Language of document : ECLI:EU:T:2003:271

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre élargie)

16 octobre 2003 (1)

«Aides d'État - Prélèvement compensatoire - Mode de financement des aides - Régime d'aide communautaire pour le coton - Recours en annulation - Recevabilité - Actes susceptibles de recours -

Refus de la Commission de poursuivre une procédure en manquement - Principe de l'autonomie des voies de recours»

Dans l'affaire T-148/00,

The Panhellenic Union of Cotton Ginners and Exporters, établie à Thessalonique (Grèce), représentée par Mes K. Adamantopoulos, V. Akritidis et J. Gutiérrez Gisbert, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme M. Condou et M. D. Triantafyllou, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

soutenue par

République hellénique, représentée par M. I. Chalkias et Mme C. Tsiavou, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d'annulation partielle de la décision 2000/206/CE de la Commission, du 20 juillet 1999, relative au régime d'aide appliqué en Grèce pour le coton par l'Office grec du coton (JO 2000, L 63, p. 27),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre élargie),

composé de M. R. García-Valdecasas, président, Mme P. Lindh, MM. J. D. Cooke, P. Mengozzi et H. Legal, juges,

greffier: M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 27 février 2003,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    Le protocole n° 4 concernant le coton annexé à l'acte relatif aux conditions d'adhésion de la République hellénique (JO 1979, L 291, p. 174, ci-après le «protocole n° 4») instaure un régime destiné, notamment, à soutenir la production de coton dans les régions de la Communauté où elle est importante pour l'économie agricole, à permettre un revenu équitable aux producteurs concernés et à stabiliser le marché par l'amélioration des structures au niveau de l'offre et de la mise sur le marché.

2.
    Le paragraphe 3 du protocole n° 4 prévoit que ce régime comprend l'«octroi d'une aide à la production», qui, «pour faciliter la gestion et le contrôle, [...] sera octroyée via les entreprises d'égrenage».

3.
    Ce paragraphe indique également que le montant de cette aide est établi périodiquement sur la base de la différence existant entre un prix d'objectif fixé pour le coton non égrené et le prix du marché mondial déterminé sur la base des offres et des cours constatés sur le marché mondial. Le prix d'objectif est arrêté par le Conseil (paragraphe 8 du protocole n° 4), tandis que la Commission détermine le prix du marché mondial et le montant de l'aide (paragraphe 10 du protocole n° 4).

4.
    Aux termes du paragraphe 5 du protocole n° 4, «[l]e régime des échanges de la Communauté avec les pays tiers ne devra pas être affecté [et], en particulier, aucune mesure restrictive à l'importation ne pourra être prévue».

5.
    Conformément au paragraphe 9 du protocole n° 4, le Conseil a adopté, le 27 juillet 1981, le règlement (CEE) n° 2169/81 fixant les règles générales du régime d'aide au coton (JO L 211, p. 2). Ce règlement a été remplacé par le règlement (CE) n° 1554/95 du Conseil, du 29 juin 1995, fixant les règles générales du régime d'aide au coton et abrogeant le règlement n° 2169/81 (JO L 148, p. 48).

6.
    Aux termes du troisième considérant du règlement n° 2169/81:

«[P]our faciliter la gestion et le contrôle [du régime d'aide au coton], il convient d'octroyer l'aide aux entreprises d'égrenage; [...] dans le but de faire bénéficier les agriculteurs de ce régime, il convient de subordonner l'octroi de l'aide à la condition que ceux-ci ont obtenu un prix au moins égal à un prix minimal à déterminer, ce prix minimal étant voisin du prix d'objectif fixé conformément au paragraphe 8 du protocole [n° 4], ou que l'aide leur sera répercutée.»

7.
    L'article 6 du règlement n° 2169/81 régissait les relations financières entre les entreprises d'égrenage et les producteurs de coton. Il prévoyait que l'aide n'était octroyée qu'aux entreprises d'égrenage qui en faisaient la demande et qui avaient déposé soit un contrat prévoyant notamment le paiement au producteur d'un prix au moins égal au prix minimal visé à l'article 9 de ce règlement soit, dans le cas où elles égrenaient pour le compte d'un producteur individuel ou associé, une déclaration précisant les conditions dans lesquelles l'égrenage était effectué et l'aide était répercutée aux producteurs. L'article 9 du règlement n° 2169/81 précisait que le Conseil fixait chaque année, en même temps que le prix d'objectif, un prix minimal pour le coton non égrené, et ce «à un niveau garantissant aux producteurs la réalisation de leurs ventes à un prix aussi proche que possible du prix d'objectif». L'article 7 du règlement n° 1554/95 a reproduit en substance l'article 6 du règlement n° 2169/81.

