Language of document : ECLI:EU:T:2023:72

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

15 février 2023 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Procédure disciplinaire – Mise en garde – Article 21 du statut – Droits de la défense – Responsabilité »

Dans l’affaire T‑357/22,

José Das Neves, demeurant à La Hulpe (Belgique), représenté par Me J.-P. Vandersteen, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. T. Bohr et Mme I. Melo Sampaio, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen, président, C. Mac Eochaidh et J. Laitenberger (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 270 TFUE, le requérant, M. José Das Neves, demande, d’une part, l’annulation de la décision de la Commission européenne du 12 octobre 2021 par laquelle celle-ci lui a adressé une mise en garde au titre de l’article 3, paragraphe 1, sous b), de l’annexe IX du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») (ci-après la « décision attaquée ») et, d’autre part, la réparation du préjudice qu’il aurait subi du fait de cette décision.

 Antécédents du litige

2        Entre le 1er septembre 2014 et le 30 avril 2019, le requérant a été affecté comme fonctionnaire de grade AD 10 à différentes unités au sein de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF). En particulier, du 1er avril 2017 au 15 octobre 2018, le requérant a exercé les fonctions de chargé de sécurité au sein de l’unité OLAF.02 « Budget ».

3        Le 19 décembre 2017, sur le fondement d’un contrat-cadre conclu avec la Commission et géré par la direction générale de l’informatique de cette institution, un consortium de sociétés a soumis une offre à l’OLAF en vue de la conclusion d’un contrat spécifique ayant pour objet de fournir une « assistance pour le développement de plans de sécurité informatique » (ci-après le « CS 22 »). Dans cette offre, le consortium proposait de sous-traiter l’exécution du CS 22 à une société ayant déjà participé à plusieurs contrats spécifiques conclus en vertu du même contrat-cadre (ci-après la « société en cause »).

4        Après la réception de cette offre, le chef d’unité du requérant a consulté la direction générale de l’informatique de la Commission sur la question d’un conflit d’intérêts potentiel quant à la participation de la société en cause à l’exécution du CS 22 au motif que ladite société aurait été étroitement impliquée dans la rédaction des spécifications techniques du CS 22. Cette direction générale a conclu que l’inclusion de la société en cause dans l’offre soumise par le consortium ne faisait pas apparaître l’existence d’un conflit d’intérêts, mais que cette conclusion aurait pu être différente si l’offre avait été directement soumise par ladite société.

5        Le 22 décembre 2017, le requérant, son chef d’unité et l’ordonnateur subdélégué ont décidé d’exclure la société en cause de l’exécution du CS 22 afin d’éviter toute perception d’un conflit d’intérêts potentiel (ci-après la « décision d’exclusion »). Le requérant a réitéré son accord avec cette décision par courriels du même jour.

6        Le même jour, l’OLAF a invité le consortium à présenter une nouvelle offre en excluant la participation de la société en cause de la liste des consultants assignés à l’exécution du CS 22, en précisant que cette modification était requise afin d’éviter toute perception d’un potentiel conflit d’intérêts eu égard au fait que le dirigeant de ladite société avait été impliqué dans la rédaction des spécifications techniques du CS 22. Le consortium a renvoyé l’offre actualisée le même jour.

7        Le 31 décembre 2017, l’OLAF a conclu le CS 22 avec le consortium, sans que la société en cause soit incluse dans l’exécution de celui-ci. Le CS 22 devait être exécuté entre le 1er janvier et le 30 novembre 2018.

8        Au printemps 2018, constatant que l’exécution du contrat prenait du retard, le consortium a inclus la société en cause dans l’équipe de consultants assignés à l’exécution du CS 22 sans solliciter l’approbation préalable de l’OLAF. En avril 2018, le requérant, craignant que le projet ne soit pas finalisé à temps, a accepté cette inclusion. Il n’en a pas informé son chef d’unité et l’ordonnateur subdélégué.

9        Le 23 novembre 2018, l’OLAF a ouvert une enquête concernant des « soupçons de fraude et/ou d’autres irrégularités dans l’exécution de contrats spécifiques conclus au titre [d’un contrat-cadre dont le CS 22 fait partie], causant un préjudice financier potentiel aux intérêts financiers de l’[Union européenne], et une possible violation du statut par un membre du personnel de l’[Union européenne] ».

10      Le 4 juillet 2019, l’OLAF a entendu le requérant dans le cadre de cette enquête. Le requérant a soumis des observations écrites le 3 mars 2020 sur le résumé des faits établis par l’OLAF au terme de ladite enquête.

11      Dans son rapport d’enquête transmis au secrétaire général de la Commission le 8 juin 2020, l’OLAF a conclu que le requérant avait enfreint les articles 11 et 21 du statut en acceptant l’inclusion de la société en cause dans l’équipe de consultants assignés à l’exécution du CS 22 sans en informer sa hiérarchie.

