Language of document : ECLI:EU:F:2008:123

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

25 septembre 2008 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Recrutement – Avis de vacance – Rejet de candidature – Recours en annulation et en indemnité – Recevabilité – Intérêt à agir – Retraite – Comité de présélection – Composition – Application dans le temps de nouvelles dispositions – Indépendance – Impartialité – Communication d’une décision »

Dans l’affaire F‑44/05,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Guido Strack, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Cologne (Allemagne), initialement représenté par Me J. Mosar, avocat, puis par Me M. Wehrheim, avocat, puis par Me F. Gengler, avocat, et enfin par Me P. Goergen, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. G. Berscheid et H. Kraemer, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch, président, Mme I. Boruta et M. H. Kanninen (rapporteur), juges,

greffier : M. S. Boni, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 juillet 2007,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal de première instance des Communautés européennes le 17 juin 2005, M. Strack demande, en substance, l’annulation de la décision de l’Office des publications officielles des Communautés européennes portant rejet de sa candidature au poste de chef de l’unité « Appels d’offres et contrats » (A 5/A 4) dudit Office (ci-après le « poste litigieux ») et de la décision de nommer M. A au poste litigieux, ainsi que la condamnation de la Commission des Communautés européennes au paiement d’une indemnité en réparation du préjudice moral prétendument subi.

 Cadre juridique

 Dispositions régissant la procédure de pourvoi des vacances d’emploi

2        Aux termes de l’article 29, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes dans sa rédaction en vigueur jusqu’au 1er mai 2004 (ci-après l’« ancien statut »), date d’entrée en vigueur du règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO L 124, p. 1) :

« En vue de pourvoir aux vacances d’emploi dans une institution, l’autorité investie du pouvoir de nomination, après avoir examiné :

a)      les possibilités de promotion et de mutation au sein de l’institution ;

[…]

c)      les demandes de transfert de fonctionnaires d’autres institutions des trois Communautés européennes

ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves. La procédure de concours est déterminée à l’annexe III.

[…] »

3        Les dispositions de l’article 29, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes dans sa rédaction en vigueur au 1er mai 2004 (ci-après le « nouveau statut » ou le « statut »), sont ainsi libellées :

« En vue de pourvoir aux vacances d’emploi dans une institution, l’autorité investie du pouvoir de nomination, après avoir examiné :

a)      les possibilités de pourvoir l’emploi par voie de :

i)      mutation ou

ii)      nomination conformément à l’article 45 bis ou

iii)      promotion

au sein de l’institution ;

b)      les demandes de transfert de fonctionnaires du même grade d’autres institutions et/ou les possibilités d’organiser un concours interne à l’institution ouvert uniquement aux fonctionnaires et aux agents temporaires visés à l’article 2 du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes ;

ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves. La procédure de concours est déterminée à l’annexe III.

Cette procédure peut être ouverte également en vue de constituer une réserve de recrutement. »

4        Dans une communication en date du 22 décembre 2000 [Sec (2000)2305/5], intitulée « Évaluation, sélection et nomination du personnel d’encadrement supérieur de la Commission » (ci-après la « communication du 22 décembre 2000 »), le secrétariat général de la Commission a formulé des propositions de modifications dans la composition, le mandat et la procédure des comités de consultation.

5        L’article 2, paragraphe 3, de la décision de la Commission portant sur le personnel d’encadrement intermédiaire, datée du 28 avril 2004 et publiée aux Informations administratives n° 73–2004 du 23 juin 2004, (ci-après la « décision du 28 avril 2004 ») prévoit que, « [e]n vue de pourvoir un emploi en vertu de l’article 29 du [nouveau statut], et sauf cas spécifiques précisés dans les modalités d’application visées à l’article 16, paragraphe 2, le directeur général concerné nomme un comité de présélection, composé d’au moins trois membres de grade et fonction d’encadrement égaux ou supérieurs au niveau de l’emploi à pourvoir, dont un d’une autre direction générale ».

6        À l’article 16 de la décision du 28 avril 2004, il est énoncé que ladite décision abroge et remplace, notamment, la communication du 22 décembre 2000 quant aux dispositions relatives à l’encadrement intermédiaire. Selon l’article 17 de la décision du 28 avril 2004, celle-ci est entrée en vigueur le 1er mai 2004.

7        L’Office des publications est doté d’un manuel relatif à la procédure de recrutement des chefs d’unité (A 4/A 5). Ce manuel détaille le déroulement de la procédure comme suit :

« 1. Préparation de l’avis de vacance d’emploi.

2. Publication dans toutes les institutions de l’avis de vacance adopté par le [d]irecteur de l’Office des publications. L’avis devra présenter une description précise du profil du poste à pourvoir et des tâches à accomplir. Les candidatures sont envoyées directement à l’Office des publications.

3. Nomination d’un rapporteur par la [d]irection générale ‘Personnel et [a]dministration’ […] de la Commission.

4. Le [d]irecteur de l’Office [des publications] nomme [trois] chefs d’unité pour constituer un panel de présélection.

5. Le panel de présélection :

a)      examine les candidatures (éligibilité statutaire),

b)      s’entretient avec les candidats et les évalue sur base d’une grille de critères d’évaluation prédéfinis et

c)      établit un rapport détaillé et motivé (qualités, faiblesses et lacunes de chaque candidat) et une ‘short-list’, par ordre alphabétique, qui [sont] transmis au [d]irecteur de l’Office [des publications] et au rapporteur.

6. Dans un délai de [cinq] jours ouvrables après la réception du rapport du panel de présélection, le rapporteur fait parvenir au [d]irecteur de l’Office [des publications] son avis sur le rapport.

(Le cas échéant, à la lumière de l’avis du rapporteur, le [d]irecteur de l’Office [des publications] peut relancer la procédure à partir de l’étape 5.)

7. Le [d]irecteur de l’Office [des publications] s’entretient avec les candidats repris dans la ‘short-list’ ainsi qu’avec tout autre candidat qu’il souhaiterait interviewer. Il peut se faire assister par des chefs d’unité ou des directeurs désignés par lui. Le rapporteur participe à ces entretiens.

8. Suite à ces entretiens un procès[-]verbal est établi et transmis à la [direction générale ‘Personnel et administration’] et au rapporteur.

9. La [direction générale ‘Personnel et administration’] saisit le [c]omité consultatif des nominations (CCN) par voie de procédure écrite et communique l’avis émis par le CCN au [d]irecteur de l’Office [des publications].

10. Le [d]irecteur de l’Office [des publications] prend sa décision sur base du rapport du panel de présélection, de l’avis du rapporteur, du procès[-]verbal établi par le [d]irecteur de l’Office [des publications] à la suite des entretiens (cf. point 6) et de l’avis du CCN.

11. La [direction générale ‘Personnel et administration’] prépare l’acte de nomination.

12. L’acte de nomination est signé par le [d]irecteur de l’Office [des publications] en tant qu’[autorité investie du pouvoir de nomination]. »

8        Aux termes de l’article 11 bis du nouveau statut :

« 1. Dans l’exercice de ses fonctions, le fonctionnaire ne traite aucune affaire dans laquelle il a, directement ou indirectement, un intérêt personnel, notamment familial ou financier, de nature à compromettre son indépendance, sous réserve du paragraphe 2.

2. Le fonctionnaire auquel échoit, dans l’exercice de ses fonctions, le traitement d’une affaire telle que visée au paragraphe 1 en avise immédiatement l’autorité investie du pouvoir de nomination. Celle-ci prend les mesures qui s’imposent et peut notamment décharger le fonctionnaire de ses responsabilités dans cette affaire.

[…] »

9        Selon l’article 22 bis du nouveau statut :

« 1. Le fonctionnaire qui, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, a connaissance de faits qui peuvent laisser présumer une activité illégale éventuelle, notamment une fraude ou une corruption, préjudiciable aux intérêts des Communautés, ou une conduite en rapport avec l’exercice de ses fonctions pouvant constituer un grave manquement aux obligations des fonctionnaires des Communautés, en informe immédiatement son supérieur hiérarchique direct ou son directeur général ou encore, s’il le juge utile, le secrétaire général, ou toute personne de rang équivalent, ou directement l’Office européen de lutte antifraude.

[…]

2. Le fonctionnaire recevant l’information visée au paragraphe 1 communique immédiatement à l’Office européen de lutte antifraude tout élément de preuve dont il a connaissance, pouvant laisser présumer l’existence des irrégularités visées au paragraphe 1.

3. Le fonctionnaire qui a communiqué l’information visée aux paragraphes 1 et 2 ne subit aucun préjudice de la part de l’institution, pour autant qu’il ait agit de bonne foi.

[…] »

 Dispositions régissant la mise à la retraite et l’octroi d’une allocation pour cause d’invalidité

10      L’article 53 du nouveau statut dispose que « [l]e fonctionnaire reconnu par la commission d’invalidité comme remplissant les conditions prévues à l’article 78 est mis d’office à la retraite le dernier jour du mois au cours duquel est prise la décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination constatant l’incapacité définitive pour le fonctionnaire d’exercer ses fonctions ».

11      L’article 78 du nouveau statut est ainsi libellé :

« Dans les conditions prévues aux articles 13 à 16 de l’annexe VIII, le fonctionnaire a droit à une allocation d’invalidité lorsqu’il est atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale et le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de son groupe de fonctions.

L’article 52 s’applique par analogie aux bénéficiaires d’une allocation d’invalidité. Si le bénéficiaire d’une allocation d’invalidité prend sa retraite avant l’âge de 65 ans sans avoir atteint le taux maximal de droits à pension, les règles générales de la pension d’ancienneté sont appliquées. La pension d’ancienneté est liquidée sur la base du traitement afférent au classement, en grade et en échelon, que le fonctionnaire détenait au moment où il a été mis en invalidité.

Le taux de l’allocation d’invalidité est fixé à 70 % du dernier traitement de base du fonctionnaire. […]

[…]

Lorsque l’invalidité résulte d’un accident survenu dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice des fonctions, d’une maladie professionnelle ou d’un acte de dévouement accompli dans un intérêt public ou du fait d’avoir exposé ses jours pour sauver une vie humaine, l’allocation d’invalidité ne peut être inférieure à 120 % du minimum vital. Dans ce cas, l’institution ou l’organisme visés à l’article [1er] bis prend à sa charge la totalité de la contribution au régime de pensions. »

12      Selon l’article 14, premier et deuxième alinéas, de l’annexe VIII du nouveau statut :

« Le droit à l’allocation d’invalidité naît à compter du premier jour du mois civil suivant la mise à la retraite en application de l’article 53 du statut.

Lorsque l’ancien fonctionnaire cesse de remplir les conditions requises pour bénéficier de cette allocation, il est obligatoirement réintégré, à la première vacance, dans un emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à sa carrière, à condition qu’il possède les aptitudes requises pour cet emploi. S’il refuse l’emploi qui lui est offert, il conserve ses droits à réintégration, à la même condition, lors de la deuxième vacance dans un emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à sa carrière ; en cas de second refus, il peut être démis d’office. »

13      L’article 15 de l’annexe VIII du nouveau statut énonce que « [t]ant que l’ancien fonctionnaire bénéficiant d’une allocation d’invalidité n’a pas atteint l’âge de 63 ans, l’institution peut le faire examiner périodiquement en vue de s’assurer qu’il réunit toujours les conditions requises pour bénéficier de cette allocation ».

 Faits relatifs au litige

14      Le requérant est entré au service de la Commission le 1er septembre 1995. Du 1er septembre 1995 au 31 mars 2002, le requérant a exercé ses fonctions au sein de l’Office des publications. Le 1er janvier 2001, il a été promu au grade A 6. Du 1er avril 2002 au 15 février 2003, il a travaillé à l’unité C 4 de la direction générale (DG) « Entreprises » de la Commission, avant d’être affecté à Eurostat à partir du 16 février 2003.

15      Le 25 mars 2004, l’Office des publications a publié l’avis de vacance COM/A/057/04 en vue de pourvoir l’emploi de chef de l’unité « Appels d’offres et contrats » (A 5/A 4) audit Office (ci-après l’« avis de vacance »).

16      Le titre II de l’avis de vacance, intitulé « Qualifications requises », était ainsi libellé :

« Formation universitaire complète sanctionnée par un diplôme, de préférence en économie, en droit ou en affaires, ou expérience professionnelle équivalente.

Connaissance approfondie du [r]èglement financier et de ses modalités d’exécution, ainsi que des règlements applicables en matière de marchés publics et/ou de contrats.

Formation spécifique dans le domaine du management.

Une très bonne aptitude et une expérience prouvée dans la gestion et l’encadrement de personnel.

Esprit rigoureux et capacité à travailler de manière autonome.

Culture de service.

Bonne capacité de communication orale et écrite.

Une connaissance satisfaisante de la langue anglaise est essentielle.

La connaissance des métiers de l’édition n’est pas indispensable, mais sera appréciée. »

17      Le titre III de l’avis de vacance, intitulé « Candidatures », énonçait :

« Les candidatures seront examinées conformément aux dispositions de l’article 29, [paragraphe 1, sous a) et c)], [de l’ancien statut].