8.
    L'article 5, paragraphe 3, du règlement n° 2169/81 prévoyait notamment que «le droit à l'aide [était] acquis au moment de l'égrenage» et que «l'aide [pouvait] toutefois être avancée dès l'entrée du coton non égrené dans l'entreprise d'égrenage, à condition qu'une garantie suffisante [fût] constituée». L'article 5, paragraphe 3, du règlement n° 1554/95 a reproduit en substance cette dernière disposition.

9.
    Le 3 mai 1989, la Commission a adopté le règlement (CEE) n° 1201/89 portant modalités d'application du régime d'aide pour le coton (JO L 123, p. 23). L'article 7, paragraphe 2, de ce règlement, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2878/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, modifiant le [règlement n° 1201/89] (JO L 301, p. 21), prévoyait que «lorsqu'elle [était] déposée avant le dépôt de la demande de mise sous contrôle, la demande d'aide n'[était] recevable que si une garantie de 12 écus par 100 kilogrammes [était] constituée». Le paragraphe 3 du même article disposait que cette garantie était « constituée sous une des formes visées à l'article 8 du règlement (CEE) n° 2220/85 de la Commission [,du 22 juillet 1985, fixant les modalités communes d'application du régime des garanties pour les produits agricoles (JO L 205, p. 5)]», qu'elle était «libérée au prorata des quantités pour lesquelles l'obligation prévue au paragraphe 1 de l'article 9 [était] remplie» et «acquise au prorata des quantités pour lesquelles l'obligation prévue au paragraphe 1 de l'article 9 n'[était] pas remplie». L'article 9, paragraphe 1, du règlement n° 1201/89 prévoyait le dépôt par «toute entreprise d'égrenage [...], lors de l'entrée du coton non égrené, [d']une demande de mise sous contrôle». Le paragraphe 8 du même article, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2064/95 de la Commission, du 29 août 1995, modifiant le règlement n° 1201/89 (JO L 204, p. 8), prévoyait, dès la mise sous contrôle, l'octroi par les États membres aux intéressés en faisant la demande d'une avance sur l'aide à la condition de la constitution d'une garantie au moins égale à 110 % du montant de l'aide à avancer, le calcul du montant de l'avance sur la base des quantités mises sous contrôle, la constitution de la garantie sous une des formes visées à l'article 8 du règlement n° 2220/85 et son acquisition à concurrence du montant dont l'avance versée dépassait le montant de l'aide à octroyer.

10.
    Le 23 avril 1992, la République hellénique a adopté la loi n° 2040/92 relative à la réglementation des questions relevant de la compétence du ministère de l'Agriculture et des personnes morales placées sous son contrôle (Journal officiel de la République hellénique, première partie, n° 70) (ci-après la «loi n° 2040/92»).

11.
    L'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92, intitulé «réajustement des ressources de l'Office grec du coton», dispose:

«À compter de la date de publication de la présente loi, les entreprises d'égrenage de coton seront assujetties à un prélèvement compensatoire en faveur de l'Office grec du coton, équivalant à 1 % du prix payé au producteur par kilogramme de coton non égrené [...]»

12.
    L'article 30, paragraphe 3, de la loi n° 2040/92 prévoit, en outre, une taxe spéciale en faveur de l'Office grec du coton imposée sur le coton à utilisation industrielle importé de l'étranger ainsi que sur les fibres artificielles ou synthétiques importées de l'étranger, jusqu'à trois deniers, s'élevant à 1 % de leur valeur (ci-après la «taxe spéciale»).

Antécédents du litige

13.
    La requérante est une association professionnelle de droit grec regroupant les égreneurs et les négociants grecs de coton.

14.
    L'Office grec du coton est une entité publique à but non lucratif qui, selon ses statuts, a pour objectif de fournir une série de services aux producteurs et aux égreneurs de coton. Ces services étaient financés par le prélèvement compensatoire mentionné au point 11 ci-dessus (ci-après le «prélèvement compensatoire») et la taxe spéciale.

15.
    Par lettre du 12 novembre 1992, la requérante a adressé une plainte à la direction générale (DG) «Agriculture» de la Commission dans laquelle elle faisait valoir que le prélèvement compensatoire était illégal en ce qu'il était calculé sur le montant total perçu par les producteurs pour la vente de coton non égrené , à savoir en ce compris sur le montant de l'aide communautaire. Elle soutenait également que les entreprises d'égrenage ne bénéficiaient pas des services susvisés de l'Office grec du coton et que celui-ci subordonnait la restitution des lettres de garantie, que ces entreprises devaient ouvrir pour pouvoir obtenir une avance, au versement effectif du prélèvement compensatoire.

16.
    À la suite de cette plainte, la DG «Agriculture» a adressé diverses demandes de renseignements aux autorités grecques, portant sur le fonctionnement de l'Office grec du coton et sur la «taxe parafiscale» imposée en sa faveur. Les autorités grecques ont répondu à ces demandes et la requérante a présenté des observations sur ces réponses.