12      Le 23 février 2021, le requérant a été informé de l’ouverture de la procédure prédisciplinaire par l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »). Il a été invité à soumettre ses commentaires sur le rapport d’enquête de l’OLAF au cours d’une audition avec l’Office d’investigation et de discipline de la Commission (IDOC), qui s’est déroulée le 18 mars 2021.

13      Les 26 mars et 20 avril 2021, l’IDOC a reçu des commentaires écrits de la part du requérant.

14      Le 20 août 2021, l’AIPN a informé le requérant de l’ouverture d’une procédure disciplinaire sans consultation du conseil de discipline, conformément à l’article 3, paragraphe 1, sous c), i), de l’annexe IX du statut. Puis, le 21 septembre 2021, il a été entendu par l’AIPN, au titre de l’article 11 de l’annexe IX du statut.

15      Le 12 octobre 2021, l’AIPN a adopté la décision attaquée. Elle y a considéré que le requérant avait manqué d’informer sa hiérarchie de l’inclusion de la société en cause dans l’exécution du CS 22. L’AIPN a conclu que ce comportement constituait un manquement à l’article 21 du statut. Elle n’a cependant pas adopté de sanction disciplinaire à son égard, dès lors que, d’une part, le requérant avait coopéré sans entrave tout au long de la procédure administrative et que, d’autre part, aucun élément du dossier n’indiquait qu’il avait agi par manque de loyauté envers l’institution, mais plutôt dans un souci de bonne exécution du CS 22, notamment au vu du retard pris par les personnes responsables de l’exécution de ce dernier. L’AIPN s’est donc limitée à lui adresser une mise en garde au titre de l’article 3, paragraphe 1, sous b), de l’annexe IX du statut.

16      Le 12 novembre 2021, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision attaquée.

17      Le 22 mars 2022, la réclamation a été rejetée par une décision de l’AIPN (ci-après la « décision rejetant la réclamation »).

 Conclusions des parties

18      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de réparation de son préjudice moral et financier ;

–        condamner la Commission aux entiers dépens.

19      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner le requérant aux entiers dépens.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation

20      À l’appui de sa demande en annulation de la décision attaquée, le requérant soulève quatre moyens. Le premier est tiré d’une « erreur manifeste d’interprétation », le deuxième est tiré d’un abus de pouvoir, le troisième est tiré d’une violation des droits de la défense et le quatrième est tiré d’une violation de l’article 21 du statut.

21      Il convient d’examiner tout d’abord le quatrième moyen, dans la mesure où la décision attaquée est fondée sur la constatation d’un manquement du requérant à ses obligations découlant de l’article 21 du statut.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 21 du statut

22      Le quatrième moyen se divise, en substance, en quatre branches. La première branche est tirée d’une interprétation prétendument erronée de l’article 21 du statut par la Commission. Dans le cadre de la deuxième branche, le requérant fait valoir qu’il n’était pas nécessaire d’informer la hiérarchie de l’ajout de la société en cause à l’exécution du CS 22. Par la troisième branche, le requérant soutient que ce n’était pas à lui qu’il incombait d’informer sa hiérarchie à ce sujet. Par la quatrième branche, le requérant soutient que la hiérarchie avait, en tout état de cause, connaissance de l’ajout de la société en cause.

–       Sur la première branche du quatrième moyen, tirée d’une interprétation erronée de l’article 21 du statut par la Commission

23      Le requérant fait valoir que l’article 21 du statut ne porte pas sur une quelconque obligation d’information, mais seulement sur celle d’assister et de conseiller la hiérarchie.

24      La Commission soutient que cette branche est irrecevable pour violation de la règle de la concordance entre la réclamation et la requête, dans la mesure où elle est invoquée pour la première fois dans le cadre de la procédure devant le Tribunal.

25      À titre subsidiaire, la Commission conclut au rejet de cette branche comme étant non fondée.

26      Aux termes de l’article 91, paragraphe 2, du statut, un recours n’est recevable que si l’AIPN a été préalablement saisie d’une réclamation.

27      Il ressort d’une jurisprudence constante sur la règle de la concordance entre la réclamation et la requête subséquente que, sous peine d’irrecevabilité, un moyen soulevé devant le juge de l’Union européenne doit l’avoir déjà été dans le cadre de la procédure précontentieuse, afin que l’AIPN ait été mise en mesure de connaître d’une manière suffisamment précise les critiques que l’intéressé formulait à l’encontre de la décision contestée [voir arrêt du 25 juin 2020, XH/Commission, T‑511/18, EU:T:2020:291, point 57 (non publié) et jurisprudence citée].

