Language of document : ECLI:EU:T:2008:418

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

8 octobre 2008 (*)

« Clause compromissoire – Programme d’encouragement au développement, à la distribution et à la promotion des oeuvres audiovisuelles européennes (MEDIA Plus) – Demande de paiement d’un soutien financier – Existence d’une clause compromissoire – Compensation – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑122/06,

Helkon Media AG, établie à Munich (Allemagne), représentée par Me U. Karpenstein, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. G. Wilms et Mme I. Kaufmann-Bühler, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours au titre de l’article 238 CE, visant à obtenir la condamnation de la Commission à payer à la requérante une somme prétendument due en vertu du contrat relatif au soutien financier communautaire accordé au projet « Dark Blue World » (Projet 2002‑4212‑0103DI010006DE),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. S. Papasavvas (rapporteur) et A. Dittrich, juges,

greffier : Mme C. Kantza, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 avril 2008,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Règlement financier

1        L’article 73, paragraphe 1, du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1), applicable depuis le 1er janvier 2003, dispose :

« 1. Le comptable prend en charge les ordres de recouvrement des créances dûment établis par l’ordonnateur compétent. Il est tenu de faire diligence en vue d’assurer la rentrée des recettes des Communautés et doit veiller à la conservation des droits de celles-ci.

Le comptable procède au recouvrement par compensation et à due concurrence des créances des Communautés à l’égard de tout débiteur lui-même titulaire d’une créance certaine, liquide et exigible à l’égard des Communautés. »

 Décision 2000/821/CE

2        L’article 6 de la décision 2000/821/CE du Conseil, du 20 décembre 2000, portant sur la mise en oeuvre d’un programme d’encouragement au développement, à la distribution et à la promotion des oeuvres audiovisuelles européennes (MEDIA Plus – Développement, Distribution et Promotion) (2001-2005) (JO L 336, p. 82), dispose :

« Les soutiens financiers accordés dans le cadre du programme peuvent être octroyés sous forme d’avances conditionnellement remboursables ou de subventions, tels que définis en annexe […] »

3        Le point 2.2.2, premier alinéa, de l’annexe de la décision 2000/821 prévoit :

« Avant d’approuver une demande de soutien communautaire, la Commission l’évalue soigneusement afin d’en juger la conformité avec la présente décision et avec les conditions exposées à la présente section, sous-sections 2 et 3, de la présente annexe. »

4        Le point 2.2.3 de la même annexe dispose :

« La Commission détermine les règles pour les engagements et les paiements relatifs aux actions entreprises en conformité avec la présente décision, conformément aux dispositions appropriées de la réglementation financière.

Elle veille tout particulièrement à ce que les procédures administratives et financières mises en oeuvre soient adaptées aux objectifs poursuivis ainsi qu’aux pratiques et intérêts de l’industrie audiovisuelle. »

5        Le point 2.3.1, deuxième alinéa, de ladite annexe dispose :

« La Commission assure la sélection définitive des bénéficiaires du programme et décide des soutiens financiers à accorder […] Elle assure la motivation de ses décisions auprès des demandeurs de soutien communautaire et veille à la transparence de la mise en oeuvre du programme. »

 Antécédents du litige

6        La requérante, Helkon Media AG, est une société anonyme de droit allemand dont le siège est à Munich. Son objet social est de produire, de distribuer et de louer des produits audiovisuels. Elle vise aussi à fournir des services dans le domaine cinématographique et télévisuel. Elle a également pour objet d’acquérir des participations dans des sociétés du même domaine et de les diriger.

7        Le 1er octobre 2002, une procédure de faillite a été ouverte à l’égard de la requérante.

8        Dans le cadre de la décision 2000/821, la Communauté européenne, représentée par la Commission, a conclu, le 7 octobre 2002, un accord (ci-après l’« accord ») avec la requérante portant sur le soutien financier au projet de film « Dark Blue World » (ci-après le « projet »).

9        Aux termes de l’article 4.2 de l’accord, la Commission s’engageait à mettre à disposition de la requérante une somme d’un montant maximal de 120 000 euros pour la réalisation du projet. Cette somme devait être répartie entre, d’une part, une subvention représentant 50 % du coût réel de la synchronisation et du sous-titrage du film faisant l’objet du projet, à concurrence d’un montant maximal de 30 000 euros, et, d’autre part, un prêt remboursable représentant 50 % des coûts de distribution de ce film, à concurrence d’un montant maximal de 90 000 euros.

