, l’accord OTC et l’accord SPS font tous partie des accords sur le commerce des marchandises qui, suivant l’avis 1/94, relèvent du champ d’application de la politique commerciale commune.

141. Enfin, le chapitre 6 a lui aussi spécifiquement trait au commerce international puisqu’il a pour objet de faciliter le commerce des marchandises et d’assurer des contrôles douaniers efficaces. La Commission ajoute que la plupart des dispositions de ce chapitre correspondent aux dispositions plus détaillées relatives à la même matière qui figurent dans l’accord OMC sur la facilitation des échanges, qui est désormais inclus dans l’annexe 1A de l’accord OMC (100). Selon la Commission, ni les États membres ni les autres institutions ne contestent la compétence exclusive de l’Union en ce qui concerne ce nouvel accord OMC.

142. Le Parlement se rallie, en substance, à la position de la Commission.

143. Alors que le Conseil et pratiquement tous les États membres n’ont présenté aucun argument spécifique concernant les chapitres 2 à 6, un État membre soutient que la compétence exclusive de l’Union ne couvre pas la coopération douanière prévue à l’article 6.1.1, seconde phrase, de l’ALEUES. L’article 206 TFUE se réfère uniquement à l’établissement d’une union douanière conformément aux articles 28 à 32 TFUE. Il ne couvre donc pas l’article 33 TFUE, qui instaure une base juridique pour l’adoption de « mesures afin de renforcer la coopération douanière entre les États membres et entre ceux-ci et la Commission ». Il résulte en outre de l’article 6, sous g), TFUE, comme le confirme l’article 197, paragraphe 2, TFUE (la disposition unique du titre XXIV intitulé « Coopération administrative »), qu’en ce qui concerne la coopération administrative, l’Union ne dispose d’une compétence que pour mener des actions en vue d’appuyer, de coordonner ou de compléter l’action des États membres.

 Analyse

144. Les chapitres 2 à 6 régissent différents aspects de la régulation du commerce des marchandises. Les matières couvertes dans ces chapitres et le type d’obligations qu’ils prévoient correspondent, dans une certaine mesure, à certains accords OMC relatifs au commerce des marchandises.

145. Avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, la politique commerciale commune couvrait déjà le commerce des marchandises. Dans son avis 1/94, la Cour a conclu que (ce qui était à l’époque) la Communauté européenne était seule compétente, en vertu de l’article 113 du traité CE, à conclure « les accords multilatéraux relatifs au commerce des marchandises », c’est-à-dire les accords inclus dans l’annexe 1A de l’accord OMC (ci-après les « accords de l’annexe 1A ») (101). Cette annexe contient le GATT de 1994, mais également douze autres accords. La Cour a conclu que tous les accords de l’annexe 1A relevaient de la politique commerciale commune sans examiner chacun de ces accords individuellement (102). C’est la raison pour laquelle ils ont tous été jugés se rapporter spécifiquement au commerce international en ce qu’ils avaient essentiellement pour objet de promouvoir, de faciliter ou de régir le commerce et en ce qu’ils avaient des effets directs et immédiats sur le commerce. La plupart des accords figurant à l’annexe 1A de l’accord OMC contiennent des obligations concernant, notamment, l’accès au marché, le traitement national et d’autres formes de réglementation nationale, la transparence, les recours juridictionnels et administratifs ainsi que l’équilibre entre les objectifs commerciaux et les objectifs non commerciaux. Le champ d’application de certains de ces accords est défini par référence au type de marchandises (par exemple, l’accord sur l’agriculture et l’accord sur les textiles et les vêtements) ; d’autres s’appliquent à des types spécifiques d’instruments commerciaux (par exemple, l’accord OTC, l’accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce, l’accord antidumping, l’accord SMC et l’accord sur les sauvegardes); à des mesures commerciales ayant un objectif spécifique (par exemple, l’accord SPS) ou à certaines étapes du processus d’importation ou d’exportation (par exemple, l’accord antidumping, l’accord sur l’inspection avant expédition, l’accord sur les règles d’origine et l’accord sur les procédures de licences d’importation).

146. Il apparaît donc clairement de l’avis 1/94 que l’Union détient une compétence exclusive pour les matières couvertes par ces accords et pour les obligations qui en résultent (103). Cette position demeure la même sous le régime du traité de Lisbonne, qui n’a pas modifié la description de la politique commerciale commune dans la mesure où elle a trait au commerce des marchandises.

147. Il me paraît clair, dans ce contexte, que les chapitres 2 à 5 concernent spécifiquement le commerce des marchandises. Leur objet correspond en substance aux matières couvertes par certains accords figurant à l’annexe 1A de l’accord OMC qui relèvent de la compétence exclusive de l’Union en matière de politique commerciale commune. Ainsi, le chapitre 2 a trait aux matières des articles I, II et XI du GATT de 1994, qui énoncent les obligations fondamentales d’accès au marché dans le commerce des marchandises. Les matières couvertes par le chapitre trois ont trait aux dispositions du GATT de 1994 sur la lutte antidumping, les subventions et les sauvegardes ainsi qu’aux accords plus spécifiques correspondants (l’accord antidumping, l’accord sur les subventions et les mesures compensatoires et l’accord sur les sauvegardes) qui figurent à l’annexe 1A de l’accord OMC. Les chapitres 4 à 5 concernent des obstacles non tarifaires couverts par les disciplines de l’article III du GATT de 1994 (« Traitement national ») et les disciplines plus spécifiques visées dans l’accord OTC et l’accord SPS, l’un comme l’autre inclus dans l’annexe 1A de l’accord OMC.

148. Ces matières concernent la procédure de transport des marchandises au‑delà des frontières, de leur mise en libre pratique, de leur dédouanement et de leur traitement sur un marché. Elles présentent donc un lien spécifique avec le commerce international.

149. Qui plus est, des règles qui ont pour objet de faciliter cette procédure (essentielles à l’importation et à l’exportation de marchandises) et de rendre plus transparentes, prévisibles, efficaces et moins onéreuses cette procédure et les règles qui gouvernent le traitement de ces marchandises sur un marché promeuvent, facilitent ou régissent le commerce et ont des effets directs et immédiats sur le commerce (104).

150. Cette conclusion s’applique également à la coopération douanière prévue au chapitre 6 et aux dispositions additionnelles relatives aux douanes qui figurent dans la clause interprétative no 3 ainsi qu’aux règles figurant dans la clause interprétative no 4 sur la reconnaissance mutuelle des programmes relatifs aux opérateurs économiques agréés (ces deux clauses interprétatives ont trait au chapitre 6).

151. Le chapitre 6 concerne les procédures et l’évaluation douanières et la facilitation des échanges (partiellement couvertes par le GATT de 1994), l’accord antidumping et le récent accord OMC sur la facilitation des échanges. Les formes de coopération prévues au chapitre 6 correspondent dans une certaine mesure à celles qui s’appliquent aux matières douanières sous le régime du GATT de 1994 et de l’accord antidumping. Ces derniers accords prévoient également, outre les règles générales de publicité (105), des consultations sur les matières qui ont trait à l’administration du système d’évaluation en douane (106). À un niveau plus général, le GATT de 1994 et les accords de l’annexe 1A prévoient en outre de nombreuses formes analogues de coopération dans différentes matières concernant le commerce des marchandises (107). De telles dispositions n’ont pas empêché la Cour de conclure, dans son avis 1/94, que ces accords relèvent entièrement de la politique commerciale commune (108).

152. Je ne peux pas souscrire à l’argument formaliste fondé sur une distinction, en ce qui concerne le commerce des marchandises dans le marché intérieur, entre les dispositions du traité qui régissent l’union douanière (articles 30 à 32 TFUE) et la coopération douanière (article 33 TFUE). Il est exact que l’article 206 TFUE, qui énonce les objectifs de l’union douanière, se réfère uniquement aux articles 28 à 32 TFUE. Néanmoins, il le fait parce que ces articles sont les dispositions qui établissent l’union douanière. Tel n’est pas l’objet d’une disposition telle que l’article 33 TFUE, qui offre une base juridique pour l’adoption de mesures visant à renforcer la coopération douanière entre les États membres. On ne saurait dès lors raisonnablement tirer aucune conclusion sur l’étendue de la politique commerciale commune du fait que l’article 206 TFUE ne se réfère pas expressément à l’article 33 TFUE. L’article 6, sous g), et l’article 197 TFUE n’ont pas non plus le moindre impact sur l’étendue de cette politique. Ces dispositions traitent en termes généraux de la coopération administrative entre les États membres et entre ceux-ci et l’Union. Elles ne préjugent donc pas la compétence exclusive de l’Union d’inclure dans sa politique commerciale commune des mesures visant à améliorer la coopération administrative avec des pays tiers en ce qui concerne des matières relevant de cette politique.

153. Enfin, mon analyse des chapitres 2 à 6 s’applique également au protocole no 1 relatif à la définition de la notion de « produits originaires » et aux méthodes de coopération administrative. Ce protocole porte sur les règles d’origine. Il présente manifestement un lien spécifique avec le commerce international des marchandises.

154. C’est pourquoi je conclus que les chapitres 2 à 6 relèvent entièrement de la compétence exclusive que l’article 207 TFUE confère à l’Union en matière de politique commerciale commune.

155. Je vais à présent me tourner vers le chapitre 8. Comme les chapitre 7 (« Obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable ») et 13 (« Commerce et développement durable ») soulèvent des questions analogues en ce qui concerne l’étendue de la politique commerciale commune et la relation entre les objectifs commerciaux et les objectifs non commerciaux (109), j’examinerai le chapitre 7 plus tard en même temps que le chapitre 13.

 Sur les services, l’établissement et le commerce électronique (chapitre 8 de l’ALEUES (110))

 Arguments

 Arguments généraux

156. La Commission soutient que la section A énonce les objectifs et définit le champ d’application du chapitre 8 de l’ALEUES. Les sections B à D de ce chapitre relèvent de la compétence exclusive de l’Union parce que leur champ d’application correspond à celui des engagements sur les fournitures de services en modes 1, 2, 3 et 4 conformément à l’AGCS, qui est couvert par l’article 207, paragraphe 1, TFUE. Conformément à l’article 1er, paragraphe 2,, sous a) à d), de l’AGCS, ces quatre modes couvrent la fourniture d’un service a) en provenance du territoire d’un membre (OMC) et à destination du territoire de tout autre membre (OMC) (« mode 1 » ou « fourniture transfrontière »); b) sur le territoire d’un membre (OMC) à l’intention d’un consommateur de services de tout autre membre (OMC) (« mode 2 » ou « consommation à l’étranger »); c) par un fournisseur de services d’un membre (OMC) grâce à une présence commerciale sur le territoire de tout autre membre (OMC) (« mode 3 » ou « présence commerciale ») et d) par un fournisseur de services d’un membre (OMC) grâce à la présence de personnes physiques d’un membre (OMC) sur le territoire de tout autre membre (OMC) (« mode 4 » ou « présence de personnes physiques »).

157. Pour chaque sous-section du chapitre 8, section E (« Cadre réglementaire »), la Commission prétend qu’il existe un lien suffisamment étroit avec le commerce international.

158. En ce qui concerne les dispositions d’application générale (sous-section 1), la Commission se fonde sur une comparaison avec les dispositions de l’AGCS et avec un certain nombre d’instruments non obligatoires adoptés par différents organes de l’OMC. La Commission ajoute que l’article 8, paragraphe 16, sur la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles relève de la politique commerciale commune parce qu’il facilite l’accès au marché des fournisseurs de services étrangers et parce que la Cour a confirmé que de telles obligations imposées par l’AGCS font partie de la politique commerciale commune. L’article 8, paragraphe 17, sur la transparence énonce des obligations qui sont usuelles dans les accords commerciaux internationaux et semblables à celles qui résultent de l’article III, paragraphe 1, et de l’article III, paragraphe 4, de l’AGCS. Des incertitudes concernant des mesures applicables régulant les actions commerciales peuvent avoir pour effet que des fournisseurs de services s’abstiennent de pénétrer sur des marchés étrangers.

159. En ce qui concerne la réglementation interne (sous-section 2), la Commission fait valoir, en substance, que cette sous-section impose des conditions qui garantissent que les prescriptions et procédures en matière d’octroi de licences ou de qualification n’entravent pas le commerce international. Leur finalité est semblable à celle de l’article VI, paragraphe 4, de l’AGCS, qui a pour but d’assurer que de telles prescriptions et procédures, même si elles ne sont pas discriminatoires, ne créent pas des obstacles superflus dans le commerce des services. En outre, l’obligation énoncée à l’article 8.19.3 de l’ALEUES de maintenir ou d’instituer des instances ou des procédures judiciaires, arbitrales ou administratives assurant le contrôle des décisions est analogue à celle qui figure à l’article VI, paragraphe 2, sous a), de l’AGCS.

160. Les dispositions spécifiques sur les services informatiques, les services postaux, les services de télécommunications et les services financiers (sous‑sections 3, 4, 5 et 6), dont certaines réaffirment ou développent des engagements pris dans l’AGCS, relèvent elles aussi de la compétence que l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union.

161. La section F contient principalement des déclarations d’intention. La seule obligation matérielle (qui figure à l’article 8.58 de l’ALEUES) interdit aux parties d’imposer des droits de douane, ce qui est une matière relevant manifestement de la politique commerciale commune.

162. Le Parlement et le Conseil n’ont pas présenté d’arguments spécifiques relatifs aux dispositions du chapitre 8 qui ne concernent pas les transports (111).

163. Les États membres concentrent leur attention en particulier sur des dispositions spécifiques telles que celles qui ont trait aux services financiers et à la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles.

164. Un certain nombre d’États membres font valoir que la sous-section 6 sur les services financiers ne relève pas entièrement de la politique commerciale commune de l’Union. La directive 2014/65/UE (112), qui doit entrer en vigueur au mois de janvier 2017, n’harmonise que certains aspects de la fourniture de services financiers et d’investissements par des ressortissants de pays tiers.

165. Les règles régissant la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles ne relèvent pas non plus de la politique commerciale commune. Premièrement, contrairement à ce que prétend la Commission, le simple fait qu’une matière ait un impact sur les relations commerciales externes ou soit régie par le droit économique international n’est pas suffisant pour que cette matière relève de la politique commerciale commune. Deuxièmement, la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles (113) ne préjuge pas la compétence exclusive des États membres en ce qui concerne la reconnaissance des qualifications professionnelles acquises en dehors du territoire de l’Union. Pareillement, dans le domaine des transports maritimes, les règles communes, qui figurent en particulier dans la directive 96/50/CE et la directive 2008/106/CE (114), n’énoncent que des règles minimales qui ne sauraient être affectées par l’article 8.16 de l’ALEUES. Troisièmement, la Commission ne tient pas compte du fait que l’AGCS (en particulier son article VII, paragraphe 1) n’exige pas des membres de l’OMC qu’ils reconnaissent les qualifications professionnelles de pays tiers ou qu’ils concluent des accords internationaux à ce sujet.

166. En outre, la manière dont la libéralisation doit être menée à bien en application de l’ALEUES, en particulier dans le domaine de l’établissement, affectera ou pourrait affecter la santé et les services sociaux pour lesquels les États membres demeurent compétents. Cela est incompatible avec l’article 207, paragraphe 6, TFUE. La Commission soutient également à tort que les dispositions concernant le commerce électronique ne contiennent que des déclarations d’intention.

167. Quatrièmement, la Commission ne peut pas se fonder sur l’article 216 TFUE pour justifier l’existence d’une compétence partagée dans des domaines qui ne relèvent pas de la compétence exclusive de l’Union. La Commission n’a pas démontré la nécessité de conclure l’ALEUES pour atteindre un des objectifs visés dans les traités.

 Arguments concernant les transports

168. La Commission traite séparément les obligations imposées dans le chapitre 8 qui ont spécifiquement trait aux transports (dans la liste des engagements spécifiques de l’Union qui figure à l’annexe 8-A et à la section E, sous-section 7, concernant les services de transport maritime international).

169. La Commission allègue que, bien qu’une partie significative des services entre Singapour et l’Union dans les cinq secteurs des transports visés par l’ALEUES (air, rail, route, voies navigables intérieures et mer) soient fournis suivant le mode 3 (établissement), les dispositions concernant l’établissement des fournisseurs de services de transport ne relèvent pas de l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE. Il en serait ainsi parce que l’établissement en matière de services de transport ne relève pas du champ d’application du titre VI de la troisième partie du TFUE (lu en combinaison avec l’article 58, paragraphe 1, TFUE), auquel l’article 207, paragraphe 5, TFUE se réfère, et parce qu’aucune disposition du traité n’empêche les dispositions relatives à la liberté d’établissement de s’appliquer aux transports. La Commission établit ici une analogie avec la distinction entre, d’une part, la liberté de fournir des services de transport en application du droit dérivé adopté conformément au titre VI de la troisième partie du TFUE, qui est limitée aux modes 1, 2 et 4, et, d’autre part, la liberté d’établissement en application des articles 49 et suivants du TFUE.

170. En ce qui concerne les engagements inscrits dans l’ALEUES qui relèvent de l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE, la Commission prétend que la compétence exclusive de l’Union résulte du troisième cas de figure prévu à l’article 3, paragraphe 2, TFUE. L’action externe des États membres risquerait d’affecter les règles communes qui ont été adoptées dans le domaine des services de transport, qui est couvert en grande partie par de telles règles communes. Si la Cour devait n’être pas d’accord et juger qu’il est nécessaire de considérer des engagements pour chaque secteur du transport individuellement, au moins les engagements pris dans l’ALEUES en matière de transport maritime international, de transport par voie ferrée et de transport par route ainsi qu’en ce qui concerne certains services auxiliaires relèvent de la compétence exclusive de l’Union.

171. En ce qui concerne les services de transport aérien, la Commission affirme que la compétence exclusive de l’Union en matière de services de réparation et d’entretien des aéronefs pendant lesquels l’aéronef est retiré du service, en matière de vente ou de commercialisation de services de transport aérien et en matière de services liés aux systèmes informatisés de réservation (services auxquels s’appliquent les sections B et C) est fondée en partie sur l’article 207, paragraphe 1, TFUE et en partie sur les premier et troisième cas de figure prévus à l’article 3, paragraphe 2, TFUE. En ce qui concerne les services de réparation et d’entretien des aéronefs, l’article 12 du règlement (CE) no 216/2008 (115) prévoit la conclusion d’un accord par l’Union (premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE). En ce qui concerne la vente et la commercialisation de services de transport aérien, la Commission soutient qu’elles n’impliquent pas en soi le transport de marchandises ou de passagers : elles relèveraient dès lors de la politique commerciale commune. Les services liés aux systèmes informatisés de réservation sont régis par de très nombreuses règles communes, en particulier par le règlement (CE) no 80/2009 (116), et relèveraient donc dès lors de la compétence exclusive qui échoit à l’Union dans le troisième cas de figure prévu à l’article 3, paragraphe 2, TFUE.

172. La pertinence pratique des modes 1, 2 et 4 de fourniture de service est limitée en raison de la situation géographique de l’Union et de Singapour.

173. En ce qui concerne spécifiquement les transports par voies navigables intérieures, il n’existe donc en pratique aucun exercice de compétence externe par l’ALEUES.

174. En ce qui concerne les transports par voie ferrée, l’Union n’a accepté aucun engagement pour les modes 1 ou 4 et ne s’est engagée complètement qu’en ce qui concerne le mode 2. Ces engagements sont, en tout état de cause, accessoires par rapport aux engagements énoncés dans l’ALEUES dans le domaine des transports ou dans le domaine de la politique commerciale commune. En ce qui concerne la fourniture de services de transport par voie ferrée par une filiale d’une société singapourienne établie dans un État membre à destination d’un autre État membre (mode 3), la directive 2012/34/UE autorise la libre fourniture de services à l’intérieur de l’Union par des opérateurs établis dans un État membre, mais ne stipule aucune exigence en matière de nationalité en ce qui concerne les propriétaires de la filiale (117). Cette matière est donc couverte par des règles communes.

175. En ce qui concerne les transports par route, l’Union a accepté des engagements limités sur le transport des passagers et le fret. Elle n’a pris aucun engagement de mode 1. En revanche, elle a pris un engagement complet (sans réserves) pour le mode 2 ainsi qu’un engagement (avec réserves) pour le mode 4. À l’instar de ceux qu’elle a pris pour les transports ferroviaires, les engagements acceptés n’ont qu’une incidence pratique limitée. En tout état de cause, l’engagement spécifique de mode 2 est accessoire par rapport aux autres engagements acceptés dans l’ALEUES. En ce qui concerne la fourniture de services par route par une filiale d’une société singapourienne établie dans un État membre à destination d’un autre État membre (mode 3), les règlements (CE) nos 1072/2009 (118) et 1073/2009 (119), lus en combinaison avec le règlement (CE) no 1071/2009 (120), établissent des règles communes concernant les conditions d’établissement des transporteurs par route dans l’Union. Comme ces règlements s’appliquent indépendamment de la nationalité des propriétaires de la filiale, la fourniture transfrontière de services de transport routier par des sociétés établies dans l’Union est couverte en grande partie par des règles communes. L’Union jouit donc de la compétence externe exclusive correspondante en application de l’article 3, paragraphe 2, TFUE. Enfin, la Commission avance, en ce qui concerne le mode 4 à propos des transports par route, les mêmes arguments que ceux qu’elle avance pour le transport maritime (121). En pratique, une société de transport routier originaire de la République de Singapour pourrait détacher du personnel clé (très probablement à la faveur d’un transfert intragroupe (122)) vers l’établissement qu’elle a créé dans un État membre. En pareille situation, la directive 2014/66/UE s’applique à l’entrée et au séjour de ces ressortissants d’un pays tiers dans le cadre d’un transfert intragroupe (123). En tout état de cause, ces engagements sont accessoires par rapport à l’engagement que l’Union a pris à l’égard de la fourniture de transports routiers suivant le mode 3 (pour lesquels l’Union a une compétence exclusive (124)).

176. En ce qui concerne le transport maritime, la Commission fait valoir que des règles communes figurent dans le règlement (CEE) no 4055/86 (125), qui couvre au moins une part significative de la fourniture de services de transport maritime entre les États membres et les pays tiers. Il couvre également le traitement des ressortissants de pays tiers (à savoir le personnel de certaines sociétés de transport établies dans des pays tiers). Contrairement aux règlements applicables au transport aérien, le règlement no 4055/86 s’applique à certaines sociétés de transport de pays tiers (126). Ce règlement n’est pas non plus limité aux itinéraires intra-Union. De surcroît, il s’applique à la fourniture (transfrontière) de services de transport maritime par des filiales de sociétés singapouriennes établies dans un État membre en provenance de cet État membre et à destination d’un autre État membre.

177. En ce qui concerne le mode 4, la Commission allègue qu’en pratique, une société de transport maritime singapourienne détachera du personnel clé (très probablement à la faveur d’un transfert intragroupe) vers l’établissement qu’elle a créé dans un État membre. En pareille situation, la directive 2014/66 s’applique aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers détachés dans le cadre d’un transfert intragroupe. En tout état de cause, l’engagement de mode 4 est un ajout nécessaire à l’engagement de mode 3 pour lequel l’Union dispose d’une compétence exclusive (127).

178. La Commission ajoute que les services portuaires, qui font l’objet de l’article 8.56.6 de l’ALEUES (partie de la sous-section 7), n’ont pas été libéralisés pour les fournisseurs étrangers de ces services. La raison en est que l’Union n’a pas accepté d’engagement dans sa liste. L’article 8.56.6 de l’ALEUES est un simple développement de l’obligation de traitement national à l’égard du transport maritime international, dans la mesure où il est libéralisé.

179. En ce qui concerne les services accessoires au transport maritime, au transport par voies navigables intérieures, au transport ferroviaire et au transport routier, la Commission allègue que certains de ces services ne sont pas des services de transport. Ils relèvent donc de la politique commerciale de l’Union. Tel est le cas, en particulier, des services fournis par les agences en douane. En ce qui concerne l’entretien et la réparation des équipements de transport maritime, de transport par voies navigables intérieures, de transport ferroviaire et de transport routier, la Commission soutient que ces services sont couverts par les engagements que l’Union a acceptés pour les services aux entreprises. Ils relèvent donc de la politique commerciale commune.

180. Si la Cour devait juger que certaines dispositions de l’ALEUES relatives aux services de transport ne relèvent pas de compétences exclusives de l’Union, la Commission fait valoir que ces dispositions relèvent de compétences partagées de l’Union parce que, conformément au deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, ces engagements internationaux sont nécessaires pour atteindre un objectif des traités. La Commission se réfère en particulier à l’objectif visé à l’article 91, paragraphe 1, TFUE en vue de l’établissement de règles communes pour les services de transport entre l’Union et les pays tiers.

181. Le Parlement soutient que certains services (tels que l’entreposage et le magasinage, les services de transitaires, le poussage et le remorquage) sont des services accessoires des services de transport maritime et doivent dès lors être traités de la même manière que ceux-ci. Le Parlement allègue en outre que les engagements pris en matière de mode 4 (présence temporaire de personnes physiques) sont nécessaires pour assurer un droit d’établissement effectif. Le régime juridique de la fourniture de services en mode 4 doit dès lors suivre celui du mode 3 et doit donc échapper au champ d’application de l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE. Si les services en mode 4 devaient néanmoins être considérés de manière autonome, les engagements correspondants relèveraient encore toujours de l’article 207, paragraphe 1, TFUE parce que la présence temporaire de personnes physiques est régie par des dispositions du traité sur l’entrée et le séjour de ressortissants de pays tiers sur le territoire des États membres et non par les dispositions relatives à la politique des transports qui figurent au titre VI de la troisième partie du TFUE. En ce qui concerne le transport maritime, le Parlement ajoute qu’en raison du champ d’application du règlement no 4055/86, l’Union jouit d’une compétence exclusive pour les arrangements de partage des cargaisons.

182. Le Conseil et de nombreux États membres prétendent que rien ne permet d’exclure l’établissement dans la zone de transport du champ d’application de l’article 207, paragraphe 5, TFUE. Ni les dispositions du titre VI sur les transports ni la jurisprudence ne suggèrent que l’établissement dans la zone de transport se situerait entièrement en dehors du champ d’application de ces dispositions. L’article 58, paragraphe 1, TFUE ne confirmerait pas l’interprétation que la Commission donne de l’article 207, paragraphe 5, TFUE. S’il est vrai qu’il n’existe pas de disposition analogue concernant le droit d’établissement, il en va de même pour la liberté de circulation des travailleurs et la libre circulation des capitaux. L’interprétation de la Commission limiterait le titre sur les transports à des matières touchant à la libre prestation des services. En tout état de cause, l’article 58, paragraphe 1, TFUE ne fait pas partie du titre sur les transports. Il serait incompatible avec la structure des traités qu’une disposition qui réduit de manière significative le champ d’application du titre sur les transports ne figure pas dans ce titre lui-même. Le Conseil et de nombreux États membres citent des exemples d’actes législatifs de l’Union fondés sur l’article 91, paragraphe 1, ou l’article 100, paragraphe 2, TFUE et qui concernent la liberté d’établissement ou la libre circulation des travailleurs dans le domaine des transports (128).

183. Le Conseil soutient que le champ d’application des matières relatives aux transports visées dans l’ALEUES est nettement plus large que ce que la Commission suggère. Le Conseil et de nombreux États membres ajoutent que la pertinence pratique d’une disposition de l’ALEUES (en particulier en ce qui concerne les voies et plans d’eau navigables, le chemin de fer et la route) n’affecte pas la répartition de la compétence externe. Pareillement, les réserves exprimées par l’Union au profit d’un État membre individuel ne limitent pas le champ d’application d’une matière (129) (par exemple, en ce qui concerne les services de location simple ou de crédit-bail sans opérateurs se rapportant aux navires, aéronefs et autres matériels de transport dans la liste des engagements spécifiques de l’Union ou en ce qui concerne l’entretien et la réparation de vaisseaux, de matériels de transport ferroviaire, de véhicules automobiles, de motocycles, de motoneiges et de matériels des transports routiers ainsi que l’entretien et la réparation des aéronefs et de leurs parties dans cette même liste).

184. Le Conseil fait grief à la Commission de n’avoir pas démontré que les conditions énoncées à l’article 3, paragraphe 2, TFUE sont remplies pour toutes les dispositions relatives aux transports du chapitre 8. Les domaines ne relevant pas de la compétence exclusive de l’Union incluraient donc i) les services auxiliaires des transports par route, par voie ferrée et par voies et plans d’eau navigables et nombre des services auxiliaires des services de transport maritime ; ii) les services de transport maritime dans la mesure où des vaisseaux battant le pavillon d’un pays tiers sont concernés, les services de transport maritime fournis suivant le mode 3 et les services de transport maritime fournis suivant le mode 4 en ce qui concerne les vendeurs de services aux entreprises et les visiteurs en déplacement d’affaires à des fins d’établissement ; iii) les services de transport par voies et plans d’eau navigables ; iv) les services de transport ferroviaire fournis suivant le mode 2 ainsi que l’entretien et la réparation des matériels de transport ferroviaire urbain et de banlieue ; v) les services de transport routier fournis suivant le mode 2 et les services de transport routier fournis suivant le mode 4 qui concernent les vendeurs de services aux entreprises et les visiteurs en déplacement d’affaires à des fins d’établissement, et vi) la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles. Même si la Cour devait confirmer l’interprétation étroite que la Commission donne de l’article 207, paragraphe 5, TFUE, certaines parties du chapitre 8 ne relèveraient, en tout cas, pas de la compétence exclusive de l’Union.

185. Le Conseil et de nombreux États membres affirment également que la Commission ne peut pas regrouper toutes les matières relatives aux transports dans l’ALEUES comme s’il s’agissait d’un « domaine » pertinent unique aux fins de l’application du troisième cas de figure énoncé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE. Le Conseil soutient que certains services auxiliaires sont à ce point distincts qu’ils constituent un domaine à eux seuls. Aux fins de l’application du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE, les « domaines » pertinents doivent être définis par référence aux différents modes de transport et ne sont pas couverts en grande partie par des règles communes.

186. Ainsi, en ce qui concerne le transport maritime, les dispositions de l’ALEUES énoncent des obligations qui ne relèvent pas du champ d’application du règlement no 4055/86. Ce règlement a donc un champ d’application plus étroit. Contrairement à l’ALEUES, de surcroît, le règlement no 4055/86 ne s’applique pas à tous les modes de services. Il concerne non pas les services portuaires (auxiliaires) ou d’autres services de transport maritime auxiliaires, mais uniquement le transport de personnes et de marchandises.

187. Lorsque le règlement s’applique, une distinction doit être établie entre les arrangements de partage de cargaison, qui sont couverts en grande partie par l’article 3 du règlement no 4055/86, et toutes les autres restrictions de la libre circulation des services dans le secteur du transport maritime, qui ne sont pour la plupart pas couvertes par ce règlement.

188. En ce qui concerne les transports par voies navigables, la Commission n’a indiqué aucune règle commune susceptible d’affecter les dispositions de l’ALEUES. La compétence exclusive prévue dans le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE ne saurait être établie dans ce domaine sur la base des règlements du Conseil (CEE) no 3921/91 (130) ou (CE) no 1356/96 (131).

189. Pour ce qui est des transports ferroviaires, les engagements pris par l’Union dans l’ALEUES pour les services fournis suivant le mode 3 pourraient affecter la directive 2012/34. Néanmoins, cette directive ne contient aucune règle concernant le mode 2.

190. Quant aux transports routiers, la Commission n’a indiqué aucune règle commune relative au mode 2. En ce qui concerne le mode 4, de surcroît, la directive 2014/66 ne s’applique pas à une entreprise singapourienne qui n’a pas encore créé un établissement dans un État membre. Des règles communes n’existent qu’en ce qui concerne le mode 3. Elles figurent, en particulier, dans les règlements nos 1071/2009, 1072/2009 et 1073/2009, qui n’imposent aucune condition de nationalité pour la fourniture de services de transports routiers.

191. En ce qui concerne les transports aériens, l’Union jouit, conformément à l’article 3, paragraphe 2, TFUE, d’une compétence externe exclusive en ce qui concerne les services liés aux systèmes informatisés de réservation. Néanmoins, la Commission se trompe en ce qui concerne les services de réparation et d’entretien des aéronefs (au sujet de la base alléguée pour la conclusion d’un accord international que fournirait l’article 12 du règlement no 216/2008) ainsi que la vente et la commercialisation de services de transport aérien (lesquelles, selon la Commission, ne relèvent pas de l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE). De tels services sont indissociablement liés au transport et même essentiels à la fourniture de services de transport.

192. Pour ce qui est des modes de fourniture de services de transport (par opposition aux modes de transport eux-mêmes), il n’existe aucune règle commune relative à la fourniture de services de transport suivant le mode 3 (établissement). L’adoption de pareilles règles n’est pas davantage prévue dans un avenir prévisible. Le mode 4 n’est pas entièrement couvert par des règles communes, en particulier celles énoncées dans la directive 2014/66. Cette directive s’applique en particulier aux transferts intragroupe de ressortissants d’un pays tiers en qualité de dirigeants, d’experts ou de stagiaires, mais pas à d’autres membres du personnel clé. De surcroît, ses dispositions sur les conditions d’entrée et de résidence de ressortissants de pays tiers s’appliquent sans préjudice des dispositions plus favorables a) du droit de l’Union, y compris les accords bilatéraux et multilatéraux et b) des accords bilatéraux ou multilatéraux conclus entre un ou plusieurs États membres et un ou plusieurs pays tiers (132). De telles dispositions favorables figurent dans l’ALEUES, en particulier à l’article 8.14 lu en combinaison avec l’article 8.13. Alors que l’Union jouit d’une compétence externe exclusive implicite pour les questions de résidence à court terme (à la suite de l’adoption du règlement (CE) no 810/2009 (133)), les États membres demeurent compétents pour les visas de longue durée, à l’exception de cas spécifiques qui ne sont pas régis par des règles communes (comme les transferts intragroupe).

193. Qui plus est, contrairement à la Commission, les États membres font valoir que le mode 4 est un mode de fourniture de services distinct. Le mode 4 ne peut pas être considéré comme un accessoire nécessaire à l’établissement (mode 3), qui implique souvent le recrutement de personnel local.

194. Enfin, reconnaître la compétence externe exclusive de l’Union en ce qui concerne les dispositions du chapitre 8 sur la présence temporaire de personnes physiques entraînerait une harmonisation et non seulement méconnaîtrait la répartition des compétences entre l’Union et les États membres qui résulte du protocole 21, mais enfreindrait encore l’article 207, paragraphe 6, TFUE.

 Analyse

 Introduction

195. Dans son avis 1/94, la Cour a dit pour droit qu’en ce qui concerne le commerce des services (autres que les services de transport) qui est régi par l’AGCS, seules les fournitures transfrontière n’impliquant aucun déplacement de personnes (mode 1») pourraient être assimilées au commerce des marchandises et relever ainsi de la politique commerciale commune (134). En revanche, les modes 2 à 4 (c’est-à-dire, respectivement, la consommation à l’étranger, la présence commerciale et la présence de personnes physiques) impliquaient des mouvements de personnes et concernaient le traitement de ressortissants de pays tiers lorsqu’ils traversent des frontières extérieures d’États membres. Ces modes demeuraient dès lors en dehors de la politique commerciale commune (135).

196. Le traité de Nice a par la suite élargi la portée de la politique commerciale commune de façon qu’elle couvre, en particulier, la négociation et la conclusion d’accords sur le commerce des services dans la mesure où ces accords n’étaient pas encore couverts par la politique commerciale commune (136). Aucune distinction n’a été faite en fonction du mode de fourniture. Néanmoins, cette compétence était soumise à un ensemble complexe de règles énoncées à l’article 133, paragraphes 5 et 6, CE. Une exception prévoyait que les accords sur le commerce des services dans certains secteurs (à savoir le secteur culturel, le secteur audiovisuel, le secteur des services de l’éducation, le secteur social et le secteur de la santé humaine) demeuraient soumis à la compétence partagée de (ce qui était à l’époque) la Communauté et des États membres (137). Sous réserve de ces exceptions, la Cour a déclaré dans son avis 1/08 que la Communauté avait acquis compétence exclusive de conclure, en particulier, des accords internationaux concernant le commerce des services fournis suivant les modes 2 à 4 (138). Elle l’a fait sans examiner en détail le type d’obligation auquel la Communauté souscrivait pour chacun de ces modes de fourniture.

197. À la suite de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l’article 207, paragraphe 1, TFUE couvre désormais le commerce des services fournis suivant les quatre modes qui sont régis par l’article I, paragraphe 2, sous a) à d), de l’AGCS dès lors que la distinction entre commerce de marchandises et commerce de services a été supprimée. L’article 207 TFUE ne contient plus aucune dérogation (sectorielle) à la compétence exclusive de l’Union dans ce domaine, bien que l’exception générale concernant les transports demeure d’application (139). La politique commerciale commune couvre donc désormais la totalité de l’AGCS dans la mesure où cet accord s’applique aux services autres que les services de transport.

198. Quelle est la situation en ce qui concerne le chapitre 8 de l’ALEUES ?

199. Pour établir la compétence de l’Union à adopter le chapitre 8 et déterminer la nature de cette compétence, il convient de distinguer les parties de ce chapitre qui relèvent de la politique commerciale commune (article 207) de celles qui peuvent relever de la compétence de l’Union sur une autre base. La raison en est que l’article 207, paragraphe 5, TFUE exclut expressément les services de transport du champ d’application de la politique commerciale commune.

200. C’est la raison pour laquelle je vais commencer par examiner si, dans la mesure où il ne s’applique pas aux services de transport, le chapitre 8 relève de la compétence exclusive de l’Union en matière de politique commerciale commune. Je considérerai par la suite séparément la compétence de l’Union à l’égard des dispositions du chapitre 8 qui s’appliquent aux services de transport. Dans ce contexte, il est nécessaire de tenir compte des dispositions qui traitent expressément de la question de savoir si ce chapitre s’applique ou non à de tels services, des dispositions généralement applicables, des dispositions spécifiques qui régissent les services de transport maritime international et des engagements qui figurent dans la liste des engagements spécifiques de l’Union. Cette liste comprend des listes distinctes pour les fournitures transfrontière de services, pour l’établissement, pour le personnel clé et les stagiaires de niveau postuniversitaire ainsi que pour les vendeurs de services aux entreprises. Ces listes séparées contiennent des engagements spécifiques pour le (sous-)secteur des transports (en particulier le transport maritime, le transport par voies navigables intérieures, le transport ferroviaire, le transport routier, le transport par conduites de produits autres que des combustibles) et pour les services auxiliaires de ces différents modes de transport.

 Sur la compétence exclusive sur la base de l’article 207, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, TFUE

201. Le chapitre 8, sections B à D, (« Fourniture transfrontière de services, consommation à l’étranger » (140), « Établissement et présence temporaire de personnes physiques à des fins professionnelles ») s’appliquent à la fourniture de services suivant les modes 1 à 4 prévus par l’AGCS. Les règles relatives à ces modes de fourniture relèvent donc en principe du champ d’application de l’article 207, paragraphe 1, TFUE. Il en va de même des obligations horizontales énoncées sous la section E (« Cadre réglementaire »), sous-sections 1 (« Dispositions d’application générale ») et 2 (« Réglementation interne ») et aux obligations spécifiques par secteur énoncées sous les sous-sections 3 (« Services informatiques »), 4 (« Services postaux »), 5 (« Services de télécommunications ») et 6 (« Services financiers »). Pareillement, la section F (« Commerce électronique ») vise essentiellement à accroître les possibilités d’échanges pouvant résulter de l’utilisation et du développement du commerce électronique. La section G énonce les conditions auxquelles les parties peuvent adopter des mesures qui seraient autrement incompatibles avec le chapitre 8 et prévoit le réexamen de ce chapitre. Ces sections ont donc des effets directs et immédiats sur le commerce et relèvent donc du champ d’application de la politique commerciale commune de l’Union.

202. La question de savoir si la section C (« Établissement », c’est-à-dire la fourniture de services suivant le mode 3) concerne également les investissements étrangers directs est une question distincte. La Commission admet que la section C du chapitre huit peut, conformément à l’article 8.8, sous d), de l’ALEUES, s’appliquer à des formes d’établissements créées pour l’exercice d’une activité économique qui ne comporte pas (exclusivement) la fourniture de services. Ces formes d’établissements peuvent donc ne pas relever de la notion d’« échange […] de services » au sens de l’article 207, paragraphe 1, TFUE. Néanmoins, la Commission soutient que, lorsque l’établissement remplit les conditions lui permettant d’être considéré comme un « investissement étranger direct », il relève néanmoins de la politique commerciale commune de l’Union. J’examinerai cet argument au point 326 plus bas.

203. Par la suite, comme je l’ai expliqué (141), les échanges de services fournis suivant le mode 4 (présence temporaire de personnes physiques) relève du champ d’application de la politique commerciale commune, sous la seule réserve de l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE. C’est sur cette base-là que je rejette les arguments soulevés par certains États membres à propos des protocoles nos 21 et 22. Ces protocoles ne sont pas de nature à avoir un effet sur la question de la base juridique correcte sur laquelle le Conseil peut décider de signer un accord international. C’est la base juridique d’une mesure qui détermine les protocoles qu’il faut appliquer, et non l’inverse (142). Ces deux protocoles couvrent le titre V de la troisième partie du TFUE (« Espace de liberté, de sécurité et de justice »). Rien n’indique que ce titre pourrait faire partie de la base légale de la décision de conclure l’ALEUES. La raison en est, en particulier, l’article 8.1.4 de l’ALEUES et le fait que le mode 4 (en tant qu’il est couvert par l’ALEUES) a trait à la présence temporaire de personnes physiques à des fins professionnelles.

204. De même, je ne puis me rallier à l’argument que certains États membres ont avancé à propos des services financiers. Selon eux, il faudrait que l’Union ait adopté du droit dérivé pour qu’un domaine relève de la compétence exclusive de l’Union en matière de politique commerciale commune. J’ai déjà expliqué que ni l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE ni l’article 207, paragraphe 1, TFUE ne subordonnent la compétence de l’Union à l’adoption préalable de règles harmonisées ou d’autres règles régissant les relations commerciales entre l’Union et les pays tiers (143). Dans ce contexte, il n’est pas nécessaire d’explorer le champ d’application de la directive 2014/65, auquel référence a été faite lors de l’audience.

205. Je ne suis pas non plus convaincue que la politique commerciale commune ne couvre pas l’article 8.16 de l’ALEUES relatif à la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles. Une telle reconnaissance mutuelle est susceptible d’avoir un impact direct sur la libéralisation des fournitures de services, en particulier suivant les modes 3 et 4, parce qu’elle facilite la circulation des personnes aux fins de la fourniture de services. De surcroît, l’article 8.16 n’harmonise pas les exigences en matière de qualifications ou d’expérience professionnelles et il n’impose pas aux parties ni ne leur interdit d’imposer de telles exigences. Il vise bien plutôt à encourager les parties à adopter une recommandation (voire de négocier un accord) sur la reconnaissance mutuelle des exigences en matière de qualifications ou d’expérience professionnelles. Sa fonction est donc semblable à celle de l’article VII de l’AGCS.

206. Enfin, comme je l’ai déjà expliqué (144), la portée de la politique commerciale commune, qui est une politique autonome, ne peut pas être subordonnée à l’adoption préalable de dispositions de droit dérivé de l’Union réglementant le marché intérieur ni a fortiorià la portée et au contenu de pareilles dispositions. C’est la raison pour laquelle la directive 2005/36 ne saurait modifier la répartition des compétences qui résulte de l’article 3, paragraphe 1, sous e), et de l’article 207, paragraphe 1, TFUE.

207. J’en conclus dès lors que, sous réserve de l’exception que l’article 207, paragraphe 5, TFUE formule pour les transports, les sections B à G du chapitre 8 relèvent du champ d’application de l’article 207, paragraphe 1, TFUE. Il en résulte que la section A, qui énonce les objectifs et le champ d’application de ce chapitre, relève elle aussi de la politique commerciale commune (sous réserve de la même exception).

 Sur les matières exclues du champ d’application de la politique commerciale commune en vertu de l’article 207, paragraphe 5, TFUE

208. L’article 207, paragraphe 5, TFUE exclut les règles sur les transports de la compétence exclusive de l’Union. Dans la mesure où le chapitre 8 s’applique aux services de transport, il est donc nécessaire d’examiner si l’Union dispose néanmoins d’une compétence exclusive sur la base de l’article 3, paragraphe 2, TFUE (145).

209. Les observations déposées dans la présente procédure montrent que l’étendue précise de l’exclusion énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE demeure incertaine. L’article 207, paragraphe 5, TFUE couvre-t-il l’établissement dans le secteur des transports ? En outre des services qui peuvent être fournis uniquement dans le cadre du secteur des transports relèvent-ils eux aussi de cette exception ? Je vais examiner ces deux questions l’une après l’autre.

210. En ce qui concerne la première question, je ne lis pas l’article 207, paragraphe 5, TFUE de la même manière que la Commission.

211. L’article 207, paragraphe 5, TFUE place les « accords internationaux dans le domaine des transports » en dehors de la politique commerciale commune. Bien qu’aux termes de cette disposition, de tels accords relèvent, notamment, du titre VI de la troisième partie du TFUE, cette référence concerne les effets de l’exception plutôt que le champ d’application de celle-ci. Les arguments que le Conseil et les États membres ont présentés dans le contexte des transports sont centrés, pour l’essentiel, sur des questions relatives à l’établissement (mode 3).

212. Comme l’article 207, paragraphe 5, TFUE ne fait pas de distinction entre les modes de fourniture des services, je ne vois aucune raison de considérer que l’exception qu’il énonce ne s’applique pas aux services fournis suivant le mode 3. La Cour l’a d’ailleurs confirmé (du moins de manière implicite) dans son avis 1/08, dans lequel elle a jugé que le domaine des transports dans les accords en cause, qui couvraient également le mode 3, relevait du champ d’application de la politique des transports. La Cour n’a donc fait aucune distinction entre les différents modes de fourniture lorsqu’elle a appliqué (ce qui est devenu) l’article 207, paragraphe 5, TFUE (146).

213. En tout état de cause, l’établissement n’est pas exclu du champ d’application du titre VI de la troisième partie du TFUE relatif aux transports. Ce titre s’applique à tous les modes de fourniture dans la mesure où il s’agit de services de transport. C’est ainsi que l’établissement pourrait être régi par les dispositions adoptées en application de l’article 91, paragraphe 1, sous b), TFUE énonçant les conditions auxquelles les transporteurs non-résidents peuvent opérer des services de transport sur le territoire d’un État membre.

214. Il est vrai que l’article 58, paragraphe 1, TFUE (qui fait partie du chapitre 3 du titre IV sur les services) dispose que la libre circulation des services, en matière de transports, est régie par les dispositions du titre VI de la troisième partie du TFUE et il est vrai également qu’il n’existe aucune disposition analogue dans le chapitre 2 du titre IV sur le droit d’établissement. La Cour a dit pour droit que l’article 58, paragraphe 1, TFUE est inclus dans le chapitre 3 (« Services ») du titre IV du TFUE parce que le transport est, par essence, un service. Comme, en raison des aspects spécifiques de cette branche d’activité économique, il était nécessaire de soumettre les transports à un régime spécial (147), les services de transport sont traités séparément et déclarés expressément régis par le titre VI de la troisième partie du TFUE plutôt que par les dispositions de ce traité relatives à la libre prestation des services (148).

215. Néanmoins, l’absence d’une disposition analogue à l’article 58, paragraphe 1, TFUE, dans le chapitre 2 du titre IV sur le droit d’établissement ne signifie pas que l’établissement est exclu en tant que tel du titre VI de la troisième partie du TFUE. Elle signifie simplement que, dans le secteur des transports, l’établissement n’est pas exclu du champ d’application du chapitre 2 du titre IV. La Cour a jugé, en substance, que ce chapitre s’applique directement aux transports, du moins dans la mesure où des règles plus spécifiques adoptées sur la base du titre VI de la troisième partie ne s’appliquent pas (149).

216. Je vais me tourner à présent vers la question de savoir si des services fournis dans le cadre du secteur des transports sont visés par l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE. Pour répondre à cette question, il faut jeter un coup d’œil à celle de savoir si le degré de connexion entre le service et le transport doit atteindre un certain seuil pour déclencher l’application de l’exception prévue à l’article 207, paragraphe 5, TFUE. En particulier, la question se pose de savoir si des services tels que la manutention des cargaisons, le dédouanement, les prestations d’agences maritimes, la location de vaisseaux avec équipage ou encore la vente et la commercialisation de services de transport aérien relèvent de la politique commerciale commune ou de la politique commune des transports.

217. Selon moi, l’expression « accords internationaux dans le domaine des transports » couvre les accords (ou les parties d’accords) qui s’appliquent non seulement aux services de transport en tant que tels (à savoir le service qui consiste à transporter des marchandises ou des personnes par air, par route, par voie ferrée, par mer ou par voies et plans d’eau navigables), mais également à des services qui sont intrinsèquement et indissociablement liés à de tels services, c’est-à-dire des services qui sont à la fois spécialement liés au service de transport et qui leur sont subordonnés (150).

218. La cohérence de l’action externe dans le domaine des transports exige que le service de transport lui-même et le service dont il est l’accessoire fasse partie de la même politique commune. La cohérence de la politique de l’Union concernant les services de transport en tant que tels et la libéralisation appropriée de ces services pourraient être ébranlées s’il n’existait pas une politique correspondante pour les services qui sont intrinsèquement liés au transport et qui, en pratique, rendent possible la fourniture d’un service de transport. Ainsi, transporter par bateau une cargaison dans des containers n’a aucun sens si l’on ne dispose pas de services qui déchargent les containers du navire, de sorte que leur contenu puisse être transporté au-delà et finalement livré aux destinataires. Des mesures libéralisant l’accès des bateaux de fret aux ports pourraient dès lors être tenues en échec si, par exemple, les services de manutention des cargaisons demeuraient soumis à des mesures protectionnistes. Il en va de même, par exemple, de l’entretien et de la réparation des matériels de transport, dont on peut présumer qu’ils requièrent un savoir-faire et des appareillages techniques spécifiques au mode de transport concerné et dont on peut également supposer qu’ils sont nécessaires pour assurer que ce transport est efficace. Pareillement, les systèmes de réservation par ordinateur sont des systèmes informatisés dans lesquels les données sont rassemblées et mises à la disposition du public de manière à ce qu’il puisse réserver et, finalement, acheter (notamment) des services de transport. Le fait que de tels systèmes peuvent également être utilisés pour réserver et acheter des services de logement pour les voyageurs ne change rien au fait que la première raison pour laquelle de tels systèmes existent est de vendre des services de transport. Cette interprétation est corroborée dans l’avis 1/08, dans lequel la Cour a décrit « certains services de transport aérien » couverts par la liste en cause dans cette procédure comme incluant « les services de réparation et d’entretien d’aéronefs, la vente et la commercialisation de services de transport ou encore les services de systèmes informatisés de réservation » (151).

219. Par ailleurs, les services qui ne sont pas intrinsèquement et indissociablement liés aux services de transport, tels que les services de dédouanement, ne relèvent pas de l’exception énoncée à l’article 207, paragraphe 5, TFUE. De tels services sont fournis parce que des marchandises sont importées et exportées. Cela impliquerait, bien entendu, des mouvements transfrontière de marchandises au moyen de différentes formes de transport. Néanmoins, le besoin de pareils services se fait sentir indépendamment des modes de transport utilisés.

 Sur la compétence exclusive sur la base de l’article 3, paragraphe 2, TFUE

220. Pour les matières relevant du champ d’application de l’exclusion inscrite à l’article 207, paragraphe 5, TFUE et qui relèvent donc du domaine des transports, les compétences sont en principe partagées entre l’Union et les États membres (152). La Commission prétend, néanmoins, que l’Union dispose d’une compétence externe exclusive sur la base soit du premier, soit du troisième cas de figure visés à l’article 3, paragraphe 2, TFUE selon le service de transport concerné.

–       Sur le premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE

221. La Commission soutient que l’article 12 du règlement no 216/2008 prévoit la conclusion d’un accord par l’Union. C’est la raison pour laquelle l’Union est exclusivement compétente à conclure un accord dans la mesure où il porte sur le service d’entretien et de réparation d’aéronefs.

222. Je ne suis pas d’accord.

223. Le règlement no 216/2008 crée l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) et met en place un cadre approprié et complet pour la définition et la mise en œuvre de règles techniques et de procédures administratives communes dans le domaine de l’aviation civile et pour la sécurité des aéronefs des pays tiers empruntant les aéroports de l’Union (153). Il s’applique, notamment, à l’entretien et à l’exploitation de produits, de pièces et d’équipements aéronautiques (ce qui inclut donc les aéronefs (154)) (155).