17.
    Le 17 juin 1994, la requérante a informé la DG «Agriculture» qu'elle avait intenté un recours contre l'Office grec du coton devant les tribunaux grecs en vue d'obtenir le remboursement du prélèvement compensatoire dans la mesure où il était appliqué sur le montant de l'aide communautaire.

18.
    Le 27 janvier 1995, la Commission a adressé une lettre au gouvernement grec dans laquelle elle indiquait qu'elle n'avait pas d'objection à formuler à l'encontre de certaines activités de l'Office grec du coton, que d'autres activités de celui-ci étaient «des services qui [relevaient] de la compétence de l'État et ne [présentaient] donc pas un caractère d'aide à des entreprises particulières» et qu'elle avait décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, du traité CE (devenu article 88, paragraphe 2, CE) pour ce qui était du reste des activités de l'Office grec du coton.

19.
    Dans la même lettre, la Commission indiquait que «s'agissant d'aides financées par une charge obligatoire, en l'occurrence le prélèvement compensatoire et la taxe spéciale, [elle avait] examiné également le financement de l'ensemble de ces aides». Elle constatait, à cet égard, ce qui suit:

-    la taxe spéciale frappait également les produits importés des autres États membres;

-    selon la jurisprudence, le financement d'une aide d'État par une charge affectée obligatoire constituait un élément essentiel de cette aide et, dans l'appréciation d'une telle aide, il convenait d'examiner au regard du droit communautaire à la fois l'aide et son financement;

-    «[m]ême si les aides sont compatibles tant dans leur forme que dans leurs objectifs, il n'en reste pas moins que, selon la jurisprudence [...], leur financement par des taxes affectées grevant également les produits communautaires importés des autres États membres et des pays de l'Espace économique européen a un effet protecteur allant au-delà de l'aide proprement dite»;

-    «[e]n effet, même si les aides financées par l'[Office grec du coton] [pouvaient] bénéficier dans une certaine mesure aux produits importés, il n'en rest[ait] pas moins que ceci n'entraîn[ait] pas une participation effective également profitable pour tous à ces avantages car, sur le plan pratique, une situation plus favorable [était] faite par la force des choses aux opérateurs helléniques étant donné que les résultats recherchés et les actions entreprises s'inspir[aient] des spécialisations, des besoins et des lacunes nationaux»;

-    «[l]'application d'une condition supplémentaire (le paiement effectif de la taxe parafiscale), non prévue par la réglementation communautaire, pour la libération de la caution constitu[ait] une infraction au règlement [n° 2169/81]»;

-    l'application de la taxe spéciale était contraire à l'article 5 du protocole n° 4 annexé à l'acte d'adhésion de la Grèce ainsi qu'à l'article 12 du traité CE (devenu, après modification, article 25 CE).

20.
    La Commission précisait que, compte tenu de ces éléments, elle avait décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE également à l'égard de l'ensemble des aides «du fait de leur financement par la taxe spéciale frappant également les produits importés des autres États membres et des pays membres de l'Espace économique européen, et du fait que le financement par le prélèvement compensatoire et la taxe spéciale revêt[ait] un aspect d'infraction à la réglementation communautaire».

21.
    Enfin, par cette lettre du 27 janvier 1995, la Commission invitait le gouvernement grec à présenter ses observations et à communiquer certaines informations. Par la publication de cette lettre au Journal officiel des Communautés européennes du 24 octobre 1995 (JO C 278, p. 4), les autres États membres et les parties intéressées ont été informés de l'ouverture de la procédure et ont été invités à faire valoir leurs observations éventuelles. Par lettre du 12 avril 1995, le gouvernement grec a communiqué ses observations ainsi que les informations qui lui avaient été demandées. Des tiers intéressés ont également présenté leurs observations, dont la requérante, par lettre du 23 novembre 1995.

22.
    Parallèlement à la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE, la Commission, par lettre du 15 janvier 1996, a engagé la procédure prévue à l'article 169 du traité CE (devenu article 226 CE) à l'encontre de la République hellénique (ci-après la «procédure d'infraction»). Elle considérait, en substance, que le fait, pour l'Office grec du coton, de subordonner la libération des garanties bancaires au paiement effectif du prélèvement compensatoire constituait une violation des articles 7, paragraphe 3, et 9, paragraphe 1, du règlement n° 1201/89, des règles de l'organisation commune des marchés dans le secteur du coton, et plus particulièrement du règlement n° 2169/81, du principe de proportionnalité et de l'article 40, paragraphe 3, du traité CE (devenu, après modification, article 34, paragraphe 2, CE). Elle mettait le gouvernement grec en demeure de présenter ses observations et de fournir certaines informations. Par télécopie du 25 janvier 1996, la DG «Agriculture» a informé la requérante de l'ouverture de la procédure d'infraction.

