Language of document : ECLI:EU:T:2006:245

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

7 septembre 2006 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Marques figuratives antérieures représentant un sapin comprenant, pour certaines, des éléments verbaux – Demande de marque figurative comprenant l’élément verbal ‘Aire Limpio’ – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), et article 73 du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑168/04,

L & D, SA, établie à Huercal de Almeria (Espagne), représentée initialement par Me M. Knospe, puis par Mes  S. Miralles Miravet et A. Castedo Garcia, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme J. García Murillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Julius Sämann Ltd, établie à Zug (Suisse), représentée par Mes A. Castán Pérez‑Gómez et E. Armijo Chávarri, avocats,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 15 mars 2004 (affaire R  326/2003-2), relative à une procédure d’opposition entre Julius Sämann Ltd et L & D, SA,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de M. H. Legal, président, Mmes P. Lindh et I. Wiszniewska-Białecka, juges,

greffier : Mme B. Pastor, greffier adjoint,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 mai 2004,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 21 décembre 2004,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 17 janvier 2005,

à la suite de l’audience du 12 janvier 2006,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 30 avril 1996, L & D, SA a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif, comprenant un élément verbal, reproduit ci-après :

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3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent des classes 3, 5 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques » ;

–        classe 5 : « Produits d’ambiance parfumés » ;

–        classe 35 : « Publicité; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ».

4        Le 29 juin 1998, la demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 47/98.

5        Le 29 septembre 1998, Julius Sämann Ltd a formé une opposition, au titre de l’article 42 du règlement nº 40/94, à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée.

6        L’opposition était fondée sur plusieurs marques antérieures.

7        Il s’agissait, en premier lieu, de la marque communautaire figurative n° 91991, déposée le 1er avril 1996 et enregistrée pour les produits relevant de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice, reproduite ci-après :

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8        Il s’agissait, en second lieu, des marques internationales et nationales figuratives, comprenant pour certaines des éléments verbaux, ayant fait l’objet des enregistrements internationaux nos 328917, 612525, 178969, 216415, 328915, 328916, 475333 et 539068 ; autrichien nº 109639 ; suédois nos 217829, 225214 et 89348 ; espagnol nº 1575391 ; danois nº 03157/1964; finlandais nos 109644 et 45548 ; allemand nº 984362, pour les produits compris dans les classes 3 et/ou 5 au sens de l’arrangement de Nice, et qui sont reproduites ci-après :

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9        L’opposition était fondée sur tous les produits protégés par les marques antérieures et visait tous les produits et services désignés dans la demande de marque communautaire.

10      À l’appui de son opposition, l’intervenante invoquait les motifs relatifs de refus d’enregistrement visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94.

11      Par décision du 25 février 2003, la division d’opposition de l’OHMI a rejeté l’opposition dans son intégralité.

12      Le 23 avril 2003, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de la division d’opposition.

13      Par décision du 15 mars 2004 (ci-après  la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a partiellement fait droit au recours de l’intervenante.

14      S’agissant du recours fondé sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, celui-ci a été accueilli en ce qui concerne les produits en cause. En revanche, en ce qui concerne les services en cause, le recours a été rejeté et la chambre de recours a confirmé la décision de la division d’opposition rejetant l’opposition à l’enregistrement. S’agissant du recours fondé sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, la chambre de recours l’a rejeté en l’absence de preuve du préjudice porté à la marque antérieure ou du profit qui serait indûment tiré de son caractère distinctif.

15      Quant à l’examen de la similitude des marques en conflit, la chambre de recours a procédé à une comparaison entre, d’une part, la marque dont l’enregistrement est demandé et, d’autre part, la marque communautaire antérieure nº 91991, en tant que marque représentative des autres marques antérieures. Elle a considéré que cette marque communautaire antérieure avait acquis un caractère distinctif à la suite de l’usage et de la notoriété d’une autre marque antérieure, dont la forme est essentiellement identique à celle de la marque communautaire n° 91991.

16      La chambre de recours a relevé que les marques en conflit étaient toutes deux constituées d’un sapin représenté avec des branches formées par des excroissances et des retraits sur les parties latérales et un tronc très court posé sur une partie plus large en guise de socle.

17      Elle a rappelé que la similitude conceptuelle peut conduire à un risque de confusion, notamment lorsque la marque antérieure possède un caractère distinctif particulier, soit intrinsèquement, soit grâce à la notoriété dont elle jouit auprès du public.

18      Selon la chambre de recours, il apparaît, à la lumière des preuves produites, que la marque antérieure jouissait d’une notoriété au moins dans une partie de la Communauté, notamment en Italie, où sa part de marché a été estimée à plus de 50 %, et qu’elle avait fait l’objet d’un usage prolongé sur ce même territoire.

19      Elle a déduit de ces éléments que la similitude conceptuelle des deux marques en conflit pourrait créer, au moins en Italie, un risque de confusion dans l’esprit du public concerné. Les différences entre les marques en conflit, reposant essentiellement sur le fait que le sapin de la marque dont l’enregistrement est demandé constitue un cadre dans lequel se trouve le dessin d’un personnage animé ainsi que l’élément verbal « aire limpio », ne permettraient pas d’éviter ce risque de confusion, car la marque dont l’enregistrement est demandé pourrait être perçue, par le public concerné, comme une variante amusante et animée de la marque antérieure.

 Conclusions des parties

20      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les points 1 et 3 du dispositif de la décision attaquée, dans la mesure où celle-ci, d’une part, annule partiellement la décision de la division d’opposition et refuse l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant des classes 3 et 5 et, d’autre part, condamne chacune des parties à supporter les frais qu’elle a exposés aux fins des procédures d’opposition et de recours ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

21      L’OHMI et l’intervenante concluent ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

22      La requérante invoque deux moyens tirés respectivement d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 et d’une violation de l’article 73 de ce même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

23      La requérante fait valoir que l’appréciation effectuée par la chambre de recours quant à la similitude des marques en conflit est erronée. Il n’existerait aucune similitude entre ces marques et les constatations relatives au caractère distinctif de la marque antérieure seraient dès lors inutiles.