224. Conformément à l’article 12, l’Union doit conclure avec des pays tiers des accords de reconnaissance mutuelle concernant l’utilisation de certificats délivrés par les autorités aéronautiques de ces pays tiers certifiant la conformité aux exigences de sécurité de l’aviation civile. Cette disposition, lue en combinaison avec le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE, fournit une base qui permet à l’Union de conclure, sans ses États membres, avec des pays tiers des accords internationaux sur la reconnaissance de pareils certificats. Néanmoins, il ne crée pas une compétence externe exclusive de l’Union qui permettrait à celle‑ci de conclure des accords internationaux visant à libéraliser les fournitures de services d’entretien et de réparation des aéronefs. En d’autres termes, le fait que le pouvoir législateur de l’Union a décidé que des États membres ne peuvent pas conclure leurs propres accords internationaux sur un aspect particulier d’une politique ne signifie pas que l’Union pourrait alors se prévaloir du premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE pour s’arroger une compétence externe exclusive sur l’ensemble de cette politique ou sur certains aspects de celle‑ci.

–       Sur le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE

225. La première étape que comporte l’application de l’article 3, paragraphe 2, TFUE consiste à définir le domaine concerné (156). Les parties sont divisées sur le domaine pertinent à prendre en considération pour déterminer si l’Union est exclusivement compétente à conclure l’ALEUES dans sa partie consacrée aux services de transport.

226. En ne prenant pas d’engagement ou seulement des engagements très limités concernant certains modes de fourniture de certains types de transport au chapitre 8 de l’ALEUES, l’Union a choisi d’exercer sa compétence d’une manière particulière. En pareilles circonstances, une base juridique permettant d’exercer cette compétence externe doit figurer dans les traités. Par exemple, il résulte de la liste des engagements spécifiques annexée au chapitre 8 que l’Union ne prend aucun engagement en ce qui concerne le mode 1 de fourniture de services de transport ferroviaire (157). Elle a donc choisi de n’accepter aucune obligation. Cela présuppose que l’Union est compétente à faire un tel choix. Cette compétence requiert une base juridique dans les traités. Le même raisonnement s’applique aux engagements qui pourraient être d’une pertinence pratique limitée (en raison, par exemple, de la distance géographique entre l’Union et Singapour). Lorsqu’une compétence est exercée, les règles pertinentes du traité sur la répartition des compétences externes entre l’Union et les États membres s’appliquent. C’est pourquoi je suis d’accord avec le Conseil que cette répartition ne peut pas différer selon la situation géographique des tierces parties avec lesquelles l’Union conclut un accord international particulier.

227. Inversement, les choix faits dans l’exercice de compétences ainsi que les effets pratiques de ces choix peuvent avoir un impact sur la réponse à donner à la question de savoir si l’accord international affecte des règles communes ou en altère la portée. La dernière étape de l’analyse AETR exige, comme je l’ai expliqué, que l’on examine spécifiquement les conséquences que des engagements internationaux ont sur le droit dérivé de l’Union dans le domaine concerné (158).

228. Les engagements horizontaux énoncées au chapitre 8 et tant les engagements horizontaux que les engagements sectoriels qui figurent sur la liste des engagements spécifiques qui est annexée à ce chapitre montrent que l’ALEUES libéralise le commerce des services de transport entre l’Union et Singapour sur la base du mode de transport pertinent. Ainsi, alors que les engagements horizontaux s’appliquent en principe à tous les services de transport (à l’exception d’une grande partie des services de transport aérien), des principes spécifiques s’appliquent à la libéralisation du transport maritime international. De surcroît, la liste des engagements spécifiques (appendice 8-A-1) pour le mode 1 (fourniture transfrontière) fait, sous le titre 11 (« Services de transport »), une distinction entre les engagements concernant le transport maritime (section 11.A), le transport sur les voies et plans d’eau navigables (section 11.B), le transport ferroviaire (section 11.C), le transport routier (section 11.D) et le transport par conduites de produits autres que des combustibles (section 11.E). La liste d’engagements spécifiques figure sous le titre 12 (« Services auxiliaires des transports ») pour les services auxiliaires correspondant à chacun de ces types de transport. Les mêmes distinctions apparaissent à l’appendice 8-A-2 sur le mode 3 (établissement) et à l’appendice 8-A-3 sur le mode 4 (personnel clé et stagiaires de niveau postuniversitaire ainsi que vendeurs de services aux entreprises) (159). Le degré d’engagement dépend de la mention utilisée dans la liste, selon que celle-ci utilise l’expression « aucun engagement » (qui signifie qu’aucun engagement n’a été pris pour l’ensemble des services concernés ou pour certains d’entre eux) ou l’expression « aucune restriction » (ce qui signifie que des engagements complets ont été pris) ou selon qu’elle spécifie les termes d’un engagement particulier (par exemple, une condition de nationalité peut encore être appliquée).

229. De telles distinctions sont logiques puisque, comme l’illustre le droit dérivé de l’Union qui met en œuvre la politique commune des transports de l’Union (160), chaque mode de transport (aérien, routier, ferroviaire, maritime et par voies et plans d’eau navigables) (161) présente des caractéristiques qui, dans une large mesure, lui sont spécifiques et qui nécessitent, dès lors, l’adoption de règles spécifiques, y compris en vue de leur libéralisation.

230. Il en résulte que les domaines pertinents aux fins du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE en l’espèce correspondent à la fourniture de services de transport suivant chacun des modes de transport, c’est-à-dire des services de transport aérien, de transport routier, de transport ferroviaire, de transport maritime et de transport par voies et plans d’eau navigables (162). Chaque domaine inclut des services intrinsèquement liés aux services de transport concernés. Ces services ne peuvent pas être simultanément intrinsèquement liés à un mode de transport et constituer un domaine distinct aux fins de l’article 3, paragraphe 2, TFUE (parce qu’ils sont distincts d’autres services).

231. Je vais examiner à présent si ces domaines sont « couverts en grande partie » par des règles communes avant de rechercher l’impact que la conclusion de l’ALEUES aurait sur ces règles.

232. En ce qui concerne le transport maritime, je rejette l’argument suivant lequel le fait que le règlement no 4055/86 ne porte pas (essentiellement) sur la fourniture de services de transport maritime international en provenance de pays tiers et à destination de l’Union serait suffisant pour écarter toute compétence externe exclusive sur la base du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE.

233. Il est exact que le règlement no 4055/86 s’applique aux « transports intracommunautaires » (qui sont définis comme étant le « transport de voyageurs ou de marchandises par mer entre un port d’un État membre et un port ou une installation off-shore d’un autre État membre ») et au « trafic avec des pays tiers » (qui est défini comme étant le « transport de voyageurs ou de marchandises par mer entre un port d’un État membre et un port ou une installation off-shore d’un pays tiers ») (163). Comme il a, en substance, pour objet de mettre en œuvre les règles du traité sur la libre prestation des services et la jurisprudence y afférente (164), ce règlement s’applique uniquement i) soit aux ressortissants de l’Union qui sont établis dans un État membre autre que celui du destinataire des services (article 1er, paragraphe 1), ii) soit aux ressortissants des États membres établis hors de l’Union et aux compagnies maritimes établies hors de la Communauté et contrôlées par des ressortissants d’un État membre, si leurs navires sont immatriculés dans cet État membre conformément à sa législation (article 1er, paragraphe 2) (165). Contrairement à l’ALEUES, le règlement no 4055/86 n’a donc pas pour objet d’éliminer des restrictions à la fourniture de services de transport maritime international lorsque ces services sont fournis par des ressortissants de pays tiers ou par des compagnies maritimes établies en dehors de l’Union et contrôlées par des ressortissants de pays tiers ou lorsque les navires sont immatriculés dans un pays tiers, sauf si les services sont fournis par des ressortissants de l’Union qui sont établis dans un État membre autre que celui du destinataire des services (166).

234. Que le règlement no 4055/86 s’applique ou non à des situations comportant un élément étranger à l’Union (et qui ont donc une dimension externe) est, cependant, dénué de pertinence lorsque l’on effectue une analyse AETR. Un engagement international est parfaitement susceptible d’affecter des règles communes régissant uniquement des situations « intra-Union » ou d’en altérer la portée. L’avis 1/03 en fournit une illustration (167). La nouvelle convention de Lugano sur laquelle portait la demande de cet avis visait à étendre à des États non membres les règles communes inscrites dans le règlement (CE) no 44/2001 du Conseil (168) concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale. Alors que ces règles communes n’avaient pas vocation à régir la compétence judiciaire des juridictions dans des États non membres ni la reconnaissance et l’exécution de jugements ou arrêts rendus par celles-ci, la Cour a conclu que la nouvelle convention de Lugano affecterait l’application uniforme et cohérente du système mis en place par le règlement no 44/2001 (169).

235. Le règlement no 4055/86 couvre-t-il en grande partie le domaine des services de transport maritime ?

236. Pour le transport maritime, l’Union accepte, au chapitre 8, en plus des obligations horizontales énoncées dans ce chapitre, des engagements complets pour les modes 1 et 2, certains engagements pour le mode 3 et des engagements limités pour le mode 4 (170). En ce qui concerne les services auxiliaires du transport maritime, les engagements pour les modes 1 et 3 dépendent de l’État membre concerné et du type de services auxiliaires, et l’Union a pris des engagements complets pour le mode 2. Un certain nombre d’États membres ont accepté des engagements limités pour le mode 4.

237. Il existe certainement des recoupements entre le règlement no 4055/86 et le chapitre 8 de l’ALEUES. Conformément à l’article 58, paragraphe 1, TFUE, ce règlement a pour objet d’appliquer les règles du traité régissant la libre circulation des services en matière de transport maritime entre les États membres (171). Il s’oppose donc à l’application de toute réglementation nationale qui a pour effet de rendre la prestation de services entre États membres plus difficile que la prestation de services purement interne à un État membre, à moins que cette réglementation n’apparaisse justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général et à la condition que les mesures qu’elle édicte soient nécessaires et proportionnées (172). Tout comme l’ALEUES, le règlement no 4055/86 vise donc à libéraliser la fourniture transfrontière de services de transport maritime (c’est-à-dire la fourniture de ces services suivant les modes 1 et 2). Tant l’ALEUES que ce règlement contiennent en outre des règles spécifiques concernant les arrangements en matière de partage des cargaisons contenus dans les accords bilatéraux existants conclus par les États membres avec des pays tiers (173).

238. Néanmoins, la seule énonciation de ces règles dans le règlement no 4055/86 ne permet pas de conclure que la libéralisation des services de transport maritime est couverte en grande partie par des règles communes.

239. Premièrement, le règlement no 4055/86 porte uniquement sur les échanges transfrontière de services maritimes (modes 1 et 2). Il ne libéralise pas les fournitures de services en mode 3, c’est-à-dire suivant le mode établissement. La raison en est peut-être que le transport maritime (tout comme d’autres modes de transport) est déjà régi, dans l’Union, par les règles du traité sur la liberté d’établissement qui sont énoncées aux articles 49 à 55 TFUE. Ces dispositions ne contiennent aucune exclusion comparable à celle que l’article 58 TFUE énonce pour les services (174). Le mode 3 en matière de transport maritime est donc soumis aux dispositions du traité sur la liberté d’établissement. Néanmoins, comme je l’expliquerai dans le contexte des investissements portefeuille, des dispositions du traité ne peuvent pas, selon moi, être considérées comme des « règles communes » aux fins du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE (175). De surcroît, alors que l’article 50, paragraphe 1, TFUE fournit une base juridique pour l’adoption de règles communes visant à « réaliser la liberté d’établissement dans une activité déterminée », aucune des parties à la présente procédure n’a suggéré que cette disposition a été utilisée dans le secteur du transport maritime (176).

240. Secondement, en ce qui concerne le mode 4, la Commission observe à bon droit que des règles communes sont inscrites dans la directive 2014/66. Cependant, cette directive s’applique spécifiquement dans le contexte d’un transfert intragroupe de cadres, d’experts ou d’employés stagiaires (177). Comme l’indique l’article 8.13.2 de l’ALEUES, le chapitre 8, section D, a un champ d’application considérablement plus large puisqu’il couvre non seulement les transferts intragroupe de personnel, mais également d’autres formes de « présences temporaires de personnes physiques à des fins professionnelles ». Ainsi, l’article 8.13.2, sous a), second alinéa, précise qu’outre les « personnes transférées temporairement par leur société », le personnel clé comprend les « visiteurs en déplacement d’affaires à des fins d’établissement ». Pareillement, cet article s’applique aux « vendeurs de services aux entreprises », qui sont définis comme étant des « personnes physiques qui représentent un fournisseur de services d’une partie et qui souhaitent entrer temporairement sur le territoire de l’autre partie afin de négocier la vente de services ou de conclure des accords de vente de services pour ce fournisseur ». À nouveau, cette fourniture de services n’implique aucun « transfert intragroupe » de main-d’œuvre.

241. C’est la raison pour laquelle je conclus que le domaine de la libéralisation des services de transport maritime n’est pas encore couvert en grande partie par des règles communes et que, par conséquent, aucune compétence externe exclusive dans ce domaine ne peut être établie au sens du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE.

242. Toutefois, j’admets que l’Union dispose d’une compétence partagée de conclure un accord international visant à libéraliser les services de transport maritime.

243. Selon moi, les dispositions de l’ALEUES sur les services de transport maritime peuvent être considérées comme étant nécessaires pour atteindre les objectifs du titre VI de la troisième partie du TFUE concernant la politique des transports de l’Union (deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE). Une politique commune des transports requiert, notamment, l’adoption de règles communes aux transports internationaux exécutés au départ ou à destination du territoire d’un État membre ou traversant le territoire d’un ou de plusieurs États membres [article 91, paragraphe 1, sous a), TFUE]. Cela inclut le transport par voie ferrée, par route, par voie navigable, par mer et par air (article 100 TFUE). Cela a nécessairement pour corollaire la compétence de conclure des accords internationaux de manière à obtenir des engagements réciproques de la part de pays tiers au départ ou à destination desquels le transport est effectué. Je considère dès lors que l’Union et les États membres se partagent la compétence concernant ces dispositions en application de l’article 4, paragraphe 2, sous g), TFUE (« Les transports ») et du second cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, lus en combinaison avec l’article 91 et l’article 100, paragraphe 2, TFUE.

244. Je me tourne à présent vers le transport par voies et plans d’eau navigables. En plus des obligations horizontales énoncées au chapitre 8, l’Union prend, dans ce chapitre, des engagements limités pour les modes 1 et 2 ainsi que pour le mode 3 (selon l’État membre concerné). Aucun engagement n’est pris pour le mode 4. En ce qui concerne les services auxiliaires du transport par voies et plans d’eau navigable (tels que les services de manutention ou les services de stockage et de magasinage), les engagements pris pour les modes 1, 2 et 3 dépendent de l’État membre concerné et du type de services auxiliaires.

245. J’ai déjà expliqué pourquoi je ne suis pas d’accord avec la Commission lorsqu’elle affirme qu’en raison de la pertinence pratique restreinte de certains services, l’Union n’a, pour l’essentiel, pris aucun engagement et qu’en pratique, elle n’exerce aucune compétence par le truchement de l’ALEUES (178). Qui plus est, la Commission n’a présenté aucun élément qui démontrerait que les conditions du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE sont remplies. Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire d’explorer plus avant l’éventuelle application de l’article 3, paragraphe 2, TFUE aux dispositions du chapitre 8 dans la mesure où elles s’appliquent au transport par voies et plans d’eau navigables. L’Union ne dispose d’aucune compétence externe exclusive pour un tel mode de transport en vertu de l’article 3, paragraphe 2, TFUE.

246. Néanmoins, comme dans le cas du transport maritime (179), les dispositions de l’ALEUES sur le transport par voies et plans d’eau navigables peuvent être considérées comme étant nécessaires pour atteindre les objectifs exposés sous le titre VI de la troisième partie du TFUE (deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE) et, partant, elles relèvent, pour les mêmes raisons, de la compétence partagée de l’Union et des États membres sur la base de l’article 4, paragraphe 2, sous g), et du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, lus en combinaison avec l’article 91 et l’article 100, paragraphe 1, TFUE.

247. En ce qui concerne le transport aérien, à l’exception des obligations horizontales énoncées au chapitre 8, l’Union prend des engagements complets pour les modes 1 et 2, bien que ces engagements soient limités i) aux services de réparation et d’entretien des aéronefs pendant lesquels un aéronef est retiré du service ; ii) à la vente et à la commercialisation de services de transport aérien et iii) aux services informatisés de réservation. L’Union prend en outre certains engagements pour le mode 3 et des engagements limités pour le mode 4 (une condition de nationalité peut être appliquée) pour les services internationaux de transport aérien.

248. J’ai déjà écarté la compétence exclusive que la Commission revendique pour l’Union en matière de services de réparation et d’entretien des aéronefs sur la base du premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE (180).

249. Par conséquent, le point de savoir si l’Union jouit d’une compétence exclusive en matière de transport aérien dépend de la question de savoir si les conditions du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE sont remplies.

250. Selon moi, la Commission n’a pas démontré qu’elles le sont. Ses arguments concernant les services de réparation et d’entretien des aéronefs se limitent au premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE. Sa position sur la vente et la commercialisation de services de transport aérien est qu’elles relèvent de la politique commerciale commune. Les seuls services de transport aérien pour lesquels la Commission présente une analyse AETR sont les services liés aux systèmes informatisés de réservation. Il est constant que le règlement no 80/2009 énonce des règles communes qui s’appliquent à tout système informatisé de réservation dans la mesure où il contient des produits de transport aérien offerts ou utilisés dans l’Union. De plus, la Cour a confirmé que par l’effet du règlement qui a précédé le règlement no 80/2009 [règlement (CEE) no 2299/89 du Conseil (181)], l’Union a acquis la compétence exclusive de contracter avec les pays tiers des accords internationaux concernant les systèmes informatisés de réservation proposés ou utilisés sur son territoire (182). Ce seul élément n’est cependant pas suffisant pour conclure que la fourniture de services de transport aérien est un domaine couvert en grande partie par des règles communes. L’Union ne dispose donc pas d’une compétence externe exclusive dans ce domaine.

251. Les dispositions de l’ALEUES concernant les services de transport aérien peuvent néanmoins être considérées comme étant nécessaires pour atteindre les objectifs énoncés sous le titre VI de la troisième partie du TFUE (deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE) pour des raisons analogues à celles qui s’appliquent au transport maritime et au transport par voies et plans d’eau navigables (183). C’est pourquoi l’Union et les États membres ont une compétence partagée pour ces dispositions conformément à l’article 4, paragraphe 2, sous g), et au deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, lus en combinaison avec l’article 91 et l’article 100, paragraphe 2, TFUE.

252. Dans le domaine du transport ferroviaire, l’Union n’a, en dehors des obligations horizontales énoncées au chapitre 8, pris aucun engagement pour le mode 1 et a pris des engagements complets pour le mode 2. Des engagements complets ont été pris pour la plupart des États membres en ce qui concerne le mode 3 bien que les États membres peuvent soumettre l’utilisation du domaine public à un monopole public ou à des droits exclusifs octroyés à des opérateurs privés. Aucune réserve ne s’applique en ce qui concerne le mode 4 (184). Pour les services auxiliaires du transport ferroviaire, les engagements de modes 1 et 3 dépendent de l’État membre concerné et du type de service auxiliaire. Des engagements complets ont été pris pour le mode 2.

253. Je rejette l’argument de la Commission selon lequel l’avis 1/94 et l’arrêt Portugal/Conseil (185) contiennent des éléments permettant de conclure que les engagements pris dans l’ALEUES pour les fournitures de services de transport ferroviaire suivant le mode 2 ont une « portée extrêmement limitée » et sont donc accessoires par rapport aux engagements pris dans le domaine de la politique commerciale commune (pour laquelle l’Union est exclusivement compétente). Dans la partie de l’avis 1/94 qui nous intéresse, la Cour a fait une distinction entre un accord international « de la nature et de l’ampleur de l’accord ADPIC », qui ne pouvait pas être considéré comme relevant du champ d’application de la politique commerciale commune, et les accords commerciaux qui ne traitent de droits de propriété intellectuelle que d’une manière purement incidente (186). Cette partie de l’avis 1/94 concernait donc la portée d’accords adoptés sur la base juridique de (ce qui est devenu) l’article 207, paragraphe 1, TFUE. Elle est dénuée de pertinence lorsque, comme en l’espèce, la Cour est invitée à déterminer si l’Union détient une compétence externe exclusive sur la base de l’article 3, paragraphe 2, TFUE en ce qui concerne un domaine qui ne relève pas de la politique commerciale commune (à savoir le transport ferroviaire en l’espèce). Le même raisonnement s’applique à l’arrêt Portugal/Conseil (187).

254. Je me penche à présent sur la question de savoir si la directive 2012/34 couvre en grande partie le domaine des services de transport ferroviaire dans l’Union.

255. La directive 2012/34, qui s’applique à l’utilisation d’infrastructures ferroviaires pour les services ferroviaires nationaux et internationaux (188), a pour objet d’appliquer le principe de la libre prestation des services au secteur ferroviaire en tenant compte des caractéristiques spécifiques de ce secteur (189). La directive 2012/34 énonce donc les règles suivant lesquelles les entreprises ferroviaires ont accès aux infrastructures ferroviaires dans tous les États membres (y compris dans un État membre autre que celui dans lequel elles sont établies) afin d’y exploiter des services de fret ferroviaire ou de transport de passagers (190). Elle vise donc la fourniture de services transfrontière de transport ferroviaire (modes 1 et 2) dans l’Union. La directive énonce également des règles matérielles et de procédure concernant les conditions auxquelles une entreprise ferroviaire peut obtenir une licence lui permettant de fournir des services de transport ferroviaire dans l’Union, y compris au départ du territoire d’un État membre vers le territoire d’un autre État membre. Ces conditions portent, en particulier, sur l’honorabilité de l’entreprise, sur sa capacité financière et sur sa capacité professionnelle (191). La directive 2012/34 contient donc des règles détaillées d’accès au marché par voie d’établissement (mode 3).

256. Dans ces circonstances, j’estime que la directive 2012/34 couvre en grande partie le domaine du transport ferroviaire.

257. Je considère également que les règles pertinentes de l’ALEUES altèreraient la portée des règles communes énoncées dans cette directive. Par exemple, les dispositions concernant l’établissement (chapitre 8, section C) s’appliquent aux « mesures adoptées ou maintenues par les parties qui ont une incidence sur l’établissement dans l’ensemble des activités économiques » (192). Ces dispositions visent notamment la protection contre tout traitement discriminatoire. Ainsi, une entreprise de transport ferroviaire singapourienne cherchant à pénétrer le marché de l’Union en y établissant une présence commerciale doit obtenir un accès au marché non discriminatoire, sous réserve des restrictions énoncées dans la liste des engagements spécifiques de l’Union (193). Une fois établie dans un État membre, cette entreprise ne devrait pas être traitée de manière moins favorable que des entreprises similaires de cet État membre (194). Ces dispositions concernant l’accès au marché et le traitement national ont donc pour effet d’offrir aux entreprises de transport ferroviaire singapouriennes un accès à l’espace ferroviaire unique européen mis en place par la directive 2012/34. Par exemple, une entreprise de transport ferroviaire singapourienne aurait, en principe, le droit d’obtenir une licence aux mêmes conditions que les entreprises ferroviaires « nationales » (195). Sous réserve de la limitation horizontale pour les services publics qui figure dans la liste des engagements spécifiques de l’Union concernant l’établissement (196), cette entreprise aurait également le droit d’obtenir un droit d’accès aux infrastructures ferroviaires dans les États membres (197) et de ne pas être traitée d’une manière moins favorable qu’une entreprise ferroviaire « nationale » en ce qui concerne la répartition des capacités de l’infrastructure (198). En d’autres termes, l’ALEUES altèrerait la portée de la directive 2012/34.

258. Comme l’ALEUES affecterait les règles communes existantes concernant l’accès au marché des services de transport ferroviaire de l’Union, celle-ci a acquis une compétence externe exclusive dans le domaine du transport ferroviaire. Cette conclusion ne peut pas être mise en question par le fait qu’en ce qui concerne la fourniture de services de transport ferroviaire suivant le mode 4, la directive 2014/66 a un champ d’application plus limité que les dispositions pertinentes de l’ALEUES. Le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE n’exige pas que les domaines couverts par les engagements internationaux et les engagements couverts par les règles de l’Union coïncident parfaitement (199).

259. C’est la raison pour laquelle je considère que l’Union détient une compétence externe exclusive pour les dispositions de l’ALEUES qui concernent les services de transport ferroviaire en vertu de l’article 91 et de l’article 100, paragraphe 1, TFUE, lus en combinaison avec le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE et le troisième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE.

260. Dans le domaine du transport routier, l’Union n’a, en dehors des obligations horizontales énoncées au chapitre 8, pris aucun engagement pour le mode 1 et a pris des engagements complets pour le mode 2. Les engagements de mode 3 sont soumis à diverses réserves dans certains États membres en fonction du type de transport (transport de passagers ou transport de fret). En ce qui concerne le mode 4, un certain nombre d’États membres ont émis des réserves (qui prennent la forme de conditions de nationalité et de résidence). Quant aux services auxiliaires de transport routier, les engagements de mode 1 et 3 dépendent de l’État membre concerné et du type de service auxiliaire en cause. Des engagements complets ont été pris pour le mode 2. Trois États membres ont émis des réserves pour le mode 3 (sous la forme d’une condition de nationalité).

261. La Commission prétend que les engagements pris pour la fourniture de services de transport routier suivant le mode 2 n’ont, en pratique, qu’une pertinence limitée. Je rejette cet argument pour les raisons que j’ai déjà exposées (200).

262. Le règlement no 1071/2009 couvre-t-il néanmoins en grande partie les services de transport routier ?

263. Le règlement no 1071/2009 met en place un corpus important de règles concernant l’accès à la profession de transporteur par route et l’exercice de celle‑ci tant dans le domaine du transport de marchandises que dans le domaine du transport de passagers (201). Il énonce les exigences à remplir pour exercer la profession de transporteur par route, à savoir que les entreprises de transport routier doivent être établies de façon stable et effective dans un État membre, qu’elles doivent être honorables, avoir la capacité financière appropriée et la capacité professionnelle requise (202). Le règlement no 1071/2009 exige en outre que chaque État membre désigne une ou plusieurs autorités compétentes chargées de délivrer des autorisations d’exercer la profession de transporteur par route aux entreprises qui remplissent ces conditions (203). Ces règles sont complétées par des règles sectorielles dans le règlement no 1072/2009 (204) et dans le règlement no 1073/2009 (205). Ces deux règlements imposent aux entreprises concernées qu’elles obtiennent une licence communautaire avant de se lancer dans ces activités (206).

264. Sur cette toile de fond, les règlements nos 1071/2009, 1072/2009 et 1073/2009 règlent la fourniture transfrontière des services de transport routier (modes 1 et 2) de même que l’accès au marché des services de transport routier par voie d’établissement (mode 3). Le règlement no 1072/2009 contient également des règles concernant l’attestation du conducteur et règle donc la présence temporaire de personnes physiques sur le territoire des États membres pour la fourniture de services de transport routier de marchandises (mode 4) (207). Bien que la directive 2014/66 ait un champ d’application plus limité que les engagements correspondants pris dans l’ALEUES pour le mode 4, je considère que les règles communes existantes couvrent en grande partie le domaine du transport par route.

265. Je considère en outre que la portée des règlements nos 1071/2009, 1072/2009 et 1073/2009 serait altérée par des engagements internationaux tels que ceux qui figurent dans l’ALEUES. Mon raisonnement est, en substance, analogue à celui que j’ai tenu pour le transport ferroviaire (208).

266. En particulier, les dispositions concernant l’établissement (chapitre 8, section C) s’appliquent aux « mesures adoptées ou maintenues par les parties qui ont une incidence sur l’établissement dans l’ensemble des activités économiques » (209). Ces dispositions comportent la protection contre tout traitement discriminatoire. Ainsi, un opérateur de transport routier singapourien qui recherche un accès au marché de l’Union en y établissant une présence commerciale a droit à un accès au marché non discriminatoire, sous réserve des restrictions énoncées dans la liste des engagements spécifiques de l’Union (210). Une fois établi dans un État membre, cet opérateur aurait le droit d’être traité d’une manière non moins favorable que des opérateurs similaires de cet État membre (211). Ces dispositions concernant l’accès au marché et le traitement national ont donc pour effet d’accorder à un opérateur de transport routier singapourien un accès non discriminatoire au marché de l’Union en éliminant les obstacles à son établissement effectif sur le territoire de celle-ci. Il résulte de l’ALEUES que cet opérateur doit obtenir un accès à ce marché aux mêmes conditions que celles qui s’appliquent aux opérateurs nationaux (par exemple, en ce qui concerne l’exigence de capacité financière et de capacité professionnelle (212)). En d’autres termes, l’ALEUES altèrerait la portée des règlements nos 1071/2009, 1072/2009 et 1073/2009.

267. Comme l’ALEUES aurait un tel effet sur les règles communes existantes en matière d’accès au marché des services de transport routier de l’Union, celle-ci a acquis une compétence externe exclusive dans le domaine du transport routier. Par conséquent, l’Union détient une compétence externe exclusive lui permettant d’adopter les dispositions de l’ALEUES concernant les services de transport routier en vertu de l’article 91 et de l’article 100, paragraphe 1, TFUE, lus en combinaison avec le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE et le troisième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE.

268. À la lumière de ces considérations, je conclus que l’Union partage avec les États membres la compétence externe de prendre des engagements au titre du chapitre 8 de l’ALEUES dans la mesure où il vise le transport aérien, le transport maritime et le transport par voies et plans d’eau navigables, y compris les services intrinsèquement liés à ces services de transport, et qu’elle jouit d’une compétence externe exclusive en application du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE pour prendre des engagements au titre du chapitre 8 de l’ALEUES dans la mesure où il concerne le transport ferroviaire et le transport routier (et les services intrinsèquement liés à ces services de transport). L’Union européenne détient une compétence externe exclusive sur la base de l’article 3, paragraphe 1, sous e), et de l’article 207, paragraphe 1, TFUE pour tous les autres services couverts par ce chapitre.

269. Je vais examiner à présent le chapitre 9, section A, de l’ALEUES. J’aborderai la section B de ce chapitre en même temps que les chapitres 13, 15 et 16 de l’ALEUES (213).

 Sur les investissements (chapitre 9, section A, de l’ALEUES (214))

 Arguments

270. La Commission soutient que le chapitre 9, section A, de l’ALEUES, qui a trait spécifiquement aux investissements internationaux et ne s’applique pas aux investissements intra-Union, relève de la compétence exclusive de l’Union en matière de politique commerciale commune dans la mesure où elle s’applique aux investissements étrangers directs. Se fondant sur l’analyse appliquée dans des affaires concernant le commerce des services et des marchandises ainsi que les aspects commerciaux de la propriété intellectuelle, la Commission allègue qu’un accord relève du champ d’application de l’article 207, paragraphe 1, TFUE s’il vise spécifiquement les investissements internationaux en ce qu’il a essentiellement pour finalité de promouvoir, de faciliter ou de régir les investissements internationaux et a des effets directs et immédiats sur ces investissements.

271. En faisant une distinction entre les investissements portefeuille (ou d’autres investissements non directs) et les investissements étrangers directs (les uns comme les autres pouvant relever de la définition figurant à l’article 9.1 de l’ALEUES), la Commission propose de transposer à l’article 207, paragraphe 1, TFUE la définition que la Cour a donnée de la notion d’« investissements directs » dans le contexte de la libre circulation des capitaux et des paiements.

272. Selon la Commission, la politique commerciale commune couvre à la fois les règles régissant l’accès initial d’investissements au marché de l’État d’accueil et la protection qui doit être accordée à un investissement après qu’il a été admis sur le marché (« protection postadmission »). Cette protection inclut la protection contre, par exemple, toute discrimination, tout traitement injuste et inéquitable et toute expropriation sans compensation. La Commission fait valoir que, lorsqu’ils se réfèrent aux « investissements étrangers directs », l’article 206 et l’article 207, paragraphe 1, TFUE ne font aucune distinction entre l’accès au marché et la protection postadmission. En outre, exclure la protection postadmission des investissements étrangers directs de la politique commerciale commune serait également contraire aux objectifs énoncés à l’article 206 TFUE. En particulier, l’objectif de « suppression progressive des restrictions […] aux investissements étrangers directs » vise la suppression des obstacles résultant à la fois des entraves à l’admission initiale d’un investissement et les obstacles à sa gestion et à sa jouissance ultérieures. Dans ce contexte, la Commission relève certaines analogies avec la compétence exclusive de l’Union dans le domaine du commerce des marchandises et des services, compétence qui n’est pas non plus limitée à l’accès au marché.

273. La Commission ajoute que la politique commerciale commune couvre déjà les normes de l’AGCS applicables au traitement postadmission de la fourniture de services en mode 3 (c’est-à-dire par voie de présence commerciale (215)). Des normes similaires figurent au chapitre 8 de l’ALEUES. Il serait illogique de conclure que l’Union n’a pas une compétence exclusive pour les normes énoncées au chapitre 9, mais est exclusivement compétente pour des normes analogues figurant au chapitre 8 de l’ALEUES ou dans l’AGCS.

274. La Commission considère que l’article 345 TFUE ne limite pas la compétence exclusive de l’Union concernant le contenu du chapitre 9 dans la mesure où ce chapitre se rapporte à l’expropriation. L’article 9.6 de l’ALEUES soumet l’exercice du droit d’expropriation à des conditions analogues à celles qu’imposent les articles 49 et 63 TFUE. Cette disposition opère sans préjudice des règles qui gouvernent le système des droits de propriété dans chaque État membre : elle n’interdit pas à un État membre d’exproprier ni n’exige qu’un État membre exproprie des actifs quelconques détenus en propriété par des investisseurs singapouriens.

275. La Commission rejette également l’argument selon lequel la première partie de l’article 207, paragraphe 6, TFUE exclut les clauses d’expropriation du champ d’application de la politique commerciale commune parce qu’il n’existe aucune politique comparable de l’Union dans le marché intérieur. Cet argument méconnaît la distinction qu’il convient de faire entre compétence externe exclusive expresse et compétence externe exclusive implicite. La seconde partie de l’article 207, paragraphe 6, TFUE n’altère pas non plus la position de la Commission : l’article 345 TFUE n’exclut pas, en soi, l’harmonisation des droits de propriété. En tout état de cause, l’article 9.6 de l’ALEUES n’harmonise pas les dispositions législatives ou réglementaires des États membres au sens de l’article 207, paragraphe 6, TFUE.

276. La Commission reconnaît que, dans la mesure où le chapitre 9 s’applique aux investissements de portefeuille, il ne relève pas de la politique commerciale commune. Elle soutient que l’Union dispose néanmoins d’une compétence exclusive parce que les investissements de portefeuille sont un mouvement de capitaux au sens de l’article 63 TFUE et que les normes de traitement prévues au chapitre 9 sont, à tout le moins, couvertes en grande partie par les règles communes établies dans cette disposition du traité. En particulier, les normes essentielles du traitement national, du traitement juste et équitable et de la protection contre l’expropriation sont couvertes par l’interdiction énoncée à l’article 63, paragraphe 1, TFUE. Alors que l’article 63, paragraphe 1, TFUE est soumis à l’exception prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE, les restrictions « bénéficiant d’une clause d’antériorité » en vertu de cette dernière disposition (c’est-à-dire les restrictions existantes qui peuvent être maintenues) ne comportent pas de restriction visant les investissements de portefeuille. Par conséquent, les conditions du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE sont remplies.

277. La Commission soutient qu’interpréter, comme elle le fait, l’expression « règles communes » utilisée dans le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE comme couvrant à la fois les dispositions du traité et les règles de droit dérivé est conforme à la justification rationnelle qui sous-tend la jurisprudence AETR. Cette justification rationnelle repose sur la protection de l’unité du marché commun et sur l’application uniforme du droit de l’Union ainsi que sur la nécessité d’assurer l’application uniforme et cohérente des règles de l’Union ainsi que le fonctionnement correct du système qu’elles mettent en place (216). La Commission soutient également que les règles du traité relatives à la libre circulation des capitaux sont uniques parce qu’elles ont une dimension externe. De surcroît, et sous réserve de l’exception énoncée à l’article 64, paragraphe 1, TFUE, l’article 63, paragraphe 1, TFUE lui-même réalise la libéralisation complète des mouvements de capitaux entre l’Union et des pays tiers. Ainsi, il n’est pas nécessaire d’adopter du droit dérivé pour étendre la libre circulation des capitaux aux mouvements de capitaux entre les États membres et les pays tiers ou pour réaliser une libération complète. Le fait qu’à l’exception de l’affaire Pringle (217), la plupart des affaires concernant l’application du principe AETR impliquent des règles communes de droit dérivé a pour raison que les traités se limitent fréquemment à énoncer des objectifs de politique et à conférer des pouvoirs législatifs aux institutions. Enfin, sans compétence exclusive de l’Union, il ne sera pas possible de garantir que les règles communes figurant à l’article 63, paragraphe 1, TFUE seront appliquées de manière uniforme et cohérente.

278. Si la Cour devait juger que l’Union n’a pas de compétence exclusive pour les investissements de portefeuille sur la base de l’article 3, paragraphe 2, TFUE, lu en combinaison avec l’article 63, paragraphe 1, TFUE, la Commission fait valoir que l’Union dispose néanmoins d’une compétence partagée. Elle se fonde en cela sur l’article 216, paragraphe 1, TFUE, qui permet à l’Union de conclure des accords internationaux avec des pays tiers lorsque cela « est nécessaire pour réaliser, dans le cadre des politiques de l’Union, l’un des objectifs visés par les traités ». L’objectif recherché en l’espèce est de réaliser la libre circulation des capitaux, ce qui comprend les investissements de portefeuille entre l’Union et des pays tiers. La libéralisation des mouvements de capitaux en dehors de l’Union ne saurait être effective si les pays tiers n’abolissent pas les restrictions qu’ils appliquent eux-mêmes sur les mouvements de capitaux entre l’Union et leurs territoires respectifs. Une telle abolition requiert généralement la conclusion d’accords internationaux, fondés sur la réciprocité, avec ces pays. La Commission souligne avec insistance qu’elle ne prétend pas que, parce que le chapitre 9 est nécessaire pour permettre à l’Union d’exercer ses compétences externes, l’Union dispose d’une compétence exclusive.

279. Le Parlement plaide lui aussi en faveur d’une compétence exclusive de l’Union en ce qui concerne la section A du chapitre 9 de l’ALEUES. Il soutient, en particulier, que l’Union jouit d’une compétence exclusive pour les investissements de portefeuille parce que, d’une part, la couverture des investissements de portefeuille énoncée dans le chapitre 9 est accessoire par rapport à l’objectif principal ou dominant énoncé dans ce chapitre (qui est d’assurer la protection des investissements étrangers directs) et parce que, d’autre part, l’article 3, paragraphe 2, TFUE peut également s’appliquer lorsque du droit primaire de l’Union pourrait être affecté. Le Parlement se rallie spécifiquement à la position de la Commission selon laquelle l’interdiction d’exproprier qu’énonce l’article 9.6 de l’ALEUES n’est ni une ingérence dans les différents régimes de propriété des États membres ou dans les méthodes d’enregistrement et de structuration des relations de propriété dans différentes traditions légales ni une harmonisation des lois des États membres.

280. Le Conseil admet que, d’un point de vue économique, les échanges commerciaux et les investissements étrangers directs sont étroitement liés et que certains aspects du traitement des investissements étrangers directs ont trait à des questions standard de politique commerciale commune (c’est-à-dire l’accès au marché, notamment l’accès d’un investisseur étranger aux licences d’importation ou d’exportation). Néanmoins, il déclare que la régulation des investissements étrangers directs ne poursuit pas nécessairement des objectifs commerciaux. Selon le Conseil, légiférer en matière d’admission, de traitement et de protection d’investissements étrangers directs constitue un domaine indépendant des relations économiques internationales qui ne fait pas automatiquement partie de la politique commerciale. Le Conseil fait une distinction entre i) l’admission d’investissements étrangers directs (c’est-à-dire l’accès au marché : la décision d’autoriser ou non un investisseur direct à investir dans un État d’accueil et de lui imposer ou non des restrictions ou conditions) ; ii) les mouvements de capitaux par rapport aux investissements étrangers directs (même si un investisseur peut également lever des fonds dans l’État d’accueil et que les investissements étrangers directs n’impliquent donc pas toujours nécessairement des mouvements de capitaux transfrontière) et iii) le traitement des investissements.

281. Selon le Conseil, le chapitre 9 est un chapitre autonome qui traite uniquement de la protection des investissements et qui utilise une définition très large, fondée sur les actifs, de la notion d’« investissements ». Ce chapitre ne concerne ni l’admission ni la promotion des investissements. Les règles sur l’admission des investissements figurent au chapitre 8 de l’ALEUES.

282. Le Conseil admet que l’Union a, pour les investissements étrangers directs, une compétence exclusive liée à la politique commerciale commune, mais il propose une interprétation de la portée de l’article 207, paragraphe 1, TFUE plus étroite que celle que la Commission et le Parlement préconisent. À ce propos, le Conseil considère qu’il n’est pas nécessaire que la Cour se prononce sur les limites précises de la compétence en matière d’investissements étrangers directs conformément à l’ALEUES. Le Conseil soutient, en substance, que la Commission n’a pas démontré que toutes les normes énoncées dans la section A se réfèrent à des dispositions qui relèvent de la compétence exclusive de l’Union en matière d’investissements étrangers directs ou de tout autre type d’investissement visé au chapitre 9.

283. En ce qui concerne la clause de traitement national inscrite à l’article 9.3 de l’ALEUES, le Conseil concentre son attention sur les situations visées à l’article 9.3.3, dans lesquelles les parties peuvent écarter l’obligation de traitement national. Selon le Conseil, l’Union ne peut pas avoir de compétence exclusive pour signer et conclure l’ALEUES dans la mesure où il a trait à des mesures adoptées par les États membres dans l’exercice de leurs responsabilités en matière de sécurité nationale. L’Union ne jouit pas davantage d’une compétence exclusive en matière de protection des trésors nationaux ou d’une compétence législative qui lui permettrait d’adopter des mesures dans le domaine de l’imposition directe.

284. En ce qui concerne la clause de traitement juste et équitable et la clause de protection et sécurité intégrales inscrites à l’article 9.4 de l’ALEUES, le Conseil soutient que la Commission n’a pas démontré que l’Union a une compétence exclusive lui permettant d’adopter ces deux clauses.

285. En ce qui concerne le régime d’indemnisation des pertes sur investissements (visés au chapitre 9) prévu à l’article 9.5 de l’ALEUES, le Conseil fait valoir que l’Union n’a aucune compétence en ce qui concerne la partie de cette disposition qui a trait aux forces armées des États membres. Il doute également que l’Union puisse signer et conclure, à elle seule, un accord qui traite des conséquences de situations de guerre ou de conflit armé, de révolution, d’état d’urgence national, de révolte, d’émeute ou d’insurrection sur le territoire des États membres.

286. En ce qui concerne les arrangements concernant l’expropriation énoncés à l’article 9.6 de l’ALEUES, le Conseil soutient que la jurisprudence de la Cour ne permet pas d’affirmer que toutes les mesures de l’ALEUES qui ont trait à l’expropriation relèvent entièrement de la compétence exclusive de l’Union. Il résulte de l’article 345 TFUE que l’Union ne peut pas avoir la compétence exclusive de signer et conclure l’article 9.6 de l’ALEUES.

287. Le Conseil fait encore valoir que la Commission n’a pas soutenu, et encore moins démontré, que certaines matières visées à l’article 9.7.2 de l’ALEUES, en particulier les crimes et délits, la sécurité sociale, les régimes de retraite publics ou d’épargne obligatoire, relèvent de la compétence exclusive de l’Union.

288. Le Conseil conteste que la Commission puisse se fonder sur le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE pour revendiquer, en faveur de l’Union, une compétence exclusive en matière d’investissements de portefeuille.

289. Premièrement, s’il est vrai que des investissements de portefeuille peuvent impliquer un mouvement de capitaux, ce type d’investissement ne peut pas être assimilé à la libre circulation des capitaux prévue par les traités. L’article 63, paragraphe 1, TFUE n’a rien à voir avec la protection des investissements. Il ne traite pas non plus des investissements de portefeuille ou des investissements directs en tant que tels. L’article 63, paragraphe 1, TFUE ne s’applique que dans la mesure où intervient un mouvement de capitaux. Tel n’est pas toujours nécessairement le cas d’investissements étrangers directs ou d’investissements de portefeuille. Le Conseil observe en outre qu’il est important d’assurer que des opérateurs de pays tiers ne contournent pas des restrictions licites à la liberté d’établissement (justifiées conformément à l’article 65, paragraphe 2, TFUE) en se prévalant directement de l’article 63 TFUE. La Cour a établi une distinction entre la liberté d’établissement et la libre circulation des capitaux en s’intéressant au centre de gravité de l’opération et en se demandant quel aspect particulier d’une situation est essentiellement affecté par la restriction alléguée.

290. Deuxièmement, aucune disposition dans les traités ne confère à l’Union une compétence spécifique qui lui permettrait d’agir dans le domaine des investissements de portefeuille ou (a fortiori) de la protection d’investissements de portefeuille. Conformément à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 5, paragraphe 2, TFUE, ce sont donc les États membres qui ont le droit d’agir dans ce domaine.

291. Troisièmement, si la Cour devait néanmoins admettre que des investissements de portefeuille sont un mouvement de capitaux au sens de l’article 63, paragraphe 1, TFUE et que cette disposition confère à l’Union un pouvoir spécifique d’agir en vue de protéger ce type d’investissement, le Conseil fait valoir que l’Union n’a adopté aucune réglementation en application de l’article 63, paragraphe 1, TFUE visant à protéger les investissements de portefeuille. Le Conseil reconnaît qu’il existe du droit dérivé qui a trait, par exemple, à l’introduction de valeurs mobilières en Bourse ou aux marchés d’instruments financiers. Bien que ces règles comportent des aspects d’investissement de portefeuille, aucune n’a été adoptée par le recours aux bases juridiques relatives à la libre circulation des capitaux.

292. Quatrièmement, l’Union ne saurait en tout cas avoir aucune compétence externe exclusive implicite pour les investissements de portefeuille parce que l’article 63, paragraphe 1, TFUE n’est pas une « règle commune » au sens de l’article 3, paragraphe 2, TFUE. À supposer même qu’il y ait des règles de droit primaire libéralisant complètement les mouvements de capitaux entre États membres et pays tiers, le Conseil allègue que l’interprétation inédite que la Commission donne de la notion de « règles communes » au sens de l’article 3, paragraphe 2, TFUE est entachée d’erreur. La jurisprudence de la Cour montre que l’Union doit avoir exercé sa compétence interne en adoptant des règles de droit dérivé. Cette exigence est inhérente à la notion de « pouvoirs implicites ». La Commission se fonde à tort sur l’arrêt Pringle et sur l’avis 1/92 (218). Dans l’arrêt Pringle (219), la Cour a dit pour droit que le traité instituant le mécanisme européen de stabilité entre le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne, la République d’Estonie, l’Irlande, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, la République italienne, la République de Chypre, le Grand-Duché de Luxembourg, Malte, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République portugaise, la République de Slovénie, la République slovaque et la République de Finlande, conclu à Bruxelles le 2 février 2012 (ci-après le « traité MES ») ne relevait, dans sa totalité, pas de la compétence exclusive dont l’Union se prévalait au titre de l’article 3, paragraphe 1, sous c), TFUE. Il n’était pas nécessaire que la Cour examine la question additionnelle de savoir si le traité MES pouvait néanmoins être considéré comme « affect[ant] des règles communes » ou comme « en altér[ant] la portée » au sens de l’article 3, paragraphe 2, TFUE. En tout état de cause, il est manifeste que l’objectif utilisé dans l’arrêt Pringle (C-370/12, EU:C:2012:756) était lié à l’exercice par l’Union des pouvoirs qui lui avait été expressément conférés. Le Conseil admet que, dans son avis 1/92 (220), la Cour s’est référée à des dispositions du traité relatives à la concurrence. Les affaires auxquelles la Cour s’est référée dans cet avis ont néanmoins clairement mis en lumière que des compétences internes doivent avoir été exercées avant qu’une compétence implicite de conclure un accord international prenne naissance ou que l’existence d’une telle compétence implicite est liée à une compétence qui est expressément conférée par les traités.

293. Si la Cour devait accepter que l’article 63, paragraphe 1, TFUE est susceptible d’être une « règle commune », le Conseil fait valoir que la Commission n’a pas démontré en quoi le domaine des investissements de portefeuille a été « couvert en grande partie » par les « règles communes » qu’elle allègue. Elle n’a pas davantage démontré que, pour autant qu’il vise la protection des investissements de portefeuille, le chapitre 9 affecterait de telles règles communes ou en altérerait la portée.

294. Le Conseil est également préoccupé par le raisonnement qui sous-tend l’argument subsidiaire de la Commission, qui soutient qu’il y a une compétence partagée pour les investissements de portefeuille fondée sur l’article 216, paragraphe 1, TFUE. La nécessité d’atteindre un objectif spécifique du traité exige que l’on démontre que des compétences ont été conférées à l’Union au plan interne en vue de réaliser cet objectif. Par conséquent, la Cour ne peut pas se fonder sur l’article 216, paragraphe 1, TFUE pour ce qui est des investissements de portefeuille. Si la Cour devait juger que l’Union possède effectivement la compétence requise pour réglementer la protection des investissements de portefeuille, le Conseil observe que la Commission ne prétend pas que l’Union serait en mesure d’exercer cette compétence interne uniquement en concluant un accord international ni que l’exercice de compétences internes en matière de protection des investissements de portefeuille étrangers et l’exercice de compétences externes ayant le même objet devraient alors être concomitants. En outre, si la Commission avait raison, il ne serait pas nécessaire de conclure un accord international : l’article 63, paragraphe 1, TFUE réaliserait à lui seul la libéralisation complète des mouvements de capitaux entre l’Union et les pays tiers.

295. Le Conseil convient que l’Union et les États membres ont une compétence partagée en ce qui concerne le chapitre 9. Néanmoins, comme la compétence de protéger les investissements de portefeuille n’a pas été conférée à l’Union, il n’est pas possible pour elle d’exercer cette compétence sans la participation des États membres. À titre subsidiaire, le Conseil soutient que, si la Cour devait accepter que l’Union a effectivement une compétence partagée concernant les investissements de portefeuille, le point de savoir si cette compétence devrait être exercée au moyen de la conclusion de l’ALEUES demeure une décision politique.

296. La plupart des États membres qui sont intervenus ont pris position sur la section A. Les arguments qu’ils mettent en avant correspondent largement aux différents aspects de la position du Conseil.

297. Ils font ainsi valoir que l’expression « investissements directs » qui figure à l’article 64 TFUE et l’expression « investissements étrangers directs » utilisée à l’article 207, paragraphe 1, TFUE doivent avoir la même signification. Sur ce point, la jurisprudence concernant la portée de l’article 64 TFUE est pertinente, de même que la définition de l’expression « investissements directs » (et « investissements de portefeuille ») figurant dans le règlement (CE) no 184/2005 (221) et dans la directive 88/361/CEE (222).

298. La compétence exclusive de l’Union en matière d’investissements étrangers directs est limitée à l’élimination des restrictions frappant ce type d’investissement. Dans la mesure où l’ALEUES garantit également d’autres formes de protection, de telles règles ne relèvent pas de la compétence exclusive de l’Union issue de l’article 207, paragraphe 1, TFUE. Tel est le cas des dispositions concernant la promotion et la protection des investissements étrangers directs (comme celles qui ont trait à l’expropriation, aux forces armées, à l’imposition directe, au droit pénal et à la procédure).

299. L’article 9.6 de l’ALEUES (« Expropriation ») énonce des principes généraux dont il résulte que les parties doivent appliquer leurs propres lois sur la propriété. De telles matières relèvent de la compétence des États membres, qui doit être exercée dans le respect du droit de l’Union. L’article 345 TFUE impose une limitation à l’exercice par l’Union des compétences que lui confèrent les traités.

