Language of document : ECLI:EU:F:2008:166

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

11 décembre 2008 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Promotion dite de ‘deuxième filière’ – Exercice de promotion 2005 – Attribution de points de priorité – Dispositions transitoires – DGE de l’article 45 du statut – Égalité de traitement – Recevabilité »

Dans l’affaire F‑113/06,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Didier Bouis, demeurant à Overijse (Belgique), et trois autres fonctionnaires de la Commission des Communautés européennes dont les noms figurent en annexe, représentés par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.-N. Louis et É. Marchal, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. V. Joris et D. Martin, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch, président, Mme I. Boruta et M. H. Kanninen (rapporteur), juges,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er avril 2008,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 29 septembre 2006 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le même jour), M. Bouis et trois autres fonctionnaires de la Commission des Communautés européennes demandent, en substance, l’annulation des décisions de ne pas leur accorder, au titre des années 2003 et 2004, des points de priorité mis à la disposition de chaque direction générale (ci-après les « PPDG ») ni des points de priorité en reconnaissance des tâches accomplies dans l’intérêt de l’institution (ci-après les « PPII ») ainsi que l’annulation des décisions de ne pas faire figurer leur nom sur la liste de mérite et sur la liste des fonctionnaires promus au grade A*13 au titre de l’exercice de promotion 2005.

 Cadre juridique

2        L’article 45, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur du règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO L 124, p. 1) (ci-après l’« ancien statut »), disposait :

« La promotion est attribuée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur de la catégorie ou du cadre auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum d’ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion ainsi que des rapports dont ils ont fait l’objet.

[…] »

3        L’article 45, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa version issue du règlement n° 723/2004 (ci-après le « statut ») dispose :

« La promotion est attribuée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination en considération de l’article 6, paragraphe 2. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’autorité investie du pouvoir de nomination prend en considération, en particulier, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l’article 28, [sous] f), et, le cas échéant, le niveau des responsabilités exercées. »

4        Par sa décision du 19 juillet 1988 concernant le pourvoi des emplois d’encadrement intermédiaire [COM(88)PV 928], modifiée notamment le 28 juin 1995 (ci-après la « décision du 19 juillet 1988 »), la Commission a introduit une procédure spécifique de pourvoi d’emplois d’encadrement intermédiaire, dont la principale nouveauté consiste à dissocier le grade et la fonction, de manière à ce que des fonctionnaires qui paraissent en avoir les aptitudes puissent commencer à exercer des fonctions d’encadrement à un âge plus jeune, sans devoir attendre d’atteindre le grade A 3, comme c’était le cas auparavant. Cette décision a entraîné la création de la fonction de « chef d’unité » (et celle de « conseiller »), laquelle peut être exercée indifféremment au grade A 3, A 4 ou A 5, alors que, auparavant, on ne connaissait que la notion de « chef de division » dont la fonction ne pouvait être exercée qu’au grade A 3.

5        La décision du 19 juillet 1988 porte non seulement sur la première nomination en tant que chef d’unité (ou de conseiller), mais elle prévoit aussi, en son point 4, la possibilité pour l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») de promouvoir les chefs d’unité (et les conseillers) à un grade supérieur, ces fonctionnaires continuant à exercer la même fonction. Il s’agit de la procédure de promotion dite « de deuxième filière » (ci-après la « procédure de deuxième filière »), qui permet aux chefs d’unité (ou aux conseillers) existants d’être pris en considération pour une promotion au grade A 3 sur la base de leurs mérites comparés, et ce sans changement de poste, c’est-à-dire sans devoir postuler à un autre poste vacant.

6        Dans le cadre de la procédure de deuxième filière, le comité consultatif des nominations, après consultation des directeurs généraux et chefs de service, établit un avis sur les fonctionnaires promouvables qui devraient plus particulièrement être pris en compte pour une promotion vers le grade A 3, étant précisé que la liste ainsi établie doit dépasser de 50 % les possibilités de promotion selon cette procédure (point 4.2 de la décision du 19 juillet 1988).

7        En vertu de leur article 1er, paragraphe 1, les dispositions générales d’exécution de l’article 45 de l’ancien statut, prises le 26 avril 2002 (ci-après les « DGE 45 du 26 avril 2002 »), applicables à l’exercice de promotion 2003, excluaient de leur champ d’application les fonctionnaires, détenant le grade A 4 dans la structure de carrière prévue par l’ancien statut, lesquels étaient promus, ainsi que cela vient d’être précisé au point 5 du présent arrêt, selon la procédure de deuxième filière.

8        De même, l’article 1er, paragraphe 1, des dispositions générales d’exécution de l’article 45 de l’ancien statut, prises le 24 mars 2004 (ci-après les « DGE 45 du 24 mars 2004 »), applicables à l’exercice de promotion 2004, ne s’appliquaient pas aux fonctionnaires de grade supérieur ou égal au grade A 4.

9        Cependant, l’article 2 de l’annexe XIII du statut, en modifiant la structure de la carrière des fonctionnaires de la catégorie A, telle qu’elle ressortait de l’ancien statut, a introduit un grade A*13, situé entre le grade A*14, correspondant à l’ancien grade A 3, et le grade A*12, correspondant à l’ancien grade A 4. Il a été décidé, en conséquence, de soumettre, lors de l’exercice de promotion 2005, les fonctionnaires de grade A 4 à la même procédure de promotion que les fonctionnaires des grades inférieurs.

10      L’exercice de promotion 2005 est donc le premier au cours duquel les fonctionnaires de grade A*12 ont été soumis au système de promotion, introduit en 2003, qui repose sur la quantification des mérites par des points octroyés dans le cadre d’exercices annuels d’évaluation et de promotion (ci-après le « nouveau système de promotion »).

11      Les dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut applicables à l’exercice de promotion 2005 ont été adoptées par décision de la Commission du 23 décembre 2004 (ci-après les « DGE 45 »).