24      Deux marques seraient similaires lorsque, du point de vue du public concerné, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne leurs aspects visuel, phonétique et conceptuel. S’agissant des marques complexes, il serait nécessaire de vérifier que la similitude porte sur un élément propre à déterminer l’impression d’ensemble produite par ces marques, à savoir un élément susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public ciblé garde en mémoire. L’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe serait effectuée en prenant en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants. Si la concordance porte sur un élément descriptif pour les produits concernés, elle ne pourrait pas dominer l’impression d’ensemble produite par cette marque et on ne pourrait donc pas conclure à une similitude des marques.

25      La chambre de recours n’aurait pas tenu compte de ces principes, car elle se serait référée uniquement à l’existence d’un « dénominateur commun » entre les marques en conflit, sans examiner les concordances visuelles, phonétiques et conceptuelles et sans établir l’importance de l’élément éventuellement concordant dans l’impression générale produite par la marque complexe dont l’enregistrement est demandé.

26      Tout d’abord, sur le plan phonétique, la marque antérieure ne comporterait aucun élément verbal. Toute similitude phonétique serait donc exclue.

27      Ensuite, sur le plan visuel, la marque antérieure serait composée de la représentation naturaliste de la silhouette d’un sapin, disposée sur un socle carré, tandis que la marque dont l’enregistrement est demandé serait formée par le dessin d’un personnage humoristique ayant une physionomie particulière, enveloppé dans un vêtement dont la silhouette évoque, sous une forme très abstraite, un sapin et qui attirerait l’attention du consommateur sur l’élément verbal « aire limpio ». La marque dont l’enregistrement est demandé serait donc dominée de façon égale par ce personnage humoristique et par l’élément verbal « aire limpio », excluant ainsi toute similitude visuelle.

28      Enfin, sur le plan conceptuel, la simple ressemblance entre les silhouettes des deux signes ne permettrait pas de conclure à l’existence d’une similitude. La circonstance que la silhouette du personnage humoristique puisse rappeler la forme d’un sapin serait inopérante, des similitudes de silhouette n’étant pas des similitudes conceptuelles. En outre, l’image de la silhouette serait reléguée à l’arrière‑plan, la forme du sapin étant altérée par l’image du personnage humoristique, au point de devenir un simple manteau ou une simple enveloppe de ce personnage, plutôt que la représentation de l’image d’un sapin.

29      La requérante en conclut qu’il n’existe aucune similitude entre les marques.

30      À titre subsidiaire, la requérante ajoute que, si l’existence d’une similitude conceptuelle était reconnue, la concordance ne porterait pas sur un élément dominant de la marque, car la silhouette du sapin ne serait pas susceptible de dominer l’impression d’ensemble produite par la marque dont l’enregistrement est demandé, qui serait, au contraire, dominée par la représentation fantaisiste et singulière d’un personnage humoristique et l’inscription « aire limpio ». En outre, la silhouette serait descriptive des produits désignés par la marque dont l’enregistrement est demandé et ne pourrait donc pas, conformément à la jurisprudence, dominer l’impression d’ensemble produite par cette marque.

31      À titre encore plus subsidiaire, la requérante soutient que, si le Tribunal n’excluait pas toute similitude entre les marques en conflit, il n’y aurait néanmoins aucun risque de confusion, car la marque dont l’enregistrement est demandé serait suffisamment éloignée de la marque antérieure.

32      De plus, selon la requérante, la marque antérieure ne peut pas bénéficier d’une protection étendue, car elle ne possède qu’un caractère faiblement distinctif.

33      D’une part, la marque antérieure aurait un caractère insuffisamment distinctif pour trois raisons. Premièrement, la silhouette du sapin serait descriptive des produits tels que des désodorisants et des parfums d’ambiance. Cette appréciation serait confirmée par les « directives pratiques pour l’examen des marques de produits et de services » de l’office des brevets du Royaume-Uni. Deuxièmement, la marque antérieure ne serait constituée, pour l’essentiel, que de la forme du produit qui est commercialisé sous celle-ci. Or, selon la jurisprudence, la fonction essentielle de la marque ne pourrait pas être remplie lorsque le signe concerné se confond avec l’aspect du produit. Tel serait le cas en l’espèce, les produits concernés n’étant composés que d’une tablette plate d’un matériau poreux non gras sur lequel est appliquée une substance aromatique et dont le contour correspond à la silhouette de la marque, la surface de ces produits étant entièrement couverte par la marque.Troisièmement, la forme constituée de la silhouette d’un sapin serait nécessaire à l’obtention du résultat technique recherché par le produit. Or, en vertu des dispositions de l’article 7 du règlement n° 40/94, les formes nécessaires à l’obtention d’un résultat technique seraient exclues de l’enregistrement de la marque. De plus, la description des fonctions du produit, telle qu’elle figure dans la demande de brevet américain déposée par l’intervenante, démontrerait que la forme d’arbre conique utilisée par l’intervenante remplit une fonction technique, à savoir l’extraction progressive et partielle du désodorisant, laquelle pourrait être aisément réalisée par une forme telle que celle du sapin, forme qui apparaît également dans les dessins du brevet. La requérante en conclut que l’intervenante utilise désormais le droit des marques pour tenter d’interdire aux tiers l’utilisation d’une forme autrefois protégée par un brevet.

34      D’autre part, le faible caractère distinctif de la marque antérieure n’aurait pas pu être renforcé a posteriori en raison d’une notoriété accrue par l’usage de la marque en Italie. À cet égard, la requérante avance que, selon la jurisprudence, la notoriété d’une marque ne saurait être établie seulement sur la base de données générales et abstraites, telles que des pourcentages déterminés, et que les arguments relatifs aux chiffres d’affaires et aux investissements publicitaires ne sont pas de nature à déterminer le caractère distinctif d’une marque.