300. Il résulte de l’article 207, paragraphe 6, TFUE que l’Union ne peut pas exercer une compétence exclusive pour négocier et conclure des accords commerciaux internationaux dans des domaines dans lesquels elle n’a aucune compétence pour légiférer au plan interne. Cette disposition empêche également l’Union de jouir d’une compétence exclusive, en application de l’article 207, paragraphe 1, TFUE en matière d’investissements autres que les investissements étrangers directs.

301. L’interprétation inédite que la Commission donne de l’article 3, paragraphe 2, TFUE aurait pour effet que l’Union jouirait d’une compétence exclusive en matière d’investissements de portefeuille conformément à l’article 3, paragraphe 2, et à l’article 63 TFUE. Elle impliquerait également que tout accord susceptible de restreindre les investissements, qu’ils relèvent de la politique commerciale commune ou non, pourrait relever de la compétence exclusive implicite de l’Union. Néanmoins, les traités indiquent clairement qu’elle n’a une compétence exclusive (expresse) qu’en ce qui concerne les investissements étrangers directs. Des règles communes au sens de l’article 3, paragraphe 2, TFUE sont des règles de droit dérivé, et non pas de droit primaire. L’existence d’une compétence interne n’est pas suffisante. Le contexte historique de l’article 3, paragraphe 2, TFUE confirme cette interprétation. En tout état de cause, l’article 63 TFUE n’est pas une base juridique permettant d’exercer une compétence. La base juridique permettant d’agir se trouve à l’article 64, paragraphe 2, TFUE et est assortie de restrictions.

302. Qui plus est, les conditions énoncées à l’article 3, paragraphe 2, TFUE ne sont pas remplies. La portée de la section A du chapitre 9 est nettement plus étendue que celle de l’article 63 TFUE. L’expropriation n’est pas une restriction à la libre circulation des capitaux prévue par les traités. Dans la mesure où l’article 63 TFUE s’applique, cela garantirait uniquement l’application du principe de non-discrimination. Aucune règle commune n’a été adoptée en matière d’expropriation.

303. L’Union ne peut pas, en donnant son accord pour l’article 9.10.1 de l’ALEUES, décider seule de l’abolition des accords conclus par les États membres avec la République de Singapour. Cette disposition ne respecte pas le principe général énoncé à l’article 59, paragraphe 1, sous a), de la convention de Vienne de 1969, suivant lequel les accords internationaux ne peuvent être abrogés que par les parties à ceux-ci. La Commission n’a pas non plus mentionné une base de droit international qui confirmerait sa position. En outre, l’Union elle-même a reconnu, dans le règlement (UE) no 1219/2012 (223), que les accords bilatéraux des États membres signés avant le 1er décembre 2009 demeurent en vigueur ou entrent en vigueur conformément à ce règlement.

304. Enfin, aucun des cas de figure visés à l’article 216 TFUE ne se présente. C’est pourquoi l’Union ne jouit d’aucune compétence partagée en ce qui concerne les investissements de portefeuille.

 Analyse

 Introduction

305. Il existe deux voies suivant lesquelles l’Union pourrait avoir la compétence exclusive d’adopter les règles matérielles régissant les investissements qui sont énoncées dans le chapitre 9, section A. Ces règles relèvent-elles de la politique commerciale commune telle qu’elle est décrite à l’article 207, paragraphe 1, TFUE ? Si tel n’est pas le cas, font-elles néanmoins partie d’un domaine dans lequel il existe des règles communes (qui coïncident avec ce domaine ou qui le couvrent en grande partie) susceptibles d’être affectées ou dont la portée pourrait être altérée si l’ALEUES devait être conclu (troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE) ? Je vais examiner chacune de ces possibilités l’une après l’autre.

306. Le chapitre 9 soulève une question distincte supplémentaire dans la mesure où l’article 9.10.1 de l’ALEUES dispose que, dès l’entrée en vigueur de ce dernier, certains accords bilatéraux que des États membres ont conclus avec la République de Singapour en matière d’investissements (accords dont la liste figure à l’annexe du chapitre 9) cesseront d’exister. J’aborderai cette question séparément (224).

 Sur la compétence exclusive sur la base de l’article 207, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, TFUE

–       Sur la signification de l’expression « investissements étrangers directs » au sens de l’article 207, paragraphe 1, TFUE

307. Le chapitre 9 définit les investissements et les investisseurs visés. Contrairement aux traités, il ne fait aucune distinction entre les investissements étrangers directs et d’autres formes d’investissement (225). Ni l’ALEUES ni les traités ne se réfèrent aux « investissements de portefeuille ».

308. La demande de la Commission fournit à la Cour l’occasion d’interpréter, pour la première fois, la notion d’« investissements étrangers directs » au sens de l’article 207, paragraphe 1, TFUE et de statuer sur la mesure dans laquelle la politique commerciale commune couvre la régulation des « investissements étrangers directs ». Ce type d’investissement figurait déjà à l’article III-315, paragraphe 1, du traité établissant une constitution pour l’Europe (226). Le contenu de cette disposition était identique à celui de l’article 207, paragraphe 1, TFUE (227).

309. Conformément à l’article 207, paragraphe 1, TFUE lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE, l’Union a une compétence exclusive en matière d’investissements étrangers directs. Cette compétence s’applique conjointement à sa compétence dans d’autres matières qui relèvent de la politique commerciale commune (comme les services), mais qui pourraient également avoir trait aux investissements (tels que les investissements dans le secteur des services) (228).

310. Les traités ne définissent pas la notion d’« investissements étrangers directs ». Néanmoins, un certain nombre de dispositions des traités, protocoles et déclarations (229) utilise le terme « investissement ».

311. Sur un plan général, je comprends la notion d’« investissement » comme désignant le placement d’argent ou d’un autre actif dans une activité commerciale en vue d’en tirer un profit.

312. L’article 207, paragraphe 1, TFUE se réfère à un type particulier d’investissement, à savoir les investissements qui sont à la fois « étrangers » et « directs ».

313. Un investissement étranger est un investissement effectué par une personne physique ou morale de l’Union dans un pays tiers ou par une personne physique ou morale d’un pays tiers dans l’Union. Les investissements étrangers directs sont donc des investissements directs qui comportent un élément étranger à l’Union.

314. L’expression « investissements directs » apparaît également dans d’autres dispositions du traité, en particulier à l’article 64, paragraphes 1 et 2, TFUE, qui fait partie du chapitre 4 (« Les capitaux et les paiements ») du titre IV (« La libre circulation des personnes, des services et des capitaux »). Sans préjudice de l’article 64, paragraphes 1 et 2, TFUE, l’article 63 TFUE interdit toutes les restrictions aux mouvements de capitaux et aux paiements entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers. Cette interdiction a un spectre très large. Elle s’applique, par exemple, aux restrictions aux mouvements de capitaux qui dissuadent les non-résidents d’investir dans un État membre ou qui dissuadent les résidents de cet État membre d’investir dans d’autres États (230).

315. Le champ d’application de l’article 64, paragraphe 1, TFUE est défini par référence aux catégories de mouvements de capitaux susceptibles de faire l’objet de restrictions (231). Il délimite l’interdiction faite à l’article 63 TFUE en ce qui concerne les mouvements de capitaux à destination ou en provenance de pays tiers lorsqu’ils impliquent des investissements directs, y compris des investissements immobiliers, l’établissement, la prestation de services financiers ou l’admission de titres sur les marchés de capitaux. L’article 64, paragraphe 2, TFUE offre au Parlement et au Conseil une base juridique qui leur permet d’adopter des mesures visant ces formes de mouvements de capitaux. Aux conditions énoncées à l’article 64, paragraphe 3, TFUE, le Conseil peut également adopter des mesures qui constituent un « recul » dans le droit de l’Union en ce qui concerne la libéralisation des mouvements de capitaux à destination ou en provenance de pays tiers.

316. Quel que soit le champ d’application précis des articles 63 et 64 TFUE, il me semble que ces dispositions s’appliquent manifestement aux mouvements de capitaux et aux paiements à destination et en provenance de pays tiers lorsqu’ils impliquent des investissements directs, y compris les investissements étrangers directs. C’est la raison pour laquelle ces deux dispositions et la jurisprudence qui les interprète sont pertinentes lorsqu’il s’agit de définir la portée de l’expression « investissements étrangers directs » qui figure à l’article 207, paragraphe 1, TFUE.

317. Lorsqu’elle a interprété la notion d’« investissements directs » à l’article 64, paragraphe 1, TFUE, la Cour s’est fondée sur la définition qu’en donne la directive 88/361 (232). L’article 1er, paragraphe 1, de cette directive dispose que les mouvements de capitaux doivent être classés conformément à la nomenclature qui figure à l’annexe I (dont la Cour a admis qu’elle a une valeur indicative) (233).

318. Sous l’intitulé « Investissements directs », la nomenclature de l’annexe I reprend les investissements suivants : « 1) [c]réation et extension de succursales ou d’entreprises nouvelles appartenant exclusivement au bailleur de fonds, et acquisition intégrale d’entreprises existantes ; 2) [p]articipation à des entreprises nouvelles ou existantes en vue de créer ou maintenir des liens économiques durables ; 3) [p]rêts à long terme en vue de créer ou de maintenir des liens économiques durables et 4) [r]éinvestissement de bénéfices en vue de maintenir des liens économiques durables ». Cette partie de l’annexe se réfère également aux notes explicatives qui définissent certains termes uniquement aux fins de la nomenclature et de la directive 88/361. Ces notes définissent la notion d’« investissements directs » comme désignant « les investissements de toute nature auxquels procèdent les personnes physiques, les entreprises commerciales, industrielles ou financières et qui servent à créer ou à maintenir des relations durables et directes entre le bailleur de fonds et le chef d’entreprise ou l’entreprise à qui ces fonds sont destinés en vue de l’exercice d’une activité économique ». Les notes explicatives ajoutent que cette notion « doit donc être comprise dans son sens le plus large ».

319. C’est dans ce contexte que la Cour a dit pour droit que la notion d’« investissements directs » couvre les investissements auxquels procèdent les personnes physiques ou morales « et qui servent à créer ou à maintenir des relations durables et directes entre le bailleur de fonds et l’entreprise à qui ces fonds sont destinés en vue de l’exercice d’une activité économique » (234). Dans son arrêt Test Claimants in the FII Group Litigation, la Cour a déclaré que l’article 63 TFUE couvre, en principe, les mouvements de capitaux impliquant un établissement ou des investissements directs, ajoutant que ces dernières notions « se rapportent à une forme de participation dans une entreprise par la détention d’actions qui confère la possibilité de participer effectivement à sa gestion et à son contrôle » (235). Dans l’arrêt Haribo, la Cour a appliqué ce critère avant de conclure qu’une société holding ne relève pas du champ d’application de l’article 64, paragraphe 1, TFUE (ce qui implique donc qu’il ne s’agissait pas d’investissements directs) lorsqu’elle détenait moins de 10 % du capital social d’une société (236).

320. Cette jurisprudence semble calquée sur des définitions qui figurent ailleurs. Par exemple, l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) définit les « investissements directs » comme étant « un type d’investissement transnational effectué par le résident d’une économie […] afin d’établir un intérêt durable [dont l’existence est établie dès lors que l’investisseur direct détient au moins 10 % des droits de vote de l’entreprise d’investissement direct] dans une entreprise […] qui est résidente d’une autre économie que celle de l’investisseur direct ». L’investisseur direct trouve son intérêt dans « une relation stratégique durable [qu’il a établie] afin d’exercer une influence significative sur [l]a gestion » de l’entreprise d’investissement direct (237). Le FMI définit l’« investissement direct » comme étant « une catégorie d’investissement transnational dans lequel un résident d’une économie détient le contrôle ou une influence importante sur la gestion d’une entreprise résidente d’une autre économie ». Selon le FMI, « [l]’intérêt durable implique l’existence de relations à long terme entre l’investisseur direct et l’entreprise, ainsi qu’un niveau significatif d’influence de l’investisseur sur la gestion de l’entreprise » (238). La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) se réfère aux définitions utilisées par l’OCDE et le FMI.

321. La jurisprudence concernant le champ d’application de l’article 63 TFUE aide elle aussi à comprendre ce qui est exclu de la notion d’« investissements directs ». La Cour a ainsi distingué ce type d’investissement des « investissements de portefeuille », c’est-à-dire « l’acquisition de titres sur le marché des capitaux effectuée dans la seule intention de réaliser un placement financier sans intention d’influer sur la gestion et le contrôle de l’entreprise » (239) (mise en italique par mes soins). Cette interprétation correspond également aux définitions de la notion d’« investissements de portefeuille » utilisées ailleurs (240).

322. C’est sur cette toile de fond que j’interprète la notion d’« investissements étrangers directs » figurant à l’article 207, paragraphe 1, TFUE comme désignant des investissements effectués par des personnes physiques ou morales d’un pays tiers dans l’Union et les investissements effectués par des personnes physiques ou morales de l’Union dans un pays tiers qui servent à établir ou à maintenir des liens durables et directs sous la forme d’une participation effective dans la gestion et le contrôle de la société, liens unissant la personne qui effectue l’investissement à la société à laquelle cet investissement est fourni afin qu’elle puisse réaliser une activité économique. En appliquant cette définition, je considère que le fait que l’investisseur direct détienne au moins 10 % des droits de vote de l’entreprise destinataire de l’investissement direct peut fournir des indications en matière de preuve, mais cela n’est certainement pas déterminant.

–       Sur la réglementation des « investissements étrangers directs » en tant que partie de la politique commerciale commune

323. Les parties sont divisées à propos des formes de réglementation des « investissements étrangers directs » qui relèvent de la politique commerciale commune de l’Union. Elles s’entendent à admettre que cette politique couvre l’accès au marché (c’est-à-dire les conditions d’entrée et d’établissement) ainsi que la promotion des investissements. C’est ainsi qu’une disposition telle que l’article 9.7 de l’ALEUES (« Transferts »), qui impose aux parties l’obligation d’autoriser que tout transfert se rapportant à un investissement visé soit effectué dans une devise librement convertible sans restriction ni retard et qui s’applique donc à l’accès au marché, relève de la politique commerciale commune.

324. La politique commerciale commune couvre-t-elle également la protection des investisseurs (et de leurs investissements) après qu’ils ont obtenu accès au marché ?

325. J’estime que tel est le cas.

326. Il est clair que la politique commerciale commune couvre, du moins dans une certaine mesure, la protection de certains investissements étrangers. Il en est ainsi parce que cette politique couvre le commerce des services, compris comme étant les services fournis suivant les quatre modes visés dans l’AGCS (241). L’AGCS impose des obligations concernant, notamment, à la fois l’accès au marché et le traitement national, le principe de la nation la plus favorisée et la réglementation nationale, en particulier en ce qui concerne la fourniture d’un service par un fournisseur de services d’un État membre grâce à une présence commerciale sur le territoire de tout autre membre (ce qu’il est convenu d’appeler le mode 3 de fourniture de services, qui correspond généralement à l’« établissement ») (242). La présence commerciale au sens de cet accord signifie « tout type d’établissement commercial ou professionnel, y compris sous la forme i) de la constitution, de l’acquisition ou du maintien d’une personne morale ou ii) de la création ou du maintien d’une succursale ou d’un bureau de représentation sur le territoire d’un membre en vue de la fourniture d’un service » (243). Lorsque des investissements étrangers directs servent à établir une présence commerciale aux fins de la fourniture d’un service, ils relèvent du commerce des services et donc de la politique commerciale commune. Eu égard aux types d’obligation résultant de l’AGCS et à la conclusion à laquelle la Cour est parvenue dans son avis 1/08 (244), il est également clair que la politique commerciale commune couvre l’accès au marché et le traitement qui doit être accordé après qu’une présence commerciale a été établie. Une certaine forme, au moins, de protection des investissements étrangers directs après leur admission est donc couverte par la politique commerciale commune dans la mesure où elle comprend le commerce des services.

327. En outre, la question de savoir si la politique commerciale commune couvre une réglementation qui, par application du principe du traitement national, protège les mesures d’investissement liées au commerce des marchandises a déjà été tranchée. La Cour a déclaré que l’Union est exclusivement compétente pour conclure l’accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce (ci-après l’« accord sur les MIC ») (245) qui s’applique aux mesures concernant les investissements qui sont liées au commerce des marchandises (246) et impose, notamment, une obligation de traitement national (247).

328. Il est de jurisprudence constante qu’un acte de l’Union relève de la politique commerciale commune « s’il porte spécifiquement sur les échanges internationaux en ce qu’il est essentiellement destiné à promouvoir, à faciliter ou à régir ces échanges et a des effets directs et immédiats sur ceux-ci » (248). Le même critère devrait dès lors s’appliquer aux investissements étrangers directs. Ainsi, les mesures de l’Union qui sont essentiellement destinées à promouvoir, à faciliter ou à régir les investissements étrangers directs et qui ont des effets directs et immédiats sur ceux-ci et sur les investisseurs étrangers directs relèvent de la politique commerciale commune de l’Union.

329. Je voudrais ajouter que le contexte spécifique dans lequel l’expression « investissements étrangers directs » apparaît à l’article 206 et à l’article 207, paragraphe 1, TFUE correspond à celui dans lequel la même expression était utilisée dans les projets d’articles sur l’action externe dans le traité constitutionnel proposé par le présidium de la convention. À propos de (ce qui est devenu) l’article 206 et l’article 207, paragraphe 1, TFUE, le présidium a déclaré dans son commentaire qu’une référence aux investissements étrangers directs avait été ajoutée « en reconnaissance du fait que les flux financiers complètent le commerce des marchandises et qu’ils constituent aujourd’hui une très grande partie des échanges commerciaux » (249). Cela suggère que les investissements et le commerce sont des composantes essentielles d’une politique commerciale commune effective et unifiée. Dans une économie de plus en plus globalisée, il y a tout lieu de supposer que les décisions sur les marchés d’exportation et d’importation et sur les lieux de production dépendent à la fois du commerce et des politiques ainsi que des réglementations en matière d’investissements.

330. La politique commerciale commune comprend donc, outre les mesures qui rendent possible ou améliorent l’entrée d’investissements étrangers directs dans le pays d’accueil, les mesures qui protègent de tels investissements dans la mesure où la disponibilité de cette protection a des effets directs et immédiats sur la décision d’effectuer l’investissement étranger direct et sur la jouissance des bénéfices de cet investissement.

331. Cette lecture de l’article 207 TFUE permet à l’Union d’atteindre les objectifs de la politique commerciale commune. Conformément à l’article 206 TFUE, lorsqu’elle mène cette politique, l’Union doit contribuer, notamment, « à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs ». Selon moi, cette phrase ne peut pas être interprétée comme signifiant que la politique commerciale commune se limite à la suppression des restrictions à l’accès au marché des investissements étrangers directs. L’objectif d’une suppression progressive des restrictions ne se limite pas à la question de savoir si des marchandises ou des services peuvent avoir accès à un marché ou si des investissements étrangers directs peuvent pénétrer un marché. Les mesures à la frontière et les restrictions à l’entrée ne sont qu’un type de restriction. De nombreux autres types de mesures (ou l’absence de pareilles mesures) peuvent également empêcher, rendre plus onéreuse ou d’une quelconque façon plus laborieuse la mise sur le marché d’un produit ou service ou la réalisation d’un investissement qui soit rentable. De telles restrictions peuvent résulter, par exemple, d’un traitement discriminatoire, de l’absence de sécurité, de prévisibilité ou de transparence dans la réglementation du commerce international et des investissements étrangers directs (250), ou encore de l’existence de pratiques commerciales déloyales.

332. Dans le droit-fil de cette interprétation, la Cour a admis que les dispositions relatives au commerce des biens et des services (à l’exception du transport) qui sont énoncées dans le GATT de 1994 et dans l’AGCS relèvent de la politique commerciale commune (251). Ces accords ne se limitent pas aux règles d’accès au marché. D’autres types de règles concernant, en particulier, des instruments nationaux sont également nécessaires parce qu’en leur absence, les bénéfices d’un accès au marché pourraient être rendus négligeables par l’effet, notamment, de mesures nationales discriminatoires.

333. Le même raisonnement doit, selon moi, s’appliquer à la réglementation des investissements étrangers directs. Après tout, l’efficacité de règles permettant ce type d’investissement pourrait être complètement sapée si, une fois les investissements réalisés, l’investisseur se retrouvait dépourvu de toute protection contre, par exemple, un traitement discriminatoire (voir article 9.3 de l’ALEUES sur le traitement national, lu en combinaison avec la clause interprétative no 5, et l’article 9.5.1 de l’ALEUES sur l’indemnisation des pertes), l’expropriation (voir article 9.6 de l’ALEUES sur l’expropriation) ou des restrictions sur les transferts (voir article 9.7 de l’ALEUES sur les transferts). Par exemple, si un investissement a obtenu l’accès au marché et que l’activité économique à laquelle il était destiné est par la suite expropriée sans indemnisation, le résultat pour l’investisseur pourrait être pire que si l’accès lui avait simplement été refusé. Il en va de même lorsqu’un investisseur subit des pertes dans l’État d’accueil parce que son investissement a été réquisitionné ou détruit sans nécessité par les forces armées ou les autorités de l’État (voir article 9.5.2 de l’ALEUES sur l’indemnisation des pertes).

334. De la même manière, si des investisseurs se voient refuser un traitement juste et équitable pour leurs investissements parce qu’ils n’ont pas accès à une procédure judiciaire ou s’ils se heurtent à une violation fondamentale de leur droit à une procédure régulière ou encore à la mauvaise foi de l’État d’accueil, cela peut grever la décision d’investir dans cet État et de tirer profit de pareil investissement (voir article 9.4 de l’ALEUES sur le traitement normal). La même conséquence peut résulter de l’absence de protection de la sécurité physique des investisseurs et de leurs investissements (voir article 9.4 de l’ALEUES sur le traitement normal).

335. Je ne vois aucune raison de penser autrement parce que les dispositions instaurant des dérogations au principe du traitement normal, comme le fait l’article 9.3.3 de l’ALEUES, se réfèrent à des objectifs dont la poursuite peut relever des compétences des États membres. La fonction de pareilles dispositions est de fixer les conditions auxquelles les parties peuvent adopter ou appliquer des mesures qui contreviennent à ce principe du traitement normal afin d’atteindre des objectifs légitimes tels que la protection de la sécurité publique ou le maintien de l’ordre public. Il s’agit là de mesures qui font partie du champ d’application de la politique commerciale commune de l’Union en raison de leur relation spécifique aux investissements étrangers directs. Les conditions auxquelles de telles mesures peuvent être appliquées à titre exceptionnel relèvent donc également de cette politique.

336. C’est pourquoi je conclus que la politique commerciale commune couvre également la réglementation de la protection des investissements étrangers directs dans la mesure où la disponibilité de cette protection a un effet direct et immédiat sur la décision d’effectuer l’investissement étranger direct et sur la jouissance du profit engendré par cet investissement.

337. Cela signifie que le chapitre 9, section A, de l’ALEUES relève de la compétence exclusive de l’Union dans la mesure où les dispositions de cette section concernent la libéralisation et la protection des investissements étrangers directs au sens de l’article 207, paragraphe 1, TFUE.

338. Un certain nombre d’États membres objectent, néanmoins, que la politique commerciale commune ne peut pas couvrir les normes de protection contre l’expropriation d’investissements étrangers directs. Ils soutiennent que, conformément à l’article 345 TFUE, cette matière relève de la compétence des États membres. Aux termes de cette disposition, les traités ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les États membres. Lu en combinaison avec l’article 207, paragraphe 6, TFUE, cela signifie (selon eux) que la politique commerciale commune ne s’étend pas à l’expropriation d’investissements étrangers directs.

339. Je n’interprète pas l’article 207, paragraphe 6, et l’article 345 TFUE de cette manière.

340. L’article 345 TFUE énonce le principe que les traités sont neutres à l’égard des régimes de la propriété dans les États membres : les traités n’excluent, en règle générale, ni la nationalisation d’entreprises ni leur privatisation (252). Cependant, la Cour a dit pour droit que l’article 345 TFUE « n’a pas pour effet de soustraire les régimes de propriété existant dans les États membres aux règles fondamentales du [TFUE], dont, notamment, celles de non-discrimination, de liberté d’établissement et de liberté des mouvements de capitaux » (253). Selon moi, il en découle que, si les États membres peuvent effectivement choisir leurs régimes de propriété, les conséquences résultant de ce choix et les conditions auxquelles la propriété est détenue ne sont pas soustraites au champ d’application des règles du droit de l’Union. En d’autres termes, l’article 345 TFUE ne saurait être interprété comme signifiant que les États membres peuvent réglementer la propriété « à l’exclusion de toute action [de l’Union] dans cette matière » (254).

341. Si l’Union devait conclure un accord international (quelle que soit la base juridique lui permettant de le faire) qui priverait les États membres de leur droit d’exproprier, cela pourrait effectivement enfreindre le droit garanti à l’article 345 TFUE. Il n’en va cependant pas ainsi lorsque l’Union convient avec un pays tiers qu’aucune partie à l’accord ne peut nationaliser ou exproprier les investissements effectués par des investisseurs de l’autre partie, sauf lorsque certaines conditions sont remplies. Un tel accord n’enfreint pas la prérogative des États membres (c’est-à-dire leur compétence exclusive) de choisir leurs régimes de propriété. Il limite simplement les circonstances dans lesquelles ils peuvent choisir de nationaliser ou d’exproprier des investissements. Dans la mesure où un tel accord couvre également les investissements étrangers directs, l’article 345 TFUE ne limite pas la compétence exclusive que l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union de convenir avec un État tiers de soumettre l’exercice de ce droit à certaines conditions. Un tel accord n’harmonise pas non plus les conditions d’expropriation dans l’Union.

342. C’est pourquoi je considère que l’article 345 TFUE, lu en combinaison avec l’article 207, paragraphe 6, TFUE, ne limite pas l’exercice des compétences exclusives que l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union (255).

343. Par conséquent, je conclus que, dans la mesure où elle s’applique aux investissements étrangers directs, le chapitre 9, section A, (« Protection des investissements ») relève entièrement de la compétence exclusive que l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union.

344. Enfin, je voudrais ajouter que, si les « investissements étrangers directs » sont à présent clairement une matière relevant de la politique commerciale commune, certaines parties du chapitre 9, section A, de l’ALEUES pourraient très bien relever de cette politique en vertu d’autres aspects de l’article 207, paragraphe 1, TFUE. J’ai déjà évoqué l’interaction entre le commerce des services et les investissements (256). Les aspects commerciaux du droit de la propriété intellectuelle et les investissements peuvent, de la même manière, interagir dans la mesure où, conformément à l’ALEUES, les droits de propriété intellectuelle et le fonds commercial sont une forme d’investissement couverte conformément à ce chapitre (257).

345. Aux fins de la présente procédure, cependant, il suffit que le contenu du chapitre 9 porte sur au moins une des matières visées à l’article 207, paragraphe 1, TFUE et relève ainsi de la politique commerciale commune.

 Sur la compétence de l’Union sur la base de l’article 63 TFUE, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 2, TFUE

346. Les parties sont d’accord sur le fait que l’article 207, paragraphe 1, TFUE ne couvre pas, en soi, des types d’investissements autres que les investissements étrangers directs. Elles ont principalement utilisé le terme « investissements de portefeuille » pour décrire ces investissements.

347. À moins que les règles de l’ALEUES (ou certaines parties d’entre elles) régissant ces autres types d’investissements soient couvertes par les engagements en matière de services (258), la base juridique de l’action de l’Union en ce qui concerne de tels investissements et de sa compétence exclusive doit donc être recherchée ailleurs.

348. Rien n’indique que, pour exercer sa compétence interne, l’Union a besoin d’une compétence exclusive pour conclure que l’ALEUES. Le deuxième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE ne s’applique donc pas.

349. Néanmoins, les parties sont divisées sur le point de savoir si l’Union pourrait déduire une compétence exclusive pour la section A du chapitre 9 du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE dans la mesure où elle concerne des types d’investissement autres que des investissements étrangers directs.

350. Je ne peux pas souscrire à l’interprétation large que la Commission donne de l’article 3, paragraphe 2, TFUE de manière à inclure les dispositions du traité dans les « règles communes ».

351. Il est vrai que le texte de l’article 3, paragraphe 2, TFUE lui-même ne fournit aucune indication décisive. Alors que le TFUE utilise la notion de « règles communes » spécifiquement à propos de l’adoption de règles de droit dérivé de l’Union (259), le titre VII de la troisième partie du TFUE est intitulé « Les règles communes sur la concurrence, la fiscalité et le rapprochement des législations ». Il qualifie donc les dispositions du traité qu’il contient de « règles communes ».

352. Toutefois, le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE devrait être interprété à la lumière de l’arrêt AETR et de la jurisprudence ultérieure qui applique le principe AETR (260). Considérée dans ce contexte, il est manifeste que l’interprétation large que la Commission donne de la notion de « règles communes » ne saurait être acceptée.

353. L’article 3, paragraphe 2, TFUE énonce des cas de figure supplémentaires dans lesquels l’Union est exclusivement compétente pour conclure un accord international lorsqu’elle ne jouit pas d’une compétence exclusive expresse en vertu de l’article 3, paragraphe 1, TFUE. Cette compétence doit donc provenir d’une quelconque autre base que les traités eux-mêmes. Dans le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE, cette autre base est l’impact que des accords internationaux conclus par les États membres pourraient avoir sur des « règles communes », c’est-à-dire des règles adoptées par l’Union dans l’exercice de sa compétence interne (dans le cadre d’une politique commune) dans certains domaines. Ainsi, comme la Cour l’a clairement indiqué dans son avis 2/92, seul l’exercice d’une compétence interne (et non sa seule existence) peut donner naissance à une compétence externe exclusive (implicite) (261). Dans son avis 1/94, la Cour a souligné que « la compétence externe exclusive de [l’Union] ne découle pas ipso facto de son pouvoir d’édicter des règles sur le plan interne » (262).

354. L’argument de la Commission signifierait que l’article 3, paragraphe 2, TFUE reconnaît à l’Union le droit de conclure un accord qui affecte les traités ou en altère la portée. Or, la fonction première de l’article 3, paragraphe 2, TFUE est, comme son libellé l’indique clairement, de préciser la nature de la compétence externe de l’Union. Il ne peut pas avoir pour objet d’habiliter l’Union à « affecter » ses règles de droit primaire ou à « en altérer la portée » en concluant un accord international (263). Le droit primaire ne peut être modifié qu’au prix d’une révision des traités conformément à l’article 48 TUE (264). Contrairement à ce que soutient la Commission, le risque d’affecter le droit primaire de l’Union ne saurait créer une compétence externe exclusive au sens du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE (265). L’article 3, paragraphe 2, TFUE ne peut pas non plus être interprété comme signifiant que l’Union jouit d’une compétence externe exclusive sur la seule base du fait qu’elle est compétente pour adopter des règles au niveau interne (266).

355. La Commission s’est fondée ici sur l’arrêt Pringle (C-370/12, EU:C:2012:756), dans lequel la Cour a examiné si le traité MES (conclu par les États membres dont la monnaie est l’euro) affectait le pouvoir de l’Union d’accorder, sur la base de l’article 122, paragraphe 2, TFUE, une aide financière ponctuelle à un État membre en difficulté ou sérieusement menacé de subir de graves difficultés par des désastres naturels ou des événements exceptionnels échappant à son contrôle. La Cour a jugé que l’institution du MES n’affecte pas la compétence de l’Union d’accorder, sur la base de l’article 122, paragraphe 2, TFUE, une assistance financière ponctuelle à un État membre lorsqu’il est constaté que ce dernier connaît des difficultés ou une menace sérieuse de graves difficultés en raison de catastrophes naturelles ou d’événements exceptionnels échappant à son contrôle. Néanmoins, elle a rappelé que ni l’article 122, paragraphe 2, TFUE ni aucune autre disposition des traités UE et FUE ne confèrent à l’Union une compétence spécifique qui lui permettrait d’instituer un mécanisme de stabilité permanent tel que le MES (voir points 64 à 66 de l’arrêt), les États membres sont, eu égard à l’article 4, paragraphe 1, et à l’article 5, paragraphe 2, TUE, habilités à agir dans ce domaine (267). Lorsqu’elle a vérifié si l’article 3, paragraphe 2, TFUE empêchait les États membres dont la monnaie est l’euro de conclure le traité MES, la Cour a examiné tant le règlement (UE) no 407/2010 du Conseil (268) que la disposition du traité habilitant l’Union à adopter des instruments de droit secondaire. La Cour a conclu que l’article 3, paragraphe 2, TFUE ne s’opposait pas à ce qu’un groupe d’États membres conclue le traité MES.

356. Après avoir décrit l’objet principal de l’article 3, paragraphe 2, TFUE, la Cour a, dans son arrêt Pringle, déclaré qu’« [i]l […] découle également [de l’article 3, paragraphe 2, TFUE] qu’il est interdit aux États membres de conclure entre eux un accord qui serait susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée » (269). Cette déclaration ne fait qu’exprimer le principe de la primauté du droit de l’Union sur le droit national, principe qui joue aussi bien en ce qui concerne le droit primaire de l’Union que son droit dérivé. Cette partie du raisonnement que la Cour a tenu dans l’affaire Pringle ne va pas dans le sens de la thèse suivant laquelle la compétence exclusive de l’Union pour conclure un accord international sur la base du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE peut découler de « règles communes » énoncées dans le droit primaire de l’Union.

357. L’argument de la Commission impliquerait également qu’une compétence externe exclusive peut être établie sur la base du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE même lorsque la compétence interne sous-jacente à la disposition du traité sur laquelle elle repose n’a pas été exercée. Si cela était correct, la distinction entre le deuxième cas de figure, qui concerne spécifiquement la situation dans laquelle une compétence interne n’a pas été exercée, et le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE disparaîtrait partiellement.

358. De surcroît, si le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE était interprété en ce sens qu’une compétence exclusive est une conséquence nécessaire du fait qu’un accord international est susceptible d’affecter des règles du traité ou d’en altérer la portée, la simple existence d’une disposition du traité pourrait être suffisante pour conclure que l’Union dispose d’une telle compétence. Si cela était exact, pourquoi les auteurs du projet de traité n’ont-ils pas simplement confirmé l’existence de cette compétence externe exclusive en termes exprès ?

359. C’est la raison pour laquelle je considère que l’expression « règles communes » utilisée dans le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE ne peut pas être interprétée de façon à y inclure les « dispositions du traité ».

360. Il est entendu entre les parties que l’Union n’a adopté aucune législation dérivée en application de l’article 63, paragraphe 1, et de l’article 64, paragraphe 2, TFUE concernant d’autres types d’investissements que les investissements étrangers directs.

361. C’est pourquoi je conclus qu’en l’absence de règles communes, les conditions du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE ne sont pas remplies. Il en résulte que l’Union n’a aucune compétence exclusive sur cette base. La Commission n’a pas non plus soutenu qu’elle dispose d’une telle compétence sur une autre base.

362. L’Union a-t-elle une compétence partagée avec les États membres ?

 Sur les compétences partagées entre l’Union et les États membres

363. La Commission soutient, à titre subsidiaire, que l’Union dispose d’une compétence partagée pour conclure un accord international portant sur des types d’investissements autres que les investissements étrangers directs sur la base du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE.

364. Lors de l’audience, la Cour a demandé tant au Conseil qu’à la Commission de lui dire sur quelle base l’Union bénéficiait d’une compétence interne en matière de types d’investissements autres que les investissements étrangers directs. Le Conseil lui a répondu que les traités ne contenaient aucune base légale permettant d’adopter des règles de droit dérivé régissant des types d’investissements autres que des investissements étrangers directs qui pourraient être considérées comme des « règles communes » au sens du troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE. Il a néanmoins admis que certains aspects de types d’investissements autres que les investissements étrangers directs pourraient être soumis à des actes législatifs adoptés sur la base de dispositions du traité (autres que les articles 63 et 64 TFUE) régissant le marché intérieur. La Commission a répondu qu’eu égard à l’interdiction déjà formulée à l’article 63, paragraphe 1, TFUE, les traités ne fournissent (manifestement) aucune base juridique permettant d’adopter des règles de droit dérivé en vue de la libéralisation (à ne pas confondre avec l’harmonisation) des mouvements de capitaux, y compris les investissements de portefeuille. Néanmoins, tant l’article 114 que l’article 352 TFUE fournissaient une base permettant d’éliminer les restrictions aux investissements de portefeuille. Cela étant dit, dans la mesure où l’ALEUES n’avait pas pour objet d’harmoniser, l’article 114 TFUE ne serait pas une base juridique appropriée. La Commission a soutenu qu’en tout état de cause, il n’est pas nécessaire d’identifier une base juridique permettant d’exercer une compétence interne avant que l’Union puisse se prévaloir de l’article 216, paragraphe 1, TFUE.

365. Selon moi, le deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE n’est pertinent que si l’Union dispose d’une compétence interne. À ces fins, une matière doit relever du champ d’application du droit de l’Union et, donc, de la compétence de celle‑ci (270). Il n’est pas nécessaire que l’Union soit compétente à adopter des règles de droit dérivé.

366. Il me semble que toutes les conditions d’application du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE sont remplies ici.

367. Conformément à l’article 63 TFUE, l’Union dispose manifestement d’une compétence en matière de libéralisation et de protection de types d’investissements autres que les investissements étrangers directs dans la mesure où de tels investissements représentent des mouvements de capitaux entre États membres et entre États membres et pays tiers. Comme les traités ne définissent pas la notion de « mouvements de capitaux », la Cour a interprété cette notion en se fondant sur la nomenclature (non exhaustive) qui est annexée à la directive 88/361 (271). Les mouvements de capitaux sont classés en fonction de la nature économique des valeurs d’actif et de passif qu’ils concernent. La définition est très large. Ainsi, des mouvements de capitaux couvrent, notamment, des biens immobiliers, des titres, d’autres instruments des marchés financiers, des titres d’organismes de placement collectif et des comptes de dépôt auprès d’institutions financières, des crédits liés à des transactions commerciales ou à la fourniture de services, des prêts et crédits financiers, des cautions, d’autres garanties, des droits de gage, des transferts en exécution de contrats d’assurance, des mouvements de capitaux personnels, des importations et exportations physiques d’actifs financiers, des brevets, des dessins, des marques et des inventions.

368. D’autres formes de réglementation de ces types d’investissements pourraient être basées sur l’article 114 TFUE dans la mesure où elles rapprochent des lois régissant l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur. Des pouvoirs supplémentaires pourraient également être déduits de l’article 352 TFUE.

369. L’aspect de la libre circulation des capitaux du marché intérieur comporte à la fois une composante interne et une composante externe. Un accord qui a pour objet d’instaurer une libéralisation réciproque entre l’Union et un pays tiers, tel que l’ALEUES, relève du cadre de cette politique. Dès lors que de tels engagements réciproques ne peuvent pas être obtenus sans le consentement de ce pays tiers, il peut s’avérer nécessaire, au sens du premier cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, de conclure un accord international pour atteindre cet objectif.

370. C’est la raison pour laquelle je conclus que dans la mesure où elle s’applique à des types d’investissements autres que les investissements étrangers directs, le chapitre 9, section A, relève des compétences partagées de l’Union et des États membres sur la base de l’article 4, paragraphe 2, sous a), TFUE et du premier cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 63 TFUE.

 L’ALEUES peut-il annuler des accords bilatéraux conclus entre les États membres et la République de Singapour ?

371. La question de savoir si l’Union est compétente pour consentir à l’article 9.10.1 du chapitre 9, section A, de l’ALEUES est une question distincte. Aux termes de cette disposition, dès l’entrée en vigueur de l’ALEUES, les accords d’investissement bilatéraux conclus entre les États membres et la République de Singapour dont la liste figure à l’annexe 9-D (272) cesseront d’exister. Ces accords seront annulés et remplacés par l’ALEUES. La note 19 (273) sur cette disposition établit que, « par souci de clarté, [ces accords] sont considérés comme ayant pris fin en raison d[e l’ALEUES], au sens de l’article 59, paragraphe 1, point a), de l’article 59 de la Convention de Vienne sur les droits des traités ».

372. Dans sa requête, la Commission soutient que l’article 9.10 (« Rapports avec d’autres accords »), ainsi que les articles 9.8 (« Subrogation ») et 9.9 (« Dénonciation ») sont clairement dépendants d’autres dispositions matérielles du chapitre 9, section A, sur les investissements et, donc, accessoires par rapport à celles-ci. Lors de l’audience, la Commission a fait valoir que, lorsque l’Union conclut un accord international dans un domaine relevant de sa compétence (du moins lorsque cette compétence est exclusive), elle prend la succession des États membres en ce qui concerne les accords bilatéraux qu’ils ont conclus avec des pays tiers et qu’elle peut dès lors agir au nom des États membres, y compris en dénonçant de tels accords bilatéraux.

373. Le Conseil et un nombre significatif d’États membres ont fait valoir que l’Union ne peut pas, agissant seule, convenir avec un pays tiers d’annuler et de remplacer des accords internationaux que ce pays a conclus avec les États membres et auxquels l’Union elle-même n’est pas partie.

374. Selon moi, il n’est nécessaire de statuer définitivement sur cette question que si la Cour considère que l’Union jouit d’une compétence exclusive pour toutes les autres parties de l’ALEUES. Si la Cour devait dire pour droit que l’Union partage sa compétence avec les États membres et si l’ALEUES devait donc être conclu à la fois par l’Union et par les États membres, les États membres (concernés) pourraient, en exprimant leur consentement à être liés par l’ALEUES, décider eux-mêmes s’ils entendent ou non annuler leurs accords existants avec la République de Singapour.

375. Pour les raisons que j’ai déjà indiquées, je considère que l’Union ne jouit pas d’une compétence exclusive pour la totalité du chapitre 9, section A (ou, d’ailleurs, pour l’ensemble de l’ALEUES) (274).

376. Par souci d’être complète, je vais néanmoins examiner brièvement si, sans être partie aux accords conclus entre les États membres et la République de Singapour dont la liste figure à l’annexe 9-D, l’Union peut convenir avec la République de Singapour d’annuler ces accords sans le consentement des États membres.

377. Cette question est inédite (275).

378. Lorsque l’Union acquiert une compétence (interne ou externe) exclusive dans un domaine particulier, elle agit dans un domaine pour lequel c’étaient les États membres qui étaient précédemment compétents. Le point de savoir si l’Union décide ou non d’annuler des actes antérieurs des États membres dépendra de la manière dont elle exerce cette compétence et du point de savoir si cela crée une quelconque incompatibilité avec un acte antérieur des États membres. Les conditions auxquelles l’Union peut exercer des compétences internes dépendent du droit de l’Union. En tout état de cause, l’action de l’Union doit être compatible avec le droit international (276).

379. Lorsque l’Union assume les pouvoirs précédemment exercés par les États membres dans un domaine régi par un accord international, les dispositions de cet accord acquièrent, en droit de l’Union, force obligatoire pour elle (277). Telle est la position que la Cour a adoptée dans son arrêt International Fruit Company e.a. (278) en ce qui concerne le GATT de 1947 [accord auquel tous les États membres étaient parties (à l’époque), mais pas l’Union]. L’effet obligatoire du GATT de 1947 était une condition pour pouvoir déterminer si cet accord affectait la validité du droit dérivé de la Communauté écononomique européenne. La Cour n’a pas examiné (et elle n’avait pas à le faire) la manière dont cette conclusion affectait les obligations que le GATT de 1947 imposait aux États membres ou leur statut en tant que parties à cet accord. Selon moi, l’arrêt International Fruit Company e.a. implique que, du point de vue du droit de l’Union, l’Union avait acquis une compétence exclusive pour des matières couvertes par le GATT de 1947 et, du point de vue du droit international, elle avait remplacé les États membres en tant que parties responsables du respect des obligations qu’ils avaient assumées en concluant le GATT de 1947.

380. Néanmoins, dans son arrêt International Fruit Company e.a., la Cour n’a pas examiné la question de savoir si, lorsque l’Union assume les pouvoirs précédemment exercés par les États membres dans un domaine qui relève désormais des compétences exclusives de l’Union, ces pouvoirs incluent le droit d’annuler des accords existants conclus par les États membres avec des pays tiers. En effet, les États membres ont continué à être parties au GATT de 1947, qui, du point de vue du droit de l’Union, s’appliquait désormais tant à ces États membres qu’à la Communauté économique européenne.

381. La Cour a également jugé qu’en principe, l’application des traités de l’Union ne peut pas affecter l’obligation qu’ont les États membres de respecter les droits que des pays tiers puisent dans un accord antérieur ni leur obligation de s’acquitter des obligations que cet accord leur impose (279). Ainsi, même si les traités transfèrent entièrement à l’Union une compétence dans un domaine particulier, les États membres doivent continuer à s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu d’accords internationaux conclus avec des pays tiers, ce qui est conforme au principe bien établi de droit international suivant lequel le droit interne ne peut pas justifier un non-respect d’un accord international ou affecter la validité de cet accord (280). Cela signifie également que les modifications apportées aux traités ne peuvent pas avoir pour effet que l’Union se substitue aux États membres dans des accords que ceux-ci ont précédemment conclus avec des pays tiers. Un pays tiers continue donc à être lié par un accord qu’il a conclu avec l’État membre concerné et les deux parties à cet accord doivent, en principe, exécuter intégralement cet accord en application du principe pacta sunt servanda (281).

382. Les États membres sont néanmoins tenus de s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu de ces accords d’une manière compatible avec le droit de l’Union et avec l’exercice par celle-ci des compétences exclusives qu’elle a nouvellement acquises. Lorsqu’il s’avère impossible de le faire sans enfreindre le droit de l’Union, les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour rendre ces accords compatibles avec le droit de l’Union. Cette obligation résulte à la fois de la primauté du droit de l’Union et de l’obligation de coopération loyale qui est inscrite à l’article 4, paragraphe 3, TUE.

383. L’article 351 TFUE, qui traite de la relation entre les accords conclus par les États membres avant le 1er janvier 1958 (ou avant l’adhésion d’un État membre particulier) entre un ou plusieurs États membres et un ou plusieurs pays tiers, d’une part, et les dispositions des traités, d’autre part, confirme ce raisonnement.

384. L’article 351, premier alinéa, TFUE a pour objet « de préciser, conformément aux principes du droit international, que l’application du traité n’affecte pas l’engagement de l’État membre concerné de respecter les droits des États tiers résultant d’une convention antérieure et d’observer ses obligations » (282).

385. Aux termes du deuxième alinéa de cet article, dans la mesure où ces conventions ne sont pas compatibles avec les traités, le ou les États membres en cause recourent à tous les moyens appropriés pour éliminer les incompatibilités constatées. Ces moyens pourraient exiger d’eux qu’ils dénoncent l’accord. Lorsqu’il n’y a aucune incompatibilité entre l’accord antérieur et les traités, ils n’ont aucune obligation de prendre des mesures de correction.

386. L’article 351 TFUE s’applique à la relation entre, d’une part, les accords bilatéraux conclus entre la République de Singapour et divers États membres individuels avant leur adhésion à l’Union (à savoir la République de Bulgarie, la République tchèque, la République de Lituanie, la Hongrie, la Hongrie, la République de Pologne, la République de Slovénie et la République slovaque, c’est-à-dire certains des accords dont la liste figure à l’annexe 9-D) (283) et les traités, d’autre part. Cependant, l’article 351, premier alinéa, TFUE ne régit pas, en tant que tel, la relation entre la première catégorie d’accords et les accords conclus par la suite par la République de Singapour et l’Union. Il n’est pas davantage pertinent en ce qui concerne les accords conclus par d’autres États membres.

387. Loin de corroborer la thèse de la Commission, l’article 351 TFUE confirme clairement qu’un État membre demeure partie aux accords internationaux qu’il avait conclus auparavant et qu’il lui appartient d’éliminer toute incompatibilité entre ces accords et les traités. L’article 351 TFUE s’applique indépendamment de la question de savoir si l’Union jouit de compétences exclusives ou partagées dans les domaines couverts par ces accords.

388. Aucune disposition du traité ne dresse la liste des obligations qui incombent aux États membres qui concluent des accords internationaux avec des États tiers (ou avec des organisations internationales) après leur adhésion à l’Union. Leurs obligations résultent à la fois de la primauté du droit de l’Union et de l’obligation de coopération loyale énoncée à l’article 4, paragraphe 3, TUE. Les traités n’affectent donc pas le droit qu’ont les États membres de conclure de tels accords après leur adhésion à l’Union. Ils ne peuvent le faire que dans des domaines relevant de leurs compétences et uniquement à la condition de respecter le droit de l’Union.

389. Si la répartition des compétences entre l’Union et les États membres change par la suite et si l’Union acquiert des compétences supplémentaires qui sont exclusives par nature, je ne vois pas pourquoi les règles qui figurent à l’article 351 TFUE devraient cesser de s’appliquer. Les États membres doivent toujours prendre les mesures appropriées pour garantir que les accords existant dans le domaine concerné, qui lient désormais l’Union (284) également, sont conformes à cette nouvelle répartition de compétences et compatibles avec toute action entreprise ultérieurement par l’Union dans l’exercice de ses compétences.

390. Il me semble que cette conclusion est également parfaitement conforme au droit international.

391. À la note 19 (285) sur l’article 9.10.1 de l’ALEUES, l’Union et la République de Singapour se réfèrent expressément à l’article 59 de la convention de Vienne de 1969. Du point de vue du droit des traités, cette disposition lie tous les États membres et la République de Singapour. L’Union elle-même n’est pas et ne peut pas être liée par la convention de Vienne de 1969 parce qu’elle n’est pas un État. La Cour a néanmoins invoqué cette disposition pour résoudre des questions concernant des accords successifs (286).

392. L’article 59 de la convention de Vienne de 1969 traite de l’extinction (implicite) d’un traité entre parties du fait de la conclusion d’un traité postérieur par l’ensemble de ces parties. Conformément à cette disposition, « 1) Un traité est considéré comme ayant pris fin lorsque toutes les parties à ce traité concluent ultérieurement un traité portant sur la même matière et : a) s’il ressort du traité postérieur ou s’il est par ailleurs établi que, selon l’intention des parties, la matière doit être régie par ce traité. » La Commission en conclut que l’Union devrait désormais être considérée comme étant partie aux accords bilatéraux antérieurs.

393. L’article 59 ne s’écarte en aucune façon du principe de base suivant lequel l’annulation d’un traité exige le consentement des parties (de la même manière que sa conclusion) (287). Il sert essentiellement de règle de conflit permettant de déterminer quel traité s’applique en présence d’accords successifs et lorsque toutes les parties au traité antérieur sont également parties au traité ultérieur, mais lorsque le traité antérieur n’a pas été dénoncé (288). Lorsque l’Union décide d’exercer ses compétences nouvellement acquises et conclut un accord avec un État tiers, cet État tiers est tenu par ce nouvel accord ainsi que par tous autres accords couvrant la même matière qu’il a conclus auparavant avec des États membres. Cette situation peut manifestement entraîner une insécurité juridique pour l’État tiers. Lorsque l’article 59 de la convention de Vienne de 1969 s’applique, ce conflit est résolu en faveur de l’accord ultérieur conclu entre l’Union et l’État tiers. Lorsqu’il ne s’applique pas, l’État tiers doit en principe respecter les deux accords.

394. L’article 59 de la convention de Vienne de 1969 ne s’applique cependant que s’il est admis que (du point de vue du droit international) l’Union a pris la succession des États membres individuels en ce qui concerne les accords bilatéraux dont la liste figure à l’annexe 9-D. Il n’offre aucune ligne directrice générale concernant la succession en matière de traités. La convention de Vienne de 1969 ne préjuge aucune question qui pourrait se poser à propos d’un traité du fait d’une succession d’États (289). La convention de Vienne sur la succession d’États en matière de traités, du 23 août 1978 (290) ne semble pas non plus viser la situation spécifique en cause. [J’ajouterai que, bien que cette convention soit entrée en vigueur, seuls quelques États membres font partie du nombre (limité) de signataires.]

395. Lors de l’audience, la Commission s’est référée à ce qu’elle a décrit comme étant une pratique « bien établie » et « acceptée par un grand nombre de pays tiers ». Néanmoins, les exemples peu nombreux qu’elle a donnés concernaient tout ce que l’Union elle-même a fait. La Commission n’a offert aucune aide en ce qui concerne le point de savoir si d’autres États membres considèrent qu’une telle pratique équivaut à une règle de droit international.

