Language of document : ECLI:EU:T:2009:181

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

9 juin 2009 (*)

« Recours en annulation – Aides d’État – Règlement (CE) n° 659/1999 – Plainte d’un concurrent – Lettres de la Commission à un plaignant – Aide existante – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑152/06,

NDSHT Nya Destination Stockholm Hotell & Teaterpaket AB, établie à Stockholm (Suède), représentée par Mes M. Merola et L. Armati, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. T. Scharf, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision qui serait contenue dans les lettres de la Commission des 24 mars et 28 avril 2006 adressées à NDSHT, relatives à une plainte concernant des aides d’État prétendument illégales octroyées par la ville de Stockholm à Stockholm Visitors Board AB (affaire CP 178/04 – Allégation d’aide d’État au bénéfice de SVB AB),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCEDES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (première chambre),

composé de Mme V. Tiili, président, M. F. Dehousse et Mme I. Wiszniewska-Białecka (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Kantza, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er juillet 2008,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, NDSHT Nya Destination Stockholm Hotell & Teaterpaket AB, est une société de droit suédois qui exerce des activités de voyagiste à Stockholm au moyen de son site Internet. Elle propose un service global comportant la réservation de chambres d’hôtel et une carte touristique appelée « Stockholm à la carte » qui permet à ses détenteurs d’accéder à plusieurs services et infrastructures dans la ville de Stockholm, tels que des musées et le transport local. Elle a été créée en 2001 à la suite du retrait des opérateurs privés de Destination Stockholm AB (DSAB).

2        DSAB avait été créée en 1980, par une décision de la ville de Stockholm et du conseil du comté de Stockholm. DSAB était un partenariat formé par des opérateurs privés du secteur du tourisme et par la ville de Stockholm par l’intermédiaire de la fondation municipale Stockholm Information Services (SIS) (ci-après la « fondation SIS »). Il s’agissait d’une filiale détenue en majorité par la fondation SIS, qui avait elle-même été créée en 1978 pour effectuer des opérations de promotion touristique de la ville de Stockholm et qui était contrôlée et financée conjointement par la ville de Stockholm et le comté de Stockholm. Depuis 1980, DSAB fournissait des hébergements dans des hôtels à prix réduits à Stockholm et un ensemble de services liés au tourisme notamment au moyen d’une carte appelée « Stockholm Card ».

3        En 2001, à la suite du retrait des opérateurs privés de DSAB, les autorités de Stockholm ont décidé de réorganiser DSAB en fusionnant ses activités restantes avec celles de la fondation SIS. Le 1er janvier 2002, DSAB a changé de nom et est devenue Stockholm Visitors Board AB (ci-après « SVB »), société détenue par la ville de Stockholm à travers différentes filiales. À partir de 2002, SVB a été chargée de la fourniture d’informations touristiques et de la promotion de la région de Stockholm, activités qui incombaient auparavant à la fondation SIS. En lien avec ces activités d’information touristique, SVB exerce également des activités commerciales consistant, notamment, en des services de réservation de chambres d’hôtel et la vente de la « Stockholm Card » qui offre l’accès gratuit à des sites et à des infrastructures dans la ville de Stockholm.

4        Le 23 septembre 2004, la requérante a transmis à la Commission des informations concernant les subventions annuelles allouées par la ville de Stockholm à SVB pour les années 2003, 2004 et 2005, en alléguant que ces subventions seraient des aides d’État octroyées par le Royaume de Suède en violation de l’article 88, paragraphe 3, CE. Les aides d’État, telles que décrites dans cette plainte et dans des observations postérieures présentées par la requérante, seraient constituées par des crédits annuels du budget de la ville de Stockholm en faveur de SVB, le remboursement régulier par la société mère de SVB de ses pertes avant impôts et l’accès préférentiel à des infrastructures publiques, telles qu’un parking payant géré par la ville de Stockholm.

5        Dans sa plainte, la requérante a fait valoir que, faute de garantie de l’absence de surcompensation des activités d’information publique, les montants octroyés par la ville de Stockholm pourraient être utilisés par SVB pour financer les activités commerciales qu’elle effectue en plus de ses activités d’information touristique en concurrence avec d’autres entreprises nationales et internationales, provoquant ainsi une distorsion de concurrence. Ces aides devraient être considérées comme illégales, en l’absence d’une approbation par la Commission, et comme incompatibles avec le marché commun.

6        La requérante a complété sa plainte par des mémorandums décrivant en détail l’histoire, l’organisation et les activités de SVB et a demandé à la Commission d’adopter des mesures provisoires au titre de l’article 11 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88] CE (JO L 83, p. 1), jusqu’à ce que celle-ci statue sur la compatibilité des aides avec le marché commun, afin d’éviter que la requérante ne subisse des dommages substantiels et irréparables.