12      Aux termes de l’article 13, paragraphe 3, des DGE 45 :

« Pour les fonctionnaires des grades A*12, B*10, C*6 et D*4, les modalités suivantes sont, en outre, d’application en 2005 :

a)      Les points de mérite visés à l’article 3, paragraphe 1, sont la somme des notes de mérite figurant dans les rapports d’évolution de carrière relatifs aux périodes de référence comprises entre le 1er juillet 2001 et le 31 décembre 2004 et se rapportant au grade considéré.

b)      Des points de priorité sont attribués au titre de l’année 2004. Les articles 4 à 6 sont d’application sous réserve des dispositions suivantes :

i)      le contingent de points de priorité visé à l’article 4, paragraphe 2, est fixé en tenant compte du nombre de fonctionnaires pour lesquels la direction générale concernée a finalisé le rapport annuel d’évolution de carrière pour l’année 2003 ;

ii)      il est tenu compte du mérite accumulé dans le grade par les fonctionnaires concernés, jusqu’au 31 décembre 2003 ;

c)      Des points de priorité transitoires sont attribués aux fonctionnaires concernés, à raison de [un] point par année passée dans le grade, jusqu’à concurrence de [sept] points au maximum […].

d)      Les points de priorité visés [sous] b) et c) sont attribués avant la phase d’octroi de points de priorité au titre de l’année 2005. »

13      En vertu des dispositions des DGE 45, les fonctionnaires de grade A*12 étaient susceptibles de recevoir, au titre de l’exercice de promotion 2005, outre les points de mérite (ci-après les « PM ») prévus à l’article 13, paragraphe 3, sous a), des DGE 45 et correspondant à la somme des notes de mérite figurant dans leurs rapports d’évolution de carrière relatifs aux périodes de référence comprises entre le 1er juillet 2001 et le 31 décembre 2004, les points de priorité suivants :

–        les PPDG attribués, en vertu des dispositions de l’article 5 des DGE 45, aux fonctionnaires les plus méritants selon les critères définis par le directeur général et communiqués au personnel, dans la limite de dix points ; pour la première application, en 2005, du nouveau système de promotion aux fonctionnaires de grade A*12, il était prévu l’attribution de PPDG au titre de 2005, mais aussi au titre de 2004, en application des dispositions de l’article 13, paragraphe 3, sous b), des DGE 45 ;

–        les points de priorité supplémentaires éventuellement attribués sur proposition du comité de promotion saisi par le fonctionnaire d’un recours dirigé contre le nombre de PPDG qu’il a reçus, en application des dispositions de l’article 8, paragraphe 3, des DGE 45 ;

–        les PPII pour le travail accompli dans l’intérêt de l’institution au cours de l’année 2004, en application de l’article 9 des DGE 45 ;

–        les points de priorité de transition attribués par l’AIPN (ci-après les « PPTA »), en application des dispositions de l’article 13, paragraphe 2, sous a), des DGE 45, selon le tableau figurant au point 2.3 de l’annexe II des DGE 45 et dans la limite de quatre points ;

–        les points de priorité de transition proposés par les comités de promotion (ci-après les « PPTCP »), en vertu des dispositions de l’article 13, paragraphe 2, sous c), des DGE 45, pour tenir compte « notamment [de] la situation des fonctionnaires dont l’ancienneté de grade dépasse l’ancienneté moyenne des fonctionnaires promus en 2003 […] », dans la limite de trois points ;

–        les points de priorité transitoires d’ancienneté (ci-après les « PPT ») attribués, en application de l’article 13, paragraphe 3, sous c), des DGE 45, à raison de un point par année passée dans le grade à la date du 31 décembre 2003, dans la limite de sept points.

14      Selon l’article 9 des DGE 45 :

« 1. Les comités de promotion visés à l’article 11 soumettent à l’AIPN des propositions relatives à l’attribution aux fonctionnaires, de [PPII]. Chaque comité de promotion se voit attribuer, à cette fin, un contingent de points de priorité égal à 0,25 fois le nombre de fonctionnaires visés à l’article 4, paragraphe 2. Pour pouvoir bénéficier des points de priorité au titre du présent article, le fonctionnaire doit avoir accompli des tâches supplémentaires dans l’intérêt de l’institution ne faisant pas partie de ses activités habituelles telles qu’elles sont reprises, notamment, dans sa description de poste. Les fonctionnaires détachés en qualité de représentants du personnel peuvent bénéficier des points de priorité au titre du présent article s’ils sont membres d’au moins trois comités paritaires. La liste exhaustive des ‘tâches supplémentaires accomplies dans l’intérêt de l’institution’ pouvant justifier l’attribution de points de priorité supplémentaires au titre du présent article est reprise à l’annexe I.

2. Les propositions d’attribution de points de priorité, au titre du paragraphe [1,] sont préparées par un groupe de travail paritaire rattaché à chaque comité de promotion. Ce groupe est composé d’un nombre égal de représentants du personnel et de l’administration.

3. Le nombre total de points de priorité attribués à chaque fonctionnaire au titre du présent article ne peut excéder le chiffre de deux. »

 Faits à l’origine du litige

15      Les requérants, fonctionnaires de la Commission de grade A 4 au 30 avril 2004, ont vu leur grade renommé A*12 à partir du 1er mai 2004.

16      Après avoir pris connaissance des listes de mérite publiées aux Informations administratives n° 60‑2005 du 22 juillet 2005, au titre de l’exercice de promotion 2005, les requérants ont introduit un recours auprès du comité de promotion, dans le délai visé à l’article 8, paragraphe 2, des DGE 45.

17      Ce recours a été rejeté par le comité de promotion.

18      Le 23 novembre 2005, la Commission a publié aux Informations administratives n° 85‑2005 du 23 novembre 2005 la liste des fonctionnaires promus dans le cadre de l’exercice de promotion 2005 ainsi que la liste des PPII.

19      Ne figurant pas sur la liste des fonctionnaires promus, les requérants ont introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, en date du 23 février 2006.

20      Par décision du 16 juin 2006, l’AIPN a rejeté la réclamation.

 Procédure et conclusions des parties

21      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, conformément à l’article 55, paragraphe 2, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal a invité la Commission à produire une copie de la décision du 19 juillet 1988. La Commission a déféré à cette demande par courrier du 22 février 2008.