23.
    Le 14 mai 1996, la requérante a adressé une seconde plainte, sur la base de l'article 226 CE, à la DG «Agriculture» contre la République hellénique. Elle faisait valoir, d'une part, que l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 violait l'article 5, paragraphe 3, du règlement n° 2169/81, l'article 7 du règlement n° 1201/89, les dispositions du protocole n° 4, l'article 189 du traité CE (devenu article 249 CE) et l'article 34, paragraphe 2, CE. D'autre part, elle soutenait que l'article 30, paragraphe 3, de la même loi violait les articles 9 (devenu, après modification, article 23 CE) et 12 (devenu, après modification, article 25 CE) du traité CE, l'article 249 CE, les dispositions du protocole n° 4, les articles 18 à 27 du traité CE (abrogés par le traité d'Amsterdam), les articles 28 (devenu, après modification, article 26 CE) et 29 (devenu, après modification, article 27 CE) du traité CE et les articles 113 (devenu, après modification, article 133 CE) et suivants du traité CE ainsi que les règles de l'accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT). Dans un mémorandum annexé à cette plainte, la requérante faisait également valoir que le mécanisme de financement des activités de l'Office grec du coton constituait une aide d'État illégale et incompatible avec le marché commun. Par ailleurs, elle demandait l'adoption, par la Commission, de mesures provisoires, à savoir que celle-ci obtienne de la République hellénique la suspension de l'application de la loi n° 2040/92.

24.
    Par télécopie du 19 novembre 1997, la DG «Agriculture» a demandé à la requérante, dans le cadre de la procédure d'infraction, de lui fournir certains documents. La requérante a répondu à cette demande par lettre du 28 novembre 1997 et a présenté une série d'observations par lettres des 8 juillet, 2 et 16 septembre 1998.

25.
    Le 2 décembre 1998, la Commission a décidé de classer le dossier relatif à la procédure d'infraction.

26.
    Le 20 juillet 1999, la Commission a adopté la décision 2000/206/CE relative au régime d'aide appliqué en Grèce pour le coton par l'Office grec du coton (JO 2000, L 63, p. 27, ci-après la «décision litigieuse»).

27.
    Le point IV, paragraphe 2, de la décision litigieuse indique:

«En ce qui concerne la position de la Commission sur les questions relatives à la compatibilité du prélèvement compensatoire de 1 % sur la production indigène grecque et sur les aides communautaires versées aux producteurs grecs avec l'organisation commune des marchés du coton, cette question a été examinée dans le cadre de la procédure d'infraction. Du fait que les dispositions du règlement [n° 1554/95] n'excluent pas explicitement un tel prélèvement, la Commission a décidé, le 2 décembre 1998, de classer le dossier.»

28.
    Le point IV, paragraphe 3, de la décision litigieuse se lit comme suit:

«Il résulte des observations soumises à la Commission dans le cadre de la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, [CE] que les taxes parafiscales en examen présentent un certain degré de subvention croisée. En effet, les taxes sont prélevées au niveau des entreprises d'égrenage pour financer des mesures qui sont principalement adressées aux producteurs agricoles. La pratique établie de la Commission en matière de taxes parafiscales est celle d'accepter que les taxes soient collectées à un niveau différent de la filière productive (exemple: taxes collectées au niveau des abattoirs pour financer la lutte contre les épizooties). Dans le cas d'espèce, il ne semble pas possible aux égreneurs de transférer le paiement de la taxe aux producteurs agricoles en raison des mécanismes de l'organisation commune de marché du coton.

En vertu de ce qui précède, la Commission conclut que dans la mesure où la méthode de financement des aides par le prélèvement de 1 % sur la production indigène grecque et sur les aides communautaires versées aux producteurs grecs est conforme à l'organisation commune des marchés du coton, elle n'aurait pas de raisons de soulever des objections quant à la méthode de financement en vertu des articles 87 [CE] à 89 [CE].»

29.
    Le dispositif de la décision litigieuse se lit comme suit:

«Article premier

Les aides d'État accordées en Grèce dans le cadre des fonctions statutaires de l'Office grec du coton, financées par les cotisations obligatoires prévues par l'article 30, paragraphe 3, de la loi n° 2040/92, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles sont financées par des taxes parafiscales imposées aux produits importés.

Article 2

La Grèce est tenue de modifier le régime d'aide visé à l'article 1er, afin de le rendre compatible avec la présente décision.

Article 3

1. La Grèce prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer, auprès des bénéficiaires, l'aide visée à l'article 1er, illégalement mise à leur disposition.