Les fonctionnaires des [i]nstitutions des Communautés européennes des grades A 4, A 5, ou A 6 promouvables, qui estiment posséder les qualifications requises, pourront postuler sur cet emploi.

[…] »

18      Aux termes du titre IV de l’avis de vacance, intitulé « Procédure de sélection », il était prévu que « [l]es candidatures seront examinées par un panel de sélection qui – sur la base des critères énumérés ci-dessus – établira une ‘short-list’ des candidats qui seront convoqués pour un entretien ».

19      Le 31 mars 2004, Mme B a été nommée rapporteur pour la procédure de pourvoi du poste litigieux.

20      Par courrier électronique en date du 15 avril 2004, le requérant s’est porté candidat au poste litigieux.

21      Par note du 7 juin 2004, le requérant a été invité à un entretien qui s’est déroulé le 21 juin suivant avec les membres d’un comité de présélection.

22      Le comité de présélection a rempli, pour chaque candidat, une grille où sont énoncés les critères d’évaluation. Une note du comité de présélection en date du 25 juin 2004 précise notamment que, bien que tous les candidats aient été statutairement éligibles, seuls sept d’entre eux ont participé à des entretiens avec le comité. Deux candidats ont renoncé à l’entretien et un autre ne s’est pas présenté devant le comité de présélection.

23      La note du 25 juin 2004 indique également que le comité de présélection était composé de M. C, directeur à l’Office des publications et de MM. D et E, tous deux chefs d’unité et que la coordination administrative était assurée par M. E.

24      Enfin, la note du 25 juin 2004 cite, dans l’ordre alphabétique, les noms figurant sur la liste restreinte (« short-list ») : M. A, M. F, M. G et M. H. Trois de ces candidats étaient alors de grade A 5 et un candidat de grade A 4.

25      Par courrier électronique du 5 juillet 2004, le requérant s’est renseigné auprès de M. E sur l’état d’avancement de la procédure de sélection. Par courrier électronique du 6 juillet 2004, M. E lui a indiqué qu’aucune information ne pouvait être communiquée tant que la procédure de sélection n’était pas terminée.

26      Le 13 juillet 2004, les quatre candidats sélectionnés ont été interviewés par le directeur général de l’Office des publications, en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »), lui-même assisté de Mme B. Il ressort de la réponse à la réclamation que, au terme de ces entretiens, le directeur général de l’Office des publications a choisi M. A ce même 13 juillet 2004.

27      Dans le rapport daté du 15 juillet 2004, signé par le directeur général de l’Office des publications et Mme B, intitulé « Rapport de l’AIPN suite aux entretiens avec les candidats retenus par le comité de présélection », il est indiqué que M. A « est le candidat qui présente le plus de garanties pour le bon fonctionnement de l’unité ».

28      Par courrier électronique en date du 7 septembre 2004, le requérant a interrogé M. E sur l’avancement de la procédure de sélection. Ce courrier électronique est resté sans réponse. Le requérant prétend avoir une dernière fois renouvelé sa demande par courrier électronique en date du 18 novembre 2004. Cette demande n’a pas fait l’objet de réponse de la part de l’administration.

29      Puis, le 22 novembre 2004, le requérant a contacté M. E par téléphone. Ce dernier lui a fait savoir que la procédure de sélection était achevée depuis un certain temps mais que l’administration avait omis d’en informer les candidats qui n’avaient pas été retenus.

30      Enfin, par note en date du 19 novembre 2004, réceptionnée par le requérant le 24 novembre 2004, M. E a, au nom de l’Office des publications, informé le requérant que sa candidature n’avait pas été retenue.

31      Le 26 novembre 2004, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, par laquelle il a demandé, d’une part, l’annulation de la décision de l’AIPN portant nomination de M. A au poste litigieux, ainsi que l’annulation de la décision de rejet de sa candidature audit poste. D’autre part, il a demandé le versement de dommages-intérêts à hauteur du préjudice subi du fait de l’irrégularité de la nomination de M. A ainsi que du retard dans la communication de la décision de rejet de sa candidature.

32      Le 14 mars 2005, la commission d’invalidité, prévue par l’article 53 du nouveau statut, a constaté que le requérant était atteint d’une invalidité permanente totale le mettant dans l’impossibilité d’exercer des fonctions correspondant à un emploi de sa carrière et que, pour ce motif, il était tenu de suspendre son service à la Commission. La commission d’invalidité a déclaré que l’invalidité du requérant ne résultait pas d’un accident survenu dans l’exercice de ses fonctions ou d’un acte de dévouement accompli dans l’intérêt public ou du fait d’avoir exposé ses jours pour sauver des vies humaines. La commission d’invalidité a précisé que la relation éventuelle entre l’invalidité et l’occupation professionnelle antérieure du requérant devait faire l’objet d’une discussion ultérieure en son sein, dès que les éléments pertinents seraient disponibles.

33      Par décision du 18 mars 2005, l’AIPN a rejeté la réclamation du requérant. Cette décision a été adressée au requérant par courrier posté le 22 mars 2005 et portée à sa connaissance le 23 avril 2005.

34      Par décision de l’AIPN, en date du 31 mars 2005 et prenant effet le même jour, le requérant a été mis à la retraite et admis au bénéfice d’une allocation d’invalidité fixée conformément aux dispositions de l’article 78, troisième alinéa, du nouveau statut.

35      Le 26 octobre 2005, le requérant a été convoqué à un examen médical, au titre de l’article 73 du nouveau statut, examen fixé au 14 décembre 2005.

36      Par lettre du 8 novembre 2006, la Commission a informé le requérant qu’elle reconnaissait que, à la suite de l’examen médical auquel celui-ci s’était soumis, son état antérieur s’était aggravé et qu’en conséquence les frais de traitements médicaux en rapport direct avec l’aggravation de son état antérieur lui seraient remboursés jusqu’à la consolidation dudit état, conformément à l’article 73 du nouveau statut. Il était également précisé que, en vertu de l’article 19 de la réglementation commune relative à la couverture des risques d’accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes, le requérant devait tenir l’administration informée de l’évolution de son état de santé. Partant, il était demandé au requérant de faire remplir un formulaire d’attestation médicale par son médecin traitant. À cet égard, il était précisé que, dans l’hypothèse où l’administration ne recevrait pas ce formulaire rempli au plus tard le 8 mai 2007, le requérant serait considéré comme guéri.

37      Le 28 mars 2007, la Commission a rappelé au requérant que, selon l’article 15 de l’annexe VIII du nouveau statut, l’institution peut faire examiner périodiquement les anciens fonctionnaires bénéficiant d’une pension d’invalidité et qui n’ont pas atteint l’âge de 60 ans. Dès lors, la Commission a demandé au requérant de bien vouloir lui faire parvenir un certificat médical lui indiquant son état actuel de santé et « statuant » sur la nécessité ou non de son maintien en position d’invalidité.

 Procédure et conclusions des parties

38      Le présent recours a initialement été enregistré au greffe du Tribunal de première instance sous la référence T‑225/05.

39      Le 3 octobre 2005, la Commission avait, conformément à l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal de première instance, formulé une demande d’exception d’irrecevabilité par acte séparé.

40      Le 15 novembre 2005, le requérant a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité.

41      Le 8 décembre 2005, en application de l’article 114, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, ce dernier a rendu une ordonnance portant jonction au fond de l’exception d’irrecevabilité.

42      Par ordonnance du 15 décembre 2005, le Tribunal de première instance, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), a renvoyé la présente affaire devant le Tribunal. Le recours a été enregistré au greffe de ce dernier sous la référence F‑44/05.

43      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        donner acte du recours introduit conformément à l’article 91 du nouveau statut ;

–        déclarer le recours recevable et bien fondé ;

–        annuler la décision de l’AIPN, datée du 22 mars 2005, rejetant sa réclamation ;

–        annuler la décision de la Commission, datée du 19 novembre 2004, rejetant sa candidature ;

–        annuler la procédure de sélection COM/A/057/04 ;

–        condamner la Commission à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral subi du fait de l’illégalité de la procédure de sélection et de la tardiveté de la décision de rejet de sa candidature ;

–        condamner la Commission aux dépens.

44      La Commission conclut à ce qu’il plaise au tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable et, à titre subsidiaire, non fondé ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

45      À l’audience, le requérant a déposé, avec l’accord de la Commission, une copie de la lettre du 8 novembre 2006, citée au point 36 du présent arrêt.

46      Toujours à l’audience, à la demande du Tribunal, présentée dans le rapport préparatoire d’audience, la Commission a communiqué au Tribunal des documents concernant la composition du comité de présélection.

47      À la demande du Tribunal, présentée à l’audience, la Commission a signalé par écrit, le 16 juillet 2007, sa position sur l’applicabilité de la décision du 28 avril 2004 à l’Office des publications.

48      Le 10 septembre 2007, par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 11 septembre suivant), le requérant a déposé ses observations sur ladite position de la Commission. Il a, de plus, demandé au Tribunal de transmettre une copie des pièces du dossier aux autorités de poursuite pénale compétentes et de porter plainte en conséquence. En outre, le requérant a demandé que le Tribunal tienne compte, dans le cadre de sa décision sur la demande en indemnité, des déclarations de la Commission concernant la date du début des travaux du comité de présélection, compte tenu de l’inexactitude de ces déclarations. À cet égard, le requérant a demandé que le Tribunal fasse usage de sa compétence de pleine juridiction en condamnant la Commission au paiement d’une indemnité appropriée en réparation du préjudice moral occasionné par l’illégalité dont celle-ci serait responsable.

49      Le Tribunal ne saurait accéder à la demande du requérant de transmettre une copie des pièces du dossier aux autorités de poursuite pénale compétentes et de porter plainte en conséquence, une telle demande n’entrant pas dans la compétence du Tribunal.

50      Le 22 novembre 2007, le président de la deuxième chambre du Tribunal a clôturé la procédure orale et mis l’affaire en délibéré.

 Sur l’objet du recours en annulation

51      Dans ses chefs de conclusions, tels que formulés dans la requête, le requérant demande, outre l’annulation de la décision du 19 novembre 2004, portant rejet de sa candidature au poste litigieux, l’annulation de la procédure de sélection ainsi que de la décision de l’AIPN rejetant sa réclamation.

52      À cet égard, il convient de rappeler que les conclusions en annulation formellement dirigées contre le rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée et sont, comme telles, dépourvues de contenu autonome (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. 23, point 8 ; arrêts du Tribunal de première instance du 10 décembre 1992, Williams/Cour des comptes, T‑33/91, Rec. p. II‑2499, point 23, et du 6 avril 2006, Camós Grau/Commission, T‑309/03, Rec. p. II‑1173, point 43 ; arrêt du Tribunal du 19 septembre 2007, Talvela/Commission, F‑43/06, non encore publié au Recueil, point 36).

53      Il ressort de la réclamation, datée du 26 novembre 2004, que le requérant a demandé l’annulation tant de la décision de nommer M. A au poste litigieux que de la décision subséquente de rejet de sa candidature audit poste.

54      Il convient donc de comprendre les chefs de conclusions du requérant comme ayant pour objet l’annulation, d’une part, de la décision de nomination de M. A et, d’autre part, de la décision de rejet de sa candidature (ci-après les « décisions attaquées »).

 Sur la recevabilité du recours

 Arguments des parties

55      Dans son mémoire en défense, la Commission soutient qu’il y a lieu de rejeter le recours comme irrecevable en ce qui concerne tant les demandes en annulation que la demande en indemnité.

56      La Commission, qui renvoie aux considérations exposées dans l’exception d’irrecevabilité présentée par acte séparé, soutient en substance que le requérant a été mis à la retraite le 31 mars 2005, à la suite des conclusions de la commission d’invalidité datées du 14 mars 2005 constatant que le requérant était atteint d’une invalidité permanente considérée comme totale, soit antérieurement à l’introduction du présent recours.

57      La Commission soutient en outre qu’il n’est pas exact que la convocation du requérant à un examen médical le 14 décembre 2005 ait eu pour finalité d’établir non seulement l’éventuelle origine professionnelle de son invalidité, mais aussi, implicitement, la persistance de ladite invalidité. D’ailleurs, la Commission souligne que la convocation à l’examen médical est fondée sur l’article 73 du nouveau statut qui régit la protection des fonctionnaires en cas d’accident ou de maladie et non sur l’article 53 du nouveau statut qui concerne la mise à la retraite au titre de l’invalidité reconnue par la commission d’invalidité. Selon la Commission, la question de l’éventuelle origine professionnelle de l’invalidité a été expressément réservée par la commission d’invalidité qui a décidé d’en différer l’examen dans l’attente des documents pertinents.

58      La Commission prétend que, s’il y avait eu des doutes quant à l’invalidité du requérant, celui-ci aurait été convoqué à l’examen médical sur la base de l’article 53 du nouveau statut.

59      La Commission ajoute que, quels que soient les résultats de l’examen médical du 14 décembre 2005, la décision de la Commission de mettre le requérant à la retraite demeure valable aussi longtemps qu’elle n’a pas été annulée. Or, le requérant était à la retraite lorsqu’il a introduit son recours. En outre, l’hypothèse selon laquelle le requérant pourrait être à nouveau convoqué devant la commission d’invalidité pour l’appréciation de son aptitude au travail serait purement conjecturale.