10      L’annexe II de l’accord (ci-après l’« annexe II ») prévoit à son article 3.1 que le bénéficiaire peut refuser, à tout moment, le soutien financier, moyennant un préavis de deux mois, présenté par écrit. Dans cette éventualité, la Commission peut réclamer le remboursement intégral ou partiel des sommes déjà versées en vertu de l’accord, dans les conditions et les délais qu’elle fixe.

11      L’article 3.2 de l’annexe II dispose que la Commission peut mettre fin à l’accord si le bénéficiaire ne remplit pas, pour des raisons autres que la force majeure, l’une de ses obligations en vertu de l’accord et s’il ne les remplit toujours pas un mois après avoir été informé par lettre recommandée.

12      Aux termes de l’article 3.3 de l’annexe II, la Commission peut résilier l’accord sans préavis et sans paiement de la moindre compensation si le bénéficiaire est déclaré être en faillite, est engagé dans ou soumis à une telle procédure, s’il ne se conforme pas à l’article 2 de ladite annexe, ou s’il fournit des déclarations fausses ou incomplètes pour obtenir le prêt prévu dans l’accord. Dans ces éventualités, la Commission peut réclamer le remboursement intégral ou partiel des sommes déjà versées en vertu de l’accord.

13      Selon l’article 3.7 de l’annexe II, la décision de recouvrement adoptée par la Commission et transmise au bénéficiaire, débiteur à l’égard de la Commission, sera exécutoire au sens de l’article 256 CE. L’article 3.8 de l’annexe II dispose que les sommes devant être remboursées à la Commission peuvent être compensées par toute somme, de quelque nature qu’elle soit, due au bénéficiaire.

14      L’article 8 de l’annexe II, intitulé « Compétence et droit applicable », stipule que « [l]e bénéficiaire peut former un recours contre les décisions de la Commission relatives à l’application des dispositions de l’accord, y compris ses annexes, auprès du Tribunal […] et, en cas de pourvoi, devant la Cour […] ».

15      Par lettre du 14 septembre 2004, la Commission a annoncé à la requérante qu’elle procédait à la compensation des 120 000 euros qu’elle devait à la requérante en vertu de l’article 4.2 de l’accord, au moyen de quatre créances d’un montant total de 281 283,50 euros, qu’elle avait constatées par les notes de débit nos 3240406121, 3240408508, 3240508254 et 3240508873. La Commission a indiqué qu’elle effectuerait cette opération conformément aux modalités de paiement prévues à l’article 73, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement n° 1605/2002.

16      Par lettre du 15 mars 2005, la requérante a contesté le bien-fondé de la compensation. Elle a indiqué que cette opération n’était pas possible, parce que le débiteur d’une partie des créances de la Commission était une autre entreprise et que la législation allemande n’autorisait pas la compensation après l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité. Elle a soutenu par ailleurs que certains des montants indiqués dans les notes de débit étaient incorrects.

17      Par lettre du 20 mai 2005, la Commission a indiqué à la requérante qu’elle estimait que la compensation était fondée.

18      Par courriers adressés à la Commission le 15 août 2005 et le 10 janvier 2006, la requérante a de nouveau contesté le bien-fondé de la compensation effectuée.

19      Par lettre du 8 février 2006, la Commission a souligné que la compensation avait été opérée en septembre 2004 et que le délai imparti pour demander l’annulation de cette décision était échu.

 Procédure

20      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 avril 2006, la requérante a introduit le présent recours.

21      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 14 juillet 2006, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. La requérante a déposé ses observations sur cette exception le 8 août 2006. Par ordonnance du Tribunal (quatrième chambre) du 5 décembre 2006, l’exception d’irrecevabilité a été jointe au fond et les dépens ont été réservés.

22      Le 18 décembre 2006, le Tribunal a adressé une question aux parties à la procédure. La requérante a déposé ses observations sur cette question le 22 janvier 2007 et la Commission y a répondu dans son mémoire en défense, déposé le 29 janvier 2007.

23      La requérante a renoncé au dépôt d’un mémoire en réplique.

24      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la huitième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

25      Par décision du président du Tribunal du 15 novembre 2007, l’affaire a été confiée à un nouveau juge rapporteur.

26      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 23 avril 2008.

 Conclusions des parties

27      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable ;

–        condamner la Commission à lui verser la somme de 120 000 euros ;

–        condamner la Commission aux dépens.