28      Partant, d’après la règle de la concordance, l’objet et la cause de la requête doivent être les mêmes que ceux de la réclamation [voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 2020, XH/Commission, T‑511/18, EU:T:2020:291, points 58 et 59 (non publiés) et jurisprudence citée]. Par conséquent, les conclusions présentées dans la requête ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que ceux invoqués dans la réclamation. Néanmoins, ces chefs de contestation peuvent être développés par la présentation de moyens et d’arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s’y rattachant étroitement (arrêt du 20 mai 1987, Geist/Commission, 242/85, EU:C:1987:234, point 9).

29      Pour qu’un moyen qui n’a pas été invoqué de manière explicite dans la réclamation administrative préalable soit recevable devant le Tribunal, il suffit que la partie requérante s’y soit, à ce stade, référée de manière implicite. En effet, puisque la procédure précontentieuse a un caractère informel et que les intéressés agissent en général, à ce stade, sans le concours d’un avocat, l’administration est tenue de ne pas interpréter les réclamations de façon restrictive, mais au contraire de les examiner dans un esprit d’ouverture (voir, en ce sens, arrêts du 29 janvier 1997, Vanderhaeghen/Commission, T‑297/94, EU:T:1997:8, point 37, et du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, EU:T:2013:557, point 76). De plus, l’article 91 du statut ne doit pas avoir pour effet de lier, de façon rigoureuse et définitive, la phase contentieuse éventuelle, dès lors que le recours contentieux ne modifie ni la cause ni l’objet de la réclamation [voir arrêt du 25 juin 2020, XH/Commission, T‑511/18, EU:T:2020:291, point 59 (non publié) et jurisprudence citée].

30      En l’espèce, il est vrai que le requérant, dans le cadre de sa réclamation, ne conteste pas explicitement l’interprétation de l’article 21 du statut retenue par la Commission. Il y soulève cependant la question de savoir quelle personne aurait dû informer sa hiérarchie de l’ajout de la société en cause à l’exécution du CS 22. Les considérations figurant dans la requête et relatives à l’interprétation de l’article 21 du statut reposent donc sur la même cause que les conclusions invoquées dans la réclamation.

31      Il en résulte que la première branche du quatrième moyen est recevable.

32      En ce qui concerne son bien-fondé, il convient de relever que, selon l’article 21, premier alinéa, du statut, le « fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est tenu d’assister et de conseiller ses supérieurs ; il est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées ».

33      Selon la jurisprudence, l’article 21, premier alinéa, du statut établit un devoir de loyauté et de coopération qui incombe à tout fonctionnaire à l’égard de l’institution dont il relève et de ses supérieurs (voir arrêt du 16 mars 2004, Afari/BCE, T‑11/03, EU:T:2004:77, point 192 et jurisprudence citée).

34      Il en ressort notamment que le devoir de conseil et d’assistance, tel que défini à l’article 21 du statut, peut, en vue du principe hiérarchique dont il est l’expression, imposer au fonctionnaire l’obligation d’informer ses supérieurs hiérarchiques sur certains aspects liés à l’exécution de ses tâches (voir, en ce sens, ordonnance du 13 février 2014, CX/Commission, F‑5/14 R, EU:F:2014:21, point 67).

35      En effet, l’article 21, premier alinéa, du statut ne définit pas de façon exhaustive les formes que les obligations d’assistance et de conseil peuvent prendre dans un cas d’espèce. Par conséquent, il n’exclut notamment pas qu’un fonctionnaire soit obligé, en vertu de cette disposition, d’assister et de conseiller ses supérieurs en leur transmettant une information.

36      Il résulte de ce qui précède que la Commission n’a pas commis d’erreur de droit en interprétant l’article 21 du statut en ce sens qu’il impliquait notamment une obligation d’information de la part d’un fonctionnaire à l’égard de sa hiérarchie.

37      Par conséquent, il convient de rejeter la première branche du quatrième moyen comme non fondée.

–       Sur la deuxième branche du quatrième moyen, tirée du fait qu’il n’était pas nécessaire d’informer la hiérarchie du requérant

38      Le requérant soutient que l’inclusion de la société en cause dans l’exécution du CS 22 n’était pas susceptible de déclencher un quelconque devoir d’information. Il fait valoir que cette inclusion n’avait aucun impact budgétaire et qu’une opération de renforcement d’une équipe est une pratique commune qui ne justifie pas une communication à la hiérarchie.

39      La Commission conteste ces arguments.

40      Il convient de rappeler à cet égard que, dans le cas d’espèce, le requérant, son chef d’unité et l’ordonnateur subdélégué ont, d’un commun accord, décidé d’exclure la société en cause de l’exécution du CS 22 (voir point 5 ci-dessus).

41      Dans ces circonstances, les devoirs de loyauté et de coopération définis à l’article 21 du statut exigeaient du requérant qu’il assure le respect de la décision d’exclusion et, le cas échéant, qu’il informe sa hiérarchie des difficultés rencontrées dans l’exécution du CS 22 afin qu’elle puisse apprécier l’opportunité, au regard de l’intérêt du service, de revoir cette décision. Or, le respect de cette décision a été remis en question après l’inclusion, par le consortium, avec l’accord du requérant, de la société en cause dans l’équipe de consultants chargés de l’exécution du CS 22.

