Language of document : ECLI:EU:T:2019:299

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

8 mai 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne tridimensionnelle – Forme d’une bouteille rose – Motifs absolus de refus – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous e), i) à iii), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous e), i) à iii), du règlement 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑325/18,

Vinicola Tombacco (VI.TO.) Srl, établie à Trebaseleghe (Italie), représentée par Me L. Giove, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Scardocchia et M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Sandro Bottega, établi à Colle Umberto (Italie), représenté par Me R. Galli, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 14 mars 2018 (affaire R 1037/2017-1), relative à une procédure de nullité entre VI.TO. et M. Bottega

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, S. Papasavvas (rapporteur) et Mme O. Spineanu‑Matei, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 mai 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 14 août 2018,

vu le mémoire en réponse de l’intervenant déposé au greffe du Tribunal le 1er août 2018,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 14 novembre 2013 (ci-après la « date de référence »), l’intervenant, M. Sandro Bottega, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1) [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe tridimensionnel reproduit ci-après, pour lequel la couleur rose avait été indiquée :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

« Boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; eaux-de-vie ; alcool de menthe ; alcool de riz ; spiritueux ; amers ; anis (liqueur) ; anisette ; apéritifs ; arak ; boissons alcoolisées à l’exception des bières ; boissons alcoolisées contenant des fruits ; boissons alcoolisées pré-mélangées, autres qu’à base de bière ; boissons distillées ; cocktails ; curaçao ; digestifs (alcools et liqueurs) ; essences alcooliques ; extraits alcooliques ; extraits de fruits avec alcool ; genièvre (eau-de-vie) ; hydromel ; kirsch ; liqueurs ; nira (boisson alcoolisée à base de canne à sucre) ; rhum ; saké ; cidre ; poiré ; piquette ; vin ; vodka ; whisky. »

4        Le 26 mars 2014, la marque a été enregistrée en tant que marque de l’Union européenne pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

5        Le 2 mars 2016, la requérante, Vinicola Tombaco (VI.TO.) Srl, a présenté une demande en nullité, au titre de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], lu conjointement avec l’article 7 dudit règlement (devenu article 7 du règlement 2017/1001), contre la marque contestée, pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        Les motifs invoqués à l’appui de la demande en nullité étaient ceux visés à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001] et à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i) à iii), du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous e), i) à iii), du règlement 2017/1001].

7        Le 31 mars 2017, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité.

8        Le 17 mai 2017, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’annulation.

9        Par décision du 14 mars 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.

10      En particulier, s’agissant, premièrement, du motif visé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la chambre de recours a considéré que, dès lors que la marque contestée avait été enregistrée par l’EUIPO à la suite de l’examen effectué par l’examinateur, elle bénéficiait d’une présomption de validité à compter de la date de la demande d’enregistrement, de sorte que, conformément à une jurisprudence constante, l’EUIPO n’était pas contraint d’effectuer à nouveau l’examen d’office des faits en cause, au titre de l’article 95 du règlement 2017/1001. À cet égard, la chambre de recours a relevé que, dans le cadre d’une procédure de nullité, il incombait à la requérante, en sa qualité de demanderesse en nullité, de produire les « faits spécifiques » susceptibles d’étayer sa déclaration selon laquelle la marque contestée, dans son ensemble, était dépourvue de caractère distinctif à la date de référence. Or, aucun des éléments produits par la requérante n’aurait été de nature à démontrer l’absence de caractère distinctif intrinsèque de la marque contestée pour les produits en cause à la date de référence.

11      S’agissant, deuxièmement, des motifs de refus prévus à l’article 7, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 207/2009, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, la chambre de recours a rappelé, tout d’abord, que les produits en cause n’étaient pas des bouteilles, mais des boissons qui, en raison de leur caractère liquide, ne pouvaient pas revêtir de forme imposée par la nature du produit, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement n° 207/2009, mais prenaient la forme de leur conditionnement, lequel était susceptible de varier. Ensuite, la chambre de recours a relevé que la couleur de la marque contestée n’était pas pertinente au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009, dans sa version applicable aux faits de l’espèce. Enfin, la chambre de recours a estimé que la forme de la bouteille et la couleur rose bonbon à effet miroir, qui constituaient les seules caractéristiques essentielles du signe, n’avaient pas de design « remarquable », « particulier » ou « facilement reconnaissable », de façon à pouvoir conférer, tant séparément que conjointement, une valeur substantielle aux produits visés, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), dudit règlement.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

13      L’EUIPO et l’intervenant concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      À l’appui de son recours, la requérante invoque quatre moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du même règlement, le troisième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), dudit règlement et, le quatrième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), de ce même règlement.

