Language of document : ECLI:EU:F:2012:144

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

23 octobre 2012 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Renvoi au Tribunal après annulation – Levée de l’immunité des agents d’une institution pour les paroles prononcées et les écrits produits dans le cadre d’une procédure judiciaire – Nomination à un poste de chef d’unité – Rejet de candidature – Recours en annulation – Intérêt à agir du candidat évincé – Autorité de la chose jugée – Vice de procédure – Mise en balance des intérêts en présence – Recours en indemnité – Préjudice moral subi du fait d’une irrégularité »

Dans l’affaire F‑44/05 RENV,

ayant pour objet le renvoi d’un recours initialement introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Guido Strack, ancien fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Cologne (Allemagne), représenté par Mes N. A. Lödler et H. Tettenborn, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. H. Krämer et Mme B. Eggers, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),

composé de Mme M. I. Rofes i Pujol, président, Mme I. Boruta (rapporteur) et M. K. Bradley, juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 janvier 2012,

rend le présent

Arrêt

1        Le présent recours a été renvoyé au Tribunal par arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 9 décembre 2010, Commission/Strack (T‑526/08 P, ci-après l’« arrêt de renvoi »), annulant partiellement l’arrêt du Tribunal du 25 septembre 2008, Strack/Commission (F‑44/05, ci-après l’« arrêt Strack/Commission »), statuant sur le recours par lequel M. Strack demandait l’annulation de la décision de l’Office des publications officielles des Communautés européennes portant rejet de sa candidature au poste de chef de l’unité « Appels d’offres et contrats » (A 5/A 4) dudit Office (ci-après le « poste litigieux ») et de la décision de nommer M. A au poste litigieux, ainsi que la condamnation de la Commission européenne au paiement d’une indemnité en réparation du préjudice moral prétendument subi.

 Cadre juridique

 Dispositions concernant l’Office des publications

2        L’article premier de la décision 2000/459/CE, CECA, Euratom du Parlement européen, du Conseil, de la Commission, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Comité économique et social et du Comité des régions, du 20 juillet 2000, relative à l’organisation et au fonctionnement de l’Office des publications officielles des Communautés européennes (JO L 183, p. 12) prévoit que l’Office des publications « a pour objet d’assurer, dans les meilleurs conditions techniques et financières possibles, sous la reponsabilité des institutions des Communautés européennes, l’édition des publications de celles-ci et de leurs services ».

3        À l’article 6 de la décision 2000/459, il est indiqué :

« 1.      Les compétences de l’autorité investie du pouvoir de nomination sont exercées par la Commission en ce qui concerne les fonctionnaires ou agents de grade A 1, A 2, A 3 et LA 3 dans les conditions reprises ci-après.

[…]

2.      Les compétences de l’autorité investie du pouvoir de nomination sont exercées par la Commission en ce qui concerne les fonctionnaires et agents autres que ceux visés au paragraphe 1. Elle peut déléguer ses compétences au directeur de l’Office.

[…]

3.      Les procédures administratives relatives aux actes mentionnés aux paragraphes 1 et 2 ainsi que la gestion courante du personnel, notamment en matière de retraite, de caisse maladie, d’accidents du travail, de traitements, de congés, sont effectuées dans les mêmes conditions que pour les agents de la Commission en service à Luxembourg [(Luxembourg)].

[…] »

 Dispositions régissant la procédure en vue de pourvoir aux vacances d’emploi

4        Dans une communication du 22 décembre 2000 [SEC (2000) 2305/5], intitulée « Évaluation, sélection et nomination du personnel d’encadrement supérieur de la Commission », le secrétariat général de la Commission a formulé des propositions de modifications dans la composition, le mandat et la procédure des comités de consultation.

5        L’article 2, paragraphe 3, de la décision de la Commission portant sur le personnel d’encadrement intermédiaire, datée du 28 avril 2004 et publiée aux Informations administratives no 73‑2004 du 23 juin 2004 (ci-après la « décision du 28 avril 2004 »), prévoit que, « [e]n vue de pourvoir un emploi en vertu de l’article 29 du statut [des fonctionnaires de l’Union européenne], et sauf cas spécifiques précisés dans les modalités d’application visées à l’article 16, paragraphe 2, le directeur général concerné nomme un comité de présélection, composé d’au moins trois membres de grade et fonction d’encadrement égaux ou supérieurs au niveau de l’emploi à pourvoir, dont un d’une autre direction générale ».

6        À l’article 16 de la décision du 28 avril 2004, il est énoncé que ladite décision abroge et remplace, notamment, la communication du 22 décembre 2000 quant aux dispositions relatives à l’encadrement intermédiaire. Selon l’article 17 de la décision du 28 avril 2004, celle-ci est entrée en vigueur le 1er mai 2004.

7        L’Office des publications est doté d’un manuel relatif à la procédure de recrutement des chefs d’unité (A 5/A 4). Ce manuel, dans sa version en vigueur au moment des faits, détaille le déroulement de la procédure comme suit :

« 1.      Préparation de l’avis de vacance d’emploi.

2.      Publication dans toutes les institutions de l’avis de vacance adopté par le [d]irecteur de l’Office des publications. L’avis devra présenter une description précise du profil du poste à pourvoir et des tâches à accomplir. Les candidatures sont envoyées directement à l’Office des publications.

3.      Nomination d’un rapporteur par la [d]irection générale ‘Personnel et [a]dministration’ […] de la Commission.

4.      Le [d]irecteur de l’Office [des publications] nomme [trois] chefs d’unité pour constituer un [comité] de présélection.

5.      Le [comité] de présélection :

a)      examine les candidatures (éligibilité statutaire),

b)      s’entretient avec les candidats et les évalue sur [la] base d’une grille de critères d’évaluation prédéfinis et

c)      établit un rapport détaillé et motivé (qualités, faiblesses et lacunes de chaque candidat) et une [liste restreinte], par ordre alphabétique, qui [sont] transmis au [d]irecteur de l’Office [des publications] et au rapporteur.

6.      Dans un délai de [cinq] jours ouvrables après la réception du rapport du [comité] de présélection, le rapporteur fait parvenir au [d]irecteur de l’Office [des publications] son avis sur le rapport.

(Le cas échéant, à la lumière de l’avis du rapporteur, le [d]irecteur de l’Office [des publications] peut relancer la procédure à partir de l’étape 5.)

7.      Le [d]irecteur de l’Office [des publications] s’entretient avec les candidats repris dans la [liste restreinte] ainsi qu’avec tout autre candidat qu’il souhaiterait interviewer. Il peut se faire assister par des chefs d’unité ou des directeurs désignés par lui. Le rapporteur participe à ces entretiens.

8.      [À la suite de] ces entretiens un procès[-]verbal est établi et transmis à la [direction générale ‘Personnel et administration’] et au rapporteur.

9.      La [direction générale ‘Personnel et administration’] saisit le [c]omité consultatif des nominations (CCN) par voie de procédure écrite et communique l’avis émis par le CCN au [d]irecteur de l’Office [des publications].

10.      Le [d]irecteur de l’Office [des publications] prend sa décision sur [la] base du rapport du [comité] de présélection, de l’avis du rapporteur, du procès[-]verbal établi par le [d]irecteur de l’Office [des publications] à la suite des entretiens ([étape 7]) et de l’avis du CCN.

11.      La [direction générale ‘Personnel et administration’] prépare l’acte de nomination.

12.      L’acte de nomination est signé par le [d]irecteur de l’Office [des publications] en tant qu’[autorité investie du pouvoir de nomination]. »

 Dispositions régissant la mise à la retraite et l’octroi d’une allocation pour cause d’invalidité

8        Le statut des fonctionnaires de l’Union européenne, tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, est entré en vigueur le 1er mai 2004 (ci-après le « statut », ou le « nouveau statut »). Ces dispositions ont remplacé celles qui étaient applicables jusqu’au 30 avril 2004 (ci-après l’« ancien statut »). L’article 53 du statut dispose que « [l]e fonctionnaire reconnu par la commission d’invalidité comme remplissant les conditions prévues à l’article 78 est mis d’office à la retraite le dernier jour du mois au cours duquel est prise la décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination constatant l’incapacité définitive pour le fonctionnaire d’exercer ses fonctions ».

9        L’article 78 du statut est ainsi libellé :

« Dans les conditions prévues aux articles 13 à 16 de l’annexe VIII, le fonctionnaire a droit à une allocation d’invalidité lorsqu’il est atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de son groupe de fonctions.

L’article 52 s’applique par analogie aux bénéficiaires d’une allocation d’invalidité. Si le bénéficiaire d’une allocation d’invalidité prend sa retraite avant l’âge de 65 ans sans avoir atteint le taux maximal de droits à pension, les règles générales de la pension d’ancienneté sont appliquées. La pension d’ancienneté est liquidée sur la base du traitement afférent au classement, en grade et en échelon, que le fonctionnaire détenait au moment où il a été mis en invalidité.

Le taux de l’allocation d’invalidité est fixé à 70 % du dernier traitement de base du fonctionnaire. […]

Lorsque l’invalidité résulte […] d’une maladie professionnelle […], l’allocation d’invalidité ne peut être inférieure à 120 % du minimum vital. Dans ce cas, l’institution ou l’organisme visés à l’article [1er] bis prend à sa charge la totalité de la contribution au régime de pensions. »

10      Aux termes de l’article 13 de l’annexe VIII du statut :

« 1.      Sous réserve des dispositions de l’article 1[er], paragraphe 1, […] le fonctionnaire âgé de moins de 65 ans qui, au cours de la période durant laquelle il acquérait des droits à pension, est reconnu par la commission d’invalidité comme atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière et qui, pour ce motif, est tenu de suspendre son service […], a droit, tant que dure cette incapacité, à l’allocation d’invalidité visée à l’article 78 du statut.

2.      […]

L’intéressé est tenu de fournir les preuves écrites qui peuvent être exigées et de notifier à l’institution tout élément susceptible de modifier son droit à l’allocation. »

11      Selon l’article 14, premier et deuxième alinéas, de l’annexe VIII du statut :

« Le droit à l’allocation d’invalidité naît à compter du premier jour du mois civil suivant la mise à la retraite en application de l’article 53 du statut.