396. Dans ce contexte, je ne vois, en l’état actuel du droit international, aucune base qui permettrait de conclure que l’Union peut automatiquement succéder aux États membres en ce qui concerne un accord international conclu par ceux-ci auquel elle n’est pas partie pour dénoncer par la suite cet accord. Une telle règle dérogerait à la règle fondamentale du consentement pour tout acte législatif international. Admettre la position de la Commission signifierait qu’en cas de modifications dans le droit de l’Union et d’exercice (éventuel) de ses compétences externes par celle-ci, un État membre pourrait cesser d’être partie à un accord international, bien qu’il soit un État qui a consenti à être lié par cet accord et à l’égard duquel celui-ci est en vigueur (291). Les droits et obligations qui incombent à l’État membre en vertu de cet accord expireraient et, si l’Union devait décider d’exercer ses nouvelles compétences, ils seraient remplacés par des droits et obligations contractés par elle avec l’État tiers sans que l’État membre ait exprimé son consentement à ces modifications (fondamentales).

397. Enfin, j’observe que l’Union a adopté des règles de droit dérivé (règlement no 1219/2012) établissant des dispositions transitoires pour les accords d’investissement bilatéraux conclus entre des États membres et des pays tiers. Suivant ses termes exprès, cependant, ce règlement s’applique sans préjudice de la répartition des compétences entre l’Union et les États membres qui est prévue par le TFUE (292). Il est fondé sur la prémisse que l’Union est exclusivement compétente pour toutes les matières couvertes par ces accords bilatéraux antérieurs et il offre, en droit de l’Union, une base permettant aux États membres d’agir à l’égard d’accords existants et d’(éventuels) nouveaux accords. Ce règlement n’envisage cependant pas que l’Union puisse elle-même annuler ces accords antérieurs (en concertation avec l’État tiers lié par l’accord bilatéral).

398. J’en conclus dès lors que ce sont les États membres qui ont la compétence exclusive de mettre fin aux accords d’investissement bilatéraux qu’ils avaient conclus précédemment avec des États tiers. Par conséquent, l’Union n’a aucune compétence pour consentir à l’article 9.10 de l’ALEUES.

 Sur les marchés publics (chapitre 10 de l’ALEUES (293))

 Arguments

399. La Commission affirme que, dans l’affaire C-360/93 (294), la Cour a déjà admis qu’en principe, la politique commerciale commune couvre la conclusion d’accords sur l’ouverture réciproque des frontières pour les marchés publics et pour les fournitures transfrontière de services. Comme d’autres modes de fourniture de services relèvent désormais du champ d’application de la politique commerciale commune, le même argument s’applique, par analogie, à ces autres modes de fourniture. À un niveau plus général, la Commission soutient que les accords internationaux régissant l’accès des biens et services originaires de pays tiers destinés à des marchés publics dans l’Union, d’une part, et des biens et services originaires de l’Union destinés à des marchés publics de pays tiers, d’autre part, concernent spécifiquement les échanges internationaux et ont donc des effets directs et immédiats sur le commerce international. La Commission ajoute que le protocole (récent) amendant l’accord OMC sur les marchés publics a été conclu par l’Union agissant sur la base de sa compétence exclusive en matière de politique commerciale commune.

400. Les autres parties n’ont présenté aucun argument spécifique concernant le chapitre 10.

 Analyse

401. Contrairement à la Commission, je ne considère pas que l’affaire C‑360/93 (295) soit pertinente pour décider si le chapitre 10 relève de la politique commerciale commune. Dans cette affaire, la Cour a annulé deux décisions du Conseil qui avaient pour objet, respectivement, i) de conclure un accord entre (ce qui est devenu) l’Union et les États-Unis d’Amérique concernant la passation de marchés publics et ii) d’étendre le bénéfice des dispositions de la directive 90/531/CEE du Conseil afin d’y inclure les États-Unis d’Amérique (296). Elle a jugé que l’article 113 CE n’était pas une base juridique adéquate pour ces décisions parce qu’à l’époque, seule la fourniture transfrontière de services relevait du champ d’application de la politique commerciale commune. Néanmoins, ces deux décisions couvraient également d’autres modes de fourniture de services (à savoir la présence commerciale ou la présence de personnes physiques sur le territoire de l’autre partie contractante) (297). La Cour n’a donc pas pris position sur le point de savoir si, en tant que tels, les marchés publics relèvent de la politique commerciale commune.

402. Je conviens néanmoins avec la Commission que l’objectif du chapitre 10 consiste principalement à faciliter l’ouverture réciproque des frontières pour les marchés publics de l’Union et de la République de Singapour dans les limites fixées dans la liste d’engagements de chaque partie en matière d’accès au marché. Ce chapitre vise également à promouvoir la concurrence dans les achats publics de biens, de services et de travaux de construction ainsi qu’à garantir la transparence et la correction des procédures dans ce domaine. Il le fait en étendant les engagements déjà contractés par les deux parties quand elles ont conclu l’accord OMC (révisé) sur les marchés publics (298). En fait, des parties importantes de ce chapitre correspondent (mot pour mot) à cet accord OMC.

403. La conclusion que le commerce des biens et services (et donc les règles d’accès au marché de pareils biens et services ainsi que les réglementations nationales qui les régissent) relève(nt) de la politique commerciale commune n’est en aucune façon affectée par le fait que ces biens et services sont achetés par des pouvoirs publics et non par des particuliers.

404. Néanmoins, le chapitre 10 prévoit également l’application de certains engagements spécifiques au secteur des transports. L’annexe 10.E, partie 2 (« Engagements de l’Union »), qui dresse la liste des services pour lesquels l’Union contracte des engagements, confirme expressément que ce chapitre couvre différentes formes de services de transport. De surcroît, la note 2 sur cette partie de l’annexe dispose que les engagements de l’Union en matière de services sont soumis aux limitations et conditions des engagements que l’Union a contractés dans le chapitre 8.

405. Dans la mesure où le chapitre 10 s’applique aux services de transport et aux services intrinsèquement liés à ceux-ci, il résulte de l’article 207, paragraphe 5, TFUE que la compétence de l’Union pour ce chapitre ne peut pas être fondée sur la politique commerciale commune (299).

406. La Commission n’a pas indiqué sur quelle autre base l’Union pourrait disposer d’une compétence exclusive en ce qui concerne le chapitre 10.

407. Selon moi, l’Union jouit d’une compétence partagée en ce qui concerne ce chapitre dans la mesure où il s’applique aux services de transport et aux services intrinsèquement liés à ceux-ci. Le chapitre 10 garantit que les marchés publics qu’il vise sont adjugés dans le respect des principes d’égalité de traitement, de non-discrimination et de transparence, et il garantit donc l’ouverture des marchés publics à la concurrence dans l’Union et à Singapour (300). Ce chapitre contribue donc à établir ou à assurer le fonctionnement du marché intérieur, qui, comme le protocole no 27 sur le marché intérieur et la concurrence annexé au TFUE l’indique clairement, « comprend un système garantissant que la concurrence n’est pas faussée » (301). Dans ce sens-là, le chapitre 10 peut être considéré comme étant nécessaire à la réalisation de l’objectif de la mise en place du marché intérieur qui est formulé à l’article 26, paragraphe 1, TFUE, au sens du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE (302). Cette compétence externe est, cependant, partagée entre l’Union et ses États membres conformément à l’article 4, paragraphe 2, sous a), TFUE.

408. C’est la raison pour laquelle je conclus que les dispositions du chapitre 10 sur les marchés publics relèvent du champ d’application de la compétence exclusive que l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union sauf dans la mesure où elles s’appliquent aux marchés publics de services de transport et de services intrinsèquement liés à ceux-ci. Dans la mesure où elles s’appliquent à ces dernières catégories de services, les dispositions du chapitre 10 relèvent de la compétence partagée de l’Union.

 Sur la propriété intellectuelle (chapitre 11 de l’ALEUES (303))

 Arguments

409. La Commission soutient que la totalité du chapitre 11 relève du champ d’application de la politique commerciale commune parce qu’il vise les aspects commerciaux de la propriété intellectuelle au sens de l’article 207, paragraphe 1, TFUE. C’est la raison pour laquelle l’Union jouirait d’une compétence exclusive en ce qui concerne ce chapitre en application de l’article 3, paragraphe 1, TFUE.

410. La Commission fonde sa position sur l’arrêt Daiichi (304), dans lequel la Cour a dit pour droit que, parmi les normes adoptées par l’Union en matière de propriété intellectuelle, seules celles « qui présentent un lien spécifique avec les échanges commerciaux internationaux sont susceptibles de relever de la notion d’“aspects commerciaux de la propriété intellectuelle” » (305), mais que l’accord ADPIC est entièrement couvert par cette notion (306). Il en va de même des accords internationaux sur la propriété intellectuelle conclus en dehors de l’OMC qui présentent un lien spécifique avec les échanges commerciaux internationaux. La Commission se fonde ici sur l’arrêt Regione autonoma Friuli-Venezia Giulia et ERSA (307).

411. Premièrement, la Commission soutient que la plupart des dispositions du chapitre 11 sont fondées sur l’accord ADPIC. Deuxièmement, l’article 11.2.1 dispose que les dispositions de ce chapitre « complètent les droits et obligations des parties au titre de l’accord ADPIC et des autres traités internationaux dans le domaine de la propriété intellectuelle auxquels elles sont parties ». Troisièmement, le chapitre 11 fait partie d’un accord commercial plus large conclu entre l’Union et la République de Singapour, comme l’indique l’article 11.1.1. Les objectifs qui sont énumérés montrent que fixer des normes communes pour protéger la propriété intellectuelle n’est pas, en soi, un objectif de l’ALEUES. Cet accord a bien plutôt pour objet de réduire les distorsions commerciales et d’améliorer l’accès au marché pour les produits protégés par des droits de propriété intellectuelle. En outre, de la même manière que l’accord ADPIC, le chapitre 11 est soumis aux dispositions de règlement des différends qu’énoncent les chapitres 15 et 16 de l’ALEUES. Toute violation des obligations imposées dans le chapitre 11 peut dès lors entraîner des sanctions commerciales.

412. En ce qui concerne les références que le chapitre 11 fait à d’autres accords internationaux concernant la propriété intellectuelle, la Commission allègue que l’utilisation de cette technique (habituelle) de rédaction est raisonnable et justifiée dès lors que l’objectif global est d’abolir progressivement les obstacles aux échanges et investissements internationaux. De surcroît, la plupart des références sont simplement déclaratoires ou se présentent sous la forme d’« engagements à déployer les meilleurs efforts », lesquels ne sortissent aucun effet juridique susceptible d’entamer la compétence de l’Union à l’égard du chapitre 11.

413. La position du Parlement sur le chapitre 11 correspond à celle de la Commission. Il ajoute que le chapitre 11 ne contient aucune référence à l’article 61 de l’accord ADPIC (qui porte sur les procédures pénales et les sanctions) (308).

414. Aucun des arguments du Conseil ne porte spécifiquement sur le chapitre 11.

415. De nombreux États membres soutiennent que l’Union ne jouit pas d’une compétence exclusive en ce qui concerne le chapitre 11, qui ne présente aucun lien spécifique avec des échanges internationaux et ne peut dès lors pas relever de la notion d’« aspects commerciaux de la propriété intellectuelle ». L’arrêt Daiichi (309) portait essentiellement sur l’article 27 de l’accord ADPIC, et non sur l’ensemble de cet accord. C’est pourquoi l’article 207 TFUE ne peut pas être interprété comme conférant à l’Union la compétence exclusive de conclure des accords couvrant toutes les dispositions de l’accord ADPIC. Si, contrairement à cette allégation, l’arrêt de la Cour concernait bel et bien toutes les dispositions de l’accord ADPIC, le raisonnement de la Cour était fondé essentiellement sur des traits de l’ordre juridique de l’OMC qui sont absents de l’ALEUES. Même en donnant une interprétation large de l’arrêt Daiichi (310), cet arrêt ne peut pas s’étendre à des matières qui ne sont pas directement régies par l’accord ADPIC.

416. Le chapitre 11 de l’ALEUES et l’accord ADPIC ne se chevauchent pas entièrement. En tout état de cause, le simple fait qu’une matière soit régie par l’accord OMC (dont l’accord ADPIC fait partie intégrante) ne signifie pas que cette matière serait nécessairement couverte également par la politique commerciale commune. L’article 207, paragraphe 1, TFUE ne devrait pas être interprété en ce sens qu’il impliquerait que tous les accords internationaux concernant les droits de propriété intellectuelle relèveraient désormais de la politique commerciale commune.

417. Le chapitre 11 reprend à la fois certaines dispositions de l’accord ADPIC et des dispositions d’autres accords sur la propriété intellectuelle (conclues indépendamment de l’accord OMC) pour lesquels l’Union ne peut pas jouir d’une compétence exclusive. Contrairement à l’accord ADPIC, ces accords [qui sont essentiellement des accords internationaux administrés par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI)] n’ont pas été conclus en tant qu’éléments d’accords commerciaux. Ils ne peuvent pas non plus être classés comme étant des accords commerciaux au sens de l’arrêt Regione autonoma Friuli‑Venezia Giulia et ERSA (311). Toute relation entre ces accords et les échanges internationaux n’est qu’indirecte. L’Union ne peut pas contracter des engagements internationaux qui ne concernent que les États membres. L’Union ne peut pas davantage exiger des États membres qu’ils appliquent les accords internationaux qu’ils ont conclus.

418. De surcroît, des dispositions relatives à l’application de droits protégés, telles que les articles 42 à 50 de l’accord ADPIC (c’est-à-dire les dispositions de la partie III, section 2, intitulée « Procédures et mesures correctives civiles et administratives »), ne font pas partie de la politique commerciale commune. Ces dispositions concernent l’organisation judiciaire et les procédures civiles. Elles ne présentent aucun lien direct avec les échanges internationaux.

419. L’Union ne saurait pas davantage jouir d’une compétence exclusive parce que le chapitre 11 intègre l’article 61 de l’accord ADPIC, qui a trait aux sanctions pénales. Les matières pénales ne font pas partie des aspects commerciaux de la propriété intellectuelle.

420. L’Union n’est pas non plus compétente pour accepter les obligations qui sont énoncées à l’article 11.4 de l’ALEUES dans la mesure où cette disposition insère dans l’accord la convention pour la protection des œuvres littéraires et artistiques (312), le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur (313) et le traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (314), qui s’appliquent aux droits moraux. L’Union n’a aucune compétence en matière de droits moraux ; il n’y a jamais eu aucune harmonisation dans ce domaine.

421. L’article 11.2 (qui se réfère à l’accord ADPIC et à la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle (315)) et l’article 11.29 de l’ALEUES (qui rappelle les obligations au titre du traité de coopération en matière de brevets (316) et impose aux parties de déployer, lorsque cela est approprié, tous les efforts raisonnables pour respecter les articles 1er à 16 du traité sur le droit des brevets (317)) auront des effets sur les brevets, qui sont une matière relevant de la compétence partagée [voir, en particulier, article 118 TFUE, règlement (UE) no 1257/2012 et règlement (UE) no 1260/2012] (318). La protection des brevets est une matière qui requiert une coopération renforcée entre les États membres (à l’exception du Royaume d’Espagne, de la République de Croatie et de la République italienne). Une telle matière ne peut pas faire l’objet d’une compétence exclusive : la notion de « coopération renforcée » est incompatible avec la notion de « compétence exclusive ». Un autre État membre fait valoir également que la Commission n’a pas expliqué comment l’Union pourrait se conformer à l’article 11.29 de l’ALEUES (319) si cette dernière devait signer à elle seule l’ALEUES. Les matières couvertes par le traité de coopération en matière de brevets et le traité sur le droit des brevets sont différentes des questions matérielles en matière de brevets couvertes par l’accord ADPIC.

422. L’article 11.35 (sur les variétés végétales) ne relève pas, lui non plus, de la politique commerciale commune. La convention internationale pour la protection des obtentions végétales, adoptée à Paris le 2 décembre 1961, n’est pas spécifiquement liée aux échanges commerciaux internationaux. La convention prévoit une forme suigeneris de protection de la propriété intellectuelle. La base juridique sur le fondement de laquelle le Conseil a adopté la décision portant conclusion de cette convention était l’article 43 TFUE, qui a trait à l’agriculture.

423. Enfin, il est nécessaire qu’il y ait une certaine uniformité entre la compétence interne et la compétence externe. Or, comme certaines matières couvertes par le chapitre 11 ne sont pas harmonisées, l’Union ne dispose donc pas d’une compétence exclusive fondée sur l’article 3, paragraphe 2, TFUE.

 Analyse

 Sur la signification de l’expression « aspects commerciaux de la propriété intellectuelle » figurant à l’article 207, paragraphe 1, TFUE

424. Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l’article 207, paragraphe 1, TFUE dispose désormais que la politique commerciale commune doit être fondée sur des principes uniformes en ce qui concerne « les aspects commerciaux de la propriété intellectuelle » également. Le point de départ de l’interprétation de cette expression est l’affaire Daiichi (320).

425. Dans l’arrêt qu’elle a rendu dans cette affaire, la Cour a commencé par observer que, comme le droit primaire de l’Union avait considérablement évolué, son ancienne jurisprudence relative à l’accord ADPIC, y compris son avis 1/94 (321), n’était plus pertinente pour déterminer dans quelle mesure l’accord ADPIC relevait de la politique commerciale commune.

426. Premièrement, la Cour a jugé que, bien que l’accord ADPIC ne porte pas sur les modalités des opérations de commerce international en tant que telles, il fait partie intégrante du régime de l’OMC et constitue l’un des accords multilatéraux principaux sur lesquels ce régime est fondé (322).

427. Deuxièmement, la Cour a dit pour droit que la spécificité du lien entre l’accord ADPIC et les échanges commerciaux internationaux est illustrée par le fait que le mécanisme RDIE mis en place par l’OMC permet à un État membre de suspendre certaines concessions de manière croisée entre cet accord et les autres accords multilatéraux principaux dont l’accord OMC est composé (323). La Cour s’est en cela fondée sur l’article 22, paragraphe 3, du mémorandum d’accord de l’OMC sur les règles de procédure régissant le règlement de différends. Cette disposition indique les concessions ou autres obligations qui peuvent être suspendues.

428. Troisièmement, la Cour a considéré que, lorsqu’ils ont utilisé l’expression « aspects commerciaux de la propriété intellectuelle » à l’article 207, paragraphe 1, TFUE, les auteurs du traité n’ont pas pu ignorer que les termes ainsi insérés correspondent quasi littéralement au titre même de l’accord ADPIC (324).

429. Quatrièmement, la Cour a insisté sur le fait que l’accord ADPIC a pour objectif premier de renforcer et d’harmoniser la protection de la propriété intellectuelle à l’échelle mondiale. C’est ainsi que son préambule indique que l’accord a pour objectif de réduire les distorsions du commerce international en garantissant, sur le territoire de chacun des membres de l’OMC, une protection efficace et suffisante des droits de propriété intellectuelle (325). Les règles de fond se situent dans le contexte de la libéralisation du commerce et non pas dans celui d’une harmonisation des législations des États membres.

430. Je considère que, dans l’arrêt Daiichi (C‑414/11, EU:C:2013:520), la Cour a jugé que la totalité de l’accord ADPIC relève de la politique commerciale commune. Son analyse ne s’est pas limitée à l’article 27 de l’accord ADPIC.

431. Cela étant dit, je ne suis pas convaincue que le raisonnement exposé dans l’arrêt Daiichi (C‑414/11, EU:C:2013:520) puisse et doive être transposé tel quel à l’examen de l’ALEUES.

432. Le fait que la terminologie utilisée à l’article 207, paragraphe 1, TFUE (« Aspects commerciaux de la propriété intellectuelle ») corresponde au titre de l’accord ADPIC (« Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce ») semble spécifique de cet accord OMC.

433. Le fait d’inclure des dispositions relatives à la propriété intellectuelle dans un accord commercial déterminé pourrait dénoter un lien spécifique entre ces dispositions et les échanges internationaux. Néanmoins, la politique commerciale commune pourrait également couvrir des dispositions sur la propriété intellectuelle ou des accords négociés et conclus dans un contexte non commercial (326). Si le simple fait d’inclure une matière dans un tel accord devait cependant suffire à faire tomber celui-ci dans le champ d’application de la politique commerciale commune, les États membres courraient effectivement un risque sérieux de perdre certaines de leurs compétences (327).

434. Le champ d’application de la politique commerciale commune ne devrait pas non plus, selon moi, être défini par référence au type de mesure corrective prévu par les mécanismes RDIE (328).

435. Selon moi, ce qui importe aux fins de l’article 207, paragraphe 1, TFUE, c’est le point de savoir si un accord contenant des dispositions pour la protection de la propriété intellectuelle a trait spécifiquement aux échanges commerciaux internationaux. Il convient, pour s’en assurer, d’examiner si cet accord est essentiellement destiné à promouvoir, à faciliter ou à régir ces échanges (plutôt qu’à harmoniser les législations des États membres) (329) ; s’il a des effets directs et immédiats sur ces échanges et s’il a pour objectif de réduire les distorsions du commerce international en garantissant, sur le territoire de chacune des parties, que les intérêts économiques que représentent les monopoles que créent les droits de propriété intellectuelle sont effectivement et adéquatement protégés. Telle est la substance de l’arrêt Daiichi (C‑414/11, EU:C:2013:520).

436. Je suis d’accord sur ce point avec l’avocat général Wahl et considère moi aussi que les droits de propriété intellectuelle ont, par nature, généralement un lien avec le commerce en ce qu’ils sont, par essence, des droits exclusifs créant des monopoles susceptibles de limiter la libre circulation des biens ou services (330). Dans une économie de marché, la pertinence première de ces droits réside dans leur valeur économique. Lorsque leur exercice est essentiel à l’exploitation commerciale de la propriété intellectuelle protégée dans un marché transfrontalier, de tels droits relèvent des « aspects commerciaux de la propriété intellectuelle » (331). De ce point de vue, les intérêts liés à la protection de ces droits deviennent, en substance, des intérêts commerciaux.

437. Cela ne veut pas dire que toutes les formes de protection des droits de propriété intellectuelle sont toujours et nécessairement liées au commerce international. Par exemple, la Cour a décrit l’objet spécifique des droits à la protection de la propriété littéraire et artistique comme étant d’assurer la protection des droits moraux et économiques de leurs titulaires (332). Les droits moraux complètent les droits économiques en ce qu’ils confèrent à l’auteur « le droit de revendiquer la paternité de l’œuvre et de s’opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de cette œuvre ou à toute autre atteinte à la même œuvre, préjudiciable à son honneur ou à sa réputation » (333). Ils ont pour objet de protéger la relation d’un auteur à son œuvre. Cette relation est essentiellement indépendante des droits économiques que l’auteur peut avoir sur cette œuvre. Cela signifie également que, lorsqu’un accord, tel que l’ALEUES, couvre la création et la protection des droits moraux, la base juridique permettant de conclure cet accord ne peut pas être le seul article 207, paragraphe 1, TFUE. Les dispositions concernant de tels droits ne sont pas accessoires par rapport à celles qui concernent les droits économiques. Toute autre conclusion reviendrait à biffer les mots « aspects commerciaux » de l’article 207, paragraphe 1, TFUE, de sorte qu’aussi bien les aspects commerciaux que les aspects non commerciaux de la propriété intellectuelle relèveraient de la politique commerciale commune.

438. Un certain nombre d’États membres demandent à la Cour de limiter la conclusion dans son arrêt Daiichi (C‑414/11, EU:C:2013:520) en excluant certaines dispositions de l’accord ADPIC, telles que ses articles 42 à 50 et l’article 61, du champ d’application de la politique commerciale commune. Ils font valoir que ces dispositions ont trait à l’organisation judiciaire, aux procédures civiles et aux matières pénales. Il en résulterait que, comme ces dispositions font néanmoins partie de l’ALEUES, l’Union n’a pas une compétence exclusive pour le chapitre 11.

439. S’il est correct, cet argument impliquerait que, pour relever de la politique commerciale commune, toute disposition d’un accord international devrait remplir la condition d’un lien spécifique avec le commerce international pour relever de la politique commerciale commune. Néanmoins, décider si l’Union a une compétence exclusive et, partant, identifier la base juridique correcte de l’action en cause doit se fonder sur des facteurs objectifs, y compris l’objectif et le contenu de l’action (334). La base juridique d’une décision de conclure un accord international n’est pas la somme des bases juridiques de chaque disposition de cet accord. Ainsi, dans l’affaire C‑137/12 (335), le fait que l’accord international qui était en cause comportait des dispositions relatives à des mesures de saisie et de confiscation n’a pas modifié la conclusion de la Cour que l’accord relevait du champ d’application de la politique commerciale commune. Ces dispositions « vis[ai]ent, d’une manière générale, à garantir l’efficacité de la protection juridique des services à l’accès conditionnel sur le territoire de[s] parties [contractantes] » et, par conséquent, « contribu[ai]ent […] à l’objectif principal de la décision attaquée, lu en combinaison avec la convention » (336).

440. Enfin, je ne considère pas que l’Union jouit d’une compétence exclusive en matière de politique commerciale commune uniquement lorsqu’elle dispose des compétences correspondantes sur le marché intérieur et qu’elle a exercé ces compétences internes (pour harmoniser ce marché). Cela reviendrait à interpréter l’article 3, paragraphe 1, sous e), et l’article 207, paragraphe 1, TFUE comme comportant une condition du type de celle que la Cour a définie dans l’arrêt AETR (22/70, EU:C:1971:32). Néanmoins, la politique commerciale commune comporte une composante interne et une composante externe. L’Union peut exercer sa compétence en matière de politique commerciale commune sans qu’il faille se demander si elle dispose d’une compétence interne sur une autre base et si elle a exercé cette compétence. Conformément à l’article 3, paragraphe 1, TFUE, la compétence exclusive dont jouit l’Union pour cette politique ne dépend pas des conditions énoncées à l’article 3, paragraphe 2, TFUE (337).

 Sur la compétence de l’Union en ce qui concerne le chapitre 11 de l’ALEUES

441. Selon moi, le chapitre 11 vise à la fois les aspects commerciaux et les aspects non commerciaux de la propriété intellectuelle.

442. L’examen de l’article 11.1.1 et 2 de l’ALEUES montre qu’une protection adéquate et effective des droits de propriété intellectuelle est considérée comme un instrument permettant d’augmenter les bénéfices des échanges commerciaux et des investissements. À cette fin, le chapitre 11 instaure, pour l’essentiel, des normes minimales pour les réglementations nationales de propriété intellectuelle ainsi que des obligations en matière d’application effective de ces normes.

443. Ainsi, le chapitre 11 définit la portée de la protection pour chaque droit de propriété intellectuelle visé, fixe la durée de la protection et les moyens d’obtenir celle-ci, précise les formes de coopération et énonce toute une série d’obligations visant à assurer la protection juridique adéquate des droits visés à ce chapitre et leur mise en œuvre au moyen de mesures appropriées. Ce faisant, le chapitre 11 utilise en partie la technique (déjà utilisée dans l’accord ADPIC (338)) qui consiste à incorporer par référence des normes matérielles concernant la propriété intellectuelle qui figurent dans des accords internationaux conclus en dehors du contexte de l’ALEUES.

444. Selon moi, le fait que le chapitre 11 incorpore par référence des parties de l’accord ADPIC ainsi que d’autres accords internationaux conclus en dehors du contexte de l’OMC après l’entrée en vigueur de l’accord ADPIC et de décisions de l’OMC, au lieu de citer ces instruments mot pour mot (339), ne saurait affecter l’allocation des compétences. Dans un cas comme dans l’autre, la source des droits et obligations des parties à l’ALEUES est l’ALEUES lui-même. En effet, j’observe que le fait que les auteurs de l’accord ADPIC aient eu recours au procédé d’incorporation n’a pas empêché la Cour de conclure, dans son arrêt Daiichi (C‑414/11, EU:C:2013:520), que l’Union était compétente pour conclure cet accord.

445. Contrairement à la Commission, je ne fais donc aucune distinction entre les dispositions du chapitre 11 qui incorporent par référence d’autres accords internationaux (ou partie de ceux-ci) et celles qui se réfèrent à de tels accords sans rendre leurs dispositions obligatoires conformément à l’ALEUES. La compétence que l’article 207 TFUE confère à l’Union est celle de définir et de mettre en œuvre la politique commerciale commune. L’Union peut le faire en négociant et en concluant des accords internationaux. Les objectifs de la politique commerciale commune et de l’action externe en général peuvent être atteints de nombreuses façons, qui ne débouchent pas toutes nécessairement sur des obligations assorties d’effets juridiques contraignants. Comme la Cour l’a déclaré dans l’affaire C‑660/13 à propos d’un protocole d’accord, « une décision portant signature d’un accord non contraignant […] fait partie des actes de définition des politiques de l’Union » (340).

446. À mon avis, les conclusions auxquelles la Cour est parvenue dans son arrêt Daiichi (341) s’appliquent également au chapitre 11 dans la mesure où il incorpore le contenu de l’accord ADPIC en ce qui concerne les droits de propriété intellectuelle visés dans ce chapitre (à savoir le droit d’auteur et les droits connexes, les brevets, les marques de fabrique ou de commerce, les dessins et modèles, les schémas de configuration de circuits intégrés, les indications géographiques et la protection des renseignements non divulgués).

447. Je ne vois, en principe, aucune raison d’adopter une conclusion différente en ce qui concerne les autres dispositions sur le niveau minimal de protection de la propriété intellectuelle pour autant qu’elles aient trait à la protection d’intérêts économiques résultant d’un droit de propriété intellectuelle et aux mesures destinées à assurer leur respect. La politique menée utilise des normes minimales de protection des intérêts économiques ancrés dans la propriété intellectuelle afin de promouvoir les investissements, de réduire les obstacles aux échanges commerciaux, de faciliter le commerce international et de garantir une certaine égalité des conditions de concurrence. Tout cela fait partie d’une politique commerciale.

448. Alors que les droits d’obtention végétale ne sont pas couverts par l’accord ADPIC, il me semble que le chapitre 11 [article 11.35, sous g) de l’ALEUES, dans lequel les parties réaffirment leurs obligations au titre de la convention internationale pour la protection des obtentions végétales (342)], devrait être examinée de la même manière. La raison en est que les droits d’obtention végétale sont des droits économiques, à savoir le droit pour un obtenteur d’autoriser, notamment, pour une variété protégée, la production ou la reproduction, les conditions de multiplication, l’offre à la vente, la vente ou toute autre forme de commercialisation, l’exportation, l’importation et la détention (343).

449. Je peux comprendre les objections à la compétence exclusive de l’Union en ce qui concerne l’article 61 de l’accord ADPIC. Néanmoins, il me semble que le chapitre 11 n’incorpore pas effectivement l’article 61 de l’accord ADPIC. Le texte du chapitre 11 ne se réfère pas expressément à cette disposition. Il ne contient pas davantage une section concernant les mesures pénales. Lorsque ce chapitre incorpore l’accord ADPIC pour certains droits de propriété intellectuelle, j’interprète cette référence croisée comme se rapportant aux « Normes concernant l’existence, la portée et l’exercice des droits de propriété intellectuelle » inscrites dans la partie II de l’accord ADPIC plutôt qu’aux dispositions concernant les « moyens de faire respecter les droits de propriété intellectuelle » prévues dans la partie III de l’accord ADPIC. En effet, le chapitre 11 contient sa propre section distincte sur les moyens (de droit civil) de faire respecter les droits de propriété intellectuelle.

450. Les dispositions concernant la transparence, la protection effective des droits garantis et les moyens de faire respecter des obligations font partie intégrante de la politique commerciale commune de l’Union. C’est la raison pour laquelle je considère que les parties du chapitre 11 concernant les moyens de droit civil de faire respecter les droits de propriété intellectuelle et les mesures frontalières relèvent également de la politique commerciale commune (344). Il en va de même de dispositions telles que l’article 11.52, qui prévoit des formes de coopération internationale (345).

451. Toutefois, le chapitre 11 de l’ALEUES semble également couvrir les aspects non commerciaux de la propriété intellectuelle.

452. Contrairement à l’accord ADPIC (346), l’article 11.4 de l’ALEUES (concernant la protection octroyée au droit d’auteur et aux droits connexes) incorpore tous les droits et obligations prévus par la convention de Berne. Il inclut donc l’article 6 bis de cette convention, qui protège les droits moraux. L’article 6 bis lui‑même fait une distinction entre les droits moraux et les droits économiques d’un auteur.

453. L’article 11.4 incorpore également dans l’ALEUES la totalité du traité de l’OMPI sur le droit d’auteur et du traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes. L’article 3 du premier des deux impose aux parties contractantes l’obligation d’appliquer les dispositions des articles 2 à 6 de la convention de Berne en ce qui concerne la protection prévue par le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur. L’article 5, paragraphe 1, du second désigne certains droits moraux dont jouit un interprète ou exécutant.

454. J’ai déjà souligné le rôle distinct, et important, que jouent les droits moraux (347). Ce rôle est clairement reconnu dans l’ALEUES. Néanmoins, de tels droits sont aussi manifestement non commerciaux. J’en conclus donc que, dans la mesure où le chapitre 11 s’applique à des aspects non commerciaux de la propriété intellectuelle, la compétence de l’Union pour conclure ces parties de ce chapitre ne peut pas être fondée sur l’article 207, paragraphe 1, TFUE.

455. La Commission n’a pas tenté de prétendre que l’Union jouit néanmoins d’une compétence externe exclusive sur la base d’un des cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE.

456. Comme les droits moraux sont indépendants des droits économiques de la propriété intellectuelle (et s’appliquent tout autant que ceux‑ci) (348), je considère que, dans la mesure où elles s’appliquent aux aspects non commerciaux des droits de propriété intellectuelle, des dispositions telles que celles du chapitre 11 de l’ALEUES peuvent être considérées comme nécessaires à la réalisation des objectifs du marché intérieur. Le fait qu’il pourrait ne pas (encore) y avoir d’harmonisation des droits moraux n’infirme aucunement cette conclusion (349). Ces aspects du chapitre 11 de l’ALEUES relèvent dès lors de la compétence partagée de l’Union et des États membres sur la base de l’article 4, paragraphe 2, sous a), et de l’article 26, paragraphe 1, TFUE ainsi que du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE.

 Sur la concurrence et les questions connexes (chapitre 12 de l’ALEUES (350))

 Arguments

457. La Commission soutient que le chapitre douze vise essentiellement à promouvoir et à faciliter le commerce des biens et services entre l’Union et la République de Singapour. Ce chapitre a pour objet d’interdire les pratiques anticoncurrentielles transnationales susceptibles d’entraver l’accès effectif aux marchés ou de réduire les bénéfices économiques de la libéralisation commerciale que l’ALEUES entend réaliser. En outre, le chapitre 12 n’entraîne aucune harmonisation et se réfère expressément au rapport entre comportement anticoncurrentiel et commerce international. Il a donc des effets directs et immédiats sur les échanges commerciaux et relève entièrement du champ d’application de la compétence exclusive que l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union. La Commission se réfère également à plusieurs accords de l’OMC qui incorporent des éléments de politique de la concurrence.

458. Les autres parties n’ont présenté aucun argument spécifique sur le chapitre 12.

 Analyse

459. Je suis d’accord avec la Commission que le lien entre le commerce international et la politique de la concurrence apparaît déjà dans certaines dispositions d’accords de l’OMC (351). Cela étant dit, l’OMC n’a encore adopté aucune politique globale en matière de concurrence et de commerce (352).

460. En revanche, le chapitre 12 de l’ALEUES a pour objet de s’attaquer en profondeur aux effets délétères que des comportements ou pratiques anticoncurrentiels du secteur public ou du secteur privé pourraient avoir sur le commerce entre l’Union et la République de Singapour. C’est la raison pour laquelle il impose aux parties l’obligation de maintenir et d’appliquer sur leur territoire respectif une législation complète lui permettant de lutter efficacement contre les accords entre entreprises, les abus de position dominante et les concentrations entre entreprises qui entraînent une diminution significative de la concurrence ou entravent considérablement une concurrence effective, qui affectent le commerce entre elles (353). Ces types de comportements anticoncurrentiels sont considérés comme susceptibles de saper les bénéfices de la libéralisation commerciale que l’ALEUES a pour objet de mettre en place soit en rendant les règles d’accès aux marchés inopérantes, soit en réduisant les bénéfices économiques que les entreprises d’une partie peuvent espérer obtenir en commercialisant leurs marchandises ou services sur le territoire de l’autre partie (354).

461. Le chapitre 12 est également directement lié à la régulation des échanges commerciaux dans la mesure où il vise à limiter les distorsions de concurrence résultant de la possibilité pour chaque partie de créer ou de conserver des entreprises publiques ou de conférer des droits spéciaux ou exclusifs à des entreprises (355) et il réglemente les subventions prohibées ou autres (356).

462. L’article 12.7.2 de l’ALEUES illustre ce rapport entre le chapitre 12 et le commerce international. Cette disposition, qui incorpore également l’article 3 de l’accord SMC (sur les subventions prohibées) (357), interdit l’octroi de certaines catégories de subventions « à moins que la partie qui accorde les subventions n’ait démontré, à la demande de l’autre partie, que les subventions en question n’ont pas d’incidence sur le commerce de l’autre partie ni ne sont susceptibles d’en avoir » (358). De même, l’article 12.8.1 de l’ALEUES impose aux parties de « tout mettre en œuvre » pour lutter contre les distorsions de concurrence causées par d’autres subventions spécifiques liées au commerce des marchandises et des services « dans la mesure où elles ont ou sont susceptibles d’avoir une incidence sur le commerce de l’une ou l’autre partie » et pour empêcher de telles distorsions.

463. Le fait que le chapitre 12 entraîne un certain degré d’harmonisation des règles de concurrence ne signifie pas que son objectif est de rapprocher les législations des États membres dans ce domaine afin d’améliorer le fonctionnement du marché intérieur. Bien plutôt, le chapitre 12 étend le champ d’application de certaines des règles et principes de base du droit de la concurrence de l’Union à la République de Singapour afin de réguler les échanges commerciaux de biens et de services avec ce pays tiers (359). Ces règles incluent les articles 101 et 102 TFUE, qui condamnent les accords et pratiques concertées entre entreprises et les abus de position dominante sur un marché, ainsi que le règlement (CE) no 139/2004 du Conseil relatif au contrôle des concentrations entre entreprises (360). De même, les dispositions de l’ALEUES sont l’expression de l’article 106 TFUE (qui concerne les entreprises publiques, les entreprises auxquelles les États membres accordent des droits spéciaux ou exclusifs et les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général) et des articles 107 à 109 TFUE (qui visent à empêcher les distorsions de la concurrence résultant d’aides d’État).

464. Il est vrai que le chapitre douze contient également des dispositions concernant la coopération et la coordination dans l’application de la législation, la protection des secrets d’affaires et autres informations confidentielles, la concertation entre les parties en matière de concurrence et l’exclusion de l’application des chapitres 15 (« Règlement des différends ») et 16 (« Mécanisme de médiation ») à toute question relative au chapitre 12 (à l’exception de l’article 12.7 de l’ALEUES sur les subventions prohibées). Ces dispositions sont toutes accessoires par rapport aux obligations matérielles principales énoncées au chapitre 12. Elles n’entament donc aucunement ma conclusion que le chapitre 12 vise à promouvoir, faciliter ou réglementer les échanges et qu’il a donc des effets directs et immédiats sur le commerce des marchandises et des services.

465. En ce qui concerne la disposition sur la transparence dans le domaine des subventions liées au commerce des marchandises et à la fourniture de services (article 12.9 de l’ALEUES), je renvoie à mon analyse du chapitre 14 et des dispositions relatives à la transparence qui figurent dans d’autres chapitres (361).

466. C’est la raison pour laquelle je conclus que le chapitre 12 relève entièrement du champ d’application de la compétence exclusive que l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union.

 Sur les obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable (chapitre 7 de l’ALEUES (362)) ainsi qu’au commerce et développement durable (chapitre 13 de l’ALEUES (363))

 Arguments

 Sur les obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable

467. La Commission soutient que l’Union possède une compétence exclusive pour le chapitre 7 en vertu de l’article 207, paragraphe 1, TFUE. D’une part, ce chapitre exige la suppression ou la réduction des obstacles au commerce (tant tarifaires que non tarifaires) et aux investissements ainsi qu’une convergence réglementaire destinée à faciliter les échanges. D’autre part, il présente également des liens avec les investissements étrangers directs : il interdit aux parties d’exiger la constitution de partenariats avec des sociétés locales.

468. Le Parlement et le Conseil n’ont présenté aucun argument spécifique concernant le chapitre 7.

469. Certains États membres prétendent que le chapitre 7 a pour objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre en promouvant la production d’énergie renouvelable et qu’il est donc lié à la politique de l’environnement (article 191 TFUE) plutôt qu’à la politique commerciale commune.

 Sur le commerce et le développement durable

470. La Commission affirme que, conformément à l’article 3, paragraphe 1, sous e), et à l’article 207, paragraphe 1, TFUE, le chapitre 13 relève entièrement de la compétence exclusive de l’Union. La compétence en matière de politique commerciale commune ne se limite pas à l’adoption d’instruments qui n’ont d’effet que sur les aspects traditionnels du commerce extérieur. Des divergences de niveau de protection de l’environnement et du travail entre États peuvent avoir des effets directs et immédiats sur le commerce international et les investissements. Des normes de protection moins strictes chez l’une des parties peuvent favoriser le commerce et les investissements sur son territoire. Inversement, des normes en matière d’environnement et de travail peuvent devenir des obstacles occultes aux échanges commerciaux. Ainsi qu’il apparaît de l’article 13.1.1 de l’ALEUES notamment, l’ALEUES vise à développer et à promouvoir le commerce international de manière à contribuer au développement durable, qui comprend le développement économique, le développement social et la protection de l’environnement.

471. La Commission soutient que le chapitre 13 n’a pas pour objet de créer de nouvelles obligations matérielles en matière de protection du travail et de l’environnement, mais réaffirme uniquement certains engagements internationaux existants. Il est destiné à assurer que les conditions du commerce et des investissements ne sont pas détériorées en raison de différences de niveau de protection.

472. La Commission ne voit aucun conflit entre, d’une part, le chapitre 13 et, d’autre part, l’article 3, paragraphe 5, TUE ainsi que l’article 21, paragraphe 2, TUE. L’article 3, paragraphe 5, TUE impose à l’Union d’incorporer les préoccupations relatives au « développement durable de la planète » et au « commerce libre et équitable » dans sa politique commerciale commune. L’article 21, paragraphe 2, TUE inclut lui aussi plusieurs objectifs qui ont trait au développement durable.

473. La Commission soutient, en particulier, à propos de dispositions spécifiques du chapitre 13 que le fait qu’à l’article 13.3.3 de l’ALEUES, les parties s’engagent à mettre en œuvre de manière effective certains principes concernant les droits fondamentaux au travail ne permet pas de conclure que les États membres devraient participer à la conclusion de l’ALEUES. Cette disposition n’impose pas la manière spécifique dont la République de Singapour et les États membres doivent assurer la mise en œuvre effective des conventions de l’organisation internationale du travail (OIT) qu’ils ont ratifiées. De surcroît, l’article 13.6.2 et l’article 13.8, sous a), de l’ALEUES ne font que réaffirmer des engagements déjà pris. D’autres dispositions [telles que l’article 13.8, sous b) à d)] visent à éviter les effets de distorsion sur le commerce international et sont dès lors indissociablement liées à celui‑ci.

474. Le Parlement est, en substance, d’accord avec la Commission.

475. Le Conseil et plusieurs États membres estiment que, bien que le chapitre 13 présente un lien avec le commerce, il réglemente également des aspects du travail, de la protection de l’environnement et de la pêche qui n’ont aucun lien avec le commerce et qu’il vise à promouvoir le travail et la protection de l’environnement ainsi que la conservation des ressources marines vivantes conformément à la politique commune de la pêche. Ces dispositions du chapitre 13 ne peuvent pas être fondées sur l’article 207 TFUE. Le Conseil soutient également que les articles 13.3.3 et 4 de l’ALEUES entraînent une harmonisation minimale des législations des États membres dans des domaines dans lesquels les traités l’excluent. Si ces dispositions devaient faire partie de la politique commerciale commune, elles seraient incompatibles avec l’article 207, paragraphe 6, TFUE.

476. En outre, le Conseil et plusieurs États membres maintiennent que le chapitre 13 est manifestement distinct du reste de l’accord. En particulier, le système spécifique de règlement des différends qui s’applique à ce chapitre en serait la preuve (364).

477. Enfin, le Conseil prétend que la compétence exclusive qu’a l’Union de prendre des engagements en matière de commerce des produits de la pêche à l’article 13.8 de l’ALEUES résulte de l’article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE (conservation des ressources marines vivantes conformément à la politique commune de la pêche) plutôt que de l’article 3, paragraphe 1, sous e), TFUE (politique commerciale commune). L’article 13.8 aurait pour objet premier de garantir la conservation et la gestion des stocks halieutiques de manière durable et non de faciliter, de réguler ou de réglementer les échanges commerciaux.

 Analyse

 Sur les objectifs liés aux échanges et les objectifs non liés aux échanges : principes généraux

478. La politique commerciale commune doit être menée dans le cadre des principes et objectifs de l’action extérieure de l’Union (365), qui comporte l’élaboration de « mesures internationales pour préserver et améliorer la qualité de l’environnement et la gestion durable des ressources naturelles mondiales, afin d’assurer un développement durable » (366). C’est la raison pour laquelle je suis d’accord avec la Commission que les niveaux de protection de l’environnement démontrent l’existence de liens avec le commerce international. D’importantes disparités peuvent fausser la concurrence et le commerce ; des normes peu exigeantes sur un marché peuvent créer des avantages concurrentiels pour les entreprises nationales et donc attirer des investissements étrangers au détriment de marchés où les normes sont plus élevées. Inversement, les normes de protection de l’environnement peuvent être manipulées afin d’atteindre des objectifs protectionnistes (367). C’est pour ces raisons que la promotion du développement durable fait partie des objectifs énoncés dans le préambule de l’accord OMC (368). Un raisonnement similaire pourrait s’appliquer à la relation entre la protection du travail et le commerce international.

479. Néanmoins, le fait que la politique commerciale commune puisse également poursuivre des objectifs étrangers au commerce ne signifie pas que les chapitres 7 à 13 relèvent automatiquement du champ d’application de l’article 207, paragraphe 1, TFUE.

480. La Cour a déjà fourni certaines lignes directrices sur la manière de faire la distinction entre les mesures relevant du champ d’application de la politique commerciale commune (en ce qu’elles ont essentiellement pour objet de promouvoir, faciliter ou régir les échanges et ont donc des effets directs et immédiats sur ceux-ci) (369) et les mesures relatives aux politiques de l’Union en matière d’environnement et en matière sociale.

481. Ainsi la Cour a admis que les actes de l’Union qui poursuivent également des objectifs qui ne sont pas purement économiques (par exemple, des objectifs sociaux, écologiques ou humanitaires) peuvent relever du champ d’application de la politique commerciale commune (370). Dans tous les cas, les accords internationaux en cause impliquaient cependant des instruments de politique commerciale : des arrangements commerciaux de stockage dans l’avis 1/78 ; l’octroi de préférences tarifaires dans l’affaire 45/86 ; l’importation (conditionnelle) de produits agricoles dans l’affaire C‑62/88 et des exigences en matière d’étiquetage (c’est‑à‑dire des obstacles techniques aux échanges commerciaux) dans l’affaire C‑281/01. Tous ces instruments avaient des effets directs et immédiats sur le commerce des produits et services concernés.

482. En revanche, des accords internationaux qui ne présentent pas un lien spécifique avec le commerce ne relèvent pas de la politique commerciale commune même s’ils ont un lien indirect avec le commerce. C’est ainsi que, dans son avis 2/00, la Cour a tenu compte du fait que les règles concernant les mouvements transfrontaliers d’organismes vivants modifiés qui sont énoncées dans le protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques, qui est annexé à la convention sur la diversité biologique, ne se limitaient pas aux mouvements à objet commercial. Elle a donc conclu que l’objet ou l’élément principal de ce protocole était la protection de l’environnement plutôt que la politique commerciale commune (371). De la même manière, la Cour a confirmé, dans l’affaire C‑411/06 (372), que le règlement (CE) no 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006, concernant les transferts de déchets (373) avait pour objet non pas de définir les caractéristiques que doivent posséder les déchets pour circuler librement dans le marché intérieur ou dans le cadre des échanges commerciaux avec les pays tiers, mais de fournir un système harmonisé de procédures par lesquelles la circulation des déchets peut être limitée afin d’assurer une protection de l’environnement (374). Ce règlement était donc validement fondé sur les dispositions du traité concernant la protection de l’environnement.

483. C’est sur cette toile de fond que je vais examiner si les chapitres 7 et 13 relèvent en bloc de la politique commerciale commune.

 Sur les obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable

484. Le chapitre 7 de l’ALEUES a pour but de protéger l’environnement (et, à titre incident, la santé humaine) en « promouv[ant], développ[ant] et accro[issant] la production d’énergie à partir de sources non fossiles renouvelables et durables », et donc en réduisant les émissions de gaz à effet de serre (375). Néanmoins, son champ d’application est limité aux mesures « susceptibles d’avoir une incidence sur les échanges et les investissements entre les parties » en ce qui concerne la production d’énergie verte (376). Le point de savoir si l’article 207, paragraphe 1, TFUE confère à l’Union une compétence exclusive pour ce chapitre dépend du point de savoir si celui‑ci vise essentiellement à promouvoir, faciliter ou régir les échanges et s’il a donc des effets directs et immédiats sur le commerce (377).

485. Je considère que tel est le cas.

486. Les dispositions du chapitre 7 ont pour objet premier de réglementer les instruments de politique commerciale et d’éliminer les obstacles au commerce et aux investissements. C’est ainsi que l’article 7.4 vise à éliminer les obstacles au commerce et aux investissements susceptibles d’entraver la production d’énergie verte, par exemple, en interdisant les « prescriptions relatives à la teneur en éléments locaux » et la constitution obligatoire de partenariats avec des entreprises locales (378). De même, l’article 7.5 de l’ALEUES vise à supprimer les obstacles techniques au commerce de produits servant à la production d’énergie verte. Il est bien établi que les engagements internationaux visant à assurer que les règlements techniques et les normes ainsi que les procédures d’évaluation de la conformité aux règlements techniques et aux normes ne créent pas des obstacles non nécessaires au commerce international relèvent du champ d’application de la politique commerciale commune (379). Les articles 7.6 et 7.7 de l’ALEUES (qui concernent, respectivement, les exceptions ainsi que la mise en œuvre et la coopération) sont accessoires par rapport aux autres engagements résultant du chapitre 7 et ne sont dès lors pas décisifs pour déterminer si ce chapitre relève de la politique commerciale commune.

487. Il en résulte que le chapitre 7 vise à réguler et à faciliter les échanges liés à la production d’énergie verte et qu’il a donc des effets directs et immédiats sur le commerce. Ce chapitre relève dès lors entièrement de la compétence exclusive dont jouit l’Union en vertu de l’article 207, paragraphe 1, TFUE.

488. Cette conclusion n’est pas remise en question par l’objection qu’un État membre a soulevée à propos du chapitre 7, qui serait susceptible d’entamer le droit qu’a chaque État membre, conformément à l’article 194, paragraphe 2, second alinéa, TFUE, de déterminer les conditions d’exploitation de ses sources d’énergie, son choix entre différentes sources d’énergie et la structure générale de son approvisionnement énergétique. Comme l’indiquent les termes dans lesquels il est rédigé, l’article 194, paragraphe 2, TFUE a pour seul objet de clarifier l’étendue de la compétence qu’a l’Union d’adopter des instruments législatifs de mise en œuvre d’une politique énergétique. Il ne saurait dès lors limiter la portée autonome de la politique commerciale commune telle qu’elle est définie à l’article 207, paragraphe 1, TFUE.

 Sur le commerce et le développement durable

489. Certaines dispositions du chapitre 13 présentent manifestement un lien direct et immédiat avec la régulation des échanges. Ainsi, l’article 13.6.4 de l’ALEUES vise spécifiquement le problème des restrictions déguisées au commerce pouvant résulter de mesures de mise en œuvre d’accords multilatéraux en matière d’environnement. De même, l’article 13.12 de l’ALEUES a pour objet, en substance, d’empêcher qu’une partie ne renonce ou ne déroge à ses législations en matière de travail et d’environnement ou ne s’abstienne d’en assurer le respect effectif d’une manière qui affecte les échanges ou les investissements. D’autres exemples sont l’article 13.11.1 de l’ALEUES, qui vise spécifiquement à faciliter et à encourager le commerce et l’investissement dans les marchandises et services respectueux de l’environnement, et l’article 13.11.2, par lequel les parties s’engagent à s’employer tout particulièrement à faciliter la suppression des obstacles au commerce ou à l’investissement en ce qui concerne les marchandises et les services respectueux du climat.