 Observations liminaires

15      À titre liminaire, il y a lieu de relever que le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, modifiant le règlement no 207/2009 et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94, et abrogeant le règlement (CE) no 2869/95 de la Commission relatif aux taxes à payer à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 2015, L 341, p. 21), entré en vigueur le 23 mars 2016, a modifié le libellé de l’article 7, paragraphe 1, sous e), du règlement no 207/2009, lequel concerne une règle de fond, en ajoutant aux signes constitués exclusivement « par la forme », imposée par la nature même du produit, nécessaire à l’obtention d’un résultat technique ou qui donne une valeur substantielle au produit, la référence à une « autre caractéristique » du produit en cause.

16      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les règles de fond sont habituellement interprétées comme ne visant des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur que dans la mesure où il ressort clairement de leurs termes, de leur finalité ou de leur économie qu’un tel effet doit leur être attribué (arrêts du 12 novembre 1981, Meridionale Industria Salumi e.a., 212/80 à 217/80, EU:C:1981:270, point 9, et du 11 décembre 2008, Commission/Freistaat Sachsen, C‑334/07 P, EU:C:2008:709, point 44). Or, il ne ressort pas des termes du règlement 2015/2424, de sa finalité ou de son économie que l’article 7, paragraphe 1, sous e), du règlement no 207/2009, dans sa version issue du règlement 2015/2424, devrait s’appliquer à des situations acquises antérieurement à son entrée en vigueur.

17      Par ailleurs, il importe de rappeler que, en vertu d’une jurisprudence constante, les instances de l’EUIPO doivent, pour examiner si les motifs absolus visés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 s’opposent à l’enregistrement d’une marque ou doivent entraîner la déclaration de la nullité d’une marque préalablement enregistrée, se placer à la date du dépôt de la demande d’enregistrement [voir arrêt du 21 novembre 2013, Heede/OHMI (Matrix-Energetics), T‑313/11, non publié, EU:T:2013:603, point 47 et jurisprudence citée].

18      Il s’ensuit que c’est l’article 7, paragraphe 1, sous b) et e), du règlement no 207/2009, dans sa rédaction avant modification (ci-après le « règlement no 207/2009 avant modification ») qui est applicable en l’espèce, étant donné que la marque contestée a été enregistrée le 26 mars 2014 à la suite d’une demande d’enregistrement déposée le 14 novembre 2013, ce qui n’est pas remis en cause par les parties. De surcroît, il ressort des termes de la décision attaquée que c’est bien l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 avant modification, qui a été appliqué par la chambre de recours et qui a été invoqué par la requérante lors de la procédure administrative.

19      Par suite, en application de la jurisprudence citée aux points 16 et 17 ci-dessus, il convient d’examiner les motifs de refus invoqués par la requérante dans leur version issue du règlement no 207/2009 avant modification.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

 Sur la recevabilité des éléments de preuve produits pour la première fois devant le Tribunal

20      Il convient de constater, ainsi que l’a relevé l’EUIPO, que la requérante a produit, en annexe à la requête, deux pièces visant à établir la prétendue présence sur le marché de bouteilles de forme similaire et de couleur rose provenant de marques concurrentes pendant la période pertinente, lesquelles n’avaient pas été produites lors de la procédure administrative. D’après la requérante, ces documents sont de nature à corroborer la documentation produite devant l’EUIPO s’agissant de la prétendue absence de caractère distinctif de la marque contestée.

21      Or, à l’instar de l’EUIPO, il convient de relever que ces pièces, produites pour la première fois devant le Tribunal, ne peuvent pas être prises en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter comme irrecevables les documents susmentionnés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir arrêt du 6 octobre 2011, Bang & Olufsen/OHMI (Représentation d’un haut-parleur), T‑508/08, EU:T:2011:575, point 22 et jurisprudence citée].