7        La Commission a procédé à un examen de la plainte au moyen de demandes de renseignements transmises aux autorités suédoises ainsi que d’échanges de correspondance et de réunions avec des représentants de ces autorités et de la requérante. Les autorités suédoises ont envoyé à la Commission des informations contenant, notamment, des descriptions détaillées relatives à l’évolution depuis les années 30 des activités de promotion touristique de la ville de Stockholm. Elles ont également transmis à la Commission un relevé des actes adoptés par la ville de Stockholm pour mettre en œuvre les réorganisations dont ces activités ont fait l’objet, des informations financières pour chaque activité de la fondation SIS et de DSAB pour les exercices 1995 à 2001, ainsi que des informations relatives aux contributions accordées à SVB par la ville de Stockholm pendant les exercices 2002, 2003 et 2004 et des prévisions pour l’exercice 2005.

8        Le 24 mars 2006, le directeur de la direction « Aides d’État 1 : Cohésion et concurrence » de la direction générale de la concurrence de la Commission chargé du dossier (ci-après le « directeur du service de la Commission chargé du dossier ») a envoyé à la requérante une lettre rédigée comme suit :

« COMMISSION EUROPÉENNE

DG Concurrence

Aides d’État 1 : Cohésion et concurrence

Le directeur […]

Objet : CP 178/2004 – Allégation d’aide d’État au bénéfice de SVB AB

[…]

Je me réfère à vos courriers des 23 septembre 2004, 22 décembre 2004, 10 janvier 2005, 19 avril 2005 et 14 février 2006 relatifs à la plainte mentionnée en objet.

Je souhaite vous informer du fait que, sur la base des informations disponibles, les services compétents de la direction générale de la concurrence sont parvenus à la conclusion qu’il n’y a pas de motifs suffisants justifiant la poursuite de l’examen de votre plainte. Comme vous le savez, nous avons reçu de l’État membre concerné un nombre plutôt important d’informations transmises par courrier et à l’occasion de réunions. L’ensemble des faits et des circonstances ont fait l’objet d’un examen attentif et ont été analysés. La plainte de votre client a été prise très au sérieux, et nous avons fait tout ce qui était possible pour identifier une violation de l’article 87, paragraphe 1, CE.

Il résulte de notre analyse que les activités liées à la ‘Stockholm Card’ et aux réservations de chambres d’hôtel (à l’exception des places de parking comprises dans la ‘Stockholm Card’) sont mises en œuvre aux conditions du marché. Ces activités ne sont donc pas financées par une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. S’agissant de l’utilisation à titre gratuit de certaines places de parking, il peut être soutenu qu’il n’y a pas d’affectation du commerce, et même si tel était le cas, cette aide a été comprise dans la ‘Stockholm Card’ bien avant que la Suède n’adhère à l’Union européenne en 1995, et constituerait donc une aide existante. En outre, depuis le 1er janvier 2006, ce service n’est plus compris dans la ‘Stockholm Card’.

S’agissant des autres activités (fourniture d’informations touristiques, etc.), il semble qu’elles relèvent des dispositions régissant les services d’intérêt économique général (SIEG). Il ne semble pas qu’il y ait de subventions croisées en faveur d’activités économiques. Dans l’hypothèse où la compensation pour les SIEG serait qualifiée d’aide d’État, une telle aide serait néanmoins accordée aux mêmes conditions depuis bien avant 1995, et constituerait, dès lors, une aide existante.

Pour résumer, les recherches approfondies que nous avons conduites sur cette plainte montrent que nous sommes en présence d’une aide existante et non d’une aide illégale, qui en tout cas est compatible avec le marché commun. Puisqu’il n’y a pas lieu de mettre en œuvre la procédure des mesures utiles prévues à l’article 88, paragraphe 1, CE, nous n’envisageons pas d’adopter d’autre mesure dans cette affaire.

Néanmoins, je souhaite attirer votre attention sur le fait que si, contrairement à mes services, vous êtes néanmoins convaincu qu’une aide illégale a été versée, l’article 87, paragraphe 1, CE a un effet direct et créé des droits pour les particuliers que les juridictions nationales doivent sauvegarder. Vous pouvez donc les saisir de cette affaire.

[…] »

9        Par lettre du 5 avril 2006, la requérante a informé la Commission qu’elle déduisait de la lettre du 24 mars 2006 que l’examen du financement octroyé par la ville de Stockholm à SVB avait conduit la Commission à rejeter sa plainte et à adopter une décision de ne pas soulever d’objections à l’égard des aides alléguées en vertu de l’article 13 et de l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 659/1999. La requérante demandait à la Commission de lui transmettre une copie de cette décision, en vertu de l’article 20 du même règlement.

10      Par lettre du 28 avril 2006 (ci-après, prise ensemble avec la lettre du 24 mars 2006, les « lettres attaquées »), le directeur du service de la Commission chargé du dossier a répondu à la requérante en ces termes :

« COMMISSION EUROPÉENNE

DG Concurrence

Aides d’État 1 : Cohésion et concurrence

Le directeur […]

Objet : CP 178/2004 – Allégation d’aide d’État au bénéfice de SVB AB

[…]

Je me réfère à votre courrier du 5 avril 2006 relatif aux aides mentionnées en objet.