22      Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions de ne pas faire figurer leur nom sur la liste de mérite ainsi que sur la liste des fonctionnaires promus au grade A*13 au titre de l’exercice de promotion 2005 ;

–        annuler les décisions de leur attribuer des PPT ainsi que les décisions de ne pas leur accorder de PPDG et de PPII, au titre des années 2003 et 2004 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

23      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours non fondé ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

24      À l’audience, la Commission a formellement conclu, à titre principal, à l’irrecevabilité du recours.

 En droit

 Observations liminaires

25      Dans leur requête, les requérants ont notamment contesté l’attribution, aux fonctionnaires de grade A*12, d’un PPT par année d’ancienneté dans leur grade, en application de l’article 13, paragraphe 3, sous c), des DGE 45 et ont demandé à ce que les décisions leur attribuant des PPT soient annulées.

26      Tenant compte de l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 19 octobre 2006 (Buendía Sierra/Commission, T‑311/04, Rec. p. II‑4137), cité par la Commission dans son mémoire en défense, les requérants ont indiqué dans leur mémoire en réplique qu’ils renonçaient au moyen tiré de la violation des articles 43 et 45 du statut en ce qui concerne l’attribution d’un PPT par année d’ancienneté dans le grade. À l’audience, les requérants ont confirmé qu’ils maintenaient cette renonciation.

27      Or, les requérants, en présentant les conclusions dirigées contre les décisions leur attribuant des PPT, ont précisé dans la requête qu’ils demandaient l’annulation de ces décisions « en ce qu[e les PPT] sont limités à un point par année d’ancienneté de grade avec un maximum de sept points ». De plus, au soutien de ces conclusions, ils n’invoquaient que le seul moyen tiré de la violation des articles 43 et 45 du statut.

28      Partant, il y a lieu de considérer que les requérants, en renonçant à invoquer le moyen tiré de la violation des articles 43 et 45 du statut en ce qui concerne l’attribution d’un PPT par année d’ancienneté dans le grade, ont renoncé également à demander l’annulation de la décision leur attribuant un PPT par année d’ancienneté en application de l’article 13, paragraphe 3, sous c), des DGE 45.

 Sur le premier chef de conclusions, tendant à l’annulation des décisions de ne pas inscrire le nom des requérants sur la liste de mérite et sur la liste des fonctionnaires promus au grade A*13 au titre de l’exercice de promotion 2005

 Arguments des parties

29      Au cours de l’audience, la Commission a relevé, en substance, que les requérants n’ont fourni aucune information sur leur situation personnelle au soutien de leurs chefs de conclusions. En conséquence, le recours devrait être déclaré irrecevable comme introduit dans l’intérêt de la loi.

30      Les requérants ont fait valoir que des informations complémentaires sur leur situation personnelle ne présenteraient aucune utilité pour le règlement de l’affaire.

 Appréciation du Tribunal

31      Il convient de rappeler que la procédure de promotion s’achève par l’établissement de la liste des fonctionnaires promus. Cette décision finale identifie les fonctionnaires qui sont promus à l’occasion de l’exercice de promotion en cours. Dès lors, c’est au moment de la publication de cette liste que les fonctionnaires qui s’estimaient en mesure d’être promus prennent connaissance, d’une manière certaine et définitive, de l’appréciation de leurs mérites et que leur position juridique est affectée (arrêts du Tribunal de première instance du 21 novembre 1996, Michaël/Commission, T‑144/95, RecFP p. I‑A‑529 et II‑1429, point 30 ; du 19 mars 2003, Tsarnavas/Commission, T‑188/01 à T‑190/01, RecFP p. I‑A‑95 et II‑495, point 73, et Buendía Sierra/Commission, précité, point 87). Partant, cette liste constitue un acte faisant grief aux requérants au sens de l’article 90, paragraphe 2, et de l’article 91, paragraphe 1, du statut.

32      En revanche, la liste de mérite ainsi que la décision de ne pas inscrire le nom d’un fonctionnaire sur ladite liste constituent des actes préparatoires, préalables et nécessaires à la décision finale arrêtant les promotions (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 9 avril 2003, Tejada Fernández/Commission, T‑134/02, RecFP p. I‑A‑125 et II‑609, point 18, et Buendía Sierra/Commission, précité, points 96 et 97).

33      Il en résulte que la décision de ne pas inscrire le nom des requérants sur la liste de mérite ne saurait faire l’objet d’un recours en annulation autonome (arrêt Buendía Sierra/Commission, précité, point 98), mais que sa légalité peut toujours être contestée dans le cadre d’un recours dirigé contre la décision définitive de l’AIPN arrêtant les promotions. En l’espèce, les requérants attaquent la décision établissant la liste des fonctionnaires promus au grade A*13 au titre de l’exercice 2005. C’est donc au soutien des conclusions dirigées contre cette dernière décision que la légalité de la décision de ne pas inscrire le nom des requérants sur la liste de mérite pourra, éventuellement, être examinée.

34      Toutefois, selon la jurisprudence constante, un fonctionnaire n’est pas habilité à agir dans l’intérêt de la loi ou des institutions et ne peut faire valoir, à l’appui d’un recours en annulation, que les griefs qui lui sont personnels (arrêt de la Cour du 30 juin 1983, Schloh/Conseil, 85/82, Rec. p. 2105, point 14 ; ordonnance du Tribunal de première instance du 10 décembre 1997, Smets/Commission, T‑134/96, Rec. p. II‑2333, point 47 ; ordonnance du Tribunal du 14 juin 2006, Lebedef e.a./Commission, F‑34/05, RecFP p. I‑A‑1‑33 et II‑A‑1‑105, point 21).

35      Or, en l’espèce, il y a lieu de constater que, à l’exception de la mention de leur grade, les requérants n’ont fourni aucun élément concret sur leur situation propre à l’égard de l’exercice de promotion 2005, de nature à établir leur intérêt personnel à introduire le présent recours.