Lorsque l’ancien fonctionnaire cesse de remplir les conditions requises pour bénéficier de cette allocation, il est obligatoirement réintégré, à la première vacance, dans un emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à sa carrière, à condition qu’il possède les aptitudes requises pour cet emploi. S’il refuse l’emploi qui lui est offert, il conserve ses droits à réintégration, à la même condition, lors de la deuxième vacance dans un emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à sa carrière ; en cas de second refus, il peut être démis d’office. »

12      L’article 15 de l’annexe VIII du statut énonce que, « [t]ant que l’ancien fonctionnaire bénéficiant d’une allocation d’invalidité n’a pas atteint l’âge de 63 ans, l’institution peut le faire examiner périodiquement en vue de s’assurer qu’il réunit toujours les conditions requises pour bénéficier de cette allocation ».

 Autres dispositions pertinentes

13      L’article 3 du statut dispose :

« L’acte de nomination du fonctionnaire précise la date à laquelle cette nomination prend effet ; en aucun cas, cette date ne peut être antérieure à celle de l’entrée en fonctions de l’intéressé. »

14      Le règlement de procédure du Tribunal prévoit en son article 30 :

« 1.      Les représentants des parties qui se présentent devant le Tribunal ou devant une autorité judiciaire commise par lui en vertu d’une commission rogatoire jouissent de l’immunité pour les paroles prononcées et les écrits produits relatifs à la cause ou aux parties.

2.      Les représentants des parties jouissent en outre des privilèges et facilités suivants :

a)      tous papiers et documents relatifs à la procédure sont exempts de fouille et de saisie. En cas de contestation, les préposés de la douane ou de la police peuvent sceller les papiers et documents en question qui sont alors transmis sans délai au Tribunal pour qu’ils soient vérifiés en présence du greffier et de l’intéressé ;

b)      les représentants des parties ont droit à l’attribution de devises nécessaires à l’accomplissement de leur tâche ;

c)      les représentants des parties jouissent de la liberté de déplacement dans la mesure nécessaire à l’accomplissement de leur tâche.

3.      Les privilèges, immunités et facilités mentionnés aux paragraphes 1 et 2 sont accordés exclusivement dans l’intérêt de la procédure.

4.      Le Tribunal peut lever l’immunité lorsqu’il estime que la levée de celle-ci n’est pas contraire à l’intérêt de la procédure. »

 Faits et procédure

 Antécédents du litige

15      Le requérant est entré au service de la Commission le 1er septembre 1995 et a été nommé à l’Office des publications à compter de cette même date. Le 1er janvier 2001, il a été promu au grade A 6 (devenu, suite à l’entrée en vigueur du nouveau statut, à compter du 1er mai 2004, A*10, puis à compter du 1er mai 2006, AD 10). Le 1er avril 2002, il a quitté l’Office des publications pour travailler à l’unité C 4 de la direction générale (DG) « Entreprises » de la Commission. À partir du 16 février 2003, le requérant a été affecté à Eurostat.

16      Le 25 mars 2004, l’Office des publications a publié l’avis de vacance COM/A/057/04 en vue de pourvoir le poste litigieux (ci-après l’« avis de vacance »).

17      Le titre III de l’avis de vacance, intitulé « Candidatures », énonçait :

« […]

Les fonctionnaires des [i]nstitutions des Communautés européennes des grades A 4, A 5, ou A 6 promouvables, qui estiment posséder les qualifications requises, pourront postuler sur cet emploi.

[…] »

18      Aux termes du titre IV de l’avis de vacance, intitulé « Procédure de sélection », il était prévu que « [l]es candidatures ser[aie]nt examinées par un [comité] de sélection qui […] établira[it] une [liste restreinte] des candidats qui ser[aie]nt convoqués pour un entretien ».

19      Le 31 mars 2004, Mme B a été nommée rapporteur pour la procédure de pourvoi du poste litigieux.

20      Par courriel en date du 15 avril 2004, le requérant s’est porté candidat au poste litigieux.

21      Par note du 7 juin 2004, le requérant a été invité à un entretien qui s’est déroulé le 21 juin suivant avec les membres du comité de présélection. Ce comité était composé de M. C, directeur à l’Office des publications et de MM. D et E, tous deux chefs d’unité à l’Office des publications, la coordination administrative étant assurée par M. E.

22      Une note du comité de présélection du 25 juin 2004 précise notamment que, bien que tous les candidats aient été statutairement éligibles, seuls sept d’entre eux ont participé à des entretiens avec le comité de présélection. Cette même note cite, dans l’ordre alphabétique, les noms figurant sur la liste restreinte issue des entretiens : M. A, M. F, M. G et M. H. Trois de ces candidats étaient alors de grade A 5 et un candidat de grade A 4.

23      Par courriel du 5 juillet 2004, le requérant s’est renseigné auprès de M. E sur l’état d’avancement de la procédure de sélection. Par courriel du 6 juillet 2004, M. E lui a indiqué qu’aucune information ne pouvait être communiquée tant que la procédure de sélection n’était pas terminée.

24      Le 13 juillet 2004, les quatre candidats figurant sur la liste restreinte ont été interviewés par le directeur général de l’Office des publications, en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »), lui-même assisté de Mme B. Au terme de ces entretiens, le directeur général de l’Office des publications a choisi M. A ce même 13 juillet 2004.

25      Dans le rapport daté du 15 juillet 2004, signé par l’AIPN et Mme B, intitulé « R[apport de l’AIPN à la suite des entretiens avec les candidats retenus par le comité de présélection] », il est indiqué que M. A « est le candidat qui présente le plus de garanties pour le bon fonctionnement de [l’]unité ».

26      Par courriel du 7 septembre 2004, le requérant a interrogé une nouvelle fois M. E sur l’état d’avancement de la procédure de sélection. Ce courriel est resté sans réponse. Le requérant prétend avoir renouvelé sa demande une dernière fois, par courriel du 18 novembre 2004. Cette demande n’a pas fait l’objet de réponse de la part de l’administration.

27      Le 22 novembre 2004, le requérant a contacté M. E par téléphone. Ce dernier lui a appris que la procédure de sélection était achevée depuis un certain temps, mais que l’administration avait omis d’en informer les candidats qui n’avaient pas été retenus.

28      Le 24 novembre 2004, le requérant a reçu une note, datée du 19 novembre 2004, par laquelle l’Office des publications l’informait que sa candidature n’avait pas été retenue.

29      Le 26 novembre 2004, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par laquelle il a demandé, d’une part, l’annulation de la décision de l’AIPN portant nomination de M. A au poste litigieux et de la décision de rejet de sa candidature audit poste et, d’autre part, le versement de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu’il aurait subi du fait de l’illégalité de la nomination de M. A ainsi que du retard dans la communication de la décision de rejet de sa candidature.

30      Par décision du 18 mars 2005, l’AIPN a rejeté la réclamation du requérant. Cette décision a été adressée au requérant par courrier posté le 22 mars 2005 et portée à sa connaissance le 23 avril 2005.

31      Entre temps, le 14 mars 2005, la commission d’invalidité, dont l’intervention est prévue par l’article 53 du statut, a constaté que le requérant était atteint d’une invalidité permanente totale le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière et que, pour ce motif, il était suspendu de son service à la Commission. La commission d’invalidité a précisé que la relation éventuelle entre l’invalidité et l’occupation professionnelle antérieure du requérant devait faire l’objet d’une discussion ultérieure en son sein, dès que les éléments pertinents seraient disponibles.

32      Par décision de l’AIPN du 31 mars 2005 et prenant effet le même jour, le requérant a été mis à la retraite et admis au bénéfice d’une allocation d’invalidité fixée conformément aux dispositions de l’article 78, troisième alinéa, du statut.

33      Le 26 octobre 2005, le requérant a été convoqué à un examen médical, fixé au 14 décembre 2005, au titre de l’article 73 du statut.

34      Par lettre du 8 novembre 2006, la Commission a informé le requérant qu’elle reconnaissait que, à la suite de l’examen médical auquel celui-ci s’était soumis, son état antérieur s’était aggravé et qu’en conséquence les frais des traitements médicaux en rapport direct avec l’aggravation de son état antérieur lui seraient remboursés jusqu’à la consolidation dudit état, conformément à l’article 73 du statut. Il était également précisé que, en vertu de l’article 19 de la réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires, le requérant devait tenir l’administration informée de l’évolution de son état de santé. Partant, il était demandé au requérant de faire remplir un formulaire d’attestation médicale par son médecin traitant. À cet égard, il était précisé que, dans l’hypothèse où l’administration ne recevrait pas ce formulaire rempli au plus tard le 8 mai 2007, le requérant serait considéré comme guéri.

35      Le 28 mars 2007, la Commission a rappelé au requérant que, selon l’article 15 de l’annexe VIII du statut, l’institution peut faire examiner périodiquement les anciens fonctionnaires bénéficiant d’une pension d’invalidité et qui n’ont pas atteint l’âge de 63 ans. Dès lors, la Commission a demandé au requérant de bien vouloir lui faire parvenir un certificat médical lui indiquant son état actuel de santé et « statuant » sur la nécessité ou non de son maintien en position d’invalidité.

 Procédure en première instance

36      Le 17 juin 2005, le requérant, alors âgé de 40 ans, a saisi le Tribunal de première instance des Communautés européennes d’un recours ayant pour objet l’annulation de la décision de l’AIPN portant rejet de sa candidature au poste litigieux, ainsi que l’annulation de la décision de nommer M. A à ce même poste, lequel a été enregistré sous la référence T‑225/05.

37      Le 3 octobre 2005, la Commission a soulevé, par acte séparé, au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, une exception d’irrecevabilité à l’encontre tant des demandes en annulation que de la demande en indemnité formulées dans le cadre du recours T‑225/05. Le 15 novembre 2005, le requérant a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité. Par ordonnnance du 8 décembre 2005, le Tribunal de première instance a joint l’exception d’irrecevabilité au fond.

38      Par ordonnance du 15 décembre 2005, le Tribunal de première instance, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), a renvoyé l’affaire devant le Tribunal. Le recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous la référence F‑44/05.

39      Le 10 septembre 2007, le requérant a notamment demandé au Tribunal de transmettre aux autorités de poursuite pénale compétentes une copie des pièces du dossier de procédure et de porter plainte contre la Commission en raison de déclarations inexactes contenues dans celles-ci, concernant la date du début des travaux du comité de présélection. En outre, le requérant a demandé que le Tribunal tienne compte, dans le cadre de sa décision sur la demande en indemnité, de l’inexactitude des déclarations de la Commission. À cet égard, le requérant a demandé au Tribunal de faire usage de sa compétence de pleine juridiction aux fins de condamner la Commission au paiement d’une indemnité appropriée en réparation du préjudice moral que lui auraient causées les déclarations inexactes de la Commission.

