Language of document : ECLI:EU:F:2007:220

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

12 décembre 2007 (*)

« Fonction publique – Irrecevabilité manifeste – Article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance »

Dans l’affaire F‑111/07,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Georgi Kerelov, demeurant à Pazardzhik (Bulgarie), représenté par Me A. Kerelov, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, Mme I. Boruta et M. H. Kanninen, juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 9 octobre 2007 par courrier électronique (le dépôt de l’original étant intervenu le 15 octobre suivant), M. Kerelov demande, notamment, l’annulation de la décision du directeur de l’Office de sélection du personnel des Communautés européennes (EPSO), du 14 décembre 2006 (ci-après la « décision attaquée »), de ne pas l’inviter à remplir un acte de candidature en vue d’une possible admission au concours général EPSO/AD/46/06 (publié le 21 juin 2006, JO C 145 A, p. 3, ci-après le « concours »).

 Faits à l’origine du litige

2        Le requérant s’est porté candidat au concours, organisé par l’EPSO en vue de la constitution d’une réserve de recrutement d’administrateurs (AD 5) de citoyenneté bulgare dans les domaines de l’administration publique européenne, du droit, de l’économie et de l’audit.

3        Après avoir passé sur ordinateur le test d’accès à ce concours, le requérant a reçu une lettre de l’EPSO, datée du 14 décembre 2006, l’informant du fait que les notes qu’il avait obtenues audit test, bien que supérieures ou égales aux notes minimales requises, étaient insuffisantes pour lui permettre de figurer parmi les candidats ayant obtenu les meilleures notes, seuls candidats invités à remplir un acte de candidature en vue d’une possible admission au concours.

4        En l’espèce, le requérant avait reçu une note de 38,666/60, alors que la moins élevée des meilleures notes obtenues, permettant d’être invité à remplir un acte de candidature, était de 39,334/60 points.

5        Par lettre du 6 mars 2007, le requérant a adressé au directeur de l’EPSO une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »), contre la décision attaquée.

6        N’ayant pas reçu de réponse à sa réclamation dans le délai de quatre mois, fixé à l’article 90, paragraphe 2, second alinéa, du statut, le requérant a introduit le présent recours.

 Conclusions du requérant

7        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission des Communautés européennes à lui payer une indemnité forfaitaire évaluée ex aequo et bono à 1 000 euros ainsi que les intérêts légaux à partir de l’introduction de l’instance pour les dommages matériels et moraux subis du fait de la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

 En droit

8        À l’appui de son recours, le requérant soulève un moyen unique, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement, sur la base de l’argumentation suivante :

–        certains candidats se seraient procurés à l’avance les questions et les réponses correspondantes relatives au test d’accès au concours, des fuites massives à cet égard ayant été rapportées par la presse bulgare ;

–        le temps imparti pour répondre aux questions n’aurait pas été différencié en fonction de la langue maternelle des candidats et aurait été trop court par rapport aux efforts des candidats de langue maternelle bulgare pour leur permettre de comprendre le sens des questions, ce qui expliquerait, selon le requérant, sa propre difficulté pour répondre dans le temps imparti aux quatre dernières questions sur les soixante posées ;

–        la deuxième série des trente questions du test aurait à la fois concerné les domaines du droit et de la comptabilité, opérant ainsi la présélection des candidats juristes en ayant recours à des critères étrangers à la finalité du concours.

9        En vertu de l’article 76 du règlement de procédure, adopté le 25 juillet 2007 (JO L 225, p. 1) et entré en vigueur le 1er novembre suivant, lorsqu’un recours est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

10      En l’espèce, à la lumière du dossier, le Tribunal décide de statuer sans poursuivre la procédure.

11      Selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur (voir arrêt de la Cour du 12 novembre 1981, Salumi e.a., 212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9 ; arrêts du Tribunal de première instance du 19 février 1998, Eyckeler & Malt/Commission, T‑42/96, Rec. p. II‑401, point 55, et du 12 septembre 2007, González y Díez/Commission, T‑25/04, non encore publié au Recueil, point 58). Néanmoins, il est de jurisprudence établie que la recevabilité d’une requête s’apprécie au moment de son introduction (arrêt de la Cour du 27 novembre 1984, Bensider e.a./Commission, 50/84, Rec. p. 3991, point 8, et ordonnance du président du Tribunal de première instance du 8 octobre 2001, Stauner e.a./Parlement et Commission, T‑236/00 R II, Rec. p. II‑2943, point 49).