 Sur le fond

22      La requérante considère que la décision attaquée est entachée d’une contradiction de motifs en ce que la chambre de recours a, d’une part, rejeté la demande en nullité formulée sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, tout en affirmant, d’autre part, dans le cadre de l’examen de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), de ce même règlement, que le caractère distinctif de la marque contestée était extrêmement faible, eu égard au défaut intrinsèque de caractère distinctif des caractéristiques du signe qualifiées d’essentielles, à savoir la forme de la bouteille et sa couleur rose bonbon, tant prises séparément que de manière combinée.

23      Or, d’après la requérante, compte tenu du fait que le seul autre élément de la marque contestée, à savoir la lettre majuscule « B » en relief sur le col de la bouteille, a été considéré comme non essentiel ou dénué de pertinence par la chambre de recours, et que tant la forme de la bouteille que sa couleur rose bonbon seraient d’usage courant dans le secteur, la marque contestée est dépourvue de caractère distinctif dans son ensemble. Cette conclusion s’imposerait en l’espèce, dans la mesure où l’ensemble des éléments constitutifs de ladite marque auraient été considérés comme étant dépourvus de caractère distinctif intrinsèque. Dans ces conditions, c’est uniquement à titre subsidiaire que la requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours relative au prétendu manque de pertinence des éléments de preuve qu’elle a produits afin de remettre en cause le caractère distinctif de la marque contestée.

24      L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante.

25      Aux termes de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, la nullité de la marque de l’Union européenne est déclarée lorsque ladite marque a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7 dudit règlement.

26      Or, ainsi que la chambre de recours l’a relevé à bon droit dans la décision attaquée (voir point 10 ci-dessus), dans le cadre de la procédure de nullité, celle-ci n’était pas tenue d’examiner d’office une nouvelle fois les faits en cause, au titre de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lesquels auraient pu l’amener à appliquer les motifs absolus de refus et, notamment, celui relevant de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. En effet, dès lors que l’examinateur a fait droit à l’enregistrement de la marque contestée, cette dernière bénéficiait d’une présomption de validité à compter de la date de dépôt de la demande d’enregistrement qu’il incombait à la requérante de renverser par la production d’éléments concrets qui mettraient en cause sa validité [voir, en ce sens, arrêt du 28 septembre 2016, European Food/EUIPO – Société des produits Nestlé (FITNESS), T‑476/15, EU:T:2016:568, points 47 et 48 et jurisprudence citée].

27      La requérante ne remet nullement en cause ces appréciations, mais se borne à affirmer que la marque contestée est dépourvue de caractère distinctif et que la décision attaquée repose exclusivement sur le motif que les documents produits par elle lors de la procédure administrative ne constitueraient pas des éléments concrets de nature à remettre en cause la validité de la marque contestée.

28      Dans ces conditions, le contrôle du Tribunal doit porter essentiellement sur la question de savoir si c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve produits par la requérante ne permettaient pas de remettre en cause la conclusion selon laquelle la marque contestée présentait un caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

29      À cet égard, la chambre de recours a relevé que, afin de prouver que la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif, la requérante avait produit des résultats de plusieurs recherches effectuées sur Internet, en utilisant les termes « bottiglia collio » et « pink bottle/bottiglia collio rosa ». Par ailleurs, selon la chambre de recours, la requérante avait fourni les résultats d’une recherche effectuée sur Internet comportant des photographies de bouteilles d’autres marques afin d’établir que d’autres producteurs de vin utilisaient déjà des bouteilles roses.

30      La chambre de recours a constaté que les documents constitués principalement d’images téléchargées depuis un moteur de recherche sur Internet ne constituaient pas des faits spécifiques susceptibles de remettre en cause la validité de la marque contestée et donc d’étayer la thèse selon laquelle ladite marque était dépourvue de caractère distinctif. En particulier, premièrement, la chambre de recours a relevé que les résultats liés à la requête « bottiglia collio » n’étaient pas pertinents, puisque, d’une part, ils ne faisaient que démontrer des faits notoires et incontestés, à savoir que la forme de la bouteille dite « collio » était connue avant 2013 et qu’elle était d’usage courant pour les vins mousseux et notamment le prosecco, et, d’autre part, ils ne portaient pas sur la marque dans son ensemble. Deuxièmement, le document lié à la requête « pink bottle – alcoholic drink » consisterait en une simple collecte d’images sans aucune explication fournie sur leur pertinence, alors même que de nombreuses bouteilles n’étaient pas roses, appartenaient au titulaire de la marque contestée ou étaient trop petites pour être clairement visibles. En outre, selon la chambre de recours, à l’exception d’une marque de champagne qui, d’après la requérante aurait été commercialisée au moins depuis 2012, les images en question n’indiquaient pas si les bouteilles faisaient référence à des produits présents sur le marché et, le cas échéant, si leur présence était antérieure à la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée et ne spécifiaient pas non plus le territoire concerné. Par conséquent, la chambre de recours a considéré que ledit document ne permettait pas davantage de constater que l’utilisation de bouteilles de couleur rose était répandue à la date de référence.