2. La récupération a lieu conformément aux procédures du droit national. Les sommes à récupérer produisent des intérêts de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition des bénéficiaires, jusqu'à leur récupération effective. Les intérêts sont calculés sur la base du taux de référence utilisé pour le calcul de l'équivalent subvention dans le cadre des aides à finalité régionale.

Article 4

La Grèce informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures qu'elle entend prendre pour s'y conformer.

Article 5

La République hellénique est destinataire de la présente décision.»

Procédure et conclusions des parties

30.
    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 juin 2000, la requérante a introduit le présent recours.

31.
    Par acte séparé déposé au greffe le 14 juillet 2000, la Commission a soulevé une exception d'irrecevabilité conformément à l'article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Le 15 septembre 2000, la requérante a présenté ses observations sur cette exception d'irrecevabilité.

32.
    Par acte déposé au greffe le 7 décembre 2000, la République hellénique a demandé à intervenir dans le présent litige au soutien des conclusions de la Commission. Le président de la cinquième chambre élargie a admis cette intervention par ordonnance du 9 mars 2001.

33.
    Par ordonnance du 15 décembre 2000, le Tribunal a décidé de joindre au fond l'exception d'irrecevabilité soulevée.

34.
    La République hellénique a déposé son mémoire en intervention le 23 avril 2001, sur lequel la requérante a présenté ses observations. La Commission a renoncé à déposer des observations sur ce mémoire.

35.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre élargie) a décidé d'ouvrir la procédure orale. Dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, il a invité la Commission à répondre à des questions écrites et à produire certains documents. La Commission a déféré à ces demandes.

36.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l'audience du 27 février 2003.

37.
    La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    déclarer le recours recevable;

-    annuler l'article 1er de la décision litigieuse «dans la mesure où il se borne à déclarer l'article 30, paragraphe 3, de la loi n° 2040/92 [...] et non l'article 30, paragraphe 1, [de la même loi] incompatible avec le marché commun»;

-    condamner la Commission aux dépens.

38.
    La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme irrecevable;

-    à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé;

-    condamner la requérante aux dépens.

39.
    La République hellénique conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme irrecevable;

-    à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé.

En droit

Arguments des parties

40.
    La Commission et la République hellénique soutiennent que le recours est irrecevable.

41.
    En premier lieu, il constituerait un détournement de procédure.

42.
    En effet, premièrement, la requérante, «passant sous silence les aspects relatifs à l'aide d'État», chercherait en réalité à obtenir du Tribunal qu'il se prononce sur la légalité du prélèvement compensatoire et de la décision de la Commission de clore la procédure d'infraction. Or, «prise isolément», une violation du droit communautaire, telle que celle invoquée par la requérante, ne relèverait pas du contrôle des aides d'État et ne pourrait être examinée que dans le cadre d'une procédure en constatation de manquement au titre de l'article 226 CE. En outre, selon une jurisprudence constante, les particuliers ne seraient pas recevables à attaquer un refus de la Commission d'engager, ou de poursuivre, une telle procédure (arrêt du Tribunal du 22 mai 1996, AITEC/Commission, T-277/94, Rec. p. II-351, point 55).

43.
    Deuxièmement, la requérante utiliserait également le présent recours en annulation comme un recours en carence au sens de l'article 175 du traité CE (devenu article 232 CE). Elle critiquerait, en effet, le fait que la Commission n'a pas également déclaré incompatible avec le marché commun l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92. Or, l'article 232 CE viserait la carence par abstention de statuer ou de prendre position et non l'adoption d'un acte différent de celui que les intéressés auraient souhaité ou estimé nécessaire.

44.
    En deuxième lieu, la Commission, appuyée par la République hellénique, fait valoir que la requérante n'est pas individuellement concernée par la décision litigieuse, laquelle est adressée à la République hellénique.

45.
    Premièrement, elle affirme que, selon la jurisprudence, les associations ne sont considérées comme individuellement concernées par une décision dans le domaine des aides d'État que si elles réunissent des entreprises concurrentes des bénéficiaires des aides en cause, ont joué un rôle actif dans la procédure ouverte au titre de l'article 88, paragraphe 2, CE et sont affectées en leur qualité de négociatrices ou, en introduisant leur recours, se sont substituées à l'un ou à plusieurs de leurs membres qu'elles représentent, à la condition que leurs membres eux-mêmes aient été en situation d'introduire un recours recevable (arrêts de la Cour du 28 janvier 1986, Cofaz e.a./Commission, 169/84, Rec. p. 391, point 25; du 2 février 1988, Van der Kooy e.a./Commission, 67/85, 68/85 et 70/85, Rec. p. 219, points 21 à 24; du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C-313/90, Rec. p. I-1125, points 28 à 30, et du 23 mai 2000, Comité d'entreprise de la Société française de production e.a./Commission, C-106/98 P, Rec. p. I-3659, point 42; arrêt du Tribunal du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T-380/94, Rec. p. II-2169, point 50). Or, en l'espèce, à l'exception de celle tenant à la participation active à la procédure, la requérante ne remplirait pas ces différentes conditions.