35      Les constatations opérées par la chambre de recours quant à la reconnaissance de la notoriété de la marque antérieure seraient entachées de plusieurs erreurs.

36      Premièrement, l’établissement du caractère distinctif accru de la marque antérieure en Italie n’aurait pas pu être fondé sur les seules indications générales concernant le volume de publicité et le chiffre des ventes, d’autant qu’il s’agit d’un produit de grande consommation et de faible coût. La quantité de produits vendus n’aurait donc pas la même valeur probante que celle des produits durables, prestigieux ou de haute qualité.

37      Deuxièmement, l’OHMI se serait fondé à tort sur le fait que les ventes de désodorisants de l’intervenante en Italie sont supérieures à celles des autres désodorisants pour véhicules et représenteraient une part de marché supérieure à 50 %. Les chiffres de vente du rapport trimestriel de la société Nielsen, qui sont cités dans la déclaration sous serment de l’administrateur délégué de l’intervenante, ne se rapporteraient pas au produit couvert par la marque communautaire n° 91991, mais concerneraient principalement les produits portant la dénomination « arbre magique », commercialisés sous une marque qui serait différente de la marque n° 91991. En outre, ces chiffres se rapporteraient aux années 1997 et 1998, c’est-à-dire à une période largement postérieure à la date du dépôt de la demande de marque communautaire. Les chiffres relatifs aux dépenses publicitaires pour les années 1996 et 1997 seraient inappropriés pour les mêmes raisons, ces publicités visant les désodorisants portant la dénomination « arbre magique » et étant postérieures au 30 avril 1996, date de dépôt de la demande de marque communautaire.

38      Troisièmement, afin d’établir un usage prolongé de la marque antérieure en Italie, la division d’opposition et la chambre de recours se seraient fondées à tort sur le fait que la marque était utilisée en Italie depuis une longue période et y bénéficiait, sous une forme, pour l’essentiel, identique depuis 1954, d’une protection au titre de l’enregistrement international n° 178969. Ce faisant, elles auraient assimilé à tort la date de la demande de marque à l’utilisation effective de cette marque, alors qu’aucune preuve n’aurait été fournie quant à l’utilisation de la marque internationale n° 178969 depuis son enregistrement. Par ailleurs, l’enregistrement n° 178969 concernerait une marque qui comporte un socle blanc et l’élément verbal « car freshner », tandis que l’enregistrement n° 91991 concernerait une marque simplement figurative. En outre, l’enregistrement dans la classe 5 ne porterait pas sur les produits désodorisants en cause en l’espèce mais sur des « désinfectants, produits pour le bain, insecticides, produits chimiques ».

39      Par conséquent, compte tenu de son faible caractère distinctif, la marque antérieure bénéficierait d’une protection réduite et de faibles différences avec la marque dont l’enregistrement est demandé suffiraient à exclure tout risque de confusion entre les deux signes. Ainsi, à supposer même qu’on admette une similitude conceptuelle, celle-ci ne suffirait pas pour créer un risque de confusion. L’image du sapin ne présenterait en effet aucun motif imaginaire et la preuve de la notoriété de la marque n° 91991 n’aurait pas été rapportée.

40      À l’audience, la requérante a également produit et invoqué un arrêt du Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) du 5 avril 2005, qui lui conférerait de manière définitive les droits portant sur la marque espagnole Aire Limpio n° 2033859.

41      La requérante en conclut que la chambre de recours a retenu à tort l’existence d’une similitude entre les marques en conflit et le caractère distinctif accru par l’usage de la marque de l’intervenante. Il n’existerait en fait aucun risque de confusion dans l’esprit du consommateur.

42      L’OHMI fait valoir que la comparaison globale des marques en conflit doit, en ce qui concerne leur similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. Selon l’OHMI, la procédure devant le Tribunal devrait se concentrer sur la perception que le public italien aura des marques en conflit.

43      Sur le plan visuel, l’OHMI relève que la marque antérieure consiste en la représentation de la silhouette d’un sapin au tronc très court avec des saillies et des retraits irréguliers sur les parties latérales, posé sur une base plus large en guise de socle. La marque dont l’enregistrement est demandé serait quant à elle composée d’une figure comique animée, dont la partie supérieure présente une forme triangulaire aux côtés irréguliers, ressemblant à la partie supérieure d’un sapin, placée, au niveau de la base, sur la représentation de deux grandes chaussures. Dans la partie triangulaire supérieure apparaîtrait, au centre, la représentation d’un visage animé et de deux bras qui semblent montrer l’expression verbale en caractères stylisés « aire limpio ». Les marques en conflit auraient en commun des traits extérieurs, à savoir un dessin d’apparence triangulaire aux côtés irréguliers et dont la base, après un rétrécissement, est constituée d’un élément rectangulaire. En dépit du contraste qui résulte de la touche comique et animée et de l’élément verbal « aire limpio », cet élément graphique revêtirait un caractère dominant manifeste dans l’impression globale que le signe dégage et l’emporterait de façon notable sur l’élément verbal, qui ne saurait être perçu très clairement.

44      Sur le plan phonétique, la marque antérieure, en tant que signe purement graphique, pourrait être transmise oralement grâce à une description du signe, tandis que la marque dont l’enregistrement est demandé serait prononcée à l’aide de son élément verbal, à savoir « aire limpio ».

45      Sur le plan conceptuel, l’OHMI soutient que les marques en conflit seront associées par le public ciblé à la silhouette d’un sapin au tronc très court, dont les branches sont formées par des saillies et des retraits, disposé sur un élément rectangulaire en guise de socle. L’OHMI est d’avis que le public italien n’attribuera aucune signification particulière à l’expression « aire limpio » et n’identifiera les deux signes que par le contenu sémantique des deux représentations graphiques.