Comme je l’ai expliqué dans mon courrier du 24 mars 2006, les services de la Commission sont parvenus à la conclusion qu’il n’y a pas de raisons suffisantes justifiant la poursuite de l’examen de votre plainte. En effet, il résulte des informations fournies par les autorités suédoises par courrier et à l’occasion de réunions, que les mesures que vous dénoncez ne constituent pas des aides d’État illégales.

Dès lors, nous ne sommes pas en mesure de vous fournir une décision de la Commission en vertu de l’article 20 du règlement n° 659/1999, comme vous le demandez dans votre courrier.

[…] »

 Procédure et conclusions des parties

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 juin 2006, la requérante a introduit le présent recours.

12      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 1er septembre 2006, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité en vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

13      Le 9 novembre 2006, la requérante a déposé ses observations sur l’exception d’irrecevabilité.

14      Par ordonnance du Tribunal (quatrième chambre) du 15 mars 2007, l’exception d’irrecevabilité a été jointe au fond et les dépens ont été réservés.

15      Le 3 mai 2007, la Commission a déposé son mémoire en défense.

16      Par lettre du 28 juin 2007, la requérante a renoncé au dépôt d’un mémoire en réplique.

17      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la première chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

18      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

19      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 1er juillet 2008. Le Tribunal a invité la Commission à produire certains documents dans un délai de deux semaines. La Commission a produit ces documents le 11 juillet 2008. Par lettre du 6 août 2008, la requérante a formulé ses observations sur ces documents.

20      Le 23 janvier 2009, le Tribunal a décidé de clore la procédure orale.

21      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité et déclarer le recours recevable ;

–        annuler la décision contenue dans les lettres attaquées ;

–        ordonner à la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen au titre de l’article 88, paragraphe 2, CE ;

–        condamner la Commission aux dépens.

22      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ou non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Arguments des parties

23      La Commission soutient que les lettres attaquées ne constituent pas une décision de la Commission, ni séparément ni conjointement, et ne constituent donc pas un acte attaquable. Dès lors, le recours serait irrecevable.

24      En premier lieu, les lettres attaquées n’auraient pas un contenu décisionnel. Selon la jurisprudence, il ne suffirait pas qu’une lettre soit envoyée par une institution communautaire en réponse à une demande pour qu’elle puisse être qualifiée de décision au sens de l’article 230 CE. La lettre du 24 mars 2006 indiquerait que ce sont les services compétents de la direction générale de la concurrence, et non la Commission ou le membre de la Commission chargé des affaires de concurrence, qui sont parvenus à la conclusion de ne pas poursuivre l’enquête. La lettre du 28 avril 2006 indiquerait expressément, en réponse à la demande de la requérante, qu’il n’existait pas de décision de la Commission susceptible de lui être communiquée. La Commission n’aurait pas arrêté de position définitive. À plusieurs reprises dans sa requête, la requérante ferait d’ailleurs valoir l’absence de position finale de la Commission. Les lettres attaquées auraient été destinées à informer la requérante que les services de la Commission n’avaient pas trouvé de motifs suffisants pour se prononcer sur l’affaire ou pour poursuivre l’examen de l’aide alléguée. Le fait que les services de la Commission présentent leurs réflexions sur l’affaire, dans un souci de transparence, n’empêcherait pas de considérer les lettres attaquées comme des informations au sens de l’article 20 du règlement n° 659/1999.

25      L’argument de la requérante, tiré du caractère indifférent de la forme dans laquelle une prétendue décision a été adoptée, serait sans pertinence en l’espèce dans la mesure où la requérante devrait démontrer que les lettres attaquées constituent une décision par leur contenu. Or, les lettres attaquées n’ayant eu aucun effet juridique sur la situation de la requérante, elles ne pourraient être qualifiées de décision. En outre, les lettres attaquées ne mentionneraient pas de base juridique, elles auraient été envoyées par les services de la direction générale de la concurrence et non par la Commission en tant que collège ou par le membre de la Commission habilité à cet effet et elles auraient été adressées à la requérante et non au Royaume de Suède. Il s’agirait d’indications supplémentaires que les lettres attaquées, séparément ou conjointement, ne contiennent pas une décision de la Commission.