46.
    Deuxièmement, la Commission souligne que la décision litigieuse porte sur un régime général d'aides et que, selon la jurisprudence, les entreprises concurrentes d'une entreprise potentiellement bénéficiaire d'une aide au titre d'un tel régime n'ont pas qualité pour agir contre une décision de la Commission autorisant le même régime (arrêt du Tribunal du 5 juin 1996, Kahn Scheepvaart/Commission, T-398/94, Rec. p. II-477). Il devrait a fortiori en aller de même pour les entreprises non concurrentes et les associations qui les représentent. Elle invoque également l'arrêt du Tribunal du 11 février 1999, Arbeitsgemeinschaft Deutscher Luftfahrt-Unternehmen et Hapag-Lloyd/Commission (T-86/96, Rec. p. II-179, point 45), dans lequel ce dernier aurait considéré que les bénéficiaires potentiels d'un régime général d'aides n'étaient pas individuellement concernés par une décision de la Commission portant sur un tel régime.

47.
    En troisième lieu, la Commission avance, dans son mémoire en défense, que la requérante, à supposer qu'elle représente les intérêts d'entreprises bénéficiaires des mesures d'aide en cause, n'a pas d'intérêt à agir. Cette dernière attaquerait, en effet, la décision litigieuse non en tant qu'elle refuse l'octroi d'un avantage à ses membres, mais en tant qu'elle n'est pas «suffisamment défavorable en ce qui concerne le financement de l'aide». Si la Commission avait admis les critiques de la requérante au sujet de l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92, elle aurait déclaré les aides d'État en cause incompatibles avec le marché commun dans leur ensemble, c'est-à-dire non seulement dans la mesure où elles sont financées par la taxe spéciale, mais aussi dans la mesure où elles le sont par le prélèvement compensatoire.

48.
    La Commission fait également observer que la requérante conteste le fait que l'un des deux modes de financement des mesures d'aide en cause n'a pas été déclaré incompatible et, par voie de conséquence, ne met pas en cause le dispositif de la décision litigieuse, celui-ci visant les mesures d'aide et non leur financement. L'incompatibilité de la taxe spéciale ne serait que le motif sur lequel repose l'incompatibilité de l'aide. Elle relève que les appréciations formulées dans les motifs d'une décision ne sont susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation que si elles constituent le support nécessaire du dispositif de l'acte faisant grief à la requérante (arrêt du Tribunal du 17 septembre 1992, NBV et NVB/Commission, T-138/89, Rec. p. II-2181, point 31). En l'espèce, les appréciations sur la compatibilité du prélèvement compensatoire allant dans le sens d'une déclaration de compatibilité des mesures d'aide dans le dispositif de la décision litigieuse, la requérante, en sa qualité d'association d'entreprises bénéficiaires de ces mesures d'aide, n'aurait aucun intérêt à les contester. En outre, ces appréciations ne constitueraient pas le support du dispositif de la décision litigieuse, l'incompatibilité de la taxe spéciale empêchant à elle seule que les mesures d'aide puissent être autorisées.

49.
    En quatrième lieu, dans sa duplique, la Commission soutient que la requérante a procédé, dans sa réplique, à une «réorientation fondamentale de la requête» et à une «reformulation de la plupart des moyens d'origine». Elle fait notamment observer que la requérante y «évite soigneusement la question de la compatibilité du prélèvement [compensatoire] avec l'organisation commune de marché du coton, alors qu'il s'agissait du principal argument de sa requête». Ainsi, la requérante aurait non seulement introduit des moyens nouveaux, irrecevables en vertu de l'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure, mais aurait également adopté une position contradictoire avec les conclusions de la requête.