46      En ce qui concerne l’évaluation du caractère distinctif de la marque antérieure, l’OHMI fait valoir que cette dernière ne se réduit pas à la représentation d’un sapin. Il s’agirait d’une représentation graphique d’un concept plus complexe, à savoir la forme d’un sapin avec certaines caractéristiques particulières telles que des saillies et des retraits, un tronc très court et placé sur une base rectangulaire en guise de socle.

47      S’agissant de l’argument selon lequel la forme d’un sapin serait couramment utilisée pour la commercialisation de parfums d’ambiance, la requérante n’aurait apporté, au cours de la procédure devant l’OHMI, aucun élément démontrant que, sur le marché italien, le public ciblé serait habitué à l’utilisation, pour ce type de produits, de figures dont la forme présente des similitudes avec la silhouette d’un sapin.

48      Si la forme du produit doit effectivement être plus étroite dans la partie supérieure que dans la partie inférieure, le résultat technique recherché ne nécessiterait pas l’utilisation d’une forme correspondant au concept de la marque antérieure, mais pourrait être obtenu par le biais d’un simple triangle aux côtés droits et réguliers ou d’une figure plus étroite dans sa partie supérieure que dans sa partie inférieure. La forme de la marque antérieure ne serait donc pas l’unique façon d’obtenir ce résultat.

49      S’agissant de l’appréciation du risque de confusion, l’OHMI souligne que, en l’espèce, les produits concernés étant de consommation courante, le consommateur moyen n’accorde pas une attention particulière lors de leur achat.

50      Compte tenu de l’importance de la silhouette du sapin dans l’utilisation faite de la marque figurative comprenant l’élément verbal « arbre magique » en Italie, ainsi que de la prépondérance de l’élément graphique, l’OHMI estime que tant l’expression « arbre magique » que son élément graphique omniprésent et frappant (correspondant à la représentation de la marque antérieure sur laquelle se fonde la décision attaquée) doivent être considérés comme notoires et fréquemment utilisés par le public visé. En conséquence, l’OHMI considère que la chambre de recours a reconnu, à juste titre, que la marque communautaire antérieure sur laquelle cette décision est fondée jouit en Italie d’un caractère distinctif particulier.

51      L’OHMI ajoute que les publicités ont été diffusées, selon l’intervenante, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement et qu’une part de marché aussi grande ne peut pas avoir été acquise très rapidement. Il ne serait donc pas vraisemblable que les ventes de 1996 aient été peu importantes.

52      Enfin, l’OHMI estime que, en application du principe énoncé dans l’arrêt de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL (C‑251/95, Rec. p. I‑6191, point 24), la similitude conceptuelle entre les marques en conflit pourrait créer, en Italie, où la marque antérieure jouit d’un caractère distinctif particulier, un risque de confusion que les différences de style et d’animation entre les marques ne permettraient pas d’éviter. En effet, la marque dont l’enregistrement est demandé pourrait être considérée comme une variante amusante et animée de la marque antérieure largement connue du public ciblé.

53      L’intervenante relève tout d’abord que les éléments qui distinguent les marques en cause n’altèrent pas l’impression générale de similitude.

54      Les produits désignés par les marques litigieuses seraient vendus dans des zones libre-service de stations d’essence ou de supermarchés et seraient acquis de manière très rapide et sans processus de réflexion préalable. Le consommateur porterait donc son attention sur le premier élément qui vient à son esprit lorsqu’il regarde les marques, à savoir la silhouette du sapin.

55      Ensuite, sur le plan phonétique, la différence constituée par l’inscription « aire limpio » serait sans pertinence sur le choix du consommateur, car celui-ci porterait son attention uniquement sur l’apparence ou la présentation externe du produit.

56      Enfin, les signes en conflit seraient aussi similaires sur le plan conceptuel, car ils utiliseraient des images communes qui coïncident quant à l’idée représentée, à savoir la silhouette d’un petit sapin, identifient le produit et révèlent son origine commerciale aux consommateurs.  

57      L’intervenante s’oppose également à la description faite par la requérante de la marque dont l’enregistrement est demandé comme étant la reproduction d’un personnage humoristique.

58      Par ailleurs, le caractère purement descriptif de la silhouette du sapin pour des produits d’ambiance ou désodorisants ne pourrait pas être invoqué en l’absence de preuve établissant que cette silhouette est devenue usuelle dans chacun des marchés pertinents et/ou que les juridictions des pays concernés ont déterminé qu’elle n’était pas valable en tant que marque.

59      L’intervenante partage encore l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle l’existence d’un risque de confusion est renforcée en raison du caractère distinctif élevé de la marque antérieure, qui découle de sa notoriété.

60      L’intervenante conteste l’argument selon lequel, d’une part, la marque antérieure concorderait avec la forme du produit et, d’autre part, cette forme serait nécessaire en vue de l’obtention d’un résultat technique. Tout d’abord, cet argument devrait être rejeté, car il aurait été soulevé pour la première fois devant le Tribunal. Ensuite, en tout état de cause, les marques antérieures n’étant pas des marques tridimensionnelles mais des marques figuratives, ce grief ne serait pas pertinent. Enfin, les éléments graphiques revendiqués pour les marques de l’intervenante ne représenteraient pas la forme nécessaire en vue de la commercialisation du produit.

61      De même, la chambre de recours aurait estimé à juste titre que le caractère distinctif de la marque antérieure avait été accru par l’usage de celle-ci et les arguments contraires de la requérante ne pourraient pas être retenus.

62      L’intervenante ajoute plusieurs arguments à cet égard.

63      Premièrement, les chiffres de vente ne perdraient pas leur valeur probante du simple fait qu’il s’agit en l’espèce de produits de consommation courante.

64      Deuxièmement, le pourcentage des ventes des produits sur le marché italien serait complété par d’autres preuves relatives à la notoriété des marques sur ce marché.