26      En deuxième lieu, la Commission fait valoir qu’elle n’a pas arrêté de décision ni de position définitive. Dans les lettres attaquées, la Commission n’aurait pas indiqué qu’elle avait adopté une décision au titre de l’article 13 ou de l’article 4 du règlement n° 659/1999. Le fait que la requérante, dans sa lettre du 5 avril 2006, demande à la Commission de lui envoyer une décision, révélerait qu’elle ne considérait pas la lettre du 24 mars 2006 comme une décision. La lettre du 28 avril 2006 se contenterait d’informer la requérante qu’aucune décision ne peut lui être fournie. La combinaison de ces deux lettres, dont aucune ne constitue une décision, ne saurait constituer une décision. La Commission fait valoir que, dans l’hypothèse où l’affaire porterait sur des aides illégales, elle n’a adopté aucune des décisions prévues à l’article 4 du règlement n° 659/1999 et qu’elle n’a pas davantage affirmé définitivement que les mesures en cause étaient des aides existantes. Les services de la Commission se seraient arrêtés au stade de la procédure précédant celui où la Commission devrait choisir de prendre une décision. Dans la mesure où la requérante semble implicitement admettre une inaction de la Commission et en supposant que la Commission aurait été tenue d’agir, la requérante aurait dû introduire un recours en carence.

27      En troisième lieu, la Commission relève que seules les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts d’un requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique, sont susceptibles de recours au titre de l’article 230 CE. En l’absence de décision de la Commission, la situation juridique de la requérante n’aurait pas été modifiée par l’envoi des lettres attaquées.

28      La requérante considère que l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission doit être rejetée. Il résulterait de la jurisprudence qu’une lettre envoyée à un plaignant faisant état d’une position définitive de la Commission en matière d’aides d’État constitue une décision même si elle n’a pas été adressée à l’État membre concerné. La déclaration selon laquelle les services de la Commission étaient parvenus à la conclusion qu’il n’y avait pas de motifs suffisants pour poursuivre l’examen de la plainte constituerait une décision finale par laquelle la Commission a refusé d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE et par laquelle elle a classé l’affaire. Les lettres attaquées constitueraient dès lors un acte attaquable au sens de l’article 230 CE.

29      La requérante fait valoir que, selon la jurisprudence, pour déterminer si un acte produit des effets juridiques obligatoires et, partant, est susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation, il convient d’en examiner le contenu. La forme dans laquelle une décision est adoptée serait sans importance. Or, les lettres attaquées contiendraient, conjointement ou séparément, la position définitive de la Commission à l’égard de la plainte de la requérante et produiraient des effets sur sa situation juridique. En tant que concurrente directe de la société bénéficiaire des aides alléguées, la requérante aurait été qualifiée de partie intéressée au sens de l’article 1er, sous h), du règlement n° 659/1999 et se serait vu accorder les garanties procédurales prévues à l’article 88, paragraphe 2, CE et à l’article 6 du règlement n° 659/1999, si la procédure formelle d’examen avait été ouverte.

30      Selon la requérante, tous les arguments de la Commission concernant l’irrecevabilité du recours porteraient exclusivement sur la forme et non sur le contenu des lettres attaquées et aucun ne serait pertinent. Premièrement, le fait que les lettres attaquées aient été envoyées par le directeur d’un service de la direction générale de la concurrence de la Commission serait indifférent. En l’absence d’une réserve précisant qu’elles n’exprimaient que le point de vue personnel de leur auteur, les lettres attaquées devraient être considérées comme indiquant la position de la Commission et seraient donc susceptibles de recours.

31      Deuxièmement, la Commission ne saurait prétendre que le fait que les lettres attaquées n’aient pas été adressées à un État membre indiquerait qu’elles ne constituent pas une décision de la Commission. La requérante rappelle que, selon la jurisprudence, une lettre adressée à un plaignant, faisant mention de la position définitive de la Commission concernant une aide d’État, peut faire l’objet d’un recours en annulation. Dans le cas contraire, le plaignant serait privé de toute possibilité de contester la position définitive de la Commission sur sa plainte et la Commission pourrait contourner ses obligations au titre du règlement n° 659/1999.

32      Troisièmement, le refus de la Commission de transmettre à la requérante une copie de la décision aurait confirmé que la lettre du 24 mars 2006 constituait la position définitive de la Commission. La requérante ne pouvant obtenir une motivation supplémentaire, son seul recours possible aurait été de contester la décision contenue dans les lettres attaquées. Par ailleurs, la requérante souligne que le langage prudent employé dans les lettres attaquées révèle que la Commission entretenait des doutes quant à la qualification et à la compatibilité des mesures en question qui auraient dû l’amener à ouvrir la procédure formelle d’examen. La Commission ne se serait pas contentée d’affirmer qu’il n’y avait pas de motifs suffisants pour se prononcer sur le cas, comme elle l’aurait fait pour une communication informelle au titre de l’article 20, paragraphe 2, du règlement n° 659/1999. Le contenu des lettres attaquées, malgré un langage prudent, révélerait clairement que la Commission a arrêté une position claire et définitive en réponse à la plainte de la requérante.

33      En outre, les lettres attaquées ne pourraient pas être comprises comme étant des actes préparatoires, leur contenu indiquant que la Commission n’envisageait pas de prendre d’autres mesures dans le cadre de l’examen des aides visées dans la plainte. Les garanties procédurales reconnues aux plaignants en matière d’aides d’État deviendraient complètement inutiles si la Commission bénéficiait de l’immunité du seul fait de l’utilisation d’un langage prudent dans ses décisions.