490. Toutefois, bien que les parties déclarent leur intention de ne pas harmoniser leurs normes en matière de travail ou d’environnement (article 13.1.4 de l’ALEUES), un nombre significatif de dispositions du chapitre 13 ne subordonnent les échanges à aucune condition (en permettant à l’autre partie d’adopter des sanctions commerciales en cas de non-respect de pareilles conditions ou en subordonnant l’octroi d’un avantage commercial spécifique au respect des normes en matière de travail et d’environnement) ni ne réglementent d’une autre façon l’utilisation des instruments de politique commerciale en tant qu’un moyen de promouvoir le développement durable.

491. Ainsi, les articles 13.3.1, 13.3.3, 13.4, 13.6.2 et 13.6.3 de l’ALEUES visent essentiellement à la mise en place, dans l’Union et à Singapour, de normes minimales (respectivement) de protection du travail et de protection de l’environnement indépendamment de leurs éventuels effets sur les échanges. Ces dispositions se situent dès lors manifestement toutes en dehors du champ d’application de la politique commerciale commune. Contrairement aux clauses sur les « éléments essentiels » qui figurent dans certains accords commerciaux internationaux de l’Union (380), qui imposent une obligation de respect des principes démocratiques et des droits de l’homme, une violation des normes en matière de travail et d’environnement auxquelles se réfèrent ces dispositions de l’ALEUES ne confère pas à l’autre partie le droit de suspendre les avantages commerciaux résultant de l’ALEUES. Les articles 13.16 et 13.17 de l’ALEUES n’autorisent pas une partie à suspendre les concessions commerciales accordées à l’autre partie si celle‑ci ne respecte pas les engagements qu’elle a pris au chapitre 13 (381). En outre, contrairement au régime spécial d’encouragement en faveur du développement durable et de la bonne gouvernance prévu par le régime dit SPG + (382), ces dispositions ne visent pas non plus à accorder des concessions commerciales à la République de Singapour à condition qu’elle respecte ces normes.

492. L’article 13.8 de l’ALEUES concerne le commerce des produits de la pêche. J’admets que l’obligation que l’article 13.8, sous b), faite aux parties d’instaurer des mesures efficaces de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée peut, notamment, déboucher sur l’adoption d’instruments de politique commerciale commune ou inclure une action visant à éliminer l’utilisation de tels instruments (comme des subventions contribuant à la surpêche et à la surcapacité, et qui sont liées à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée). Cette disposition mentionne également des exemples de pareilles mesures.

493. En revanche, les autres points de l’article 13.8 de l’ALEUES visent essentiellement à contribuer à la conservation et à la gestion des stocks halieutiques de manière durable par les parties. Par exemple, à l’article 13.8, sous a), de l’ALEUES, les parties s’engagent, en termes généraux, à respecter les mesures de conservation à long terme et à pratiquer une exploitation durable des stocks halieutiques telle que définie dans les instruments internationaux qu’elles ont ratifiés et à défendre les principes de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et les instruments pertinents des Nations unies relatifs à ces questions. Le respect de ces normes n’est pas une condition préalable de l’obtention d’avantages commerciaux. Le non-respect de ces engagements n’entraîne pas non plus une suspension des concessions commerciales prévue par l’ALEUES (383). Pareillement, l’article 13.8, sous c) et d), de l’ALEUES ne présente aucun lien direct et immédiat avec le commerce international. Il ne relève donc pas de la politique commerciale commune.

494. Quelles sont les implications en ce qui concerne la compétence ?

495. Selon moi, l’article 3, paragraphe 5, et l’article 21 TUE ainsi que les articles 9 et 11 TFUE, auxquels la Commission se réfère, ne sont pas pertinents aux fins de résoudre la question de la compétence. Ces dispositions ont pour objet d’imposer à l’Union de contribuer à la réalisation de certains objectifs dans ses politiques et activités. Elles ne peuvent pas affecter la portée de la politique commerciale commune visée à l’article 207 TFUE. Pour la même raison, le point de savoir si, comme le soutient la Commission, les droits fondamentaux auxquels l’article 13.3.3 de l’ALEUES se réfère sont compatibles avec les normes universelles en matière de travail protégées par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») est sans incidence. Cet argument porte sur la compatibilité matérielle de l’ALEUES avec les droits fondamentaux. Il ne saurait modifier la portée de la compétence de l’Union (384).

496. Je n’accepte pas non plus l’argument de la Commission, qui affirme, en substance, que les articles 13.3.3 et 13.6.2 de l’ALEUES ne sont pas « suffisamment contraignants » pour être pris en considération dans l’examen de la répartition des compétences entre l’Union et les États membres en ce qui concerne le chapitre 13. La Commission se fonde en cela sur l’affaire C‑377/12 (385), dans laquelle la Cour a jugé que les dispositions relatives à la réadmission, aux transports et à l’environnement de l’accord‑cadre de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République des Philippines, d’autre part (386), ne « cont[enaient] pas d’obligations d’une portée telle qu’il puisse être considéré qu’elles constituent des objectifs distincts de ceux de la coopération au développement, qui ne soient ni seconds ni indirects par rapport à ces derniers » (387). Comme la migration, les transports et l’environnement font partie intégrante de la politique de développement de l’Union, exiger qu’un accord de coopération au développement incluant ces matières soit fondé sur des parties des traités autres que les dispositions concernant la politique du développement aurait pour effet pratique de priver de substance la compétence et la procédure prévues dans cette disposition (388). En revanche, aucun des droits fondamentaux en vigueur ni aucune norme de protection de l’environnement ne font partie intégrante de la politique commerciale commune. L’affaire C‑377/12 n’est dès lors pas d’un grand secours dans l’examen du chapitre 13 de l’ALEUES.

497. Selon moi, le chapitre 13 est composé de quatre éléments. Le premier comporte les dispositions relevant de la politique commerciale commune. Les deuxième et troisième éléments comprennent les dispositions concernant, respectivement, les normes de protection du travail et les normes de protection de l’environnement. Le quatrième élément concerne la conservation à long terme et la gestion durable des stocks halieutiques.

498. Aucun de ces éléments ne peut être considéré simplement comme un ajout nécessaire pour assurer l’efficacité des autres éléments de l’ALEUES ou du chapitre 13 ni être considéré comme ayant une portée extrêmement limitée. En particulier, je ne peux pas accepter l’argument de la Commission selon lequel l’article 13.6.2 de l’ALEUES (qui exige la mise en œuvre efficace des accords multilatéraux en matière d’environnement auxquels l’Union et la République de Singapour sont parties) n’implique aucune nouvelle obligation pour les parties. Il est vrai que cette disposition se réfère uniquement aux engagements multilatéraux que les parties avaient pris auparavant en matière de protection de l’environnement. Néanmoins, elle a pour effet d’incorporer ces engagements dans l’ALEUES et, donc, de les rendre applicables dans les relations entre l’Union et la République de Singapour sur la base de l’ALEUES. L’article 13.6.2 créé donc manifestement une nouvelle obligation pour les parties, obligation dont l’exécution forcée peut être obtenue conformément à l’ALEUES.

499. Il en résulte que la décision de l’Union de prendre des engagements pour chacun des quatre éléments du chapitre treize doit être fondée sur une base juridique distincte.

500. En ce qui concerne le premier élément, la compétence exclusive de l’Union résulte de l’article 3, paragraphe 1, sous e), et de l’article 207, paragraphe 1, TFUE. Conformément à l’article 3, paragraphe 1, sous d), et à l’article 43, paragraphe 2, TFUE (389), le quatrième élément relève de la compétence exclusive de l’Union en matière de conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la politique commune de la pêche.

501. En revanche, les deuxième et troisième éléments relèvent en principe de la compétence partagée de l’Union.

502. Les dispositions concernant les normes de protection du travail (deuxième élément) peuvent être considérées comme étant nécessaires à la réalisation des objectifs de politique sociale énoncés à l’article 151 TFUE qui sont liés, en particulier, à ceux dont la liste figure à l’article 53, paragraphe 1, sous a), b) et c), TFUE (amélioration du milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité de travailleurs, conditions de travail, sécurité sociale et protection sociale des travailleurs). L’Union dispose donc d’une compétence partagée pour cet élément en application de l’article 4, paragraphe 2, sous b), de l’article 151 et de l’article 153, paragraphe 1, TFUE ainsi que du second cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE.

503. Pour ce qui est des dispositions concernant les normes de protection de l’environnement (troisième élément), il suffit de noter que l’Union est, conformément à l’article 191, paragraphe 1, TFUE, compétente pour mener une politique de l’environnement visant à préserver, à protéger et à améliorer la qualité de l’environnement. La compétence externe de l’Union en matière de politiques de l’environnement, qui résulte à la fois de l’article 191, paragraphe 4, TFUE (390) et du premier cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, est partagée avec les États membres en vertu de l’article 4, paragraphe 2, sous e), TFUE.

504. La Commission n’a pas prétendu que l’Union dispose d’une compétence externe exclusive pour les deuxième et troisième éléments sur la base de l’article 3, paragraphe 2, TFUE. Il n’appartient dès lors pas à la Cour d’examiner si le troisième cas de figure visé dans cette disposition pourrait plausiblement s’appliquer à ces éléments (391).

 Sur la transparence et le contrôle administratif et judiciaire des mesures d’application générale (chapitre 14 de l’ALEUES (392) et dispositions connexes d’autres chapitres (393))

 Arguments

505. La Commission soutient que le chapitre 14 relève de la compétence exclusive de l’Union en matière de politique commerciale commune i) parce que ce chapitre a pour objectif de faciliter le commerce et les investissements ; ii) parce que ses dispositions s’appliquent uniquement aux mesures concernant des matières couvertes par d’autres chapitres de l’ALEUES et iii) parce que ses dispositions visent à clarifier et à améliorer des dispositions existantes d’accords de l’OMC, en particulier l’article X du GATT de 1994. En outre, ces dispositions reflètent également des considérations de base en matière de traitement équitable qui font partie des principes généraux du droit de l’Union.

506. Ni le Parlement ni le Conseil n’ont présenté d’arguments spécifiques concernant le chapitre 14.

507. Les États membres qui ont pris position sur le chapitre 14 sont peu nombreux. Les arguments mis en avant sont que, d’une part, le chapitre 14 concerne l’exercice de l’administration nationale, le recours aux procédures administratives et la protection juridictionnelle à l’égard des mesures administratives et, d’autre part, que l’argument de la Commission présuppose que l’Union dispose d’une compétence exclusive pour toutes les autres parties de l’ALEUES. Dans la mesure où le chapitre 14 vise à donner effet à d’autres parties de l’ALEUES pour lesquelles la compétence de l’Union n’est pas exclusive, cependant, il ne peut pas relever de la compétence exclusive de l’Union. Les dispositions du chapitre quatorze elles-mêmes ne concernent pas spécifiquement le commerce international. Enfin, les matières concernant la justice qui sont visées aux articles 14.5 et 14.6 de l’ALEUES ne relèvent ni de la compétence exclusive de l’Union ni de sa compétence partagée : elles ne font pas partie du champ d’application de l’article 81, paragraphe 2, TFUE (qui concerne la coopération judiciaire dans les matières civiles).

 Analyse

508. Le chapitre 14 crée des obligations de transparence, de consultation et de meilleure administration qui s’appliquent aux lois, aux règlements, aux décisions judiciaires, aux procédures et décisions administratives susceptibles d’avoir une incidence sur toute question visée par l’ALEUES (qu’il désigne comme étant des « mesures d’application générale ») (394). Les parties ont inclus ce chapitre dans l’ALEUES en particulier en raison de l’incidence que leurs environnements réglementaires respectifs peut avoir sur les échanges commerciaux et les investissements entre elles (395). Les obligations imposées dans le chapitre 14 s’appliquent en sus d’obligations similaires, poursuivant des objectifs analogues, qui figurent dans d’autres chapitres de l’ALEUES (396).

509. Le chapitre 14 s’applique donc horizontalement à tous les chapitres de l’ALEUES et uniquement en ce qui concerne les matières régies dans ces chapitres. C’est pourquoi je considère que l’objet principal du chapitre 14 n’est pas de réglementer les procédures administratives et la protection juridictionnelle en tant que telles. Les obligations qu’il énonce ne s’imposent que lorsque des mesures d’application générale ont un impact sur des matières couvertes par l’ALEUES. Elles ont pour objectif et pour fonction de rendre effective et opérationnelle la réglementation des questions matérielles couvertes par l’ALEUES, et d’en permettre l’exécution forcée (397). Les dispositions du chapitre 14 (et les dispositions plus spécifiques concernant les mêmes matières qui figurent dans d’autres chapitres) ne s’appliquent pas de façon indépendante. Elles sont, par nature, accessoires ; dans le même temps, cependant, elles sont essentielles au fonctionnement harmonieux de l’ALEUES.

510. En outre, la transparence, la consultation et l’administration de mesures d’application générale dans des matières relevant de la politique commerciale commune sont essentielles pour réduire ou éviter les obstacles au commerce. En effet, un manque de transparence, d’équité et de sécurité juridique peut en lui‑même constituer un obstacle au commerce (398). Si les commerçants et les investisseurs ne se voient pas accorder un traitement équitable et si aucune garantie n’est mise en place pour assurer que ces commerçants et investisseurs ainsi que les gouvernements se familiarisent avec les mesures d’application générale en matière de commerce et d’investissement, et s’y adaptent, les bénéfices de la libéralisation commerciale résultant des règles de fond inscrites dans l’ALEUES pourraient être perdus. De surcroît, les conditions de concurrence pourraient être affectées si ces mesures ne sont pas appliquées en pratique ou, en l’absence de sauvegardes suffisantes, si des transactions spécifiques ne peuvent pas se concrétiser dans les faits. Les commerçants pourraient renoncer au commerce ou aux investissements, ou leurs transactions pourraient être retardées ou rendues plus onéreuses.

511. Dans ce contexte, il me semble que la politique commerciale commune couvre les règles et les décisions concernant la publication et l’administration ainsi que le contrôle administratif et judiciaire des mesures d’application générale qui ont un impact sur des matières couvertes par l’ALEUES qui sont spécifiquement liées au commerce international ou aux investissements. Si des obligations dans ce domaine ne s’appliquent pas au contenu matériel de ces mesures, elles sont, de la même manière que des obligations matérielles, essentielles à la réalisation de l’objectif de promotion et de facilitation du commerce et des investissements, et elles ont des effets directs et immédiats sur le commerce.

512. Selon moi, ces obligations remplissent une fonction similaire dans le contexte de politiques extérieures autres que la politique commerciale commune qui sont pertinentes en ce qui concerne les matières couvertes par l’ALEUES. Lorsque l’Union conclut avec des pays tiers des accords concernant d’autres matières relevant de sa compétence partagée ou exclusive (notamment les transports, la protection de l’environnement ou la promotion des investissements de portefeuille), la compétence de l’Union doit comprendre le pouvoir de décision à l’égard de dispositions visant à assurer l’efficacité des engagements qu’elle contracte. C’est ainsi que les engagements matériels concernant la protection de l’environnement pourraient être vidés de leur substance si un pays tiers devait refuser aux citoyens de l’Union tout accès à un contrôle juridictionnel des mesures écologiques d’application générale, alors que, dans des circonstances comparables, ses propres ressortissants disposent d’un tel contrôle juridictionnel.

513. C’est pourquoi je considère que la répartition des compétences en matière de dispositions concernant la transparence ainsi que le contrôle administratif et judiciaire de mesures d’application générale (figurant au chapitre 14 ou dans d’autres chapitres) doit suivre la répartition des compétences matérielles.

 Sur le règlement des différends et la médiation (chapitre 9, section B (399), ainsi que chapitres 13, 15 et 16 de l’ALEUES (400))

 Arguments

514. La Commission soutient que l’Union a une compétence exclusive pour toutes les dispositions concernant le règlement des différends entre investisseurs et États (mécanisme RDIE) du chapitre 9, section B. Cette compétence résulte nécessairement de la compétence pour les dispositions matérielles de l’accord qui sont appliquées et interprétées lorsque le mécanisme RDIE est déclenché. Cela signifie également qu’en principe, l’Union est seule responsable, au regard du droit international, pour toute violation de ces dispositions. L’Union peut décider, au regard du droit de l’Union, de répartir la responsabilité financière liée au mécanisme RDIE entre l’Union et les États membres, et d’habiliter ceux‑ci à agir en tant que défendeurs (et donc, le cas échéant, à supporter la responsabilité financière) lorsqu’ils sont responsables du traitement contesté, à moins que ce traitement soit requis par le droit de l’Union. Tel est précisément l’objet du règlement (UE) no 912/2014 (401), qui s’applique à tous les accords auxquels l’Union est partie et qui prévoit un mécanisme RDIE. Les règles de répartition que contient ce règlement s’appliqueraient lorsque l’Union détermine, conformément à l’article 9.15.2 de l’ALEUES, le défendeur dans un litige opposant un investisseur à un État.

515. La Commission n’a soulevé aucun argument spécifique concernant les articles 13.16 (« Consultations au niveau des pouvoirs publics ») et 13.17 (« Groupe d’experts ») de l’ALEUES.

516. Quant aux chapitres 15 (« Règlement des différends ») et 16 (« Mécanisme de médiation »), la Commission prétend qu’ils sont nécessaires pour assurer le respect effectif des droits et obligations institués par l’ALEUES, et s’alignent sur une pratique internationale établie. Comme l’Union jouit d’une compétence exclusive pour les parties de l’ALEUES auxquelles s’appliquent les chapitres 15 et 16, elle bénéficie d’une compétence exclusive pour ces chapitres également.

517. Le Parlement partage, en substance, la position de la Commission.

518. Le Conseil affirme que, comme l’Union n’a aucune compétence qui lui permettrait de légiférer en matière de protection diplomatique (article 9.28 de l’ALEUES), elle ne peut avoir en aucun cas la compétence exclusive de signer et de conclure l’ALEUES. Nonobstant l’article 23, paragraphe 1, TFUE, la décision d’accorder ou non la protection diplomatique dans un cas particulier appartient aux États membres. À titre subsidiaire, le Conseil soutient que la compétence de l’Union en ce qui concerne l’article 9.28 de l’ALEUES se limite aux différends impliquant des investissements étrangers directs.

519. Le Conseil n’a présenté aucun argument spécifique en ce qui concerne les chapitres 15 et 16.

520. Alors que la plupart des États membres qui ont présenté les observations écrites ont (abondamment) abordé le chapitre 9, section B, leurs observations sur les chapitres 15 et 16 sont bien plus limitées. Lors de l’audience, certains États membres ont concentré leur attention sur les dispositions de l’article 9.28 de l’ALEUES qui concernent la protection diplomatique.

521. En ce qui concerne le chapitre 9, section B, ils font valoir, tout d’abord, que, comme l’Union n’a pas de compétence exclusive pour d’autres types d’investissements que les investissements étrangers directs, elle ne peut pas avoir de compétence exclusive pour cette section, qui s’applique tant aux investissements étrangers directs qu’à d’autres types d’investissements. De surcroît, comme l’ALEUES prévoit un mécanisme RDIE dans lequel les États membres peuvent être désignés comme défendeurs, les lois constitutionnelles de certains États membres peuvent exiger d’eux qu’ils participent à la conclusion de cet accord.

522. Le Conseil et les États membres n’ont présenté aucun argument spécifique concernant les articles 13.16 et 13.17 de l’ALEUES, sinon qu’ils se sont fondés sur l’article 13.17 pour étayer leur position sur la compétence de l’Union concernant les dispositions matérielles du chapitre 13.

 Analyse

523. Selon moi, la répartition des compétences en ce qui concerne les mécanismes RDIE portant sur l’interprétation et l’application de diverses dispositions de l’ALEUES est accessoire par rapport à la répartition des compétences matérielles. Cela vaut tant pour le chapitre 15 que pour le chapitre 16, qui s’appliquent horizontalement, et pour d’autres chapitres qui prévoient des formes spécifiques de règlement des différends (ce qui est le cas du chapitre 9, section B, relatif aux investissements et du chapitre 13 relatif au commerce et au développement durable).

524. Cette répartition des compétences entre l’Union et les États membres est régie par les traités uniquement. Les règles légales internes, fussent-elles constitutionnelles, ne peuvent pas modifier cette répartition (402).

525. Il résulte des avis 1/91, 1/09 et 2/13 que, lorsque l’Union est compétente pour les dispositions matérielles d’un accord international, elle est également compétente en ce qui concerne les mécanismes RDIE, mécanismes qui ont pour objet d’assurer que ces dispositions sont effectivement respectées. De tels mécanismes ne font que contribuer à la réalisation des objectifs primaires de l’ALEUES et sont donc accessoires par rapport aux règles (matérielles) auxquelles ils se rapportent (403).

526. Cette conclusion s’applique aussi bien au mécanisme horizontal RDIE prévu dans le chapitre 15 qu’aux mécanismes analogues que le chapitre 9, section B, et le chapitre 13 instituent pour des matières spécifiques (404). Contrairement à certains États membres, je considère que le fait que le mécanisme RDIE confère à un investisseur d’une partie le droit d’engager une procédure d’arbitrage contre l’autre partie n’a, en soi, aucune incidence sur la répartition des compétences entre l’Union et les États membres. Ce trait est l’expression de la volonté des parties, qui ont opté pour ce type de règlement des différends en matière d’investissements plutôt que pour un mode de règlement d’État à État (ou une combinaison des deux mécanismes). Il concerne donc la manière dont la compétence externe est exercée plutôt que l’existence et la nature de cette compétence externe.

527. Le même raisonnement s’applique aux mécanismes de médiation tels que ceux qui sont prévus à l’annexe 9-E (spécifiquement pour les différends opposant un investisseur à un État) et au chapitre 16. Ils ont eux aussi pour objet d’assurer la mise en œuvre des dispositions de l’ALEUES auxquelles ils s’appliquent.

528. Ma conclusion n’est aucunement ébréchée par l’argument (soulevé par un État membre) selon lequel, comme l’article 9.16 de l’ALEUES prévoit une procédure d’arbitrage sous les auspices du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), l’Union ne peut pas être partie à la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre État et ressortissants d’autres États, qui a été signée à Washington le 18 mars 1965 (ci-après la « convention CIRDI »). Il est vrai que seuls des États peuvent devenir partie à cette convention (405). Néanmoins, la Cour a déjà dit pour droit qu’un obstacle de droit international à la capacité de l’Union d’adhérer à une convention internationale ne concerne pas l’étendue de la compétence externe de l’Union, qui doit s’apprécier au seul regard du droit de l’Union. Un tel obstacle n’empêche pas l’Union d’exercer sa compétence externe par le truchement de ses États membres agissant conjointement dans son intérêt (406). En tout état de cause, l’arbitrage du CIRDI n’est qu’un des mécanismes RDIE mentionnés à l’article 9.16 de l’ALEUES.

529. Comme les mécanismes RDIE et les mécanismes de médiation sont accessoires par nature, la répartition des compétences entre l’Union et ses États membres en ce qui concerne pareils mécanismes est nécessairement la même que celle qui régit les dispositions matérielles auxquelles ils ont trait.

530. C’est la raison pour laquelle je ne suis pas convaincue par l’argument selon lequel, en raison du fait que les États membres sont susceptibles d’être défendeurs dans un différend en matière d’investissements et de devoir, le cas échéant, supporter la charge financière résultant d’une décision clôturant un tel différend (407), l’Union ne peut pas avoir la compétence exclusive d’apporter son consentement concernant le chapitre 9, section B, de l’ALEUES.

531. Qui plus est, les règles de la répartition de la responsabilité financière entre l’Union et ses États membres qui sont énoncées dans le règlement no 912/2014 n’affectent pas la répartition des compétences prévue par les traités. La partie introductive de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 912/2014 dispose expressément que le règlement s’applique « [s]ans préjudice de la répartition des compétences établie par le [TFUE] » (408); et ce règlement lui-même doit respecter les règles du traité sur la compétence (409).

532. En tout état de cause, la Cour a déjà dit pour droit qu’en ce qui concerne la répartition des compétences entre l’Union et ses États membres en vue de la conclusion d’un accord international, le fait que les obligations et les charges financières inhérentes à l’exécution de l’accord soient supportées directement par les États membres n’a guère d’importance (410). Les mesures tant internes qu’externes prises par l’Union dans le cadre de ses compétences n’impliquent pas nécessairement un transfert aux institutions de l’Union des obligations et des charges financières qu’elles peuvent entraîner ; ces mesures ont uniquement pour but de substituer à l’action unilatérale des États membres une action commune, fondée sur des principes uniformes, pour l’ensemble de l’Union (411).

533. Selon moi, ce principe s’applique a fortiori aux charges financières imposées à un État membre à la suite de l’adoption, par un tribunal arbitral, d’une sentence finale concluant que cet État membre a appliqué des mesures incompatibles avec les règles de l’ALEUES sur la protection des investissements.

534. Par souci d’exhaustivité, j’ajouterai que, dans son avis 1/78, la Cour a dit, en substance, que, lorsqu’un accord international instaure un mécanisme de financement qui constitue « un trait essentiel » de cet accord, ce fait est à lui seul de nature à justifier la participation des États membres à sa conclusion dans la mesure où les charges financières qui en résultaient étaient directement imputées sur les budgets des États membres (412). Je ne considère pas que ce raisonnement s’applique aux charges financières qui peuvent résulter pour les États membres du mécanisme RDIE mis en place par l’ALEUES. Si elles devaient se présenter, de telles charges financières résulteraient de l’exécution incorrecte par un État membre des obligations que lui impose l’ALEUES. Elles ne sauraient dès lors pas être comparées à celles que la Cour a examinées dans l’avis 1/78.

535. Je conclus dès lors que l’Union est compétente pour donner son consentement aux mécanismes RDIE et de médiation prévus au chapitre 9, section B, et aux chapitres 13, 15 et 16 de l’ALEUES. Comme certaines dispositions de l’ALEUES auxquelles ces chapitres s’appliquent relèvent de la compétence partagée de l’Union, celle-ci partage cette compétence avec les États membres. Dans la mesure où l’Union jouit d’une compétence exclusive pour certaines dispositions de l’ALEUES, elle seule peut donner son consentement concernant le chapitre 9, section B, les articles 13.16 et 13.17, ainsi que pour les chapitres 15 et 16 de l’ALEUES.

536. Je voudrais souligner que ma conclusion concerne uniquement la compétence. Je n’ai pas examiné ni exprimé une quelconque opinion sur la compatibilité matérielle du chapitre 9, section B, avec les règles matérielles des traités. Cette question ne relève pas de la portée de la demande d’avis introduite par la Commission (413).

537. Enfin, je ne suis pas convaincue par l’argument que l’Union ne peut pas jouir d’une compétence exclusive concernant le chapitre 9, section B, à cause de l’article 9.28 de l’ALEUES. La principale objection soulevée à l’encontre de cette disposition est que l’Union n’a aucune compétence en matière de protection diplomatique.

538. Comme cette question ne présenterait une importance fondamentale que si la Cour devait juger que l’Union jouit d’une compétence exclusive pour toutes les autres parties de l’ALEUES, je présumerai, aux fins des observations qui vont suivre, que tel est le cas.

539. La protection diplomatique concerne les procédures suivant lesquelles le pays dont une personne lésée possède la nationalité invoque la responsabilité d’un autre État pour le dommage que l’action ou l’omission préjudiciables de ce second État a causé à l’un des ressortissants du premier en vue d’assurer la protection de ce ressortissant et d’obtenir réparation (414). Ou, comme la Cour permanente de justice internationale l’a formulé, « [e]n prenant fait et cause pour l’un des siens, en mettant en mouvement, en sa faveur, l’action diplomatique ou l’action judiciaire internationale, cet État fait, à vrai dire, valoir son droit propre, le droit qu’il a de faire respecter en la personne de ses ressortissants le droit international » (415). C’est une règle de droit coutumier international qu’avant qu’un État accorde la protection diplomatique à ses ressortissants lésés, ces ressortissants doivent avoir préalablement épuisés les recours internes (416).

540. Les particuliers ont progressivement obtenu davantage de droits individuels en droit international, y compris le droit d’invoquer des clauses de protection contre leur propre État ou des États d’accueil. Désormais, la protection diplomatique coexiste donc avec des moyens (tels que des mécanismes RDIE) qui permettent aux particuliers d’obtenir directement le respect de leurs droits propres (417). Selon la Commission de droit international, « [l]es procédures de règlement des différends offertes par les traités bilatéraux d’investissement et le CIRDI sont plus intéressantes pour l’investisseur étranger que le système de la protection diplomatique régi par le droit international coutumier, car elles donnent directement accès à l’arbitrage international, permettent d’éviter l’incertitude politique inhérente à la nature discrétionnaire de la protection diplomatique et ignorent les conditions auxquelles est soumis l’exercice de la protection diplomatique » (418).

541. La Commission a confirmé que l’article 9.28 de l’ALEUES est basé sur la convention CIRDI (419).

542. Selon moi, l’article 9.28 de l’ALEUES concerne le rapport entre, d’une part, la juridiction des tribunaux arbitraux au sens du chapitre 9, section B, (« Tribunal arbitral au sens du chapitre 9 de l’ALEUES ») et, d’autre part, d’autres juridictions (nationales ou internationales) et d’autres procédures permettant de mettre en cause la responsabilité d’une autre partie (article 9.28.1) et les groupes spéciaux d’arbitrage au sens du chapitre 15 de l’ALEUES (« Groupe spécial d’arbitrage au sens du chapitre 15 de l’ALEUES ») (article 9.28.2). Lorsqu’une partie et un investisseur d’une autre partie sont convenus de soumettre leur différend à l’arbitrage en application du chapitre 9, section B, ce différend ne peut (en principe) pas être soumis à la juridiction d’une autre cour ou d’un tribunal par le jeu soit de la protection diplomatique, soit d’un recours international. Deux exceptions s’appliquent : premièrement, lorsque la partie n’a pas respecté la sentence rendue par le tribunal arbitral au sens du chapitre 9 de l’ALEUES ou ne lui a pas donné effet (article 9.28.1) et, secondement, lorsqu’un groupe spécial d’arbitrage au sens du chapitre 15 de l’ALEUES est compétent pour régler un différend relatif à une mesure d’application générale (article 9.28.2).

543. À mon avis, lorsque des mécanismes RDIE ont trait à l’interprétation et à l’application de dispositions d’un accord international relevant de la compétence exclusive de l’Union, l’Union peut également statuer sur des clauses qui circonscrivent la juridiction (exclusive) de ces mécanismes.

544. Enfin, conformément à l’article 23, premier alinéa, TFUE, les autorités diplomatiques ou consulaires d’un État membre peuvent être invitées, dans certaines circonstances, à offrir leur protection à des ressortissants d’un autre État membre dans les mêmes conditions que celles qui s’appliquent à leurs propres ressortissants. Ainsi, le droit de l’Union élargit la catégorie des personnes qui peuvent bénéficier de la protection diplomatique offerte par un État membre. Ce sont normalement les États membres qui sont compétents pour décider d’accorder la protection diplomatique. Néanmoins, cette compétence doit être exercée conformément à la compétence que les traités confèrent à l’Union d’accepter la juridiction de mécanismes RDIE pour résoudre les conflits relatifs aux dispositions d’un accord international qui relève (en pareille hypothèse) de sa compétence exclusive.

 Sur les dispositions institutionnelles, générales et finales (chapitre 17 de l’ALEUES (420))

 Arguments

545. La Commission soutient que le chapitre 17 a pour objet de mettre en place un cadre institutionnel et procédural garantissant l’effectivité de l’ALEUES. Comme les dispositions du chapitre 17 sont dès lors accessoires par rapport au reste de l’ALEUES, l’Union jouit également d’une compétence exclusive pour ce chapitre. Cette conclusion s’applique également aux dispositions énonçant des exceptions concernant la fiscalité (article 17.6), le compte des transactions courantes et les mouvements de capitaux (article 17.7), les fonds souverains (article 17.8), les restrictions visant à préserver l’équilibre de la balance des paiements (article 17.9), la sécurité (article 17.10) et la divulgation de renseignements (article 17.11).

546. Ni le Parlement ni le Conseil n’ont pris position concernant le chapitre 17.

547. Seul un État membre s’est prononcé sur ce chapitre en indiquant que la Commission n’a fourni aucun élément qui démontrerait que l’article 17.6 de l’ALEUES porte spécifiquement sur le commerce international et qu’en tout état de cause, cette disposition va au-delà du champ d’application des compétences que les traités confèrent à l’Union dans les matières fiscales.

 Analyse

548. Les dispositions du chapitre 17 de l’ALEUES de nature purement procédurale ou institutionnelle sont des dispositions usuelles dans les accords (commerciaux) internationaux. Ces dispositions mettent en place des organes chargés de missions spécifiques par l’accord et gouvernent leur fonctionnement (articles 17.1, 17.2 et 17.3) ; elles régissent la relation entre l’accord et d’autres engagements internationaux des parties (articles 17.3 et 17.17) et elles énoncent des règles sur les amendements (article 17.5), l’entrée en vigueur (article 17.12), la durée (article 17.13), l’exécution des obligations (article 17.14), l’effet de l’accord sur les ordres juridiques des parties (article 17.15), la couverture de l’accord et ses versions authentiques (articles 17.16 et 17.20), les futures adhésions à l’Union et le champ d’application territorial de l’accord (articles 17.18 et 17.19). Comme ces dispositions sont purement accessoires par nature, elles ne sont pas susceptibles de modifier la répartition des compétences entre l’Union et les États membres en ce qui concerne les autres dispositions de l’ALEUES.

549. Les autres dispositions du chapitre 17 ont un caractère plus matériel.

550. L’article 17.6 de l’ALEUES (« Fiscalité ») (lu en combinaison avec la clause interprétative no 1) a pour objet de préciser la mesure dans laquelle l’ALEUES s’applique aux mesures fiscales et de préserver la compétence tant de la République de Singapour que de l’Union ou de ses États membres de mener leurs politiques fiscales. Cette disposition est donc accessoire par rapport au reste de l’ALEUES ; elle n’en est pas une composante distincte.

551. Il en va de même de l’article 17.9 de l’ALEUES (« Restrictions visant à préserver l’équilibre de la balance des paiements »). Cette disposition permet à chaque partie qui rencontrerait ou risquerait de rencontrer de graves difficultés en matière de balance des paiements ou de finances extérieures de limiter les avantages que l’ALEUES confère en ce qui concerne le commerce de marchandises et de services, l’établissement ainsi que les paiements et transferts liés à des investissements. Elle n’est donc pertinente que par rapport à d’autres dispositions de l’ALEUES, auxquelles elle déroge. Cette disposition ne constitue dès lors pas une composante distincte de cet accord. De la même manière, les articles 17.10 (« Exceptions concernant la sécurité ») et 17.11 (« Divulgation de renseignements ») sont l’un et l’autre purement accessoires par rapport au reste de l’ALEUES.

552. Enfin, les articles 17.7 (« Compte des transactions courantes et mouvements de capitaux ») et 17.8 (« Fonds souverains ») contiennent des règles qui sont autonomes par rapport aux autres dispositions de l’ALEUES. Ces dispositions ont, cependant, une portée très limitée et ne peuvent dès lors pas être considérées comme une composante distincte de l’ALEUES.

553. Je conclus donc que les dispositions du chapitre 17 de l’ALEUES soit sont purement accessoires par rapport aux autres dispositions de cet accord, soit ont une portée très limitée, et que, pour ces raisons, elles ne sont de nature à altérer la répartition des compétences entre l’Union et les États membres en ce qui concerne les différentes composantes de l’ALEUES.

 Sur l’appréciation de la compétence externe de l’Union pour conclure l’ALEUES

554. Il résulte de tout l’exposé qui précède qu’aux fins d’apprécier la répartition des compétences entre l’Union et les États membres, l’ALEUES doit être divisé en plusieurs parties distinctes Ces parties sont les suivantes : les dispositions relevant de la politique commune ; les dispositions libéralisant les services de transport entre l’Union et la République de Singapour et relevant dès lors du champ d’application de la politique des transports ; les dispositions régissant les types d’investissements autres que les investissements étrangers directs, qui sont régis par les règles de la libre circulation des capitaux ; les dispositions régissant les aspects non commerciaux des droits de propriété intellectuelle, qui sont nécessaires pour réaliser les objectifs du marché intérieur ; les dispositions concernant la convergence des normes de base en matière de travail et d’environnement entre l’Union et la République de Singapour et qui relèvent donc, respectivement, du champ d’application de la politique sociale et du champ d’application de la politique de protection de l’environnement, et les dispositions concernant la conservation des ressources marines vivantes, qui relèvent de la politique de la pêche.

555. Aucune de ces parties ne peut être identifiée comme étant la composante principale ou prépondérante de l’ALEUES ou comme étant « purement accessoire » ou comme ayant « une portée extrêmement limitée ».

556. Comme ces parties ne relèvent pas toutes du champ d’application des compétences externes exclusives de l’Union, l’ALEUES ne peut pas, sur la base des compétences exclusives de l’Union, être conclu sans la participation des États membres.

557. Voici, en détail, ma conception de la répartition des compétences entre l’Union et les États membres en ce qui concerne les différentes parties de l’ALEUES.

558. L’Union jouit d’une compétence externe exclusive, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous e), et de l’article 207, paragraphe 1, TFUE, pour les parties de l’ALEUES qui comprennent les dispositions relevant de la politique commerciale commune. Ces dispositions concernent :

–        les objectifs et définitions générales (chapitre 1er) ;

–        le commerce des marchandises (chapitres 2 à 6) ;

–        le commerce et les investissements dans la production d’énergie renouvelable (chapitre 7) ;

–        le commerce des services et les marchés publics (chapitres 8 à 10), à l’exception des parties de l’ALEUES qui s’appliquent aux services de transport et aux services intrinsèquement liés aux services de transport ;

–        les investissements étrangers directs (chapitre 9, section A) ;

–        les aspects commerciaux de droits de propriété intellectuelle (chapitre 11, à l’exclusion des dispositions relatives aux aspects non commerciaux de ces droits);

–        la concurrence et les matières connexes (chapitre 12) ainsi que

–        le commerce et le développement durable dans la mesure où les dispositions en question ont principalement trait aux instruments de politique commerciale (chapitre 13, à l’exclusion des dispositions visées aux points 559 et 562 plus bas).

559. L’Union jouit également d’une compétence externe exclusive, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous d), et de l’article 43, paragraphe 2, TFUE, pour les parties de l’ALEUES qui ont trait à la conservation des ressources marines vivantes [article 13.8, sous a), c) et d), de l’ALEUES].

560. En outre, l’Union jouit d’une compétence externe exclusive, en vertu de l’article 91 et de l’article 100, paragraphe 1, TFUE, lus en combinaison avec le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE et le quatrième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, pour les dispositions de l’ALEUES concernant le commerce des services de transport ferroviaire et routier (chapitre 8 de l’ALEUES).

561. Enfin, l’Union jouit également d’une compétence externe exclusive pour les matières couvertes par le chapitre 9, section B, par les articles 13.16 et 13.17 ainsi que par les chapitres 14 à 17 de l’ALEUES dans la mesure où ces dispositions s’appliquent (et sont donc accessoires par rapport) aux parties de l’ALEUES pour lesquelles l’Union jouit d’une compétence externe exclusive.

562. La compétence externe de l’Union est partagée avec les États membres pour les composantes suivantes de l’ALEUES :

–        les dispositions sur le commerce des services de transport aérien, les services de transport maritime et les services de transport par voies et plans d’eau navigables, y compris les services intrinsèquement liés à ces services de transport (chapitre 8), sur la base de l’article 4, paragraphe 2, sous g), et des articles 91 et 100 TFUE ainsi que du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE ;

–        les dispositions sur les types d’investissements autres que les investissements étrangers directs (chapitre 9, section A), sur la base de l’article 4, paragraphe 2, sous a), et de l’article 63 TFUE ainsi que du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE ;

–        les dispositions sur les marchés publics dans la mesure où elles s’appliquent aux services de transport et aux services intrinsèquement liés aux services de transport (chapitre 10), sur la base de l’article 4, paragraphe 2, sous a), et de l’article 26, paragraphe 1, TFUE ainsi que du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE ;

–        les dispositions concernant les aspects non commerciaux des droits de propriété intellectuelle (chapitre 11), sur la base de l’article 4, paragraphe 2, sous a), et de l’article 26, paragraphe 1, TFUE ainsi que du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE ;

–        les dispositions fixant des normes fondamentales en matière de travail et d’environnement et relevant donc du champ d’application soit de la politique sociale, soit de la politique de protection de l’environnement (chapitre 13), sur la base, respectivement, de l’article 4, paragraphe 2, sous b), de l’article 151 et de l’article 153, paragraphe 1, TFUE ainsi que du deuxième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, et de l’article 4, paragraphe 2, sous e), et de l’article 191, paragraphe 4, TFUE ainsi que du premier cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, ainsi que

–        les matières couvertes par le chapitre 9, section B, par les articles 13.16 et 13.17 ainsi que par les chapitres 14 à 17 de l’ALEUES dans la mesure où ces dispositions s’appliquent (et sont donc accessoires par rapport) aux parties de l’ALEUES pour lesquelles l’Union jouit d’une compétence externe partagée.

563. Enfin, l’Union n’a aucune compétence externe qui lui permettrait d’accepter d’être liée par l’article 9.10.1 de l’ALEUES (chapitre 9, section A), qui prévoit l’annulation d’accords bilatéraux conclus entre certains États membres et la République de Singapour. Cette compétence relève de la compétence exclusive de ces États membres.

564. Il résulte de ces conclusions que, dans sa rédaction actuelle, l’ALEUES ne peut être conclu que par l’Union et les États membres agissant conjointement.

565. Une procédure de ratification impliquant tous les États membres agissant aux côtés de l’Union est nécessairement susceptible d’être à la fois lourde et complexe. Elle peut également comporter le risque que le résultat de négociations laborieuses puisse être bloqué par quelques États membres, voire par un seul d’entre eux. Un tel blocage pourrait saper l’efficacité de l’action extérieure de l’Union et avoir des conséquences négatives pour les relations de l’Union avec le ou les pays tiers concernés.

566. Cependant, la nécessité d’unité et de rapidité de l’action externe de l’Union ainsi que les difficultés qui peuvent surgir si l’Union et les États membres doivent participer conjointement à la conclusion et à la mise en œuvre d’un accord international ne sauraient affecter la réponse à donner à la question de savoir qui a compétence pour le conclure. Cette question doit être tranchée exclusivement sur la base des traités (421). Il s’ensuit que des préoccupations pratiques concernant la négociation et la conclusion de l’ALEUES ainsi que sa mise en œuvre ne sont pas susceptibles de supprimer les divergences que j’ai identifiées dans mes conclusions entre le large éventail de matières régies par cet accord et la portée de la politique commerciale commune telle qu’elle résulte du traité de Lisbonne. En d’autres termes, le fait qu’il n’y ait pas un chevauchement intégral entre ce qui doit être considéré comme de la « politique commerciale » ou de la « politique des investissements » dans les relations internationales (et qui est dès lors couvert par un accord tel que l’ALEUES) et ce qui constitue la politique commerciale commune en droit de l’Union est dénué de pertinence lorsqu’il faut déterminer si l’Union est exclusivement compétente pour conclure un tel accord.

567. On pourrait bien sûr segmenter l’ALEUES en plusieurs accords en fonction de la ou des compétences impliquées. Néanmoins, il s’agit là d’une décision politique qui exige (en particulier) l’accord de l’État tiers concerné.

568. La Cour a dit pour droit que, lorsqu’un accord exigeant la participation tant de l’Union que des États membres qui la composent est négocié et conclu, aussi bien l’Union que les États membres doivent agir dans le cadre des compétences qui sont les leurs tout en respectant les compétences de toute autre partie contractante (422). Il est vrai qu’en principe, chaque partie (y compris les États membres) doit, en l’état actuel des choses, choisir entre consentir à l’accord dans sa totalité ou le rejeter entièrement. Néanmoins, ce choix doit être fait dans le respect des règles du traité sur la répartition des compétences. Si un État membre devait refuser de conclure un accord international pour des raisons liées à des aspects de cet accord qui relèvent de la compétence externe exclusive de l’Union, cet État membre agirait en violation de ces règles du traité.

569. Enfin, la Cour a jugé à diverses occasions que, lorsqu’il apparaît que la matière d’un accord relève, pour partie, de la compétence de l’Union et, pour partie, de celle des États membres, il importe d’assurer une coopération étroite entre ces derniers et les institutions de l’Union tant dans le processus de négociation et de conclusion que dans l’exécution des engagements assumés. C’est ce qui résulte de l’exigence d’unité dans la représentation internationale de l’Union (423), ainsi que du principe de coopération loyale exprimé à l’article 4, paragraphe 3, TUE. Pour les raisons que j’ai expliquées dans les présentes conclusions, cette obligation de coopérer sans partage s’applique à la négociation, à la conclusion et à la mise en œuvre de l’ALEUES.

 Conclusion

570. Sur la base des considérations qui précèdent, je propose que la Cour réponde à la demande d’avis de la Commission européenne de la manière suivante :

1)      L’accord de libre-échange envisagé entre l’Union européenne et la République de Singapour ne peut être conclu que par l’Union et les États membres agissant conjointement.

2)      L’Union jouit d’une compétence externe exclusive en ce qui concerne les parties de l’accord qui comprennent les dispositions relevant de la politique commerciale commune, à savoir :

–        les objectifs et définitions générales (chapitre 1er) ;

–        le commerce des marchandises (chapitres 2 à 6) ;

–        le commerce et les investissements dans la production d’énergie renouvelable (chapitre 7) ;

–        le commerce des services et les marchés publics (chapitres huit et dix), à l’exception des parties de l’accord qui s’appliquent aux services de transport et aux services intrinsèquement liés aux services de transport ;

–        les investissements étrangers directs (chapitre 9, section A) ;

–        les aspects commerciaux de droits de propriété intellectuelle (chapitre 11, à l’exclusion des dispositions relatives aux aspects non commerciaux de ces droits) ;

–        la concurrence et les matières connexes (chapitre 12) ainsi que

–        le commerce et le développement durable dans la mesure où les dispositions en question ont principalement trait aux instruments de politique commerciale (chapitre 13, à l’exclusion des dispositions relatives à la conservation des ressources marines vivantes et des dispositions fixant des normes fondamentales en matière de travail et d’environnement et relevant donc du champ d’application soit de la politique sociale, soit de la politique de protection de l’environnement).

L’Union jouit également d’une compétence externe exclusive en ce qui concerne les parties de l’accord (chapitre 13) qui ont trait à la conservation des ressources marines vivantes.

L’Union jouit également d’une compétence externe exclusive en ce qui concerne les dispositions de l’accord (chapitre 8) concernant le commerce des services de transport ferroviaire et routier.

L’Union jouit également d’une compétence externe exclusive en ce qui concerne les matières couvertes par le chapitre 9, section B, par les articles 13.16 et 13.17, par les chapitres 14 à 17 de l’accord dans la mesure où ces dispositions s’appliquent (et sont donc accessoires par rapport) aux parties de l’accord pour lesquelles l’Union jouit d’une compétence externe exclusive.

3)      La compétence externe de l’Union est partagée avec les États membres en ce qui concerne les composantes suivantes de l’accord :

–        les dispositions sur le commerce des services de transport aérien, les services de transport maritime et les services de transport par voies et plans d’eau navigables, y compris les services intrinsèquement liés à ces services de transport (chapitre 8) ;

–        les dispositions sur les types d’investissements autres que les investissements étrangers directs (chapitre 9, section A) ;

–        les dispositions sur les marchés publics dans la mesure où elles s’appliquent aux services de transport et aux services intrinsèquement liés aux services de transport (chapitre 10) ;

–        les dispositions concernant les aspects non commerciaux des droits de propriété intellectuelle (chapitre 11) ;

–        les dispositions fixant des normes fondamentales en matière de travail et d’environnement et relevant donc du champ d’application soit de la politique sociale, soit de la politique de protection de l’environnement (chapitre 13) ainsi que

–        les matières couvertes par le chapitre 9, section B, par les articles 13.16 et 13.17 ainsi que par les chapitres 14 à 17 de l’accord dans la mesure où ces dispositions s’appliquent (et sont donc accessoires par rapport) aux parties de l’accord pour lesquelles l’Union jouit d’une compétence externe partagée.

4)      L’Union n’a aucune compétence externe qui lui permettrait de consentir à être liée par l’article 9.10.1 de l’accord (chapitre 9, section A), qui prévoit l’annulation d’accords bilatéraux conclus entre certains États membre et la République de Singapour. Cette compétence appartient exclusivement à ces États membres.

 ANNEXE – Résumé de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et la République de Singapour

1.        Le premier et le deuxième considérant de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et la République de Singapour (ci-après l’« ALEUES ») se réfèrent à l’accord de partenariat et de coopération conclu entre l’Union et la République de Singapour. Aux deuxième et cinquième considérants, les mêmes parties déclarent qu’elles souhaitent renforcer leurs relations et élever le niveau de vie, favoriser la croissance économique et la stabilité, créer de nouvelles perspectives d’emploi et améliorer le bien–être général et qu’à cet effet, elles réaffirment leur engagement de promouvoir la libéralisation des échanges et des investissements. Le quatrième considérant prend acte de la détermination des parties à renforcer leurs relations économiques, commerciales et en matière d’investissements conformément à l’objectif de développement durable et à promouvoir le commerce et les investissements d’une manière compatible avec les niveaux élevés de protection de l’environnement et des travailleurs dans le respect des normes pertinentes internationalement reconnues et des accords auxquels elles sont parties. Les parties reconnaissent en outre, dans le neuvième considérant, l’importance de la transparence dans les échanges internationaux au profit de toutes les parties intéressées. Le dixième considérant énonce le souci des parties d’établir des règles claires et mutuellement avantageuses qui s’appliquent aux échanges et aux investissements entre elles, et leur désir de réduire ou d’éliminer les obstacles à ces échanges et investissements. Le onzième considérant explique que les parties sont résolues à contribuer au développement harmonieux et à l’expansion du commerce international en supprimant les obstacles aux échanges grâce à l’ALEUES, ainsi qu’à éviter, entre elles, de nouvelles entraves aux échanges et aux investissements susceptibles de compromettre les avantages découlant de l’ALEUES. Au douzième considérant, les parties déclarent s’appuyer sur les droits et obligations respectifs résultant pour elles de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), signé à Marrakech le 15 avril 1994 (ci-après l’« accord OMC ») et d’autres accords multilatéraux, bilatéraux et régionaux auxquels elles sont parties.

2.        Le chapitre 1er (« Objectifs et définitions générales ») dispose qu’en vertu de l’ALEUES, les parties établissent une zone de libre‑échange en conformité avec l’article XXIV de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (JO 1994, L 336, p. 103, ci‑après le « GATT de 1994 ») et avec l’article V de l’accord général sur le commerce des services, annexé à l’accord sur l’OMC (ci-après l’« accord AGCS ») (article 1.1). L’article 1.2 dispose que l’ALEUES a pour objectifs de libéraliser ainsi que de faciliter le commerce et les investissements entre les parties.

3.        Le chapitre 2 (« Traitement national et accès au marché en ce qui concerne les marchandises ») s’applique au commerce des marchandises entre les parties (article 2.2). L’objectif énoncé à l’article 2.1 est de libéraliser de manière progressive et réciproque le commerce des marchandises pendant une période de transition débutant à la date d’entrée en vigueur de l’accord conformément aux dispositions de celui-ci et à l’article XXIV du GATT de 1994. L’article 2.3 formule l’obligation pour chaque partie d’accorder le traitement national aux marchandises de l’autre partie conformément à l’article III du GATT de 1994 (qui est ainsi incorporé dans l’ALEUES). Le chapitre 2 couvre également la classification des marchandises (article 2.5), exige la réduction ou l’élimination des droits de douane appliquée sur les marchandises (article 2.6) et interdit le maintien ou l’institution de droits de douanes ou de taxes à l’exportation (article 2.7). Il poursuit en imposant certaines obligations concernant les mesures non tarifaires, en particulier les restrictions à l’importation et à l’exportation (article 2.9), les redevances et formalités se rapportant à l’importation et à l’exportation (article 2.10), les procédures de licences d’importation et d’exportation (article 2.11), les entreprises commerciales d’État (article 2.12) et l’élimination des mesures non tarifaires sectorielles visées à l’annexe 2-B et à l’annexe 2-C (article 2.13). L’article 2.14 instaure des exceptions générales et se réfère, en particulier, à l’article XX du GATT de 1994 (qui énonce les exceptions générales de cet accord). L’article 2.15 institue un comité « Commerce des marchandises », dont les principales responsabilités sont de suivre la mise en œuvre, de favoriser le commerce des marchandises entre les parties pour les questions relevant de ce chapitre et de ces annexes, et d’examiner les mesures tarifaires et non tarifaires s’appliquant au commerce des marchandises entre les parties.