12      Il résulte de ces considérations que si la règle, énoncée à l’article 76 du règlement de procédure, selon laquelle le Tribunal peut rejeter par ordonnance un recours qui apparaît manifestement irrecevable, est une règle de procédure, qui s’applique dès la date de l’entrée en vigueur dudit règlement aux litiges pendants devant le Tribunal, il n’en va pas de même des règles sur la base desquelles ce dernier peut, en application de cet article, regarder un recours comme manifestement irrecevable. Ainsi, les règles fixant les conditions de recevabilité d’une requête sont nécessairement celles qui étaient applicables à la date d’introduction de celle‑ci.

13      En l’espèce, la requête ayant été introduite le 9 octobre 2007, il y a lieu de se référer aux règles applicables à l’époque, à savoir l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance des Communautés européennes, applicable mutatis mutandis au Tribunal, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier.

14      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 7, paragraphe 1, de l’annexe I dudit statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance, la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit, sur lesquels celui-ci se fonde, ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnances du Tribunal de première instance du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, Rec. p. II‑523, point 20, et du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, Rec. p. II‑1703, point 49 ; arrêt du Tribunal de première instance du 15 juin 1999, Ismeri Europa/Cour des comptes, T‑277/97, Rec. p. II‑1825, point 29).

15      Ainsi qu’il découle de la jurisprudence, la partie requérante ne saurait se limiter à faire une énonciation abstraite de ses moyens, notamment en se bornant à affirmer que l’acte attaqué serait illégal, sans étayer plus avant cette affirmation en explicitant en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est basé (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 18 novembre 1992, Rendo e.a./Commission, T‑16/91, Rec. p. II‑2417, point 130 ; du 16 mars 1993, Blackman/Parlement, T‑33/89 et T‑74/89, Rec. p. II‑249, points 64 et 65, ainsi que du 17 mars 1994, Hoyer/Commission, T‑43/91, RecFP p. I‑A‑91 et II‑297, point 22).

16      Or, en l’espèce, le moyen tiré de la violation du principe d’égalité de traitement est énoncé dans la requête par des considérations abstraites, qui n’exposent pas de façon pertinente et cohérente les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels se fondent les conclusions de la requête, de telle sorte qu’elles ne permettent pas à la partie défenderesse de préparer utilement sa défense ni au Tribunal de statuer sur le recours.

17      Le requérant se borne ainsi à alléguer qu’il y aurait eu des fuites concernant les questions et les réponses correspondant au test, rapportées par la presse bulgare, que le temps accordé pour répondre aux questions aurait été insuffisant pour les candidats de langue maternelle bulgare, et que la deuxième série de trente questions n’aurait pas été pertinente par rapport au domaine du concours choisi par lui, à savoir le droit, sans développer la moindre argumentation au soutien de sa thèse. En particulier, il n’est pas aisé de comprendre en quoi, selon le requérant, les candidats de langue maternelle bulgare auraient pu être désavantagés en raison du temps imparti pour effectuer le test d’accès, alors que le concours était ouvert uniquement à des candidats de citoyenneté bulgare et que, au nombre des conditions d’admission au concours, figurait la connaissance approfondie de cette langue. Ces allégations ne sauraient être considérées comme suffisantes au regard de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance.

18      De surcroît, la requête ne contient aucun argument au soutien de la thèse du requérant, selon laquelle le principe d’égalité de traitement aurait été méconnu du fait des circonstances alléguées dans les deux derniers des trois arguments avancés, dès lors que la prétendue insuffisance du temps imparti pour passer le test ainsi que la prétendue non-pertinence d’une série de questions concernaient de manière identique, d’une part, tous les candidats au concours, d’autre part, tous les candidats du domaine « droit ».

19      Compte tenu de ce qui précède, et sans qu’il y ait lieu de s’interroger sur la question de savoir si la décision attaquée constitue un acte faisant grief, le recours doit être rejeté comme manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

20      En vertu de l’article 122 du règlement de procédure, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième de ce règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur dudit règlement, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

21      En vertu de l’article 88 du règlement de procédure du Tribunal de première instance, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. La présente ordonnance intervient avant que la partie défenderesse ait déposé son mémoire en défense. Par conséquent, le requérant ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme manifestement irrecevable.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 12 décembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

      S. Van Rapenbusch      

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : le français.