50.
    La requérante conteste, en premier lieu, que le recours constitue un détournement de procédure.

51.
    Dans ses observations sur l'exception d'irrecevabilité, elle prétend, premièrement, qu'il n'est pas dirigé à l'encontre du prélèvement compensatoire, mais qu'il «a pour objectif évident de prouver que la Commission a commis une erreur manifeste en ne s'acquittant pas de son obligation d'examiner la compatibilité de l'aspect d'aide de l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 au titre des règles applicables aux aides d'État séparément et indépendamment du mode de financement». La requérante avance, plus particulièrement, qu'elle critique l'appréciation juridique faite par la Commission au point IV, paragraphe 3, deuxième alinéa, de la décision litigieuse. Elle explique, à cet égard, que «la Commission, lorsqu'elle apprécie la compatibilité avec le marché commun d'une mesure telle que l'article 30, paragraphes 1 et 3, de la loi n° 2040/92 au regard des articles 87 [CE] et 88 CE, doit, premièrement, considérer la méthode par laquelle l'aide est financée et, deuxièmement, considérer, séparément, la compatibilité de l'aspect d'aide». Elle estime que, en l'espèce, la Commission, ayant déclaré le mode de financement prévu à l'article 30, paragraphe 3, de la loi n° 2040/92 «incompatible avec le marché commun dans la mesure où il viole les règles de l'organisation commune du marché du coton», n'était pas tenue d'examiner en outre la compatibilité de cette disposition au regard des règles applicables aux aides d'État. En revanche, s'agissant de l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92, dès lors qu'elle l'avait déclaré compatible avec les règles de l'organisation commune des marchés dans le secteur du coton, il appartenait encore à la Commission, selon la requérante, d'en examiner l'«aspect d'aide d'État» au regard des règles applicables aux aides d'État. Elle précise que, par le présent recours, «elle a pour principal objectif d'obtenir du Tribunal qu'il statue en confirmant que la Commission a commis une erreur manifeste d'appréciation des faits en constatant la compatibilité de l'aspect d'aide de l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 avec les articles 87 [CE] à 89 [...] CE, sans procéder à une analyse serrée et correcte, c'est-à-dire à une analyse du point de savoir si l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 répond aux quatre conditions prévues à l'article 87 [...] CE».

52.
    Deuxièmement, la requérante avance que, par le présent recours, elle n'invoque aucune carence dans le chef de la Commission ni ne conteste la décision de celle-ci de clore la procédure d'infraction.

53.
    En deuxième lieu, la requérante estime que, en sa qualité d'association réunissant des entreprises bénéficiaires des mesures d'aide en cause, elle doit être considérée comme individuellement concernée par la décision litigieuse. Par ailleurs, elle conteste le bien-fondé des arguments que la Commission tire du fait que la décision litigieuse porte sur un régime général d'aides. Elle avance que les références faites par la Commission aux arrêts Kahn Scheepvaart/Commission et Arbeitsgemeinschaft Deutscher Luftfahrt-Unternehmen et Hapag-Lloyd/Commission, précités, sont dépourvues de pertinence.

54.
    En troisième lieu, la requérante soutient que l'argument de la Commission selon lequel elle n'a aucun intérêt légitime à poursuivre l'annulation de la décision litigieuse en tant que celle-ci n'est pas «suffisamment défavorable» n'est pas pertinent. De par sa seule qualité d'association représentant des bénéficiaires des mesures d'aide en cause, et quel que soit le motif qui l'a conduit à introduire le présent recours, elle serait, en effet, recevable à attaquer la décision litigieuse.

Appréciation du Tribunal

55.
    Il convient, en premier lieu, de considérer l'objet du recours.

56.
    Dans ses conclusions, la requérante tend à obtenir l'annulation de «l'article 1er de la [décision litigieuse] dans la mesure où il se borne à déclarer l'article 30, paragraphe 3, de la loi n° 2040/92 [...] et non l'article 30, paragraphe 1, [de la même loi] incompatible avec le marché commun».

57.
    Or, cet article 1er ne déclare pas . pas plus que d'autres passages du dispositif de la décision litigieuse . l'article 30, paragraphe 3, de la loi n° 2040/92 incompatible avec le marché commun. La déclaration d'incompatibilité qu'il prévoit ne vise, en effet, que les mesures d'aide accordées par l'Office grec du coton et financées par la taxe spéciale instituée par cette disposition, un aspect de la décision litigieuse dont la requérante ne conteste nullement le bien-fondé.

58.
    En réalité, la requérante remet en cause non le dispositif de la décision litigieuse en soi, mais certaines appréciations formulées par la Commission dans les motifs de celle-ci et, plus particulièrement, celles relatives au prélèvement compensatoire contenues en son point IV, paragraphes 2 et 3.

59.
    Il y a lieu de constater, en second lieu, qu'il ressort clairement de la requête que, contrairement à la position qu'elle adopte dans ses écritures ultérieures (voir, notamment, point 51 ci-dessus), la requérante conteste, à titre principal, le bien-fondé de la conclusion de la Commission selon laquelle le prélèvement compensatoire est conforme à l'organisation commune des marchés dans le secteur du coton (point IV, paragraphe 2, de la décision litigieuse). Ainsi, l'essentiel de l'argumentation juridique qu'elle développe dans sa requête est consacré à cette question et contient une remise en cause de la position adoptée par la Commission dans le cadre de la procédure d'infraction.

60.
    Or, la requérante ne saurait être déclarée recevable à attaquer cette conclusion.

61.
    D'une part, en effet, ladite conclusion résulte, en réalité, de la décision du 2 décembre 1998 portant classement de la procédure d'infraction. Le point IV, paragraphe 2, de la décision litigieuse se limite à rappeler la position déjà prise par la Commission dans sa décision du 2 décembre 1998 et ne contient aucun élément nouveau susceptible de produire des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la requérante en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique.