42      Par conséquent, au vu de l’incompatibilité de l’inclusion de la société en cause au projet avec la décision prise d’un commun accord avec sa hiérarchie, le requérant aurait dû informer celle-ci de ce changement.

43      Contrairement à ce que le requérant fait valoir, l’existence d’une obligation d’information de sa part ne dépendait pas d’autres facteurs, tels que les conséquences budgétaires de l’ajout de la société en cause. Elle ne dépendait pas non plus de la question de savoir s’il s’agissait d’une pratique communément acceptée dans d’autres circonstances. Dans le cas d’espèce, ce devoir d’information découlait simplement du fait que le requérant savait que l’inclusion de la société en cause allait à l’encontre de la décision d’exclusion, de sorte que la nécessité d’informer ses supérieurs hiérarchiques ne pouvait pas être laissée à sa discrétion.

44      La conclusion selon laquelle le requérant aurait dû informer son chef d’unité et l’ordonnateur subdélégué de l’inclusion de la société en cause dans l’exécution du CS 22 n’est ni remise en cause par son argument selon lequel il était opérationnellement directement rattaché au directeur général faisant fonction qu’il avait informé des difficultés rencontrées dans le cadre de l’exécution du contrat et des actions qu’il avait prises pour les résoudre, ni par son argument selon lequel le chef d’unité n’était pas son supérieur hiérarchique au moment des faits.

45      À cet égard, il convient de constater que ce dernier argument n’est en rien étayé et qu’il est en contradiction avec la présentation des faits dans la requête elle-même, dans la mesure où le requérant y indique que le chef d’unité était son « chef d’unité sur le plan administratif ».

46      En tout état de cause, le requérant savait que ledit chef d’unité et l’ordonnateur subdélégué avaient convenu de l’exclusion de la société en cause de l’exécution du CS 22. Compte tenu de son implication personnelle dans cette décision, il n’y avait aucune justification valable pour ne pas les informer des évolutions contraires à cette décision. Dès lors, même s’il est vrai, comme l’a souligné l’AIPN, que le requérant n’a pas agi par manque de loyauté envers l’institution, mais plutôt dans un souci de bonne exécution du CS 22 en approuvant l’inclusion de la société en cause dans l’exécution de ce contrat, les dispositions de l’article 21 du statut lui imposaient néanmoins d’en informer sa hiérarchie afin de permettre à son chef d’unité et à l’ordonnateur subdélégué d’apprécier l’opportunité de revenir sur la décision d’exclusion.

47      Ainsi, les arguments du requérant ne sont pas susceptibles de remettre en cause la décision attaquée, complétée à cet égard par la décision rejetant la réclamation.

48      Par conséquent, il convient de rejeter la deuxième branche du quatrième moyen.

–       Sur la troisième branche, tirée du fait qu’il incombait au consortium et non au requérant d’informer sa hiérarchie

49      Le requérant soutient qu’il ne lui appartenait pas de notifier à l’ordonnateur subdélégué la réintégration de la société en cause dans l’exécution du CS 22, mais que cette responsabilité incombait plutôt au consortium lui-même.

50      La Commission conteste cet argument.

51      À cet égard, il convient de constater que la circonstance, à la supposer établie, que le consortium était tenu d’informer l’ordonnateur subdélégué ne modifie en rien les obligations du requérant décrites au point 42 ci-dessus. En effet, il découle de ce qui précède que le devoir de loyauté et de coopération qui incombe au requérant en vertu de l’article 21 du statut fait peser sur lui une obligation d’information qui existe indépendamment des obligations du consortium.

52      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument du requérant selon lequel il n’était pas responsable de la décision de réintégrer la société en cause dans l’exécution du CS 22. Les obligations d’information du requérant découlant de l’article 21 du statut ont été déclenchées par la décision d’exclusion. À partir du moment où le requérant a eu connaissance de l’inclusion de la société en cause dans l’exécution du CS 22 et donc du fait que le respect de la décision d’exclusion de sa hiérarchie avait été remis en question, il était obligé d’en informer sa hiérarchie, conformément aux devoirs découlant de l’article 21 du statut. La question de savoir s’il portait une quelconque responsabilité dans la décision prise par le consortium de réintégrer la société en cause dans l’exécution du CS 22 est, à cet égard, sans pertinence.

53      En ce qui concerne la question de savoir si le requérant possédait les éléments nécessaires pour informer sa hiérarchie, les éléments du dossier ne lui permettent pas de nier que tel était le cas.