60      En tout état de cause, il conviendrait de faire la balance entre les intérêts d’une bonne administration et les intérêts personnels du requérant. À cet égard, la Commission fait valoir que l’AIPN a évidemment intérêt à ce que le poste litigieux soit pourvu par un fonctionnaire en activité. Or, en cas d’invalidité permanente, ledit poste ne saurait être pourvu par son titulaire mais par un fonctionnaire qui le remplacerait de fait en permanence. La situation serait naturellement différente en cas de maladie temporaire, mais tel ne serait pas le cas en l’espèce.

61      Quant aux griefs pris de ce que la décision de rejet de la réclamation ferait mention d’affirmations mensongères, la Commission soutient qu’ils sont entièrement nouveaux et donc irrecevables. En effet, selon la Commission, nul ne peut s’affranchir des voies de recours prescrites. Ainsi, le requérant devrait saisir l’AIPN d’une demande et, en tout état de cause, introduire une réclamation puis un recours.

62      À l’audience, la Commission a précisé, premièrement, que l’intérêt à agir du requérant devait s’apprécier au moment de l’introduction de la requête. Deuxièmement, au sujet du caractère définitif de l’invalidité, la Commission a fait mention de l’arrêt du Tribunal de première instance du 7 février 2007 (Gordon/Commission, T‑175/04, non encore publié au Recueil, points 29 et suivants, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant la Cour, affaire C‑198/07 P) et, en particulier de son point 32, aux termes duquel « la mise à la retraite du requérant en vertu de l’article 78 du [nouveau statut] affecte son intérêt à obtenir l’annulation du [rapport d’évolution de carrière] contesté dès lors que sa carrière au sein de son institution a été interrompue, en principe, de manière définitive ». Troisièmement, la Commission a soutenu l’autonomie des demandes en annulation et en indemnité. Selon la Commission, la demande en indemnité peut être recevable même si la demande en annulation est irrecevable du fait d’un défaut d’intérêt à agir. Dès lors, la Commission a prétendu qu’il fallait considérer la demande en annulation du requérant comme irrecevable, sans rejeter comme irrecevable la demande en indemnité au motif que le requérant a été mis à la retraite. En revanche, la Commission souligne que la demande en indemnité pourrait être déclarée irrecevable en raison, en particulier, de son défaut de précision. Selon la Commission, le préjudice, évalué par le requérant à 5 000 euros, ne serait pas suffisamment établi.

63      Dans sa réplique, le requérant soutient que le recours est recevable. Il relève, premièrement, que, en vertu des articles 13 et 14 de l’annexe VIII du nouveau statut, en cas de constatation d’une guérison de l’intéressé, sa mise à la retraite cesse immédiatement. Le requérant serait même tenu d’informer sans délai l’AIPN de la guérison. En outre, le président de la commission d’invalidité aurait encore confirmé au requérant, le 10 février 2006, que la persistance de son invalidité serait régulièrement vérifiée tous les deux ans, donc au plus tard au printemps 2007. Or, au lieu de contribuer à la guérison du requérant, la Commission aurait seulement cherché à déterminer s’il était apte, compte tenu de son incapacité permanente de travail, à occuper le poste litigieux.

64      Deuxièmement, le requérant soutient qu’une demande en indemnité est recevable même en l’absence de procédure précontentieuse préalable indépendante, lorsque le dommage a été directement causé par un acte contre lequel est exercé un recours en annulation. Le requérant relève en outre que son préjudice a été causé, en partie, par la décision rejetant sa candidature, du fait qu’elle a été adoptée tardivement, et, en partie, par la décision rejetant sa réclamation, eu égard aux propos diffamatoires qu’elle contiendrait. Le requérant aurait fait valoir le premier préjudice dans sa réclamation, mais il n’aurait pu faire valoir son second préjudice que dans la requête.

65      À l’audience, le requérant a soutenu que sa mise en invalidité ne changeait rien à sa situation, puisque la commission d’invalidité pourrait revenir sur sa décision de le mettre en invalidité. Seul le caractère définitif de la mise en invalidité devrait être considéré comme décisif. D’ailleurs, par courrier du 28 mars 2007, la Commission aurait demandé au requérant de faire vérifier son état de santé en vue, éventuellement, de le réintégrer. Par ailleurs, par une lettre de la Commission du 8 novembre 2006, le requérant aurait été informé de ce qu’il serait considéré comme guéri s’il ne faisait pas remplir un formulaire d’attestation médicale, au plus tard le 8 mai 2007, en vue d’informer l’administration sur l’évolution de son état de santé.

 Appréciation du Tribunal

 Sur la recevabilité de la demande en annulation

66      Selon une jurisprudence constante, pour qu’un fonctionnaire ou un ancien fonctionnaire puisse valablement introduire un recours en vertu des articles 90 et 91 du statut, il doit justifier d’un intérêt personnel à l’annulation de l’acte attaqué (en ce sens, arrêt de la Cour du 29 octobre 1975, Marenco e.a./Commission, 81/74 à 88/74, Rec. p. 1247, point 6 ; ordonnance du Tribunal de première instance du 28 juin 2005, Ross/Commission, T‑147/04, RecFP p. I‑A‑171 et II‑771, point 24 ; ordonnances du Tribunal du 15 mai 2006, Schmit/Commission, F‑3/05, RecFP p. I‑A‑1‑9 et II‑A‑1‑33, point 40, et du 13 juillet 2006, E/Commission, F‑5/06, RecFP p. II–A–1–337, point 38). L’appréciation de l’intérêt à agir doit s’effectuer non dans l’abstrait, mais au regard de la situation personnelle de la partie requérante (arrêt de la Cour du 12 décembre 1967, Bauer/Commission, 15/67, Rec. p. 511, 519 ; ordonnance Schmit/Commission, précitée, point 40). C’est au moment de l’introduction du recours que l’intérêt à agir doit s’apprécier (voir, notamment, ordonnance du Tribunal de première instance du 30 novembre 1998, N/Commission, T‑97/94, RecFP p. I‑A‑621 et II‑1879, point 23 ; arrêt du Tribunal de première instance du 31 mai 2005, Dionyssopoulou/Conseil, T‑105/03, RecFP p. I‑A‑137 et II‑621, point 16 ; ordonnance E/Commission, précitée, point 38).

67      En l’espèce, il est constant que, d’une part, le requérant a été mis à la retraite et admis au bénéfice d’une allocation d’invalidité à compter du 31 mars 2005 et que, d’autre part, le présent recours a été introduit le 17 juin 2005.

68      Il s’ensuit que, à la date d’introduction du recours, le requérant n’avait plus vocation à travailler au sein de la Commission et ne pouvait plus prétendre à occuper le poste litigieux.

69      Le requérant soutient toutefois que sa mise en invalidité n’est pas définitive et que, dès lors, il a un intérêt à demander l’annulation des décisions attaquées.

70      À cet égard, il convient de relever que, même si l’article 14 de l’annexe VIII du nouveau statut prévoit la possibilité d’une réintégration du fonctionnaire admis au bénéfice d’une pension d’invalidité, l’invalidité permanente considérée comme totale a été conçue par le législateur comme ayant vocation à mettre fin à la carrière du fonctionnaire concerné. Ainsi, l’article 53 du nouveau statut prévoit que « [l]e fonctionnaire reconnu par la commission d’invalidité comme remplissant les conditions prévues à l’article 78 est mis d’office à la retraite le dernier jour du mois au cours duquel est prise la décision de l’[AIPN] constatant l’incapacité définitive pour le fonctionnaire d’exercer ses fonctions ». Pour sa part, l’article 47 du nouveau statut classe toute mise à la retraite, y compris celle qui découle d’une invalidité permanente considérée comme totale, parmi les causes de cessation définitive des fonctions. Ladite invalidité est ainsi considérée par le législateur, pour ce qui est du caractère définitif ou non de la cessation de fonctions qu’elle comporte, de la même manière que d’autres causes de cessation de fonctions dont le caractère définitif ne fait pas de doute, telles que la démission, le licenciement pour insuffisance professionnelle ou la révocation (voir, en ce sens, arrêt Gordon/Commission, précité, point 30).

71      Il en résulte que, dans le système du statut, la mise à la retraite pour cause d’invalidité permanente considérée comme totale au sens des articles 53 et 78 du nouveau statut est entendue comme mettant fin, en principe, à la carrière du fonctionnaire. Elle se distingue ainsi du congé de maladie, prévu à l’article 59 du nouveau statut, qui lui n’affecte pas la continuité de la carrière du fonctionnaire se trouvant dans l’impossibilité temporaire d’exercer ses fonctions (arrêt Gordon/Commission, précité, point 31).

72      L’argument du requérant pris de son éventuelle réintégration dans les services de la Commission ne saurait davantage être retenu. Il convient de rappeler, en effet, qu’un requérant doit justifier d’un intérêt né et actuel à l’annulation de l’acte attaqué et que, si l’intérêt dont il se prévaut concerne une situation juridique future, il doit établir que l’atteinte à cette situation se révèle, d’ores et déjà, certaine (arrêt Gordon/Commission, précité, point 33). Tel n’est pas le cas en l’espèce, la réintégration du requérant dans les services de la Commission n’étant qu’un évènement éventuel dont la réalisation future est incertaine.

73      À cet égard, force est de constater que ni la lettre du 8 novembre 2006, ni le courrier du 28 mars 2007, envoyés par la Commission au requérant et dont celui-ci s’est prévalu à l’audience, ne sont de nature à établir que sa réintégration dans les services de la Commission est certaine, ni même envisagée. Dans la lettre du 8 novembre 2006, il est notamment fait état de l’aggravation de l’état de santé du requérant et de l’obligation faite à celui-ci de tenir l’administration informée de l’évolution de son état de santé. Quant au courrier du 28 mars 2007, il invite simplement le requérant à faire parvenir à l’administration un certificat médical indiquant son état de santé et « statuant » sur la nécessité ou non de son maintien en position d’invalidité. Rien dans ces documents n’indique qu’une amélioration de l’état de santé du requérant permettant sa réintégration est probable.

74      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que, à la date de l’introduction du recours, même en tenant compte des éléments survenus postérieurement, l’intérêt du requérant était simplement hypothétique et donc insuffisant pour établir que sa situation juridique se trouverait affectée par l’absence d’annulation des décisions attaquées (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 21 janvier 1987, Stroghili/Cour des comptes, 204/85, Rec. p. 389, point 11 ; arrêt Gordon/Commission, précité, point 33). Il incombe donc au requérant d’établir l’existence d’une circonstance particulière justifiant le maintien d’un intérêt personnel et actuel à agir en annulation des décisions attaquées (ordonnance N/Commission, précitée, points 26 et 27 ; arrêt Gordon/Commission, précité, point 35).

75      En l’espèce, le requérant invoque deux circonstances distinctes. Premièrement, le requérant a fait valoir, à l’audience, que son intérêt à demander l’annulation des décisions attaquées devrait être reconnu afin de garantir le respect de son droit à une protection juridictionnelle effective. Selon le requérant, au cas où le Tribunal rejetterait le recours comme irrecevable et que, par la suite, la Commission le réintègrerait dans ses services, le considérant comme guéri, il ne pourrait plus demander l’annulation des décisions attaquées. Deuxièmement, toujours à l’audience, le requérant a prétendu que l’amélioration de son état de santé dépendrait de la décision du Tribunal d’admettre le recours comme recevable.

76      Quant à la première circonstance, il convient de relever que le droit à une protection juridictionnelle effective suppose que le requérant ait un intérêt né et actuel à l’annulation de l’acte attaqué, de sorte que, si l’intérêt dont il se prévaut concerne une situation juridique future, il doit établir que l’atteinte à cette situation se révèle, d’ores et déjà, certaine. Or, ainsi qu’il a été relevé aux points 72 et 73 du présent arrêt, la réintégration du requérant est douteuse, de sorte que sa vocation à occuper le poste litigieux est incertaine. Dans ces conditions, il convient de considérer que le droit à une protection juridictionnelle effective ne saurait conférer au requérant un droit à voir le Tribunal statuer sur sa demande d’annulation.

77      S’agissant de la seconde circonstance invoquée par le requérant pour justifier le maintien de son intérêt à demander l’annulation des décisions attaquées, il suffit de constater qu’elle est fondée sur la supposition, dont la réalité n’est nullement démontrée, qu’il existerait un lien entre l’amélioration de l’état de santé du requérant et l’admission par le Tribunal du présent recours.

78      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, au moment de l’introduction du recours, le requérant ne possédait pas un intérêt personnel né et actuel à demander l’annulation des décisions attaquées aux seules fins de la reprise éventuelle, par la Commission, de la procédure de pourvoi du poste litigieux.

79      En revanche, le requérant, bien que mis à la retraite, conserve un intérêt à faire constater l’illégalité de la décision de rejet de sa candidature au poste litigieux en vue d’obtenir la réparation du dommage qu’elle a pu lui avoir causé (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 9 février 1994, Latham/Commission, T‑82/91, RecFP p. I‑A‑15 et II‑61, point 25). La demande en indemnité introduite par le requérant s’appuie d’ailleurs en partie sur la prétendue illégalité de la procédure de pourvoi du poste litigieux.