65      Troisièmement, même s’il est vrai que le rapport de la société Nielsen se réfère aux années 1997 et 1998, son contenu, à la lumière des autres preuves apportées, permettrait de présumer que, au cours des années immédiatement antérieures, les pourcentages de vente des produits commercialisés sous les marques de l’intervenante étaient vraisemblablement semblables à ceux de la période 1997-1998. En outre, pour déterminer le caractère distinctif d’une marque nationale antérieure invoquée à l’encontre d’une demande de marque postérieure, il ne saurait être fait abstraction d’une preuve attestant l’usage de la marque nationale invoquée à l’appui de l’opposition, au cours de la période immédiatement postérieure à la date de dépôt de la demande de marque communautaire et antérieure à la date à laquelle l’opposition a été formée.

66      L’intervenante conclut que la chambre de recours à considéré à juste titre qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, en ce qui concerne les produits relevant des classes 3 et 5.

 Appréciation du Tribunal

–       Observations liminaires

67      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 40/94, il convient d’entendre par marques antérieures les marques communautaires, les marques enregistrées dans un État membre ou ayant fait l’objet d’un enregistrement international, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

68      En outre, même si l’article 8 du règlement n° 40/94 ne contient pas de disposition semblable à celle de l’article 7, paragraphe 2, selon laquelle il suffit, pour refuser l’enregistrement d’une marque, qu’un motif absolu de refus n’existe que dans une partie de la Communauté, il y a lieu de considérer que la même solution doit être appliquée en l’espèce. Il s’ensuit que l’enregistrement doit également être refusé, même si le motif relatif de refus n’existe que dans une partie de la Communauté [arrêts du Tribunal du 3 mars 2004, Mühlens/OHMI – Zirh International (Sir/ZIRH), T‑355/02, Rec. p. II‑791, point 36, et du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (Selenium Spezial A-C-E/SELENIUM‑ACE), T‑312/03, non encore publié au Recueil, point 29].

69      En l’espèce, l’opposition à l’enregistrement était fondée sur plusieurs marques de l’intervenante comportant la représentation d’un sapin. La chambre de recours, en examinant cette opposition, se fonde principalement sur la marque communautaire n° 91991 en tant que marque représentative des autres marques invoquées à l’appui de l’opposition.

70      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les marques en conflit étaient similaires notamment sur le plan conceptuel et qu’il existait un risque de confusion. Cette conclusion résultait de la constatation selon laquelle la marque communautaire antérieure n° 91991, protégée depuis le 1er avril 1996, constituée par la forme d’un sapin, avait un caractère distinctif particulier en Italie. Cette constatation était elle‑même basée sur l’acceptation de l’usage prolongé et de la notoriété en Italie de la marque internationale ARBRE MAGIQUE, représentée sous la même forme d’un sapin et comportant en outre un élément verbal.

71      Il y a donc lieu d’examiner au préalable si la chambre de recours a valablement considéré que la marque communautaire antérieure n° 91991 avait pu acquérir un caractère distinctif particulier du fait de l’usage prolongé d’une autre marque enregistrée, à savoir la marque ARBRE MAGIQUE, ainsi qu’en raison d’un usage prolongé en Italie, cette marque pouvant y être considérée comme notoire.

–       Sur le caractère distinctif particulier de la marque communautaire antérieure

72      Il convient tout d’abord de relever que la jurisprudence admet qu’une marque possède un caractère distinctif particulier, soit intrinsèquement, soit grâce à la notoriété dont elle jouit auprès du public (arrêt SABEL, point 52 supra, point 24).

73      Ensuite, il importe de rappeler que l’acquisition du caractère distinctif d’une marque peut également résulter de son usage en tant que partie d’une autre marque enregistrée. Il suffit que, en conséquence de cet usage, les milieux intéressés perçoivent effectivement le produit ou le service désigné par les marques antérieures comme provenant d’une entreprise déterminée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 juillet 2005, Nestlé, C‑353/03, Rec. p. I‑6135, points 30 et 32).

74      Partant, il convient également d’admettre que le caractère distinctif particulier d’une marque peut être acquis en raison de son usage prolongé et de sa notoriété en tant que partie d’une autre marque enregistrée, pour autant que le public ciblé perçoive la marque comme indiquant la provenance des produits d’une entreprise déterminée.

75      En l’espèce, la question de savoir si la chambre de recours a valablement considéré que la marque communautaire antérieure n° 91 991 avait pu acquérir un caractère distinctif particulier du fait de son usage en tant que partie d’une autre marque enregistrée appelle donc une réponse positive dans l’hypothèse où la marque communautaire antérieure n° 91991 peut être considérée comme une partie de la marque ARBRE MAGIQUE.

76      À cet égard, la chambre de recours a estimé à juste titre que la représentation de la silhouette du sapin, qui joue un rôle significatif voire prédominant dans la marque ARBRE MAGIQUE, correspond au signe de la marque communautaire antérieure n° 91991. En conséquence, la chambre de recours a considéré à bon droit que la marque communautaire antérieure n° 91991 constituait une partie de la marque antérieure ARBRE MAGIQUE. Ainsi, la première marque pouvait avoir acquis un caractère distinctif à la suite de son usage en tant que partie de la seconde marque.

77      En conséquence, la chambre de recours a examiné à juste titre l’ensemble des preuves relatives à l’usage et à la notoriété de la marque ARBRE MAGIQUE afin d’établir l’usage prolongé, la notoriété et, dès lors, le caractère distinctif particulier d’une partie de celle‑ci, à savoir la marque communautaire antérieure n° 91991.

78      En ce qui concerne, en l’espèce, l’examen proprement dit des preuves par la chambre de recours, c’est à juste titre que la décision attaquée indique qu’il ressort des éléments de preuve figurant au dossier, à savoir essentiellement la documentation produite le 8 novembre 1999 dans le cadre de l’opposition formée par l’intervenante, que, en tant que partie d’une marque enregistrée, à savoir la marque ARBRE MAGIQUE, la marque antérieure n° 91991 a fait l’objet d’un usage prolongé en Italie, y est notoire et possède dès lors un caractère distinctif particulier.