40      Le 25 septembre 2008, le Tribunal (deuxième chambre) a rendu l’arrêt Strack/Commission aux termes duquel il a, dans un point 1, rejeté comme irrecevable la demande d’annulation de la décision de nommer M. A au poste litigieux, dans un point 2, annulé la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux, dans un point 3, condamné la Commission à verser au requérant un montant de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts, dans un point 4, rejeté le recours pour le surplus, dans un point 5, condamné le requérant à supporter la moitié de ses dépens, et dans un point 6, condamné la Commission à supporter ses propres dépens ainsi que la moitié des dépens du requérant.

41      À l’occasion de cet arrêt, le Tribunal a jugé, s’agissant de la demande du requérant de transmettre une copie des pièces du dossier aux autorités de poursuite pénale compétentes et de porter plainte en conséquence, qu’il ne saurait accéder à cette demande, car celle-ci n’entrait pas dans sa compétence (arrêt Strack/Commission, point 49).

42      En ce qui concerne l’objet du recours, le Tribunal a précisé que les chefs de conclusions en annulation du requérant devaient être compris comme ayant pour objet, d’une part, l’annulation de la décision de nommer M. A au poste litigieux et, d’autre part, l’annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant (arrêt Strack/Commission, point 54).

43      À l’issue de son examen des conclusions en annulation, le Tribunal a rejeté celles tendant à l’annulation de la décision de nommer M. A au poste litigieux comme étant irrecevables (arrêt Strack/Commission, point 80) et a accueilli partiellement celles tendant à l’annulation de la décision rejetant la candidature du requérant (arrêt Strack/Commission, point 202).

44      Pour motiver l’irrecevabilité des conclusions en annulation de la décision de nommer M. A au poste litigieux, le Tribunal a relevé que le requérant avait été mis à la retraite et admis au bénéfice d’une allocation d’invalidité à compter du 31 mars 2005 de sorte que, lorsque le présent recours a été introduit, le 17 juin 2005, il n’avait plus vocation à travailler au sein de la Commission et ne pouvait plus prétendre à occuper le poste litigieux. Certes, une réintégration du requérant au service de la Commission restait possible, mais le Tribunal a rappelé que, lorsque l’intérêt à agir dont un requérant se prévaut concerne une situation juridique future, celui-ci doit établir que l’atteinte à cette situation se révèle, d’ores et déjà, certaine. Or, la réintégration du requérant dans les services de la Commission n’aurait été qu’un évènement éventuel dont la réalisation était incertaine. Dans ces circonstances, le Tribunal a jugé qu’il incombait au requérant d’établir l’existence d’une circonstance particulière justifiant le maintien d’un intérêt personnel et actuel à agir en annulation de la décision de nommer M. A au poste litigieux et, considérant que celui-ci n’était pas parvenu à établir l’existence d’une telle circonstance, en a tiré la conséquence que le requérant n’avait pas d’intérêt à demander l’annulation de la décision de nommer M. A au poste litigieux. En revanche, le Tribunal a considéré que le requérant, bien que mis à la retraite, conservait un intérêt à faire constater l’irrégularité de la décision de rejet de sa candidature au poste litigieux et ce afin d’obtenir, le cas échéant, réparation du dommage que cette décision avait pu lui avoir causé.

45      Sur le fond, le Tribunal a accueilli les conclusions en annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux au motif que la composition du comité de présélection n’était pas conforme à l’article 2, paragraphe 3, de la décision du 28 avril 2004. En effet, cette décision prévoyait que le comité de présélection devait comporter au moins un membre d’une autre direction générale que celle concernée par le poste à pourvoir. Or, tous les membres du comité de présélection exerçaient leurs fonctions au sein de l’Office des publications (arrêt Strack/Commission, point 116) et les parties ne contestaient pas que la décision du 28 avril 2004 s’appliquait audit Office (arrêt Strack/Commission, point 106). Par suite, le Tribunal a partiellement accueilli les conclusions indemnitaires du requérant au motif qu’il avait été privé du droit de voir sa candidature examinée dans des conditions légales et a condamné la Commission à verser au requérant la somme de 2 000 euros au titre de son préjudice moral (arrêt Strack/Commission, point 220).

 Procédure de pourvoi

46      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal de première instance, le 3 décembre 2008, la Commission a formé un pourvoi principal contre l’arrêt Strack/Commission, enregistré sous la référence T‑526/08 P. Selon la Commission, le Tribunal aurait, premièrement, commis une erreur de droit en reconnaissant au requérant un intérêt à agir en annulation de la décision de rejet de sa candidature, deuxièmement, commis une erreur de droit en déduisant l’existence du préjudice moral allégué par le requérant du seul constat que celui-ci s’était vu privé du droit de voir sa candidature examinée dans des conditions légales et, troisièmement, entaché son arrêt d’un défaut de motivation en n’exposant pas les raisons pour lesquelles l’intérêt moral du requérant aurait été lésé.

47      Le 10 février 2009, le requérant a déposé son mémoire en réponse, dans lequel il a également formé un pourvoi incident contre l’arrêt attaqué. Selon le requérant, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en lui déniant tout intérêt à agir en annulation de la décision de nomination de M. A, un défaut de motivation en ne motivant pas la considération selon laquelle il n’avait pas compétence pour connaître de la demande de transmettre aux autorités de poursuite pénale compétentes une copie des pièces du dossier de procédure et de porter plainte contre la Commission en raison de déclarations inexactes contenues dans celles-ci et une erreur de droit en statuant en ce sens. Le requérant faisait aussi grief au Tribunal d’avoir omis de tenir compte du préjudice moral qui lui aurait été causé par certaines irrégularités de la procédure de sélection qu’il avait dénoncées dans le cadre de son recours initial ayant donné lieu à l’arrêt Strack/Commission. Dans ses écrits, le requérant avait en outre présenté une demande tendant à ce que le Tribunal de première instance transmette aux autorités de poursuite pénale compétentes une copie des pièces de procédure et porte plainte contre la Commission en raison des déclarations inexactes contenues dans celles-ci.

48      Dans l’arrêt de renvoi, le Tribunal de l’Union européenne a, d’une part, accueilli le pourvoi principal de la Commission aux motifs que le Tribunal avait commis trois erreurs de droit, la première, en appréciant l’intérêt du requérant à agir en annulation de la décision de rejet de sa candidature de manière spécifique et distincte de son intérêt à agir en annulation de la décision de nomination de M. A (arrêt de renvoi, point 46), la seconde, en fondant la recevabilité de la demande en annulation de la décision de rejet de la candidature sur une appréciation erronée de l’intérêt à agir du requérant (arrêt de renvoi, point 51), la troisième, dans l’interprétation et l’application des règles d’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, le Tribunal ayant accueilli les conclusions indemnitaires du requérant sans rechercher concrètement, comme il y était légalement tenu, si le préjudice moral allégué était détachable de l’illégalité fondant l’annulation de la décision de rejet de sa candidature, et donc insusceptible d’être intégralement réparé par ladite annulation (arrêt de renvoi, point 59).

49      Le Tribunal de l’Union européenne a, d’autre part, accueilli partiellement le pourvoi incident du requérant. En effet, il a estimé que le Tribunal avait commis une erreur de droit en rejetant, comme irrecevables, les conclusions en annulation de la décision de nomination de M. A contenues dans la requête sur la base de motifs qui n’étaient pas de nature à établir que le requérant n’avait pas d’intérêt à agir en vue d’une telle annulation (arrêt de renvoi, points 75 et suivants).

50      En revanche, le Tribunal de l’Union européenne a rejeté le surplus du pourvoi incident. Notamment, il a indiqué que c’était à bon droit que le Tribunal avait jugé qu’il n’avait pas compétence pour statuer sur la demande émanant d’une partie à un litige devant lui visant, en substance, premièrement, à ce qu’il constate que le comportement adopté, en cours de procédure par l’autre partie à ce même litige, est susceptible de recevoir une qualification pénale, deuxièmement, à ce qu’il décide que ledit comportement doit être dénoncé aux autorités pénales compétentes et, troisièmement, à ce qu’il dépose plainte auprès de ces dernières. Le Tribunal de l’Union européenne a cependant précisé que cette constatation était sans préjudice de la possibilité pour le requérant de demander au Tribunal, en vertu des pouvoirs que celui-ci tire de l’article 30, paragraphe 4, de son règlement de procédure, de lever l’immunité dont bénéficient les représentants des parties qui se présentent devant lui, pour les paroles prononcées et les écrits produits relatifs à la cause ou aux parties, afin de saisir dudit comportement les autorités pénales compétentes (arrêt de renvoi, point 82).

51      En ce qui concerne la demande du requérant tendant à ce que le Tribunal de l’Union européenne transmette aux autorités de poursuite pénale compétentes une copie des pièces de procédure et porte plainte contre la Commission, le Tribunal de l’Union européenne a rejeté ladite demande comme étant irrecevable, au motif que les règles qui régissent la procédure de pourvoi contre une décision du Tribunal ne prévoient pas de voie de droit permettant à une partie à la procédure en première instance de le saisir d’une demande visant, en substance, à ce qu’il constate que le comportement adopté, en première instance par l’autre partie à la procédure, est susceptible de recevoir une qualification pénale et à ce qu’il décide de dénoncer ledit comportement aux autorités pénales compétentes (arrêt de renvoi, point 124).

52      En définitive et en premier lieu, le Tribunal de l’Union européenne a annulé les points 1, 2, 3, 5 et 6 du dispositif de l’arrêt Strack/Commission (arrêt de renvoi, point 127) et rejeté le pourvoi incident pour le surplus. En deuxième lieu, le Tribunal de l’Union européenne a estimé qu’il n’était pas en mesure de statuer ni sur les conclusions en annulation de la décision de nomination de M. A et de la décision de rejet de la candidature du requérant au motif qu’il n’y avait pas eu de débat sur le point de savoir si l’intérêt de M. A faisait obstacle à ce qu’une telle annulation soit prononcée, ni sur les conclusions en indemnisation pour un montant de 2 000 euros dans la mesure où le Tribunal n’avait pas examiné si le préjudice moral dont le requérant avait eu à souffrir était détachable de l’illégalité qu’il avait constatée. Par suite, le Tribunal de l’Union européenne a renvoyé l’affaire devant le Tribunal aux fins qu’il statue sur les conclusions en annulation de la décision de nomination de M. A au poste litigieux et de la décision de rejet de la candidature du requérant audit poste ainsi que sur les conclusions indemnitaires pour un montant de 2 000 euros (arrêt de renvoi, point 128). En dernier lieu, le Tribunal de l’Union européenne a réservé les dépens de la procédure de pourvoi.