80      En conséquence, la demande en annulation est recevable pour autant qu’elle vise l’annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux. En revanche, la demande en annulation dirigée contre la décision de nomination de M. A doit être déclarée irrecevable.

 Sur la recevabilité de la demande en indemnité

81      La Commission soutient, premièrement, que la demande en indemnité est irrecevable au motif que le préjudice évalué par le requérant à 5 000 euros n’est pas précisément défini. Deuxièmement, la procédure précontentieuse n’aurait pas été suivie quant à la demande visant à indemniser le prétendu préjudice subi du fait de la mention d’affirmations mensongères dans la réponse à la réclamation.

82      Tout d’abord, la seconde exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission ne saurait être retenue. En effet, il ressort de la jurisprudence que, lorsqu’il existe un lien direct entre un recours en annulation et une action en indemnité, l’action indemnitaire est recevable, en tant qu’accessoire au recours en annulation, sans devoir être précédée tant d’une demande invitant l’AIPN à réparer les préjudices prétendument subis que d’une réclamation contestant le bien-fondé du rejet implicite ou explicite de la demande (arrêt du Tribunal de première instance du 13 juillet 1995, Saby/Commission, T‑44/93, RecFP p. I‑A‑175 et II‑541, point 31).

83      Or, tel est le cas, en l’espèce, entre la demande en annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant et la demande en indemnité s’appuyant sur un préjudice subi du fait de la réponse à la réclamation introduite contre ladite décision.

84      S’agissant de la première exception d’irrecevabilité selon laquelle la demande indemnitaire formulée par le requérant serait imprécise, il y a lieu de rappeler qu’une requête visant à la réparation de dommages causés par une institution communautaire doit contenir les éléments qui permettent d’identifier le comportement que le requérant reproche à l’institution, les raisons pour lesquelles il estime qu’un lien de causalité existe entre le comportement et le préjudice qu’il prétend avoir subi, ainsi que la nature et l’étendue de ce préjudice (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 5 octobre 1999, Apostolidis e.a./Commission, C‑327/97 P, Rec. p. I‑6709, point 37 ; ordonnance du Tribunal de première instance du 1er juillet 1994, Osório/Commission, T‑505/93, RecFP p. I‑A‑179 et II‑581, point 33, et arrêt du Tribunal de première instance du 6 octobre 2004, Vicente-Nuñez/Commission, T‑294/02, RecFP p. I‑A‑283 et II‑1279, points 102 à 104).

85      En l’espèce, il ressort de la requête que le requérant a d’abord qualifié son préjudice de moral et qu’il l’a évalué à 5 000 euros. En outre, le requérant établit un lien entre la décision de rejet de sa candidature et le préjudice moral qui en résulterait puisque, notamment, il soutient que son préjudice serait dû, premièrement, au retard dans la communication de ladite décision, qui l’aurait placé dans un état d’incertitude prolongé, deuxièmement, aux déclarations mensongères contenues dans la décision rejetant sa réclamation et, troisièmement, à la participation à la procédure de sélection de membres de l’Office des publications contre lesquels a été ouverte une enquête de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) à la suite des informations délivrées par le requérant à l’OLAF. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la demande en indemnité est suffisamment précise pour permettre à la Commission de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours.

86      De tout ce qui précède, il résulte que la demande en indemnité doit être déclarée recevable.

 Sur le fond

 Sur la demande en annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux

87      À l’appui de son recours, le requérant invoque cinq moyens tirés, premièrement, de la violation de la décision du 28 avril 2004, deuxièmement, de la violation de l’article 11 bis et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du nouveau statut, troisièmement, de l’erreur manifeste d’appréciation, quatrièmement, de la violation de l’article 25 du nouveau statut et, cinquièmement, de la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude.

 Sur le moyen tiré de la violation de la décision du 28 avril 2004

–       Arguments des parties

88      Le requérant prétend que le comité de présélection était composé de trois directeurs d’unités de l’Office des publications. Or, la composition du comité de présélection ayant été arrêtée après le 1er mai 2004, date d’entrée en vigueur de la décision du 28 avril 2004, l’article 2, paragraphe 3, de ladite décision qui prévoit qu’au moins un des membres du comité de présélection doit appartenir à une autre direction générale aurait dû s’appliquer.

89      En outre, il ne résulterait pas de la décision du 28 avril 2004 qu’elle ne s’appliquerait pas à la composition des comités de présélection pour des avis de vacance déjà publiés à la date de son entrée en vigueur.

90      Le requérant soutient également que, dans l’ignorance de la réalité des faits, il conteste que le comité de présélection ait réellement débuté ses travaux avant le 15 avril 2004. Certes, la Commission l’affirmerait mais elle ne préciserait ni la date exacte à laquelle la composition du comité de présélection a été décidée, ni la nature de ses travaux avant le 1er mai 2004.

91      Le requérant ajoute que tant la convocation à l’entretien que le premier entretien devant le comité de présélection, et la décision sur le choix du candidat retenu, sont intervenus après le 1er mai 2004.

92      Dans sa réplique, le requérant prétend que, pour déterminer les règles applicables en l’espèce, on ne saurait se placer à la date de publication de l’avis de vacance mais à celle de l’établissement de la liste de présélection ou de la décision sur le choix du candidat ou encore du recrutement, qui se situerait après le 1er mai 2004, soit postérieurement à l’entrée en vigueur de la décision du 28 avril 2004. Il souligne également que, quand bien même le comité de présélection aurait été constitué avant le 1er mai 2004 et aurait débuté ses travaux avant cette date, la Commission était néanmoins tenue, eu égard à la décision du 28 avril 2004, d’adapter la composition du comité de présélection aux nouvelles dispositions, ce qui aurait pu être fait sans porter atteinte à la capacité de fonctionnement de l’administration puisque l’ensemble des attributions dudit comité n’auraient, en l’espèce, été exercées qu’après le 1er mai 2004.

93      Par ailleurs, le requérant prétend que, à cause de la composition du comité de préselection, ses droits ont été limités et violés. Le requérant estime qu’il pouvait légitimement craindre qu’un comité exclusivement composé de membres de l’Office des publications se montre moins objectif à son égard, compte tenu de la procédure d’enquête ouverte par l’OLAF contre des membres dudit Office, à la suite des informations délivrées par le requérant à l’OLAF. La composition du comité de présélection aurait eu directement pour effet de désavantager le requérant par rapport aux autres candidats qui, eux, ne faisaient pas l’objet d’un « a priori négatif ». La règle introduite par la Commission dans la décision du 28 avril 2004 viserait précisément à protéger les candidats issus d’autres services contre des « compositions maison ».

94      De plus, selon le requérant, la participation aux comités de présélection de représentants d’autres directions générales était, avant l’adoption de la décision du 28 avril 2004, une pratique courante de bonne administration. Pour cette seule raison, la composition du comité de présélection aurait dû suivre cette pratique.

95      Le requérant fait valoir enfin, qu’à supposer applicable le manuel sur la procédure de recrutement des chefs d’unité, d’après lequel le directeur de l’Office des publications nomme trois chefs d’unité pour un panel de sélection, il y aurait néanmoins en l’espèce un « défaut de procédure », puisque M. C n’est pas un chef d’unité mais un directeur. De par son rang hiérarchique, il aurait eu un rôle prépondérant, ce qui serait contraire à la lettre et à l’esprit de la disposition du manuel de procédure sur laquelle se fonde la Commission et contraire aux intérêts du requérant.

96      La Commission répond en premier lieu que, dans le cadre d’une procédure de nomination, l’AIPN prend sa décision sur la base d’un examen comparatif des notations et des mérites des candidats concernés. Le recours à un comité de présélection, aux fins de pourvoir un poste, démontrerait le souci de l’AIPN de ne prendre sa décision qu’à l’issue d’une consultation aussi large et objective que possible. Même si la création d’un comité ad hoc n’est pas prévue par le statut, on ne saurait en conclure que la procédure retenue par l’AIPN est contraire à celui-ci.

97      En deuxième lieu, la Commission soutient que la décision du 28 avril 2004 n’est pas applicable en l’espèce puisque, selon l’article 17 de cette décision, il est prévu qu’elle n’entrera en vigueur que le 1er mai 2004. Or, la procédure de sélection aurait été engagée par la publication de l’avis de vacance, c’est-à-dire avant le 25 mars 2004. De plus, un rapporteur aurait été nommé le 31 mars 2004 et le délai concernant l’avis de vacance expirant le 15 avril 2004, c’est donc à cette date que les travaux du comité de présélection auraient débuté.

98      Dans ces conditions, ce sont les dispositions de la communication du 22 décembre 2000 qui auraient dû s’appliquer. Or, cette communication ne prévoyait pas qu’un comité de présélection dût comporter, parmi ses membres, un représentant d’une autre direction générale. En l’espèce, l’Office des publications aurait appliqué le manuel relatif à la procédure de recrutement des chefs d’unité (A 4/A 5) audit Office qui prévoirait, en son chapitre 4, que le directeur de l’Office des publications nomme trois chefs d’unité pour un comité de présélection.

99      Selon la Commission, cette disposition aurait été respectée puisque le comité de présélection était composé de M. E, chef de l’unité « Ressources humaines », de M. C, directeur de la production et de M. D, chef de l’unité « Diffusion ». La Commission souligne que le fait que M. C, en tant que directeur, soit placé plus haut dans la hiérarchie qu’un chef d’unité, ne constitue pas une violation de la disposition en cause. Celle-ci aurait été conçue pour que les membres du comité, eu égard à leur activité et à leur rang élevé, aient une grande expérience des fonctions d’encadrement. Or, un directeur répondrait à cette condition, mieux encore qu’un chef d’unité.

100    En outre, la Commission rappelle que le comité de présélection n’est qu’une instance consultative et que l’AIPN est entièrement libre de choisir un candidat qui ne figure pas sur la liste arrêtée par ledit comité. À cet égard, la Commission relève que le requérant ne démontre pas que la proposition du comité de présélection et la décision de l’AIPN eurent été différentes si la composition du comité avait été conforme à ses attentes.

101    À l’audience, la Commission a rappelé que Mme B a été nommée en tant que rapporteur le 31 mars 2004, date à laquelle ne s’appliquait pas la décision du 28 avril 2004. Quant aux autres membres du comité de présélection, la Commission indique qu’ils ont été nommés les 19 mai et 4 juin 2004, si bien que la situation serait complexe.

102    En outre, la Commission a souligné que, si, en principe, les dispositions de procédure s’appliquent dès leur entrée en vigueur, les dispositions en cause, dans la présente affaire, ne concerneraient pas la procédure mais la composition d’un organe. Or, la procédure de constitution dudit comité ayant débuté sous l’empire des dispositions antérieures à celles de la décision du 28 avril 2004, ce sont ces anciennes dispositions qui devraient s’appliquer à l’ensemble de la procédure de composition du comité de présélection.

103    À une question posée par le juge rapporteur, la Commission a répondu que l’application de la décision du 28 avril 2004 aurait entraîné un report de la procédure de nomination du fait de difficultés d’ordre pratique, liées notamment à la recherche d’un chef d’unité appartenant à une autre direction générale.

104    Enfin, la Commission a soutenu que, à supposer la composition du comité de présélection irrégulière, il conviendrait d’évaluer les conséquences d’un tel constat sur l’intérêt du requérant. Or, selon la Commission, l’objectif visé par la décision du 28 avril 2004 en imposant la participation dans le comité de présélection d’un membre appartenant à une autre direction générale serait d’éviter le favoritisme. Ainsi, il s’agirait d’un objectif de protection de l’intérêt du service et non des candidats eux-mêmes.

–       Appréciation du Tribunal

105    Le requérant soutient en substance que, en violation de l’article 2, paragraphe 3, de la décision du 28 avril 2004, le comité de présélection ne comportait pas de membre relevant d’une autre direction générale.

106    Il y a d’abord lieu de constater qu’il n’est pas litigieux entre les parties que la décision du 28 avril 2004 s’applique à l’Office des publications depuis le 1er mai 2004 et qu’elle a remplacé le manuel relatif à la procédure de recrutement des chefs d’unité (A 4/A 5). En effet, dans ses observations du 16 juillet 2007, mentionnées au point 47 du présent arrêt, la Commission confirme l’applicabilité de la décision du 28 avril 2004 à l’Office des publications.

107    Il importe encore de déterminer si la décision du 28 avril 2004 était effectivement applicable en l’espèce. Pour ce faire, il convient de situer le moment de la constitution du comité de présélection par rapport au 1er mai 2004, date de l’entrée en vigueur de la décision du 28 avril 2004.

108    À cet égard, il y a lieu de constater que, bien que Mme B ait été nommée en tant que rapporteur dès le 31 mars 2004, soit avant l’entrée en vigueur de la décision du 28 avril 2004, les membres du comité de présélection ont été nommés les 19 mai et 4 juin 2004. Il ressort en effet, d’une part, de la note du directeur général de l’Office des publications, datée du 19 mai 2004, que Mme I, MM. E et D ont été nommés afin de constituer le comité de présélection et, d’autre part, de la note dudit directeur, datée du 4 juin 2004, que M. C a été nommé en tant que membre du comité de présélection en remplacement de Mme I.