54      En effet, selon les déclarations du requérant faites lors de l’enquête de l’IDOC, il avait donné son accord à la réintégration de la société en cause parce qu’il avait estimé que la situation ne ferait naître aucun conflit d’intérêts.

55      De même, dans le cadre de la requête, le requérant répète ne pas avoir vu de conflit d’intérêts ni de coûts budgétaires additionnels pour l’OLAF. Ces considérations impliquent nécessairement que le requérant avait connaissance de la réintégration de la société en cause. De plus, dans la requête, le requérant soutient avoir contacté la société en cause lui-même en ce qui concernait les problèmes d’exécution du CS 22. Par la suite, la société en cause aurait contacté le consortium qui aurait décidé de la réintégrer. Le cours de ces évènements et l’implication du requérant excluent toute supposition selon laquelle il n’était pas au courant de la réintégration de la société en cause dans l’exécution du CS 22.

56      Il s’ensuit que la troisième branche du quatrième moyen doit être rejetée.

–       Sur la quatrième branche du quatrième moyen, tirée du fait que la hiérarchie avait en tout état de cause eu connaissance de l’ajout de la société

57      Le requérant fait valoir que sa hiérarchie était, même sans en avoir été informée par lui, au courant de la réintégration de la société en cause dans l’exécution du CS 22.

58      À cet égard, le requérant soutient que des membres de l’équipe de l’ordonnateur subdélégué et de l’équipe du chef d’unité ont participé à de nombreuses réunions de travail menées par la société en cause dans le cadre de l’exécution du CS 22 à partir de mai 2018, que ces réunions ont été tenues dans une salle de réunion située en face du bureau de l’ordonnateur subdélégué et que le requérant a organisé une réunion avec le chef d’unité relative à un problème de sécurité durant laquelle il a explicitement mentionné l’implication du propriétaire de la société en cause dans la découverte de ce problème.

59      Par conséquent, le requérant n’aurait pas été tenu d’informer sa hiérarchie de l’implication de la société en cause.

60      La Commission conteste cet argument.

61      À cet égard, il convient de constater que le chef d’unité du requérant et l’ordonnateur subdélégué ont indiqué lors de l’enquête de l’OLAF qu’ils s’étaient rendu compte de l’inclusion de la société en cause pour la première fois en novembre 2018.

62      Si le requérant invoque des indices au soutien de son affirmation selon laquelle sa hiérarchie était au courant de l’inclusion de la société en cause dans l’exécution du CS 22, aucun de ces indices n’est susceptible de démontrer qu’elle l’était effectivement avant la date indiquée par le chef d’unité du requérant et l’ordonnateur subdélégué. En effet, comme l’a indiqué l’AIPN dans la décision rejetant la réclamation, aucune pièce du dossier ne confirme la thèse du requérant.

63      Dans les circonstances décrites par le requérant, même à les supposer établies, celui-ci ne pouvait pas présumer que sa hiérarchie était au courant d’une décision allant à l’encontre de la décision d’exclusion sans en obtenir la confirmation. Aussi, l’argumentation du requérant est sans incidence sur la question de savoir s’il était obligé d’en informer la hiérarchie.

64      Par ailleurs, les arguments du requérant selon lesquels l’ordonnateur subdélégué était au courant de l’inclusion de la société en cause dans l’exécution du CS 22 sont contraires à ses propres déclarations faites au cours de l’enquête, dans le cadre de laquelle il a admis que l’ordonnateur subdélégué n’était peut-être pas au courant.

65      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la quatrième branche du quatrième moyen et, partant, le quatrième moyen dans son intégralité comme étant non fondés.

 Sur le premier moyen, tiré de l’« erreur manifeste d’interprétation du “conflit d’intérêts” »

66      Le requérant soutient que la Commission a commis une « erreur manifeste d’interprétation » en présumant l’existence d’un conflit d’intérêts de la société en cause concernant l’exécution du CS 22.

67      Plus particulièrement, le requérant fait valoir que l’enquête menée par l’OLAF a démontré que le propriétaire de la société en cause n’avait pas participé à la rédaction des spécifications du CS 22. De plus, il soutient que son chef d’unité n’a jamais démontré de liens d’intérêts qui auraient pu corrompre l’objectivité ou la neutralité du propriétaire de la société en cause dans l’exécution du CS 22, et ce même s’il avait été impliqué dans la rédaction des spécifications du CS 22. Par conséquent, il n’y aurait eu aucun conflit d’intérêts et aucune raison d’exclure la société en cause de l’exécution du CS 22.

68      En outre, le requérant estime que la direction générale de l’informatique est la seule instance habilitée à prendre position sur la question de savoir s’il existe un conflit d’intérêts. Il fait valoir que l’OLAF et l’IDOC auraient dû prendre en compte l’avis de la direction générale de l’informatique, qui avait conclu à l’absence d’un tel conflit.