34      Enfin, l’argument de la Commission selon lequel, en l’absence d’une décision, la requérante aurait dû introduire un recours en carence devrait être rejeté en l’espèce. Il résulterait de la jurisprudence qu’un tel recours ne pourrait être introduit en présence d’une prise de position claire et explicite de la Commission sur la plainte. Les articles 230 CE et 232 CE ne formant qu’une seule et même voie de droit, c’est l’acte qui contient la prise de position de la Commission qui devrait être contesté et, par conséquent, le présent recours en annulation serait le moyen d’action approprié.

 Appréciation du Tribunal

35      Selon une jurisprudence constante, il ne suffit pas qu’une lettre ait été envoyée par une institution communautaire à son destinataire, en réponse à une demande formulée par ce dernier, pour qu’elle puisse être qualifiée de décision au sens de l’article 230 CE, ouvrant ainsi la voie du recours en annulation (arrêts du Tribunal du 22 mai 1996, AITEC/Commission, T‑277/94, Rec. p. II‑351, point 50, et du 22 octobre 1996, CSF et CSME/Commission, T‑154/94, Rec. p. II‑1377, point 51 ; ordonnance du Tribunal du 5 novembre 2003, Kronoply/Commission, T‑130/02, Rec. p. II‑4857, point 42).

36      Selon une jurisprudence également constante, seules les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts d’un requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci, constituent des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation au sens de l’article 230 CE (arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9 ; arrêt du Tribunal du 5 avril 2006, Deutsche Bahn/Commission, T‑351/02, Rec. p. II‑1047, point 35, et ordonnance Kronoply/Commission, point 35 supra, point 43).

37      Pour déterminer si un acte ou une décision produit de tels effets, il y a lieu de s’attacher à sa substance (ordonnance Kronoply/Commission, point 35 supra, point 44). En revanche, la forme dans laquelle un acte ou une décision a été adopté est en principe indifférente pour apprécier la recevabilité d’un recours en annulation (voir, en ce sens, arrêt IBM/Commission, point 36 supra, point 9).

38      À cet égard, il convient de rappeler que, si une décision mettant un terme à l’examen de la compatibilité avec le traité CE d’une mesure d’aide au sens de l’article 4 du règlement n° 659/1999 a toujours pour destinataire l’État membre concerné, une communication adressée à un plaignant peut refléter le contenu d’une telle décision, même si celle-ci n’a pas été envoyée à l’État membre concerné (ordonnance du Tribunal du 30 septembre 1999, UPS Europe/Commission, T‑182/98, Rec. p. II‑2857, point 38).

39      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler le régime applicable aux plaintes en matière d’aides d’État tel que prévu au règlement n° 659/1999.

40      Une fois que la Commission, en application de l’article 10, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999, a examiné des informations concernant une aide prétendue illégale, l’article 13 du même règlement lui impose, en ce qui concerne les aides illégales, de clôturer la phase préliminaire d’examen par l’adoption d’une décision au titre de l’article 4 du même règlement.

41      En dehors de cette possibilité de prendre une décision en vertu de l’article 4 du règlement n° 659/1999, la Commission, lorsqu’elle est saisie d’informations visant l’existence éventuelle d’une aide d’État, n’a d’autre choix que d’informer les parties intéressées, en application de l’article 20, paragraphe 2, deuxième phrase, du même règlement qu’il « n’y a pas de motifs suffisants pour se prononcer sur le cas » (arrêt Deutsche Bahn/Commission, point 36 supra, point 43).

42      Il ressort de la jurisprudence que, pour apprécier si une lettre transmise à un plaignant en réponse à sa plainte constitue un acte attaquable, le Tribunal doit déterminer au regard de la substance de l’acte attaqué s’il constitue une décision au sens de l’article 4 du règlement n° 659/1999 ou simplement une communication informelle, telle que prévue à l’article 20, paragraphe 2, deuxième phrase, du même règlement (voir, en ce sens, arrêt Deutsche Bahn/Commission, point 36 supra, point 44).

43      Ainsi, il découle de la procédure applicable aux plaintes en matière d’aides d’État, telle qu’elle est prévue au règlement n° 659/1999 et notamment à son article 20, paragraphe 2, que si la Commission a l’obligation d’examiner sans délai les informations concernant une prétendue aide illégale qui lui sont transmises par un tiers par l’intermédiaire d’une plainte, en revanche, elle n’est pas tenue d’adopter une décision au sens de l’article 4 dudit règlement en réponse à chaque plainte.