109    Ainsi, il ressort de l’ensemble des pièces du dossier que la composition du comité de présélection a été définitivement arrêtée après le 1er mai 2004. À l’audience, la Commission a confirmé que le comité de présélection n’avait pas siégé avant cette date.

110    Or, il ressort d’un principe généralement reconnu qu’une réglementation nouvelle s’applique, sauf dérogation, immédiatement, non seulement aux situations à naître, mais également aux effets futurs de situations nées sous l’empire de la réglementation antérieure (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 9 décembre 1965, Singer, 44/65, Rec. p. 1191, 1200 ; ordonnance de la Cour du 13 juin 2006, Echouikh, C‑336/05, Rec. p. I‑5223, point 54 ; arrêts du Tribunal du 30 novembre 2006, Balabanis et Le Dour/Commission, F‑77/05, RecFP p. II–A–1–535, point 39, et du 8 novembre 2007, Andreasen/Commission, F‑40/05, non encore publié au Recueil, point 163, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant le Tribunal de première instance, affaire T‑17/08 P).

111    Il y a également lieu de rappeler que les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur, à la différence des règles de fond qui sont habituellement interprétées comme ne visant pas, en principe, des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 12 novembre 1981, Meridionale Industria Salumi e.a., 212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9, et du 23 février 2006, Molenbergnatie, C‑201/04, Rec. p. I‑2049, point 31 ; arrêt Andreasen/Commission, précité, point 164 ; ordonnance du Tribunal du 14 décembre 2007, Steinmetz/Commission, F‑131/06, non encore publiée au Recueil, point 26).

112    Certes, l’application immédiate de nouvelles dispositions relatives à la constitution et à la composition d’un organe donné, tel que le comité de présélection, ne saurait entraîner l’application rétroactive de ces dispositions (arrêt Andreasen/Commission, précité, points 165 et 166). Toutefois, en l’espèce, la composition du comité de présélection a été arrêtée presque trois semaines après l’entrée en vigueur de la décision du 28 avril 2004. L’argument de la Commission selon lequel, du fait de difficultés d’ordre pratique, l’application des nouvelles dispositions issues de la décision du 28 avril 2004 aurait conduit au report de la procédure de sélection, ne peut en tant que tel justifier leur inapplicabilité.

113    De l’ensemble de ces considérations, il s’ensuit que la décision du 28 avril 2004 était applicable en l’espèce.

114    Aux termes de l’article 2, paragraphe 3, de la décision du 28 avril 2004, « [e]n vue de pourvoir un emploi en vertu de l’article 29 du [nouveau statut], et sauf cas spécifiques précisés dans les modalités d’application visées à l’article 16, paragraphe 2, le directeur général concerné nomme un comité de présélection, composé d’au moins trois membres de grade et fonction d’encadrement égaux ou supérieurs au niveau de l’emploi à pourvoir, dont un d’une autre direction générale ».

115    En l’espèce, il ressort des écritures des parties que, au moment de leur nomination, M. E était chef de l’unité « Ressources humaines », M. C, directeur de la production et M. D, chef de l’unité « Diffusion ».

116    Ainsi, force est de constater que tous les membres du comité de présélection exerçaient leurs fonctions au sein de l’Office des publications. En conséquence, le moyen tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 3, de la décision du 28 avril 2004 doit être accueilli.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 11 bis et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du nouveau statut

–       Arguments des parties

117    Le requérant rappelle, en premier lieu, le contenu de l’article 22 bis, paragraphe 3, du statut, aux termes duquel le fonctionnaire qui a communiqué les informations visées aux paragraphes 1 et 2 dudit article ne subit aucun préjudice de la part de l’institution, pour autant qu’il ait agi de bonne foi.

118    Le requérant indique ensuite que, le 30 juillet 2002, il avait informé l’OLAF de certains comportements de ses supérieurs hiérarchiques à l’Office des publications. Il s’agissait notamment de M. C et de M. J, directeur général de l’Office des publications. À la suite de cette plainte, l’OLAF aurait ouvert une enquête. Le requérant aurait donc communiqué des informations au sens du paragraphe 1 de l’article 22 bis du nouveau statut. Il l’aurait fait de bonne foi, de sorte qu’il n’aurait pas dû subir de ce fait un préjudice lorsqu’il a, par la suite, présenté sa candidature au poste litigieux. Le requérant ajoute que MM. C et J ont été informés de ses agissements au plus tard à partir du 19 mars 2004.

119    Le requérant souligne que le fait que M. J, en tant que directeur général de l’Office des publications, ait choisi les membres du comité de présélection, atteste qu’il est intervenu dans la procédure de sélection, ce qui lui aurait causé un préjudice. De plus, selon le requérant, c’est à M. J que revenait la décision finale de recrutement.

120    S’agissant des rapports entre le requérant et M. C, il serait évident qu’il y avait un conflit d’intérêt. Eu égard à l’enquête ouverte par l’OLAF, leurs relations étaient plus que difficiles, de sorte que, en vertu de l’article 11 bis du nouveau statut, M. C aurait dû refuser de participer au comité de présélection. Par ailleurs, le requérant fait valoir qu’il était peu envisageable que M. C propose à son supérieur hiérarchique, qui faisait également l’objet d’une enquête de l’OLAF, la candidature de la personne qui était à l’initiative de la procédure d’enquête ouverte contre eux.

121    Dans sa réplique, le requérant soutient que MM. C et J auraient dû informer l’AIPN de leur partialité. Cette dernière aurait alors eu à décider de la manière de procéder.

122    La Commission répond, premièrement, que M. J n’était pas membre du comité de présélection et qu’il n’a donc pas participé au rejet de la candidature du requérant. Quant au fait que M. J aurait participé au recrutement du requérant en ce qu’il a dû choisir le candidat parmi les noms figurant sur la liste arrêtée par le comité de présélection, la Commission relève que M. J, en tant que directeur de l’Office des publications, ne pouvait guère se soustraire à son obligation de choisir le candidat qui occuperait le poste vacant.

123    En ce qui concerne la participation de M. C au comité de présélection, la Commission indique d’abord que le requérant ne rapporte pas la preuve de sa partialité.

124    La Commission soutient ensuite que, à supposer que MM. C et J aient été informés du signalement par le requérant de dysfonctionnements au sein de l’Office des publications, on ne saurait en déduire que leur indépendance en fût affectée. La Commission relève également que l’OLAF a décidé de clore l’enquête et que l’affaire a été classée sans suite.

125    En outre, la Commission prétend que ce serait donner une interprétation trop extensive de l’article 11 bis du nouveau statut, incompatible avec le principe de bonne administration, s’il résultait de l’ouverture par l’OLAF d’une enquête visant un fonctionnaire X, sur la base d’indications données par un fonctionnaire Y, l’exclusion du fonctionnaire X de toute participation à une procédure de nomination engagée en vue de pourvoir un poste auquel le fonctionnaire Y s’est porté candidat.

126    Le requérant n’aurait d’ailleurs apporté aucun indice concret de nature à prouver que sa non-inscription sur la liste restreinte serait imputable à la partialité de M. C. Les appréciations dont les candidats ont fait l’objet à l’issue des entretiens montreraient que le comité de présélection a donné des indications précises sur les connaissances et sur les points faibles de chaque candidat.

–       Appréciation du Tribunal

127    Dans sa requête, le requérant invoque expressément le moyen tiré de la violation de l’article 11 du nouveau statut. L’argumentation du requérant exposée dans ses requête et réplique ainsi qu’au cours de l’audience doit toutefois être comprise comme visant la violation de l’article 11 bis du nouveau statut, laquelle est d’ailleurs également explicitement mentionnée dans ses écrits.

128    Il convient donc de considérer que le requérant soutient, en substance, que la participation de MM. C et J à la procédure de sélection constitue une violation de l’article 11 bis et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du nouveau statut.

129    Aux termes de l’article 11 bis, paragraphe 1, du nouveau statut, « [d]ans l’exercice de ses fonctions, le fonctionnaire ne traite aucune affaire dans laquelle il a, directement ou indirectement, un intérêt personnel, notamment familial ou financier, de nature à compromettre son indépendance, sous réserve du paragraphe 2 ».

130    Le paragraphe 2, de l’article 11 bis du nouveau statut, dispose que « [l]e fonctionnaire auquel échoit, dans l’exercice de ses fonctions, le traitement d’une affaire telle que visée au paragraphe 1 en avise immédiatement l’[AIPN ; c]elle-ci prend les mesures qui s’imposent et peut notamment décharger le fonctionnaire de ses responsabilités dans cette affaire ».

131    L’article 11 bis du nouveau statut reprend les dispositions de l’article 14 de l’ancien statut en y apportant certaines précisions. Selon ce dernier article, « [t]out fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, est amené à se prononcer sur une affaire au traitement ou à la solution de laquelle il a un intérêt personnel de nature à compromettre son indépendance, doit en informer l’[AIPN] ». Étant donné que la substance de ces deux articles est la même, il y a lieu de tenir compte également, dans l’application et l’interprétation de l’article 11 bis du nouveau statut, de la jurisprudence pertinente concernant l’article 14 de l’ancien statut.

132    Ainsi, il convient de considérer que l’article 11 bis du nouveau statut poursuit les objectifs d’indépendance, d’intégrité et d’impartialité, lesquels ont un caractère fondamental, et que l’obligation prescrite à son paragraphe 2 consiste, pour le fonctionnaire concerné, à informer l’AIPN à titre préventif afin que celle-ci puisse prendre les mesures appropriées en fonction du contexte de l’affaire, et non à renoncer d’emblée au traitement ou à la solution de cette affaire ou à écarter, aux fins d’un tel traitement ou d’une telle solution, les éléments pouvant mettre en jeu son intérêt personnel. Par conséquent, l’article 11 bis du nouveau statut a un champ d’application large, couvrant toute circonstance dont le fonctionnaire doit raisonnablement comprendre, au vu de la fonction qu’il exerce et des circonstances propres de l’affaire, qu’elle est de nature à apparaître, aux yeux des tiers, comme une source possible d’altération de son indépendance (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 9 juillet 2002, Zavvos/Commission, T‑21/01, RecFP p. I‑A‑101 et II‑483, point 39 ; du 11 septembre 2002, Willeme/Commission, T‑89/01, RecFP p. I‑A‑153 et II‑803, point 47, et du 12 juillet 2005, De Bry/Commission, T‑157/04, RecFP p. I‑A‑199 et II‑901, point 33).

133    En l’espèce, il est constant entre les parties que le requérant a informé l’OLAF le 30 juillet 2002 de prétendus comportements répréhensibles de ses supérieurs hiérarchiques à l’Office des publications, dont MM. C et J. En outre, à la lumière des écritures des parties, il ne fait pas de doute que MM. C et J avaient connaissance de l’information de l’OLAF par le requérant relativement à ces prétendus comportements.

134    Cependant, il y a lieu de considérer que la seule information de l’OLAF par un fonctionnaire quant au comportement d’un autre fonctionnaire ne saurait, en tant que telle, impliquer que l’indépendance de ce deuxième fonctionnaire est compromise ou apparaît comme telle lorsqu’il est appelé à se prononcer sur une affaire dans laquelle le premier fonctionnaire intervient.

135    Partant, il convient d’examiner si, dans les circonstances du cas d’espèce et compte tenu de ce qui précède, MM. C et J devaient raisonnablement comprendre que leur impartialité était compromise ou apparaissait comme telle, aux yeux de tiers.

136    À cet égard, il y a lieu de constater que le requérant n’a produit aucun élément de fait précis permettant de conclure que MM. C et J auraient méconnu par des actes spécifiques, l’obligation d’impartialité et d’intégrité leur incombant. De plus, l’existence de rapports conflictuels entre MM. C et J et le requérant, bien qu’alléguée par le requérant, n’est pas établie. Il s’ensuit que, en dépit du large pouvoir d’appréciation des membres du comité de présélection, il n’y a pas lieu de conclure à la violation de l’obligation d’impartialité au sens de l’article 11 bis du nouveau statut.

137    Concernant le moyen tiré de la violation de l’article 22 bis, paragraphe 3, du nouveau statut, en ce que le requérant aurait subi un préjudice du fait de la dénonciation de dysfonctionnements au sein de l’Office des publications, il y a également lieu de considérer que, à défaut d’établir un lien entre ladite dénonciation et le rejet de sa candidature au poste litigieux, le requérant ne saurait soutenir que la Commission a violé l’article 22 bis, paragraphe 3, du nouveau statut.

138    De tout ce qui précède, il résulte que le moyen tiré de la violation de l’article 11 bis et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du nouveau statut doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation

–       Arguments des parties

139    Le requérant soutient que, conformément aux critères fixés par les articles 2, 4, 5, 7 et 29 du nouveau statut, l’administration aurait dû choisir le candidat le plus apte. Partant, il prétend que le comité de présélection a commis une erreur manifeste d’appréciation en ne retenant pas sa candidature.

140    Selon le requérant, le fait que M. A ait été de grade A 4 et non de grade A 5 n’est pas un critère de sélection valable. D’ailleurs, le requérant fait remarquer que, dans l’avis de vacance, aucune priorité n’était donnée au grade A 4.