69      La Commission conteste ces arguments.

70      À cet égard, il convient de constater que la décision attaquée se limite à reprocher au requérant d’avoir « failli à l’obligation d’informer [sa] hiérarchie de la décision d’intégrer la [société en cause] à l’exécution d’un contrat spécifique, alors même que cette dernière avait été exclue d’un commun accord entre [lui-même] et [sa] hiérarchie ». En revanche, la décision attaquée ne se prononce pas sur l’existence, ou non, d’un conflit d’intérêts de la part de la société en cause.

71      Ainsi, à supposer même qu’aucun conflit d’intérêts n’existait en l’espèce, cette circonstance, étrangère au comportement litigieux du requérant, ne permettrait en aucune manière de remettre en cause la décision attaquée.

72      Partant, le premier moyen doit être rejeté comme inopérant.

 Sur le deuxième moyen, tiré de l’abus de pouvoir exercé par le chef d’unité du requérant

73      Le requérant soutient que son chef d’unité a exercé un abus de pouvoir.

74      Plus particulièrement, le requérant fait valoir que le chef d’unité n’était responsable que des contrôles ex-post et aurait dû s’abstenir d’intervenir dans la procédure d’engagement budgétaire préalable à la signature du CS 22. De plus, il soutient que le chef d’unité faisait pression sur l’ordonnateur subdélégué en prétextant l’existence d’un conflit d’intérêts.

75      La Commission soutient que ce moyen est irrecevable en raison de la violation de la règle de la concordance entre la réclamation et la requête, dans la mesure où il est invoqué pour la première fois dans le cadre de la procédure devant le Tribunal.

76      À titre subsidiaire, la Commission conclut au rejet de ce moyen comme étant non fondé.

77      Il convient de constater que la réclamation ne fait pas état d’un prétendu abus de pouvoir par le chef d’unité. En raison de l’absence totale dans la réclamation d’un point de référence, même implicite, à cet égard, et ce même en examinant cette réclamation dans un esprit d’ouverture, le présent moyen ne peut pas être regardé comme se rattachant étroitement aux arguments développés dans la réclamation et ne constitue pas un développement ou une précision recevable de la réclamation.

78      Ce constat n’est pas remis en cause par l’argument du requérant figurant dans sa réplique selon lequel la question de l’existence ou non d’un conflit d’intérêts a été évoquée dans le cadre de la réclamation. Le non-respect de la règle de la concordance ne concerne pas les arguments tirés de l’interprétation de la notion de conflit d’intérêts, mais d’un prétendu abus de pouvoir exercé par le chef d’unité. Même à la supposer établie, l’interprétation erronée d’une notion de droit ne permet pas de conclure, en soi et nécessairement, à un abus de pouvoir, lequel exige la démonstration en fait et en droit d’autres éléments.

79      Par conséquent, en application de la jurisprudence rappelée aux points 27 à 29 ci-dessus, il convient de rejeter le deuxième moyen comme irrecevable.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation des droits de la défense

80      Le troisième moyen se divise, en substance, en trois branches. La première branche est tirée de l’impossibilité pour le requérant d’accéder à sa boîte électronique professionnelle. La deuxième branche est tirée du refus de l’OLAF et de l’IDOC de procéder à l’audition de témoins sollicitée par le requérant. La troisième branche est tirée d’un manque de transmission et d’une transmission tardive de témoignages par l’IDOC au requérant.

–       Sur la première branche du troisième moyen, tirée de l’impossibilité pour le requérant d’accéder à sa boîte électronique professionnelle

81      Le requérant fait valoir qu’il s’est vu priver de l’accès à sa boîte électronique professionnelle. Il soutient que certains courriels qui se trouvent dans sa boîte lui auraient permis de démontrer sa parfaite administration du CS 22, de construire sa défense et de produire les pièces indispensables au soutien de son argumentaire. Plus particulièrement, au stade de la réplique, le requérant fait valoir que la preuve de la prétendue connaissance par son chef d’unité de l’ajout de la société en cause à l’exécution du CS 22 se trouve dans sa boîte électronique professionnelle.

82      La Commission conteste ces arguments.

83      Il convient de rappeler que, selon le droit de l’Union, une violation des droits de la défense, en particulier du droit d’être entendu, n’entraîne l’annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l’absence de cette irrégularité, cette procédure aurait pu aboutir à un résultat différent (arrêt du 3 juillet 2014, Kamino International Logistics et Datema Hellmann Worldwide Logistics, C‑129/13 et C‑130/13, EU:C:2014:2041, point 79).

84      Pour établir que tel est le cas, la partie requérante doit expliquer quels sont les arguments et les éléments qu’elle aurait fait valoir si ses droits de la défense avaient été respectés et démontrer, le cas échéant, que ces arguments et ces éléments auraient pu conduire dans son cas à un résultat différent [voir arrêt du 3 juillet 2019, PT/BEI, T-573/16, EU:T:2019:481, point 269 (non publié) et jurisprudence citée].