31      Afin de contester l’appréciation de la chambre de recours sur ce point, la requérante se limite à faire valoir qu’« il est loin d’être impossible de déduire de la documentation produite devant la chambre de recours [telle que corroborée par celle produite devant le Tribunal,] la présence sur le marché d’une multitude de bouteilles de forme et de couleur rose bonbon identiques à celles […] de la marque [contestée] », dont l’utilisation aurait été répandue avant la date de référence. Elle soutient, à cet égard, que la chambre de recours aurait considéré comme pertinent le fait que le Rosé impérial de la marque de champagne Moët & Chandon était présent sur le marché dans l’édition Tag your love depuis plusieurs années et, dans tous les cas, à une date antérieure à celle du dépôt de la marque contestée. Cela aurait été également le cas d’une autre marque de champagne, déposée en tant que marque de l’Union européenne en 2007, à propos de laquelle la chambre de recours avait émis un doute quant à sa commercialisation effective. Or, selon la requérante, les nouveaux documents produits par elle devant le Tribunal permettraient de lever un tel doute.

32      D’emblée, il suffit de constater que, dans la mesure où l’argumentation de la requérante repose sur des documents qui n’avaient pas été produits devant la chambre de recours, elle ne saurait être prise en compte par le Tribunal, ceux-ci ayant été écartés comme irrecevables pour les motifs exposés au point 21 ci-dessus.

33      Quant aux documents figurant dans le dossier de l’EUIPO, ainsi que l’a constaté à juste titre la chambre de recours, faute de contenir des indications précises sur la date et le territoire de commercialisation des bouteilles présentant des similitudes avec celles de la marque contestée, ils ne permettent pas de remettre en cause sa validité. En effet, à l’instar de l’EUIPO et ainsi que l’a relevé la chambre de recours, la simple existence d’images sur Internet n’établit pas que les produits en cause sont effectivement présents sur le marché et qu’ils l’étaient avant novembre 2013.

34      Cette appréciation n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante selon lesquels la chambre de recours aurait considéré comme pertinent le fait que le producteur de la marque Moët & Chandon aurait mis sur le marché une ligne de bouteilles roses avant la date de dépôt de la marque contestée. En effet, une telle constatation ne ressort nullement de la décision attaquée, dès lors que la chambre de recours s’est limitée à observer que, bien que la requérante eût soutenu que les bouteilles roses de ladite marque avaient été commercialisées depuis au moins l’année 2012, elle n’avait pas produit de preuve démontrant la véracité de cette allégation et, par conséquent, la chambre de recours n’en a pas tenu compte. Il s’ensuit que la requérante ne saurait utilement faire valoir que la chambre de recours a accordé une pertinence quelconque à son argumentation liée à la prétendue présence sur le marché de bouteilles de forme et de couleur identiques à celle de la marque contestée antérieurement à la date de dépôt de celle-ci.

35      En outre, s’agissant de la contradiction interne dont serait prétendument entachée la décision attaquée (voir point 22 ci-dessus), force est de constater que, d’une part, contrairement à ce que prétend la requérante, la chambre de recours n’a nullement indiqué dans la décision attaquée que « la marque contestée avait un caractère distinctif extrêmement faible ». En effet, une telle constatation ne figure pas dans la décision attaquée, mais procède d’une lecture tronquée de celle-ci de la part de la requérante, dès lors que cette dernière prend appui sur la circonstance relevée par la chambre de recours selon laquelle la forme de la bouteille en cause est couramment utilisée pour des produits tels que ceux visés par la marque contestée. La chambre de recours ne s’est d’ailleurs pas prononcée sur le caractère distinctif de la marque dans son ensemble, dès lors qu’elle bénéficiait d’une présomption de validité, qu’il incombait à la requérante de renverser, conformément la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus. Or, la chambre de recours s’est bornée à considérer à juste titre que les preuves produites par la requérante étaient non pertinentes ou insuffisantes, en constatant que celle-ci n’avait produit aucun fait spécifique au soutien de ses affirmations d’absence de caractère distinctif de la marque contestée.