36      Premièrement, dans leur requête, les requérants se bornent à évoquer de façon générale l’adoption de nouvelles dispositions générales d’exécution des articles 43 et 45 de l’ancien statut pour l’exercice de promotion 2003. Ils mentionnent ensuite les nouvelles règles applicables aux exercices de promotion 2004 et 2005. Deuxièmement, sous la rubrique de la requête, intitulée « Les faits », les requérants se limitent à rappeler qu’ils étaient classés au grade A 4 jusqu’au 1er mai 2004, puis exposent la procédure spécifique de pourvoi d’emplois d’encadrement intermédiaire ainsi que la procédure de deuxième filière telles qu’issues de la décision du 19 juillet 1988. Troisièmement, les requérants rappellent que la structure de carrière a été modifiée à partir du 1er mai 2004 et que, dans ce cadre, le grade A 4 a été renommé A*12. Enfin, ils indiquent, sans autre précision, qu’ils « se sont vu attribuer, pour l’exercice de promotion 2005, des points de priorité ».

37      En revanche, les requérants ne mentionnent pas pour chacun d’eux, ni dans leur requête ni dans leur mémoire en réplique, le nombre de points de promotion obtenus au total et dans chaque catégorie de points. Ils n’indiquent pas non plus le seuil de promotion pour le grade concerné s’appliquant lors de l’exercice de promotion 2005.

38      Il importe de rappeler, à cet égard, que la non-inscription d’un fonctionnaire sur la liste des fonctionnaires promus peut résulter d’un nombre insuffisant de points de promotion reçus par rapport au seuil fixé pour le grade concerné (article 2, paragraphe 5, des DGE 45) et, le cas échéant, d’autres considérations accessoires prises en compte dans les conditions énoncées à l’article 10, paragraphe 1, des DGE 45. En outre, pour pouvoir être inscrit sur ladite liste, le fonctionnaire concerné doit disposer d’au moins dix points de mérite lors du dernier exercice d’évaluation (article 1er, paragraphe 3, des DGE 45).

39      À défaut d’indiquer les éléments permettant de déterminer qu’ils avaient vocation à la promotion au titre de l’exercice de promotion 2005 et que l’annulation qu’ils poursuivent leur ouvrirait la perspective d’être promus, compte tenu de leur situation personnelle et en particulier du nombre de points de promotion reçus, les requérants ne font pas apparaître en quoi consiste leur intérêt personnel à demander l’annulation des décisions de ne pas inscrire leur nom sur la liste des fonctionnaires promus (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal de première instance du 22 novembre 2006, Milbert e.a./Commission, T‑434/04, RecFP p. II‑A‑2‑1423, points 31 à 33).

40      Au surplus, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance applicable mutatis mutandis au Tribunal, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier, lequel n’était pas entré en vigueur à la date d’introduction du recours des requérants, toute requête doit contenir l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (arrêt de la Cour du 13 décembre 1990, Commission/Grèce, C‑347/88, Rec. p. I‑4747, point 28 ; ordonnances du Tribunal de première instance du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, Rec. p. II‑523, point 20, et du 29 novembre 1993, Koelman/Commission, T‑56/92, Rec. p. II‑1267, point 21).

41      Enfin, il importe de souligner que le Tribunal a accordé aux requérants, en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de l’annexe I du statut de la Cour de justice, la possibilité de déposer un mémoire en réplique. Or, même celui-ci ne contient aucun élément permettant d’apprécier sur le fond la demande d’annulation des décisions de ne pas inscrire le nom des requérants sur la liste des fonctionnaires promus.

42      De tout ce qui précède, il résulte que le premier chef de conclusions doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur le second chef de conclusions, tendant à l’annulation des décisions de non-attribution de PPDG et de PPII au titre des années 2003 et 2004

 Arguments des parties

43      Les requérants prétendent que, en raison de l’interprétation et de l’application faites par la Commission des dispositions de l’article 13 des DGE 45, ils n’auraient pas reçu de PPDG ni de PPII, au titre des années 2003 et 2004, qu’ils pourraient faire valoir au titre de l’exercice de promotion 2005. Or, au cours de cet exercice et pour les exercices de promotion suivants, les requérants seraient mis en concurrence avec des fonctionnaires promus au grade A*12 au titre des exercices 2003 ou 2004, qui auraient accumulé dans leur « sac à dos », avant leur promotion, des PPDG et PPII. En conséquence, les mérites des requérants auraient fait l’objet d’une comparaison avec ceux des fonctionnaires de même grade qui auraient bénéficié d’une prise en compte plus étendue de leurs mérites, ce en violation de l’article 45 du statut et du principe d’égalité de traitement.

44      En outre, les fonctionnaires de la Commission, soumis aux dispositions des DGE 45, seraient moins bien traités que les fonctionnaires du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne. L’égalité de traitement entre les fonctionnaires travaillant au sein desdites institutions serait donc également rompue.

45      Dans ces conditions, les requérants soutiennent que les dispositions de l’article 13 des DGE 45, telles qu’interprétées et appliquées par la Commission, sont illégales en ce qu’elles méconnaissent l’article 45 du statut et le principe d’égalité de traitement.

46      Dans la réplique, les requérants précisent que les fonctionnaires de grade A 5, qui ont été promus en 2003 au grade A 4, ont reçu des PM et des points de priorité et ont, partant, conservé dans leur « sac à dos », à la suite de leur promotion, le solde des points qui dépassait le seuil de promotion. De même, les fonctionnaires de grade A 5, qui ont été promus au grade A 4 en 2004, ont également pu conserver les PM et les points de priorité qui dépassaient le seuil de promotion vers le grade A 4. En revanche, les requérants qui avaient le grade A 4 avant 2003, n’ont jamais pu obtenir de PM ni de points de priorité avant l’exercice de promotion 2005.

47      Les requérants prétendent également que, en vertu de l’article 13, paragraphe 3, sous b, ii), des DGE 45, il est tenu compte du mérite accumulé dans le grade par les fonctionnaires concernés, jusqu’au 31 décembre 2003. Or, ils n’auraient reçu aucun point pour les années 2001 et 2002.