85      En l’espèce, il y a lieu de constater que le requérant se borne à indiquer de manière générale que, s’il avait eu accès à sa boîte aux lettres électronique, il aurait pu démontrer sa parfaite administration du CS 22. Cet argument ne permet d’identifier ni les détails de l’administration prétendument parfaite de ce contrat par le requérant, ni le contenu des courriels que le requérant aurait pu utiliser. Le requérant ne fait notamment pas valoir qu’il aurait pu démontrer, s’il avait eu accès à sa boîte aux lettres électronique, qu’il avait informé sa hiérarchie de l’inclusion de la société en cause dans l’équipe de consultants du CS 22 par l’un des courriels, contrairement à ce qui lui est reproché dans la décision attaquée. En tout état de cause, le requérant ne conteste pas le fait qu’il n’a jamais informé sa hiérarchie de cette inclusion litigieuse.

86      S’agissant plus particulièrement de l’affirmation soulevée au stade de la réplique selon laquelle la « preuve [de la prétendue connaissance par la hiérarchie de l’ajout de la société en cause] se trouve dans la boîte de courriels du requérant », ce dernier n’explique tout d’abord pas quelle forme prendrait cette preuve et se limite à affirmer de manière générale l’existence d’une preuve. Cette affirmation générale n’indique aucunement que le requérant aurait soumis ou pu soumettre, dans l’hypothèse où il aurait eu accès à sa boîte aux lettres électronique, des arguments et des éléments qui auraient pu conduire en l’espèce à un résultat différent de la procédure administrative. La décision attaquée repose uniquement sur le fait que le requérant n’a pas informé sa hiérarchie de l’intégration de la société en cause dans l’exécution du CS 22. Tel que cela est expliqué au point 63 ci-dessus, l’argumentation tirée d’une prétendue connaissance par sa hiérarchie de la réintégration de la société en cause dans l’exécution du CS 22 est sans incidence à cet égard. Il en résulte que les arguments ne répondent pas aux exigences de la jurisprudence citée aux points 83 et 84 ci-dessus.

87      Partant, il convient de rejeter la première branche du troisième moyen.

–       Sur la deuxième branche du troisième moyen, tirée du refus de l’OLAF et de l’IDOC de procéder à l’audition de témoins sollicitée par le requérant

88      Le requérant fait valoir qu’en refusant de procéder à l’audition de quatre autres témoins, l’OLAF et l’IDOC ont porté gravement atteinte à ses droits de la défense, alors que ces témoins auraient pu apporter un éclairage indispensable sur les faits qui lui sont imputés.

89      La Commission conteste cet argument.

90      À cet égard, il importe de rappeler que, dans l’exercice de leurs devoirs d’enquête administrative, l’enquêteur et le responsable de l’enquête disposent d’un large pouvoir d’appréciation quant à l’utilité de procéder à l’audition d’un témoin, mais que ce pouvoir d’appréciation n’est pas discrétionnaire, dans la mesure où il doit être exercé en tenant compte de ce qui est nécessaire pour établir dans un délai raisonnable tous les éléments de fait et de droit pertinents, à charge comme à décharge, conformément au principe de bonne administration et, plus spécifiquement, à celui d’impartialité. Dans ces conditions, si, en l’absence de toute initiative en ce sens des enquêteurs, le fonctionnaire ou l’agent concerné estime opportune l’audition d’un témoin, il lui incombe d’en demander la convocation et d’étayer sa demande en avançant des indices précis et pertinents de nature à expliquer en quoi le témoignage demandé peut présenter de l’intérêt pour la manifestation de la vérité (arrêt du 5 octobre 2020, Broughton/Eurojust, T‑87/19, non publié, EU:T:2020:464, points 81 et 82).

91      Or, en l’occurrence, il convient de relever que le requérant se borne à soutenir de manière générale que les témoins auraient pu apporter un éclairage indispensable sur son cas. Ainsi, le requérant n’explique pas de façon suffisamment précise quels seraient les arguments ou faits que les témoins auraient pu présenter dans le cadre de l’enquête de l’OLAF ou de l’IDOC et qui auraient pu avoir une incidence sur la conclusion retenue dans la décision attaquée. Il ne soutient notamment pas que des témoins auraient pu indiquer qu’il avait informé la hiérarchie de l’inclusion de la société en cause dans l’exécution du CS 22, contrairement à ce qui lui est reproché dans la décision attaquée.

92      Par conséquent, le requérant n’explique pas quels seraient les arguments ou les éléments qu’il aurait pu faire valoir à l’égard de la décision attaquée si les témoins avaient été entendus, de sorte qu’il ne démontre pas que l’audition de ces témoins aurait pu conduire, à l’égard de la décision attaquée, à un résultat différent. Ainsi, son argumentation ne répond pas aux exigences de la jurisprudence citée aux points 83 et 84 ci-dessus.