36      D’autre part, la chambre de recours a analysé les caractéristiques de la marque, prises séparément, dans le cadre de l’examen du motif visé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement n° 207/2009 (voir point 59 ci-après), qui poursuit un objectif différent, à savoir celui d’éviter que le droit des marques aboutisse à conférer à une entreprise un monopole sur des formes qui donnent une valeur substantielle au produit (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2011, Représentation d’un haut-parleur, T‑508/08, EU:T:2011:575, points 63 à 66), de sorte que la requérante ne saurait utilement en tirer argument pour remettre en cause le caractère distinctif de la marque contestée.

37      Il s’ensuit que, nonobstant la circonstance que la chambre de recours a indiqué, au point 56 de la décision attaquée, que la forme de bouteille visée était dépourvue de tout caractère distinctif, cette considération doit être lue dans le contexte dans lequel elle a été formulée, à savoir celui de l’examen du motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement n° 207/2009. Elle ne permet donc pas de considérer que la décision attaquée est entachée d’une contradiction interne, ainsi que le prétend la requérante, en ce qui concerne l’appréciation du caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement. En effet, ainsi que l’a précisé la chambre de recours au même point de la décision attaquée, cette absence de caractère distinctif de la forme exclut que son design puisse être qualifié de « remarquable », de « particulier » ou de « facilement reconnaissable », conformément aux exigences de la jurisprudence pertinente en la matière.

38      De surcroît, ainsi que l’a relevé la chambre de recours d’emblée dans son analyse, bien que la marque contestée soit un signe tridimensionnel, elle ne se résume pas à la seule forme de la bouteille, mais comprend d’autres éléments ou caractéristiques, à savoir la couleur rose réfléchissant et la lettre majuscule « B ». Ainsi, l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle la forme était, en elle-même, dépourvue de tout caractère distinctif, à la supposer fondée, ne saurait conduire automatiquement à la conclusion selon laquelle la marque contestée est dénuée de caractère distinctif dans son ensemble. En outre, il doit être rappelé que l’analyse de chacun des autres éléments constitutifs de ladite marque a été effectuée à l’aune de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement n° 207/2009 afin de déterminer s’ils pouvaient être considérés comme constituant des caractéristiques de nature à donner une valeur substantielle aux produits en cause et non au regard de leur caractère distinctif intrinsèque ou du caractère distinctif de la marque en tant que telle. Il s’ensuit que, au même titre que les considérations portant sur la forme de la bouteille, formulées dans le cadre de l’examen du motif visé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement n° 207/2009, le fait que la chambre de recours a qualifié l’autre élément de la marque contestée, à savoir la lettre majuscule « B », comme étant une caractéristique « non essentielle », ne permet pas de constater que la décision attaquée est entachée d’une contradiction de motifs s’agissant du caractère distinctif de ladite marque.

39      Par suite, il y a lieu d’écarter le premier moyen comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement no 207/2009

40      La requérante fait valoir que la décision attaquée est entachée d’une contradiction de motifs en ce qu’il en ressort, d’une part, que le produit visé par la marque contestée est le vin et non les bouteilles et, d’autre part, que, bien que la chambre de recours ait confirmé que le format de bouteilles communément appelé « collio » était habituellement utilisé pour des vins mousseux en général et le prosecco en particulier, elle n’a pas pour autant considéré que la forme de la bouteille était imposée par la nature du produit. Or, la requérante prétend que la forme de la bouteille est étroitement liée aux produits qu’elle contient et que le titulaire de la marque contestée a choisi une forme de bouteilles standardisée sans avoir apporté la moindre variante, de sorte qu’elle serait frappée par le motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement no 207/2009.