79      La décision attaquée prend ainsi en considération l’usage prolongé de la marque ARBRE MAGIQUE et le fait que les ventes annuelles des produits commercialisés sous cette marque dépassent les 45 millions d’unités et que les ventes en Italie représentaient ainsi une part de marché dépassant 50 % en 1997 et en 1998. De plus, la décision attaquée tient compte du fait que les frais de publicité engagés en Italie pour la promotion de ces produits en 1996 et en 1997 ont dépassé 7 milliards de lires italiennes (soit 3 615 198,29 euros).

80      La circonstance que les chiffres de vente se rapportent aux années 1997 et 1998 et que les dépenses publicitaires concernent les années 1996 et 1997, c’est‑à‑dire des dates postérieures à celle du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque par la requérante, à savoir le 30 avril 1996, ne suffit pas à priver ces éléments de leur force probante aux fins de la constatation de la notoriété de la marque antérieure n° 91991.

81      En effet, selon la jurisprudence, des données postérieures à la date de dépôt d’une demande de marque communautaire peuvent être prises en considération lorsqu’elles permettent de tirer des conclusions sur la situation telle qu’elle se présentait à cette même date [arrêt du Tribunal du 15 décembre 2005, BIC/OHMI (Forme d’un briquet à pierre), T‑262/04, non encore publié au Recueil, point 82 ; voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, Rec. p. I‑8993, point 41, et la jurisprudence citée]. De telles circonstances peuvent permettre de confirmer ou de mieux apprécier la portée de l’usage de la marque concernée au cours de la période pertinente (voir, par analogie, ordonnance de la Cour du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, Rec. p. I‑1159, point 31).

82      La chambre de recours a donc pu valablement considérer que de telles circonstances postérieures permettaient de tirer des conclusions sur la situation telle qu’elle se présentait au jour du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque présentée par la requérante et de confirmer la notoriété de la marque n° 91991 à cette même date.

83      En effet, il y a lieu de relever en particulier qu’une part de marché de 50 % en 1997 et en 1998 n’a pu être acquise que progressivement. La chambre de recours n’a donc pas commis d’erreur en considérant, en substance, que la situation n’était pas sensiblement différente en 1996.

84      La circonstance qu’il s’agirait de données postérieures au dépôt de la demande d’enregistrement de la marque par la requérante, à savoir le 30 avril 1996, ne suffit donc pas à les priver de leur force probante en ce qui concerne la constatation de la notoriété de la marque antérieure n° 91991.

85      On ne saurait par ailleurs accueillir l’argument de la requérante, selon lequel la chambre de recours aurait à tort retenu le caractère distinctif particulier de la marque antérieure en Italie en se fondant uniquement sur des indications générales concernant le volume de publicité et le chiffre des ventes. Certes, selon la jurisprudence invoquée par la requérante, le caractère distinctif d’une marque ne saurait être établi seulement sur la base de données générales et abstraites, telles que des pourcentages déterminés (arrêt de la Cour du 18 juin 2002, Philips, C‑299/99, Rec. p. I‑5475, point 62). Toutefois, il y a lieu de relever, premièrement, que cette jurisprudence concerne l’acquisition du caractère distinctif d’une marque faisant l’objet d’une demande d’enregistrement et non pas, comme en l’espèce, l’évaluation de la notoriété d’une marque enregistrée qui a déjà acquis un caractère distinctif. Deuxièmement, afin d’établir, en l’espèce, la notoriété de la marque, la chambre de recours n’a pas seulement pris en compte des indications générales, telles que des pourcentages déterminés, mais également l’usage prolongé de la marque ARBRE MAGIQUE, que, par ailleurs, la requérante n’a pas contesté.

86      Il y a également lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours se serait fondée à tort sur le fait que la marque antérieure bénéficiait d’une protection sous une forme essentiellement identique depuis 1954, au titre de l’enregistrement n° 178969. La requérante ne saurait utilement soutenir que la chambre de recours a assimilé la date de la demande de marque à celle de l’utilisation effective de la marque CAR FRESHNER n° 178969, sans qu’aucune preuve n’ait été fournie quant à son utilisation depuis son enregistrement. En effet, ainsi qu’il a été déjà relevé et confirmé par l’OHMI à l’audience, la chambre de recours s’est fondée sur l’usage avéré en Italie de la marque ARBRE MAGIQUE et non sur l’usage de la marque CAR FRESHNER. La décision attaquée constate, certes, que la marque CAR FRESHNER a été enregistrée depuis 1954, mais, s’agissant de l’usage prolongé, elle se réfère à la marque ARBRE MAGIQUE.

87      Il découle de ce qui précède que la chambre de recours a estimé à juste titre que l’usage prolongé et la notoriété de la marque ARBRE MAGIQUE et, par conséquent, de la marque n° 91991,  en Italie, perçues comme indiquant la provenance des produits d’une entreprise déterminée, étaient démontrés à suffisance de droit.

88      Compte tenu de la notoriété en Italie de la marque communautaire antérieure n° 91991, découlant notamment de son usage prolongé en tant que partie de la marque ARBRE MAGIQUE et de la notoriété de cette dernière sur ce territoire, il y a lieu de considérer que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant à son caractère distinctif particulier en Italie.

–       Sur la similitude des produits

89      En l’espèce, la constatation par la décision attaquée de la similitude des produits désignés par la marque antérieure et par la marque dont l’enregistrement est demandé dans les classes 3 et 5 ne donne pas lieu à contestation par les parties.

90      Par ailleurs, l’argument de la requérante selon lequel l’enregistrement international de la marque CAR FRESHNER pour des produits relevant de la classe 5 ne porte pas sur les produits désodorisants en cause en l’espèce, mais sur des « désinfectants, produits pour le bain, insecticides, produits chimiques », est dénué de fondement. En effet, il n’est pas contesté que cette marque a également été enregistrée pour les « produits pour la purification de l’air, […] parfums, essences […] », qui relèvent de la classe 3.