141    Le requérant soutient que, selon l’article 45 du nouveau statut, l’administration devait tenir compte de l’ancienneté des candidats dans leur grade et devait procéder à un examen comparatif de leurs mérites et de leurs rapports de notation. Appartenir à un grade plus élevé n’impliquerait pas que les mérites soient plus importants. À cet égard, le requérant rappelle que M. A, en sa qualité d’auditeur auprès de l’Office des publications, n’a pas donné de suite aux informations fournies par le requérant quant à la mauvaise administration dudit Office. Partant, il n’aurait pas correctement exercé sa mission, ce qui démontrerait qu’il ne remplirait pas les conditions nécessaires pour exercer une fonction telle que celle correspondant au poste litigieux.

142    De plus, le requérant fait valoir que, selon la description du poste litigieux, les compétences requises en matière juridique étaient importantes, de sorte qu’il eût fallu que des examinateurs ayant des compétences dans ce domaine procèdent à une évaluation de tous les candidats.

143    Enfin, la procédure de sélection aurait été menée d’une manière relevant du détournement de pouvoir, puisque les dossiers personnels des candidats et leurs rapports de notation n’auraient pas été pris en compte, ce qui aurait défavorisé le requérant lequel, contrairement à M. A, aurait exercé des fonctions en dehors de l’Office des publications.

144    Le requérant soutient que l’avis de vacance ne requiert pas des candidats qu’ils aient suivi le programme de formation en management organisé par la Commission ou qu’ils connaissent le règlement financier. Dans sa réplique, le requérant prétend également que le comité de présélection a minimisé ses formations dans le domaine du management et ses connaissances du règlement financier. Or, il aurait suivi plusieurs formations pertinentes et de longue durée, notamment relatives au « management des ressources humaines », au « management de projets », aux « stress et efficience », ainsi qu’une formation sur le nouveau règlement financier, dont il aurait fait état lors de l’entretien avec les membres du comité de présélection.

145    Le requérant souligne également que, sous la rubrique portant sur son aptitude et son expérience dans la gestion et l’encadrement du personnel de la grille d’évaluation établi par le comité de présélection pour chaque candidat, la mention « équipe inférieure à [dix] personnes dont une partie de prestataires » est inexacte. Selon le requérant, l’équipe qu’il dirigeait au sein de l’Office des publications comprenait, ainsi que cela ressortirait de son curriculum vitae, quinze personnes, avec un budget d’environ sept millions d’euros par an. Cette équipe aurait également comporté des « in-house prestataires » qui auraient contribué à rendre les tâches d’encadrement plus difficiles encore.

146    La Commission rappelle, que, en vertu d’une jurisprudence constante, il lui incombe de prouver que le candidat choisi par l’AIPN satisfait aux conditions requises par l’avis de vacance. Elle n’est toutefois nullement tenue de prouver que le requérant serait moins qualifié pour le poste que le candidat retenu. L’examen comparatif des mérites relèverait du pouvoir d’appréciation de l’administration et ne serait donc pas susceptible de contrôle juridictionnel.

147    La Commission ajoute que M. A a été considéré comme le candidat le plus qualifié. M. A serait économiste, diplômé de l’enseignement supérieur et aurait suivi des formations complémentaires dans les domaines de l’audit, du droit fiscal et de l’informatique. Il aurait travaillé dans le secteur des services informatiques et dans celui de l’audit interne, mené à bien des tâches importantes ressortissant aux applications informatiques et géré des projets complexes et innovants. Il aurait réalisé divers audits à l’Office des publications et aurait pris les contacts nécessaires avec le service d’audit interne de la Commission ainsi que la Cour des comptes des Communautés européennes. Il aurait également participé, en 2003, au programme de formation à la gestion, proposé par la Commission et, en juin 2004, à un cours de gestion à la « London Business School ». M. A serait un collègue estimé pour « sa rare intelligence » et « l’ampleur de ses vues ». Au cours de son audition, son dynamisme et sa chaleur humaine auraient été remarqués. Sa carrière et son développement personnel l’auraient tout naturellement préparé à un poste de chef d’unité et feraient de lui un candidat qui possède toutes les qualités requises pour l’occuper. La Commission ajoute que le requérant se trompe lorsqu’il affirme que M. A a failli à ses missions d’auditeur, au motif qu’il n’aurait pas donné suite aux informations concernant les dysfonctionnements, transmises à l’OLAF par le requérant.

148    Quant au requérant, la Commission souligne, d’une part, qu’il connaît peu le règlement financier et qu’il n’a pas été spécifiquement formé à la gestion, même s’il a suivi une session de formation de trois jours et, d’autre part, qu’il n’a pas beaucoup d’expérience de l’administration et de la gestion des ressources humaines. Lors de son audition, le requérant serait apparu trop formaliste et plutôt rigide en ce qu’il aurait cherché à faire prévaloir son point de vue.

149    En revanche, les quatre personnes inscrites sur la liste restreinte disposeraient des qualifications nécessaires, d’un niveau supérieur à celui du requérant. Sur ces quatre personnes, trois auraient suivi dans son intégralité le programme de formation à la gestion et trois auraient également une bonne connaissance du règlement financier.

150    S’agissant du grief selon lequel M. A n’aurait aucune formation juridique, la Commission répond que l’avis de vacance exigeait une formation complète « de préférence en sciences économiques, en droit ou en gestion d’entreprises ». Dans la mesure où M. A disposerait d’une formation complète en sciences économiques, son diplôme principal le qualifierait tout autant que le requérant pour le poste litigieux.

151    La Commission rappelle, en outre, que les compétences requises par le poste litigieux ne sont d’ailleurs pas principalement juridiques, la formation en droit n’apparaissant dans l’avis de vacance qu’en deuxième position.

152    De plus, il n’appartiendrait pas au requérant d’apprécier la valeur comparative d’une formation en droit par rapport à une formation en sciences économiques.

153    En outre, le requérant ferait une erreur en affirmant que M. A n’a pas été choisi en fonction de ses compétences mais uniquement pour éviter des difficultés que l’administration craignait voir surgir dès lors que le requérant avait eu une attitude critique au cours de son activité à l’Office des publications. L’allusion faite à la probabilité d’un travail « sans heurts de l’unité » viserait la bonne adéquation de M. A au poste à pourvoir et n’aurait rien à voir avec la prétendue crainte évoquée par le requérant.

154    La Commission relève enfin que le grief tiré de ce que l’AIPN n’aurait pas consulté les dossiers personnels des candidats n’a pas été soulevé dans la requête et est donc irrecevable, en vertu de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance.

–       Appréciation du Tribunal

155    Selon une jurisprudence constante, l’exercice du pouvoir d’appréciation dont dispose l’administration en matière de nomination ou de promotion suppose qu’elle examine avec soin et impartialité tous les éléments pertinents de chaque candidature et qu’elle observe consciencieusement les exigences énoncées dans l’avis de vacance, de sorte qu’elle est tenue d’écarter tout candidat qui ne répond pas à ces exigences. L’avis de vacance constitue en effet un cadre légal que l’AIPN s’impose à elle-même et qu’elle doit respecter rigoureusement (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, points 26, 38 et 41, ainsi que du 30 mai 1984, Picciolo/Parlement, 111/83, Rec. p. 2323, point 16 ; arrêts du Tribunal de première instance du 18 septembre 2003, Pappas/Comité des régions, T‑73/01, RecFP p. I‑A‑207 et II‑1011, point 54 ; du 9 novembre 2004, Montalto/Conseil, T‑116/03, RecFP p. I‑A‑339 et II‑1541, point 65, et du 4 mai 2005, Sena/AESA, T‑30/04, RecFP p. I‑A‑113 et II‑519, point 80).

156    S’agissant de l’appréciation d’une éventuelle erreur dans le choix d’un fonctionnaire, une telle erreur doit être manifeste et doit dépasser le large pouvoir d’appréciation dont, dans le cadre tracé par l’avis de vacance, l’AIPN dispose dans la comparaison des mérites des candidats et dans l’évaluation de l’intérêt du service. Le contrôle du Tribunal doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux éléments sur lesquels s’est fondée ladite autorité pour établir son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites raisonnables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée ou à des fins autres que celles pour lesquelles il lui avait été conféré (arrêts du Tribunal de première instance du 13 décembre 1990, Moritz/Commission, T‑20/89, Rec. p. II‑769, point 29, et Sena/AESA, précité, point 81). Le Tribunal ne saurait donc substituer son appréciation des mérites et des qualifications des candidats à celle de l’AIPN lorsque aucun élément du dossier ne permet d’affirmer que, en appréciant ces mérites et ces qualifications, l’AIPN aurait commis une erreur manifeste (arrêt de la Cour du 4 février 1987, Bouteiller/Commission, 324/85, Rec. p. 529, point 6 ; arrêt Sena/AESA, précité, point 81).

157    Conformément à ces principes, il y a lieu d’abord de vérifier si M. A satisfaisait effectivement aux conditions posées par l’avis de vacance.

158    En l’espèce, les qualifications requises pour occuper le poste litigieux étaient, dans l’avis de vacance, définies comme suit :

« Formation universitaire complète sanctionnée par un diplôme, de préférence en économie, en droit ou en affaires, ou expérience professionnelle équivalente.

Connaissance approfondie du [r]èglement financier et de ses modalités d’exécution, ainsi que des règlements applicables en matière de marchés publics et/ou de contrats.

Formation spécifique dans le domaine du management.

Une très bonne aptitude et une expérience prouvée dans la gestion et l’encadrement de personnel.

Esprit rigoureux et capacité à travailler de manière autonome.

Culture de service.

Bonne capacité de communication orale et écrite.

Une connaissance satisfaisante de la langue anglaise est essentielle.

La connaissance des métiers de l’édition n’est pas indispensable, mais sera appréciée. »

159    Le comité de présélection a déclaré statutairement recevable l’ensemble des dix candidatures déposées. Il a ensuite procédé aux entretiens avec sept candidats, deux s’étant désistés et un ne s’étant pas présenté à l’entretien. Le comité a rempli pour chacun des sept candidats une grille d’évaluation des qualifications requises par l’avis de vacance. Le comité a ensuite proposé une liste restreinte de quatre personnes ne comportant pas le nom du requérant. Enfin, les quatre candidats ont été interviewés par le directeur général de l’Office des publications, M. J, assisté de Mme B. À la suite de ces entretiens, une appréciation écrite de ces quatre candidats a été rédigée.

160    D’abord, il ressort de la grille d’évaluation de M. A, ainsi que de son curriculum vitae, que celui-ci remplissait les qualifications requises par l’avis de vacance. Certes, il y est indiqué que, en ce qui concerne la « [c]onnaissance approfondie du [r]èglement financier et de ses modalités d’exécution, ainsi que des règlements applicables en matière de marchés publics et/ou de contrats », M. A « ne possède pas d’expérience au niveau de la gestion opérationnelle des procédures ». Néanmoins, la grille d’évaluation souligne que, « [p]ar ses fonctions actuelles (auditeur interne), le candidat possède de solides connaissances dans ce domaine ».

161    Il convient de constater ensuite que le requérant n’établit pas qu’une erreur manifeste d’appréciation résulterait des évaluations de sa candidature et de celle de M. A par le comité de présélection.

162    À cet égard, il convient de relever, premièrement, que, au regard de sa lecture, comparée avec la grille d’évaluation de M. A, la grille d’évaluation du requérant fait état de certaines insuffisances. Les connaissances du requérant concernant le règlement financier seraient limitées, de même que sa compréhension des grands principes. Le requérant n’aurait pas suivi de formation dans le domaine du management, exception faite d’un cours de trois jours d’introduction. Son expérience dans la gestion et l’encadrement du personnel serait limitée. Il aurait un esprit pointilleux, trop orienté vers les aspects formels. Enfin, la grille d’évaluation indique que le requérant a démontré, lors de l’entretien, qu’il veut imposer son point de vue. Il manquerait de souplesse dans la discussion.

163    Deuxièmement, l’argument du requérant selon lequel l’AIPN aurait tenu compte du grade A 4 de M. A comme gage d’un plus grand mérite n’est pas pertinent. À cet égard, il suffit de constater que le comité de présélection avait retenu dans la liste restreinte, tant des fonctionnaires de grade A 5 que des fonctionnaires de grade A 4, parmi lesquels ne figurait pas le requérant.

164    Troisièmement, le requérant se borne à affirmer que M. A n’a pas correctement exercé la mission qui lui incombait en tant qu’auditeur auprès de l’Office des publications, en ce qu’il n’aurait pas donné de suite aux informations fournies par le requérant quant aux dysfonctionnements au sein dudit Office. Aucun élément précis en ce sens ni dans la requête, ni dans la réplique n’est rapporté par le requérant.

165    Quatrièmement, sans qu’il soit besoin d’examiner la recevabilité du grief avancé par le requérant, il convient de constater que celui-ci se borne à alléguer une prétendue violation de l’article 45 du nouveau statut en ce que la Commission n’aurait pas tenu compte de ses rapports de notation et de son dossier personnel. Le requérant se limite, en effet, à déduire de l’absence d’allusions par la Commission à ses rapports de notation et à son dossier personnel la violation de l’article 45 du nouveau statut en ce que l’AIPN n’aurait pas procédé à un examen comparatif des mérites et des rapports, sans apporter d’éléments factuels précis à son soutien.