53      Par lettres du 15 décembre 2010, le greffe du Tribunal a, conformément à l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, informé le requérant et la Commission qu’ils disposaient d’un délai de deux mois augmenté du délai de distance forfaitaire de dix jours à compter de la signification de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne pour déposer leur mémoire d’observations écrites.

54      La présente affaire a été attribuée à la deuxième chambre, alors composée de M. H. Tagaras, président, Mme I. Boruta et M. S. Van Raepenbusch, juges. Suite à l’expiration du mandat du président de la chambre et à la réorganisation des chambres du Tribunal le 10 octobre 2011, la composition de cette chambre a été modifiée.

55      Le requérant et la Commission ont déposé chacun, respectivement, le 21 février 2011 et le 12 avril 2011, un mémoire d’observations écrites.

56      Dans son mémoire d’observations écrites sur l’arrêt de renvoi, outre lesdites observations, le requérant a présenté plusieurs demandes tendant, premièrement, à ce que le Tribunal suspende la procédure jusqu’à l’adoption d’une nouvelle disposition remplaçant l’article 113, paragraphe 2, du règlement de procédure, deuxièmement, à ce qu’il lève l’immunité dont bénéficient les représentants de la Commission pour les paroles et écrits produits lors de la procédure ayant conduit à l’arrêt Strack/Commission, troisièmement, à ce que le président du Tribunal récuse M. le juge S. Van Raepenbusch et, quatrièmement, à ce que le Tribunal lui octroie une indemnité pour longueur excessive de la procédure et, dans le cas où le Tribunal estimerait que cette demande de dommages et intérêts ne peut être traitée directement dans le cadre de la présente procédure, mais doit faire l’objet d’un recours autonome, à ce que celle-ci soit transmise à la juridiction compétente.

57      Parmi ces demandes, celle tendant à ce que le Tribunal suspende la procédure jusqu’à l’adoption d’une nouvelle disposition remplaçant l’article 113, paragraphe 2, du règlement de procédure et celle tendant à ce que le président du Tribunal récuse M. le juge S. Van Raepenbusch, ont été rejetées respectivement par ordonnance du président de la deuxème chambre du 8 décembre 2011 et par décision du président du Tribunal du 29 septembre 2011.

 En droit

58      À titre liminaire, il convient de déterminer l’objet de la présente affaire.

59      Il y a lieu de relever, tout d’abord, que parmi les demandes qu’a formulées le requérant, n’ont pas encore été encore tranchées celle tendant à ce que le Tribunal lève l’immunité dont bénéficient les représentants de la Commission pour les paroles prononcées et les écrits produits lors de la procédure ayant conduit à l’arrêt Strack/Commission et celle tendant à ce que le Tribunal octroie au requérant une indemnité pour longueur excessive de la procédure.

60      Par ailleurs, il doit être rappelé qu’en raison de l’annulation par le Tribunal de l’Union européenne d’une partie du dispositif de l’arrêt Strack/Commission et du renvoi subséquent de l’affaire devant le Tribunal, celui-ci est saisi, en application de l’article 113 du règlement de procédure, par l’arrêt de renvoi des conclusions et des moyens soulevés par le requérant dans l’affaire F‑44/05, Strack/Commission, à l’exclusion des éléments du dispositif non annulés par le Tribunal de l’Union européenne, ainsi que des considérations qui constituent le fondement nécessaire desdits éléments, ceux-ci étant passés en force de chose jugée.

61      Afin de déterminer quels sont précisément les conclusions et les moyens sur lesquels le Tribunal doit se prononcer, il doit être rappelé que dans l’affaire Strack/Commission, le requérant avait conclu à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        donner acte du recours introduit conformément à l’article 91 du statut ;

–        déclarer le recours recevable et bien fondé ;

–        annuler la décision de l’AIPN, datée du 22 mars 2005, rejetant sa réclamation ;

–        annuler la décision de la Commission, datée du 19 novembre 2004, rejetant sa candidature ;

–        annuler la procédure de sélection COM/A/057/04 ;

–        condamner la Commission à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral subi du fait de l’illégalité de la procédure de sélection et de la tardiveté de la décision de rejet de sa candidature ;

–        condamner la Commission aux dépens.

62      Cependant, il doit être implicitement déduit de l’arrêt Strack/Commission, précité, que les conclusions tendant à ce que le Tribunal donne acte du recours introduit conformément à l’article 91 du statut et celles tendant à ce que le Tribunal déclare le recours recevable et bien fondé ont été considérées par ledit Tribunal comme constituant des énonciations de pure forme pour lesquelles il n’y avait pas lieu de statuer, dans la mesure où ledit arrêt ne s’est pas exprimé sur ces conclusions. L’arrêt de renvoi n’a pas infirmé ce constat.

63      En outre, dans l’arrêt Strack/Commission, le Tribunal a jugé que l’ensemble des chefs de conclusions en annulation formulés dans la requête devaient être considérés comme ayant pour objet l’annulation, d’une part, de la décision de nomination de M. A et, d’autre part, de la décision de rejet de la candidature du requérant (arrêt Strack/Commission, point 54). Cette définition de l’objet du recours n’a pas été infirmée par le Tribunal de l’Union européenne dans l’arrêt de renvoi. Toutefois, à la suite de l’annulation par le Tribunal de l’Union européenne des points 1, 2, 3, 5 et 6 du dispositif de l’arrêt Strack/Commission, dans l’arrêt de renvoi, le Tribunal doit se prononcer une nouvelle fois sur les conclusions en annulation et les conclusions indemnitaires.

64      Plus spécifiquement, il résulte du point 46 de l’arrêt de renvoi que, s’agissant des conclusions en annulation, le Tribunal doit réexaminer leur recevabilité en considérant cette fois de manière globale et unique l’intérêt du requérant à obtenir l’annulation de la décision de nomination de M. A et son intérêt à obtenir l’annulation de la décision rejetant sa candidature.

65      Sur ce point, le Tribunal de l’Union européenne a précisé aux points 47 à 51 de l’arrêt de renvoi que l’intérêt à agir en annulation du requérant ne saurait être déduit de ce que celui-ci aurait intérêt à faire constater l’illégalité d’une décision en vue d’obtenir ultérieurement la réparation du dommage que celle-ci pouvait lui avoir causé. En outre, le Tribunal de l’Union européenne a jugé, notamment aux points 73 à 75 de l’arrêt de renvoi, que l’intérêt à agir du requérant ne saurait lui être dénié du seul fait que celui-ci a été mis d’office à la retraite en raison d’une incapacité permanente totale reconnue par la commission d’invalidité, en vertu des articles 53 et 78 du statut, car cette situation est réversible.

66      En ce qui concerne le bien-fondé des moyens d’annulation, il ne ressort pas de l’arrêt de renvoi que le Tribunal aurait commis une erreur de droit en accueillant le premier moyen et en rejetant les autres. En revanche, l’arrêt de renvoi précise que la question de savoir si l’intérêt de M. A, nommé au poste litigieux, fait obstacle à l’annulation de la décision de nomination et de la décision de rejet de candidature devra être examinée par le Tribunal (arrêt de renvoi, point 128).

67      S’agissant des conclusions indemnitaires pour autant qu’elles concernent les autres chefs d’indemnisation que celui lié à l’irrégularité de la composition du comité de présélection, il convient de relever qu’aux points 211 et suivants de l’arrêt Strack/Commission, le Tribunal les a toutes écartées. Dans l’arrêt de renvoi, le Tribunal de l’Union européenne a confirmé que ces chefs d’indemnisation étaient non fondés. La solution adoptée dans l’arrêt Strack/Commission ayant ainsi acquis autorité de chose jugée, elle ne saurait être remise en cause dans le cadre de la présente instance après renvoi.

68      Pour ce qui est des conclusions indemnitaires, pour autant que celles-ci concernent le préjudice moral dont le requérant aurait eu à souffrir du fait de l’irrégularité de la composition du comité de présélection, le Tribunal de l’Union européenne les a renvoyées au Tribunal afin que celui-ci recherche si le préjudice moral allégué est détachable de l’illégalité fondant ces annulations et si ce préjudice n’est pas susceptible d’être intégralement réparé par lesdites annulations (arrêt de renvoi, points 59 et 128).

69      Par conséquent, il convient de statuer dans le cadre de la présente affaire sur :

–        la demande du requérant tendant à ce que le Tribunal lève l’immunité dont bénéficient les représentants de la Commission pour les paroles prononcées et les écrits produits lors de la procédure ayant conduit à l’arrêt Strack/Commission ;

–        la demande tendant à ce que le Tribunal octroie au requérant une indemnité pour longueur excessive de la procédure ;

–        les conclusions en annulation de la décision de nomination de M. A et de la décision rejetant la candidature du requérant pour autant qu’il s’agisse de savoir si celles-ci sont recevables et, dans cette hypothèse, si l’intérêt de M. A fait obstacle à l’annulation de ces décisions ;

–        les conclusions indemnitaires pour autant que celles-ci concernent le préjudice moral dont le requérant aurait eu à souffrir du fait de l’irrégularité de la composition du comité de présélection.

 Sur la demande de levée de l’immunité des représentants de la Commission pour les paroles prononcées et les écrits produits lors de la procédure

70      Dans le cadre de la procédure qui s’est conclue par l’arrêt Strack/Commission, le requérant a relevé que deux documents produits par les représentants de la Commission en cours d’instance contredisaient l’affirmation formulée par ces mêmes représentants dans leur mémoire en défense, selon laquelle le comité de présélection avait commencé ses travaux avant le 1er mai 2004, avec pour conséquence que la nouvelle réglementation concernant les comités de sélection n’était pas applicable. Exprimant ses doutes sur le point de savoir si les représentants de la Commission ne se seraient pas rendus coupables d’une tentative de fraude relative à la procédure, le requérant a demandé au Tribunal, dans son mémoire d’observations écrites, de lever l’immunité dont bénéficient les représentants de la Commission concernés, sur le fondement de l’article 30, paragraphe 4, du règlement de procédure. Selon le requérant, la levée de l’immunité des représentants de la Commission concernés ne serait pas contraire à l’intérêt de la procédure, dès lors que la procédure dans la présente affaire sur renvoi après annulation partielle se trouverait à un stade où les parties ont fini d’exposer leur argumentation.