62.
    D'autre part, il est manifeste que, en contestant ainsi l'appréciation contenue au point IV, paragraphe 2, de la décision litigieuse, la requérante vise en fait à mettre en cause, sous le couvert d'un recours en annulation dirigé contre une décision en matière d'aides d'État, l'issue de la procédure d'infraction. Or, outre le fait que cela constitue une violation du principe de l'autonomie des voies de recours, il importe de rappeler que les particuliers ne sont pas recevables à attaquer une décision de la Commission de ne pas poursuivre une procédure en manquement engagée à l'encontre d'un État membre (arrêts de la Cour du 1er mars 1966, Lütticke e.a./Commission, 48/65, Rec. p. 27, 39; du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, 247/87, Rec. p. 291, points 11 et 12, et du 17 mai 1990, Sonito e.a./Commission, C-87/89, Rec. p. I-1981, points 6 et 7).

63.
    Par ailleurs, la requérante avance une argumentation subsidiaire . que, dans ses écritures postérieures à la requête, elle tente de faire passer pour son argumentation principale . selon laquelle, à supposer que l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 soit conforme à l'organisation commune des marchés dans le secteur du coton, il appartenait encore à la Commission d'analyser, «séparément et indépendamment de la méthode de financement», la compatibilité de cette disposition «au titre de la réglementation régissant les aides d'État». Elle critique ainsi l'appréciation contenue au point IV, paragraphe 3, second alinéa, de la décision litigieuse et, plus particulièrement, le fait que la Commission ait prétendument considéré l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 comme compatible avec les règles en matière d'aides d'État sur la seule base de ce qu'il est conforme à l'organisation commune des marchés dans le secteur du coton.

64.
    Force est de constater que cette thèse subsidiaire a évolué au cours de la procédure mais que, quelle que soit la version retenue, le recours doit être déclaré irrecevable.

65.
    En effet, l'argumentation subsidiaire, telle qu'avancée dans la requête, repose sur l'idée que l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 est en soi une aide d'État (voir points 157 à 159 de la requête) ou qu'il comporte un «aspect d'aide d'État» (voir points 160, 162, 163 et 164 de la requête). Or, il est bien évident . comme la requérante l'admet d'ailleurs elle-même dans ses écritures ultérieures . que cette disposition ne constitue pas une aide d'État ni ne contient un tel «aspect», mais qu'elle n'est que l'une des deux méthodes de financement d'aides d'État accordées par l'Office grec du coton. Il est tout aussi évident que la Commission n'aurait pu déclarer ladite disposition compatible ou incompatible avec le marché commun au titre de l'article 87 CE, pareille déclaration ne pouvant viser que les mesures d'aide proprement dites.

66.
    En réalité, il est clair que, en assimilant indûment l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 à une aide d'État, la requérante a, à nouveau, pour seul objectif d'obtenir du Tribunal qu'il contrôle la légalité de cette disposition, et ce alors que la Commission s'est déjà prononcée sur celle-ci dans le cadre de la procédure d'infraction. En agissant ainsi, la requérante commet une violation du principe de l'autonomie des voies de recours.

67.
    Cette conclusion est confirmée par le fait que, dans sa réplique, la requérante, s'écartant de sa thèse initiale, prétend être «parfaitement consciente qu'un prélèvement ne saurait être assimilé à une aide» et avoir «toujours considéré que les mesures d'aide d'État litigieuses sont constituées par les services offerts par l'Office [grec du coton] et non par le prélèvement lui-même» (voir points 3, 17, 36 et 39 de la réplique). Dans sa réplique, elle concentre ainsi plus particulièrement son argumentation subsidiaire, non plus sur l'article 30, paragraphe 1, de la loi n° 2040/92 en tant que tel, mais sur ces services, en tant que financés par le prélèvement compensatoire (voir points 19, 20, 26 et 39 de la réplique).

68.
    Toutefois, la modification ainsi apportée à l'argumentation subsidiaire énoncée dans la requête doit être écartée. Elle constitue, en effet, un moyen nouveau, irrecevable en application de l'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure.

69.
    Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté comme irrecevable sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les autres motifs d'irrecevabilité soulevés par la Commission.

Sur les dépens

70.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de décider qu'elle supportera, outre ses propres dépens, ceux de la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

71.
    En vertu de l'article 87, paragraphe 4, du même règlement, la République hellénique supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre élargie)

déclare et arrête:

1)    Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)    La requérante supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission.

3)    La République hellénique supportera ses propres dépens.

García-Valdecasas
Lindh

Cooke

Mengozzi

Legal

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 octobre 2003.

Le greffier

Le président

H. Jung

P. Lindh


1: Langue de procédure: l'anglais.