41      L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante.

42      La chambre de recours a, tout d’abord, relevé que les produits visés par la marque contestée n’étant pas des bouteilles, mais des boissons, ils ne pouvaient pas avoir une forme imposée par la nature du produit, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement no 207/2009, du fait de leur substance liquide. Ensuite, elle a noté que, si de tels produits requerraient nécessairement un emballage ou un conditionnement, la forme de ces derniers n’était nullement obligatoire, mais pouvait varier, les boissons pouvant être conditionnées dans des bouteilles de formes diverses. Enfin, le fait que la forme de la bouteille soit « normalisée » serait dénué de pertinence dans le cadre de l’examen du motif de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement no 207/2009.

43      S’agissant de la description de la marque contestée, la chambre de recours a relevé qu’elle était enregistrée en tant que marque tridimensionnelle, mais qu’elle comprenait des caractéristiques relatives à la forme et au graphisme, à savoir la forme d’une bouteille dite « collio », sa couleur rose bonbon à effet miroir ainsi que la lettre majuscule « B », de même couleur que le corps de la bouteille, dans une police de caractères relativement commune.

44      Ainsi que le fait observer l’EUIPO, les produits qui n’ont pas de forme intrinsèque nécessitent un emballage en vue de leur commercialisation, lequel doit être assimilé, aux fins de l’examen d’une demande d’enregistrement en tant que marque, à la forme du produit. En effet,il y a lieu de relever que la marque contestée est constituée par la forme du conditionnement des produits visés et non par la forme des produits eux-mêmes, tant il est vrai que, de par leur nature, les boissons ne peuvent être vendues en l’état et nécessitent un conditionnement [voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2003, Nestlé Waters France/OHMI (Forme d’une bouteille), T‑305/02, EU:T:2003:328, point 30].

45      Plus particulièrement, le conditionnement d’un produit liquide étant un impératif de commercialisation, le consommateur moyen lui attribue avant tout une simple fonction de conditionnement [arrêt du 19 avril 2013, Adelholzener Alpenquellen/OHMI (Forme d’une bouteille avec motif en relief), T‑347/10, non publié, EU:T:2013:201, point 20].

46      Or, en l’espèce, la requérante ne saurait utilement déduire de la constatation de la chambre de recours selon laquelle le format de bouteilles de la marque contestée est habituellement utilisé pour des vins pétillants ou du prosecco que cette forme est imposée par la nature du produit. En effet, bien que la forme de la bouteille « collio » soit la forme la plus couramment utilisée par la plupart des producteurs de ce type de produits, cette circonstance résulte des habitudes de commercialisation et du consommateur. Ainsi, le fait que les producteurs de tels produits aient recours à une forme de conditionnement plutôt qu’à une autre relève d’un choix de commercialisation animé par ce qui est usuel pour ce type de produits et n’est nullement imposé par la nature du produit, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), i), du règlement no 207/2009. Dans ces conditions, c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé que, compte tenu du caractère liquide des produits, il ne saurait être considéré que la forme de la marque contestée est obligatoire. En effet, de tels produits pourraient être conditionnés dans des flacons, des bocaux ou des bouteilles de formes diverses, sans qu’une forme spécifique soit imposée par leur nature.

47      Au demeurant, il suffit de rappeler à cet égard que, hormis le vin mousseux, qui est le seul produit sur lequel prend appui la requérante pour fonder ses allégations, la marque contestée est enregistrée pour une multitude d’autres produits tels que les eaux-de-vie, les alcools de menthe ou de riz, les spiritueux, les amers, les liqueurs d’anis et d’anisette, les apéritifs, l’arak, les boissons alcoolisées contenant des fruits ou pré-mélangées, les boissons distillées, les cocktails, le curaçao, les digestifs, les essences et extraits alcooliques, les extraits de fruits à l’alcool, le gin, l’hydromel, le kirsch, les liqueurs, le nira, le rhum, le saké, le poiré, la piquette, la vodka ou le whisky, dont le conditionnement varie substantiellement et ne revêt pas nécessairement la forme de bouteilles dite « collio ».

48      Partant, contrairement aux allégations de la requérante, le raisonnement de la chambre de recours n’est entachée d’aucune contradiction ou erreur sur ce point.

49      En outre, les arguments de la requérante selon lesquels le titulaire de la marque contestée a opté pour une des formes de bouteilles standardisées dans le secteur ont trait au caractère distinctif de ladite marque et sont donc dénués de pertinence dans le cadre de l’examen du deuxième moyen.