71      Interrogés par le Tribunal, les représentants de la Commission concernés ont présenté chacun, par lettres respectives du 6 mars 2012, des observations sur la demande de levée d’immunité formulée par le requérant. Par suite, le requérant et la Commission ont pris position sur lesdites observations, par lettres respectivement du 16 avril 2012 et du 26 mars 2012.

72      À cet égard, il convient tout d’abord de rappeler qu’en vertu de l’article 30, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, « [l]es représentants des parties qui se présentent devant le Tribunal ou devant une autorité judiciaire commise par lui en vertu d’une commission rogatoire jouissent de l’immunité pour les paroles prononcées et les écrits produits relatifs à la cause ou aux parties ». Les paragraphes 3 et 4 du même article disposent que cette immunité est accordée « exclusivement dans l’intérêt de la procédure » et que le Tribunal peut lever l’immunité si une telle levée « n’est pas contraire à l’intérêt de la procédure ».

73      Il y a lieu de souligner que ces dispositions doivent être interprétées à la lumière de l’article 19, cinquième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, qui en est la base juridique, et qui dispose que « [l]es agents, conseils et avocats comparaissant devant la Cour jouissent des droits et garanties nécessaires à l’exercice indépendant de leurs fonctions, dans les conditions qui seront déterminées par le règlement de procédure ».

74      Il convient également de tenir compte dans l’interprétation de cette disposition de ce que l’immunité des représentants des parties reflète la liberté d’expression des avocats consacrée à l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et à l’article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »). À cet égard, la Cour européenne des droits de l’homme a notamment constaté, à propos de la liberté d’expression d’un avocat de la défense dans une procédure pénale, que « [l]e statut spécifique des avocats les place dans une situation centrale dans l’administration de la justice, comme intermédiaires entre les justiciables et les tribunaux, ce qui explique les normes de conduite imposées en général aux membres du barreau[. O]utre la substance des idées et informations exprimées, l’article 10 [de la CEDH] protège aussi leur mode d’expression[. L]a liberté d’expression dont jouit un avocat dans le prétoire n’est pas illimitée, et certains intérêts, tels que l’autorité du pouvoir judiciaire, sont assez importants pour justifier des restrictions à ce droit. Néanmoins […] ce n’est qu’exceptionnellement qu’une restriction à la liberté d’expression de l’avocat de la défense […] peut passer pour nécessaire dans une société démocratique » (Cour eur. D. H., arrêt Kyprianou c. Chypre du 15 décembre 2005, §173 et 174).

75      S’il est exact que la procédure devant le Tribunal n’est pas une procédure pénale, il n’en demeure pas moins que l’article 10 de la CEDH, tel qu’interprété par la Cour européenne des droits de l’homme, protège de manière générale la liberté d’expression des avocats et contribue à la réalisation dans la pratique du droit à un procès équitable. Ainsi, dans son arrêt Kyprianou c. Chypre, précité, la Cour européenne des droits de l’homme a constaté au paragraphe 175, que « [p]our avoir confiance dans l’administration de la justice, le public doit avoir confiance en la capacité des avocats à représenter effectivement les justiciables[. I]l s’ensuit que [l’]‘effet dissuasif’ [susceptible d’être produit par l’adoption d’une sanction à l’égard d’un avocat] est un facteur important à prendre en compte pour ménager un juste équilibre entre les tribunaux et les avocats dans le cadre d’une bonne administration de la justice ».

76      Enfin, il doit être tenu compte, pour interpréter l’article 30 du règlement de procédure, de l’article 47, paragraphes 1 et 2, de la Charte, lequel vise à garantir le droit fondamental à un recours effectif devant un tribunal, y compris la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter (voir, pour ce qui est du droit de bénéficier d’une aide juridictionnelle, arrêt de la Cour du 22 décembre 2010, DEB Deutsche Energiehandels- und Beratungsgesellschaft mbH, C‑279/09, points 45 et 46).

77      C’est à la lumière de ce qui précède qu’il convient d’examiner la demande de levée d’immunité dont bénéficient les représentants de la Commission concernés lors de la procédure ayant conduit à l’arrêt Strack/Commission.

78      Toutefois, avant d’examiner le bien-fondé de la demande présentée par le requérant, il convient d’en examiner la recevabilité. Certes, le Tribunal de l’Union européenne a indiqué, au point 82 de l’arrêt de renvoi, que toute partie avait la possibilité, afin de pouvoir ensuite saisir les autorités pénales compétentes, de formuler une telle demande de levée d’immunité auprès du Tribunal, mais il y a lieu de relever que, lors de la procédure initiale, le requérant n’avait pas demandé à ce que l’immunité des représentants de la Commission soit levée de sorte que le Tribunal de l’Union européenne ne peut pas avoir été conduit à se prononcer dans l’arrêt de renvoi sur la portée de l’article 30 du règlement de procédure du Tribunal. Aussi, aucune décision du Tribunal sur ce point ne peut avoir fait l’objet d’un examen par le juge du pourvoi. En conséquence, il y a lieu de constater que l’arrêt de renvoi doit être compris comme étant un simple obiter dictum, formulé en réponse à un argument du requérant selon lequel considérer le Tribunal comme étant incompétent pour constater que le comportement d’une partie est susceptible de recevoir une qualification pénale, constitue un déni de justice.

79      En revanche, il doit être constaté que l’article 30 du règlement de procédure ne fait pas expressément état de ce qu’une demande de levée d’immunité peut être introduite par l’une des parties. Or, vu que l’immunité prévue à l’article 30 du règlement de procédure vise à protéger les représentants des parties contre d’éventuelles poursuites et eu égard à la ratio legis de cette disposition telle qu’exposée ci-dessus, le Tribunal estime n’avoir l’obligation de statuer sur une demande de levée d’immunité que si cette dernière est présentée par une juridiction ou une autorité nationale compétente. Tel n’étant pas le cas, le Tribunal considère ne pas pouvoir accéder à une demande de levée de l’immunité présentée par une partie, une telle demande n’entrant pas dans la compétence du Tribunal.

80      Il s’ensuit qu’en l’espèce, la demande de levée d’immunité formulée par le requérant doit être rejetée comme étant irrecevable.

 Sur la demande d’indemnisation pour durée excessive de la procédure

81      La demande d’indemnisation pour durée excessive de la procédure, contenue dans le mémoire d’observations écrites, déposé par le requérant dans la présente procédure sur renvoi, a été traitée par ordonnance séparée (ordonnance du Tribunal du 7 décembre 2011, Strack/Commission, F‑44/05 RENV). Dans cette ordonnance, le Tribunal a constaté que, pour soutenir sa demande, le requérant se prévalait de la durée de trois procédures distinctes, à savoir la procédure administrative visant à pourvoir le poste litigieux, la procédure précontentieuse et la procédure juridictionnelle.

82      S’estimant incompétent pour statuer sur la demande indemnitaire fondée sur la durée de la procédure juridictionnelle, puisque le préjudice ainsi allégué ne trouve pas son origine dans le lien d’emploi unissant le requérant à la Commission, mais dans le retard à statuer prétendument imputable aux juridictions de l’Union, le Tribunal a renvoyé au Tribunal de l’Union européenne, par ordonnance du 7 décembre 2011, Strack/Commission, F‑44/05 RENV, la demande d’indemnisation présentée par le requérant pour autant qu’elle concernait la durée excessive de la procédure juridictionnelle. Cette demande d’indemnisation a été enregistrée au greffe du Tribunal de l’Union européenne sous la référence T‑670/11.

83      Par lettre déposée au greffe du Tribunal de l’Union européenne, le 12 janvier 2012, le requérant a demandé à ce que sa demande d’indemnisation pour durée excessive de la procédure juridictionnelle soit considérée comme ayant perdu son objet et que l’affaire T‑670/11 soit radiée du registre du Tribunal de l’Union européenne.

84      Le 16 février 2012, le requérant a introduit un pourvoi contre l’ordonnance du 7 décembre 2011 Strack/Commission, F‑44/05 RENV de renvoi de la demande d’indemnisation pour durée excessive de la procédure juridictionnelle devant le Tribunal de l’Union européenne. Ce pourvoi a été enregistré au greffe du Tribunal de l’Union européenne sous la référence T‑65/12 P.

85      Par ordonnance du président du Tribunal de l’Union européenne du 26 janvier 2012, l’affaire T‑670/11 a été radiée du registre du Tribunal de l’Union européenne.

86      Par ordonnance du 12 juin 2012, Strack/Commission (T‑65/12 P), le Tribunal de l’Union européenne a rejeté le pourvoi introduit par le requérant contre l’ordonnance du 7 décembre 2011 Strack/Commission, F‑44/05 RENV de renvoi de la demande d’indemnisation pour durée excessive de la procédure juridictionnelle devant le Tribunal de l’Union européenne au motif que l’ordonnance attaquée ne constituait pas un acte susceptible de faire l’objet d’un pourvoi.

87      En ce qui concerne la demande d’indemnisation pour autant qu’elle concerne la durée excessive de la procédure administrative visant à pourvoir le poste et de la procédure administrative précontentieuse, il y a lieu de relever que, pour soutenir celle-ci, le requérant fait grief à la Commission d’avoir volontairement allongé ces procédures, en mettant en œuvre une procédure manifestement incorrecte de vacance de poste, en ne l’informant pas directement du résultat de cette procédure et en n’adoptant pas les mesures correctives nécessaires dans le cadre de la procédure précontentieuse, dont elle a pratiquement épuisé les délais.

88      À cet égard, s’agissant de la procédure administrative strictement entendue, il doit être rappelé qu’en vertu du principe de bonne administration, l’AIPN a l’obligation d’observer un délai raisonnable dans la conduite de toute procédure administrative (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 11 avril 2006, Angeletti/Commission, T‑394/03, point 163).

89      En l’espèce, il y a lieu de relever que la procédure administrative visant à pourvoir le poste litigieux a débuté le 24 mars 2004 par la publication de l’avis de vacance en vue de pourvoir ledit poste et a pris fin, pour ce qui concerne le requérant, le 19 novembre 2004, lorsque celui-ci a été informé de ce que sa candidature n’avait pas été retenue. Par suite, il doit être constaté que la durée de la procédure administrative a été d’environ huit mois, durée qui ne saurait être considérée comme déraisonnable, sachant notamment que les candidatures au poste litigieux pouvaient être déposées jusqu’au 15 avril 2004 et que la procédure de sélection comportait quatre étapes, à savoir, premièrement, l’examen des candidatures par le comité de présélection, en vue de l’établissement d’une liste restreinte, deuxièmement, un entretien entre l’AIPN et les candidats figurant sur la liste restreinte ou tout autre candidat avec lequel elle souhaiterait s’entretenir, troisièmement, une saisine pour avis du comité consultatif des nominations, et quatrièmement, l’adoption par l’AIPN de l’acte de nomination.