93      Partant, la deuxième branche du troisième moyen doit être rejetée.

–       Sur la troisième branche du troisième moyen, tirée d’un manque de transmission de témoignages par l’IDOC

94      Le requérant soutient qu’il n’a reçu les rapports d’audition par l’OLAF du chef d’unité, de l’ordonnateur subdélégué et du consultant initialement chargé au sein du consortium de l’exécution du CS 22 qu’après sa propre audition par l’IDOC. En outre, les auditions du propriétaire de la société en cause, du représentant du consortium et d’un autre employé du consortium ne lui auraient jamais été transmises. Il fait valoir que ces auditions revêtaient un caractère essentiel pour sa défense dans le cadre de sa première audition par l’IDOC.

95      La Commission soutient que cette branche du troisième moyen est irrecevable pour violation de la règle de la concordance entre la réclamation et la requête, dans la mesure où elle est invoquée pour la première fois dans le cadre de la procédure devant le Tribunal.

96      À titre subsidiaire, la Commission conclut au rejet de cette branche comme étant non fondée.

97      Tout d’abord, il importe de rappeler que les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue quant aux éléments sur lesquels l’administration entend fonder sa décision (voir arrêt du 5 octobre 2016, ECDC/CJ, T‑395/15 P, non publié, EU:T:2016:598, point 55 et jurisprudence citée). À cet effet, ils doivent bénéficier d’un délai suffisant (voir, en ce sens, arrêt du 1er septembre 2021, KN/CESE, T‑377/20, EU:T:2021:528, point 115 et jurisprudence citée).

98      Or, s’agissant des procès-verbaux des auditions par l’OLAF du chef d’unité, de l’ordonnateur subdélégué et du consultant initialement chargé au sein du consortium de l’exécution du CS 22, il y a lieu de constater que ceux-ci ont bien été communiqués au requérant avant l’adoption de la décision attaquée et que ce dernier ne conteste pas avoir disposé d’un délai suffisant pour faire connaître utilement son point de vue sur ces témoignages. Le fait qu’ils aient été communiqués seulement après la propre audition du requérant par l’IDOC ne constitue donc pas une violation des droits de la défense de celui-ci.

99      Ensuite, il y a lieu de constater qu’il ressort du dossier que les témoignages du propriétaire de la société en cause et de l’employé du consortium ont été transmis au requérant avec l’invitation à l’audition par l’IDOC. Par conséquent, il convient de rejeter l’argument relatif à la transmission de leurs témoignages au motif qu’il est erroné en fait.

100    Enfin, il convient de constater que le requérant se borne à suggérer que les auditions des témoins revêtaient un caractère essentiel pour sa défense. Il n’avance aucun argument ou élément qu’il aurait pu faire valoir à l’égard de la décision attaquée s’il avait reçu les témoignages à une date antérieure. Ainsi, le requérant ne démontre pas que la réception des témoignages avant sa propre audition par l’IDOC aurait pu conduire, à l’égard de la décision attaquée, à un résultat différent, contrairement à ce qui est exigé par la jurisprudence citée aux points 83 et 84 ci-dessus.

101    Par conséquent, il convient de rejeter la troisième branche du troisième moyen, sans qu’il soit nécessaire d’examiner sa recevabilité, et, partant, le troisième moyen dans son intégralité.

 Sur les conclusions indemnitaires

102    Le requérant demande au Tribunal de condamner la Commission au paiement de dommages et intérêts d’un montant de 20 000 euros à titre de réparation de son préjudice moral et financier. Il soutient que l’enquête injuste, menée après qu’il avait été injustement démis de ses fonctions, a provoqué un violent choc psychologique et plusieurs mois de maladie. Le temps et les débours qui auraient été nécessaires pour la préparation de sa défense s’y ajouteraient.

103    La Commission conclut au rejet de la demande indemnitaire.

104    Selon une jurisprudence constante, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice doivent être rejetées dans la mesure où elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation, qui ont elles-mêmes été rejetées soit comme irrecevables soit comme non fondées (voir arrêt du 1er avril 2009, Valero Jordana/Commission, T‑385/04, EU:T:2009:97, point 90 et jurisprudence citée).

105    Dans le cas d’espèce, les conclusions indemnitaires, peu développées et qui ne sont étayées par aucune preuve, ne revêtent pas un caractère autonome par rapport aux conclusions en annulation. Dès lors que les conclusions en annulation de la décision attaquée doivent être rejetées, il y a également lieu de rejeter les conclusions indemnitaires et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

106    Conformément à l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

107    En l’espèce, le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. José Das Neves est condamné aux dépens.

Svenningsen

Mac Eochaidh

Laitenberger

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 février 2023.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

M. van der Woude


*      Langue de procédure : le français.