44      L’obligation pour la Commission d’adopter une décision en réponse à une plainte ne concerne que l’hypothèse prévue à l’article 13 du règlement n° 659/1999. L’article 20, paragraphe 2, deuxième phrase, du même règlement prévoit que la Commission peut se contenter d’informer le plaignant par une lettre qu’il n’y a pas de motifs suffisants pour se prononcer sur le cas. Tel est notamment le cas lorsque l’article 13 du règlement n° 659/1999 est inapplicable parce que la plainte ne concerne pas une aide illégale, mais vise en réalité une aide existante.

45      Afin de déterminer si le présent recours est recevable, il y a lieu d’examiner s’il résulte de la substance des lettres attaquées qu’elles peuvent être considérées comme une décision au sens de l’article 4 du règlement n° 659/1999 ayant en réalité pour destinataire l’État membre concerné et affectant les intérêts de la requérante en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique.

46      En premier lieu, il convient, d’analyser le contenu des lettres attaquées.

47      Dans la lettre du 24 mars 2006, le directeur du service de la Commission chargé du dossier a informé la requérante qu’il considérait qu’il n’y avait pas de motifs suffisants pour poursuivre l’examen de la plainte. Il a souligné avoir procédé à un examen attentif de la plainte.

48      Tout d’abord, il y a lieu de relever que, lorsque le directeur du service de la Commission chargé du dossier a indiqué, dans la première partie du troisième alinéa de la lettre du 24 mars 2006, que les activités liées à la « Stockholm Card » (à l’exception des places de parking) et aux réservations de chambres d’hôtel étaient exercées aux conditions du marché, il a constaté que ces activités n’étaient pas financées par les subventions dénoncées dans la plainte. Ce faisant, il n’a pas indiqué que les subventions dénoncées dans la plainte ne remplissaient pas les conditions nécessaires pour être qualifiées d’aide d’État au sens de l’article 87 CE. Dès lors, il ne saurait être déduit de cette première partie du troisième alinéa de la lettre du 24 mars 2006 que la Commission affirme que les subventions dénoncées dans la plainte à cet égard ne sont pas des aides d’État.

49      Ensuite, dans la seconde partie du troisième alinéa de la lettre du 24 mars 2006, le directeur du service de la Commission chargé du dossier a indiqué qu’il pouvait être soutenu que l’utilisation à titre gratuit de certaines places de parking par SVB n’affectait pas le commerce et que, en tout état de cause, cette aide ayant été comprise dans la « Stockholm Card » avant 1995, c’est-à-dire avant l’adhésion du Royaume de Suède à l’Union européenne, il s’agissait d’une aide existante. Dans le quatrième alinéa de la lettre du 24 mars 2006, il a précisé que les autres activités de SVB semblaient relever des dispositions régissant les services d’intérêt économique général et que, dans l’hypothèse où leur financement constituerait une aide d’État, elle aurait été accordée dans les mêmes conditions depuis bien avant 1995 et qu’elle constituerait une aide existante. Il en ressort que, dans la mesure où le directeur du service de la Commission chargé du dossier considérait que les aides dénoncées dans la plainte constituaient des aides existantes, il n’a pas procédé à un examen plus approfondi de la qualification d’aide d’État.

50      Enfin, le directeur du service de la Commission chargé du dossier a indiqué, pour résumer, que l’examen de la plainte avait montré que les mesures dénoncées constituaient des aides existantes et non des aides illégales.

51      Dans la lettre du 28 avril 2006, en réponse à la lettre du 5 avril 2006 de la requérante, le directeur du service de la Commission chargé du dossier a rappelé que les mesures dénoncées dans la plainte ne constituaient pas des aides illégales et que, par conséquent, il n’était pas possible de fournir une décision à la requérante en application de l’article 20 du règlement n° 659/1999.

52      Ainsi, il ressort clairement de la lettre du 28 avril 2006, ainsi que de la substance de la lettre du 24 mars 2006, que la Commission a considéré, à la suite d’un examen préliminaire des informations qui lui ont été transmises par l’État membre concerné, que les mesures dénoncées dans la plainte ne constituaient pas des aides illégales, au sens de l’article 1er, sous f), du règlement n° 659/1999. Dans les lettres attaquées, la Commission s’est contentée d’informer la requérante qu’il résultait d’une première évaluation provisoire que les aides dénoncées dans la plainte constituaient des aides existantes relevant de la procédure de l’article 88, paragraphe 1, CE.

53      Par ailleurs, il y a lieu de relever que, même si la Commission avait affirmé dans la première partie du troisième alinéa de la lettre du 24 mars 2006 que les activités liées à la « Stockholm Card » et aux réservations de chambres d’hôtel étaient financées par les subventions dénoncées dans la plainte, cela ne modifierait pas sa conclusion selon laquelle, ces subventions ayant été versées depuis avant 1995, elles constituent des aides existantes.

54      Dès lors, il ressort de la substance des lettres attaquées que la Commission a décidé de ne pas donner suite à la plainte au motif que les aides en cause constituent des aides existantes.