90      En ce qui concerne la durée de la procédure précontentieuse, celle-ci a duré trois mois et trente jours, ce qui ne constitue pas une durée excessive. En tout état de cause, la durée de la procédure précontentieuse ne saurait, par principe, être excessive dès lors qu’en raison des différents délais prévus aux articles 90 et 91 du statut, elle ne peut excéder, lorsqu’elle a débuté par une demande, quatorze mois et dix jours et, lorsque, comme en l’espèce, elle a débuté par une réclamation, dix mois et dix jours.

91      Par conséquent, il convient de rejeter la demande d’indemnisation pour autant qu’elle est fondée sur la durée excessive de la procédure administrative visant à pourvoir le poste et de la procédure précontentieuse.

 Sur les conclusions en annulation de la décision de nomination de M. A et de la décision de rejet de la candidature du requérant

 Sur la recevabilité des conclusions en annulation

–       Arguments des parties

92      Dans son mémoire en défense déposé dans l’affaire F‑44/05, lequel renvoie aux considérations exposées dans l’exception d’irrecevabilité présentée par acte séparé, la Commission soutient que le requérant n’aurait pas d’intérêt à agir, car il ne pourrait tirer aucun bénéfice de l’annulation des décisions attaquées. En effet, ayant été mis à la retraite d’office, en vertu des articles 53 et 78 du statut, pour cause d’incapacité permanente considérée comme totale antérieurement à l’introduction du recours, le requérant ne pourrait prétendre à occuper le poste litigieux.

93      Dans ses observations écrites déposées dans la présente procédure sur renvoi, la Commission affirme que l’arrêt de renvoi confirme que les conclusions en annulation de la décision de nomination de M. A et de la décision de rejet de la candidature du requérant sont irrecevables pour le motif que le requérant ne saurait retirer un bénéfice de l’annulation desdites décisions.

94      D’une part, la Commission relève que, pour juger qu’un fonctionnaire, tel que le requérant, reconnu par la commission d’invalidité comme se trouvant en incapacité permanente totale et mis d’office à la retraite en vertu des articles 53 et 78 du statut, conservait un intérêt à agir en annulation, le Tribunal de l’Union européenne s’est appuyé sur l’arrêt de la Cour du 22 décembre 2008, Gordon/Commission (C‑198/07 P). Or, dans cet arrêt, la Cour aurait précisé que tel ne serait pas le cas lorsque la possibilité de réintégration du fonctionnaire mis en invalidité n’est pas réelle mais seulement hypothétique. Estimant qu’en l’espèce rien ne permettrait de dire que le requérant serait susceptible d’être prochainement à nouveau apte au service, la Commission en déduit que le requérant n’aurait pas intérêt à agir.

95      D’autre part, la Commission prétend que dans l’arrêt de renvoi, le Tribunal de l’Union européenne aurait fait état de ce qu’un requérant ne pouvait pas avoir intérêt à agir en annulation d’une décision de nommer un fonctionnaire à un poste dans le cas où, en tenant compte de la gravité du vice et après mise en balance des intérêts en présence, il apparaîtrait que l’annulation de la décision illégale constituerait une sanction excessive du vice dont cette décision serait entachée. Or, dans la présente affaire, l’annulation de la décision de nommer M. A constituerait une sanction excessive. Tout d’abord, l’irrégularité ayant entaché ladite décision ne serait pas une erreur de droit ou une erreur manifeste d’appréciation, mais un simple vice de procédure, de surcroît négligeable, car ayant affecté la décision du comité de présélection et non celle de l’AIPN. Ensuite, le principe de sécurité juridique s’opposerait à l’annulation de la décision de nommer M. A dès lors que plus de sept ans se sont écoulés depuis son adoption. Enfin, il serait contraire à l’intérêt du service de recommencer une procédure visant à pourvoir un poste au sujet duquel le requérant n’apporte aucun élément qui établirait qu’il pourrait y prétendre dans un avenir proche.

96      Le requérant estime, pour sa part, que l’annulation des décisions attaquées est susceptible de lui procurer un bénéfice. Au sujet de la décision rejetant sa candidature, le requérant souligne que sa mise à la retraite d’office pour cause d’incapacité permanente totale n’étant pas définitive, il ne serait pas exclu qu’il puisse un jour occuper le poste litigieux. En ce qui concerne la décision de nomination de M. A, dès lors que les conclusions en annulation de cette décision ont été introduites dans les délais, M. A n’aurait aucun droit à être maintenu au poste litigieux. En tout état de cause, le requérant considère que la Commission ne pourrait pas se prévaloir de l’intérêt de M. A en lieu et place de ce dernier afin de soulever une exception d’irrecevabilité et qu’une telle exception d’irrecevabilité serait tardive, la Commission n’en ayant pas fait état dans son mémoire en défense déposé dans l’instance initiale devant le Tribunal.

–       Appréciation du Tribunal

97      Il est de jurisprudence constante que, pour qu’un fonctionnaire ou un ancien fonctionnaire soit recevable, dans le cadre d’un recours introduit en vertu des articles 90 et 91 du statut, à demander l’annulation d’un acte lui faisant grief, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, celui-ci doit posséder, au moment de l’introduction de son recours, un intérêt, né et actuel, suffisamment caractérisé à voir annuler cet acte, un tel intérêt supposant que la demande soit susceptible, par son résultat, de lui procurer un bénéfice (voir arrêt du Tribunal de première instance du 29 novembre 2006, Agne-Dapper e.a./Commission e.a., T‑35/05, T‑61/05, T‑107/05, T‑108/05 et T‑139/05, point 35, et la jurisprudence citée, et arrêt de renvoi, point 43). En tant que condition de recevabilité, l’intérêt du requérant à agir doit s’apprécier au moment de l’introduction du recours (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal de première instance du 28 juin 2005, Ross/Commission, T‑147/04, point 25, et la jurisprudence citée, et arrêt de renvoi, point 44).

98      S’agissant d’un fonctionnaire reconnu par la commission d’invalidité comme se trouvant en incapacité permanente totale et mis d’office à la retraite en vertu des articles 53 et 78 du statut, la situation d’un tel fonctionnaire se distingue de celle d’un fonctionnaire qui a atteint l’âge de la retraite, qui a démissionné ou qui a été licencié, car il s’agit d’une situation réversible. En effet, le fonctionnaire atteint d’une telle invalidité est susceptible de reprendre un jour ses fonctions au sein d’une institution de l’Union. À cet égard, la disposition générale de l’article 53 du statut doit être lue en combinaison avec les dispositions spécifiques des articles 13 à 15 de l’annexe VIII du statut. L’activité du fonctionnaire déclaré en état d’invalidité n’est que suspendue, l’évolution de sa situation au sein des institutions étant subordonnée à la persistance des conditions ayant justifié cette invalidité, qui peut être contrôlée à échéances régulières (arrêt Gordon/Commission, précité, points 46 et 47 ; arrêt de renvoi, point 69).

99      En outre, un fonctionnaire reconnu comme atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale, dès lors qu’il est susceptible d’être réintégré dans un emploi au sein d’une institution, conserve un intérêt, au sens de la jurisprudence exposée au point 94 du présent arrêt, à demander, dans le cadre de la procédure de sélection en vue de pourvoir à un emploi vacant, à laquelle il a été admis à participer, l’annulation de la décision portant rejet de sa candidature et de la décision de nommer un autre candidat, aux fins de pouvoir continuer à prétendre, en cas de réintégration, à l’emploi en cause ou même seulement d’éviter, dans un tel cas, que les irrégularités alléguées, qui touchent aux modalités de la procédure de sélection, ne se reproduisent, à l’avenir, dans le cadre d’une procédure analogue, à laquelle il serait amené à participer. Un tel intérêt à agir découle de l’article 233, premier alinéa, CE (devenu article 266, premier alinéa, TFUE) en vertu duquel les institutions dont émane l’acte annulé sont tenues de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C‑362/05 P, points 50 et 51, et la jurisprudence citée ; arrêt de renvoi, point 70).

100    Dans ses écrits, la Commission prétend que la jurisprudence susmentionnée, et en particulier l’arrêt Gordon/Commission, précité, exigerait, pour qu’un fonctionnaire mis d’office à la retraite, en vertu des articles 53 et 78 du statut, conserve un intérêt à agir, que la possibilité de la réintégration de ce fonctionnaire soit réelle et non simplement hypothétique.

101    Cependant, si la Cour a effectivement relevé au point 48 de l’arrêt Gordon/Commission, précité, que « la possibilité de réintégration du requérant n’était pas simplement hypothétique mais bien réelle », pour juger que celui-ci, bien que mis d’office à la retraite, conservait un intérêt à agir, cette indication ne signifie pas qu’un fonctionnaire placé dans cette situation ne conserve un intérêt à agir que s’il est d’ores et déjà acquis qu’il sera prochainement à nouveau apte au service ; cette indication signifie seulement que tant qu’il n’est pas exclu que ce fonctionnaire puisse reprendre le service, il conserve un intérêt à agir. En effet, il ressort du point 48 de l’arrêt Gordon/Commission, précité, que, pour qu’un fonctionnaire mis d’office à la retraite pour cause d’invalidité permanente totale conserve un intérêt à agir, il suffit que la possibilité que celui-ci puisse réintégrer le service existe, ce qui est le cas tant que l’invalidité permanente totale n’est pas définitivement acquise. La certitude de la réintégration du fonctionnaire n’est donc nullement requise pour que soit reconnu à ce fonctionnaire un intérêt à agir. En effet, comme il a été rappelé au point 97 du présent arrêt, l’intérêt d’un requérant à voir annuler un acte suppose que cette annulation soit susceptible de lui procurer un bénéfice et non qu’il soit acquis qu’elle lui procurera un tel bénéfice.