4.        L’annexe 2-A porte sur l’élimination des droits de douane. Elle comprend deux appendices : l’appendice 2-A-1 (liste tarifaire des droits de douane à éliminer à Singapour) et l’appendice 2-A-2 (liste tarifaire des droits de douanes à éliminer dans l’Union). L’annexe 2‑B, qui s’applique à tous les types de véhicules à moteur et à leurs parties, énonce un certain nombre d’obligations visant, notamment, l’utilisation de normes internationales, la convergence des réglementations, les produits comportant de nouvelles technologies ou de nouvelles caractéristiques, les licences d’importation et autres mesures commerciales restrictives. L’annexe 2-C, qui concerne les produits pharmaceutiques et les dispositifs médicaux, porte sur les normes internationales, la transparence et la coopération réglementaire.

5.        Le chapitre 3 est intitulé « Mesures commerciales »

6.        En ce qui concerne les mesures antidumping et compensatoires, l’article 3.1 dispose que les parties confirment leurs droits et obligations découlant de l’article VI du GATT de 1994 (qui a trait aux droits antidumping et compensatoires), de l’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 et de l’accord sur les subventions et les mesures compensatoires. Le chapitre énonce les règles de procédure applicables au traitement des demandes d’institution de mesures antidumping et compensatoires (article 3.2) ; instaure la règle du droit moindre pour chaque type de droit (article 3.3) ; consacre la nécessité de prendre en considération l’intérêt public (article 3.4) et exclut les dispositions de la section sur les mesures antidumping et compensatoires du champ d’application du chapitre 15 (« Règlement des différends ») et du chapitre 16 (« Mécanisme de médiation ») (article 3.5).

7.        Le chapitre 3 contient également des règles spécifiques sur les mesures de sauvegarde. En particulier, les parties confirment les droits et obligations résultant pour elles de l’article XIX du GATT de 1994 (qui a trait aux mesures d’urgence concernant l’importation de produits particuliers), de l’accord sur les sauvegardes et de l’article 5 de l’accord sur l’agriculture (article 3.6). Il prévoit en outre des règles de procédure et de transparence (article 3.7) et exclut les dispositions de la section sur les mesures de sauvegarde globales du champ d’application du chapitre 15 (« Règlement des différends ») et du chapitre 16 (« Mécanisme de médiation ») (article 3.8). Les articles 3.9 à 3.13 prévoient l’application (à titre provisoire si nécessaire) de mesures de sauvegarde bilatérales spécifiques ainsi qu’une compensation appropriée lorsqu’une telle mesure est imposée.

8.        Le chapitre 4 (« Obstacles techniques au commerce ») a principalement pour objet de faciliter et d’accroître le commerce des marchandises entre les parties en fournissant un cadre permettant de prévenir, de déceler et d’éliminer les obstacles inutiles aux échanges relevant de l’accord sur les obstacles techniques au commerce (article 4.1), qui est incorporé à l’ALEUES, dont il fait partie intégrante (article 4.3). Le chapitre 4 s’applique à l’élaboration, à l’adoption et à l’application de l’ensemble des normes, règlements techniques et procédures d’évaluation de la conformité, tels que définis à l’annexe 1 de l’accord sur les obstacles techniques au commerce, qui sont susceptibles d’avoir une incidence sur le commerce des marchandises entre les parties, quelle que soit l’origine de ces marchandises (article 4.2.1). Le chapitre 4 contient également des dispositions concernant, notamment, différentes formes de coopération conjointes (article 4.4), la nature des organismes de normalisation et l’implication des parties dans ceux-ci (article 4.5), la base des règlements techniques (article 4.6), les mécanismes visant à faciliter l’acceptation des résultats des procédures d’évaluation de la conformité (article 4.7), la transparence (article 4.8) et les prescriptions (contraignantes) en matière de marquage ou d’étiquetage (article 4.10). D’autres dispositions ont trait à l’échange d’informations (notamment l’article 4.9) ou à la mise à disposition d’informations à des fins définies (par le truchement, par exemple, de points de contact désignés conformément à l’article 14.4) (article 4.11).

9.        Le chapitre 5 (« Mesures sanitaires et phytosanitaires ») a pour objectif a) de protéger la santé et la vie des personnes et des animaux, ainsi que de préserver les végétaux sur le territoire respectif des parties, tout en facilitant les échanges commerciaux entre les parties en ce qui concerne les mesures sanitaires et phytosanitaires (ci-après les « mesures SPS ») ; b) de contribuer à la poursuite de la mise en œuvre de l’accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires ainsi que c) de fournir un moyen d’améliorer la communication, la coopération et la résolution de problèmes liés à l’application de mesures ayant une incidence sur le commerce entre les parties (article 5.1). Les parties réaffirment leurs droits et obligations au titre de l’accord sur l’application de mesures sanitaires et phytosanitaires [article 5.4 ; voir également article 5.6, sous a)].

10.      L’article 5.6 (« Principes généraux ») concerne les moyens d’harmoniser les mesures SPS et les restrictions à l’utilisation de mesures SPS de manière à éviter les obstacles injustifiés au commerce et les restrictions inutiles ainsi que toute discrimination arbitraire ou injustifiable et tout retard dans l’accès des parties au marché. D’autres mesures de fond ont trait aux conditions d’importation (article 5.7), aux vérifications (article 5.8), à la procédure à appliquer en cas de vérification sur place préalable à l’autorisation d’importer une ou plusieurs catégories particulières de produits d’origine animale en provenance de la partie exportatrice (article 5.9 ; voir également annexe 5-B), à la détermination et la reconnaissance de zones exemptes de parasites ou de maladies (article 5.10), aux mesures d’urgence à prendre en cas de risques graves pour la santé ou la vie des personnes ou des animaux ou pour la préservation des végétaux (article 5.13) et à la (procédure de) reconnaissance de l’équivalence d’une mesure particulière ou d’ensembles de mesures (article 5.14). Des obligations générales concernant la transparence et l’échange d’informations sont énoncées à l’article 5.11.

11.      Au chapitre 6 (« Douanes et facilitation des échanges »), les parties reconnaissent l’importance des questions relatives aux douanes et à la facilitation des échanges dans le contexte évolutif du commerce mondial et elles conviennent de renforcer leurs opérations en la matière afin de garantir que la législation et les procédures dans ce domaine ainsi que la capacité administrative des administrations concernées permettent la réalisation des objectifs consistant à promouvoir la facilitation des échanges tout en assurant un contrôle douanier efficace (article 6.1.1). L’article 6.2 formule les principes sur lesquels les dispositions et procédures douanières respectives des parties doivent être fondées (article 6.2.1). Les parties doivent également s’efforcer de simplifier et de normaliser davantage les données et les documents requis par les douanes et autres services (article 6.2.2). Les articles 6.3 à 6.14 énoncent des obligations spécifiques concernant la coopération douanière, le transit et le transbordement, les décisions anticipées, la procédure douanière simplifiée, la mainlevée des marchandises, les redevances et taxes, les commissaires en douane, les inspections avant expédition, la détermination de la valeur en douane, la gestion des risques, un système de guichet unique (afin de faciliter l’envoi électronique, en une seule fois, de toutes les informations exigées par la législation douanière) et la mise en place de procédures de recours efficaces, rapides, non discriminatoires et aisément accessibles. L’article 6.16 traite des relations des parties avec les entreprises.

12.      L’article 6.15 fait aux parties l’obligation générale de publier ou de rendre publiques de toute autre manière leur législation, leurs réglementations, leurs procédures administratives et leurs autres exigences en matière de douane et de facilitation des échanges (article 6.15.1) ainsi que de désigner ou de mettre en place un ou plusieurs points d’information (article 6.15.2). Tout au long du chapitre, diverses dispositions concernent la nécessité d’échanger des informations ou de rendre celles-ci disponibles [notamment, articles 6.3.2, 6.8.2 et 6.16, sous b)].

13.      Le chapitre 7 (« Obstacles non tarifaires au commerce et aux investissements dans la production d’énergie renouvelable ») vise à promouvoir, à développer et à accroître la production d’énergie à partir de sources non fossiles renouvelables et durables, notamment grâce à la facilitation des échanges et des investissements. À cet effet, les parties coopèrent pour supprimer ou réduire les droits de douane ainsi que les obstacles non tarifaires et pour favoriser la convergence ou le rapprochement des réglementations avec les normes régionales et internationales (article 7.1).

14.      Le chapitre 7 s’applique aux mesures susceptibles d’avoir une incidence sur les échanges et les investissements entre les parties en ce qui concerne la production d’énergie à partir de sources non fossiles renouvelables et durables, mais pas aux produits à partir desquels l’énergie est produite (article 7.3.1).

15.      L’article 7.4 impose aux parties a) de s’abstenir d’adopter des mesures prévoyant des prescriptions relatives à la teneur en éléments locaux ou toute autre compensation (toute condition favorisant le développement local) ayant une incidence sur les produits, fournisseurs de services, investisseurs ou investissements de l’autre partie ; b) de s’abstenir d’adopter des mesures exigeant la constitution de partenariats avec des entreprises locales (sauf si ces partenariats sont jugés nécessaires pour des raisons techniques) ; c) de veiller à ce que toute règle concernant les procédures d’autorisation, de certification et d’octroi de licences soit objective, transparente, non arbitraire et n’engendre pas de discrimination à l’encontre des demandeurs de l’autre partie ; d) de veiller à ce que les taxes administratives appliquées ou liées à l’importation et à l’utilisation de marchandises originaires de l’autre partie, ou ayant une incidence sur la fourniture de marchandises par les fournisseurs de l’autre partie, soient régies par l’article 2.10 et à ce que les taxes administratives appliquées ou liées à la fourniture de services par des fournisseurs de l’autre partie soient régies par les articles 8.18 à 8.20, et e) de faire en sorte que les modalités, conditions et procédures pour le raccordement et l’accès aux réseaux de transmission d’électricité soient transparentes et n’engendrent pas de discrimination à l’encontre des fournisseurs de l’autre partie.

16.      L’article 7.5 porte sur l’utilisation de normes internationales ou régionales concernant les produits servant à la production d’énergie à partir de sources non fossiles renouvelables et durables, sur la nécessité de définir les règlements techniques en fonction des propriétés d’emploi du produit et d’accepter les déclarations de conformité de l’autre partie.

17.      Aux termes de l’article 7.6.1, les dispositions du chapitre 7 sont soumises aux exceptions générales énoncées aux articles 2.14 et 8.62, à la règle concernant la sécurité et les exceptions générales qui figure à l’article 10.3 et aux dispositions pertinentes du chapitre 17. Conformément à l’article 7.6.2, aucune disposition du chapitre 17 n’est interprétée comme empêchant l’adoption ou l’application par l’une ou l’autre partie de mesures nécessaires à la sécurité de fonctionnement des réseaux d’énergie concernés ou à la sécurité de l’approvisionnement énergétique.

18.      L’article 7.7 précise le rôle du comité « Commerce des marchandises » en matière de coopération et de mise en œuvre du chapitre 7, et spécifie ce que cette coopération peut comporter.

19.      Le chapitre 8 (« Services, établissement et commerce électronique ») est divisé en sept sections.

20.      À la section A, les parties réaffirment leurs engagements respectifs en vertu de l’accord OMC et conviennent que ce chapitre énonce les dispositions nécessaires à la libéralisation progressive et réciproque du commerce des services, de l’établissement et du commerce électronique (article 8.1.1).

21.      À l’article 8.1.2, les parties déclarent que, sauf disposition contraire, le chapitre 8 a) ne s’applique pas aux subventions accordées par une partie, b) ne s’applique pas aux services fournis dans le cadre de l’exercice de la puissance publique sur le territoire respectif des parties, c) n’exige pas la privatisation d’entreprises publiques et d) ne s’applique pas aux lois, réglementations ou prescriptions régissant l’acquisition, par des organismes publics, de services achetés pour les besoins des pouvoirs publics et non pour être revendus dans le commerce ou pour servir à la fourniture de services destinés à la vente dans le commerce. L’article 8.1.4 ajoute que le chapitre 8 ne s’applique pas aux mesures relatives aux personnes physiques qui cherchent à accéder au marché du travail d’une partie ni aux mesures concernant la citoyenneté, la résidence ou l’emploi à titre permanent.

22.      L’article 8.1.3 garantit le droit de chaque partie de réglementer et d’adopter de nouvelles règles en vue d’atteindre des objectifs légitimes de politique publique d’une manière conforme au chapitre 8.

23.      Aux termes de l’article 8.2, sous d), les compagnies maritimes établies en dehors de l’Union ou de Singapour et contrôlées par des ressortissants d’un État membre de l’Union bénéficient également des dispositions de l’ALEUES si leurs bateaux sont immatriculés conformément à la législation de cet État membre de l’Union et battent pavillon d’un État membre de l’Union.

24.      L’article 8.2, sous m), définit l’expression « commerce des services » comme étant la fourniture d’un service i) en provenance du territoire d’une partie et à destination du territoire de l’autre partie (« fourniture transfrontière ») ; ii) sur le territoire d’une partie à l’intention d’un consommateur de services de l’autre partie (« consommation à l’étranger ») ; iii) par un fournisseur de services d’une partie grâce à une présence commerciale sur le territoire de l’autre partie (« présence commerciale ») et iv) par un fournisseur de services d’une partie grâce à la présence de personnes physiques de ladite partie sur le territoire de l’autre partie (« présence de personnes physiques »).

25.      La section B (« Fourniture transfrontière de services ») s’applique aux mesures prises par les parties ayant une incidence sur la fourniture transfrontière de services dans tous les secteurs, à l’exclusiona) des services audiovisuels ; b) du cabotage maritime national (qui couvre le transport de passagers ou de marchandises entre un port ou un point situé dans un État membre de l’Union et un autre port ou point situé dans le même État membre ainsi que le trafic ayant pour origine et destination le même port ou point situé dans un État membre de l’Union) ainsi que c) des services de transport aérien intérieur et international, réguliers ou non, et les services directement liés à l’exercice de droits de trafic (aérien) (article 8.3). Sont néanmoins couverts i) les services de réparation et de maintenance des aéronefs pendant lesquels l’aéronef est retiré du service ; ii) la vente ou la commercialisation de services de transport aérien et iii) les services liés aux systèmes informatisés de réservation [article 8.3, sous c)]. L’article 8.4 définit, aux fins de la section B, l’expression « fourniture transfrontière de services » comme étant la fourniture d’un service a) en provenance du territoire d’une partie et à destination du territoire de l’autre partie, et b) sur le territoire d’une partie à l’intention d’un consommateur de services de l’autre partie.

26.      L’article 8.5 concerne l’accès aux marchés. Chaque partie doit accorder aux services et fournisseurs de services de l’autre partie un traitement non moins favorable que celui prévu en application des modalités, limitations et conditions convenues qui sont précisées dans sa liste des engagements spécifiques (article 8.5.1). Dans les secteurs où des engagements en matière d’accès aux marchés sont contractés, l’article 8.5.2 précise les mesures qu’une partie ne peut pas adopter ou maintenir, que ce soit au niveau d’une subdivision régionale ou au niveau de l’ensemble de son territoire, sauf disposition contraire de sa liste des engagements spécifiques.

27.      L’article 8.6 énonce l’obligation du traitement national. Dans les secteurs inscrits dans sa liste des engagements spécifiques, et compte tenu des conditions et restrictions qui y sont indiquées, chaque partie accorde aux services et fournisseurs de services de l’autre partie, en ce qui concerne toutes les mesures ayant une incidence sur la fourniture transfrontière de services, un traitement non moins favorable que celui qu’elle accorde à ses propres services similaires et à ses propres fournisseurs de services similaires (article 8.6.1).

28.      L’article 8.7.1 dispose que les secteurs libéralisés par une partie en vertu de la section B ainsi que les limitations concernant l’accès aux marchés et le traitement national applicable aux services et fournisseurs de services de l’autre partie dans ces secteurs sont précisés dans la liste des engagements spécifiques de la partie en question.

29.      La section C est consacrée à l’« établissement », notion définie à l’article 8.8, sous d), comme étant « i) la constitution, l’acquisition ou le maintien d’une personne morale » ou « ii) la création ou le maintien d’une succursale ou d’un bureau de représentation sur le territoire d’une partie en vue de l’exercice d’une activité économique, y compris, mais non exclusivement, en vue de la fourniture d’un service ». Les termes « constitution » et « acquisition » d’une personne morale englobent également la participation capitalistique à une personne morale en vue d’établir ou de maintenir des liens économiques durables [note 8 de l’article 8.8, sous d) (424)]. La section C s’applique aux mesures adoptées ou maintenues par les parties qui ont une incidence sur l’établissement dans l’ensemble des activités économiques, à l’exception a) des industries extractives, des industries manufacturières et de la transformation des combustibles nucléaires ; b) de la fabrication et du commerce des armes, munitions et matériels de guerre ; c) des services audiovisuels ; d) du cabotage maritime national et e) des services de transport aérien intérieur et international, réguliers ou non, et des services directement liés à l’exercice de droits de trafic (article 8.9). Néanmoins, la section C ne s’applique pas aux mesures qui ont une incidence sur l’établissement dans les activités économiques que sont i) les services de réparation et de maintenance des aéronefs pendant lesquels l’aéronef est retiré du service ; ii) la vente ou la commercialisation de services de transport aérien et iii) les services liés aux systèmes informatisés de réservation [article 8.9, sous e)].

30.      Les articles 8.10, 8.11 et 8.12, qui ont trait, respectivement, à l’accès au marché, au traitement national et aux listes des engagements spécifiques, sont, dans une large mesure, le pendant des articles 8.5, 8.6 et 8.7 relatifs à l’établissement [leurs dispositions concernant, respectivement, l’accès au marché, le traitement national et les listes des engagements spécifiques en ce qui concerne la fourniture transfrontière de services (section B)].

31.      La section D (« Présence temporaire de personnes physiques à des fins professionnelles ») s’applique aux mesures prises par les parties concernant l’admission et le séjour temporaires, sur leur territoire respectif, de personnel clé, de stagiaires de niveau postuniversitaire et de vendeurs de services aux entreprises conformément à l’article 8.1.4 (article 8.13.1). L’expression « personnel clé » désigne toute personne physique qui est employée par une personne morale d’une partie, autre qu’un organisme sans but lucratif, et qui est responsable de la création ou du contrôle, de l’administration et du fonctionnement adéquats d’un établissement [article 8.13.2, sous a)]. Cette catégorie comprend les « visiteurs en déplacement d’affaires à des fins d’établissement » et les « personnes transférées temporairement par leur société ». Les « visiteurs en déplacement d’affaires à des fins d’établissement » sont des personnes physiques employées à un niveau élevé de responsabilité qui sont chargées de la création d’un établissement et qui n’interviennent pas dans des transactions directes avec le grand public et ne perçoivent pas de rémunération d’une source sise dans la partie hôte [article 8.13.2, sous a), i)]. Les « personnes transférées temporairement par leur société » sont des personnes physiques qui ont été employées par une personne morale d’une partie ou, dans le cas des personnes exerçant une profession libérale qui fournissent des services aux entreprises, en ont été des associés pendant au moins un an et qui sont transférées temporairement dans un établissement situé sur le territoire de l’autre partie. Il peut s’agir de dirigeants, de cadres supérieurs ou d’experts [article 8.13.2, sous a), ii)].

32.      En ce qui concerne le personnel clé et les stagiaires de niveau postuniversitaire, l’article 8.14 dispose que, pour chaque secteur libéralisé conformément à la section C et soumis aux éventuelles réserves indiquées dans sa liste des engagements spécifiques, chaque partie permet aux entrepreneurs de l’autre partie d’employer temporairement dans leur établissement des personnes physiques de cet autre partie, pour autant que ces salariés fassent partie du personnel clé ou soient des stagiaires de niveau universitaire au sens de l’article 8.13. Cet article prévoit également des périodes maximales de séjour temporaire différentes pour les personnes transférées temporairement par leur société, pour les visiteurs en déplacement d’affaires à des fins d’établissement et pour les stagiaires de niveau postuniversitaire. Les mesures comportant des limitations du nombre total de personnes physiques qu’un entrepreneur peut transférer en tant que personnel clé ou stagiaires de niveau postuniversitaire dans un secteur spécifique (mesures exprimées sous la forme de contingents numériques ou de l’exigence d’un examen des besoins économiques) ou constituant des restrictions discriminatoires sont interdites (article 8.14.2).

33.      Conformément à l’article 8.15, chaque partie doit en principe autoriser l’admission et le séjour temporaire de vendeurs de services aux entreprises pour une période maximale de 90 jours sur toute période de 12 mois (article 8.15).

34.      La section E (« Cadre réglementaire ») est divisée en sous-sections consacrées à des dispositions d’application générale, à la réglementation interne, aux services informatiques, aux services postaux, aux services de télécommunication, aux services financiers et aux services de transport maritime international.

35.      La sous-section 1 contient des dispositions d’application générale. Elle énonce certaines obligations concernant la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles (article 8.16) et la transparence (article 8.17). Aucune disposition de l’article 8.16 ne peut empêcher une partie d’exiger que les personnes physiques disposent des qualifications requises ou de l’expérience professionnelle prévue sur le territoire où le service est fourni pour le secteur d’activités concerné (article 8.16.1). Chaque partie répond rapidement à toutes les demandes de renseignements spécifiques émanant de l’autre partie et concernant telle ou telle de ces mesures d’application générale ou tout accord international relevant du chapitre 8. En outre, chaque partie doit mettre en place un ou plusieurs points d’informations au titre de l’article 14.4 (article 8.17).

36.      La sous-section 2 concerne la réglementation interne. Elle s’applique aux mesures prises par les parties concernant les prescriptions et procédures en matière d’octroi de licence ou de qualification qui ont une incidence sur la fourniture transfrontière de services, l’établissement sur leur territoire de personnes physiques ou morales et le séjour temporaire sur leur territoire des personnes physiques (article 8.18.1), conformément aux engagements spécifiques contractés par les parties (article 8.18.2).

37.      Les articles 8.19 et 8.20 énoncent les obligations en matière de conditions d’octroi de licence et de qualification, les procédures d’octroi de licence et de traitement des demandes sans retard injustifié et, dans les cas qui le justifient, d’adoption de mesures appropriées de correction des décisions administratives relatives à l’établissement, la fourniture transfrontière de services ou le séjour temporaire de personnes physiques à des fins professionnelles.

38.      La sous-section 3 a trait aux services informatiques. L’article 8.21.1 dispose que les parties souscrivent à la position convenue reproduite dans les autres paragraphes de cet article 8.21 en ce qui concerne les services informatiques libéralisés conformément aux sections B à D. Cette position commune porte principalement sur la signification des services informatiques et des services connexes.

39.      La sous-section 4 concerne les services postaux. Aux termes de l’article 8.22, chaque partie met en place ou maintient des mesures appropriées en vue d’empêcher que des fournisseurs de services postaux qui, seuls ou ensemble, constituent un fournisseur principal sur le marché des services postaux concerné, n’adoptent ou ne poursuivent des pratiques anticoncurrentielles. Conformément à l’article 8.23, les organismes réglementaires doivent être distincts de tout fournisseur de services postaux et ne pas relever d’un tel fournisseur. Leurs décisions et procédures sont impartiales à l’égard de tous les participants sur le marché.

40.      La sous-section 5 s’applique aux mesures qui ont une incidence sur le commerce des services de télécommunications. Elle définit les principes du cadre réglementaire applicable aux services de télécommunications libéralisés en vertu des sections B à D (c’est-à-dire la fourniture transfrontière de services, l’établissement et la présence temporaire de personnes physiques à des fins professionnelles) (article 8.24.1). Les articles 8.26 à 8.38 énoncent des obligations de fond concernant, notamment, l’accès et le recours aux réseaux et services publics de télécommunications, l’interconnexion, le partage des ressources et la portabilité du numéro. Les articles 8.41 et 8.42 imposent des obligations concernant, d’une part, les procédures d’obtention d’une autorisation de fournir des services de télécommunications et, d’autre part, les procédures d’attribution et d’utilisation de ressources limitées.

41.      L’article 8.45 crée une obligation générale de transparence. Des obligations spécifiques de mise à disposition d’informations sont énoncées, par exemple, aux articles 8.29.3 et 8.41.2.

42.      La sous-section 6 définit les principes du cadre de réglementation régissant l’ensemble des services financiers libéralisés conformément aux sections B à D (article 8.49.1). L’article 8.50.1 et 2 autorise chaque partie à adopter ou maintenir des mesures raisonnables pour des raisons prudentielles et énoncent les conditions auxquelles cela peut être fait. Conformément à l’article 8.50.4, chaque partie fait en sorte de garantir la mise en œuvre et l’application, sur son territoire, d’une série de différentes normes, dont il établit la liste, en matière de contrôle bancaire, de contrôle des assurances, de régulation financière, de transparence et d’échange de renseignements à des fins fiscales. Conformément à l’article 8.50.5, chaque partie peut, à certaines conditions, exiger l’enregistrement ou l’autorisation des instruments financiers et des fournisseurs de services financiers transfrontière de l’autre partie.

43.      L’article 8.52 impose à chaque partie d’octroyer, à certaines conditions, aux fournisseurs de services financiers de l’autre partie l’accès aux systèmes de règlement et de compensation exploités par des entités publiques ainsi qu’aux facilités de financement et de refinancement officielles disponibles au cours de transactions commerciales ordinaires.

44.      L’article 8.53 vise de nouveaux services financiers. Il oblige chaque partie à autoriser un fournisseur de services financiers de l’autre partie à fournir tout nouveau service financier qu’elle autoriserait ses propres fournisseurs de services financiers similaires à fournir sans qu’aucune mesure législative supplémentaire de sa part soit nécessaire.

45.      L’article 8.54 concerne, en particulier, le transfert d’informations sous forme électronique ou sous toute autre forme à l’intérieur et en dehors du territoire d’une partie en vue du traitement de ces informations si ce traitement est nécessaire aux opérations ordinaires d’un fournisseur de services financiers.

46.      La sous-section 7 définit les principes régissant la libération des services de transport maritime international conformément aux sections B à D. À l’article 8.56.3, les parties conviennent de garantir une application effective des principes de l’accès illimité aux cargaisons sur une base commerciale, de la libre prestation des services de transport maritime international ainsi que du traitement national dans le cadre de la fourniture de ce type de services. Les parties doivent appliquer effectivement le principe de l’accès illimité aux marchés et aux échanges dans le secteur du transport maritime international sur une base commerciale et non discriminatoire [article 8.56.3, sous a)]. Chaque partie doit accorder aux navires qui battent pavillon de l’autre partie ou qui sont exploités par des fournisseurs de services de l’autre partie un traitement non moins favorable que celui qu’elle accorde à ses propres navires ou à ceux de tout pays tiers, si ce dernier est plus favorable, en ce qui concerne notamment l’accès aux ports, l’utilisation des infrastructures portuaires et des services maritimes auxiliaires des ports, les droits et taxes y afférents, les installations douanières ainsi que l’affectation des postes de mouillage et des équipements de chargement et de déchargement. L’article 8.56.5 dispose que chaque partie autorise les fournisseurs de services de transport maritime international de l’autre partie à avoir un établissement sur son territoire à des conditions d’établissement et d’exploitation conformes aux conditions précisées dans sa liste des engagements spécifiques. Conformément à l’article 8.56.6, les parties doivent mettre à la disposition des fournisseurs de services de transport maritime international de l’autre partie, selon des modalités raisonnables et non discriminatoires, les services portuaires suivants : a) pilotage ; b) remorquage et assistance prêtée par un remorqueur ; c) embarquement de provisions ; d) embarquement de combustibles et d’eau ; e) collecte des ordures et évacuation des eaux de déballastage ; f) services de la capitainerie ; g) aides à la navigation et h) services opérationnels à terre indispensables à l’exploitation des navires.

47.      À la section F (« Commerce électronique »), les parties conviennent de l’importance de faciliter l’utilisation et le développement du commerce électronique ainsi que l’applicabilité de règles de l’OMC dans ce domaine ; elles s’engagent à encourager le développement du commerce électronique entre elles, notamment en coopérant sur les questions soulevées par le commerce électronique conformément aux dispositions du chapitre 8 (article 8.57.1 et 2). Elles conviennent également que le développement du commerce électronique doit être pleinement compatible avec les normes internationales de protection des données afin d’asseoir la confiance des utilisateurs dans ce commerce (article 8.57.4).

48.      L’article 8.58 interdit aux parties d’instituer des droits de douane sur les transmissions électroniques. À l’article 8.59, les parties affirment que les mesures liées à la fourniture d’un service par voie électronique rentrent dans le champ d’application des obligations figurant dans les dispositions pertinentes du chapitre 8, sous réserve des dérogations éventuellement applicables à ces obligations.

49.      La section G est intitulée « Exceptions ». L’article 8.62 énonce une série d’exceptions générales. À l’article 8.63, les parties s’engagent à réexaminer le chapitre 8 et leurs listes des engagements spécifiques au plus tard trois ans après l’entrée en vigueur de l’ALEUES, puis à intervalles réguliers.

50.      L’article unique de l’annexe 8-A dispose que la liste des engagements spécifiques de l’Union figure aux appendices 8-A-1 à 8-A-3. Ces appendices ont trait, respectivement, à la liste des engagements spécifiques de l’Union conformément à l’article 8.7 (fourniture transfrontière de services), à l’article 8.12 (établissement) et aux articles 8.14 et 8.15 (personnel clé et stagiaires de niveau postuniversitaire et vendeurs de services aux entreprises).

51.      L’annexe 8-B dispose que la liste des engagements spécifiques de la République de Singapour figure aux appendices 8-B-1 (engagements spécifiques) et 8-B-2 (services financiers).

52.      Le chapitre 9 (« Investissements ») comporte deux sections. La section A énonce les dispositions de fond concernant la protection des investisseurs et de leurs investissements. La section B met en place un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États(ci-après le « mécanisme RDIE »).

53.      Aux fins du chapitre 9, on entend par « investissement visé » un investissement qui est détenu ou contrôlé directement ou indirectement par un investisseur visé d’une partie sur le territoire de l’autre partie (article 9.1.1). Un « investisseur visé » est une personne physique ou morale d’une partie qui a effectué un investissement sur le territoire de l’autre partie (article 9.2). Un « investissement » est défini comme étant tout type d’avoir qui présente les caractéristiques d’un investissement, notamment l’engagement de capitaux ou d’autres ressources, la perspective de gains ou de profits, la prise de risque ou encore une certaine durée (article 9.1.1). L’article 9.1., sous a) à h), dresse la liste des différentes formes que peut prendre un investissement.

54.      Le chapitre 9 s’applique aux investissements visés qui ont été effectués avant ou après l’entrée en vigueur de l’ALEUES (article 9.2.1).

55.      L’article 9.3.1 énonce l’obligation de traitement national : chacune des parties doit accorder aux investisseurs visés de l’autre partie et à leurs investissements visés, sur son territoire, un traitement non moins favorable que celui qu’elle accorde, dans des situations similaires, à ses propres investisseurs et à leurs investissements pour ce qui est de l’exploitation, de la gestion, de la conduite, de l’entretien, de l’utilisation, de la vente ou de tout autre mode d’aliénation de leurs investissements. L’article 9.3.3 énonce un certain nombre d’exceptions ainsi que les conditions auxquelles chaque partie doit adopter ou appliquer des mesures comportant un traitement moins favorable.

56.      L’article 9.4 impose à chacune des parties d’accorder, sur son territoire, un traitement juste et équitable ainsi qu’une protection et une sécurité intégrales aux investissements visés de l’autre partie (article 9.4.1), les termes « protection et sécurité intégrales » ne désignant que l’obligation incombant aux parties en ce qui concerne la sécurité physique des investisseurs et des investissements visés (article 9.4.4). Pour assurer le respect de cette obligation, l’article 9.4.2 interdit aux parties d’adopter des mesures qui constituent a) un déni de justice dans le cadre de procédures pénales, civiles ou administratives ; b) une violation fondamentale des droits de la défense ; c) un acte manifestement arbitraire ; d) une forme de harcèlement, de contrainte, d’abus de pouvoir ou d’acte de mauvaise foi similaire ou e) une violation de la confiance légitime qu’un investisseur visé nourrit du fait de déclarations spécifiques ou sans ambiguïté d’une partie visant à l’amener à réaliser l’investissement, auxquelles s’est raisonnablement fié cet investisseur.

57.      L’article 9.5.1 dispose que les investisseurs visés d’une partie dont les investissements visés ont subi des pertes en raison de situation de guerre ou de conflit armé, de révolution, d’état d’urgence nationale, de révolte, d’émeute ou d’insurrection sur le territoire de l’autre partie se voient accorder, par cette partie, en ce qui concerne la restitution, l’indemnisation, le dédommagement ou toute autre forme de règlement, un traitement non moins favorable que celui que la partie réserve à ses propres investisseurs ou aux investisseurs de tout pays tiers, si ce dernier est plus avantageux pour l’investisseur concerné.

58.      Conformément à l’article 9.6.1, aucune partie ne peut, directement ou indirectement, nationaliser ou exproprier les investissements visés d’investisseurs visés de l’autre partie ou les assujettir à des mesures ayant des effets équivalant à une nationalisation ou à une expropriation, sauf lorsque cette expropriation est effectuée a) pour des motifs d’intérêt public ; b) conformément aux principes de l’application régulière de la loi ; c) de façon non discriminatoire et d) moyennant le versement rapide et effectif d’une indemnité suffisante conformément à l’article 9.6.2. L’article 9.6.2 précise la manière de déterminer le montant de l’indemnité. L’article 9.6 ne s’applique pas à l’octroi de licences obligatoires en ce qui concerne les droits de propriété intellectuelle, pour autant que l’octroi de ces licences soit conforme à l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ci-après l’« accord ADPIC ») (article 9.6.3). L’article 9.6.4 traite du réexamen de toute mesure d’expropriation ou d’estimation, réexamen effectué par une autorité judiciaire ou une autre autorité indépendante de la partie à l’origine de la mesure.

59.      L’article 9.7 dispose que chacune des parties autorise que tout transfert se rapportant à un investissement visé soit effectué dans une devise librement convertible, sans restriction ni retard (article 9.7.1). Néanmoins, aucune des dispositions de l’article 9.7 ne peut être interprétée comme empêchant une partie d’appliquer, de façon équitable et non discriminatoire, sa législation sur les matières énumérées à l’article 9.7.2, sous a) à g) (article 9.7.2).

60.      Les autres dispositions de la section A ont trait à la subrogation (article 9.8), à la dénonciation (article 9.9) et aux rapports avec d’autres accords (9.10). En particulier, l’article 9.9 dispose qu’en cas de dénonciation de l’ALEUES conformément à l’article 17.13, le chapitre 9 continue à produire ses effets durant une nouvelle période de 20 ans à compter de cette date en ce qui concerne les investissements visés effectués avant la date de la dénonciation de l’ALEUES. L’article 9.10.1 dispose que, dès l’entrée en vigueur de l’ALEUES, les accords conclus entre des États membres de l’Union et la République de Singapour qui sont visés à l’annexe 9-D (ainsi que les droits et obligations qui en découlent) cessent d’être appliqués ; ils sont annulés et remplacés par l’ALEUES. La note 19 (425) ajoute que ces accords seront réputés abrogés par l’ALEUES au sens de l’article 59, paragraphe 1, sous a), de la convention sur le droit des traités entre États et organisations internationales ou entre organisations internationales, conclue à Vienne le 21 mars 1986. Les autres paragraphes de l’article 9.10 traitent essentiellement des effets de l’application provisoire de l’ALEUES sur l’application des dispositions des accords énumérés à l’annexe 9-D.

61.      La section B du chapitre 9 s’applique aux différends opposant un ressortissant d’une partie à l’accord à l’autre partie à l’accord en raison d’un traitement (ou d’une inertie) que le requérant estime contraire aux dispositions de la section A et qui aurait prétendument occasionné une perte ou un préjudice à ce requérant ou à son entreprise établie localement (article 9.11.1).

62.      Aux termes de l’article 9.12, tout différend devrait, dans la mesure du possible, être résolu à l’amiable par la négociation. L’article 9.14 ajoute qu’à tout moment, les parties au différend peuvent convenir d’avoir recours à la médiation ou à d’autres modes de règlement des différends. Lorsqu’un différend ne peut pas être résolu à l’amiable, le requérant d’une partie peut présenter une demande de consultations à l’autre partie dans un délai déterminé (article 9.13). Si le différend ne peut pas être réglé dans les trois mois suivant la demande de consultations, le requérant peut notifier par écrit son intention de recourir à l’arbitrage (article 9.15). Lorsqu’une notification de l’intention de recourir à l’arbitrage est adressée à l’Union, celle-ci détermine la partie adverse (c’est-à-dire défenderesse) dans un délai spécifique et informe le requérant de sa décision sur le champ (article 9.15.2). En l’absence de pareille décision, l’article 9.15.3 dispose, en substance, que le défendeur sera déterminé conformément à la notification de l’intention de recourir à l’arbitrage.

63.      Au plus tôt trois mois après la date de la notification de l’intention de recourir à l’arbitrage, le requérant peut, aux conditions énoncées à l’article 9.17 et conformément aux autres exigences en matière de compétence applicables (article 9.17.5), engager une procédure en vertu de l’un des mécanismes RDIE énumérés à l’article 9.16.1. Ces mécanismes comprennent le régime d’arbitrage mis en place par le centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements devant un tribunal constitué conformément aux règlement d’arbitrage de la Commission des Nations unies pour le droit commercial international ou toute autre instance d’arbitrage ou tout autre régime d’arbitrage si les parties au différend y consentent.

64.      Les articles 9.18 à 9.21 ont trait, respectivement, à la constitution du tribunal arbitral, au droit applicable et aux règles d’interprétation, et aux recours manifestement non fondés ou dépourvus de fondement en droit.

65.      Lorsque le tribunal rend une sentence définitive constatant une violation des dispositions du chapitre 9, il peut ordonner, conjointement ou séparément, uniquement a) le versement d’une indemnité financière (dans les limites de l’article 9.24.2), majorée des intérêts éventuellement applicables et b) la restitution de biens, à la condition que la partie adverse ait la possibilité de verser une indemnité financière majorée des intérêts éventuellement applicables au lieu de procéder à la restitution (article 9.24.1). Le tribunal ne prononce pas de dommages-intérêts punitifs (article 9.24.2). Les articles 9.25 et 9.26 concernent, respectivement, l’indemnité ou autre forme de réparation ainsi que les dépens.

66.      L’article 9.27 porte sur l’effet obligatoire de la sentence rendue par le tribunal et sur le respect qui lui est dû.

67.      Conformément à l’article 9.28.1, aucune des parties à l’accord n’accorde de protection diplomatique ni n’introduit de recours au niveau international en ce qui concerne tout différend que l’un de ses investisseurs ou l’autre partie à l’accord ont consenti à soumettre ou ont soumis à l’arbitrage en vertu de la section B, à moins que l’autre partie à l’accord n’ait pas respecté la sentence rendue relativement à ce différend ou ne lui ait pas donné effet. Aux fins de l’article 9.28.1, la notion de « protection diplomatique » ne comprend pas les échanges diplomatiques informels effectués dans le seul but de faciliter le règlement du différend. Néanmoins, l’article 9.28.1 n’empêche pas les parties à l’accord de recourir au règlement des différends en vertu du chapitre 15 à l’égard d’une mesure d’application générale, même s’il est allégué que cette mesure a violé les dispositions de l’ALEUES en ce qui concerne un investissement particulier pour lequel une procédure d’arbitrage a été engagée.

68.      Les annexes du chapitre 9 concernent l’expropriation (annexes 9‑A à 9-C) ; une liste d’accords conclus entre les États membres et la République de Singapour (annexe 9-D) ; un mécanisme de médiation relatif aux différends entre investisseurs et États (annexe 9-E) ; le code de conduite à l’intention des arbitres et médiateurs (annexe 9-F) ainsi que les règles relatives à l’accès du public aux documents, aux audiences et à la possibilité, pour les tiers, de présenter des observations (annexe 9-G).

69.      Le chapitre 10 (« Marchés publics ») et ses neuf annexes fournissent un cadre pour les marchés publics passés par les parties. Aux fins du chapitre 10, les « marchés visés » s’entendent de marchés passés i) pour les besoins des pouvoirs publics aux fins de l’acquisition de marchandises, de services ou de toute combinaison des deux dont la valeur estimée égale ou dépasse le seuil applicable indiqué aux annexes 10-A à 10-G ; ii) par une entité contractante iii) qui ne sont pas autrement exclus (article 10.2.2). L’article 10.2.3 énumère les situations dans lesquelles le chapitre 10 ne s’applique pas (sauf disposition contraire dans les annexes 10-A à 10-G).

70.      L’article 10.3 est consacré à la sécurité et aux exceptions générales.

71.      L’article 10.4 énumère les principes généraux qui régissent les marchés publics. En particulier, les articles 10.4.1 et 10.4.2 énoncent les obligations de traitement national et d’autres formes d’obligations de non-discrimination. Conformément à l’article 10.4.7, ces dispositions ne s’appliquent pas aux mesures qui ne sont pas spécifiques aux marchés publics.

72.      L’article 10.5 énonce des règles concernant les informations sur le système de passation des marchés que chaque partie doit publier.

73.      Pour chaque marché visé, l’entité contractante publie un avis de marché envisagé (article 10.6.1), qui doit comporter toutes les informations dont la liste figure à l’article 10.6.2. De surcroît, un avis résumé doit être publié pour chaque marché envisagé (article 10.6.3). L’article 10.7 énonce certaines obligations concernant le type de conditions qu’une entité contractante peut (ou ne peut pas) imposer aux participants à une procédure de marché ; la manière d’apprécier si un fournisseur répond aux conditions de participation et les motifs pour lesquels une partie peut exclure un fournisseur. L’article 10.8 concerne la qualification des fournisseurs. L’article 10.9 énonce des exigences concernant les spécifications techniques et le dossier d’appel d’offres. L’article 10.10 est consacré à la nécessité d’accorder suffisamment de temps aux fournisseurs pour préparer et présenter des demandes de participation et des offres valables. L’article 10.11 s’applique aux négociations entre entités contractantes. L’article 10.12 expose les conditions auxquelles une entité contractante peut utiliser une procédure d’appel d’offres limité et décider de ne pas appliquer certaines des garanties instituées au chapitre 10. L’article 10.14 contient des règles de traitement des offres et d’adjudication des marchés. L’article 10.15 précise les obligations en matière de transparence des renseignements relatifs aux marchés qu’une entité doit soit fournir aux fournisseurs participants soit publier.

74.      L’article 10.16.1 impose à chaque partie de fournir dans les plus brefs délais à l’autre partie qui en fait la demande tous les renseignements nécessaires pour déterminer si un marché a été passé dans des conditions d’équité, d’une manière impartiale et conformément au chapitre 15. Dans certaines circonstances qu’ils précisent, ces renseignements ne doivent pas être divulgués (article 10.16.2).

75.      L’article 10.17 expose certaines exigences concernant le type de procédure administrative ou judiciaire que chaque partie doit mettre en place, les conditions auxquelles son recours doit être traité et la procédure à suivre.

76.      Les annexes au chapitre 10 concernent les entités centrales passant des marchés conformément aux dispositions de l’ALEUES (annexe 10-A) ; les entités sous-centrales passant des marchés conformément aux dispositions de l’ALEUES (annexe 10-B) ; les services publics et autres entités passant des marchés conformément aux dispositions de l’ALEUES (annexe 10-C) ; les marchandises visées (annexe 10-D) ; les services visés (annexe 10-E) ; les services de construction et les concessions de travaux (annexe 10-F) ; les notes générales et dérogations aux dispositions de l’article 10.4 (principes généraux) (annexe 10-G) ; les moyens de publication (annexe 10-H) ainsi que les partenariats public-privé (annexe 10-I).

77.      Le chapitre 11 (« Propriété intellectuelle ») a pour objectif de faciliter la production et la commercialisation de produits innovants et créatifs et la fourniture de services entre les parties ainsi que d’accroître les avantages découlant des échanges commerciaux et des investissements grâce à un niveau approprié et efficace de protection des droits de propriété intellectuelle et à la mise en place de mesures visant à faire respecter ces droits (article 11.1.1). Les objectifs et principes énoncés dans la partie I de l’accord ADPIC (en particulier aux chapitres 7 et 8) s’appliquent au chapitre 11, mutatis mutandis (article 11.1.2).

78.      La section A est consacrée au champ d’application du chapitre 11, aux définitions pertinentes et à l’épuisement des droits de propriété intellectuelle. L’article 11.2.1 dispose que les dispositions du chapitre 11 complètent les droits et obligations des parties au titre de l’accord ADPIC et des autres traités internationaux dans le domaine de la propriété intellectuelle auxquels elles sont parties. Aux fins du chapitre 11, on entend par « droits de propriété intellectuelle » tous les secteurs de la propriété intellectuelle qui font l’objet des sections 1 à 7 de la partie II de l’accord ADPIC, à savoir le droit d’auteur et les droits connexes ; les brevets ; les marques de fabrique ou de commerce ; les dessins et modèles ; les schémas de configuration (topographies) de circuits intégrés ; les indications géographiques et la protection des renseignements non divulgués [article 11.2.2, sous a), i) à vii), respectivement] de même que les obtentions végétales [article 11.2.2, sous b)]. Conformément à l’article 11.3, les parties sont libres d’établir leur propre régime concernant l’épuisement des droits de propriété intellectuelle sous réserve des dispositions pertinentes de l’accord ADPIC.

79.      Chaque sous-section de la section B traite d’un droit de propriété intellectuelle (ou d’un ensemble de droits de propriété intellectuelle) spécifique.

80.      La sous-section A est intitulée « Droit d’auteur et droits connexes ». Conformément à l’article 11.4 (« Protection octroyée »), les parties respectent les droits et obligations prévus par d’autres accords internationaux, à savoir la convention pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, signée à Berne le 9 septembre 1886 (acte de Paris du 24 juillet 1971), dans sa version résultant de la modification du 28 septembre 1979, le traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur le droit d’auteur, le traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes et l’accord ADPIC. L’article 11.5 définit les modalités de la protection du droit d’auteur et des droits connexes visés.

81.      Le reste de la sous-section A concerne le droit à une rémunération équitable et unique des producteurs de phonogrammes (article 11.6), les pratiques et politiques concernant le droit de suite des artistes (article 11.7), la mise en place d’une protection juridique appropriée et des voies de droit efficaces contre le contournement des mesures techniques efficaces qui sont mises en œuvre par les titulaires de droits dans le cadre de l’exercice de leurs droits et qui restreignent l’accomplissement d’actes, à l’égard de leurs œuvres, interprétations ou exécutions et phonogrammes, qui ne sont pas autorisés par les titulaires des droits ou permis en droit interne (article 11.9) et la protection de l’information sur le régime des droits sous forme électronique (article 11.10).

82.      La sous-section B est intitulée « Marques de fabrique ou de commerce ». Conformément à l’article 11.12, chaque partie déploie tous les efforts raisonnables pour respecter le traité sur le droit des marques (fait à Genève le 27 octobre 1994) et le traité de Singapour sur le droit des marques (adopté à Singapour le 27 mars 2006). Chaque partie met en place un système d’enregistrement des marques de fabrique ou de commerce en vertu duquel l’administration compétente en la matière indique par écrit les raisons d’un refus d’enregistrer une marque. Le demandeur doit avoir la possibilité de former un recours contre un tel refus devant une autorité judiciaire ; les tiers doivent avoir la possibilité de faire opposition à des demandes d’enregistrement de marques de fabrique ou de commerce et chaque partie doit créer une base de données électronique publique des demandes d’enregistrement et des enregistrements de marques de commerce ou de fabrique (article 11.13). Les parties doivent protéger les marques de fabrique ou de commerce notoirement connues conformément à l’accord ADPIC (article 11.14). L’article 11.15 énonce des exceptions aux droits conférés par une marque de fabrique ou de commerce.

83.      La sous-section C (« Indications géographiques ») s’applique à la reconnaissance et à la protection des indications géographique des vins, spiritueux, produits agricoles et denrées alimentaires qui sont originaires des territoires des parties (article 11.16.1). Dès l’entrée en vigueur de l’ALEUES, chaque partie établit des systèmes pour l’enregistrement et la protection des indications géographiques sur son territoire pour les catégories de vins, spiritueux, produits agricoles et denrées alimentaires qu’elle juge pertinentes (article 11.17). D’autres dispositions concernent des matières telles que le champ d’application de la protection des indications géographiques (article 11.19) ou les personnes autorisées à utiliser une indication géographique protégée (article 11.20).

84.      La sous-section D est intitulée « Dessins ou modèles ». Les parties doivent prévoir la protection des dessins ou modèles créés de manière indépendante qui sont nouveaux ou originaux. Cette protection doit être assurée par l’enregistrement du dessin ou du modèle et confère au titulaire des droits exclusifs (article 11.24.1). L’article 11.25 précise l’étendue des droits conférés par l’enregistrement au titulaire d’un dessin ou modèle protégé. La durée de la protection offerte est au moins égale à dix ans à compter de la date de la demande (article 11.26). L’article 11.27 concerne les exceptions limitées à la protection des dessins ou modèles. L’article 11.28 traite du rapport entre la protection des dessins ou modèles et le droit d’auteur.

85.      La sous-section E est intitulée « Brevets ». À l’article 11.29, les parties rappellent leurs obligations au titre du traité de coopération en matière de brevets et s’engagent, lorsque cela est approprié, à déployer tous les efforts raisonnables pour respecter les articles 1er à 16 du traité sur le droit des brevets (adopté le 1er juin 2000), d’une manière compatible avec leur droit et leurs procédures internes. Les parties s’engagent également à respecter la décision du conseil général de l’OMC du 30 août 2003 sur la mise en œuvre du paragraphe 6 de la déclaration de Doha sur l’accord ADPIC et la santé publique ainsi que la décision du Conseil général de l’OMC du 6 décembre 2005 sur l’amendement de l’accord ADPIC. L’article 11.31 précise les circonstances dans lesquelles les parties doivent prolonger la durée de validité des droits conférés par un brevet.

86.      La sous-section F (« Protection des données d’essai ») traite de la protection des données d’essai communiquées pour obtenir une approbation administrative de commercialisation en vue de la mise sur le marché d’un produit pharmaceutique ou d’un produit chimique pour l’agriculture (articles 11.33 et 11.34).

87.      La sous-section G (« Variétés végétales ») comporte une seule disposition, aux termes de laquelle les parties réaffirment leurs obligations au titre de la convention internationale pour la protection des obtentions végétales, adoptée à Paris le 2 décembre 1961, y compris leur capacité à appliquer l’exception facultative au droit d’obtenteur, telle que visée à l’article 15, paragraphe 2, de cette convention (article 11.35).

88.      La section C est intitulée « Moyens, en droit civil, de faire respecter les droits de propriété intellectuelle ». À l’article 11.36, les parties réaffirment leurs engagements en vertu des articles 41 à 50 de l’accord ADPIC et prévoient des procédures et des mesures, y compris correctives, dans le cadre de leur droit interne respectif contre les atteintes aux droits de propriété intellectuelle visés dans le chapitre 11, qui sont conformes à ces engagements (article 11.36.1). Ces mesures, procédures et corrections doivent remplir les conditions énoncées à l’article 11.36.2. L’article 11.36.3 dispose qu’aucune disposition du chapitre 11 n’affecte la capacité de l’une ou l’autre partie à appliquer son droit interne en général ni n’emporte aucune obligation pour l’une ou l’autre partie de modifier sa législation actuelle en ce qui concerne le respect des droits de propriété intellectuelle. En outre, aucune disposition de ce chapitre n’emporte aucune obligation pour l’une ou l’autre partie de mettre en place un système judiciaire distinct pour assurer les respect des droits de propriété intellectuelle ou en ce qui concerne la répartition des ressources entre les moyens de faire respecter les droits de propriété intellectuelle et les moyens de faire respecter la loi en général.