55      À cet égard, lors de l’audience, la Commission ne pouvait valablement soutenir, d’une part, qu’elle n’était pas en mesure de comprendre les lettres attaquées et, d’autre part, que la lettre du 24 mars 2006 contenant des formulations vagues, il en ressortait que son service n’avait donné aucune raison à la non-poursuite de l’examen de la plainte.

56      En second lieu, il convient d’examiner si les lettres attaquées en ce qu’elles qualifient les aides dénoncées dans la plainte d’aides existantes peuvent être considérées comme une décision affectant les intérêts de la requérante en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique.

57      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en matière d’aides existantes, l’initiative appartient à la seule Commission (arrêt de la Cour du 9 août 1994, Namur-Les assurances du crédit, C‑44/93, Rec. p. I‑3829, point 11). Dans le cadre de la compétence accordée à la Commission pour procéder à l’examen permanent des aides existantes, la Commission ne peut être contrainte, au moyen d’une plainte, à adresser à l’État membre une recommandation proposant des mesures utiles en application de l’article 18 du règlement n° 659/1999 (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 octobre 1996, Salt Union/Commission, T‑330/94, Rec. p. II‑1475, points 33 à 35).

58      En outre, il ressort de la jurisprudence que si les éléments d’information fournis par l’État membre permettent, dans le cadre d’une évaluation provisoire, de penser qu’il est probable que les mesures en cause constituent des aides existantes, la Commission doit les traiter dans le cadre procédural prévu aux paragraphes 1 et 2 de l’article 88 CE. En revanche, si les éléments fournis par l’État membre ne permettent pas d’arriver à cette conclusion provisoire ou si l’État membre ne fournit aucun élément à cet égard, la Commission doit traiter ces mesures dans le cadre procédural prévu aux paragraphes 3 et 2 de ce même article (arrêt de la Cour du 10 mai 2005, Italie/Commission, C‑400/99, Rec. p. I‑3657, point 55).

59      Par ailleurs, il convient de relever que la procédure applicable en matière d’aides existantes prévue aux articles 17 à 19 du règlement n° 659/1999 n’envisage aucune décision adressée à l’État membre concerné susceptible d’être adoptée par la Commission à l’issue de la phase préliminaire d’examen.

60      Il en résulte qu’un plaignant ne saurait, au moyen d’une plainte adressée à la Commission, contraindre cette dernière à apprécier la compatibilité d’une aide existante. Si la Commission considère, après une première évaluation, que la plainte ne vise pas des aides illégales mais des aides existantes, elle n’a pas l’obligation d’adresser une décision au sens de l’article 4 du règlement n° 659/1999 à l’État membre concerné et ne peut être contrainte à mettre en œuvre la procédure de l’article 88, paragraphe 1, CE.

61      En l’espèce, il convient de rappeler que la Commission a conclu, dans les lettres attaquées, que les aides dénoncées dans la plainte étaient des aides existantes. Il en résulte que, l’article 13 du règlement n° 659/1999 relatif aux aides illégales n’étant pas applicable, la Commission ne pouvait pas adopter une décision au sens de l’article 4 du règlement n° 659/1999. Elle ne pouvait donc, en réponse à la plainte de la requérante, que l’informer qu’il n’y avait pas de motifs suffisants pour se prononcer sur le cas en application de l’article 20, paragraphe 2, deuxième phrase, du règlement n° 659/1999.

62      De plus, il ressort des lettres attaquées qu’une évaluation provisoire des aides dénoncées dans la plainte a conduit la Commission à considérer que la procédure de l’article 88, paragraphe 1, CE était applicable au motif qu’il s’agissait d’aides existantes. Dès lors, contrairement à ce que prétend la requérante, les lettres attaquées ne constituent pas une décision de classement de l’affaire au motif que ces subventions ne constituaient pas une aide d’État.

63      En outre, contrairement à ce que prétend la requérante, les lettres attaquées ne constituent pas non plus un refus d’ouverture de la procédure formelle d’examen de l’article 88, paragraphe 2, CE. En effet, force est de constater que la Commission ne pouvait même pas ouvrir cette procédure, dès lors qu’un premier examen mené par elle avait fait apparaître que les aides en cause constituaient des aides existantes (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 5 octobre 1994, Italie/Commission, C‑47/91, Rec. p. I‑4635, point 24, et arrêt CSF et CSME/Commission, point 35 supra, point 49).

64      Il convient d’ajouter qu’il serait contraire à l’économie de la procédure de contrôle des aides d’État de considérer que, lorsque la Commission informe un plaignant que sa plainte concerne une aide existante, elle adopte nécessairement une décision au sens de l’article 4 du règlement n° 659/1999. Une telle solution impliquerait que, lorsque la Commission est saisie d’une plainte concernant une aide existante, elle a l’obligation d’en examiner la compatibilité avec le marché commun. Cependant, comme cela a été indiqué au point 57 ci-dessus, en application de l’article 88, paragraphe 1, CE, la Commission a seule l’initiative de la mise en œuvre de la procédure de contrôle permanent des aides existantes.