–       Sur la similitude des marques

91      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN/Matratzen Markt Concord), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 30].

92      En l’espèce, sur le plan visuel, l’élément graphique contenu dans la marque dont l’enregistrement est demandé revêt un caractère dominant manifeste dans l’impression globale que le signe dégage et l’emporte de façon notable sur l’élément verbal. La dénomination « aire limpio » a, compte tenu de la petite taille des caractères utilisés et de son insertion à l’intérieur du dessin représentant un sapin, un caractère assez estompé par rapport à l’élément graphique.

93      Contrairement aux allégations de la requérante, l’impression d’ensemble qui est produite par le graphisme n’est pas celle d’un personnage comique, mais bien celle d’une image ressemblant à un sapin. Le dessin du visage et des bras du personnage comique est intégré à la partie centrale du sapin et, au niveau de la base, le dessin des deux chaussures écartées à 180 degrés reprend la forme d’un socle. La touche comique et animée qui apparaît sous les traits de ce personnage sert à donner une impression fantaisiste à la représentation graphique du sapin, la marque dont l’enregistrement est demandé pouvant être considérée par le public comme une variante amusante et animée de la marque antérieure. La marque dont l’enregistrement est demandé est donc constituée d’un signe dont l’élément prédominant est une silhouette s’apparentant à un sapin, qui constitue la marque antérieure. C’est cet élément qui sera principalement perçu par le consommateur et déterminera son choix, d’autant plus qu’il s’agit en l’espèce de produits de consommation courante vendus en libre‑service.

94      La représentation graphique correspondant à un sapin apparaît donc, sur le plan visuel, comme l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par la marque dont l’enregistrement est demandé.

95      Sur le plan conceptuel, les signes en cause sont tous deux associés à la silhouette d’un sapin. Compte tenu de l’impression qui s’en dégage et de l’absence de signification particulière que revêt l’expression « aire limpio » auprès du public italien, leur similitude conceptuelle doit être confirmée.

96      Il s’ensuit que c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que les signes en conflit, en utilisant des images qui coïncident dans l’idée représentée, à savoir la silhouette d’un sapin, étaient similaires sur le plan conceptuel. Sur le plan phonétique, il existe une différence résultant du fait que la marque antérieure, qui est une marque purement graphique, peut être transmise oralement grâce à une description du signe, tandis que la marque qui fait l’objet de la demande d’enregistrement peut être exprimée oralement par l’énoncé de son élément verbal, à savoir « aire limpio ».

–       Sur le risque de confusion

97      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs caractérisant le cas d’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (Giorgi/GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 32].

98      L’appréciation globale du risque de confusion doit cependant, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux‑ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (PASH/BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47].

99      En outre, il convient de relever que le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important. Il ne saurait dès lors être exclu que la similitude conceptuelle découlant du fait que deux marques utilisent des images qui concordent dans leur contenu sémantique puisse créer un risque de confusion dans un cas où la marque antérieure possède un caractère distinctif particulier, soit intrinsèquement, soit grâce à la notoriété dont elle jouit auprès du public (arrêt SABEL, point 52 supra, point 24).

100    En l’espèce, étant donné que les produits en cause sont des produits de consommation courante, le public pertinent est le consommateur moyen, qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Le consommateur moyen des produits concernés ne fera pas preuve d’une attention particulière lors de leur achat.

101    Le consommateur choisira donc normalement lui-même les produits en cause et aura dès lors tendance à se fier principalement à l’image de la marque appliquée sur ces produits, à savoir la silhouette d’un sapin.

102    Par conséquent, compte tenu, d’une part, de la similitude des produits en cause et de la similitude visuelle et conceptuelle des marques en cause et, d’autre part, du fait que la marque antérieure possède un caractère distinctif particulier en Italie, il convient de constater que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant à l’existence d’un risque de confusion.

103    Cette conclusion n’est pas infirmée par les arguments développés par la requérante.

104    Est, en premier lieu, dépourvu de fondement l’argument de la requérante, selon lequel la marque antérieure a un faible caractère distinctif du fait que la silhouette du sapin serait descriptive des produits concernés. En effet, ainsi que le relève à juste titre l’OHMI, la marque antérieure n’est pas la simple représentation, fidèle à la réalité, d’un sapin. Le sapin représenté est stylisé et présente d’autres caractéristiques particulières : il possède un tronc très court et il est placé sur une base rectangulaire en guise de socle. En outre, ainsi qu’il a déjà été constaté, compte tenu de sa notoriété, la marque antérieure a acquis un caractère distinctif particulier. De plus, l’argument de la requérante tiré des lignes directrices de l’office des brevets du Royaume-Uni, qui confirmeraient le caractère descriptif de la silhouette du sapin pour les produits concernés, est dénué de pertinence car le régime communautaire des marques est un système autonome constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national et la légalité des décisions des chambres de recours devant être appréciée uniquement sur la base du règlement nº 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire [arrêt du Tribunal du 11 mai 2005, Grupo Sada/OHMI – Sadia (Sadia/Grupo Sada), T‑31/03, Rec. p. II‑1667, point 84].

105    En second lieu, il convient d’écarter les arguments de la requérante tendant à démontrer que la marque antérieure aurait dû être refusée à l’enregistrement, car, d’une part, elle n’était constituée, pour l’essentiel, que de la forme du produit qui est commercialisé sous cette marque et, d’autre part, la forme de la marque antérieure, à savoir la silhouette d’un sapin, était nécessaire à l’obtention du résultat technique recherché par le produit. En effet, la requérante ne saurait, en tout état de cause, dans le cadre d’une procédure d’opposition, invoquer un motif absolu de refus s’opposant à l’enregistrement valide d’un signe par un office national ou par l’OHMI. Les motifs absolus de refus visés à l’article 7 du règlement n° 40/94 n’ont pas à être examinés dans le cadre d’une procédure d’opposition et cet article ne figure pas parmi les dispositions au regard desquelles la légalité de la décision attaquée doit être appréciée [arrêt du Tribunal du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESEL/dieselit), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, point 71].