50      Par suite, il convient d’écarter le deuxième moyen comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement no 207/2009

51      La requérante soutient que la chambre de recours n’a pas tenu compte du fait que l’utilisation d’une couleur sur les bouteilles de vins mousseux est destinée à préserver les propriétés organoleptiques du contenu, en agissant comme barrière sur le processus d’oxydation. Ainsi, les bouteilles en verre revêtues de couleurs plus ou moins sombres offriraient une certaine protection contre l’action de la lumière et préviendraient en grande partie les effets négatifs que cette dernière exerce sur le vin. Par conséquent, la combinaison de la forme de la bouteille et de sa couleur particulière viserait à obtenir un effet de nature technique.

52      L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante.

53      La chambre de recours a constaté que, aux fins de l’application de la disposition issue du règlement n° 207/2009 avant modification, la couleur ne saurait être assimilée à la forme de la marque contestée. En effet, ainsi que cela a été rappelé au point 15 ci-dessus et que l’a constaté à bon droit la chambre de recours, la possibilité qu’une marque puisse être fonctionnelle en raison d’une caractéristique autre que la forme du produit a été introduite par le règlement 2015/2424, lequel n’était pas applicable au moment des faits en cause.

54      Par ailleurs, il importe de rappeler que, dans le contexte du droit des marques, la notion de « forme » s’entend généralement comme désignant un ensemble de lignes ou de contours qui délimite le produit concerné dans l’espace, de sorte qu’une couleur en elle-même, sans délimitation dans l’espace, ne pourrait constituer une forme (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 12 juin 2018, Louboutin et Christian Louboutin, C‑163/16, EU:C:2018:423, points 21 et 22).

55      Il en résulte que la requérante ne saurait utilement faire valoir que, en ne tenant pas compte de la circonstance, au demeurant non établie, que la couleur rose bonbon de la marque contestée permettrait de préserver les propriétés des boissons contre l’action de la lumière extérieure, la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement no 207/2009, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, laquelle vise les signes constitués exclusivement par la « forme nécessaire à l’obtention d’un résultat technique ». Au demeurant, la requérante n’a nullement étayé son allégation selon laquelle ce serait la combinaison particulière de la forme et de la couleur rose bonbon qui permettrait d’obtenir un tel résultat, de sorte qu’elle ne saurait non plus prospérer.

56      Par suite, le troisième moyen ne peut être qu’écarté.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement no 207/2009

57      La requérante soutient que la couleur rose bonbon réfléchissant de la marque contestée, qui, d’après son titulaire, constituerait un des éléments essentiels dans la stratégie de ladite marque, confère aux produits visés une « valeur esthétique particulière », de nature à les rendre plus attrayants pour le consommateur, pour lequel cette couleur évoquerait la féminité, l’amour et la tendresse. Du reste, la requérante, en se référant aux conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Louboutin et Christian Louboutin (C‑163/16, EU:C:2018:64), fait valoir que « la combinaison de la couleur et de la forme est susceptible d’être frappée par l’interdiction de "la forme qui donne une valeur substantielle aux produits" ».

58      L’EUIPO et l’intervenant contestent les arguments de la requérante.

59      La chambre de recours a, tout d’abord, et, en application des principes dégagés par la jurisprudence et des décisions antérieures de l’EUIPO, identifié les caractéristiques essentielles du signe en cause comme étant la forme de la bouteille et sa couleur rose bonbon réfléchissant. À l’inverse, elle a relevé que l’autre élément du signe, à savoir la lettre majuscule « B », figurant sur l’épaule de la bouteille, n’avait pas d’impact décisif sur le design de celle-ci. Ensuite, la chambre de recours a constaté que ni la forme ni la couleur rose du signe, tant séparément que prises ensemble, n’étaient de nature à conférer une valeur substantielle aux produits visés. À cet égard, premièrement, s’agissant de la forme de la bouteille, la chambre de recours a relevé que, comme cela avait été reconnu par les parties, elle était certainement banale et utilisée depuis plusieurs décennies par les établissements vinicoles italiens, notamment pour les vins mousseux. En outre, cette forme de bouteilles dite « collio » devait être considérée comme une simple variante de formes existant depuis des temps « immémoriaux ». En d’autres termes, la forme en cause était, selon la chambre de recours, entièrement dépourvue de caractère distinctif et, par conséquent, son design ne pouvait être décrit comme étant « remarquable », « particulier » ou susceptible d’être « facilement mémorisé ». Deuxièmement, la chambre de recours a considéré que ni la couleur rose bonbon, qui évoquait la féminité, l’amour ou la tendresse et qui était fréquemment utilisée pour conférer un caractère précieux à des produits ou des emballages, ni l’effet miroir de la surface de la bouteille, qui étant dû au polissage du verre, n’apportaient non plus d’élément de design « remarquable » ou « particulier ».