28      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, rejeter le recours comme irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Arguments des parties

29      À l’appui de son exception d’irrecevabilité, en premier lieu, la Commission soutient que le Tribunal n’est pas compétent pour connaître du présent recours. Eu égard à son libellé, l’article 8 de l’annexe II (voir point 14 ci-dessus) ne saurait être qualifié de « clause compromissoire » au sens de l’article 238 CE, mais constituerait un rappel du droit du bénéficiaire de former un recours devant le Tribunal contre des actes administratifs de la Commission. Elle souligne que, selon la jurisprudence, une clause compromissoire n’existe que dans l’hypothèse où, en vertu d’une clause convenue entre les parties, des litiges découlant de relations contractuelles de la Communauté européenne, qui relèvent en principe de la compétence des juridictions nationales, sont soumis aux juridictions communautaires. Or, en l’espèce, l’élément de réciprocité, qui caractérise normalement une telle clause, ferait défaut.

30      Tout d’abord, l’article 8 de l’annexe II se référerait au seul « bénéficiaire » du soutien financier et non aux « parties contractantes ». L’emploi du terme « bénéficiaire » renverrait à la législation relative aux subventions et désignerait le destinataire d’un acte administratif générateur de droits. La relation existant en l’espèce entre la Commission et la requérante ne serait donc pas de nature contractuelle.

31      Ensuite, la clause se rapporterait aux « décisions » de la Commission, notion qui renvoie à la nature administrative des mesures prises par la Commission dans le cadre de l’allocation de subventions. Cela serait également corroboré par la référence faite, dans l’article 3.7 de l’annexe II (voir point 13 ci-dessus), à l’article 256 CE relatif à l’« exécution immédiate des décisions ». Ainsi, l’accord n’aurait été conclu que pour définir plus précisément les obligations du bénéficiaire et les conditions dans lesquelles l’autorité publique octroie la subvention.

32      Enfin, contrairement aux clauses qui ont, selon la jurisprudence, été considérées comme étant compromissoires, l’article 8 de l’annexe II ne se réfère pas à « l’exécution, la non-exécution ou l’interprétation des relations » entre la Commission et une autre partie contractante. En effet, la Commission n’ayant pas besoin d’un tel droit de recours, dès lors qu’elle peut prendre les dispositions nécessaires par voie d’acte administratif, il s’agirait en réalité d’une clause purement déclaratoire, qui renvoie à la possibilité d’introduire un recours en vertu de l’article 230 CE.

33      En deuxième lieu, la Commission estime que la requérante, en introduisant un recours en paiement, attaque de facto et de jure la légalité de sa décision relative à la compensation. Elle tenterait ainsi de contourner le délai fixé à l’article 230, quatrième alinéa, CE et la présomption de légalité de ses décisions. Elle chercherait également à se soustraire à la charge de la preuve des prétendues illégalités commises par la Commission sur lesquelles elle fonde sa demande. Or, il résulterait de la jurisprudence que l’acte de compensation est un acte susceptible de faire l’objet d’un recours au titre de l’article 230 CE et que cet acte, qui est obligatoire en vertu du libellé d’un règlement jouissant de la primauté du droit communautaire, a pour finalité de protéger les intérêts financiers de la Communauté.

34      En troisième lieu, la Commission indique qu’une requalification du présent recours en demande d’annulation en vertu de l’article 230 CE devrait être exclue, dès lors que, d’une part, le recours doit s’analyser comme une action en paiement et que, d’autre part, la requérante a persisté dans cette voie de droit.

35      En dernier lieu, elle estime que, dans l’hypothèse où le Tribunal procéderait à une telle requalification, le recours serait irrecevable, puisqu’il a été introduit hors délai. En effet, les décisions de compensation de la Commission constitueraient des décisions au sens de l’article 230 CE. En l’espèce, l’acte de compensation étant daté du 14 septembre 2004, le recours aurait été déposé bien après l’expiration du délai prévu à l’article 230, cinquième alinéa, CE.

36      La requérante estime que son recours est recevable. En premier lieu, elle souligne que la créance dont elle se prévaut trouve son origine dans l’accord, qui serait un contrat qu’elle a conclu avec la Commission dans un rapport d’égalité et non de subordination. Si la Commission a pris, avant la conclusion de l’accord, la décision interne d’accorder une subvention, cette décision ne lui aurait pas été communiquée et ne produirait pas d’effets de droit à son égard. Seule la conclusion de l’accord lui aurait permis de réclamer le versement des fonds de soutien et l’aurait engagée auprès de la Commission à mettre en œuvre le projet.

37      Cela serait attesté notamment par le fait que les lignes directrices relatives à l’appel à propositions 21/2001, qui précisent les conditions d’octroi de soutiens financiers dans le cadre du programme MEDIA Plus, indiquent en leur point 1 que les projets de distribution sélectionnés font l’objet « d’un contrat conclu entre la Commission et chaque distributeur, qui exposera spécialement les arrangements pour le paiement et le remboursement du soutien financier accordé ». De plus, le règlement n° 1605/2002, d’une part, indique que les aides financières font l’objet d’un accord écrit (article 108, paragraphe 1) et, d’autre part, désigne la personne censée recevoir ces aides sous la dénomination de « bénéficiaire » dans la version anglaise et de « destinataire » dans la version allemande (article 109, paragraphe 2).