102    Pour répondre pleinement à l’argument de la Commission, le Tribunal de l’Union européenne a précisé, dans l’arrêt de renvoi, qu’un fonctionnaire mis d’office à la retraite pour invalidité permanente totale, en vertu des articles 53 et 78 du statut, n’est privé d’un intérêt à agir que dans certains cas particuliers où l’examen de la situation concrète dudit fonctionnaire révèle qu’il n’est plus susceptible de reprendre un jour ses fonctions au sein d’une institution, eu égard, par exemple, à des conclusions de la commission d’invalidité chargée de l’examen de sa situation d’invalidité d’où il résulte que la pathologie ayant entraîné l’invalidité a un caractère fixe et qu’aucun examen médical de révision ne sera donc nécessaire ou à des déclarations du fonctionnaire intéressé d’où il résulte que, en tout état de cause, il ne reprendra plus ses fonctions au sein d’une institution (arrêt de renvoi, point 71).

103    En l’espèce, le requérant a été reconnu par la commission d’invalidité comme se trouvant en état d’invalidité permanente totale et mis d’office à la retraite en application des articles 53 et 78 du statut. Cependant, sa situation était réversible, l’administration ayant d’ailleurs pris le soin de rappeler au requérant, le 28 mars 2007, qu’elle pouvait examiner périodiquement les anciens fonctionnaires bénéficiant d’une pension d’invalidité n’ayant pas encore atteint l’âge de 63 ans (point 35 du présent arrêt). En outre, aucun élément du dossier ne permet d’établir que depuis la date à laquelle le requérant a été mis d’office à la retraite, il soit irrémédiablement acquis qu’il ne reprendra jamais ses fonctions. En tout état de cause, il appartiendra à la commission médicale de se prononcer, le moment venu, sur la reprise par le requérant de ses fonctions, une telle appréciation étant d’ordre médical de sorte que l’administration n’a pas à préjuger du contenu de la future décision de ladite commission. En conséquence, il doit être constaté que le requérant peut continuer à prétendre à l’emploi litigieux et qu’à ce titre il conserve un intérêt à agir en annulation tant de la décision de nomination de M. A que de la décision de rejet de sa candidature, décisions, en l’espèce, indissociables (ci-après les « décisions attaquées »).

104    Dans ses observations écrites dans la présente procédure après renvoi, la Commission prétend également que le requérant n’aurait pas intérêt à contester les décisions attaquées, car, selon une jurisprudence constante, il ne pourrait obtenir l’annulation d’une décision de nommer un fonctionnaire ou agent.

105    Toutefois, il doit être constaté que la jurisprudence a déjà admis et ce, à plusieurs reprises, la recevabilité de conclusions en annulation d’un tiers à la décision dirigées contre la décision de nomination d’un fonctionnaire ou d’un agent (voir, par exemple, arrêt du Tribunal de première instance du 14 novembre 2006, Neirinck/Commission, T‑494/04, points 66 et 67) et que le juge de l’Union a déjà annulé, sur le recours de tiers, plusieurs décisions de nomination de fonctionnaires ou agents (voir, par exemple, arrêt de la Cour du 23 janvier 1975, de Dapper/Parlement, 29/74, point 16 ; arrêt du Tribunal de première instance du 20 juillet 2001, Brumter/Commission, T‑351/99, point 97).

106    Certes, lorsque l’acte devant être annulé bénéficie à un fonctionnaire ou agent, ce qui est le cas d’une décision de nomination, il appartient au juge de vérifier si l’annulation ne constituera pas une sanction excessive de l’irrégularité commise (arrêt de la Cour du 5 juin 1980, Oberthür/Commission, 24/79, point 13 ; arrêt du Tribunal de première instance du 10 juillet 1992, Barbi/Commission, T‑68/91, point 36), mais cette obligation pour le juge est sans incidence sur l’intérêt à agir du tiers à la décision, demandeur en annulation (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 octobre 2008, Tzirani/Commission, F‑46/07, point 38).

107    D’une part, l’examen par le juge de la question de savoir si une annulation n’est pas une sanction excessive de l’irrégularité commise ne peut intervenir qu’après l’examen de la légalité de la décision attaquée, ledit examen tenant compte notamment de la gravité du vice constaté (arrêt Tzirani/Commission, précité, point 38).

108    D’autre part, même lorsque l’annulation d’une décision constitue une sanction excessive au regard du vice constaté, un requérant peut retirer un bénéfice de conclusions en annulation dirigées contre cette décision, puisque, selon une jurisprudence constante, le fait que l’annulation d’une décision entachée d’une irrégularité constitue une sanction excessive n’exclut pas que le juge accueille les conclusions mais renvoie à l’administration le soin de rechercher une solution équitable au litige (arrêt de la Cour du 6 juillet 1993, Commission/Albani e.a., C‑242/90 P, point 13 ; arrêt du Tribunal du 29 septembre 2010, Brune/Commission, F‑5/08, point 18), voire qu’il procède d’office à l’indemnisation du requérant pour l’irrégularité commise (arrêt Oberthür/Commission, précité, points 13 et 14 ; arrêt du Tribunal du 5 mai 2010, Bouillez e.a./Conseil, F‑53/08, point 90).

109    Il résulte de ce qui précède qu’aucun des arguments avancés par la Commission au soutien de l’exception d’irrecevabilité soulevée à l’égard des conclusions tendant à l’annulation des décisions attaquées n’est fondé. En conséquence, cette exception d’irrecevabilité doit être rejetée.

 Sur le bien-fondé des conclusions en annulation

110    Le requérant invoque cinq moyens tirés, premièrement, de la violation de la décision du 28 avril 2004 en ce que celle-ci fixe certaines règles pour la composition du comité de présélection, deuxièmement, de la violation de l’article 11 bis et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du nouveau statut, troisièmement, de l’erreur manifeste d’appréciation, quatrièmement, de la violation de l’article 25 du nouveau statut et, cinquièmement, de la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude.

111    Dans l’arrêt Strack/Commission, le Tribunal a jugé que le moyen tiré de la violation de la décision du 28 avril 2004 devait être accueilli dès lors que cette décision, applicable en l’espèce, prévoyait en son article 2, paragraphe 3, que le comité de présélection devait être composé d’au moins trois membres de grade et fonction d’encadrement égaux ou supérieurs au niveau de l’emploi à pourvoir, dont un d’une autre direction générale et qu’en l’espèce, tous les membres du comité de présélection exerçaient leurs fonctions au sein de l’Office des publications. Il a en revanche rejeté les autres moyens comme étant non fondés.

112    Dans l’arrêt de renvoi, le Tribunal de l’Union européenne n’a pas infirmé la solution dégagée par le Tribunal s’agissant du bien-fondé des moyens d’annulation soulevés par le requérant. Par suite, la solution dégagée par le Tribunal dans l’arrêt Strack/Commission, au sujet des moyens d’annulation est passée en force de chose jugée (arrêt du Tribunal de première instance du 8 décembre 2005, Reynolds/Parlement, T‑237/00, point 46). Elle ne saurait donc être remise en cause à la suite du renvoi de la présente affaire. Il s’ensuit que le moyen tiré de la violation de la décision du 28 avril 2004 doit être accueilli et que les autres moyens doivent rejetés.

113    Avant de déterminer si, comme l’exige l’arrêt de renvoi, l’intérêt de M. A fait obstacle à ce que les décisions attaquées soient annulées, il doit être relevé que, dans son mémoire en observations, la Commission soutient, en substance, que la violation de la décision du 28 avril 2004 ne serait pas susceptible d’entrainer l’annulation des décisions attaquées, car ce vice n’aurait pas eu d’effet significatif sur le bien-fondé desdites décisions attaquées, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le comité de présélection n’étant qu’un organe consultatif, le vice ayant entaché sa composition n’aurait pas eu d’effet significatif sur les décisions attaquées. Ensuite, les personnes composant le comité de présélection ayant été désignées conformément aux règles alors applicables, la circonstance que la décision du 28 avril 2004, modifiant les règles de composition du jury, n’ait pas été appliquée rétroactivement ne permettrait pas de présumer que l’irrégularité de la composition du jury, qui s’en est suivie, ait pu exercer une influence sur la décision de nommer M. A. Enfin, la décision de nommer M. A serait correcte, car le Tribunal a jugé, sans être infirmé par le Tribunal de l’Union européenne sur ce point, que la décision de nomination de M. A ne serait pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

114    Sur ce point, il y a lieu de constater que le vice ayant affecté l’avis du comité de préselection, s’apparente à un vice de procédure, puisque le comité de présélection n’exerce pas les pouvoirs dévolus à l’AIPN, mais joue uniquement un rôle consultatif. Or, comme tendent à le rappeler les arguments de la Commission susmentionnés s’agissant d’un vice de procédure, il est nécessaire, pour que celui-ci puisse aboutir à l’annulation des décisions attaquées, qu’en l’absence de ce vice, la procédure ait été susceptible d’aboutir à un résultat différent (voir, notamment, arrêt de la Cour du 21 mars 1990, Belgique/Commission, C‑142/87, point 48). En revanche, il n’est pas requis du requérant qu’il démontre que l’acte aurait nécessairement été différent s’il n’avait pas été entaché du vice de procédure en cause et il suffit qu’il ne soit pas totalement exclu que l’administration puisse adopter une décision différente, pour que l’existence d’un vice de légalité externe entraîne l’annulation de l’acte concerné (voir, s’agissant d’un rapport de notation établi sans entretien préalable avec le notateur, arrêt du Tribunal du 13 septembre 2011, Nastvogel/Conseil, F‑4/10, point 94).

115    En conséquence, et sans qu’il soit besoin de déterminer si, par son argument, la Commission ne remet pas en cause l’autorité de la chose jugée dès lors que, dans l’arrêt Strack/Commission, le Tribunal a considéré que la composition irrégulière du comité de présélection justifiait l’annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant et que le Tribunal de l’Union européenne n’a pas infirmé cette analyse dans son arrêt de renvoi, il suffit de relever, pour écarter ledit argument, qu’il ne peut être exclu que, si le comité de présélection avait été composé régulièrement, à savoir, avec au moins un membre n’appartenant pas à l’Office des publications, l’avis dudit comité ait eu un contenu différent et que, par suite, un autre candidat ait été choisi par l’AIPN afin d’occuper le poste litigieux.

116    Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la violation de la décision du 28 avril 2004 doit, en principe, entraîner l’annulation des décisions attaquées. Toutefois, comme il a été rappelé au point 106 du présent arrêt, lorsque, comme en l’espèce, les décisions devant être annulées bénéficient à un autre fonctionnaire que le requérant, il appartient au juge de vérifier, au préalable, si l’annulation ne constitue pas une sanction excessive de l’irrégularité commise (arrêt Bouillez e.a./Conseil, précité, point 82, et la jurisprudence citée).