48      Par ailleurs, pour l’exercice de promotion 2005, la Commission aurait prévu pour les fonctionnaires de grade A*12 que le contingent annuel de points de priorité devait être attribué sur la base de deux périodes, à savoir du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2002 et du 1er janvier au 31 décembre 2003. Ainsi, en application de l’article 13 des DGE 45, les requérants n’auraient obtenu qu’un nombre limité de points de priorité au titre de l’année 2004, ce qui ne serait pas justifié.

49      Toujours dans la réplique, les requérants soulignent que la Commission ne se prononce pas, ni dans la réponse à la réclamation ni dans son mémoire en défense, sur l’exception d’illégalité dirigée contre les DGE 45. En particulier, la Commission n’aurait pas expliqué les raisons pour lesquelles la prise en compte du mérite dans la durée serait différente pour les requérants et pour les autres fonctionnaires promus plus tardivement au grade A 4.

50      Les requérants indiquent également qu’ils n’ont pas à démontrer qu’ils ont effectivement accompli des tâches dans l’intérêt de l’institution puisqu’ils ne sont pas éligibles à l’attribution de PPII aux termes des DGE 45.

51      Les requérants font également valoir qu’ils ont annexé au mémoire en réplique des documents attestant que MM. Bouis et Freese ont participé aux travaux de nombreux comités paritaires, ce que la Commission ne saurait ignorer.

52      La Commission rappelle, premièrement, que l’exercice de promotion 2005 est le premier exercice de promotion auquel les requérants ont participé. Les fonctionnaires de grade A 4, devenu A*12 au 1er mai 2004, auraient jusqu’audit exercice de promotion fait l’objet de la procédure de deuxième filière. Selon la Commission, ces fonctionnaires n’ont pu recevoir de PPDG ou de PPII au titre des exercices de promotion 2003 et 2004 ni être promus au grade supérieur puisque ni les DGE 45 du 26 avril 2002 ni les DGE 45 du 24 mars 2004 ne leur étaient applicables. Ainsi, les requérants ne subiraient aucune discrimination n’étant pas dans la même situation que les fonctionnaires soumis au nouveau système de promotion.

53      Deuxièmement, la Commission relève que l’article 13, paragraphe 3, sous b), des DGE 45 prévoit expressément l’attribution de PPDG aux fonctionnaires de grade A*12, au titre de l’année 2004, et que, au titre de l’exercice de promotion 2005, les articles 4 à 6 des DGE 45 sont pleinement applicables.

54      Troisièmement, la Commission indique que plusieurs textes prévoient l’absence d’attribution de PPII aux fonctionnaires de grade A*12, au titre des années 2003 et 2004. D’abord, les Informations administratives n° 29‑2004 du 30 avril 2004 relatives à l’exercice de promotion 2004 prévoiraient que le nouveau système de promotion ne s’applique pas aux fonctionnaires de grade A 4. Ensuite, l’article 1er des DGE 45 du 24 mars 2004 disposerait que les fonctionnaires de grade A 4 sont exclus de l’exercice de promotion 2004, tel qu’organisé par ces DGE. En outre, l’article 13 des DGE 45, relatif aux dispositions transitoires, ne ferait aucun renvoi aux dispositions de l’article 9 des DGE 45 du 24 mars 2004 qui concerneraient l’attribution de PPII.

55      En vertu de l’article 13 des DGE 45, seuls pourraient être attribués des PPII en raison de tâches accomplies dans l’intérêt de l’institution au cours de la période du 1er janvier au 31 décembre 2004. Partant, aucun PPII ne saurait être octroyé pour l’exercice de promotion 2005 au titre des tâches accomplies dans l’intérêt de l’institution avant 2004.

56      La Commission indique que le seul fait que les requérants aient accompli des tâches supplémentaires dans l’intérêt de l’institution en 2003, ce que, du reste, ils n’établiraient pas, ne leur confèrerait pas le droit d’obtenir des PPII au titre de l’année 2004.

57      La Commission rejette ensuite le grief des requérants selon lequel l’AIPN n’aurait pas tenu compte des tâches qu’ils auraient accomplies en 2004 dans l’intérêt de l’institution. Elle indique que les requérants ne donnent aucune précision d’ordre factuel ou juridique à son appui et qu’il serait donc irrecevable à ce titre. Au surplus, la Commission fait également observer que les fonctionnaires de grade A*12 ont reçu ces PPII en application de l’article 9 des DGE 45.

58      Quatrièmement, la Commission soutient que le grief avancé par les requérants d’après lequel les fonctionnaires de la Commission seraient discriminés par rapport à ceux du Parlement ou du Conseil est de toute évidence irrecevable, en ce qu’il ne satisfait pas aux conditions posées par l’article 44 du règlement de procédure du Tribunal de première instance. Ce grief serait également non fondé, les fonctionnaires de la Commission ne pouvant pas être comparés aux fonctionnaires des autres institutions.

59      Dans sa duplique, la Commission souligne que, selon la jurisprudence, les contraintes inhérentes au passage d’un mode de gestion à un autre, s’agissant de la carrière des fonctionnaires, peuvent imposer à l’administration de s’écarter temporairement et dans certaines limites de l’application stricte des règles et principes de valeur permanente s’appliquant ordinairement aux situations en cause. Le Tribunal de première instance, dans l’arrêt Buendía Sierra/Commission, précité, aurait entériné la légalité de dispositions transitoires dont la durée de validité était limitée à un seul exercice de promotion, ce qui serait le cas de l’article 13 des DGE 45.

60      Toujours dans sa duplique, la Commission fait part de sa perplexité quant à l’observation des requérants selon laquelle, aux termes des DGE 45, ils ne seraient pas éligibles pour l’attribution de PPII, alors qu’ils soutiennent dans la requête que la non-attribution de PPII est contraire à l’article 45 du statut. Selon la Commission, les allégations des requérants concernant les PPII seraient purement abstraites et ne satisferaient pas aux conditions de l’article 44 du règlement de procédure du Tribunal de première instance. À l’audience, la Commission a précisé qu’elle concluait, à titre principal, à l’irrecevabilité du recours.