89.      La partie restante de la section C traite, en particulier, de l’obligation qu’a chaque partie de prendre des mesures appropriées pour publier ou mettre à la disposition du public des informations concernant les décisions judiciaires définitives dans des procédures judiciaires civiles en matière de violation d’un droit de propriété intellectuelle (article 11.37) ; l’obligation de mettre à la disposition des titulaires de droits les procédures et les mesures, y compris correctives, visées à la section C pour tous les secteurs de la propriété intellectuelle qui font l’objet des sections 1 à 6 de la partie II de l’accord ADPIC (article 11.38) ; l’obligation d’adopter des mesures de sauvegarde des éléments de preuve (article 11.39) ; l’obligation de prévoir la possibilité de rendre des injonctions (article 11.42) ; d’adopter d’autres mesures (article 11.43) et d’accorder des dommages-intérêts (article 11.44).

90.      La section D est intitulée « Mesures aux frontières ». L’article 11.49 définit le champ d’application de pareilles mesures, en particulier en ce qui concerne les procédures relatives aux marchandises sous contrôle douanier. L’article 11.50 fait aux autorités douanières l’obligation d’adopter une série d’approches visant à identifier les expéditions qui contiennent des marchandises comportant une marque contrefaisante, des marchandises pirates portant atteinte au droit d’auteur, des marchandises pirates portant atteinte à un dessin ou modèle ou des marchandises comportant une indication géographique contrefaisante. L’article 11.51 désigne les domaines dans lesquels les parties conviennent de coopérer.

91.      La section E (« Coopération ») contient une disposition unique, aux termes de laquelle les parties conviennent de coopérer afin de faciliter la mise en œuvre des engagements et obligations visés au chapitre 11 et désigne les activités qui doivent être comprises dans ces domaines (article 11.52).

92.      Le chapitre 12 (« Concurrence et questions connexes ») traite des activités antitrust et des concentrations, des entreprises publiques, des entreprises bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs et des monopoles d’État.

93.      La section A est consacrée aux activités antitrust et aux concentrations. À l’article 12.1.1, les parties reconnaissent l’importance d’une concurrence libre et non faussée dans leurs relations commerciales et reconnaissent que des pratiques ou des transactions commerciales anticoncurrentielles sont susceptibles de perturber le bon fonctionnement de leurs marchés et d’amoindrir les avantages de la libéralisation des échanges. L’article 12.1.2 dispose que, pour promouvoir une concurrence libre et non faussée dans tous les secteurs de son économie, chaque partie doit disposer d’une législation complète lui permettant de lutter efficacement contre trois problèmes qui affectent leur échanges, à savoir a) les accords horizontaux et verticaux ; b) les abus de position dominante et c) les concentrations entre entreprises qui entraînent une diminution significative de la concurrence ou entravent considérablement une concurrence effective.

94.      La section B est intitulée « Entreprises publiques, entreprises bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs et monopoles d’État ». L’article 12.3.1 dispose qu’aucune disposition du chapitre 12 n’empêche une partie de créer ou de maintenir des entreprises publiques, ou d’octroyer des droits spéciaux ou exclusifs à des entreprises en vertu de son droit. Le reste de l’article 12.3 énonce certaines obligations concernant les conditions applicables à de telles entreprises. L’article 12.4 dispose que les parties peuvent continuer à désigner ou maintenir des monopoles d’État. Néanmoins, elles doivent aménager leurs monopoles d’État à caractère commercial afin de garantir qu’ils n’exercent aucune discrimination lorsqu’ils acquièrent ou commercialisent des biens et des services.

95.      La section C concerne les subventions. L’article 12.5.1 et 2 définissent la notion de « subvention » aux fins de l’ALEUES et désignent les catégories de subventions qui relèvent du chapitre 12. L’article 12.5.3 dispose que les articles 12.7 (« Subventions prohibées »), 12.8 (« Autres subventions ») et 12.10 (« Clause de réexamen ») ainsi que l’annexe 12-A ne s’appliquent pas à différentes subventions dans le secteur de la pêche et de l’agriculture. Les dispositions de la section C ne préjugent pas les droits et obligations des parties résultant de l’accord OMC (article 12.6). L’article 12.7 désigne les types de subventions liés au commerce des marchandises et des services qui sont prohibés et prévoit certaines exceptions. L’article 12.8.2 concerne les échanges d’informations en matière de subventions. L’article 12.9 impose des obligations en matière de transparence. L’article 12.10.1 exige des parties qu’elles assurent un suivi permanent des questions visées dans la section C.

96.      La section D (« Questions générales ») énonce des obligations concernant la coopération et la coordination en matière d’application de la législation (article 12.11), la confidentialité (article 12.12) et la consultation (article 12.13). L’article 12.14 exclut du champ d’application du chapitre 15 (« Règlement des différends ») et du chapitre 16 (« Mécanismes de médiation ») toute question relative au chapitre 12, à l’exception de l’article 12.7 (« Subventions prohibées »).

97.      L’annexe 12-A énonce certains principes qui s’appliquent à d’autres types de subventions.

98.      Le chapitre 13 est intitulé « Commerce et développement durable ».

99.      La section A contient des dispositions préliminaires. L’article 13.1 se réfère à un certain nombre d’instruments internationaux et réaffirme l’engagement des parties en faveur du développement et de la promotion du commerce international ainsi que de leurs relations commerciales économiques bilatérales dans un objectif de développement durable (article 13.1.1). Les parties reconnaissent que le développement économique, le développement social et la protection de l’environnement sont interdépendants et sont des composantes du développement durable qui se renforcent mutuellement. Elles soulignent les avantages de la coopération sur les questions sociales et environnementales liées au commerce dans le cadre d’une approche globale du commerce et du développement durable (article 13.1.2). Les parties reconnaissent également qu’il n’y a pas lieu d’encourager le commerce ou l’investissement en affaiblissant ou en réduisant les protections prévues par les législations internes en matière de travail et d’environnement, mais elles insistent sur le fait que les normes en matière d’environnement et de travail ne devraient pas être utilisées à des fins protectionnistes (article 13.1.3). Les parties reconnaissent en outre que leur objectif est de renforcer leurs relations et leur coopération commerciales de façon à promouvoir le développement durable dans le contexte des articles 13.1.1 et 2 et déclarent qu’elles n’ont pas l’intention d’harmoniser leurs normes en matière de travail ou d’environnement (article 13.1.4).

100. Chaque partie conserve le droit d’établir ses propres niveaux de protection en matière d’environnement et de travail, ainsi que d’adopter ou de modifier en conséquence ses législations et politiques, de manière cohérente avec les principes des normes ou accords internationalement reconnus visés aux articles 13.3 et 13.6 auxquels elle est partie (article 13.2.1). Les parties doivent continuer d’améliorer ces législations et ces politiques, ainsi que de s’attacher à fournir et à favoriser des niveaux élevés de protection en matière d’environnement et de travail (article 13.2.2).

101. La section B est intitulée « Commerce et développement durable – Aspects liés au travail ». Les parties reconnaissent la valeur de la coopération internationale et des accords internationaux en matière d’emploi et de travail en tant qu’instruments adoptés par la communauté internationale en réponse aux défis et opportunités résultant de la mondialisation dans les domaines économique, social et de l’emploi ; elles s’engagent à se consulter et à coopérer, en fonction des besoins, sur les questions relatives au travail et à l’emploi qui touchent au commerce et présentent un intérêt mutuel (article 13.3.1). Elles réaffirment également l’engagement qu’elles ont pris de reconnaître le plein emploi, la création d’emplois productifs, le travail décent pour tous en tant qu’éléments clés du développement durable dans tous les pays et comme des objectifs prioritaires de la coopération internationale ; elles décident de favoriser le développement du commerce international d’une manière qui soit propice au plein emploi, à la création d’emplois productifs et au travail décent pour tous (article 13.3.2). En application des obligations qui leur incombent au titre de l’Organisation internationale du travail (OIT) et de la déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail ainsi que de son suivi, les parties s’engagent à respecter, promouvoir et appliquer de manière effective les principes concernant les droits fondamentaux au travail, à savoir a) la liberté d’association et la reconnaissance effective du droit de négociation collective ; b) l’élimination de toute forme de travail forcé ou obligatoire ; c) l’abolition effective du travail des enfants et d) l’élimination de la discrimination en matière d’emploi et de profession. Les parties réaffirment l’engagement qu’elles ont pris de mettre effectivement en œuvre les conventions de l’OIT que la République de Singapour et les États membres de l’Union ont ratifiées respectivement (article 13.3). Les parties déploieront des efforts continus et soutenus en vue de la ratification et de la mise en œuvre effective des conventions fondamentales de l’OIT ; elles s’engagent à envisager également la ratification et la mise en œuvre effective d’autres conventions de l’OIT, en tenant compte de leur situation interne, et d’échanger des informations à cet égard (article 13.3.4). À l’article 13.3.5, les parties reconnaissent que la violation des principes et des droits fondamentaux au travail ne saurait être invoquée ou autrement utilisée comme un avantage comparatif légitime.

102. À l’article 13.4, les parties reconnaissent l’importance de coopérer sur les aspects liés au commerce des politiques mises en œuvre en matière de travail afin de réaliser les objectifs de l’ALEUES. Cette disposition contient également une liste (non exhaustive) des domaines dans lesquels les parties peuvent entamer des activités de coopération dans des domaines d’intérêt commun.

103. L’article 13.5 dispose que, lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des mesures visant à améliorer la santé et la sécurité au travail qui peuvent avoir une incidence sur les échanges ou les investissements entre les parties, chaque partie tient compte des informations scientifiques et techniques pertinentes et des normes, lignes directrices ou recommandations internationales, y compris le principe de précaution.

104. La section C est intitulée « Commerce et développement durable – Aspects liés à l’environnement ». Les parties reconnaissent la valeur de la gouvernance et des accords internationaux en matière d’environnement et insistent sur la nécessité de veiller à ce que les politiques, règles et mesures commerciales et environnementales soient davantage complémentaires ; elles affirment qu’elles se consulteront et coopéreront s’il y a lieu en ce qui concerne les négociations sur les questions environnementales liées au commerce qui présentent un intérêt commun (article 13.6.1). Les parties s’engagent en outre à mettre en œuvre de manière effective dans leurs législations, réglementations ou autres mesures et pratiques respectives sur leur territoire les accords multilatéraux en matière d’environnement auxquels elles sont parties (article 13.6.2). Les parties réaffirment leur engagement en faveur de la réalisation de l’objectif ultime du protocole de Kyoto, annexé à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et s’engagent à œuvrer ensemble au renforcement du système multilatéral fondé sur des règles découlant de cette convention-cadre en s’appuyant sur les décisions adoptées au titre de celle-ci, ainsi qu’à soutenir les efforts visant à élaborer un accord international sur le changement climatique qui soit applicable après l’année 2020 à toutes les parties (article 13.6.3). Aucune disposition de l’ALEUES n’empêche les parties d’adopter ou de maintenir des mesures visant à mettre en œuvre les accords multilatéraux en matière d’environnement auxquels elles sont parties, sous réserve que ces mesures ne soient pas appliquées d’une manière qui constituerait soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les parties, soit une restriction déguisée du commerce (article 13.6.4).

105. L’article 13.7 traite du commerce du bois et des produits dérivés. Les parties reconnaissent l’importance de la conservation et de la gestion durable des forêts à l’échelle mondiale. Elles s’engagent a) à échanger des informations sur les moyens de promouvoir le commerce et la consommation de bois et de produits dérivés provenant de forêts gérées de manière légale et durable, ainsi que de promouvoir l’utilisation de ces moyens ; b) à encourager l’application des lois et la gouvernance dans le secteur forestier à l’échelle mondiale et à lutter contre le commerce du bois et des produits dérivés issus d’une récolte illégale ; c) à coopérer en vue de renforcer l’efficacité des mesures ou des politiques visant à lutter contre le commerce du bois et des produits dérivés issus d’une récolte illégale et d) à encourager l’utilisation effective de la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction.

106. L’article 13.8 concerne le commerce des produits de la pêche. Les parties reconnaissent l’importance d’assurer la conservation et la gestion des stocks halieutiques de manière durable, et s’engagent a) à respecter les mesures de conservation à long terme et à pratiquer une exploitation durable des stocks halieutiques tels que définis dans les instruments internationaux ratifiés par les parties concernées et à défendre les principes de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et des instruments pertinents des Nations unies relatifs à ces questions ; b) à instaurer et à mettre en œuvre des mesures efficaces de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (ci-après la « pêche INN »), et à faciliter l’exclusion des produits de la pêche INN des flux commerciaux et l’échange d’informations sur les activités de pêche INN ; c) à adopter des mesures de suivi et de contrôle efficaces afin de garantir le respect des mesures de conservation et d) à défendre les principes de l’accord visant à favoriser le respect, par les navires de pêche en haute mer, des mesures internationales de conservation et de gestion de la FAO et à respecter les dispositions pertinentes de l’accord de la FAO relatif aux mesures du ressort de l’État du port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche INN.

107. L’article 13.9 est rédigé dans des termes pratiquement identiques à ceux de l’article 13.5, sauf qu’ils se réfèrent et s’appliquent à des mesures de protection de l’environnement et non à la santé et à la sécurité au travail.

108. À l’article 13.10, les parties reconnaissent l’importance de coopérer sur les aspects des politiques environnementales qui sont liés au commerce afin de réaliser les objectifs de l’ALEUES. Cette disposition contient une liste (non exhaustive) des domaines d’intérêt commun dans lesquels les parties peuvent entamer des activités de coopération.

109. La section D contient des dispositions générales. L’article 13.11 fait état de la décision des parties de poursuivre leurs efforts particuliers pour faciliter et encourager le commerce et l’investissement dans les marchandises et services environnementaux (article 13.11.1), de s’employer tout particulièrement à faciliter la suppression des obstacles au commerce ou à l’investissement en ce qui concerne les marchandises et les services respectueux du climat (article 13.11.2), de la nécessité de diminuer les émissions de gaz à effet de serre et de limiter les distorsions des échanges dans toute la mesure du possible (article 13.11.3) ainsi que de promouvoir la responsabilité sociale des entreprises (article 13.11.4).

110. Conformément à l’article 13.12, une partie ne peut pas renoncer ou déroger, ni offrir de renoncer ou de déroger, à ses législations en matière de travail et d’environnement d’une manière qui affecte les échanges ou les investissements entre les parties (article 13.12.1) ou s’abstenir d’assurer le respect effectif de leurs législations en matière d’environnement et de travail par une démarche soutenue ou répétée d’action ou d’inaction d’une manière qui affecte les échanges ou les investissements entre les parties (article 13.12.2).

111. L’article 13.13 impose aux parties des obligations de transparence en ce qui concerne toute mesure de portée générale visant à protéger l’environnement ou les conditions de travail qui est susceptible d’avoir une incidence sur les échanges et les investissements entre les parties. Les articles 13.14 et 13.15 concernent l’examen de l’impact de l’ALEUES sur le développement durable ainsi que le mécanisme institutionnel de suivi du respect des dispositions du chapitre 13.

112. En cas de désaccord au sujet de toute question découlant du chapitre 13, les parties ne peuvent avoir recours qu’aux procédures prévues à l’article 13.16 (« Consultations au niveau des pouvoirs publics ») et à l’article 13.17 (« Groupe d’experts »). Les dispositions du chapitre 15 (« Règlement des différends ») et du chapitre 16 (« Mécanismes de médiation ») ne s’appliquent pas au chapitre 13 (article 13.16.1). Les articles 13.16.2 à 13.16.6 exposent les procédures des consultations au niveau des pouvoirs publics ainsi que les objectifs de ces consultations. L’article 13.7 énonce, notamment, les mécanismes et procédures de mise en place d’un groupe d’experts chargé d’examiner toute question qui n’aurait pas été réglée de façon satisfaisante par le conseil prévu à l’article 13.16.4.

113. Le chapitre 14 (« Transparence ») vise à la mise en place d’un environnement réglementaire transparent et prévisible pour les opérateurs économiques (article 14.2.1). Les parties y réaffirment leurs engagements respectifs au titre de l’accord OMC, apportent des clarifications et prévoient des modalités améliorées pour permettre la transparence, la consultation et une meilleure administration des mesures d’application générale (article 14.2.2). Une « mesure d’application générale » désigne les lois, règlements, décisions judiciaires, procédures et décisions administratives susceptibles d’avoir une incidence sur toute question visée par l’ALEUES. Une décision s’appliquant à une personne en particulier n’entre pas dans cette définition [article 14.1, sous a)].

114. L’article 14.3 énonce les obligations qu’ont les parties de publier tant les mesures d’application générale (article 14.3.1) que toute proposition d’adoption ou de modification d’une telle mesure (article 14.3.2). L’article 14.4.1 impose à chaque partie de désigner un point de contact dès l’entrée en vigueur de l’ALEUES afin de faciliter sa bonne mise en œuvre et la communication entre les parties sur toute question y visée. Les articles 14.4.2 à 14.4.8 énoncent de plus amples détails concernant ce point de contact, son fonctionnement et les demandes d’information qui lui sont adressées.

115. L’article 14.5 énumère les obligations que les parties doivent respecter de manière à administrer de façon cohérente, impartiale et raisonnable toutes les mesures d’application générale. En particulier, chaque partie a) s’efforce conformément à sa façon de procéder, d’envoyer aux personnes intéressées de l’autre partie qui sont directement concernées par une procédure un préavis raisonnable de l’engagement d’une procédure ; b) accorde à ces personnes une possibilité raisonnable de présenter des éléments de fait et des arguments à l’appui de leur position avant toute décision administrative définitive et c) veille à ce que ses procédures se fondent sur sa législation et y soient conformes.

116. L’article 14.6.1 impose à chaque partie l’obligation d’établir ou de maintenir des instances ou des procédures judiciaires, quasi judiciaires ou administratives afin d’examiner et, dans les cas où cela se justifie, de corriger, dans les plus brefs délais, les mesures administratives relatives aux questions visées par l’ALEUES. Ces tribunaux doivent être impartiaux et indépendants du service ou de l’organisme chargé de l’application des prescriptions administratives et n’avoir aucun intérêt substantiel dans l’issue de la question en litige (article 14.6.1). Chaque partie doit également faire en sorte que, devant ces tribunaux ou instances, les parties à la procédure bénéficient a) d’une possibilité raisonnable de soutenir ou de défendre leurs positions respectives et b) d’une décision fondée sur les éléments de preuve et sur les conclusions déposées ou, lorsque le droit interne l’exige, sur le dossier constitué par l’autorité administrative (article 14.6.2). L’article 14.6.3 porte sur l’application de ces décisions.

117. Les parties conviennent de coopérer à la promotion de la qualité et de l’efficacité de la réglementation (article 14.7.1) et de collaborer à la promotion des principes de bonne conduite administrative (article 14.7.2).

118. L’article 14.8 dispose que les règles spécifiques énoncées dans d’autres chapitres de l’ALEUES en ce qui concerne l’objet du chapitre 14 prévalent dans la mesure où elles diffèrent des dispositions de ce chapitre 14.

119. Le chapitre 15 (« Règlement des différends ») a pour objet de prévenir et de régler toute divergence qui pourrait survenir entre les parties quant à l’interprétation et à l’application de l’ALEUES et de parvenir, dans la mesure du possible, à une solution mutuellement acceptable (article 15.1). Le chapitre 15 s’applique à toute divergence concernant l’interprétation et l’application des dispositions de l’ALEUES, sauf disposition contraire expresse (article 15.2).

120. Les procédures exposées aux articles 15.3 à 15.13 prévoient les étapes suivantes dans le mécanisme RDIE : consultations de bonne foi en vue d’une solution mutuellement convenue (articles 15.3.1 à 15.4); demande d’établissement d’un groupe spécial d’arbitrage conformément à l’article 15.4 si les parties ne parviennent pas à régler le différend au terme des consultations susvisées (article 15.3.5) ; arbitrage (articles 15.4 à 15.8) ; procédures de mise en conformité (articles 15.9 à 15.11) ; application de mesures correctrices en cas de non‑conformité (article 15.12) et réexamen des mesures prises pour la mise en conformité après la suspension des obligations (article 15.13).

121. Les articles 15.14 à 15.19 contiennent diverses règles concernant les procédures d’arbitrage, règles qui sont complétées dans l’annexe 15‑A. Les dispositions générales qui figurent à la section D ont trait à la liste d’arbitres (article 15.20) ; au lien entre le mécanisme RDIE prévu au chapitre 15 et le mécanisme RDIE mis en place par l’OMC (article 15.21) ; aux délais (article 15.22) ainsi qu’à la révision et à la modification du chapitre 15 (article 15.23).

122. Le chapitre 16 (« Mécanisme de médiation ») vise à faciliter la recherche d’une solution mutuellement convenue par une procédure détaillée et rapide avec l’aide d’un médiateur (article 16.1). Le chapitre 16 s’applique à toute mesure relevant du champ d’application de l’ALEUES qui a une incidence négative sur les échanges commerciaux ou les investissements entre les parties, sauf disposition contraire (article 16.2).

123. Avant d’engager la procédure de médiation, une partie peut solliciter à tout moment par écrit des informations concernant une telle mesure (article 16.2). La procédure énoncée aux articles 16.3 à 16.6 prévoit les étapes suivantes dans le mécanisme de médiation : la demande d’ouverture d’une procédure de médiation (article 16.3) ; le choix du médiateur (article 16.4) ; la médiation elle-même (article 16.5) et la mise en œuvre d’une solution mutuellement convenue (article 16.6). L’article 16.7 traite du lien entre la médiation et le règlement des différends. D’autres dispositions portent sur les délais (article 16.8), les dépens (article 16.9) et le réexamen (article 16.10).

124. Le chapitre 17 est intitulé « Dispositions institutionnelles, générales et finales ». Les articles 17.1 et 17.2 établissent une structure institutionnelle composée de différents comités au sein desquels les parties doivent se rencontrer afin de superviser et de faciliter la mise en œuvre et l’application de l’ALEUES. L’article 17.3 dispose que, si l’une des dispositions de l’accord OMC que les parties ont intégrées dans l’ALEUES est modifiée, les parties, s’il y a lieu, se consultent en vue de trouver une solution mutuellement satisfaisante. L’article 17.4 règle le processus de décision dans les différents comités. L’article 17.5 a trait aux amendements dont l’ALEUES peut faire l’objet.

125. L’article 17.6.1 dispose que l’ALEUES ne s’applique aux mesures fiscales que dans la mesure où cela est nécessaire pour donner effet à ces dispositions. Conformément à l’article 17.6.2, aucune disposition de l’ALEUES n’affecte les droits et obligations de la République de Singapour ou de l’Union, ou de l’un de ses États membres, qui découlent de toute convention fiscale conclue entre la République de Singapour et un ou plusieurs États membres de l’Union. Aux termes des articles 17.6.3 et 17.6.4, aucune disposition de l’ALEUES ne fait obstacle à l’adoption ou au maintien de certains types de mesures fiscales ou à des mesures visant à prévenir la fraude ou l’évasion fiscales. L’article 17.6.5 concerne le droit de la République de Singapour d’adopter ou de maintenir des mesures fiscales qui sont nécessaires pour protéger ses intérêts publics supérieurs découlant de ses contraintes sociales spécifiques.

126. Les parties doivent autoriser, dans une monnaie librement convertible et conformément aux dispositions de l’article VIII des statuts du Fond monétaire international (FMI), tous paiements et transferts relevant du compte des transactions courantes de la balance des paiements entre elles. Dans ce contexte, elles doivent se consulter (article 17.7).

127. Chaque partie a l’obligation d’encourager ses fonds souverains à respecter les principes et les pratiques généralement acceptées, dits « principes de Santiago » (article 17.8).

128. L’article 17.9 concerne les conditions et procédures permettant à une partie qui rencontre ou risque de rencontrer de graves difficultés en matière de balance des paiements ou de finances extérieures d’adopter ou de maintenir des mesures restrictives en ce qui concerne le commerce de marchandises et de services, l’établissement ainsi que les paiements et transferts liés à des investissements.

129. L’article 17.10 énonce des exceptions concernant la sécurité, exceptions permettant aux parties de prendre toute mesure qu’elle juge nécessaire à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité.

130. Les dispositions restantes du chapitre 17 concernent la divulgation de renseignements et la protection des renseignements confidentiels (article 17.11) ; l’entrée en vigueur de l’ALEUES (article 17.12) ; sa durée et sa dénonciation (article 17.13) ; l’exécution des obligations imposées par l’ALEUES (article 17.14) ; l’absence d’effet direct (article 17.15) ; les annexes, appendices, déclarations communes, protocoles et clauses interprétatives qui font partie intégrante de l’ALEUES (article 17.16) ; les rapports entre l’ALEUES et l’accord de partenariat et de coopération ainsi que l’accord OMC (article 17.17) ; les futures adhésions à l’Union (article 17.18) ; l’application territoriale de l’ALEUES (article 17.9) et les textes de l’ALEUES faisant foi, à savoir les versions en langues bulgare, espagnole, tchèque, danoise, allemande, estonienne, grecque, anglaise, française, croate, italienne, lettonne, lituanienne, hongroise, maltaise, néerlandaise, polonaise, portugaise, roumaine, slovaque, slovène, finnoise et suédoise (article 17.20).

131. Le protocole no 1 est relatif à la définition de la notion de « produits originaires » et aux méthodes de coopération administrative. Les clauses interprétatives 1 à 5 concernent, respectivement l’article 17.6 (fiscalité) ; la rémunération des arbitres ; des dispositions additionnelles relatives aux douanes ; la reconnaissance mutuelle des programmes relatifs aux opérateurs économiques agréés et les contraintes spécifiques d’espace de Singapour ou l’accès aux ressources naturelles.


1      Langue originale : l’anglais.


2      Le texte de l’ALEUES est disponible au public sur le site Internet de la Commission : http://trade.ec.europa.eu/doclib/press/index.cfm?id=961. Voir également, pour un bref aperçu, points 9 à 30 plus bas et, pour un résumé plus détaillé, voir l’annexe des présentes conclusions. Le résumé exposé dans l’annexe des présentes conclusions est fondé sur la version en langue anglaise du texte de l’ALEUES que la Commission a fourni à la Cour (en annexe à sa requête). La Commission a par la suite transmis à la Cour des traductions de l’ALEUES dans toutes les langues officielles de l’Union. Il est apparu au cours de la rédaction et de la traduction des présentes conclusions que le texte anglais qu’elle avait initialement fourni à la Cour présente certaines différences par rapport i) à la version en langue anglaise accessible au public et ii) aux autres versions linguistiques livrées à la Cour. Par exemple, la version en langue anglaise accessible au public contient un considérant supplémentaire : « Reaffirming each Party’s right to adopt and enforce measures necessary to pursue legitimate policy objectives such as social, environmental, security, public health and safety, promotion and protection of cultural diversity » (« Réaffirmant le droit de chaque partie d’adopter et de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour poursuivre des objectifs légitimes de politiques publiques, notamment en matière sociale, environnementale ou de sécurité, de santé publique et de sûreté, ainsi que de promotion et de protection de la diversité culturelle »). Il apparaît également que la numérotation des notes en bas de page tant dans la version en langue anglaise fournie à la Cour que dans la version anglaise disponible sur Internet diffère de celle des autres versions linguistiques. Comme la seule version accessible au public au moment de la rédaction des présentes conclusions est rédigée en anglais, j’ai utilisé la numérotation de cette version-là, mais, chaque fois qu’une différence a attiré mon attention, j’ai indiqué qu’une note donnée pouvait avoir un numéro différent dans d’autres versions linguistiques. Je ne puis garantir que d’autres changements qui auraient échappé à ma vigilance n’ont pas été faits.


3      C’est-à-dire les accords énumérés à l’annexe I du Mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends.


4      Voir, à ce sujet, avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, points 34, 53, 71, 98 et 105). Dans cet avis, la Cour a examiné l’objet et les objectifs de différents accords internationaux faisant partie de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), signé à Marrakech le 15 avril 1994 (ci-après l’« accord OMC »), en particulier l’accord général sur le commerce des services (ci-après l’« AGCS ») et l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ci-après l’« accord ADPIC ») ainsi que divers accords régissant le commerce des marchandises repris à l’annexe 1A (« Accords multilatéraux sur le commerce des marchandises ») de l’accord OMC, tel que l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (ci-après le « GATT de 1994 ») et l’accord sur les obstacles techniques au commerce (ci-après l’« accord OTC »).


5       Par « compétence externe exclusive implicite », j’entends que cette exclusivité n’est pas fondée sur une disposition du traité qui confère expressément à l’Union une compétence exclusive dans un domaine déterminé.


6      C’est le terme utilisé par les parties dans leurs observations. Voir également, en particulier, points 307 et 346 plus bas.


7      L’article XXIV est intitulé « Application territoriale – Trafic frontalier – Unions douanières et zones de libre-échange ».


8      L’article V concerne l’« Intégration économique ».


9      La notion de « traitement national » signifie, en substance, que la fiscalité et la réglementation nationales ne devraient pas être appliqués aux produits importés ou nationaux d’une manière qui assure la protection de la production nationale.


10       Le texte de l’accord OMC et de tous les accords OMC qui en font partie peut être consulté à l’adresse Internet suivante : https://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/final_f.htm


11      Voir également article 4, paragraphe 1, TUE.


12      Voir également déclaration no 18 concernant la délimitation des compétences, qui figure parmi les déclarations annexées à l’acte final de la Conférence intergouvernementale qui a adopté le traité de Lisbonne (JO 2016, C 202, p. 335). Cette déclaration établit que « toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres ». Elle dispose également que « [l]orsque les traités attribuent à l’Union une compétence partagée avec les États membres dans un domaine déterminé, les États membres exercent leur compétence dans la mesure où l’Union n’a pas exercé la sienne ou a décidé de cesser de l’exercer […] ».


13      JO 2012, C 326, p. 307.


14      L’article 6 TFUE dresse la liste exhaustive des domaines dans lesquels l’Union dispose d’une compétence lui permettant de mener des actions pour appuyer, coordonner ou compléter l’action des États membres.


15      Il est entendu entre les parties que, pour certaines parties de l’ALEUES, l’Union dispose d’une compétence externe exclusive en application de l’article 3, paragraphe 1, sous e), et de l’article 207, paragraphe 1, TFUE.


16      L’article 5 CE disposait ce qui suit : « La Communauté agit dans les limites des compétences qui lui sont conférées et des objectifs qui lui sont assignés par le présent traité. Dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, la Communauté n’intervient, conformément au principe de subsidiarité, que si et dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire. L’action de la Communauté n’excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs du présent traité. »


17      Voir, pour un résumé utile, Lenaerts, K., et Van Nuffel, P., European Union Law, Sweet & Maxwell, 2011, points 7 021 à 7 025.


18      Je me refuse à toute supputation concernant la question de savoir si cette réversibilité s’applique également à la compétence externe exclusive attribuée à l’Union par l’article 3, paragraphe 2, TFUE. D’aucuns ont soutenu que, si l’Union occupe le terrain sur le plan interne et entreprend de conclure un accord international sur la base de l’article 3, paragraphe 2, TFUE, le fait qu’elle cesse par la suite de légiférer au plan interne n’affecte aucunement le caractère exclusif de sa compétence externe désormais bien établie. La doctrine est toutefois divisée sur ce point.


19      Il convient de souligner que la rédaction de cet article est loin d’être idéale. Le mécanisme de préemption institué à l’article 2, paragraphe 2, TFUE s’applique à toutes les compétences partagées sauf lorsque l’exception est expressément prévue (comme à l’article 4, paragraphes 3 et 4, TFUE). Tel qu’il est rédigé, l’article 4, paragraphe 1, TFUE définit logiquement les compétences en matière de politique étrangère et de sécurité commune (PESC) comme étant elles aussi des compétences « partagées », qui sont donc susceptibles de faire l’objet du mécanisme instauré à l’article 2, paragraphe 2 : un tel résultat pourrait déconcerter au moins certains États membres.


20      Voir, notamment, en ce qui concerne le principe d’attribution, avis 2/94 (Adhésion de la Communauté à la CEDH), du 28 mars 1996 (EU:C:1996:140, point 24), et avis 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 5).


21      Bien que l’article 3, paragraphe 2, TFUE énonce quatre cas de figure puisque le dernier membre de phrase (« d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée ») prévoit deux possibilités, je traiterai les deux derniers comme s’il s’agissait d’un seul. Toute référence au « troisième cas de figure » devra donc s’entendre comme incluant ces deux possibilités.


22      Chacun de ces cas de figure reflète ainsi le principe d’attribution [voir avis 1/13 (Adhésion d’États tiers à la convention de La Haye), du 14 octobre 2014 (EU:C:2014:2303, point 67 et jurisprudence citée)] ; le premier cas de figure reflète (en partie) l’avis 1/94 du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 95) ; le deuxième cas de figure est le condensé de l’avis 1/76 (Accord relatif à l’institution d’un Fonds européen d’immobilisation de la navigation intérieure), du 26 avril 1977 (EU:C:1977:63, point 3), tandis que le troisième et le quatrième cas de figure reflètent le principe que la Cour a établi (dans des termes, certes, plus larges) dans son arrêt du 31 mars 1971, Commission/Conseil (22/70, ci-après l’« arrêt AETR », EU:C:1971:32, points 17 et 18). Voir, pour une discussion plus détaillée du principe AETR, points 120 à 131 plus bas.


23      Un « acte législatif » est un acte juridique adopté suivant la procédure législative (article 289, paragraphe 3, TFUE). Voir, sur la distinction entre actes législatifs et actes réglementaires, arrêt du 3 octobre 2016, Inuit Tapariit Kanatami e.a./Parlement et Conseil (C-583/11 P, EU:C:2013:625). Le TUE interdit les actes législatifs dans la PESC : voir article 24, paragraphe 1, second alinéa, TUE.


24      Ici encore la rédaction du traité post-Lisbonne est insolite. Ce que j’ai exposé dans le corps du texte semblerait être la lecture naturelle du troisième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec le premier cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE ; cette lecture mène effectivement à la conclusion que la compétence externe que l’Union acquiert ainsi est de nature exclusive. Néanmoins cette conclusion n’est pas facile à concilier avec le libellé de l’article 4, paragraphe 4, TFUE. Supposons (par exemple) que l’Union adopte, dans le domaine de la coopération au développement, un acte législatif qui prévoirait la conclusion d’un accord international. Aux termes de l’article 4, paragraphe 4, TFUE, l’Union « dispose d’une compétence pour mener des actions et une politique commune » dans les domaines de la coopération au développement et de l’aide humanitaire, mais il poursuit en disant que « sans que l’exercice de cette compétence puisse avoir pour effet d’empêcher les États membres d’exercer la leur ». Si l’on s’en tient à cette formulation, peut-on vraiment affirmer que la compétence de l’Union qui en résulte est toujours exclusive ? (L’article 4, paragraphe 3, TFUE est rédigé dans des termes largement similaires en ce qui concerne les compétences dans les domaines de la recherche, du développement technologique et de l’espace, et suscite la même interrogation.)


25      Voir, en particulier, avis 1/76 (Accord relatif à l’institution d’un Fonds européen d’immobilisation de la navigation intérieure), du 26 avril 1977 (EU:C:1977:63, points 1 à 3). Dans cette affaire, l’accord en cause avait pour objet d’assainir la situation économique de la batellerie dans une région géographique où les transports par voies navigables intérieures revêtent une importance particulière dans l’ensemble des réseaux de transports internationaux (point 1). La Cour a dit pour droit que, si « l’établissement de règles communes en vertu de l’article 75 du traité [CEE] ne permet[tait] toutefois pas de réaliser entièrement l’objectif recherché, c’[était] en raison de la participation traditionnelle de bateaux relevant d’un État non membre, la Confédération suisse, à la navigation par les voies principales en question, soumises au régime de la liberté de navigation, établie par des instruments internationaux d’ancienne date » (point 2). Bien que la Cour n’ait pas dit expressément dans cet avis que la compétence de l’Union qui résultait de cette situation était exclusive, elle a clairement interprété l’avis 1/76 (Accord relatif à l’institution d’un Fonds européen d’immobilisation de la navigation intérieure), en ce sens dans sa jurisprudence ultérieure. Voir, notamment, avis 2/92 (Troisième décision révisée de l’OCDE relative au traitement national), du 24 mars 1995 (EU:C:1995:83, point 32).


26      L’arrêt que la Cour a rendu dans l’affaire AETR présentait, avant le traité de Lisbonne, une « valeur ajoutée » double : premièrement, il a créé une compétence externe et, secondement, il a défini cette compétence comme étant exclusive. Si un domaine (défini de manière appropriée) est gouverné par des règle communes, cela suffit à déclencher le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE pour ce domaine. Voir en outre points 120 à 131 plus bas.


27      Le quatrième cas de figure visé à l’article 216, paragraphe 1, TFUE dit « susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée », tandis que le troisième cas de figure visé à l’article 3, paragraphe 2, TFUE dit « dans la mesure où [cette conclusion] est susceptible d’affecter des règles communes ou d’en altérer la portée ». Cette légère différence de rédaction entre les deux dispositions n’entraîne, selon moi, aucune conséquence de fond.


28      Voir point 60 plus haut.


29      Je laisse de côté la question de savoir si, dans l’hypothèse où un État membre viendrait à se retirer unilatéralement d’un accord conclu à la fois par les États membres et l’Union sans avoir préalablement engagé un dialogue avec les institutions de l’Union (en particulier avec la Commission et le Conseil), ce retrait pourrait être considéré comme une violation du devoir de coopération loyale énoncé à l’article 4, paragraphe 3, TUE.


30      Dans les conclusions qu’elle a présentées dans l’affaire Commission/Conseil (C‑13/07, EU:C:2009:190, point 121), l’avocat général Kokott a écrit ceci : « Tout comme une petite goutte de pastis suffit à donner un aspect laiteux à un verre d’eau, des dispositions isolées, si accessoires soient-elles, comprises dans un accord international fondé sur l’article 133, paragraphe 5, premier alinéa, CE peuvent également rendre obligatoire la conclusion d’un accord mixte ». Voir également arrêt du 3 décembre 1996, Portugal/Conseil (C-268/94, EU:C:1996:461, point 39 et jurisprudence citée).


31      Voir, sur ce point, avis 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 15).


32      Voir, notamment, avis 1/75 (Arrangement OCDE – Norme pour les dépenses locales), du 11 novembre 1975 (EU:C:1975:145, p. 1360 et 1361) ; avis 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, points 6 et 17), ainsi qu’avis 2/13 (Adhésion de l’Union à la CEDH), du 18 décembre 2014 (EU:C:2014:2454, point 145).


33      Voir, notamment, avis 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, points 6 et 17).


34      Conformément à l’article 46, paragraphe 1, de la convention de Vienne sur le droit des traités, du 23 mai 1969 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 1155, p. 331) (ci-après la « convention de Vienne de 1969 »), « [l]e fait que le consentement d’un État à être lié par un traité a été exprimé en violation d’une disposition de son droit interne concernant la compétence pour conclure des traités ne peut être invoqué par cet État comme viciant son consentement, à moins que cette violation n’ait été manifeste et ne concerne une règle de son droit interne d’importance fondamentale ». Conformément à l’article 46, paragraphe 2, de cette convention, une violation est manifeste « si elle est objectivement évidente pour tout État se comportant en la matière conformément à la pratique habituelle et de bonne foi ». L’article 46 de la convention de Vienne sur le droit des traités entre États et organisations internationales ou entre organisations internationales, conclue le 21 mars 1986 (qui n’est pas encore entrée en vigueur) (A/CONF.129/15) (ci-après la « convention de Vienne de 1986 ») énonce des règles similaires.


35      J’observe, à ce sujet, que la Cour vient de recevoir une demande de décision préjudicielle concernant la compatibilité avec l’article 18, premier alinéa, l’article 267 et l’article 344 TFUE d’une disposition du mécanisme RDIE figurant dans un accord bilatéral de protection des investissements conclu entre des États membres de l’Union : voir affaire C-284/16, Slowakische Republik/Achmea BV (pendante devant la Cour).


36 ‑      Voir article 4, paragraphe 1, et article 5, paragraphe 2, TUE.


37      Voir, notamment, avis 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 5), et arrêt du 1er octobre 2009, Commission/Conseil (C-370/07, EU:C:2009:590, point 47).


38      Voir, tout récemment, arrêt du 14 juin 2016, Parlement/Conseil (C-263/14, EU:C:2016:435, point 43 et jurisprudence citée).


39      Avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 111).


40      Avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 112 et jurisprudence citée).


41      C’est ce qui ressort de la structure du raisonnement que la Cour a tenu dans l’avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739).


42      Voir, notamment, arrêts du 12 décembre 2002, Commission/Conseil (C-281/01, EU:C:2002:761, point 43), et du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C-137/12, EU:C:2013:675, point 76).


43      Voir avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 166).


44      Voir, par exemple, avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 68) ; arrêts du 12 décembre 2002, Commission/Conseil (C-281/01, EU:C:2002:761, point 43), et du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C-137/12, EU:C:2013:675, point 76), ainsi qu’avis 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, points 37 et 44).


45      Arrêt du 14 juin 2016, Parlement/Conseil (C-263/14, EU:C:2016:435, point 44 et jurisprudence citée) ; voir également arrêt du 10 janvier 2016, Commission/Conseil (C-94/03, EU:C:2006:2, point 51).


46      Avis 1/75 (Arrangement OCDE – Norme pour les dépenses locales), du 11 novembre 1975 (EU:C:1975:145, p. 1364). Voir également arrêt du 15 décembre 1976, Donckerwolcke et Schou (41/76, EU:C:1976:182, point 32).


47      Article 30 TFUE.


48      Conclusions que l’avocat général Wahl a présentées dans la procédure d’avis 3/15 (Traité de Marrakech sur l’accès aux œuvres publiées), du 14 février 2017 (EU:C:2016:657, point 43).


49      Avis 1/78 (Accord international sur le caoutchouc naturel), du 4 octobre 1979, EU:C:1979:224, point 44, et arrêt du 26 mars 1987, Commission/Conseil (45/86, EU:C:1987:163, point 20).


50      Voir conclusions que l’avocat général Wahl a présentées dans la procédure d’avis 3/15 (Traité de Marrakech sur l’accès aux œuvres publiées), du 14 février 2017 (EU:C:2016:657, point 43).


51      Avis 1/78 (Accord international sur le caoutchouc naturel), du 4 octobre 1979 (EU:C:1979:224, points 41 à 46).


52      Arrêts du 17 octobre 1995, Werner (C-70/94, EU:C:1995:328, point 10), ainsi que du 17 octobre 1995, Leifer e.a. (C-83/94, EU:C:1995:329, point 11).


53      Arrêt du 29 mars 1990, Grèce/Conseil (C-62/88, EU:C:1990:153, points 17 à 20), et avis 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 40). Voir également, plus récemment, conclusions que l’avocat général Wahl a présentées dans la procédure d’avis 3/15 (Traité de Marrakech sur l’accès aux œuvres publiées), du 14 février 2017 (EU:C:2016:657, point 69).


54      Arrêts du 18 juillet 2013, Daiichi Sankyo et Sanofi-Aventis Deutschland (C‑414/11, EU:C:2013:520, point 50), ainsi que du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C‑137/12, EU:C:2013:675, point 56).


55      Voir, notamment, arrêts du 18 juillet 2013, Daiichi Sankyo et Sanofi-Aventis Deutschland (C‑414/11, EU:C:2013:520, points 51 et 52 ainsi que jurisprudence citée), et du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C‑137/12, EU:C:2013:675, points 57 et 58).


56      Arrêt du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C‑137/12, EU:C:2013:675, point 67).


57      Cette approche est corroborée dans l’avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 [EU:C:1994:384, points 44 et 45 (en ce qui concerne les services) ainsi que 59 et 60 (en ce qui concerne les droits de propriété intellectuelle].


58      Aux termes de cette déclaration, « conformément au système de répartition des compétences entre l’Union et les États membres tel que prévu par le [TUE] et le [TFUE], toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres ».


59      Voir points 424 à 430 plus bas.


60      C’est la raison pour laquelle je ne partage pas l’interprétation que l’avocat général Kokott a donnée à la limitation qui résultait jadis de l’article 133, paragraphe 6, CE. Voir conclusions que l’avocat général Kokott a présentées dans l’affaire Commission/Conseil (C-13/07, EU:C:2009:190, points 120 à 122 et 139 à 142). Selon l’avocat général Kokott, le premier alinéa de cette disposition a pour sens et finalité, « de manière très générale, d’établir un parallélisme entre les compétences internes et externes de l[’Union] et d’éviter que l[’Union] contracte, vis‑à‑vis de l’extérieur, des engagements qu’elle ne pourrait pas transposer sur le plan interne, faute de compétences suffisantes ».


61      Voir article 6 TFUE.


62      Voir article 168 TFUE. Aux termes de l’article 6 TFUE, en matière de protection et d’amélioration de la santé humaine, l’Union dispose d’une compétence pour mener des actions pour « appuyer, coordonner ou compléter l’action des États membres ».


63      Voir, respectivement, article 153, paragraphe 2, sous a), article 165, paragraphe 4, article 168, paragraphe 5, et article 167, paragraphe 5, TFUE.


64      Voir points 208 à 219 plus bas.


65      Arrêt du 31 mars 1971 (22/70, EU:C:1971:32, point 16).


66      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, points 49 et 50).


67      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 48).


68      Voir article 133, paragraphe 6, troisième alinéa, CE (« La négociation et la conclusion d’accords internationaux dans le domaine des transports restent soumises aux dispositions du titre V et de l’article 300 »). Cette disposition exprimait l’intention des auteurs du traité de Nice « de maintenir une forme de statu quo ante en la matière » [voir avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 159)].


69      Voir article 207, paragraphe 5, TFUE.


70      Avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 164).


71      Avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 163). La même conclusion pouvait déjà être tirée (ne serait-ce que de manière implicite) de l’avis 2/92 (Troisième décision révisée de l’OCDE relative au traitement national), du 24 mars 1995 (EU:C:1995:83, point 27).


72      Voir points 208 à 219 plus bas.


73      Voir points 221 à 224 plus bas.


74      Voir, notamment, arrêt du 5 novembre 2002, Commission/Allemagne (C-476/98, EU:C:2002:631, point 109 et jurisprudence citée).


75      Arrêt du 5 novembre 2002, Commission/Allemagne (C-476/98, EU:C:2002:631, point 108 et jurisprudence citée).


76      Voir, en ce sens, avis 1/03 (Nouvelle convention de Lugano), du 7 février 2006 (EU:C:2006:81, points 45, 121 et 122).


77      Voir points 225 à 268 plus bas.


78      Arrêt 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 66).


79      Arrêt du 31 mars 1971, Commission/Conseil (22/70, EU:C:1971:32, point 21). Ces obligations sont désormais inscrites à l’article 4, paragraphe 3, deuxième et troisième alinéas, TUE.


80      Arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 75).


81      Cette approche pourrait ainsi être appliquée à la convention du Conseil de l’Europe sur la protection des droits des organismes de radiodiffusion (arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil, C-114/12, EU:C:2014:2151, points 78 à 103) ou au traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des autres personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées, adopté le 27 juin 2013 par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) [voir conclusions que l’avocat général Wahl a présentées dans la procédure d’avis 3/15 (Traité de Marrakech sur l’accès aux œuvres publiées), du 14 février 2017 (EU:C:2016:657, points 137 à 154)].


82      Voir points 350 à 359 plus bas.


83      Arrêts du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 69 et jurisprudence citée), ainsi que du 26 novembre 2014, Green Network (C-66/13, EU:C:2014:2399, point 30). Cette étape de l’analyse distingue le contrôle au regard de l’article 3, paragraphe 2, TFUE de l’identification de domaines « préemptés » par l’action de l’Union engagée dans l’exercice de compétences partagées.


84      Arrêts du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 70 et jurisprudence citée), ainsi que du 26 novembre 2014, Green Network (C-66/13, EU:C:2014:2399, point 31).


85      Voir, notamment, arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 81).


86      Voir, notamment, arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 82).


87      Voir, notamment, avis 1/03 (Nouvelle convention de Lugano), du 7 février 2006 (EU:C:2006:81, point 172).


88      Avis 1/13 13 (Adhésion d’États tiers à la convention de La Haye), du 14 octobre 2014 (EU:C:2014:2303, point 74 et jurisprudence citée), ainsi qu’arrêt du 26 novembre 2014, Green Network (C-66/13, EU:C:2014:2399, point 33).


89      Voir points 234 et 349 à 361 plus bas.


90      Arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 68 et jurisprudence citée).


91      Arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 68 et jurisprudence citée).


92      Arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 71 et jurisprudence citée).


93      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 96).


94      J’ai déjà exprimé cette opinion dans les conclusions que j’ai présentées dans l’affaire Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:224, points 104 à 111).


95      Arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 73).


96      Voir point 2 de l’annexe aux présentes conclusions.


97      Tout autre est la question de savoir si toutes les matières couvertes dans le chapitre de l’ALEUES relatif aux services (chapitre 8) relèvent effectivement de la compétence exclusive de l’Union. Voir points 195 à 268 plus bas.


98      Voir points 3 à 12 de l’annexe aux présentes conclusions.


99      Voir point 131 de l’annexe aux présentes conclusions.


100      Le texte de cet accord peut être consulté à l’adresse Internet suivante : https://www.wto.org/french/tratop_f/tradfa_f/tradfa_f.htm


101      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 34).


102      La Cour a examiné certains de ces accords (l’accord sur l’agriculture, l’accord SPS et l’accord OTC) à la lumière des arguments spécifiques que les parties avaient soulevés à leur sujet. Voir avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, points 28 à 33).


103      La position était la même sous le régime de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1947 (ci-après le « GATT de 1947 ») dans la mesure où la Communauté avait progressivement acquis des pouvoirs qui étaient exercés par les États membres auparavant. Voir arrêts du 12 décembre 1972, International Fruit Company e.a. (21/72 à 24/72, EU:C:1972:115, point 18), ainsi que du 3 juin 2008, The International Association of Independent Tanker Owners e.a. (C‑308/06, EU:C:2008:312, points 48 et 49).


104      Voir également points 510 à 512 plus bas.


105      Voir article 12 de l’accord antidumping et l’article 10, paragraphe 1, du GATT de 1994.


106      Voir article 18, paragraphe 1, et article 19 de l’accord antidumping.


107      Voir, notamment, article IX, paragraphe 6, du GATT de 1994 (collaboration en vue d’éviter certaines utilisations de marques commerciales) ; article XV [collaboration, consultation et échange d’informations avec le Fonds monétaire international (FMI) concernant les arrangements d’échange] ; article XXV du GATT de 1994 (action collective des parties contractantes) ; article XXXVIII du GATT de 1994 (action collective en vue de la réalisation des objectifs énumérés à l’article XXXVI sur le commerce et le développement) ; article 4, paragraphe 2, de l’accord SPS (consultations en vue de parvenir à des accords sur la reconnaissance de l’équivalence de mesures SPS spécifiées) ; article 7 et annexe B de l’accord SPS (transparence et échange de renseignements) ainsi qu’article 10 de l’accord OTC (échange de renseignements).


108      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC) du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 34).


109      Voir points 467 à 504 plus bas.


110      Voir points 19 à 51 de l’annexe aux présentes conclusions.


111      Voir, pour les arguments concernant les transports, points 168 à 194 plus bas.


112      Directive du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d’instruments financiers et modifiant la directive 2002/92/CE et la directive 2011/61/UE (JO 2014, L 173, p. 349).


113      Directive du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 (JO 2005, L 255, p. 22), telle que modifiée.


114      Directive du Conseil du 23 juillet 1996 concernant l’harmonisation des conditions d’obtention des certificats nationaux de conduite de bateaux de navigation intérieure pour le transport de marchandises et de personnes dans la Communauté (JO 1996, L 235, p. 31), et directive du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 concernant le niveau minimal de formation des gens de mer (JO 2008, L 323, p. 33).


115      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 20 février 2008 concernant des règles communes dans le domaine de l’aviation civile et instituant une Agence européenne de la sécurité aérienne, et abrogeant la directive 91/670/CEE du Conseil, le règlement (CE) no 1592/2002 et la directive 2004/36/CE (JO 2008, L 79, p. 1), tel que modifié.


116      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 14 janvier 2009 instaurant un code de conduite pour l’utilisation de systèmes informatisés de réservation et abrogeant le règlement (CEE) no 2299/89 du Conseil (JO 2009, L 35, p. 47).


117      Directive du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 établissant un espace ferroviaire unique européen (JO 2012, L 343, p. 32).


118      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l’accès au marché du transport international de marchandises par route (JO 2009, L 300, p. 72).


119      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l’accès au marché international des services de transport par autocars et autobus, et modifiant le règlement (CE) no 561/2006 (JO 2009, L 300, p. 88).


120      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes sur les conditions à respecter pour exercer la profession de transporteur par route, et abrogeant la directive 96/26/CE du Conseil (JO 2009, L 300, p. 51).