38      En deuxième lieu, la requérante fait valoir que l’article 8 de l’annexe II contient une clause compromissoire qui lui permet d’introduire, sans délai, devant le Tribunal un recours au titre de l’article 238 CE. En outre, l’argumentation de la Commission selon laquelle la compensation à laquelle elle a procédé serait devenue définitive doit être rejetée, selon la requérante, cette dernière ayant émis, en date du 15 mars 2005, des réserves sur la compensation litigieuse.

39      Par ailleurs, le fait que la rédaction de la clause contenue à l’article 8 de l’annexe II diverge de celle généralement employée dans les clauses compromissoires ne serait pas déterminant. Dès lors que la clause serait, à plusieurs égards, linguistiquement imparfaite, il faudrait donner priorité à l’interprétation téléologique. Une clause compromissoire au profit du juge communautaire présentant pour la Commission plusieurs avantages, il y a lieu, selon la requérante, d’écarter l’idée d’une clause purement déclaratoire, qui serait superflue. Ainsi, selon elle, un contrat formulé par la Commission doit être placé sous la compétence du juge communautaire s’il comporte une clause attributive de juridiction.

40      En troisième lieu, la requérante conteste l’argumentation de la Commission selon laquelle elle aurait dû introduire un recours sur le fondement de l’article 230, quatrième alinéa, CE. La Commission ne pourrait pas, en l’absence de disposition expresse, troubler le rapport qu’elle entretient avec ses partenaires contractuels par l’adoption de mesures administratives, en particulier par l’adoption de décisions au titre de l’article 249 CE. L’existence d’une clause compromissoire obligerait les parties contractantes à régler les litiges qui surviennent entre elles par la voie d’un recours au titre de l’article 238 CE. Une autre approche irait à l’encontre tant de l’interdiction d’un venire contra factum proprium que du droit à un procès équitable.

41      En tout état de cause, il ne saurait être question en l’espèce d’une décision au sens de l’article 249 CE, dès lors qu’aucune des lettres de la Commission relatives à la compensation ne pourrait, eu égard tant à sa forme qu’à sa portée, être considérée comme telle. En outre, il ressortirait du renvoi exprès à l’article 256 CE, contenu dans l’article 3.7 de l’annexe II, que des décisions prises sur le fondement des articles 3.1 à 3.3 de cette annexe (voir points 10 à 12 ci-dessus), dont les décisions de recouvrement, ne peuvent être qualifiées de décisions au sens de l’article 249 CE.

42      Enfin, la requérante précise qu’il ne ressort pas de l’article 73, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement n° 1605/2002 que la compensation effectuée dans le cadre de relations contractuelles doit ou peut être réalisée sous la forme d’une décision au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE et de l’article 249, paragraphe 4, CE. En particulier, cette disposition ne règle pas, selon la requérante, la question de savoir si les conditions pour une compensation sont réunies.

 Appréciation du Tribunal

43      Il convient de constater que, par son recours introduit au titre de l’article 238 CE, la requérante vise, comme le relève la Commission, à contester la validité de l’acte de compensation. En effet, la requérante fait essentiellement valoir, dans sa requête, que la compensation était illicite en raison, premièrement, de l’absence de fondement juridique dans l’accord et de l’impossibilité pour la Commission de recourir, dans le cadre de relations contractuelles, au règlement n° 1605/2002, deuxièmement, de l’interdiction résultant du paragraphe 96, premier alinéa, point 1, de l’Insolvenzordnung du 5 octobre 1994 (loi relative aux procédures d’insolvabilité, BGBl. I, p. 2866), qui serait applicable, conformément à la jurisprudence, en vertu du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d’insolvabilité (JO L 160, p. 1), troisièmement, du fait qu’une tranche de 30 000 euros due en vertu de l’accord est une subvention non remboursable, quatrièmement, du fait qu’elle n’est pas le débiteur des notes de débit nos 3240406121 et 3240408508, cinquièmement, de l’inscription au passif de l’insolvabilité des créances de la Commission et, sixièmement, de l’identification imprécise de la créance sur la base de laquelle la Commission souhaite opérer la compensation.