106    Enfin, en troisième lieu, l’arrêt du Tribunal Supremo du 5 avril 2005 produit et invoqué par la requérante à l’audience, qui lui conférerait de manière définitive les droits portant sur la marque espagnole Aire Limpio  n° 2033859, est sans pertinence en l’espèce. En effet, ainsi qu’il a déjà été précisé, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base du règlement nº 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire (arrêt Sadia/Grupo Sada, point 104 supra, point 84).

107    Il résulte de ce qui précède que le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 73 du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

108    La requérante soutient que la décision attaquée a été prise en violation de l’article 73 du règlement n° 40/94.

109    En vertu de cet article et de la jurisprudence, la motivation d’une décision faisant grief doit fournir à l’intéressé les indications nécessaires pour lui permettre de savoir si cette décision est bien fondée et permettre au juge communautaire d’exercer son contrôle sur sa légalité [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Institut für Lernsysteme/OHMI – Educational Services (Ils/ELS), T‑388/00, Rec. p. II‑4301, point 59].

110    La division d’opposition, dans sa décision du 25 février 2003, et la chambre de recours auraient déjà limité leur examen, d’une part, à la marque dont l’enregistrement est demandé et, d’autre part, au seul enregistrement communautaire n° 91991. Cependant, pour retenir l’existence d’un motif relatif de refus d’enregistrement au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, la chambre de recours se serait également appuyée sur des pièces relatives à d’autres marques. Par conséquent, les motifs de la décision attaquée concerneraient des marques antérieures que la chambre de recours aurait elle-même exclues de l’analyse comparative pour déterminer l’existence d’un risque de confusion. Les motifs de la décision attaquée seraient donc incomplets et la chambre de recours aurait violé l’article 73 du règlement n° 40/94.

111    L’OHMI, soutenu par l’intervenante, répond que la requérante a eu la possibilité de réfuter le contenu des documents et des éléments de preuve sur lesquels se fonde la décision attaquée pour déterminer la notoriété et l’usage prolongé en Italie de la marque n° 91991, ces documents ayant été produits au cours de la procédure devant la division d’opposition. Elle n’aurait toutefois pas mis en cause l’exactitude de ces données.

112    Quant au fait que les documents précités concerneraient une marque qui avait été exclue de la comparaison pour des raisons d’économie de procédure, cette exclusion ne signifierait en aucun cas que ces documents seraient sans conséquence sur l’appréciation que le public italien aurait de la marque antérieure sur laquelle la décision attaquée est fondée. Plus précisément, l’OHMI n’aurait jamais déclaré que cette exclusion avait pour effet que les documents contestés ne seraient pas pris en considération dans l’évaluation de l’appréciation par le public italien de la marque sur laquelle la décision attaquée est fondée, dès lors que les deux marques invoquées correspondaient dans leur élément graphique. La décision attaquée ne violerait donc pas les droits procéduraux de la requérante étant donné que cette dernière aurait pu se prononcer sur les éléments de preuve et les documents qui ont servi à déterminer la notoriété et l’usage prolongé de la marque antérieure.

 Appréciation du Tribunal

113    En vertu de l’article 73 du règlement n° 40/94, les décisions de l’Office doivent être motivées. Par ailleurs, la règle 50, paragraphe 2, sous h), du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), dispose que la décision de la chambre de recours doit contenir les motifs de la décision. À cet égard, il y a lieu de considérer que l’obligation de motivation ainsi consacrée a la même portée que celle découlant de l’article 253 CE [arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, Rec. p. I‑10107, point 64 ; arrêt du Tribunal du 28 avril 2004, Sunrider Corporation/OHMI – Vitakraft‑Werke Wührmann et Friesland Brands (VITRAKRAFT et VITA/VITATASTE et BALANCE et BALANS /META BALANCE 44), T‑124/02 et T‑156/02, Rec. p. II‑1149, point 72].

114    Il est de jurisprudence constante que la motivation exigée par l’article 253 CE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte. Cette obligation a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge communautaire d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision (arrêts de la Cour du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C‑350/88, Rec. p. I‑395, point 15, et KWS Saat/OHMI, point 113 supra, point 65 ; arrêt VITRAKRAFT et VITA/VITATASTE et BALANCE et BALANS /META BALANCE 44, point 113 supra, point 73).

115    De surcroît, aux termes de l’article 73 du règlement n° 40/94, les décisions de l’OHMI ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition porte tant sur les motifs de fait et de droit que sur les éléments de preuve.

116    Cependant, le droit d’être entendu s’étend aux éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non à la position finale que l’administration entend adopter [arrêt du Tribunal du 7 juin 2005, Lidl Stiftung/OHMI – REWE-Zentral (Solevita/SALVITA), T‑303/03, Rec. p. II‑1917, point 62].

117    En l’espèce, la décision attaquée fait apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de la chambre de recours. Ainsi qu’il ressort du texte de la décision attaquée, qui expose les arguments invoqués devant la chambre de recours par la requérante, cette dernière a pu prendre position sur l’ensemble des éléments sur lesquels la décision attaquée est fondée ainsi que sur l’utilisation, par la chambre de recours dans le cadre de son appréciation, des éléments de preuve relatifs à l’usage des marques antérieures.

118    Par conséquent, la violation de l’article 73 du règlement n° 40/74 n’est pas établie et le second moyen ainsi que le recours dans son intégralité doivent être rejetés.

 Sur les dépens

119    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

120    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI et par l’intervenante, conformément aux conclusions de ceux-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La requérante est condamnée aux dépens.

Legal

Lindh

Wiszniewska-Białecka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 septembre 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       H. Legal


* Langue de procédure : l’espagnol.