166    Cinquièmement, le grief tiré de ce que l’avis de vacance n’imposait pas d’avoir suivi la formation en management organisée par la Commission ni une bonne connaissance du règlement financier doit également être rejeté. En effet, l’avis de vacance exigeait une « connaissance approfondie du règlement financier et de ses modalités d’exécution » ainsi qu’une « formation spécifique dans le domaine du management ». Or, il ressort de la grille d’évaluation que les connaissances du requérant sont limitées concernant le règlement financier et que sa compréhension des grands principes n’est pas assurée mais aussi que, dans le domaine du management, il n’a pas de formation formelle. Il n’aurait suivi qu’un cours de trois jours dans ce domaine. Son curriculum vitae ne contredit d’ailleurs pas cet élément de fait.

167    À supposer que le requérant ait fait état au cours de l’entretien avec les membres du comité de présélection des formations en « Management des ressources humaines », en « Management de projets » ou relativement aux « stress et efficience », ce qui n’est pas démontré par lui, il y a lieu de constater qu’il n’explique pas la prétendue pertinence de ces formations par rapport à l’exigence d’une formation dans le domaine spécifique du management telle que requise par l’avis de vacance, ni ne précise la durée de chacune de ces formations. Dans ces conditions, le requérant ne saurait soutenir que le comité de présélection a commis une erreur manifeste d’appréciation en indiquant dans la grille d’évaluation qu’il n’avait pas de formation formelle dans le domaine du management.

168    Sixièmement, s’agissant du grief pris de ce que l’AIPN n’aurait pas tenu compte des compétences juridiques du requérant, il y a lieu de constater que l’avis de vacance n’imposait pas exclusivement une formation en matière juridique. L’avis de vacance exigeait une « formation universitaire complète sanctionnée par un diplôme, de préférence en économie, en droit ou en affaires, ou expérience professionnelle équivalente ». Certes, sous le titre I de l’avis de vacance relatif à la description et à la nature des fonctions se rapportant au poste litigieux, figure « la formulation d’avis et de conseil[s] juridiques ». Le requérant ne saurait toutefois en déduire que M. A, qui avait une formation en économie, n’était pas apte à occuper le poste litigieux. En effet, le requérant ne saurait substituer sa propre appréciation à celle de l’AIPN quant aux qualifications appropriées pour occuper les fonctions se rapportant au poste litigieux.

169    Septièmement, concernant l’allégation du requérant selon laquelle M. A n’aurait pas été choisi pour ses compétences, mais afin d’éviter que des problèmes ne se posent au sein de l’Office des publications, compte tenu de l’attitude critique du requérant à l’égard dudit Office, il convient de relever que le requérant n’apporte pas le moindre élément factuel au soutien de cette affirmation. Dès lors, il y a lieu de rejeter cette argumentation comme reposant sur de pures spéculations. Les termes contenus dans la réponse à la réclamation selon lesquels le directeur général de l’Office des publications a choisi « M. [A] en tant que candidat présentant le plus de garanties pour le bon fonctionnement de l’unité » ne suffisent pas à établir la véracité de l’allégation du requérant.

170    Huitièmement, quand bien même le requérant aurait dirigé une équipe de quinze personnes au sein de l’Office des publications et non de dix personnes seulement comme mentionné dans la grille d’évaluation de sa candidature, il reste que le comité de présélection a estimé que son expérience était limitée. Or, sur ce point, le requérant ne démontre pas que le comité de présélection a commis une erreur manifeste d’appréciation.

171    Il résulte de tout ce qui précède que le comité de présélection n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en rejetant la candidature du requérant. En conséquence, le présent moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 25 du nouveau statut

–       Arguments des parties

172    Selon le requérant, la décision de rejet de sa candidature constitue une décision faisant grief et devait donc être motivée. Or, le requérant ignorerait pour quels motifs sa candidature a été rejetée et serait donc limité dans ses possibilités de défense. En particulier, la décision de rejet de sa candidature ne ferait pas mention de la possibilité d’obtenir des informations complémentaires sur la motivation du rejet, pas plus qu’elle ne lui indiquerait les voies de recours possibles.

173    La motivation de la décision de rejet de sa réclamation ne serait pas de nature à couvrir la cause de nullité de la décision de rejet de sa candidature. De plus, le requérant conteste les motifs avancés dans le rejet de sa réclamation. En effet, les fonctions décrites dans l’avis de vacance seraient principalement d’ordre juridique. Dès lors, il prétend ne pas comprendre qu’un candidat ayant une formation en économie soit jugé plus apte à occuper ces fonctions qu’un candidat ayant une formation juridique. Par ailleurs, dans l’avis de vacance, il ne serait pas précisé que les candidats devaient avoir une bonne connaissance du règlement financier ou avoir suivi le programme de formation en management de la Commission. Dès lors, la Commission ne saurait s’en prévaloir. De plus, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN exposerait que M. A a été choisi en tant que candidat présentant le plus de qualités pour le bon fonctionnement de l’unité. Ce faisant, l’AIPN aurait clairement exprimé qu’elle ne s’était pas attachée à l’aptitude particulière ou aux connaissances techniques de M. A, mais qu’elle entendait se préserver des difficultés auxquelles elle craignait être confrontée du fait du comportement critique du requérant dans le cadre de ses fonctions à l’Office des publications. L’AIPN aurait donc pris sa décision en fonction de considérations hors de propos et discriminatoires à l’égard du requérant.

174    Le requérant observe également que la Commission persiste à ne pas lui communiquer, ainsi qu’au Tribunal, les annexes de la note du 25 juin 2004. De l’avis du requérant, cela réduirait considérablement ses possibilités de défense dans le cadre du présent recours et constituerait une violation de l’article 25 du nouveau statut.

175    La Commission répond, d’abord, qu’elle n’est pas tenue de motiver une décision relative au pourvoi d’un poste ayant fait l’objet d’un avis de vacance. Il lui incomberait seulement d’aviser les candidats de la décision prise par l’envoi d’une lettre standard. Si toutefois les candidats souhaitaient obtenir des informations complémentaires, ils pouvaient en faire la demande. À cet égard, la Commission relève que le requérant n’a présenté aucune demande en ce sens.

176    La Commission ajoute que l’AIPN est tenue de motiver le rejet d’une réclamation introduite par un candidat non retenu à un concours. Cette motivation est censée coïncider avec celle de la décision contre laquelle la réclamation est dirigée. Le réclamant ne pourrait dès lors faire valoir une quelconque absence de motivation.

177    La Commission indique, en outre, que dès lors que la promotion s’effectue sur la base d’une sélection, l’AIPN n’est pas tenue de révéler au candidat écarté l’appréciation comparative qu’elle a portée sur lui et sur le candidat retenu, ni d’exposer en détail la façon dont elle a estimé que le candidat nommé remplissait les conditions de l’avis de vacance. Dans un contexte connu du requérant, une éventuelle insuffisance de la motivation donnée dans la réponse à la réclamation pourrait être couverte par des motivations complémentaires données au cours de la procédure. En l’espèce, la Commission relève que le mémoire en défense comporte ces compléments de motivation.

178    La Commission prétend enfin que le grief tiré de ce que les raisons de la non-inscription du requérant sur la liste restreinte ne seraient pas exposées est irrecevable. En effet, selon la Commission, ce grief n’ayant pas été exposé dans la requête, devrait être rejeté en vertu des dispositions de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance. Ce grief serait également non fondé puisque l’obligation de motivation ne concernerait pas les recommandations préparatoires, telles que celles du comité de présélection, mais ne viserait que la décision finale.

–       Appréciation du Tribunal

179    Aux termes de l’article 25, deuxième alinéa, du nouveau statut, toute décision faisant grief doit être motivée.

180    Une motivation générale et d’ordre procédural ne saurait être considérée comme suffisante lorsque le motif individuel et pertinent qui a permis d’écarter un candidat ne lui est pas communiqué (arrêt du Tribunal de première instance du 14 novembre 2006, Neirinck/Commisison, T‑494/04, RecFP p. II‑A‑2‑1345, point 72).

181    Il ressort néanmoins de la jurisprudence relative aux décisions prises par un jury de concours, applicable par analogie aux circonstances de l’espèce, que l’obligation de motivation doit néanmoins être conciliée avec le respect du secret qui entoure les travaux du jury, lequel s’oppose tant à la divulgation des attitudes prises par les membres individuels du jury qu’à la révélation de tous les éléments ayant trait à des appréciations de caractère personnel ou comparatif concernant les candidats (arrêt Neirinck/Commission, précité, point 73).

182    Compte tenu de ce secret, institué en vue de garantir l’indépendance des jurys et l’objectivité de leurs travaux en les mettant à l’abri de toutes ingérences et pressions extérieures, qu’elles proviennent de l’administration communautaire elle-même, des candidats intéressés ou de tiers, l’institution concernée n’est en principe pas tenue de communiquer de telles appréciations à un candidat concerné (arrêt du Tribunal de première instance du 5 avril 2005, Christensen/Commission, T‑336/02, RecFP p. I‑A‑75 et II‑341, point 24).

183    Il est également de jurisprudence constante que la motivation d’une décision d’écarter une candidature doit intervenir, au plus tard, lors du rejet de la réclamation introduite contre cette décision (arrêts Sena/AESA, précité, point 63, et Neirinck/Commission, précité, point 72).

184    En l’espèce, la décision du 19 novembre 2004 se borne à indiquer au requérant que sa candidature est rejetée. Il convient donc de considérer que, à ce stade, les motifs individuels, pertinents et précis ne lui ont pas été communiqués.

185    Toutefois, la réponse à la réclamation offre au requérant une explication détaillée et suffisante des raisons du rejet de sa candidature. D’ailleurs, les griefs et arguments soulevés par le requérant dans sa requête prennent appui, pour une grande part, sur la réponse de l’AIPN à sa réclamation.

186    Quant à la remarque du requérant, présentée dans la réplique, selon laquelle la Commission ne lui aurait pas communiqué ainsi qu’au Tribunal les grilles de critères par candidat, il suffit de constater que la Commission a annexé à son mémoire en défense, notamment, les grilles de critères concernant M. A et le requérant, ainsi que la lettre de candidature de M. A et son curriculum vitae.

187    En conséquence, le moyen tiré de la violation de l’article 25 du nouveau statut doit être rejeté comme non fondé, sans qu’il soit besoin de statuer sur sa recevabilité.

 Sur le moyen tiré de la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude

–       Arguments des parties

188    Le requérant relève que, bien qu’il se soit renseigné par courriers électroniques les 5 juillet 2004, 7 septembre 2004, 18 et 22 novembre 2004, sur l’état d’avancement de la procédure de sélection, il n’a reçu que le 24 novembre 2004 une lettre de rejet de sa candidature, rédigée le 19 novembre 2004. Pourtant, M. A aurait été choisi dès le 13 juillet 2004.

189    Le requérant conteste que les autres candidats aient été, eux aussi, informés tardivement. Quand bien même ce serait le cas, M. E aurait pu informer le requérant de ce qu’un autre candidat avait été retenu, au besoin sous la réserve que les autres candidats ne soient définitivement informés du rejet de leur candidature qu’après la nomination du candidat sélectionné. Cette manière de procéder aurait été conforme à la pratique habituelle.

190    Dans la réponse à la réclamation, la Commission indique que le directeur général de l’Office des publications a choisi M. A le 13 juillet 2004.

191    La Commission soutient, dans le mémoire en défense, que le retard dans l’information du requérant sur l’avancement de la procédure de sélection est une conséquence de la décision de la Commission de n’aviser les candidats non retenus qu’après la nomination définitive du candidat sélectionné, et ce pour être certain que la décision concernant ce dernier serait définitive. Enfin, à supposer que l’AIPN soit responsable d’un retard, le présent grief serait à rejeter dès lors, d’une part, qu’aucun indice ne permet de penser que ce retard ait eu des conséquences sur la procédure de sélection et, d’autre part, que tous les autres candidats ont été avisés concomitamment.

–       Appréciation du Tribunal

192    Le requérant formule deux principaux griefs. D’abord, il soutient qu’il a été informé tardivement du rejet de sa candidature, à l’inverse des autres candidats. Ensuite, le retard pris par l’administration pour l’informer du rejet de sa candidature en dépit de plusieurs demandes d’informations, serait contraire au principe de bonne administration et au devoir de sollicitude.

193    En ce qui concerne le premier grief, il y a lieu de rappeler que la Commission soutient que l’ensemble des candidats non retenus a été informé concomitamment du rejet de leurs candidatures. Or, le requérant n’invoque aucun élément précis de nature à établir qu’il a effectivement fait l’objet d’un traitement discriminatoire. Rien dans ses écritures ne permet de conforter cette allégation.

194    Quant au second grief, il est constant entre les parties que le choix de M. A pour occuper le poste litigieux a été fait le 13 juillet 2004 par le directeur général de l’Office des publications et que le requérant a été informé du rejet de sa candidature par décision du 19 novembre 2004, qu’il a réceptionnée le 24 novembre suivant.