44      Toutefois, si l’acte de compensation devait s’analyser comme étant un acte dont l’annulation peut être demandée à la juridiction communautaire en vertu de l’article 230 CE, il ne reviendrait pas au Tribunal de vérifier sa légalité dans le cadre d’un recours au titre de l’article 238 CE, qui concerne des litiges de nature contractuelle.

45      En l’espèce, il convient dès lors d’examiner si l’acte de compensation figure au nombre des actes qui peuvent être annulés par la juridiction communautaire en vertu de l’article 230 CE ou si, au contraire, il revêt une nature contractuelle (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 26 février 2007, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑205/05, non publiée au Recueil, point 42).

46      À cet égard, il ressort de la jurisprudence qu’un acte par lequel la Commission opère une compensation extrajudiciaire entre dettes et créances résultant de différents rapports juridiques avec la même personne constitue un acte attaquable au sens de l’article 230 CE (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 juillet 2003, Commission/CCRE, C‑87/01 P, Rec. p. I‑7617, point 45). C’est dans le cadre d’un tel recours qu’il revient au Tribunal d’examiner la légalité d’une décision de compensation au regard de ses effets tenant à l’absence de versement effectif des sommes litigieuses au requérant.

47      Par ailleurs, dès lors qu’une compensation opère l’extinction simultanée de deux obligations existant réciproquement entre deux personnes (arrêt Commission/CCRE, précité, point 59), elle peut correspondre à la fois à un paiement de sommes que la Commission estime dues en application du contrat spécifique et à un recouvrement de sommes ayant une cause étrangère à ce contrat. Ainsi, il s’agit d’une opération juridique qui est, d’une part, susceptible d’éteindre des dettes et des créances de toute nature, contractuelles ou non, et, d’autre part, dissociable d’un cadre purement contractuel.

48      En outre, il convient de considérer que, indépendamment de la nature des relations juridiques à l’origine des dettes et des créances compensées, une compensation adoptée sur la base du règlement n° 1605/2002 relève du domaine du droit communautaire et constitue un acte susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation introduit conformément à l’article 230 CE.

49      À cet égard, force est de constater que, en l’espèce, aux termes de l’article 10.2 de l’annexe II, le bénéficiaire marque son accord pour que la Commission et la Cour des comptes des Communautés européennes ainsi que toute personne autorisée par elles puissent vérifier l’utilisation du soutien financier conformément au règlement financier du 21 décembre 1977 applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 356, p. 1), tel que modifié, durant la validité de l’accord et au cours d’une période de cinq ans suivant la date à laquelle il prend fin.

50      Dès lors, eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de considérer que cette décision relève de l’article 249 CE.

51      La requérante ne saurait prétendre à cet effet que l’acte de compensation ne constitue pas une décision au sens de l’article 249 CE, dès lors qu’aucune des lettres de la Commission relatives à la compensation ne pourrait, eu égard à sa forme, être considérée comme telle. En effet, à cet égard il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation au sens de l’article 230 CE les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci (arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9 ; arrêt du Tribunal du 16 avril 1997, Connaughton e.a./Conseil, T‑541/93, Rec. p. II‑549, point 30, et voir ordonnance du Tribunal du 27 juin 2005, Royaume Uni/Commission, T‑143/05, non publiée au Recueil, point 26, et la jurisprudence citée). En l’espèce, l’acte de compensation sous forme de lettre de la Commission étant susceptible d’opérer l’extinction simultanée de deux obligations existant entre elle et la requérante, force est de constater qu’il a produit des effets juridiques obligatoires modifiant de façon caractérisée la situation juridique de la requérante.

52      Il ressort de ce qui précède que l’acte de compensation dont la validité est mise en cause par la requérante ne revêt pas une nature contractuelle, mais constitue au contraire un acte administratif dont l’annulation peut être demandée à la juridiction communautaire en vertu de l’article 230 CE.

53      Partant, la validité de cet acte ne peut être mise en cause dans le cadre d’un recours fondé sur l’article 238 CE.

54      À supposer même que le présent recours, fondé sur l’article 238 CE, puisse être requalifié de recours en vertu de l’article 230 CE, il doit, en tout état de cause, être constaté qu’il est tardif, dès lors qu’il n’a pas été introduit dans le délai prescrit par l’article 230, cinquième alinéa, CE. En effet, la requérante a introduit le présent recours le 28 avril 2006, alors que l’acte de compensation date du 14 décembre 2004.

55      Dans ces circonstances, le recours doit être rejeté comme irrecevable.

 Sur les dépens

56      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Helkon Media AG est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Papasavvas

Dittrich

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 octobre 2008.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. E. Martins Ribeiro


* Langue de procédure : l’allemand.