 Appréciation du Tribunal

–       Observations liminaires

61      Dans le cadre d’un exercice de promotion déterminé, l’attribution de points a des effets qui ne sont pas uniquement limités et circonscrits à cet exercice de promotion. Le système de promotion repose sur la prise en considération de mérites cumulés, représentés par des points accumulés année après année. Il s’ensuit que les points attribués lors d’une année déterminée sont de nature à influer sur plusieurs exercices de promotion (arrêts du Tribunal de première instance du 11 décembre 2003, Breton/Cour de justice, T‑323/02, RecFP p. I‑A‑325 et II‑1587, point 52, et Buendía Sierra/Commission, précité, point 88).

62      Ainsi, la fixation du nombre total de points en vue d’une promotion est un acte autonome qui produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du fonctionnaire en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique, alors même qu’il ne constitue qu’une des étapes de la procédure de promotion, laquelle sera suivie de l’établissement par l’AIPN de la liste des fonctionnaires promus. Partant, la décision de l’AIPN fixant le nombre total des points constitue un acte faisant grief qui peut, à l’instar de la décision arrêtant les promotions, comme indiqué au point 31 du présent arrêt, faire l’objet, en tant que tel, d’une réclamation et, le cas échéant, d’un recours juridictionnel dans le cadre des voies de recours prévues par le statut (voir, en ce sens, arrêt Buendía Sierra/Commission, précité, points 89 et 90).

63      En conséquence, un fonctionnaire non promu, comme les requérants en l’espèce, peut introduire une réclamation et, le cas échéant, un recours juridictionnel non seulement contre, à la fois, la décision de l’AIPN portant fixation du nombre total de points et celle établissant la liste des fonctionnaires promus mais également contre la seule décision de l’AIPN fixant le nombre total de points qui lui sont attribués (voir, en ce sens, arrêt Buendía Sierra/Commission, précité, points 91 à 93).

64      Il y a lieu de relever, en revanche, que selon la jurisprudence, les décisions individuelles d’attribution de certaines catégories de points de promotion constituent des actes préparatoires, préalables et nécessaires à la décision finale fixant le nombre total de points (voir, en ce sens, arrêt Buendía Sierra/Commission, précité, points 96 et 97). En effet, au cours de l’exercice de promotion et avant que l’AIPN ne fixe définitivement le nombre total de points obtenus par chaque fonctionnaire, sont adoptées des décisions individuelles d’attribution de certaines catégories de points de promotion. Il en est ainsi, notamment, de l’octroi de PPDG par les directeurs généraux en application des articles 4 et 5 des DGE 45 ou de l’attribution par l’AIPN, sur proposition des comités de promotion, de PPII en vertu de l’article 10, paragraphe 2, des DGE 45. Ces décisions ne fixent pas de manière définitive la position de l’AIPN à l’égard des fonctionnaires concernés.

65      Cela étant, force est de constater que la décision définitive de l’AIPN fixant le nombre total des points obtenus par chaque fonctionnaire, qui est consultable dans le dossier de promotion individuel, via le site Sysper 2, est constitué d’un faisceau de décisions individuelles et définitives d’attribution de catégories particulières de points de promotion qui apparaissent en tant que telles dans le dossier de promotion individuel lui-même.

66      Si ces dernières décisions doivent être considérées, elles aussi, comme des décisions préparatoires et préalables à la décision fixant le nombre total de points et ne sauraient donc faire courir le délai de réclamation, elles n’en constituent pas moins des décisions fixant de manière définitive la situation du fonctionnaire intéressé en ce qui concerne la catégorie de points en cause.

67      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, en demandant, au stade final de la procédure de promotion, l’annulation des décisions individuelles ne leur octroyant ni PPDG ni PPII au titre des années 2003 et 2004, les requérants ont nécessairement entendu contester le nombre total de points obtenus par chacun d’eux.

68      Il résulte des considérations qui précèdent que le chef de conclusions tendant à l’annulation des décisions de non-attribution de PPDG et de PPII au titre des années 2003 et 2004 ne saurait être rejeté comme irrecevable du seul fait qu’il n’a pas été formellement dirigé contre la décision portant fixation du nombre total des points.

–       Sur les moyens invoqués à l’appui du second chef de conclusions

69      À l’appui de leur recours, les requérants invoquent deux moyens tirés, d’une part, de la violation de l’article 45 du statut et, d’autre part, des principes d’égalité de traitement et de vocation à la carrière, au soutien notamment d’une exception d’illégalité à l’encontre des DGE 45. Les arguments avancés par les requérants au soutien de ces moyens sont étroitement liés. Il y a donc lieu de les examiner ensemble.

70      Avant d’examiner l’exception d’illégalité dirigée contre les DGE 45, il convient de rappeler que, pour les raisons indiquées aux points 4 à 9 du présent arrêt, l’exercice de promotion 2005 est le premier au cours duquel les fonctionnaires de grade A*12 ont été soumis au nouveau système de promotion. En effet, les DGE 45 du 26 avril 2002, applicables à l’exercice de promotion 2003, excluaient du champ d’application desdites DGE les fonctionnaires détenant le grade A 4 dans la structure de carrière prévue par l’ancien statut. De même, selon l’article 1er, paragraphe 1, des DGE 45 du 24 mars 2004, applicables à l’exercice de promotion 2004, seuls les fonctionnaires rémunérés sur les crédits du budget général dont le grade permettait encore une promotion au grade supérieur dans la catégorie ou le cadre dont ils relevaient, à l’exclusion des fonctionnaires de grade supérieur ou égal au grade A 4 ou LA 4, étaient soumis au nouveau système de promotion.

71      Il y a lieu d’indiquer ensuite que le passage de la procédure de deuxième filière au nouveau système de promotion s’est accompagné de l’adoption de mesures transitoires contenues à l’article 13, paragraphe 3, des DGE 45.