117    À cet égard, il convient de rappeler que les conséquences que tire le juge de l’Union de l’irrégularité de décisions adoptées à l’issue de concours de recrutement ne sont pas les mêmes s’agissant de décisions adoptées à l’issue d’un concours visant à l’établissement d’une liste de réserve et de décisions adoptées à l’issue d’un concours organisé afin de pourvoir, par voie de nomination, un poste déterminé. En effet, dans le cas d’un concours visant à l’établissement d’une liste de réserve, l’annulation de l’ensemble des décisions individuelles inscrivant le nom de chacun des lauréats sur ladite liste, constitue, en principe, une sanction excessive (arrêt Bouillez e.a./Conseil, précité, point 83). En revanche, pour ce qui est des décisions adoptées à la suite d’un concours interne visant à pourvoir un poste déterminé, le juge de l’Union procède à un examen au cas par cas, à l’occasion duquel il prend en considération la nature de l’irrégularité commise ainsi que la balance des intérêts.

118    S’agissant, comme en l’espèce, dans le cadre d’un concours interne visant à pourvoir un poste déterminé, d’un vice de procédure, le juge examine si ledit vice a uniquement affecté l’examen de la candidature du requérant ou s’il a vicié l’examen de l’ensemble des candidatures. Dans le premier cas, le vice de procédure doit être considéré comme n’étant pas de nature à justifier l’annulation de la décision de nomination du candidat retenu. Dans le second, le juge procède à la mise en balance des intérêts en présence, lesquels doivent être appréciés au moment où le recours est formé (voir, en ce sens, arrêt Bouillez e.a./Conseil, précité, point 85).

119    À ce titre, le juge prend en considération, d’abord, l’intérêt du requérant à bénéficier d’une procédure de sélection exempte de vice et, ensuite, l’intérêt du fonctionnaire nommé à l’issue de la procédure de sélection viciée et de ce que celui-ci a pu se fier de bonne foi à la légalité de la décision l’ayant nommé. Enfin, le juge examine l’intérêt du service c’est-à-dire, notamment, le respect de la légalité, les conséquences budgétaires d’une annulation de la décision illégale, les difficultés d’exécution de la chose jugée, les atteintes éventuelles à la continuité du service et les risques de détérioration du climat social au sein de l’institution (voir, par analogie, arrêt Bouillez e.a./Conseil, précité, points 87 à 89).

120    En l’espèce, il y a lieu de constater que la méconnaissance par la Commission des règles de composition du comité de présélection a affecté l’examen de l’ensemble des candidatures au poste litigieux. Il convient donc de procéder à la mise en balance des intérêts en présence.

121    À cet égard, le Tribunal relève, en ce qui concerne l’intérêt du requérant à bénéficier de l’annulation des décisions attaquées, que celui-ci est loin d’être négligeable. En effet, en cas d’annulation des décisions attaquées, la Commission devra reprendre l’examen des candidatures au stade de l’avis du comité de présélection sur la base des élements à sa disposition à la date à laquelle le comité de présélection a été saisi, de sorte qu’il ne saurait être exclu que, contrairement, à ce qui était indiqué dans la note du comité de préselection du 25 juin 2004, le requérant figure parmi les candidats retenus par ledit comité, voire qu’il soit choisi pour occuper le poste litigieux et par suite, promu conformément à l’avis de vacance aux grades A 4 ou A 5. Certes, si le requérant devait être choisi pour occuper le poste litigieux, l’administration ne pourrait le nommer rétroactivement audit poste, dès lors que l’article 3 du statut prévoit expressément qu’un acte de nomination ne peut avoir une date de prise d’effet antérieure à l’entrée effective en fonctions de la personne concernée, mais il n’en demeure pas moins que, dans une telle hypothèse, le requérant retirera un bénéfice de son recours puisque l’administration devra l’indemniser pour le préjudice subi du fait de n’avoir pas été nommé à la date à laquelle il aurait dû être nommé en l’absence du vice constaté.

122    De même, si l’AIPN n’est pas tenue de donner suite à une procédure de sélection, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, celle-ci ne peut en décider ainsi que pour des raisons objectives, suffisantes, et inconnues lorsqu’elle a entamé ladite procédure (voir, en ce sens arrêt du Tribunal du 14 avril 2011, Šimonis/Commission, F‑113/07, point 90). Dans le cas d’espèce, même si de telles raisons devaient être considérées comme réunies, l’intérêt du requérant à bénéficier de l’annulation des décisions attaquées ne saurait être nié, puisque, dans cette hypothèse, l’administration devra l’indemniser pour la perte de la chance d’avoir vu sa candidature correctement examinée par le comité de présélection en juin 2004.

123    S’agissant de l’intérêt du fonctionnaire, M. A, nommé à l’issue de la procédure de sélection viciée, le Tribunal considère que ce dernier ne saurait se prévaloir d’une confiance légitime au maintien de sa nomination et ce, même si huit ans se sont écoulés depuis l’adoption des décisions attaquées, dès lors que celles-ci ont été contestées dans les délais de recours contentieux (arrêt Bouillez e.a./Conseil, précité, point 88). En effet, M. A ne pouvait ignorer dans ces conditions que sa nomination ne serait définitivement acquise que si le recours du requérant n’était pas accueilli.

124    En tout état de cause, il doit être constaté que la décision de nomination de M. A a épuisé ses effets, car, selon les informations fournies par les parties notamment lors de l’audience, celui-ci n’occupe plus le poste litigieux et en raison des dispositions de l’article 3 du statut, l’administration ne pourrait pas, même en cas d’annulation de cette décision, nommer rétroactivement un autre candidat sur le poste.

125    S’agissant, en dernier lieu, de l’intérêt du service, le Tribunal relève que l’annulation des décisions attaquées permettrait de donner au principe de légalité son plein effet et que la Commission n’a pas démontré que l’annulation des décisions attaquées se heurterait à des difficultés particulières.

126    Il résulte de ce qui précède qu’il convient d’annuler les décisions attaquées dès lors que le comité de présélection a été irrégulièrement composé, qu’il ne peut être exclu que ledit comité aurait rendu un avis différent s’il avait été régulièrement composé et que l’intérêt de M. A ne fait pas obstacle à cette annulation.

 Sur les conclusions indemnitaires pour autant que celles-ci concernent le préjudice moral dont le requérant aurait eu à souffrir du fait de l’irrégularité de la composition du comité de présélection

127    Le requérant prétend avoir subi un préjudice du fait de l’irrégularité de la composition du comité de présélection.

128    Cependant, il y a lieu de rappeler que l’annulation d’un acte de l’administration attaqué par un fonctionnaire apparaît, en elle-même, comme une réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que ce fonctionnaire peut avoir subi, à moins que celui‑ci ne démontre avoir subi un préjudice moral détachable de l’irrégularité fondant l’annulation et non susceptible d’être intégralement réparé par cette annulation. Tel est le cas, premièrement, lorsque l’acte annulé comporte une appréciation explicitement négative des capacités du requérant susceptible de le blesser, deuxièmement, lorsque l’irrégularité commise est d’une gravité particulière et, troisièmement, lorsque l’annulation est privée de tout effet utile, ne pouvant ainsi constituer en elle-même la réparation adéquate et suffisante de tout préjudice moral causé par l’acte attaqué (arrêt du Tribunal du 12 mai 2011, AQ/Commission, F‑66/10, points 105, 107 et 109).

129    En l’espèce, il doit être relevé que le préjudice moral dont le requérant se prévaut trouve son origine dans le comportement décisionnel de la Commission. Or, il y a lieu de constater que selon les critères de la jurisprudence rappelée au point précédent, l’annulation des décisions attaquées constitue une réparation adequate de tout préjudice moral que le requérant peut avoir subi, puisque, premièrement, lesdites décisions ne comportaient aucune appréciation explicitement négative de ses capacités susceptible de le blesser, deuxièmement, même si celui-ci a pu ressentir un sentiment de frustration et d’injustice en raison de l’irrégularité commise, cette irrégularité n’est pas d’une gravité telle qu’elle justifierait une réparation autonome et, troisièmement, l’annulation des décisions attaquées ne sera pas privée de tout effet utile puisqu’il n’est pas entièrement exclu que le requérant puisse être nommé au poste litigieux.

130    Il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires, pour autant que celles-ci concernent le préjudice moral dont le requérant aurait eu à souffrir du fait de l’irrégularité de la composition du comité de préselection, doivent être rejetées comme non fondées.

 Sur les dépens

131    Les points 5 et 6 du dispositif de l’arrêt Strack/Commission, qui avait condamné le requérant à supporter la moitié de ses dépens et la Commission à supporter ses propres dépens et la moitié de ceux du requérant ont été annulés par le Tribunal de l’Union européenne (voir arrêt de renvoi, point 127). Dans son arrêt de renvoi, le Tribunal de l’Union européenne a réservé les dépens. Il appartient donc au Tribunal de statuer dans le présent arrêt sur les dépens afférents aux différentes étapes de la procédure.

132    Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

133    Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que la Commission est la partie qui succombe en l’essentiel. En outre, le requérant a, dans ses conclusions, expressément demandé que la Commission soit condamnée aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la Commission doit supporter ses propres dépens dans les affaires Strack/Commission, F‑44/05, Commission/Strack, T‑526/08 P, et Strack/Commission F‑44/05 RENV et est condamnée à supporter les dépens exposés par le requérant dans ces mêmes affaires.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La demande de levée d’immunité dont bénéficient les agents de la Commission des Communautés européennes dans l’affaire F‑44/05, Strack/Commission, est rejetée comme irrecevable.

2)      La demande d’indemnisation pour durée excessive de la procédure administrative visant à pourvoir le poste et pour durée excessive de la procédure précontentieuse est rejetée comme non fondée.

3)      La décision de nomination de M. A et la décision de la Commission des Communautés européennes, du 19 novembre 2004, rejetant la candidature de M. Strack au poste de chef de l’unité « Appels d’offres et contrat » de l’Office des publications officielles des Communautés européennes sont annulées.

4)      Le recours est rejeté pour le surplus.

5)      La Commission européenne supporte ses propres dépens dans les affaires Strack/Commission, F‑44/05, Commission/Strack, T‑526/08 P, et Strack/Commission, F‑44/05 RENV et est condamnée à supporter les dépens exposés par M. Strack dans ces mêmes affaires.

Rofes i Pujol

Boruta

Bradley

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 octobre 2012.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       M. I. Rofes i Pujol


* Langue de procédure : l’allemand.