195    Aux termes de l’article 25, deuxième alinéa, du nouveau statut, « [t]oute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé ».

196    Il convient de relever que le retard dans la communication d’une décision individuelle de rejet d’une candidature doit être apprécié non pas par rapport à la décision de nomination sur le poste litigieux, mais par rapport à la décision opérant le choix déterminant qui a abouti à l’exclusion des autres candidats, soit, en l’espèce, la décision du directeur général de l’Office des publications du 13 juillet 2004 (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 18 mars 1997, Picciolo et Caló/Comité des régions, T‑178/95 et T‑179/95, RecFP p. I‑A‑51 et II‑155, point 28).

197    En l’espèce, tandis que M. A a été choisi le 13 juillet 2004 pour occuper le poste litigieux, le requérant n’a été informé du rejet de sa candidature que le 24 novembre 2004. Il convient d’observer que l’explication avancée par la Commission pour justifier ledit retard n’est pas complètement convaincante. La Commission se borne en effet à soutenir qu’il avait été décidé de n’informer les candidats non retenus qu’après la nomination définitive du candidat sélectionné, sans autre précision.

198    Il convient toutefois de rappeler que, selon la jurisprudence, quand bien même la communication d’une décision individuelle à un requérant serait intervenue avec retard, celui-ci ne saurait entraîner l’annulation de ladite décision. En effet, la communication d’une décision individuelle à l’intéressé est un acte postérieur à la décision individuelle elle-même et, partant, elle n’exerce aucune influence sur le contenu de celle-ci (arrêt Picciolo/Parlement, précité, point 25 ; arrêts du Tribunal de première instance du 17 novembre 1998, Gómez de Enterría y Sanchez/Parlement, T‑131/97, RecFP p. I‑A‑613 et II‑1855, point 69, et du 7 février 2007, Caló/Commission, T‑118/04 et T‑134/04, non encore publié au Recueil, point 79). La constatation d’un retard affectant la communication à l’intéressé d’une décision individuelle ne saurait, dès lors, à elle seule, être constitutive d’une violation de l’article 25 du statut, de nature à entraîner l’annulation de la décision attaquée (arrêt Picciolo et Caló/Comité des régions, précité, point 29).

199    En outre, ce retard dans la communication de la décision de rejet de sa candidature n’a pas porté atteinte aux droits du requérant, qui a pu régulièrement introduire une réclamation ainsi que le présent recours (voir, en ce sens, arrêts Gómez de Enterría y Sanchez/Parlement, précité, point 69, et Caló/Commission, précité, point 79).

200    En revanche, si le retard dans la communication d’une décision individuelle ne peut en justifier l’annulation, il est néanmoins susceptible d’ouvrir un droit à réparation au profit du fonctionnaire concerné.

201    En conséquence, le moyen tiré de la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude doit être rejeté.

202    De tout ce qui précède, il résulte que des cinq moyens invoqués par le requérant quatre ont été rejetés alors que le moyen tiré de la violation de la décision du 28 avril 2004 a été accueilli. Il s’ensuit que la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux doit être annulée.

 Sur la demande en indemnité

 Arguments des parties

203    Dans ses chefs de conclusions, le requérant demande que la Commission soit condamnée à lui verser une indemnité en réparation du préjudice moral subi « du fait de la procédure de sélection conduite de manière illégale et de la décision de rejet de sa candidature prise tardivement et seulement à la suite de plusieurs demandes ».

204    Dans sa requête, le requérant précise qu’il a subi un préjudice du fait de la participation à l’adoption de la décision de rejet de sa candidature de membres de l’Office des publications dont il a dénoncé de prétendus comportements répréhensibles auprès de l’OLAF, le 30 juillet 2002. Il indique également que la décision de rejet de sa réclamation comporte des affirmations mensongères portant atteinte à son honneur et lui causant ainsi un préjudice.

205    Ensuite, dans sa réplique, le requérant a fait valoir que l’annulation de la décision de rejet de sa candidature au poste litigieux ne suffit pas à réparer les préjudices moraux qu’il aurait subis dès lors que ceux-ci n’ont pas été causés par cette décision elle-même. En outre, dans la décision de rejet de la réclamation introduite par le requérant, mention serait faite de son congé de maladie permanent depuis le 18 février 2004, alors qu’il aurait été en activité à cette période, notamment le 1er mars 2004, date de l’entretien qu’il aurait eu en vue de l’établissement de son rapport d’évolution de carrière. Une telle affirmation mensongère aurait pour objet de déprécier la manière dont le requérant s’acquittait de ses fonctions. Enfin, l’AIPN aurait indiqué que le requérant avait discuté ouvertement de sa dénonciation de comportements répréhensibles internes, raison pour laquelle plusieurs personnes de l’Office des publications en auraient eu connaissance. Selon le requérant, une telle allégation insinuerait de manière diffamatoire qu’il n’aurait pas respecté son devoir de discrétion.

206    En vue de réparer l’ensemble de ces préjudices prétendument subis, le requérant demande à la Commission de lui verser la somme de 5 000 euros.

207    La Commission conteste d’abord que le requérant ait pu subir un préjudice moral. Elle rétorque en outre qu’une brève interruption d’une journée ou de quelques jours pour accomplir des formalités inhérentes au service, par exemple aux fins de l’établissement du rapport d’évolution de carrière, ne remet pas en cause le constat de l’absence permanente du requérant. Un tel constat ne saurait porter atteinte à l’honneur du requérant, en particulier s’il en est fait état dans une lettre dont ce dernier est l’unique destinataire. Enfin, la Commission souligne que c’est le requérant, et non elle, qui évoque la violation du secret professionnel.

 Appréciation du Tribunal

208    Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté suppose la réunion d’un ensemble de conditions concernant l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage allégué et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué (arrêts Latham/Commission, précité, point 72 ; Montalto/Conseil, précité, point 125, et du Tribunal de première instance du 12 septembre 2007, Combescot/Commission, T‑250/04, non encore publié au Recueil, point 42). Ces trois conditions sont cumulatives, ce qui implique que, dès lors que l’une d’elles n’est pas satisfaite, la responsabilité de la Communauté ne peut être engagée (arrêt Combescot/Commission, précité, point 42).

–       Sur l’illégalité du comportement reproché

209    Il convient de rappeler, premièrement, que l’examen des moyens présentés au soutien des conclusions en annulation a révélé que la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux était illégale.

210    Deuxièmement, il y a lieu de rappeler qu’il a été constaté aux points 196 et 197 du présent arrêt une tardiveté non justifiée dans la communication de la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux.

211    Troisièmement, il importe d’examiner la légalité du comportement de la Commission quant aux griefs pris de ce que la décision de rejet de la réclamation comporterait des affirmations mensongères portant atteinte à l’honneur du requérant.

212    En ce qui concerne la mention du congé de maladie permanent dans la décision de rejet de la réclamation, il convient de relever que le requérant n’établit pas qu’elle est mensongère. Certes, le requérant était présent sur son lieu de travail le 1er mars 2004 pour passer l’entretien en vue de l’établissement de son rapport d’évolution de carrière. Toutefois, sa présence ce jour là, sur son lieu de travail, ne permet pas d’établir qu’il n’était pas en congé de maladie.

213    Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’arrêt du Tribunal de première instance du 10 juin 2004, François/Commission (T‑307/01, Rec. p. II‑1669, point 110), cité par le requérant dans sa réplique. En effet, dans cette dernière affaire, diverses décisions et avis administratifs faisant partie de la procédure disciplinaire faisaient état d’accusations graves à l’encontre du requérant de ladite affaire. Or, en l’espèce, force est de constater que l’affirmation selon laquelle le requérant était en congé de maladie permanent à partir du 18 février 2004 ne peut être qualifiée de grave accusation portant atteinte à son honneur.

214    Quant à l’allégation selon laquelle le requérant aurait discuté ouvertement de sa dénonciation de comportements répréhensibles internes, il convient de considérer qu’à la supposer mensongère, elle ne saurait être qualifiée d’accusation grave susceptible de nuire à l’honorabilité professionnelle du requérant et moins encore de diffamations (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal de première instance du 25 octobre 1996, Lopes/Cour de justice, T‑26/96, RecFP p. I‑A‑487 et II‑1357, point 41 ; arrêt du Tribunal de première instance du 14 décembre 2000, Verheyden/Commission, T‑213/99, RecFP p. I‑A‑297 et II‑1355, point 27). À cet égard, il importe de rappeler que la décision de rejet de la réclamation n’est pas un document public.

215    Il s’ensuit que le grief tiré de l’existence d’affirmations mensongères et diffamatoires dans la décision de rejet de la réclamation doit être rejeté.

216    Enfin, pour autant que le requérant ait entendu présenter, dans ses observations déposées le 10 septembre 2007, citées au point 48 du présent arrêt, un grief tiré de l’inexactitude des déclarations de la Commission concernant la date du début des travaux du comité de présélection en vue de l’induire en erreur ainsi que le Tribunal, il convient de rejeter ce grief sans qu’il soit besoin de se prononcer sur sa recevabilité. Il suffit de relever, en effet, que la date du début des travaux dudit comité a été une question litigieuse entre les parties dans le cadre de laquelle celles-ci ont présenté leurs positions respectives. Le requérant ne saurait donc déduire de l’affirmation par la Commission que Mme B a été nommée rapporteur pour la procédure de pourvoi du poste litigieux dès le 31 mars 2004 et que le comité de présélection a commencé ses travaux à partir du 15 avril 2004 la volonté de la Commission « de manipuler l’issue du procès ».

–       Sur le préjudice et le lien de causalité

217    Ainsi qu’il a été rappelé au point 208 du présent arrêt, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté suppose, outre l’illégalité du comportement reproché aux institutions, l’existence d’un dommage réel subi par le requérant ainsi que celle d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué.

218    Il a été constaté ci-dessus que la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux a été adoptée en violation de l’article 2, paragraphe 3, de la décision du 28 avril 2004.

219    Dès lors que le requérant s’est vu privé du droit de voir sa candidature examinée dans des conditions légales, il y a lieu de considérer qu’il a effectivement subi un préjudice moral.

220    Dans ces conditions, l’allocation d’un montant de 2 000 euros constitue une indemnisation adéquate du préjudice moral subi par le requérant.

221    Quant à la communication tardive de la décision de rejet de la candidature du requérant, il y a lieu de considérer que ce retard ne saurait suffire pour engager la responsabilité de la Communauté en l’absence d’établissement par le requérant d’un préjudice causé par le seul fait de cette communication tardive (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 29 octobre 1981, Arning/Commission, 125/80, Rec. p. 2539, point 9). Au surplus, il convient de rappeler que ce retard n’a pas porté atteinte aux droits du requérant d’introduire une réclamation ainsi que le présent recours (voir, en ce sens, arrêts Gómez de Enterría y Sanchez/Parlement, précité, point 69, et Caló/Commission, précité, point 79).

 Sur les dépens

222    En vertu de l’article 122 du règlement de procédure du Tribunal, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement de procédure, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

223    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Lorsque les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels, le Tribunal peut, en application de l’article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du même règlement, répartir les dépens.

224    En l’espèce, le recours ayant été partiellement accueilli, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que la Commission supporte ses propres dépens ainsi que la moitié des dépens exposés par le requérant.

225    Dans ces conditions, il y a lieu de décider que la Commission supporte ses propres dépens ainsi que la moitié des dépens du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La demande d’annulation de la décision de nommer M. A au poste de chef de l’unité « Appels d’offres et contrats » de l’Office des publications des Communautés européennes est rejetée comme irrecevable.

2)      La décision de rejet de la candidature de M. Strack au poste de chef de l’unité « Appels d’offres et contrats » de l’Office des publications des Communautés européennes est annulée.

3)      La Commission des Communautés européennes est condamnée à verser au requérant un montant de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts.

4)      Le recours est rejeté pour le surplus.

5)      M. Strack supporte la moitié de ses propres dépens.

6)      La Commission des Communautés européennes supporte ses propres dépens ainsi que la moitié des dépens de M. Strack.

Van Raepenbusch

Boruta

Kanninen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 25 septembre 2008.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       S. Van Raepenbusch

Table des matières

Cadre juridique

Dispositions régissant la procédure de pourvoi des vacances d’emploi

Dispositions régissant la mise à la retraite et l’octroi d’une allocation pour cause d’invalidité

Faits relatifs au litige

Procédure et conclusions des parties

Sur l’objet du recours en annulation

Sur la recevabilité du recours

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur la recevabilité de la demande en annulation

Sur la recevabilité de la demande en indemnité

Sur le fond

Sur la demande en annulation de la décision de rejet de la candidature du requérant au poste litigieux

Sur le moyen tiré de la violation de la décision du 28 avril 2004

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur le moyen tiré de la violation de l’article 11 bis et de l’article 22 bis, paragraphe 3, du nouveau statut

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur le moyen tiré de la violation de l’article 25 du nouveau statut

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur le moyen tiré de la violation du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur la demande en indemnité

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

– Sur l’illégalité du comportement reproché

– Sur le préjudice et le lien de causalité

Sur les dépens

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : l’allemand.