72      L’article 13, paragraphe 3, des DGE 45 dispose notamment que, pour les fonctionnaires de grade A*12, des points de priorité sont attribués au titre de l’année 2004. À cet égard, il y a lieu, d’abord, de constater que l’article 13, paragraphe 3, des DGE 45 fait mention de l’attribution de PPDG aux fonctionnaires de grade A*12 au titre de l’année 2004, par un renvoi exprès aux articles 4 à 6 des DGE 45. En revanche, aucune mention n’est faite de l’octroi, à ces mêmes fonctionnaires, de PPDG au titre de l’année 2003, ou de PPII au titre des années 2003 ou 2004 pour des tâches accomplies dans l’intérêt de l’institution respectivement en 2002 ou 2003. Ensuite, il importe d’observer que, ni au titre de l’année 2004, ni au titre d’une année antérieure, l’article 13 des DGE 45 n’opère un renvoi à l’article 9 des DGE 45 relatif à l’attribution des PPII.

73      Ainsi, à supposer que, outre l’exception d’illégalité soulevée à l’encontre des DGE 45, les requérants invoquent la violation par l’AIPN des DGE 45 en ce qu’ils n’ont pas reçu de PPDG au titre de l’année 2003 ni de PPII au titre des années 2003 et 2004, force est de constater qu’aucune disposition des DGE 45 n’en prévoyait l’attribution aux fonctionnaires de grade A*12.

74      En ce qui concerne le grief pris de ce que les requérants n’auraient pas reçu, lors de l’exercice 2005, de PPDG au titre de l’année 2004, toujours à supposer que les requérants aient soulevé un tel grief, il convient de constater qu’aucune argumentation ni aucun élément de fait et de droit précis n’est invoqué par les requérants à son soutien. Or, comme indiqué au point 40 du présent arrêt, toute requête doit contenir l’exposé sommaire des moyens invoqués, ce en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance. Selon la jurisprudence, afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours. Partant, ce grief doit être rejeté comme irrecevable.

75      Enfin, quant au prétendu refus d’attribuer aux requérants des PPII au titre de l’exercice 2005 pour des tâches accomplies en 2004, force est de constater qu’aucun élément de fait concret n’est invoqué par les requérants dans leur requête quant à des tâches qu’ils auraient effectuées en 2004 dans l’intérêt de l’institution. Dans leur mémoire en réplique, les requérants se bornent à affirmer que bien qu’« ils n’aient pas à ce stade à démontrer qu’ils ont effectivement effectué des tâches dans l’intérêt du service dès lors qu’ils ne sont pas éligibles pour l’attribution de tels points aux termes des DGE […] et qu’aucun examen n’a été effectué à cette fin, […] MM. Bouis et Freese annexent au présent mémoire des documents attestant qu’ils ont participé aux travaux de nombreux comités paritaires, ce que la Commission n’ignore pas ».

76      Or, comme rappelé aux points 40 et 74 du présent arrêt, les éléments essentiels de fait et de droit invoqués dans la requête doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours. Le grief pris de la non-attribution de PPII au titre de l’exercice de promotion 2005 pour les tâches accomplies dans l’intérêt de l’institution en 2004 doit donc être rejeté comme irrecevable.

77      Après ces considérations, il convient d’examiner l’exception d’illégalité dirigée contre les DGE 45, en ce qu’elles ne prévoient pas l’attribution, aux fonctionnaires de grade A*12, de PPDG au titre de l’année 2003 ni de PPII au titre des années 2003 et 2004.

78      Les requérants considèrent que la non-attribution de ces points au titre des années susmentionnées les met en concurrence avec les fonctionnaires promus au grade A*12 en 2003 ou 2004, en violation de l’article 45 du statut ainsi que des principes d’égalité de traitement et de vocation à la carrière. Ils font valoir que leurs mérites font l’objet d’une comparaison avec les fonctionnaires promus au grade A*12 en 2003 ou en 2004 alors que ceux-ci bénéficient d’une prise en compte plus étendue de leurs mérites.

79      Ces critiques doivent être envisagées en tenant compte de ce qu’elles se rapportent aux mesures de transition que la Commission, de l’avis des requérants, aurait dû adopter. Or, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, les contraintes inhérentes au passage d’un mode de gestion à un autre, s’agissant de la carrière des fonctionnaires, peuvent imposer à l’administration de s’écarter temporairement, et dans certaines limites, de l’application stricte des règles et principes de valeur permanente s’appliquant ordinairement aux situations en cause. Toutefois, de tels écarts doivent être justifiés par un besoin impératif lié à la transition et ne sauraient aller au-delà, dans leur durée ou dans leur portée, de ce qui est indispensable pour assurer un passage ordonné d’un régime à l’autre (arrêts du Tribunal de première instance du 11 février 2003, Leonhardt/Parlement, T‑30/02, RecFP p. I‑A‑41 et II‑265, point 51, et Buendía Sierra/Commission, précité, point 213).

80      En l’espèce, comme énoncé au point 13 du présent arrêt, l’article 13, paragraphes 2 et 3, des DGE 45 a prévu l’attribution, à titre transitoire, aux fonctionnaires de grade A*12, de PPDG au titre de l’année 2004, de PPTA dans la limite de quatre points, de PPTCP dans la limite de trois points et de PPT dans la limite de sept points. Ainsi, la Commission a décidé de limiter l’attribution de points de priorité à titre transitoire en ne prévoyant pas, notamment, l’octroi de PPII au titre de l’année 2004 pour des tâches accomplies dans l’intérêt de l’institution en 2003. Une telle limitation ne peut être regardée comme excédant le pouvoir dont dispose la Commission pour aménager, à titre transitoire, le changement des règles relatives à la promotion des fonctionnaires. Elle se borne en effet à fixer une limite à la prise en compte des mérites antérieurement reconnus (voir, en ce sens, arrêts Leonhardt/Parlement, précité, point 56, et du Tribunal de première instance du 3 mai 2006, Klaas/Parlement, T‑393/04, RecFP p. I–A‑2‑103, point 56).