65      Par conséquent, c’est à bon droit que la Commission, ayant considéré que les aides dénoncées dans la plainte étaient des aides existantes, a indiqué dans la lettre du 28 avril 2006 qu’elle n’était pas en mesure de transmettre, comme le demandait la requérante dans sa lettre du 5 avril 2006, une copie d’une décision au sens de l’article 4 du règlement n° 659/1999.

66      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, un régime d’aides existant peut continuer à être mis à exécution tant que la Commission n’a pas constaté son incompatibilité avec le marché commun (arrêt de la Cour du 15 mars 1994, Banco Exterior de España, C‑387/92, Rec. p. I‑877, point 20, et ordonnance du Tribunal du 2 juin 2003, Forum 187/Commission, T‑276/02, Rec. p. II‑2075, point 48).

67      Il ressort également de la jurisprudence que, lorsque la Commission décide de traiter une aide dans le cadre de l’examen permanent des aides existantes, la situation juridique ne change pas jusqu’à l’acceptation éventuelle par l’État membre concerné de propositions de mesures utiles ou jusqu’à l’adoption d’une décision finale par la Commission (arrêt de la Cour du 9 octobre 2001, Italie/Commission, C‑400/99, Rec. p. I‑7303, point 61).

68      Dès lors, les lettres attaquées, en ce qu’elles qualifient les aides dénoncées dans la plainte d’aides existantes, ne présentent pas les caractéristiques d’une décision produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la requérante.

69      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’indication figurant dans la lettre du 24 mars 2006, selon laquelle les aides dénoncées dans la plainte et qualifiées d’aides existantes seraient « en tout cas compatible[s] avec le marché commun ». En effet, d’une part, comme la Commission l’indique également dans cette lettre, il s’agit d’informer le plaignant qu’elle n’envisage pas pour l’instant de mettre en œuvre la procédure de l’article 88, paragraphe 1, CE, ce qui, selon la jurisprudence citée au point 57 ci-dessus, relève de sa seule initiative. D’autre part, en application de la jurisprudence citée au point 66 ci-dessus, une telle information ne produit pas d’effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la requérante.

70      Il résulte de ce qui précède que les lettres attaquées doivent être considérées comme une communication informelle, telle que prévue à l’article 20, paragraphe 2, deuxième phrase, du règlement n° 659/1999 dont le contenu ne reflète pas une décision au sens de l’article 4 du même règlement. Partant, les lettres attaquées ne constituent pas un acte attaquable au sens de l’article 230 CE.

71      Enfin, il convient de rappeler que, dans le cadre du contrôle du respect par les États membres des obligations mises à leur charge par les articles 87 CE et 88 CE, la Commission et les juridictions nationales jouent des rôles complémentaires et distincts. Le juge national a pour rôle de sauvegarder les droits que les particuliers tirent de l’effet direct de l’interdiction énoncée à la dernière phrase de l’article 88, paragraphe 3, CE. Le juge national peut donc être saisi afin de constater l’illégalité d’une aide d’État et d’en ordonner la restitution.

72      Ainsi, l’irrecevabilité du présent recours n’a pas pour effet de priver la requérante de la possibilité de soumettre la légalité de l’aide en cause à un contrôle juridictionnel. En effet, les juridictions nationales doivent garantir que toutes les conséquences d’une violation de l’article 88, paragraphe 3, dernière phrase, CE seront tirées, conformément à leur droit national, en ce qui concerne tant la validité des actes d’exécution des mesures d’aide que le recouvrement des soutiens financiers accordés au mépris de cette disposition (arrêts de la Cour du 21 novembre 1991, Fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires et Syndicat national des négociants et transformateurs de saumon, C‑354/90, Rec. p. I‑5505, point 12, et du 12 février 2008, CELF et ministre de la Culture et de la Communication, C‑199/06, Rec. p. I‑469, point 41).

73      Par ailleurs, la demande de la requérante visant à ce que le Tribunal ordonne à la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen est irrecevable, étant donné que, en vertu d’une jurisprudence constante, dans le cadre d’un recours en annulation fondé sur l’article 230 CE, la compétence du juge communautaire est limitée au contrôle de la légalité de l’acte attaqué et le Tribunal ne peut, dans l’exercice de ses compétences, adresser une injonction aux institutions communautaires (arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, DSM/Commission, C‑5/93 P, Rec. p. I‑4695, point 36, et arrêt du Tribunal du 24 février 2000, ADT Projekt/Commission, T‑145/98, Rec. p. II‑387, points 83 et 84).

74      Il résulte de tout ce qui précède que le recours dans son ensemble est irrecevable.

 Sur les dépens

75      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      NDSHT Nya Destination Stockholm Hotell & Teaterpaket AB est condamnée aux dépens.

Tiili

Dehousse

Wiszniewska-Białecka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juin 2009.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.