121      Voir point 177 plus bas.


122      Voir article 8.13 de l’ALEUES.


123      Directive du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers dans le cadre d’un transfert temporaire intragroupe (JO 2014, L 157, p. 1).


124      Voir point 169 plus haut.


125      Règlement du Conseil du 22 décembre 1986 portant application du principe de la libre prestation des services aux transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers (JO 1986, L 378, p. 1).


126      Article 1er, paragraphe 2, du règlement no 4055/86.


127      La Commission se fonde sur l’avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 51), et sur l’avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 166).


128      Ces exemples incluent la directive 2012/34, la directive 2005/45/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 septembre 2005, sur la reconnaissance mutuelle des brevets des gens de mer délivrés par les États membres et modifiant la directive 2001/25/CE (JO 2005, L 255, p. 160) ainsi que le règlement no 1071/2009.


129      Dans leurs observations, les parties ne se sont pas attardées sur les procédures internes qui ont amené l’Union à parvenir à un accord avec la République de Singapour sur les termes de ces réserves.


130      Règlement du 16 décembre 1991 fixant les conditions de l’admission de transporteurs non‑résidents aux transports nationaux de marchandises ou de personnes par voie navigable dans un État membre (JO 1991, L 373, p. 1).


131      Règlement du 8 juillet 1996 concernant des règles communes applicables aux transports de marchandises ou de personnes par voie navigable entre États membres, en vue de réaliser dans ces transports la libre prestation de services (JO 1996, L 175, p. 7).


132       Article 4, paragraphe 1, sous a) et b), de la directive 2014/66.


133      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas (code des visas) (JO 2009, L 243, p. 1)


134      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 44).


135      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, points 45 à 47). La Cour a confirmé cette position dans son avis 2/92 92 (Troisième décision révisée de l’OCDE relative au traitement national), du 24 mars 1995 (EU:C:1995:83, points 24 à 26).


136      Voir article 133, paragraphe 5, CE. Le traité d’Amsterdam a introduit une base juridique permettant d’étendre la portée de la politique commerciale commune. Cette faculté n’a cependant jamais été exercée.


137      L’article 133, paragraphe 6, deuxième alinéa, CE disposait que « [p]ar dérogation au paragraphe 5, premier alinéa, les accords dans le domaine du commerce des services culturels et audiovisuels, des services d’éducation ainsi que des services sociaux et de la santé humaine relèvent de la compétence partagée entre la Communauté et ses États membres ».


138      Avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 119).


139      Voir points 208 à 219 plus bas. Des règles de procédure spécifiques continuent à s’appliquer à certains domaines ou secteurs du commerce des services. Voir article 207, paragraphe 4, TFUE.


140      La section B s’applique aux mesures affectant la fourniture transfrontière de services. Néanmoins, aux fins de cette section, la fourniture transfrontière de services est définie comme couvrant également la consommation à l’étranger (article 8.4 de l’ALEUES).


141      Voir point 197 plus haut.


142      Voir, en ce sens, arrêts du 22 octobre 2013, Commission/Conseil, C-137/12 (EU:C:2013:675, points 73 et 74), et du 18 décembre 2014, Royaume-Uni/Conseil (C-81/13, EU:C:2014:2449, point 37).


143      Voir point 109 plus haut.


144      Voir point 109 plus haut.


145      Voir points 225 à 268 plus bas.


146      Voir avis 1/08 08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, points 168 à 173).


147      Voir arrêt du 4 avril 1974, Commission/France (167/73, EU:C:1974:35, point 27).


148      Voir, notamment, arrêt du 1er octobre 2015, Trijber et Harmsen (C-340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:641, point 47).


149      Arrêt du 22 décembre 2010, Yello Cab Verkehrsbetrieb (C-338/09, EU:C:2010:814, points 31 à 33).


150      Voir, par analogie, arrêt du 15 octobre 2015, Grupo Itevelesa e.a. (C-168/14, EU:C:2015:685).


151      Avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 169).


152      Article 4, paragraphe 2, sous g), TFUE.


153      Considérants 32, 33 et 34 du règlement no 216/2008.


154      Article 3, sous d), du règlement no 216/2008.


155      Article 1er, paragraphe 1, sous a), du règlement no 216/2008.


156      Voir point 123 plus haut.


157      Annexe 8-A-1, liste des engagements spécifiques conformément à l’article 8.7 (fourniture transfrontière de services), section 11.C.


158      Voir points 128 à 130 plus haut.


159      Titres 16 et 17.


160      Une vue d’ensemble de ce droit dérivé est disponible à l’adresse Internet suivante : http://eur-lex.europa.eu/summary/chapter/transport.html?root_default=SUM_1_CODED%3D32%2CSUM_2_CODED%3D3205&locale=fr (consultée le 4 octobre 2016).


161      Chacun de ces modes est mentionné à l’article 100 TFUE.


162      La Commission n’a présenté aucun argument concernant la répartition des compétences en ce qui concerne le transport par conduites de produits autres que des combustibles.


163      Article 1er, paragraphe 4, sous a) et b) du règlement no 4055/86.


164      Arrêt du 8 juillet 2014, Fonnship et Svenska Transportarbetareförbundet (C-83/13, EU:C:2014:2053, point 41 ainsi que jurisprudence citée).


165      Article 1er, paragraphes 1 et 2, du règlement no 4055/86.


166      L’article 7 du règlement no 4055/86 habilite le Conseil à « étendre le bénéfice des dispositions de [ce] règlement aux prestataires de services de transport maritime ressortissants d’un États tiers et établis dans l[‘Union] », mais cette disposition n’a toujours pas été mise en œuvre à ce jour.


167      Avis 1/03 (Nouvelle convention de Lugano), du 7 février 2006 (EU:C:2006:81).


168      Règlement du 22 décembre 2000 (JO 2001, L 12, p. 1).


169      Avis 1/03 (Nouvelle convention de Lugano), du 7 février 2006 (EU:C:2006:81, point 172).


170      Une condition de nationalité peut être appliquée.


171      Voir, notamment, arrêts du 5 octobre 1994, Commission/France (C-381/93, EU:C:1994:370, point 13), et du 11 janvier 2007, Commission/Grèce (C-269/05, non publié, EU:C:2007:17, point 20).


172      Voir, notamment, arrêt du 14 novembre 2002, Geha Naftiliaki e.a. (C‑435/00, EU:C:2002:661, point 20).


173      Article 3 du règlement no 4055/86.


174      Voir points 214 et 215 plus haut.


175      Voir points 350 à 359 plus bas.


176      Comme je l’ai expliqué, c’est à la partie qui se prévaut d’une compétence exclusive qu’il appartient de démontrer la nature exclusive de la compétence externe de l’Union sur laquelle elle se fonde (point 122 plus haut).


177      Article 2, paragraphe 1, de la directive 2014/66.


178      Voir point 226 plus haut. Il n’est pas davantage pertinent pour la répartition des compétences que la liste des engagements de l’Union ait été négociée sur la base de listes figurant dans l’AGCS.


179      Voir point 243 plus haut.


180      Voir points 221 à 224 plus haut.


181      Règlement du 24 juillet 1989 instaurant un code de conduite pour l’utilisation de systèmes informatisés de réservation (JO 1989, L 220, p. 1).


182      Voir, notamment, arrêt du 5 novembre 2002, Commission/Danemark (C-467/98, EU:C:2002:625, point 103).


183      Voir points 243 et 246 plus haut.


184      Les services de transport ferroviaire ne sont pas mentionnés à propos du mode 4 dans la liste des engagements spécifiques concernant le personnel clé et les stagiaires de grade postuniversitaire ainsi que les vendeurs de services aux entreprises dans l’appendice 8-A-3, qui, aux termes de son premier point, a pour objet d’énumérer « les activités économiques libéralisées en application des articles 8.7 […] et 8.12 […] pour lesquelles s’appliquent des limitations concernant le personnel clef et les stagiaires de niveau postuniversitaire en application des articles 8.14 […] et 8.15 » et de préciser ces limitations.


185      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 67), et arrêt du 3 décembre 1996, Portugal/Conseil (C-268/94, EU:C:1996:461, point 75).


186      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, points 66 à 68).


187      Arrêt du 3 décembre 1996 (C-268/94, EU:C:1996:461, point 75).


188      Article 1er, paragraphe 2, de la directive 2012/34.


189      Considérant 7 de la directive 2012/34.


190      Voir article 1er, paragraphe 1, sous b), article 10, paragraphes 1 et 2, ainsi qu’article 17 de la directive 2012/34.


191      Articles 18 à 21 de la directive 2012/34.


192      Article 8.9 de l’ALEUES. Les exceptions à cette règle qui sont énoncées dans cette disposition sont ici dénuées de pertinence.


193      Article 8.10.1 de l’ALEUES. Voir point 252 plus haut.


194      Article 8.11.1 de l’ALEUES.


195      Article 17, paragraphes 1 et 3, de la directive 2012/34.


196      Appendice 8-A-2 de l’ALEUES. Cette limitation, qui s’applique aux services de transport ferroviaire nécessitant l’utilisation du domaine public, permet de soumettre les activités économiques considérées comme des services publics au niveau national ou local à des monopoles publics ou à des droits exclusifs octroyés à des opérateurs privés.


197      Article 10 de la directive 2012/34.


198      Articles 38 à 54 de la directive 2012/34.


199      Voir point 125 plus haut.


200      Voir point 226 plus haut.


201      Article 1er, paragraphe 1, du règlement no 1071/2009.


202      Articles 3 et 5 à 9 du règlement no 1071/2009.


203      Article 10 du règlement no 1071/2009.


204      Ce règlement s’applique tant au transport international de marchandises par route, qui est défini comme le transport international de marchandises par route pour compte d’autrui pour les trajets effectués sur le territoire de l’Union, qu’au transport national de marchandises par route assuré à titre temporaire par un transporteur non résident (« cabotage ») (article 1er, paragraphes 1 et 4, du règlement no 1072/2009).


205      Ce règlement s’applique aux transports internationaux de voyageurs par autocars et autobus qui sont effectués, sur le territoire de l’Union, par des transporteurs pour compte d’autrui ou pour compte propre établis dans un État membre en conformité avec la législation de celui-ci et au moyen de véhicules immatriculés dans cet État membre, aptes, d’après leur type de construction et leur équipement, à transporter plus de neuf personnes, le conducteur compris, et destinés à cet effet ainsi qu’aux déplacements à vide de véhicules en rapport avec ces transports (article 1er, paragraphe 1, du règlement no 1073/2009). Il s’applique également au transport national de voyageurs par route pour compte d’autrui assuré à titre temporaire par un transporteur non résident (« cabotage ») (article 1er, paragraphe 4, du règlement no 1073/2009).


206      Voir article 4 des règlements nos 1072/2009 et 1073/2009.


207      Voir articles 5 et 7 du règlement no 1072/2009. Une « attestation de conducteur » est, en substance, un certificat délivré par un État membre à tout transporteur pour le transport de marchandises par route pour compte d’autrui sous une licence communautaire.


208      Voir points 257 et 258 plus haut.


209       Article 8.9 de l’ALEUES. Les exceptions à cette règle énoncées dans cette disposition sont dénuées ici de pertinence.


210       Article 8.10.1 de l’ALEUES. Voir également point 260 plus haut.


211      Article 8.11.1 de l’ALEUES.


212      Articles 7 et 8 du règlement no 1071/2009.


213      Voir points 523 à 544 plus bas.


214      Voir points 52 à 60 de l’annexe aux présentes conclusions.


215      Article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’AGCS.


216      La Commission se réfère à l’arrêt du 31 mars 1971, Commission/Conseil (22/70, EU:C:1971:32, point 31), et à l’avis 1/03 (Nouvelle convention de Lugano), du 7 février 2006 (EU:C:2006:81, points 122 et 133).


217      Arrêt du 27 novembre 2012 (C-370/12, EU:C:2012:756).


218      Avis 1/92 (Accord EEE – II), du 10 avril 1992 (EU:C:1992:189).


219      Arrêt du 27 novembre 2012 (C-370/12, EU:C:2012:756).


220      Avis 1/92 (Accord EEE – II), du 10 avril 1992 (EU:C:1992:189).


221      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 12 janvier 2005 relatif aux statistiques communautaires de la balance des paiements, du commerce international des services et des investissements directs étrangers (JO 2005, L 35, p. 23).


222      Directive du Conseil du 24 juin 1988 pour la mise en œuvre de l’article 67 du traité (JO 1988, L 178, p. 5).


223      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 établissant des dispositions transitoires pour les accords bilatéraux d’investissement conclus entre des États membres et des pays tiers (JO 2012, L 351, p. 40).


224      Voir points 371 à 398 plus bas.


225      Articles 9.1.1 et 9.1.2 de l’ALEUES.


226      Note sans objet pour la version en langue française des présentes conclusions.


227      Les discussions sur l’article III-315, paragraphe 1, ont coïncidé avec des débats à l’OMC sur la question de savoir s’il fallait négocier des dispositions de l’OMC sur les investissements étrangers directs. Dans la déclaration ministérielle qu’elle a adoptée le 14 novembre 2001 et qui a lancé le Doha Development Round, la conférence ministérielle de l’OMC a reconnu « les arguments en faveur d’un cadre multilatéral destiné à assurer des conditions transparentes, stables et prévisibles pour l’investissement transfrontières à long terme, en particulier l’investissement étranger direct, qui contribuera à l’expansion du commerce » (mise en italique par mes soins) [WT/MIN(01)/DEC/1 (20 novembre 2001), point 20 ; voir également point 22]. C’est précisément lorsque les investissements étrangers directs faisaient leur entrée dans la politique commerciale commune que les membres de l’OMC (réunis au sein du conseil général de l’OMC) ont décidé que rien ne serait entrepris au sein de l’OMC durant le Doha Development Round en vue de négociations sur les investissements [OMC, conseil général, décision adoptée par le conseil général le 1er août 2004, WT/L/579 (2 août 2004), paragraphe 1, sous g)].


228      Voir point 344 plus bas.


229      Voir, notamment, article 101, paragraphe 1, sous b), article 126, paragraphe 3, article 199, paragraphes 3 et 4, et article 309 TFUE ; protocole no 5 sur les statuts de la Banque européenne d’investissement ; protocole no 10 sur la coopération structurée permanente établie par l’article 42 du traité sur l’Union européenne et déclaration no 30 sur l’article 126 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.


230      Voir arrêts du 10 avril 2014, Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company (C‑190/12, EU:C:2014:249, point 39 et jurisprudence citée), ainsi que du 10 février 2011, Haribo (C-436/08 et C-437/08, EU:C:2011:61, point 50 et jurisprudence citée).


231      Arrêt du 21 mai 2015, Wagner-Raith (C-560/13, EU:C:2015:347, point 39).


232      Voir, notamment, pour des définitions dans d’autres instruments de droit dérivé, règlement (UE) no 549/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2013, relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans l’Union européenne (JO 2013, L 174, p. 1), rubrique 4.65 à l’annexe A et à l’annexe 7.1 – résumé des différentes catégories d’actifs, et annexe II du règlement no 184/2005. Voir également, notamment, Orientation de la Banque centrale européenne du 9 décembre 2011 relative aux obligations de déclaration statistique établies par la Banque centrale européenne en matière de statistiques extérieures (BCE/2011/23) (JO 2012, L 65, p. 1), annexe III, point 6.1.


233      Voir arrêt du 21 mai 2015, Wagner-Raith (C-560/13, EU:C:2015:347, point 23 et jurisprudence citée) ; voir également arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C-446/04, EU:C:2006:774, points 179 et 180 ainsi que jurisprudence citée).


234      Arrêt du 17 octobre 2013, Welte (C-181/12, EU:C:2013:662, point 32 et jurisprudence citée).


235      Arrêt du 13 novembre 2012 (C-35/11, EU:C:2012:707, point 102 et jurisprudence citée).


236      Arrêt du 10 février 2011, Haribo (C-436/08 et C-437/08, EU:C:2011:61, point 137). Ce seuil de 10 % est également utilisé, par exemple, dans la définition de la notion d’« investissements étrangers directs » qui figure dans le règlement no 549/2013, dans l’annexe 7.1 et dans l’Orientation de la Banque centrale européenne, du 9 décembre 2011, relative aux obligations de déclaration statistique établies par la Banque centrale européenne en matière de statistiques extérieures (BCE/2011/23) (JO 2012, L 65, p. 1), annexe III, point 6.1.


237      Voir, notamment, OCDE, Définition de référence de l’OCDE des investissements directs internationaux, 4e édition, 2008, point 11 ; voir également points 29, 117 et 122 à 147.


238      Voir, notamment, FMI, Manuel de la balance des paiements, 6e édition, 2009, point 3.59.


239      Arrêt du 21 octobre 2010, Idryma Typou (C-81/09, EU:C:2010:622, point 48). Voir également arrêt du 10 novembre 2011, Commission/Portugal (C-212/09, EU:C:2011:717, point 47 et jurisprudence citée), ainsi que, notamment,, la définition de la notion d’« investissements de portefeuille » dans l’Orientation de la Banque centrale européenne, point 6.2, citée à la note 236.


240      Voir, notamment, OCDE, Définition de référence de l’OCDE des investissements directs, 4e édition, 2008, (« l’investisseur de portefeuille ne cherchant généralement pas à influer sur la gestion de l’entreprise »), point 11 ; voir également point 29.


241      Voir points 196 et 197 plus haut.


242      Voir article 1er, paragraphe 2, sous c), articles 10 et 16 de l’AGCS. Certaines de ces règles concernent, en particulier, les conditions auxquelles des investissements peuvent être effectués. À cet égard, l’AGCS complète (au moins) partiellement des accords qui se concentrent souvent largement sur le traitement ultérieur d’un investissement.


243      Voir article 28, sous d), de l’AGCS.


244      Avis 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739).


245      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 34). Voir également point 145 plus haut. L’accord sur les MIC est un accord inclus dans l’annexe 1A de l’accord OMC (« Accords multilatéraux sur le commerce des marchandises »).


246      Article 1er de l’accord sur les MIC.


247      Article 2, paragraphe 1, de l’accord sur les MIC. L’annexe à cet accord, auquel se réfère l’article 2, paragraphe 2, contient une liste non exhaustive de mesures concernant les investissements liés au commerce qui sont incompatibles avec l’obligation d’accorder le traitement national prévu au paragraphe 4 de l’article III, paragraphe 4, du GATT de 1994 (c’est-à-dire le traitement national en ce qui concerne toutes lois, tous règlements ou toutes prescriptions affectant la vente, la mise en vente, l’achat, le transport, la distribution et l’utilisation des produits).


248      Voir, notamment, arrêt du 18 juillet 2013, Daiichi Sankyo et Sanofi-Aventis Deutschland (C‑414/11, EU:C:2013:520, point 51 et jurisprudence citée).


249      Voir note du présidium de la convention, projet d’articles du traité constitutionnel sur l’action extérieure [CONV 685/03 (23 avril 2003), p. 52 et 54]. Ou bien, comme l’Union et les États membres l’ont dit dans le contexte des discussions de l’OMC sur la relation entre le commerce et les investissements, le commerce et les investissements étrangers directs sont interdépendants et se complètent mutuellement ; les investissements étrangers directs sont un important générateur de commerce [OMC, groupe des travail des liens entre commerce et investissement, communication de la Communauté européenne et de ses membres, document de réflexion sur la définition de l’investissement (WT/WGTI/W/115, 16 avril 2002, paragraphe 2).


250      Voir également points 510 à 512 plus bas.


251      Voir, en particulier, points 145, 196 et 197 plus haut.


252      Arrêt du 22 octobre 2013, Essent e.a. (C-105/12 à C-107/12, EU: C:2013:677, points 29 et 30 ainsi que jurisprudence citée).


253      Arrêt du 22 octobre 2013, Essent e.a. (C-105/12 à C-107/12, EU:C:2013:677, point 36 et jurisprudence citée). Voir également, notamment, arrêt du 4 juin 2002, Commission/Portugal (C-367/98, EU:C:2002:326, point 48).


254      Voir arrêt du 13 juillet 1995, Espagne/Conseil (C-350/92, EU:C:1995:237, point 22).


255      Voir également, sur l’article 207, paragraphe 6, TFUE, points 106 à 110 plus haut.


256      Voir point 326 plus haut. À ce sujet, j’observe également que la note 10 sur l’article 8.8, sous d), de l’ALEUES (définition de la notion d’« établissement ») énonce que les termes « constitution » et « acquisition » d’une personne morale doivent être compris comme englobant également « la participation dans le capital d’une personne morale en vue d’établir ou de maintenir des liens économiques durables ».


257      Voir article 9.1.1 et articles 9.1.1, sous g), de l’ALEUES.


258      Voir point 326 plus haut. Dans ce contexte, j’observe que l’AGCS, qui relève de la politique commerciale commune (sans préjudice de l’exception que l’article 207, paragraphe 5, TFUE prévoit pour les transports), pourrait éventuellement s’appliquer également à certains types d’investissements autres que les investissements étrangers directs. Par exemple, la première phrase de la note 8 sur l’article 16, paragraphe 1, de l’AGCS (« Accès aux marchés ») énonce que « [s]i un Membre contracte un engagement en matière d’accès aux marchés en relation avec la fourniture d’un service suivant le mode de fourniture visé à l’alinéa 2(a) de l’article 1er et si le mouvement transfrontière de capitaux constitue une partie essentielle du service lui-même, ledit Membre s’engage par là à permettre ce mouvement de capitaux ».


259      Par exemple, l’article 91, paragraphe 1, sous a), TFUE concerne « des règles communes applicables aux transports internationaux exécutés au départ ou à destination du territoire d’un État membre ou traversant le territoire d’un ou de plusieurs États membres ».


260      Arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C-114/12, EU:C:2014:2151, point 67).


261      Avis 2/92 (Troisième décision révisée de l’OCDE relative au traitement national), du 4 mars 1995 (EU:C:1995:83, point 33, qui se réfère à la nécessité d’« actes législatifs internes », et point 36.


262      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 77, mise en italique par mes soins).


263      Voir, pour une illustration du fait que des accords internationaux auxquels l’Union est partie sont soumis au droit primaire, arrêt du 10 mars 1998, Allemagne/Conseil (C-122/95, EU:C:1998:94).


264      L’article 218, paragraphe 11, seconde phrase, TFUE envisage expressément la possibilité d’amender les traités en vue de remédier à un avis « négatif » fondé sur cette disposition.


265      En effet, un tel argument pourrait éventuellement soulever un problème à propos de la question de savoir si l’ALEUES est matériellement compatible avec les traités. Ce point va cependant clairement au-delà de la portée de la demande d’avis de la Commission. Voir point 85 plus haut.


266      Avis 1/94 (Accords annexés à l’Accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 77).


267      Arrêt du 27 novembre 2012, Pringle (C-370/12, EU:C:2012:756, points 104 et 105).


268      Règlement du 11 mai 2010 établissant un mécanisme européen de stabilisation financière (JO 2010, L 118, p. 1).


269      Arrêt du 27 novembre 2012 (C-370/12, EU:C:2012:756, point 101, mise en italique par mes soins). Dans la prise de position qu’elle a présentée dans cette affaire, l’avocat général Kokott a semblé suggérer que la question portant sur l’article 3, paragraphe 2, TFUE était mal conçue : « Une lecture combinée de l’article 3, paragraphe 2, TFUE avec l’article 216 TFUE nous enseigne que la compétence exclusive de l’Union en matière de conclusion d’accords internationaux ne concerne que les accords passés avec des pays tiers et des organisations internationales. Les dispositions combinées de cet article 3, paragraphe 2, et de l’article 2, paragraphe 1, TFUE interdisent donc uniquement aux États membres de conclure de tels accords avec des pays tiers. Or, les parties signataires du traité MES sont uniquement des États membres. » Voir prise de position de l’avocat général Kokott dans cette affaire (EU:C:2012:675, point 98).


270      Lorsqu’une matière est couverte par des règles du traité, elle relève de la compétence de l’Union. L’article 4, paragraphe 2, sous a), TFUE dispose ainsi que l’Union a une « compétence partagée » dans le domaine principal du marché intérieur.


271      Voir, notamment, arrêt du 22 octobre 2013, Essent e.a. (C-105/12 à C-107/12, EU:C:2013:677, point 40 et jurisprudence citée). Voir également points 317 et 318 plus haut (en ce qui concerne la définition de la notion d’« investissements directs »).


272      Tous ces accords disposent qu’ils sont conclus pour une période de temps limitée, mais peuvent être prorogés pourvu que (à certaines conditions) ni l’une ni l’autre partie n’exprime son intention d’annuler l’accord. Les investissements effectués avant la date d’expiration ou d’annulation de l’accord demeurent soumis à celui-ci pendant une période de temps définie.


273      Note 51 dans certaines versions linguistiques.


274      Voir points 307 à 361 plus haut.


275      Bien qu’il existe d’autres cas dans lesquels l’Union a décidé d’annuler ou de dénoncer des accords internationaux auxquels elle n’était pas partie. Voir, notamment, décision 92/530/CEE du Conseil, du 12 novembre 1992, portant dénonciation de l’accord de pêche entre l’ancienne République démocratique allemande et la Suède (JO 1992, L 334, p. 33).


276      Voir, d’une manière générale, arrêt du 24 novembre 1992, Poulsen et Diva Navigation (C‑286/90, EU:C:1992:453, point 9).


277      Voir également, notamment, arrêt du 21 décembre 2011, Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864, point 71, dans lequel la Cour a déclaré que, dans la mesure où les compétences précédemment exercées par les États membres dans le domaine d’application d’une convention internationale n’étaient pas, à cette date, assumées dans leur intégralité par l’Union, cette dernière n’était pas liée par cette convention).


278      Arrêt du 12 décembre 1972 (21/72 à 24/72, EU:C:1972:115, point 18). Voir également, notamment, en ce qui concerne d’autres accords internationaux, arrêts du 19 novembre 1975, Douaneagent der Nederlandse Spoorwegen (38/75, EU:C:1975:154, points 16 et 21), ainsi que du 14 juillet 1976, Kramer e.a. (3/76, 4/76 et 6/76, EU:C:1976:114, points 44 et 45).


279      Voir arrêt du 4 juillet 2000, Commission/Portugal (C-84/98, EU:C:2000:359, point 53).


280      Voir articles 27 et 46 des conventions de Vienne de 1969 et de 1986.


281      Conformément à l’article 26 des conventions de Vienne de 1969 et de 1986, « [t]out traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi ». La Cour a déjà dit pour droit que ce principe est « un principe fondamental de tout ordre juridique et, en particulier, de l’ordre juridique international » (voir arrêt du 16 juin 1998, Racke, C-162/96, EU:C:1998:293, point 49).


282      Voir, notamment, arrêts du 3 mars 2009, Commission/Autriche (C-205/06, EU:C:2009:118, point 33 et jurisprudence citée) ; du 19 novembre 2009, Commission/Finlande (C-118/07, EU:C:2009:715, point 27 et jurisprudence citée),ainsi que du 3 mars 2009, Commission/Suède (C-249/06, EU:C:2009:119, point 34 et jurisprudence citée).


283      Les autres accords figurant dans la liste de l’annexe 9-D ont été conclus entre la République de Singapour et l’Union économique belgo-luxembourgeoise, la République fédérale d’Allemagne, la République française, le Royaume des Pays-Bas ainsi que le Royaume-Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord, et sont postérieurs soit au 1er janvier 1958, soit (pour le Royaume-Uni) à la date d’adhésion à la Communauté économique européenne.


284      Voir point 379 plus haut.


285      Note 51 dans certaines versions linguistiques.


286      Voir arrêt du 2 août 1993, Levy (C-158/91, EU:C:1993:332, point 19). Certaines décisions judiciaires et certains ouvrages de doctrine semblent étayer la thèse suivant laquelle l’article 59 de la convention de Vienne de 1969 fait désormais partie du droit international coutumier. Voir notamment, pour une discussion des sources pertinentes, Dubuisson, F., « Article 59 – Termination or suspension of the operation of a treaty implied by conclusion of a later treaty », dans Corten, O., et Klein, P. (éd.), The Vienna Conventions on the Law of Treaties – A Commentary,volume II, Oxford University Press, 2011, p. 1325, 1329 et 1330.


287      Voir, à ce sujet, article 54 de la convention de Vienne de 1969. La convention de Vienne de 1969 énonce des exceptions (qui s’appliquent à certaines conditions) : en cas de violation (article 60) ; en cas de survenance d’une situation rendant l’exécution impossible (article 61) ; en cas de changement fondamental de circonstances (article 62) ; à titre exceptionnel, en cas de rupture des relations diplomatiques ou consulaires (article 63) et en cas de survenance d’une nouvelle norme impérative du droit international général (article 64).


288      Cela résulte clairement de l’article 30 de la convention de Vienne de 1969 portant sur la même matière.


289      Article 73 de la convention de Vienne de 1969. En tout état de cause, lorsqu’aussi bien la convention de Vienne de 1969 que la convention de Vienne de 1986 peuvent s’appliquer (par exemple, dans le contexte du rapport entre un accord bilatéral conclu entre deux États et un accord conclu entre un État et une organisation internationale), la convention de Vienne de 1969 l’emporte (voir article 7 de la convention de Vienne de 1986).


290      Recueil des traités des Nations unies, volume 1946, p. 3.


291      Voir article 2, paragraphe 1, sous g), de la convention de Vienne de 1969.


292      Article 1er, paragraphe 1, et considérant 3 du règlement no 1219/2012.


293      Voir points 69 à 76 de l’annexe aux présentes conclusions.


294      Arrêt du 7 mars 1996, Parlement/Conseil (C-360/93, EU:C:1996:84).


295      Arrêt du 7 mars 1996, Parlement/Conseil (C-360/93, EU:C:1996:84).


296      Directive du 17 septembre 1990 relative aux procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des télécommunications (JO 1990, L 297, p. 1).


297      Arrêt du 7 mars 1996, Parlement/Conseil (C-360/93, EU:C:1996:84, point 30).


298      La République de Singapour, l’Union et les 28 États membres sont parties à l’accord sur les marchés publics. Cet accord est inclus dans l’annexe 4 à l’accord OMC, qui comprend une liste des accords commerciaux multilatéraux. Il fait donc partie de l’accord OMC uniquement pour les membres de l’OMC qui l’ont accepté (et il n’est obligatoire que pour eux seuls) (article 2, paragraphe 3, de l’accord OMC). La République de Singapour, l’Union et les 28 États membres sont également parties à l’accord OMC révisé sur les marchés publics qui est entré en vigueur le 6 avril 2014.


299      Voir également point 402 plus haut.


300      Voir article 10.4 de l’ALEUES.


301      Note sans objet pour la version en langue française des présentes conclusions.


302      Cet objectif est également évoqué à l’article 3, paragraphe 3, TUE.


303      Voir points 77 à 91 de l’annexe aux présentes conclusions.


304      Arrêt du 18 juillet 2013, Daiichi Sankyo et Sanofi-Aventis Deutschland (C‑414/11, ci-après l’« arrêt Daiichi », EU:C:2013:520).


305      Arrêt du 18 juillet 2013, Daiichi (C-414/11, EU:C:2013:520, point 52).


306      Arrêt du 18 juillet 2013, Daiichi (C-414/11, EU:C:2013:520, point 53).


307      Arrêt du 12 mai 2005, Regione autonoma Friuli-Venezia Giulia et ERSA (C‑347/03, EU:C:2005:285).


308      L’article 61 de l’accord ADPIC dispose ce qui suit : « Les Membres prévoiront des procédures pénales et des peines applicables au moins pour les actes délibérés de contrefaçon de marque de fabrique ou de commerce ou de piratage portant atteinte à un droit d’auteur, commis à une échelle commerciale. Les sanctions incluront l’emprisonnement et/ou des amendes suffisantes pour être dissuasives, et seront en rapport avec le niveau des peines appliquées pour des délits de gravité correspondante. Dans les cas appropriés, les sanctions possibles incluront également la saisie, la confiscation et la destruction des marchandises en cause et de tous matériaux et instruments ayant principalement servi à commettre le délit. Les Membres pourront prévoir des procédures pénales et des peines applicables aux autres actes portant atteinte à des droits de propriété intellectuelle, en particulier lorsqu’ils sont commis délibérément et à une échelle commerciale. »


309      Arrêt du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520).


310      Arrêt du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520).


311      Arrêt du 12 mai 2005, Regione autonoma Friuli-Venezia Giulia et ERSA (C‑347/03, EU:C:2005:285).


312      Signée à Berne le 9 septembre 1886 (acte de Paris du 24 juillet 1971), dans sa version résultant de la modification du 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 1161, p. 30) (ci-après la « convention de Berne »).


313      Adopté à Genève le 20 décembre 1996.


314      Adopté à Genève le 20 décembre 1996.


315      Adoptée le 20 mars 1883, révisée en dernier lieu à Stockholm le 14 juillet 1967 et modifiée le 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 828, no 11847, p. 108).


316      Adopté à Washington le 19 juin 1970 et modifié le 3 octobre 1979.


317      Adopté le 1er juin 2000.


318      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2012 mettant en œuvre la coopération renforcée dans le domaine de la création d’une protection unitaire conférée par un brevet (JO 2012, L 361, p. 1) et règlement du Conseil du 17 décembre 2012 mettant en œuvre la coopération renforcée dans le domaine de la création d’une protection unitaire conférée par un brevet, en ce qui concerne les modalités applicables en matière de traduction (JO 2012, L 361, p. 89).


319      Dans cette disposition, les parties réaffirment les obligations qui leur incombent au titre du traité de coopération en matière de brevets et s’engagent à déployer tous les efforts raisonnables pour respecter les articles 1er à 16 du traité sur le droit des brevets d’une manière compatible avec leur droit et leurs procédures internes.


320      Arrêt du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520).


321      Avis 1/94 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, points 55 à 71). À l’exception des mesures spécifiques visant à éviter la mise en libre pratique de marchandises contrefaites, l’accord ADPIC ne relevait pas de la politique commerciale commune. La Cour a justifié cette position en déclarant que les droits de propriété intellectuelle affectent les échanges internes « autant, sinon davantage, que les échanges internationaux ». À l’époque, cependant, la disposition du traité relative à la politique commerciale commune ne se référait pas aux aspects commerciaux des droits de propriété intellectuelle.


322      Arrêt du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520, point 53).


323      Arrêt du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520, point 54).


324      Arrêt du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520, point 55).


325      Arrêt du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520, point 58).


326      Voir, notamment, conclusions de l’avocat général Wahl dans la procédure d’avis 3/15 (Traité de Marrakech sur l’accès aux œuvres publiées), du 14 février 2017 (EU:C:2016:657, points 64 à 66) ; voir également arrêt du 12 mai 2005, Regione autonoma Friuli-Venezia Giulia et ERSA (C-347/03, EU:C:2005:285, points 81 à 83).


327      Voir également point 102 plus haut.


328      Lorsque le contenu de l’obligation qui n’a pas été respectée détermine le contenu de la mesure corrective (comme la suspension de concessions ou d’obligations à titre de rétorsion), cela pourrait suggérer un lien de fond entre les deux types d’obligation. Néanmoins, il semble que le trait caractéristique de la rétorsion croisée, auquel la Cour s’est référée dans son arrêt Daiichi (C‑414/11, EU:C:2013:520), soit qu’il n’y a pas nécessairement un tel lien. J’observe, par souci d’exhaustivité, que l’article 15.12 de l’ALEUES prévoit la possibilité pour une partie de suspendre les obligations découlant de toute disposition à laquelle s’applique le chapitre 15 (« Règlement des différends »).


329      Arrêt du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520, point 51).


330      Conclusions de l’avocat général Wahl dans la procédure d’avis 3/15 (Traité de Marrakech sur l’accès aux œuvres publiées), du 14 février 2017 (EU:C:2016:657, point 56).


331      La déclaration de Punta del Este de 1986, qui a ouvert le cycle de négociation commerciale appelé cycle de l’Uruguay qui a débouché sur la création de l’OMC, définissait ce lien de la manière suivante : « Afin de réduire les distorsions et les obstacles qui affectent le commerce international, et compte tenu de la nécessité de favoriser une protection effective et suffisante des droits de propriété intellectuelle et de faire en sorte que les mesures et procédures visant à faire appliquer les droits de propriété intellectuelle ne deviennent pas elles-mêmes des obstacles au commerce légitime, les négociations viseront à éclaircir les dispositions de l’Accord général et à élaborer, s’il y a lieu, des règles et des disciplines nouvelles. »


332      Voir arrêts du 20 octobre 1993, Phil Collins e.a. (C-92/92 et C-326/92, EU:C:1993:847, point 20), ainsi que du 4 octobre 2011, Football Association Premier League e.a. (C-403/08 et C-429/08, EU:C:2011:631, point 107 ainsi que jurisprudence citée).


333      Article 6 bis, paragraphe 1, de la convention de Berne. Ce droit moral n’est pas repris dans l’accord ADPIC (voir article 9, paragraphe 1, de l’accord ADPIC). Voir également arrêt du 20 octobre 1993, Phil Collins e.a. (C-92/92 et C-326/92, EU:C:1993:847, point 20).


334      Voir point 93 plus haut.


335      Voir arrêt du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C-137/12, EU:C:2013:675).


336      Voir arrêt du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C-137/12, EU:C:2013:675, point 70, voir également point 72).


337      Voir, en particulier, point 109 plus haut.


338      Voir, notamment, article 2.1 de l’Accord ADPIC.


339      Comme les auteurs du projet de l’ALEUES l’ont fait, par exemple, pour une partie significative du chapitre 10 sur les marchés publics : voir point 402 plus haut.


340      Arrêt du 28 juillet 2016, Conseil/Commission (C-660/13, EU:C:2016:616, point 40). Voir également points 102 et 111 (ainsi que jurisprudence citée) des conclusions que j’ai présentées dans cette affaire (EU:C:2015:787).


341      Arrêts du 18 juillet 2013 (C‑414/11, EU:C:2013:520).


342      Note sans objet pour la version en langue française des présentes conclusions.


343      Article 14 de la convention internationale pour la protection des obtentions végétales.


344      Pour certains, l’article 11.36.3 de l’ALEUES indiquerait clairement que le chapitre 11 n’empêche pas les parties d’appliquer leur droit interne ni ne les oblige à modifier leur législation actuelle en ce qui concerne le respect des droits de propriété intellectuelle. Pour ma part, je comprends cette disposition comme signifiant simplement que, pour s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du chapitre 11, les parties ne doivent pas nécessairement modifier leur législation existante en matière de moyens d’assurer le respect des droits de propriété intellectuelle.


345      Voir arrêt du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C-137/12, EU:C:2013:675).


346      L’article 9.1, première phrase, de l’accord ADPIC dispose que les membres de l’OMC se conformeront aux articles 1er à 21 de la convention de Berne et à l’annexe de celle-ci. La seconde phrase dispose toutefois que les membres n’auront pas de droits ni d’obligations au titre de l’accord ADPIC en ce qui concerne les droits conférés par l’article 6 bis de la convention de Berne ou les droits qui en sont dérivés.


347      Voir point 437 plus haut.


348      Voir point 437 plus haut.


349      Voir point 109 plus haut.


350      Voir points 92 à 97 de l’annexe aux présentes conclusions.


351      L’accord SMC, qui est inclus dans l’annexe 1A de l’accord OMC et qui complète l’article 16 du GATT (conformément aux articles 12.5 et 12.7 de l’ALEUES, les dispositions de l’ALEUES relatives aux subventions sont basées sur l’accord SMC), en est une illustration évidente. L’accord SMC a pour objet d’interdire et de réglementer l’octroi de subventions aux entreprises lorsque ces subventions sont susceptibles de fausser la concurrence en faveur d’une production nationale et il vise à encadrer les actions que les membres de l’OMC peuvent adopter pour contrer les effets de subventions.


352      Des initiatives que l’OMC avait prises à ses débuts pour répondre à la nécessité d’un cadre multilatéral destiné à favoriser la contribution de la politique de la concurrence aux échanges internationaux et au développement, ainsi que pour une assistance technique renforcée et le renforcement des capacités dans ce domaine n’ont débouché sur aucune négociation au sein de l’OMC en vue de l’adoption de règles sur la concurrence. Voir Groupe de travail de l’interaction du commerce et de la politique de la concurrence – Historique, mandats et décisions qui peut être consulté à l’adresse Internet suivante : https://www.wto.org/french/tratop_f/comp_f/history_f.htm#cancun ; et « L’ensemble de résultats de juillet 2004 », qui peut être consulté à l’adresse Internet suivante : https://www.wto.org/french/tratop_f/dda_f/dda_package_july04_f.htm


353      Articles 12.1.2 et 12.2 de l’ALEUES.


354      Voir point 12.1.1, dernière phrase, de l’ALEUES.


355      Article 12.3 de l’ALEUES.


356      Articles 12.5 à 12.8 et annexe 12-A de l’ALEUES.


357      Article 12.7.1 de l’ALEUES.


358      Article 12.7.2, second alinéa, de l’ALEUES.


359      Voir, par analogie, arrêt du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C‑137/12, EU:C:2013:675, points 66 et 67).


360      Règlement du 20 janvier 2004 (« le règlement CE sur les concentrations ») (JO 2004, L 24, p. 1).


361      Voir points 508 à 513 plus bas.


362      Voir points 13 à 18 de l’annexe aux présentes conclusions.


363      Voir points 98 à 112 de l’annexe aux présentes conclusions.


364      Article 13.17 de l’ALEUES.


365      Article 207, paragraphe 1, dernière phrase, TFUE.


366      Article 21, paragraphe 2, sous f), TUE. Voir également article 3, paragraphe 5, TUE et article 11 TFUE ; ce dernier dispose que les exigences de la protection de l’environnement doivent être « intégrées dans la définition et la mise en œuvre des politiques et actions de l’Union, en particulier afin de promouvoir le développement durable ».


367      L’une et l’autre possibilités sont évoquées à l’article 13.1.3 de l’ALEUES.


368      L’organe d’appel s’est également inspiré de cet objectif pour interpréter, notamment, la clause d’exception générale qui figure à l’article 20 du GATT de 1994. Voir, notamment, Rapport de l’organe d’appel, « États‑Unis, Prohibition à l’importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevette » (WT/DS58/AB/R), adopté le 6 novembre 1998, DSR 1998:VII, p. 2755, paragraphes 129 à 131 et 152 à 155, et Rapport de l’organe d’appel, « Inde – Certaines mesures relatives aux cellules solaires et aux modules solaires » (WT/DS456/AB/R), adopté le 14 octobre 2016, non encore publié, paragraphe 5.72.


369      Voir arrêt du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C-137/12, EU:C:2013:675, point 57 et jurisprudence citée).


370      Voir, en particulier, avis 1/78 (Accord international sur le caoutchouc naturel), du 4 octobre 1979 (EU:C:1979:224), et arrêts du 26 mars 1987, Commission/Conseil (45/86, EU:C:1987:163) ; du 29 mars 1990, Grèce/Conseil (C‑62/88, EU:C:1990:153), et du 12 décembre 2002, Commission/Conseil (C‑281/01, EU:C:2002:761).


371      Avis 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 40).


372      Arrêt du 8 septembre 2009, Commission/Parlement et Conseil (C‑411/06, EU:C:2009:518).


373      JO 2006, L 190, p. 1.


374      Arrêt du 8 septembre 2009, Commission/Parlement et Conseil (C‑411/06, EU:C:2009:518, point 72).


375      Article 7.1 de l’ALEUES.


376      Article 7.3 de l’ALEUES.


377      Voir, en particulier, point 103 plus haut.


378      Article 7.4, sous a) et b), de l’ALEUES.


379       Avis 1/94 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 33). La Cour a fait cette déclaration à propos de l’accord OTC, qui s’applique, en particulier, aux règlements techniques et aux normes ainsi qu’aux procédures d’évaluation de la conformité aux règlements techniques et aux normes.


380      Voir, notamment, article 1er de l’accord commercial entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Colombie et le Pérou, d’autre part (JO 2012, L 354, p. 3).


381      Le mandat du groupe d’experts auquel se réfère l’article 13.17 de l’ALEUES se limite à « établir un rapport […] contenant des recommandations ». Voir également points 523 à 535 plus bas.


382      Articles 9 à 16 du règlement (UE) no 978/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, appliquant un schéma de préférences tarifaires généralisées et abrogeant le règlement (CE) no 732/2008 du Conseil (JO 2012, L 303, p. 1).


383      Voir articles 13.16 et 13.17 de l’ALEUES ainsi que point 490 plus haut.


384      Cette position est corroborée à l’article 51, paragraphe 2, de la Charte, qui dispose que cette dernière n’étend pas le champ d’application du droit de l’Union au‑delà des pouvoirs de celle‑ci, ni n’établit aucune compétence ou tâche nouvelles pour l’Union, ni ne modifie les compétences et tâches définies par les traités.


385      Arrêt du 11 juin 2014, Commission/Conseil (C‑377/12, EU:C:2014:1903).


386      L’Union est partie à cet accord en application de la décision du Conseil 2012/272/UE, du 14 mai 2012 (JO 2012, L 134, p. 3).


387      Arrêt du 11 juin 2014, Commission/Conseil (C‑377/12, EU:C:2014:1903, point 59).


388      Arrêt du 11 juin 2014, Commission/Conseil (C‑377/12, EU:C:2014:1903, points 38 et 49 ainsi que jurisprudence citée).


389      L’article 43, paragraphe 2, TFUE est la base juridique permettant d’adopter les dispositions nécessaires à la poursuite, notamment, de la politique commune de la pêche, à laquelle l’article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE se réfère.


390      L’article 191, paragraphe 4, TFUE confère à l’Union la compétence de prendre des engagements envers des pays tiers en matière de coopération écologique dans les domaines dans lesquels elle est compétente.


391      Voir, à ce sujet, arrêt du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (C‑114/12, EU:C:2014:2151, point 75).


392      Voir points 113 à 118 de l’annexe aux présentes conclusions.


393      Voir points 7, 8, 10, 12, 15, 35, 37, 41, 42, 58, 72 à 75, 82, 88, 89, 95 et 96 de l’annexe aux présentes conclusions.


394      Article 14.1, sous a), de l’ALEUES.


395      Voir article 14.2.1 de l’ALEUES.


396      Voir note 388 plus haut. Dans la mesure où les règles spécifiques énoncées dans d’autres chapitres de l’ALEUES en ce qui concerne la transparence et le contrôle administratif et judiciaire sont différentes des dispositions du chapitre 14, ce sont ces règles plus spécifiques dans d’autres chapitres qui l’emportent (article 14.8 de l’ALEUES).


397      Voir, notamment, arrêt du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (C-137/12, EU:C:2013:675).


398      C’est pour cette raison que les accords de l’OMC contiennent un large éventail d’obligations visant à garantir une protection contre de tels obstacles en ce qui concerne la préparation, l’adoption, l’entrée en vigueur, la publication, la mise en œuvre, la notification et l’administration ainsi que le contrôle (administratif et judiciaire) des mesures. Voir, notamment, article 10 du GATT de 1994.


399      Voir points 61 à 67 de l’annexe aux présentes conclusions.


400      Voir points 111, 112 et 119 à 123 de l’annexe aux présentes conclusions.


401      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la gestion de la responsabilité financière liée aux tribunaux de règlement des différends entre investisseurs et États mis en place par les accords internationaux auxquels l’Union européenne est partie (JO 2014, L 257, p. 121).


402      Avis 1/94 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 20).


403      Voir avis 1/91 (Accord EEE – I), du 14 décembre 1991 (EU:C:1991:490, points 40 et 70) ; 1/09 (Accord sur la création d’un système unifié de règlement des litiges en matière de brevets), du 8 mars 2011 (EU:C:2011:123, point 74), et 2/13 (Adhésion de l’Union à la CEDH), du 18 décembre 2014 (EU:C:2014:2454, point 182).


404      Elle s’applique également, par analogie, aux dispositions spécifiques concernant le règlement des différends qui sont énoncées aux articles 13.16 et 13.17 de l’ALEUES.


405      Article 67 de la convention.


406      Voir en ce sens, avis 2/91 (Convention no 170 de l’OIT), du 19 mars 1993 (EU:C:1993:106, points 3 à 5). Dans cette affaire, la constitution de l’OIT empêchait (celle qui était encore à l’époque) la Communauté européenne de conclure elle-même la convention no 170.


407      C’est ce qui résulte des articles 9.11.2 et 9.15.2 de l’ALEUES, lus en combinaison avec l’article 9.24, qui permet à un tribunal d’accorder une indemnité financière, majorée des intérêts éventuellement applicables, et la restitution de biens.


408      Voir également déclaration commune du Parlement européen, du Conseil et de la Commission annexée au règlement no 912/2014.


409      En tout état de cause, l’article 9.15.2 de l’ALEUES, aux termes duquel l’Union doit déterminer le défendeur dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de la notification de l’intention de recourir à l’arbitrage, ne se réfère (ni expressément ni implicitement) à ce règlement.


410      Avis 1/75 (Arrangement OCDE – Norme pour les dépenses locales), du 11 novembre 1975 (EU:C:1975:145, p. 1364). Voir également avis 1/94 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 21).


411      Voir, en ce sens, avis 1/75 (Arrangement OCDE – Norme pour les dépenses locales), du 11 novembre 1975 (EU:C:1975:145, p. 1364).


412      Avis 1/78 (Accord international sur le caoutchouc naturel), du 4 octobre 1979 (EU:C:1979:224, point 60). Voir également avis 1/94 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 21).


413      Voir point 85 plus haut.


414      Les traits principaux de la protection diplomatique ont été décrits par la Commission de droit international des Nations unies comme consistant en « l’invocation par un État, par une action diplomatique ou d’autres moyens de règlement pacifique, de la responsabilité d’un autre État pour un préjudice causé par un fait internationalement illicite dudit État à une personne physique ou morale ayant la nationalité du premier État en vue de la mise en œuvre de cette responsabilité » ; Commission de droit international des Nations unies, Projet d’articles sur la protection diplomatique et commentaires y relatifs (2006), adopté par la Commission de droit international lors de sa 58e session et présenté à l’assemblée générale en tant que partie du rapport de la Commission sur le travail de cette session (A/61/10), Rapport de la Commission de droit international, 2006, volume II, partie deux (« Projet d’articles sur la protection diplomatique de la CDI NU »), article 1er et commentaires sur l’article 1er, paragraphe 2.


415      Voir arrêt de la Cour permanente de justice internationale, Concessions Mavrommatis en Palestine (Grèce/Royaume-Uni), Rapports de la CPJI, 1924, série A, no 2, p. 12. Voir également arrêt de la Cour internationale de justice du 5 février 1970 dans l’affaire de la Barcelona Traction Light et Power Company Limited (Belgique/Espagne), deuxième phase (CIJ, Recueil 1970, p. 3 et 27.


416      Arrêt de la Cour internationale de justice du 21 mars 1959 dans l’affaire Interhandel (Suisse/États‑Unis d’Amérique), exceptions préliminaires (CIJ, Recueil 1959, p. 6 et 27. Voir également CDI NU, Projet d’articles sur la protection diplomatique, article 14 et les commentaires sur cette disposition.


417      Voir notamment, pour un exposé historique de cette évolution, Parlett, K., The Individual in the International Legal System : Continuity and Change in International Law, Cambridge University Press, 2011, p. 47 à 123 (sur les recours individuels et internationaux).


418      CDI NU, Projet d’articles sur la protection diplomatique, commentaires de l’article 17, paragraphe 2.


419      L’article 27, paragraphe 1, de la convention CIRDI dispose qu’« [a]ucun État contractant n’accorde la protection diplomatique ou ne formule de revendication internationale au sujet d’un différend que l’un de ses ressortissants et un autre État contractant ont consenti à soumettre ou ont soumis à l’arbitrage dans le cadre de la présente convention, sauf si l’autre État contractant ne se conforme pas à la sentence rendue à l’occasion du différend ».


420      Voir points 124 à 130 de l’annexe aux présentes conclusions.


421      Voir, en ce sens, avis 1/94 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 107), et 1/08 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 30 novembre 2009 (EU:C:2009:739, point 127).


422      Arrêt du 28 avril 2015, Commission/Conseil (C‑28/12, EU:C:2015:282, point 47).


423      Voir, notamment, avis 1/94 (Accords modifiant les listes d’engagements spécifiques au titre de l’AGCS), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 108), et 2/00 (Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 18), eainsi qu’arrêts du 20 avril 2010, Commission/Suède (C‑246/07, EU:C:2010:203, point 73), et du 28 avril 2015, Commission/Conseil (C‑28/12, EU:C:2015:282, point 54).


424      Note 10 dans certaines versions linguistiques.


425      Note 51 dans certaines versions linguistiques.