60      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement no 207/2009, tel qu’applicable à la date de référence, sont refusés à l’enregistrement les signes constitués exclusivement par la forme qui donne une valeur substantielle au produit.

61      Il importe, tout d’abord, de relever que, outre les constatations relatives à la forme du signe, laquelle, d’après la chambre de recours, n’est pas de nature à conférer une valeur substantielle aux produits visés par la marque contestée, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement no 207/2009, la décision attaquée comporte également des appréciations sur la question de savoir si la couleur de type miroir, identifiée comme étant l’une des caractéristiques essentielles du signe, est de telle nature.

62      Or, par son argumentation, la requérante se limite, en substance, à faire valoir que la couleur rose bonbon qui recouvre entièrement la bouteille de la marque confère aux produits visés une valeur substantielle. Dans la mesure où la couleur ne saurait être assimilée à une caractéristique de la forme du signe, le quatrième moyen doit être écarté comme inopérant pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 53 ci-dessus.

63      En effet, les appréciations de la chambre de recours qui ne portent pas sur la forme du signe ne sont pas pertinentes au regard du libellé de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement no 207/2009, tel qu’en vigueur à l’époque des faits, et n’auraient donc pas dû figurer dans l’analyse relative à cet article. Toutefois, pour regrettable qu’elle soit, la présence de telles appréciations de la chambre de recours, visant notamment à répondre, en faisant application des principes dégagés par la jurisprudence ayant interprété ladite disposition, aux arguments soulevés par la requérante devant elle et ayant trait essentiellement aux propriétés esthétiques de la couleur du signe, n’a pas pour effet de remettre en cause la légalité de la décision attaquée, dans la mesure où, d’une part, le rejet du motif absolu de refus en question repose également sur une analyse relative à la forme du signe, laquelle constitue le critère d’appréciation pertinent pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous e), iii), du règlement n° 207/2009, et, d’autre part, la légalité de cette analyse n’est nullement remise en cause par la requérante devant le Tribunal.

64      Quant à la référence effectuée par la requérante au point 66 des conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Louboutin et Christian Louboutin (C‑163/16, EU:C:2018:64) duquel il ressort que la combinaison de la couleur et de la forme serait susceptible d’être frappée par l’interdiction visée à l’article 3, paragraphe 1, sous e), iii), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25), il suffit de relever, tout d’abord, que, l’argument tel qu’exposé dans la requête n’est pas étayé. Ensuite, il importe de rappeler que la Cour, et, partant, le Tribunal ne sont liés ni par les conclusions de l’avocat général ni par la motivation au terme de laquelle il est parvenu à celles-ci (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 2010, Hogan Lovells International, C‑229/09, EU:C:2010:673, point 26). D’ailleurs, la Cour n’a pas reproduit, dans son arrêt du 12 juin 2018, Louboutin et Christian Louboutin (C‑163/16, EU:C:2018:423), la constatation effectuée par l’avocat général. Enfin, il ressort du point 67 des conclusions de l’avocat général Szpunar susmentionnées que la question de l’interprétation de la notion de la forme qui donne une valeur substantielle au produit n’était pas explicitement visée par la demande préjudicielle. Dans ces conditions, une telle argumentation doit être écartée comme irrecevable et, en tout état de cause, comme inopérante, dans la mesure où elle ne permet pas de remettre en cause la légalité de la décision attaquée.

65      Partant, le quatrième moyen doit être écarté.

66      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

67      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

68      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Vinicola Tombacco (VI.TO.) Srl est condamnée aux dépens.

Berardis

Papasavvas

Spineanu-Matei

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 mai 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.