81      Certes, il aurait été théoriquement possible d’envisager un système différent dans lequel, notamment, les fonctionnaires de grade A*12 auraient obtenu des PPII au titre des années 2003 et 2004 ou des PPDG au titre de l’année 2003 prise en tant que telle. Toutefois, il n’existait pas d’obligation pour la Commission d’adopter de telles modalités. En effet, le changement des méthodes en vigueur pour la promotion des fonctionnaires a, par hypothèse, pour but de remédier à certains inconvénients résultant de l’application des règles anciennes. Il est donc inhérent à un tel processus de réforme, dont l’administration peut apprécier avec une large marge de manœuvre la nécessité (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 1er juillet 1976, De Wind/Commission, 62/75, Rec. p. 1167, point 17 ; arrêt du Tribunal de première instance du 13 juillet 1995, Rasmussen/Commission, T‑557/93, RecFP p. I‑A‑195 et II‑603, point 20), de faire partir, à une date donnée, l’évaluation des mérites des fonctionnaires sur de nouvelles bases (voir, en ce sens, arrêts Leonhardt/Parlement, précité, point 55, et Buendía Sierra/Commission, précité, point 220).

82      Compte tenu des considérations énoncées au point 81 du présent arrêt, l’argument des requérants selon lequel, pour les périodes antérieures au 31 décembre 2003, leur mérite n’aurait pas été pris en compte dans l’attribution de PPDG, doit être écarté. En effet, aux termes de l’article 13, paragraphe 3, sous b), ii), des DGE 45, il est énoncé qu’« il est tenu compte du mérite accumulé dans le grade par les fonctionnaires concernés, jusqu’au 31 décembre 2003 ».

83      Il convient également de rejeter le grief pris d’une inégalité de traitement entre les fonctionnaires de grade A*12 selon qu’ils ont été promus à ce grade en 2003, 2004 ou à une date antérieure à 2003. En effet, il ressort de la jurisprudence, qu’il y a violation du principe d’égalité de traitement lorsque deux catégories de personnes, dont les situations factuelles et juridiques ne présentent pas de différence essentielle, se voient appliquer un traitement différent ou lorsque des situations juridiques différentes sont traitées de manière identique (arrêt Klaas/Parlement, précité, point 69).

84      Or, il y a lieu de rappeler d’abord que les fonctionnaires promus au grade A*12 avant 2003 étaient régis par la procédure de deuxième filière jusqu’en 2005. Leurs situations juridiques et factuelles étaient donc différentes, en 2003 et 2004, de celles des autres fonctionnaires soumis, en 2003 et 2004, au nouveau système de promotion. Il convient de relever ensuite que, à l’égard des fonctionnaires de grade A*12 qui se sont vu appliquer le nouveau système de promotion en 2005, les mesures transitoires prévues par l’article 13 des DGE 45 ont précisément eu pour objet d’assurer leur égalité de traitement avec ceux soumis avant 2005 au nouveau système de promotion. Ainsi, comme indiqué aux points 12 et 13 du présent arrêt, l’article 13 des DGE 45 a prévu l’attribution, à titre transitoire, aux fonctionnaires de grade A*12, de PPTA, de PPTCP, de PPT et de PPDG au titre de l’année 2004. Or, les requérants n’établissent pas en quoi, malgré l’existence de ces mesures transitoires destinées à prendre en compte leur ancienneté dans le grade A 4, ils ont fait l’objet d’une inégalité de traitement au regard de la situation des fonctionnaires qui ont été promus au grade A*12 en 2003 ou en 2004. Dans ces conditions, c’est à tort que les requérants soutiennent qu’ils ont fait l’objet d’un traitement discriminatoire.

85      L’allégation des requérants selon laquelle les fonctionnaires du Parlement et du Conseil bénéficieraient d’un régime plus favorable ne saurait pas davantage être retenue. En effet, les requérants se bornent à soutenir qu’ils ont fait l’objet d’un traitement discriminatoire sans étayer cette affirmation par des éléments concrets. Il convient en outre de considérer qu’il n’existait aucune obligation pour la Commission d’adopter le système, prétendument moins attentatoire à leurs intérêts, mis en œuvre par lesdites institutions (voir, en ce sens, arrêt Buendía Sierra/Commission, précité, point 220).

86      Quant au moyen tiré de la violation du principe de la vocation à la carrière, ainsi qu’il résulte d’une jurisprudence constante, l’obligation pour l’AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des candidats à la promotion, prévu par l’article 45 du statut, est l’expression à la fois du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires et de celui de leur vocation à la carrière (arrêts du Tribunal de première instance du 29 février 1996, Lopes/Cour de justice, T‑280/94, RecFP p. I‑A‑77 et II‑239, point 138, et Leonhardt/Parlement, précité, point 67). Or, il y a lieu de constater, en l’espèce, que les requérants n’ont avancé aucune argumentation spécifique relative à ce moyen, différente de celle développée au soutien des moyens tirés de la violation de l’article 45 du statut et du principe d’égalité de traitement.

87      De l’ensemble de ce qui précède, il ressort que les moyens tirés de la violation de l’article 45 du statut, des principes d’égalité de traitement et de vocation à la carrière doivent être rejetés, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’exception d’irrecevabilité du recours soulevée par la Commission au cours de l’audience. Par conséquent, le second chef de conclusions doit également être rejeté.

88      En conclusion, les deux chefs de conclusions invoqués par les requérants ayant été rejetés, il convient de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

89      En vertu de l’article 122 du règlement de procédure du Tribunal, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement de procédure, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

90      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Les requérants ayant succombé en leur recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Van Raepenbusch

Boruta

Kanninen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 décembre 2008.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       H. Kanninen

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu

ANNEXE

Karl Freese, demeurant à Merzig (Allemagne),

Andreas Menidiatis, demeurant à Bruxelles (Belgique),

Maurice Pierre Robert, demeurant à Bruxelles (Belgique).


* Langue de procédure : le français.